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24/05/2000 | LUXEMBOURG | N°s11259,11664

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 mai 2000, s11259,11664


N°s 11259 et 11664 du rôle Inscrits les 23 avril et 12 novembre 1999 Audience publique du 24 mai 2000

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Recours formé par Monsieur … MINY, X.

contre des décisions de l’administration communale de X.

en présence de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg en matière de taxes communales

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I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 11259 du rôle et déposée au greffe du tribunal administrati

f le 23 avril 1999 par Maître François BILTGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Lux...

N°s 11259 et 11664 du rôle Inscrits les 23 avril et 12 novembre 1999 Audience publique du 24 mai 2000

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Recours formé par Monsieur … MINY, X.

contre des décisions de l’administration communale de X.

en présence de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg en matière de taxes communales

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I.

Vu la requête inscrite sous le numéro 11259 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 23 avril 1999 par Maître François BILTGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MINY, cafetier, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation, d’une part, d’une facture du 25 janvier 1999 émanant de la recette communale de X. pour autant que celle-ci exige dans son chef le paiement d’une taxe d’épuration pour distilleries se chiffrant à 1.890.- francs, ainsi que, d’autre part, et pour les besoins de l’exception d’illégalité, du règlement communal du 24 décembre 1996 ayant introduit à partir de l’année 1997 une taxe d’épuration des eaux usées et fixé le tarif à 1.260.- francs par an et par équivalent habitant (EH) comme suit : 100 litres d’alcool pur (distillerie) = 1,4 EH ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Rita HERBER, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 20 avril 1999 portant signification de cette requête à l’administration communale de X. ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 10 septembre 1999 par Maître Laurent MOSAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’administration communale de X. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 24 août 1999 portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … MINY ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 5 novembre 1999 par Maître Elisabeth ALEX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en remplacement de Maître François BILTGEN, au nom de Monsieur … MINY ;

Vu la signification de ce mémoire en réplique à Maître Laurent MOSAR intervenue par acte d’avocat à avocat le 8 novembre 1999 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 9 novembre 1999 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 février 2000 par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en remplacement de Maître Laurent MOSAR, pour compte de l’administration communale de X. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Rita HERBER, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 9 février 2000 portant signification de ce mémoire en duplique à Monsieur … MINY ;

Vu les ordonnance et jugement du tribunal administratif des 27 septembre et 15 novembre 1999 constatant le maintien du recours au rôle et l’application des règles de procédure prévues par la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, conformément à son article 70 ;

II.

Vu la requête inscrite sous le numéro 11664 du rôle et déposée en date du 12 novembre 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Elisabeth ALEX, au nom de Monsieur … MINY, préqualifiés, tendant à la réformation, sinon à l’annulation, d’une part, d’une facture du 13 août 1999 émanant de la recette communale de X. exigeant dans son chef le paiement d’une taxe d’épuration pour café/restaurant au titre du 1er semestre 1999 de l’ordre de 5.670.- francs, ainsi que, d’autre part, et par voie incidente la non-application du règlement communal du 24 décembre 1996 ayant introduit à partir de l’année 1997 une taxe d’épuration des eaux usées pour certaines activités ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Alec MEYER, en remplacement de l’huissier de justice Patrick HOSS, les deux demeurant à Luxembourg, du 11 novembre 1999 portant signification de ce recours à l’administration communale de X. ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 8 février 2000 par Maître Roger NOTHAR, pour compte de l’administration communale de X. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Rita HERBER, préqualifiée, du 9 février 2000 portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … MINY ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 15 mars 2000 par Maître Elisabeth ALEX au nom de Monsieur … MINY ;

Vu la notification de ce mémoire en réplique à Maître Roger NOTHAR par télécopie du 14 mars 2000 ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2000 par Maître Roger NOTHAR, pour compte de l’administration communale de X. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Marcel HERBER, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 17 mars 2000 portant signification de ce mémoire en duplique à Monsieur … MINY ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maîtres Elisabeth ALEX et Roger NOTHAR, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 mars 2000.

2

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Lors de sa séance publique du 24 décembre 1996, le conseil communal de X. décida d’introduire à partir de l’exercice 1997 une taxe d’épuration des eaux usées et fixa les tarifs à partir du 1.1.1997 à 1.260.- francs par an (105.- francs par mois) par équivalent habitant (EH) en fixant les équivalents-habitants (EH) comme suit :

 1 habitant = 1 EH  1 emplacement au camping = 1 EH  1 vache laitière = 0,1 EH  1 chaise au café et restaurant = 0,25 EH  100 litres alcools purs (distillerie) = 1,4 EH.

