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08/12/1999 | LUXEMBOURG | N°11146

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 décembre 1999, 11146


N° 11146 du rôle Inscrit le 25 février 1999 Audience publique du 8 décembre 1999 Recours formé par Monsieur … BRANDENBURGER, … contre une décision du ministre de la Force publique en matière de discipline Vu la requête inscrite sous le numéro 11146 du rôle et déposée le 25 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BRANDENBURGER, fonctionnaire de la gendarmerie grand-ducale, actuellement en retraite, demeurant à L-…, tendant à l’annulatio

n d’une décision implicite de refus du ministre de la Force publique d’annule...

N° 11146 du rôle Inscrit le 25 février 1999 Audience publique du 8 décembre 1999 Recours formé par Monsieur … BRANDENBURGER, … contre une décision du ministre de la Force publique en matière de discipline Vu la requête inscrite sous le numéro 11146 du rôle et déposée le 25 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BRANDENBURGER, fonctionnaire de la gendarmerie grand-ducale, actuellement en retraite, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision implicite de refus du ministre de la Force publique d’annuler une décision du commandant de la gendarmerie grand-ducale du 5 août 1998 prononçant à son encontre la peine disciplinaire de l’amende de …- francs, refus découlant du silence dudit ministre depuis plus de trois mois ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 juin 1999 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 12 août 1999 par Maître Edmond DAUPHIN, au nom de Monsieur … BRANDENBURGER ;

Vu les pièces versées en cause ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Edmond DAUPHIN et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 27 septembre 1999 ;

Vu la rupture du délibéré prononcée en date du 11 octobre 1999 ;

Vu le mémoire du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 29 octobre 1999 ;

Vu la prise de position complémentaire déposée au greffe du tribunal administratif le 5 novembre 1999 par Maître Edmond DAUPHIN, au nom de Monsieur … BRANDENBURGER ;

Ouï Maître Edmond DAUPHIN et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 8 novembre 1999.

1 A la suite d’un rapport établi le 14 mars 1998 par le contrôleur d’arrondissement à … de la gendarmerie grand-ducale et adressé au commandant d’arrondissement à … ayant révélé qu’en date du 28 février 1998 Monsieur … BRANDENBURGER, adjudant-chef de la gendarmerie grand-ducale à la brigade de …, admis à la retraite avec effet au 1er juin 1999, était seul au bureau pour avoir autorisé l’adjudant X. à quitter son poste ledit jour, et que pour cette raison un appel du central RIFO concernant une affaire de viol fut transmis au commissariat de police de …, les affaires de viol étant traitées normalement par deux fonctionnaires, Monsieur BRANDENBURGER fut invité à se présenter le 3 avril 1998 chez ledit commandant d’arrondissement pour être entendu en présence dudit contrôleur d’arrondissement.

Après avoir également entendu l’adjudant X. en date du 7 avril 1998, ledit contrôleur d’arrondissement adressa le 27 mai 1998 un rapport à son commandant d’arrondissement dans lequel il reproche à Monsieur BRANDENBURGER d’avoir notamment autorisé l’adjudant X.

à quitter le poste le jour de l’incident, pour arriver à la conclusion suivante:

“ Schlussfolgerung : BRANDENBURGER liess, ohne zwingenden Grund, Adjudant X. nach Luxemburg zum grossherzoglichen Palast fahren, wissentlich mit dem Hintergedanken gespielt, dass er bei einem etwaigen Anruf resp. Einsatzaufforderung, alleine auf der Dienststelle war und dies dann auch, wie geschehen, mitteilen konnte.

Die Handlungsweise von BRANDENBURGER ist eigentlich unerklärlich und einem diensttuenden Brigadekommandanten unwürdig. Ein weiterer Kommentar erübrigt sich eigentlich. ” Faisant suite à une demande afférente du commandant d’arrondissement, Monsieur BRANDENBURGER lui adressa le 4 juillet 1998 une justification écrite sous forme de rapport. Le commandant d’arrondissement de … transmit cette prise de position au commandant de la Gendarmerie en lui proposant de frapper Monsieur BRANDENBURGER d’une sanction disciplinaire exemplaire.

