GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 11201 C Inscrit le 18 mars 1999
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Audience publique du 25 mars 1999 Recours formé par le ministre de la Justice contre … EJ-BIHRY en matière de:
mise à la disposition du Gouvernement Appel
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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 18 mars 1999 par la déléguée du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en vertu d’un mandat du ministre de la Justice du 16 mars 1999 contre un jugement rendu en matière de mise à la disposition du Gouvernement par le tribunal administratif en date du 15 mars 1999 à l’encontre de … EJ-BIHRY, de nationalité marocaine, placé au Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, actuellement sans domicile ni résidence connus.
Vu la signification de l’acte d’appel par exploit d’huissier à la date du 17 mars 1999.
Vu le procès-verbal de recherche GRASER du 17 mars 1999.
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 22 mars 1999 par Maître Stéphane LATASTE, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Yves HUBERTY, avocat II, au nom de … EJ-BIHRY.
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris avec la décision ministérielle querellée.
Ouï le conseiller rapporteur en son rapport, le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER ainsi que Maître Yves HUBERTY, en remplacement de Maître Stéphane LATASTE en leurs observations orales.
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Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 5 mars 1999 par Maître Stéphane LATASTE, avocat inscrit à la liste I du tableau de l' Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Yves HUBERTY, avocat inscrit à la liste II dudit tableau, … EJ-BIRY, de nationalité marocaine, ayant été placé au Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, a demandé la réformation d'une décision du ministre de la Justice du 11 février 1999 ordonnant une mesure de placement à son égard.
Le tribunal administratif, statuant contradictoirement en date du 15 mars 1999, a déclaré recevable le recours en réformation en la forme et l’a déclaré partiellement justifié en annulant la décision ministérielle du 11 février 1999 dans la mesure où elle a ordonné le placement au Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig d’… EJ-BIRY.
La déléguée du Gouvernement Claudine KONSBRUCK a relevé appel dudit jugement à la date du 18 mars 1999 en vertu d’un mandat du ministre de la Justice du 16 mars 1999.
Le jugement entrepris est critiqué dans la mesure où il a constaté que le placement dans un centre pénitentiaire, sans que l'intéressé ne soit poursuivi ou condamné pour une infraction pénale, ne se justifie qu'au cas où, en outre, cette personne constitue un danger pour la sécurité, la tranquillité ou l'ordre public.
Au risque de porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, il n'appartiendrait pas aux autorités judiciaires de décider en lieu et place du gouvernement ce qu'il y a lieu d'entendre par établissement approprié ou d'en définir les critères.
En ordre subsidiaire, la partie appelante conteste que le centre pénitentiaire ne corresponde pas à un établissement approprié au sens de l'article 15 paragraphe 1 de la loi du 28 mars 1972.
Elle renvoie finalement à un arrêt du 11 mars 1999 de la Cour administrative (ministre de la Justice c/ Youra Charaptchieva Borislalova) dans lequel a été retenu: "Le placement dans une partie déterminée des locaux du Centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig n'est pas à qualifier d'illégal à défaut d'autres locaux appropriés." Maître Stéphane LATASTE, assisté de Maître Yves HUBERTY, a déposé un mémoire en réponse en date du 22 mars 1999.
La partie intimée soulève la nullité sinon l’irrecevabilité de l’acte d’appel pour défaut de capacité juridique du ministre de la Justice pour interjeter appel contre un jugement du tribunal administratif.
Elle soulève encore l’absence, sinon l’irrégularité de la signification de la requête d’appel.
Quant au fond, Maître Stéphane LATASTE demande la confirmation pure et simple du jugement de première instance.
Quant à la recevabilité de l’acte d’appel Compte tenu des dispositions de l’article 99.2., 3. et 4. de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le ministre de la Justice, ministre du ressort contre lequel était dirigé le recours en première instance, peut valablement représenter l’Etat en instance d’appel et a qualité pour donner mandat au délégué du Gouvernement de relever appel du jugement en cause. (10180C du 15 janvier 98 Wolter-Weber; 9911C du 3 février 1998 Procola, 10768C du 15 décembre 1998 Cloos-Schiltz) 2 Ce moyen d’irrecevabilité laisse donc d’être fondé.
L’acte d’appel du 18 mars 1999 a été préalablement signifié le 17 mars 1999 à la partie intimée, conformément aux dispositions de l’article 99,3 de la loi du 7 novembre 1996 précitée.
Cette signification à la dernière adresse connue de l’intimé, suivie le même jour, d’un procès-
verbal de constat de recherche, répond aux exigences de l’article précité et de l’article 157 du nouveau code de procédure civile. S’y ajoute que dès le 18 mars 1999, le mandataire de l’intimé a été informé de la procédure d’appel par la voie du greffe de la Cour administrative et que ledit mandataire a réagi par un mémoire en réponse, de sorte que la partie intimée n’a pas été lésée dans ses droits de la défense.
L’acte d’appel est partant recevable.
Quant au fond Les juges de première instance ont décidé que l'incarcération dans un centre pénitentiaire d’une personne mise à disposition du gouvernement, non poursuivie ou condamnée pour une infraction pénale, ne se justifie qu'au cas où cette personne constitue en outre un danger pour la sécurité, la tranquillité ou l'ordre public.
Contrairement aux arguments développés par la partie appelante, il appartient au juge administratif de se prononcer sur la régularité du placement.
Le but d’une mise à la disposition du Gouvernement étant le placement dans un établissement sûr excluant tout danger d’éloignement en attendant l’expulsion sinon le refoulement de la personne concernée, le placement dans une partie déterminée des locaux du centre pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig n’est pas à qualifier d’illégal, à défaut d’autres locaux appropriés.
Le jugement entrepris est en l’occurrence à réformer.
Par ces motifs, la Cour administrative, statuant contradictoirement, reçoit l’acte d’appel du 18 mars 1999;
le dit fondé;
réformant, confirme la décision du ministre de la Justice du 11 février 1999;
condamne la partie intimée aux frais des deux instances.
Ainsi jugé par Marion LANNERS, vice-présidente, Christiane DIEDERICH-TOURNAY, conseiller Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur 3 et lu par la vice-présidente Marion LANNERS en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.
Le greffier La vice-présidente 4