Cette délibération fut approuvée par arrêté grand-ducal du 24 février 1997, ainsi que par le ministre de l’Intérieur en date du 27 février 1997 et publiée par voie d’affichage dans la commune de X. pendant la période du 12 mars au 28 mars 1997 inclus.

Monsieur … MINY, cafetier, demeurant à L-…, se vit adresser une facture datant du 25 janvier 1999, émanant de la recette communale de X., exigeant de sa part le paiement notamment d’une taxe d’épuration pour distilleries s’élevant à un montant de 1.890.- francs pour le deuxième semestre 1998.

A l’encontre de cette facture, ainsi qu’incidemment du règlement communal à sa base datant du 24 décembre 1996, Monsieur MINY fit introduire, par requête déposée en date du 23 avril 1999, un recours en réformation, sinon en annulation inscrit sous le numéro 11259 du rôle.

Monsieur MINY s’étant encore vu adresser une facture datant du 13 août 1999, émanant de la recette communale de X., exigeant de sa part le paiement notamment d’une taxe d’épuration pour cafés/restaurants s’élevant à un montant de 5.670.- francs pour le premier semestre 1999, il fit introduire un nouveau recours contentieux inscrit sous le numéro 11664 du rôle par requête déposée en date du 12 novembre 1999, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de cette facture, ainsi que du règlement communal à sa base datant du 24 décembre 1996, également déféré par le recours numéro 11259.

Les deux recours étant étroitement liés quant à leur objet, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de les joindre et d’y statuer par un seul et même jugement.

Quant à la compétence du tribunal Pour conclure à la compétence du tribunal administratif pour connaître des deux requêtes sous examen, la partie demanderesse s’empare des dispositions de l’article 153 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 pour soutenir que les contestations en matière d’impositions communales relèveraient de la compétence exclusive des autorités et juridictions administratives et renvoie à cet égard à un jugement du tribunal de paix de et à Luxembourg du 20 janvier 1999 illustrant les faits et rétroactes de l’affaire inscrits sous le numéro 11259 du rôle et statuant plus particulièrement sur le contredit formé par Monsieur … MINY contre une ordonnance conditionnelle de paiement numéro SII/6309/97 délivrée le 23 octobre 1997 par le juge de paix de Luxembourg, par laquelle il s’est vu ordonner à payer à l’administration 3 communale de X. la somme de 4.410.- francs, avec les intérêts légaux à partir du jour de la notification jusqu’à solde, du chef d’une facture relative à la taxe d’épuration des eaux usées instituée par le règlement du conseil communal de X. du 24 décembre 1996.

Ledit jugement a retenu que “ la taxe d’épuration instituée par la commune de X. est à qualifier de taxe de quotité et relève partant de la catégorie des prélèvements de nature fiscale qui sont de la compétence des juridictions de l’ordre administratif ”, ceci notamment au motif que “ le recouvrement des taxes communales est régi par les articles 148 à 160 de la loi communale du 13 décembre 1988.

Conformément à l’article 153 de ladite loi les contestations en matière d’impositions communales sont de la compétence exclusive des autorités et juridictions administratives.

Ainsi, les tribunaux judiciaires n’ont pas compétence pour connaître du fond du litige qui oppose un contribuable à une commune au sujet d’une taxe communale directe ; le contribuable qui se croit surtaxé ou qui estime que le règlement portant création de la taxe réclamée n’est pas conforme à la loi, doit faire valoir les réclamations de cet ordre devant les autorités et juridictions administratives ”.

Le délégué du Gouvernement conclut à l’incompétence ratione materiae du tribunal administratif pour connaître de la requête inscrite sous le numéro 11259 du rôle en faisant valoir que la taxe d’épuration de la commune de X. ne serait pas à qualifier de taxe de quotité, mais de taxe de remboursement, et que tout en étant prélevée de façon obligatoire à l’occasion d’un service public, elle se distinguerait de la taxe de quotité dans la mesure où contrairement à cette dernière, le prix payé par les usagers correspondrait approximativement au coût du service rendu. Il fait valoir que de ce fait la taxe de remboursement ne serait pas à considérer comme formant un impôt et ne relèverait dès lors pas du régime particulier des impôts, mais du régime général des créances publiques.