Par décision du 5 août 1998, le commandant de la gendarmerie prononça alors la peine disciplinaire d’une amende de ….- francs, soit un dixième d’une mensualité brute du traitement de base, à l’égard de … BRANDENBURGER.

A l’encontre de cette décision, Monsieur BRANDENBURGER fit introduire par l’intermédiaire de son mandataire un recours auprès du ministre de la Force publique, ci-après appelé “ le ministre ”. Ce recours étant resté sans suite, il a fait déposer en date du 25 février 1999 un recours contentieux tendant à l’annulation de la décision implicite du ministre de faire droit à sa demande, refus découlant du silence ministériel observé depuis plus de trois mois.

RECEVABILITE DU RECOURS Le délégué du Gouvernement conclut d’abord à l’irrecevabilité du recours comme étant prématuré, estimant qu’il a été introduit avant que le ministre de la Force publique ne se soit prononcé sur les mérites de l’appel et n’ait ainsi posé l’acte final de la procédure disciplinaire engagée.

Il fait valoir à cet égard que le demandeur ne saurait déduire du silence de plus de trois mois du ministre que l’appel qu’il a introduit serait rejeté, en présence de l’article 29, dernier alinéa de la loi modifiée du 16 avril 1979 ayant pour objet la discipline dans la force publique 2 qui prévoit d’une façon expresse que le délai d’appel et l’appel ont un effet suspensif. Il signale en outre que ce raisonnement aurait été confirmé par la Cour administrative, étant entendu que l’arrêt plus particulièrement visé est par ailleurs motivé par la considération que “ la décision ministérielle sur un recours en matière disciplinaire ne constitue pas une simple décision administrative au sens de l’article 4 (1) (de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif) ” pour retenir que le délai imposé au ministre pour statuer sur recours en la matière n’est “ limité que par la prescription de l’infraction ”.

Dans son mémoire en réplique le demandeur entend réfuter cette argumentation en faisant valoir que concernant le corps de la Gendarmerie, le ministre, en s’abstenant de statuer dans le délai légal sur le bien-fondé d’une décision prise par le commandant de la Gendarmerie, cause au justiciable un préjudice très grave. Il expose à cet effet qu’il serait déjà arrivé que des affaires disciplinaires en cours aient été invoquées parmi d’autres arguments à l’appui d’une action tendant à retarder un fonctionnaire dans son avancement.

Il soutient en outre qu’il n’existerait pas de relation entre la suspension temporaire de la peine par l’effet de l’appel et la non-application de la disposition légale et formelle de l’article 4 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 précitée.

Le tribunal ayant invité les parties à prendre position par rapport à la nature juridique de la décision déférée, qui, selon la partie demanderesse résulterait de manière implicite du silence ministériel observé depuis plus de trois mois, tandis que, de l’avis du représentant étatique, ne se serait toujours pas cristallisée, la partie demanderesse a étayé sa position en exposant que l’article 29 alinéa 7 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée, en conférant un effet suspensif au délai d’appel et à l’appel y visés, signifierait en droit uniquement que le jugement entrepris n’est pas exécutoire tant que court le délai d’appel et tant que l’appel n’est pas vidé. Elle en déduit que cette disposition ne pourrait dès lors tenir en échec les dispositions de l’article 4 (1) de la loi du 7 novembre 1996 précitée, étant donné que le fait pour une décision de ne pas être exécutoire ne signifierait pas qu’elle ne puisse être attaquée.

Elle signale en outre que le fait d’accorder au ministre un délai aussi étendu que celui préconisé par la partie défenderesse, créerait une insécurité juridique nuisible à toute bonne administration et préjudiciable à l’administré, contraint d’attendre des années avant d’être fixé sur le sort de son appel, effet qui serait contraire à la volonté du législateur qui aurait imposé au pouvoir exécutif l’obligation de statuer dans les trois mois.

L’article 29 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée dispose que “ les peines prévues à l’article 25 sous I. A 1 à 3, B 1 et C 1 à 3, ainsi que sous II. 1 à 3, sont prononcées par décision motivée, après que le militaire inculpé a été entendu.

Ces décisions sont susceptibles d’appel.

L’appel ne peut être interjeté le jour même de la notification de la décision et doit l’être au plus tard le troisième jour ouvrable qui suit celui de la notification.