A l’appui de ce moyen, le représentant étatique signale que le règlement taxe critiqué du 24 décembre 1996 se réfère dans son préambule “ à une circulaire du ministère de l’Intérieur du 22 décembre 1994 concernant un règlement taxe - type relatif à l’évacuation et à l’épuration des eaux usées ” élaboré dans l’optique de permettre précisément aux communes membres du S.I.D.E.N. (syndicat intercommunal de dépollution des eaux résiduaires du nord), de répercuter d’après le principe du pollueur-payeur sur leurs habitants les frais leur facturés d’après ce même principe par ledit syndicat.

Le délégué du Gouvernement n’a pas déposé de mémoire dans l’affaire inscrite sous le numéro 11664 du rôle.

La commune de X., tout en relevant que le tribunal administratif ne serait pas lié par le jugement invoqué du tribunal de paix de Luxembourg du 20 janvier 1999 ayant qualifié la taxe d’épuration instituée par la commune de X. de taxe de quotité relevant de la catégorie des prélèvements de nature fiscale qui sont de la compétence des juridictions de l’ordre administratif, signale que dans la mesure où elle avait conclu devant ledit tribunal, avec succès, à l’existence d’une taxe de quotité, elle ne prendrait pas de conclusions contraires dans les présents litiges. Elle relève en outre que les contestations en matière d’impositions communales sont actuellement régies par l’article 8 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et qu’aux termes de ce texte le tribunal administratif connaît des contestations relatives aux impôts et taxes communaux, à l’exception des taxes 4 rémunératoires, de sorte qu’il y aurait lieu d’examiner en l’espèce, même d’office, si la contestation produite se rapporte à une taxe rémunératoire.

Afin de déterminer sa compétence pour connaître du présent litige, le tribunal est amené à analyser dans un premier temps la nature juridique des taxes d’épuration des eaux usées pour distilleries et cafés/restaurants litigieuses, à la base des factures déférées et résultant par ailleurs du règlement communal du 24 décembre 1996, approuvé par arrêté grand-ducal du 24 février 1997 et par le ministre de l’Intérieur en date du 27 février 1997, également déféré pour les besoins de l’exception d’illégalité.

La compétence originaire du Comité du contentieux en la matière était circonscrite par les dispositions de l’article 153 de la loi communale précitée, qui dispose que “ les contestations en matière d’impositions communales sont vidées conformément à l’article 8 de l’arrêté grand-ducal du 26 octobre 1944 sur les impôts, taxes, cotisations et droits (…) ”.

Il résultait encore de l’article 8 de l’arrêté grand-ducal précité du 26 octobre 1944 – dans sa teneur avant son abrogation par la loi du 7 novembre 1996 précitée - et de son complément constitué par l’arrêté ministériel du 10 avril 1946, que la réclamation contre un bulletin, au sens de l’article 149 de la loi communale précitée, est à porter devant le collège échevinal et que le recours contre la décision du collège échevinal est à porter devant le Conseil d’Etat, Comité du contentieux, qui statuera comme juge du fond.

Il s’ensuit que sous l’empire de cette loi, le Comité du contentieux, ainsi que le tribunal administratif en ce qui concerne les litiges se rapportant à des décisions antérieures à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 précitée, était, voire est investi du pouvoir de statuer en tant que juge du fond sur toute contestation en matière d’impositions communales. Aussi la jurisprudence afférente a-t-elle permis de dégager que les litiges en rapport avec des prélèvements qui n’ont pas la nature juridique d’une imposition communale étaient soustraits à la compétence de la juridiction administrative.

Il importe cependant de relever que la loi du 7 novembre 1996 précitée a non seulement abrogé l’article 8 de l’arrêté grand-ducal précité du 26 octobre 1944 et vidé ainsi pour le moins partiellement de sa substance l’article 153 de la loi communale, avec la conséquence que les juridictions administratives ne se trouvent non seulement investies, désormais, d’une simple compétence d’annulation en la matière, mais que cette loi a encore redéfini suivant un nouveau libellé la compétence en matière d’impôts et de taxes communales des juridictions administratives nouvellement créées.

Si conformément aux dispositions de l’article 153 de la loi communale, la compétence de la juridiction administrative en la matière est définie de manière générale et directe comme ayant trait à la matière des “ impositions communales ” et appelle par voie de conséquence l’analyse de ce qu’est un impôt, l’approche consacrée par le législateur à travers la loi du 7 novembre 1996 précitée est beaucoup plus nuancée en ce que son article 8 (1), b) dispose que le tribunal administratif est compétent pour connaître des contestations relatives “ aux impôts et taxes communaux, à l’exception des taxes rémunératoires ”.