L’appel est adressé à l’autorité militaire immédiatement supérieure ayant pouvoir disciplinaire sur le supérieur qui a rendu la décision.

3 Un règlement grand-ducal détermine les modalités de la notification des peines et de la procédure d’appel.

Si la décision émane du chef de corps, l’appel est adressé au membre du gouvernement dont relève la force publique.

Le délai d’appel et l’appel ont un effet suspensif. ” Dans la mesure où le ministre, appelé à vider un recours introduit sur base du sixième alinéa dudit article 29, prend une décision à portée individuelle en matière disciplinaire à l’égard du fonctionnaire concerné, il ne fait pas de doute que l’acte ministériel à poser dans ce cadre n’est pas un acte à caractère réglementaire au sens de l’article 7 de la loi du 6 novembre 1996 précitée.

S’il est encore vrai que ledit article 29 confère dans son sixième alinéa au membre du Gouvernement dont relève la Force publique compétence pour statuer en tant qu’instance d’appel à l’égard des décisions du chef de corps prononçant l’une des peines disciplinaires y plus particulièrement visées, il n’en demeure cependant pas moins que le ministre, en statuant ès qualité, agit non pas en tant qu’instance juridictionnelle de première instance, mais en tant qu’organe rendant des décisions administratives pré-contentieuses.

L’article 86 de la Constitution, en disposant que “ nul tribunal, nulle juridiction contentieuse ne peuvent être établis qu’en vertu d’une loi. Il ne peut être créé des commissions, ni des tribunaux extraordinaires, sous quelque dénomination que ce soit ”, s’oppose en effet à la possibilité de considérer, en l’absence de disposition légale expresse afférente, un organe investi d’un certain pouvoir décisionnel comme constitutif d’une juridiction, celle-ci devant être instituée formellement par la loi.

Cette interprétation se trouve par ailleurs corroborée par l’avis du Conseil d’Etat du 9 mai 1996 sur le projet de loi portant organisation des juridictions de l’ordre administratif et fiscal (doc. parl. combinés 39403 et 3940A1, page 7) dans lequel il a retenu qu’il résulterait du projet de l’article 6 en vertu duquel "la Cour administrative statue en appel et comme juge du fond sur les recours dirigés contre les décisions d'autres juridictions administratives ayant statué sur des recours en réformation dont les lois spéciales attribuent compétence à ces juridictions" que “ l’on ne pourra plus se référer à différentes jurisprudences du Comité du contentieux ayant notamment décidé que tel organe avait un véritable pouvoir décisionnel pour en conclure qu’il s’agit en l’occurrence de juridictions administratives de premier degré. Notre droit positif ne connaît, à part la Chambre des Comptes, pas d’autres juridictions administratives ”.

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, force est dès lors de retenir que le ministre de la Force publique, en statuant en tant qu’instance d’appel ainsi désignée dans le cadre de l’article 29 de la loi du 16 avril 1979 précitée, pose un acte qui relève fondamentalement de la sphère administrative, de sorte que la procédure d’appel en cause s’analyse non pas en un appel juridictionnel de première instance, mais constitue un recours hiérarchique administratif obligatoire et pré-contentieux qui aboutit à un acte ministériel de nature administrative.

4 Un recours au fond n’étant par ailleurs prévu en matière disciplinaire de la Force publique que limitativement dans le cadre des dispositions de l’article 30 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée relativement aux peines dépassant la compétence du chef de corps, étrangères au présent litige, il suit des développements qui précèdent qu’une décision ministérielle statuant sur les mérites d’un appel introduit sur base de l’article 29, alinéa sixième précité constitue nécessairement une décision administrative au sens de l’article 2 (1) de la loi du 7 novembre 1996 précitée en vertu duquel “ le tribunal administratif statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois ou règlements ”.

L’article 4 (1) de la loi du 7 novembre 1996 précitée, en disposant que “ dans les affaires contentieuses qui ne peuvent être introduites devant le tribunal administratif que sous forme de recours contre une décision administrative, lorsqu’un délai de trois mois s’est écoulé sans qu’il soit intervenu aucune décision, les parties intéressées peuvent considérer leur demande comme rejetée et se pourvoir devant le tribunal administratif ”, envisage, par le biais d’une règle générale, plus particulièrement l’hypothèse d’une décision implicite résultant du silence observé par l’administration à la suite d’une demande qui lui a été régulièrement adressée et traduit ainsi l’intention du législateur de limiter dans le temps l’insécurité juridique dans le chef des administrés confrontés au silence de l’administration.

Cette règle générale n’étant pas tempérée par rapport à la nature de la demande suivie de silence, elle a vocation à s’appliquer également à l’égard d’un recours hiérarchique exercé, prévu pour le surplus comme étant obligatoire et ayant trait à la matière disciplinaire mettant en jeu, au-delà de la peine prononcée et suspendue par l’effet de l’appel, également l’honneur du fonctionnaire concerné. Elle ne saurait non plus être mise en échec en raison d’une modalité du recours hiérarchique pré-contentieux en cause, tenant à l’effet suspensif y attaché, sous peine de maintenir le demandeur, à l’égard duquel une sanction disciplinaire a été prononcée, dans l’insécurité juridique au-delà d’une période de trois mois et, le cas échéant, à jamais, quant à l’issue de la procédure d’appel par lui engagée en vue de voir dégager son innocence, situation, par essence préjudiciable, que le texte légal en question a justement pour objectif d’éviter.

Il est constant en cause qu’en date du 25 février 1999, lorsque la requête introductive d’instance a été déposée, le ministre n’avait pas encore statué sur les mérites de l’appel introduit par le demandeur en date du 27 août 1998, de sorte qu’un délai de plus de trois mois s’était écoulé sans que l’autorité administrative saisie ne se fût prononcée.

Dans la mesure où le silence du ministre est à considérer, en vertu des dispositions de l’article 4 (1) précité de la loi du 7 novembre 1996 comme constitutif d’une décision implicite de refus de faire droit au recours introduit par le demandeur, l’argument du représentant étatique tenant à l’absence d’acte de nature à faire grief, c’est-à-dire susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame, tombe à faux, de sorte que le moyen d’irrecevabilité afférent est à écarter comme n’étant pas fondé.

Le recours en annulation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

5 QUANT AU FOND Relativement à la forme, la partie demanderesse invoque la violation de l’alinéa premier de l’article 29 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée qui exige que le militaire inculpé soit entendu. Elle fait valoir plus particulièrement qu’elle s’est vue sommer de répondre par écrit aux inculpations qui lui furent signifiées le 25 mai 1998, alors que l’inculpé ne pourrait être invité à se défendre par écrit, mais devrait être entendu sur les reproches précis qu’on formule contre lui.

L’article 29 de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée, invoqué par Monsieur BRANDENBURGER, dispose que les peines prévues à l’article 25, notamment sub 2. sont prononcées par décision motivée, “ après que le militaire inculpé a été entendu ”. Le terme “ militaire inculpé ” se comprend comme visant le membre d’un des trois corps de la force armée, contre lequel est engagée une poursuite disciplinaire, impliquant nécessairement que celui-ci, ayant le droit d’être entendu, ait également était mis au courant des détails des reproches formulés à son égard, notamment à la base de la procédure disciplinaire engagée (cf.

trib. adm. 22 juillet 1998, n° 10622 du rôle, Juchem, Pas. adm. 2/99, V° Fonction publique, sous Discipline, n° 57 et autres références y citées).

En vertu des dispositions de l'article 31.3. de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée “ le chef hiérarchique notifie au militaire présumé fautif les faits qui lui sont reprochés".

Ledit article, applicable en l'espèce, en employant le terme "notifie", a entendu poser l'exigence d'une information écrite devant contenir d'après le libellé même de cet article pour le moins l'énumération des faits qui sont reprochés au militaire présumé fautif.