Cette nouvelle définition de la compétence des juridictions administratives en la matière ne commande en effet plus une analyse tendant à établir si une taxe litigieuse ainsi appelée est ou n’est pas à qualifier d’impôt d’après les caractéristiques qu’elle présente, mais pose une question d’ordre différent et autrement spécifique, à savoir celle ayant trait au seul caractère 5 rémunératoire de la taxe sous examen, afin de déterminer si elle tombe sous les prévisions d’exception posées in fine dudit article ceci a priori indépendamment des caractéristiques que cette taxe peut présenter par ailleurs.

Les décisions litigieuses, en l’occurrence les deux factures émanant de la recette communale de X. datant respectivement du 25 janvier et du 13 août 1999, ayant été établies postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 7 novembre 1996 précitée, il y a dès lors lieu de se référer aux dispositions de l’article 8 (1), b) de loi du 7 novembre 1996 précitée et d’examiner en conséquence si les taxes d’épuration litigieuses – respectivement pour distilleries et cafés/restaurants -, dont le caractère communal est par ailleurs constant, rentrent plus particulièrement dans la catégorie des taxes rémunératoires expressément soustraites à la compétence du tribunal.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le premier moyen du demandeur tendant à affirmer la compétence du tribunal pour connaître des deux recours en s’emparant des dispositions de l’article 153 de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 et à soutenir à cet égard que les prélèvements litigieux auraient la nature juridique d’une imposition communale, est à écarter pour ne pas être pertinent ratione temporis en l’espèce.

Conformément à la terminologie employée depuis longue date par la doctrine et la jurisprudence, la taxe rémunératoire est établie pour rémunérer un service rendu et obligatoire et peut tantôt constituer un impôt, tantôt être une taxe de remboursement (cf. L’autonomie fiscale des communes, par E. Arendt et N. Decker, in Bulletin du Centre de Documentation Communale, n° 12, avril 1972).

Les taxes rémunératoires sont en effet celles qui sont perçues à raison d’un avantage spécial que l’on retire de la chose publique ou de l’usage du domaine communal ou encore en tant que rémunération d’un service rendu (cf. R. WILKIN, Les taxes communales, n° 20, p. 37 et suivants) et se distinguent à cet égard des taxes proprement dites qui sont destinées à couvrir les dépenses générales du budget (cf. C.E. 24 novembre 1993, n° 8880 du rôle, Schmit).

Aussi une taxe rémunératoire peut-elle être, à sa base, soit une taxe de quotité, auquel cas sa recette pourra dépasser le coût des dépenses engagées par la commune, soit une taxe de répartition ou de remboursement dont les recettes correspondront au montant des dépenses effectuées (R. WILKIN, loc.cit, p. 40).

Force est dès lors de constater que la distinction mise en avant par les parties au litige, entre, d’une part, les taxes de quotité, et, d’autre part, les taxes de remboursement, ainsi que la conclusion afférente tenant à la nature fiscale ou non des prélèvements litigieux est sans incidence sur la question du caractère rémunératoire ou non des taxes litigieuses, dans son acception généralement admise en matière fiscale, pourtant seule déterminante au regard du libellé de l’article 8 (1) b) de la loi du 7 novembre 1996 précitée.

En effet, le critère distinctif principal entre taxes de quotité et taxes de remboursement réside au niveau de la proportionnalité entre les recettes et les coûts, les taxes de quotité constituant dans une certaine mesure seulement, la contrepartie d’un service mis à disposition, sans qu’il y ait nécessairement équivalence entre le coût du service obligatoire et le prélèvement opéré, tandis que les taxes de remboursement, sont limitées à la dépense engagée pour un service rendu et obligatoire.

6 La distinction ainsi dégagée, même si elle permet d’opérer une gradation au niveau du caractère rémunératoire des deux types de taxes en question, en ce que les taxes de remboursement peuvent être considérées comme “ purement ” rémunératoires, ne reste pas moins sans incidence sur la question litigieuse, dans la mesure où il est constant que les deux types de taxes s’inscrivent par ailleurs dans la catégorie plus générale des taxes rémunératoires visée précisément par l’article 8 (1) b) de la loi du 7 novembre 1996 précité qui, en ne distinguant pas entre taxes “ purement ” et “ simplement ” rémunératoires, doit s’entendre, suivant son libellé – même, et en l’absence de toute volonté contraire exprimée par ailleurs au cours de sa genèse à travers des documents parlementaires afférents, comme englobant indistinctement toute taxe rémunératoire.

S’il peut certes paraître surprenant qu’à travers cette nouvelle définition de la compétence du tribunal en matière d’impôts et de taxes communaux, à partir de l’exclusion des taxes rémunératoires dans leur acception généralement admise en matière fiscale telle que dégagée ci-avant, la juridiction administrative se trouve concrètement amputée d’une partie de sa compétence telle que délimitée antérieurement à travers l’article 153 de la loi communale précitée et la jurisprudence afférente tant administrative que civile en ce qu’elle a classiquement départagé les taxes à caractère rémunératoire en taxes de remboursement, assimilables aux redevances et partant soustraites à la juridiction administrative, et taxes de quotité revêtant une nature fiscale, il n’appartient pas pour autant à la juridiction saisie, en l’absence de toute volonté afférente exprimée par le législateur au niveau de la genèse du texte en question, de s’écarter de la définition généralement consacrée de la notion de taxe rémunératoire, fût-ce pour la réduire aux seules taxes “ purement ” rémunératoires que sont les taxes de remboursement, antérieurement soustraites à sa compétence, ou encore aux seuls prélèvements à caractère proprement civil que sont les redevances, établies pour un service rendu et facultatif.

Il convient dès lors de qualifier les taxes litigieuses non pas au regard de leur analogie éventuelle avec un prélèvement de nature fiscale, mais uniquement au regard de leur caractère rémunératoire ou non.

Lors de sa séance publique du 24 décembre 1996, le conseil communal de X. décida d’introduire à partir de l’exercice 1997 une taxe d’épuration des eaux usées et fixa les tarifs à partir du 1.1.1997 à 1.260.- francs par an (105.- francs par mois) par équivalent – habitant tout en fixant par la même décision les équivalents – habitants tel qu’exposé plus en avant et plus particulièrement à 1,4 EH par 100 litres d’alcool pur (distilleries), ainsi qu’à 0,25 EH par chaise aux cafés et restaurants, ceci au motif qu’il importe de répercuter les frais exposés par la commune au budget du syndicat intercommunal S.I.D.E.N. sur les habitants d’après le principe du pollueur-payeur et en se basant notamment sur la circulaire du ministère de l’Intérieur, service des finances communales, du 22 décembre 1994, n° 1705, référence 4.0041, concernant un règlement - taxe type relatif à l’évacuation et à l’épuration des eaux usées, élaboré dans l’optique de permettre aux communes-membres du S.I.D.E.N. de répercuter sur leurs habitants d’après le principe du pollueur-payeur les frais leur facturés d’après ce même principe par ledit syndicat.

Il appert à l’examen dudit règlement communal que la taxe d’épuration des eaux usées instituée doit être payée obligatoirement en contrepartie de la mise à disposition d’un service aux habitants par la commune et que ceux-ci sont astreints à la charge par le fait d’une 7 exigibilité indépendante de l’utilisation effective dudit service et de la quantité d’eau effectivement polluée.

Concernant les recettes perçues, il y a lieu de constater que les frais effectivement facturés par le S.I.D.E.N. à la commune sont répercutés sur les habitants, de sorte que la recette, globalement considérée, est à considérer comme directement rémunératoire du service du S.I.D.E.N. que la commune met à la disposition de ses habitants.

Il suit de ce qui précède que la taxe d’épuration des eaux usées perçue par la commune de X. est à qualifier de taxe rémunératoire. Cette conclusion ne saurait par ailleurs être énervée par le fait que les habitants de la commune sont astreints à la charge indépendamment de la quantité d’eau effectivement polluée, cette manière de procéder étant propre au type de taxe rémunératoire retenu par la commune de X., qui est en l’espèce une taxe de quotité.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que le tribunal administratif n’est pas compétent pour connaître des recours inscrits sous les numéros 11259 et 11664 du rôle pour avoir trait à des taxes rémunératoires expressément exceptées du champ de sa compétence par les dispositions de l’article 8 (1) b) de la loi du 7 novembre 1996 précitée.

Le demandeur ayant encore dirigé ses deux recours “ pour les besoins de l’exception d’illégalité ” contre le règlement communal du 24 décembre 1996 à la base de la taxe d’épuration des eaux usées litigieuse, force est de constater que le tribunal, amené à analyser le fond de l’affaire dans la mesure nécessaire pour déterminer sa compétence, a pu retenir son incompétence pour connaître des recours déférés sur base de la seule loi sans se prononcer sur la légalité du règlement communal en question.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

prononce la jonction des recours inscrits sous les numéros 11259 et 11664 du rôle ;

se déclare incompétent pour en connaître ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 mai 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : s11259,11664
Date de la décision : 24/05/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-05-24;s11259.11664 ?

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