Il se dégage des pièces versées au dossier, et plus particulièrement d’un rapport établi à … le 3 avril 1998 et signé par l’adjudant-chef Guido POIRE et le capitaine Jacques KLEIN, intitulé “ rapport de l’audition orale de l’adjudant-chef BRANDENBURGER … du 3 avril 1998, faite par le commandant d’arrondissement en présence du contrôleur d’arrondissement ”, que le demandeur a fait les déclarations suivantes lors de cette audition :

“ Le 28 février 1998, vers 11.30 heures je fus effectivement averti par le central RIFO qu’un viol s’est produit à … A ce moment j’étais seul au bureau. L’adjudant X. avait quitté la brigade vers 10.00 heures pour accomplir un service pour le compte de la brigade de … Ensuite l’adjudant X. a transporté du matériel personnel à sa nouvelle brigade d’attache à Luxembourg. Le mdl Y. qui était prévu pour le service à la brigade à la date du 28 février 1998, a participé dans la nuit à un service commandé par le commandant d’arrondissement.

C’est ainsi que j’étais effectivement seul au bureau au moment des faits en question ”.

Dans la mesure où il s’agit, au vu du dossier administratif, de la seule audition à laquelle il fut procédé en l’espèce, il y a lieu d’examiner en premier lieu si cette audition du 3 avril 1998 répond aux exigences des dispositions précitées qui sont d’ordre public comme touchant aux droits de la défense de la personne contre laquelle une procédure disciplinaire est ouverte.

Il est constant que le rapport d'audition du 3 avril 1998 ne fait pas état d'une information préalable de l'intéressé sur l'objet de l'audition et que le dossier administratif versé en cause renseigne uniquement un transmis datant du 25 mars 1998 adressé par le commandant d'arrondissement Z. à l'adjudant chef BRANDENBURGER "aux fins de vous présenter chez le commandant d'arrondissement à … le 3 avril 1998 à 17.00 heures". Il découle en outre du 6 libellé du rapport d'audition sous examen que Monsieur BRANDENBURGER n'a pas été entendu à proprement parler, mais a simplement fait rapport à son supérieur hiérarchique sur le déroulement de son service en date du 28 février 1998.

Il se dégage des considérations qui précèdent que les exigences de l'article 31.3. précité qui prévoit une notification écrite, outre les impératifs de précision des faits reprochés, n'ont pas été respectées en l'espèce.

S'il est bien vrai que par lettre du 25 juin 1998 le commandant d'arrondissement de … a demandé à Monsieur BRANDENBURGER de prendre position par rapport aux événements du 28 février 1998, il n'en reste pas moins que cet écrit ne saurait utilement combler la carence de la notification préalable concernant les faits lui reprochés, alors que cet écrit est postérieur à l'audition ainsi qualifiée du 3 avril 1998 et repose par ailleurs pour le moins en grande partie sur les déclarations de Monsieur BARNDENBURGER recueillies le même jour.

Aucun autre écrit valant notification n'ayant été versé en cause, la procédure disciplinaire engagée contre Monsieur BRANDENBURGER encourt l'annulation pour violation des dispositions essentielles destinées à sauvegarder les droits du militaire présumé fautif concerné, prévues plus précisément à l'article 31.3. de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée.

Cette annulation entraîne en bout de procédure celle de la décision du commandant de la gendarmerie, ainsi que celle du ministre de la Force publique déférée ayant statué de manière implicite sur l'appel interjeté par Monsieur BRANDENBURGER.

Il se dégage des développements qui précèdent que le recours est fondé, l'analyse des autres moyens de forme et de fond proposés devenant de ce fait surabondant.

Dans la mesure où le département ayant dans ses attributions la Force publique ainsi expressément visé par l’article 29, alinéa sixième de la loi du 29 avril 1979 précitée, n’existe plus en tant que tel depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté grand-ducal du 11 août 1999 portant constitution des ministères, il y a lieu de renvoyer l’affaire au Premier ministre chargé de la détermination des moyens et mesures d’application dudit arrêté en vertu de son article second.

Par ces motifs, le tribunal administratif, statuant contradictoirement ;

déclare le recours recevable et fondé;

déclare nulle la procédure disciplinaire menée à l'égard de Monsieur BRANDENBURGER;

partant annule la décision ministérielle déférée et renvoie l'affaire devant le Premier ministre ;

condamne l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

7 Ainsi jugé et prononcé à l'audience du 8 décembre 1999 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef s. Schmit s. Delaporte 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11146
Date de la décision : 08/12/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-12-08;11146 ?

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