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02/03/1999 | LUXEMBOURG | N°11120

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 mars 1999, 11120


N° 11120 du rôle Inscrit le 10 février 1999 Audience publique du 2 mars 1999

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Recours formé par l'association momentanée PERRARD s.à r.l., MERSCH & SCHMITZ s.à r.l. et Paul WAGNER & FILS S.A, contre une décision de l'administration communale de Hespérange en matière de marchés publics

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O R D O N N A N C E Vu la requête en référé déposée le 10 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Paul BEGHIN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à L

uxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée PERRARD, avec siège à Luxembourg, …, ...

N° 11120 du rôle Inscrit le 10 février 1999 Audience publique du 2 mars 1999

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Recours formé par l'association momentanée PERRARD s.à r.l., MERSCH & SCHMITZ s.à r.l. et Paul WAGNER & FILS S.A, contre une décision de l'administration communale de Hespérange en matière de marchés publics

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O R D O N N A N C E Vu la requête en référé déposée le 10 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Paul BEGHIN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée PERRARD, avec siège à Luxembourg, …, représentée par son gérant actuellement en fonctions, de la société à responsabilité limitée MERSCH & SCHMITZ, avec siège …,représentée par son gérant actuellement en fonctions, et de la société anonyme Paul WAGNER & FILS, avec siège à …, représentée par son conseil d'administration actuellement en fonctions, les trois sociétés agissant en leur qualité de membres de l'association momentanée PERRARD S.à r.l. MERSCH & SCHMITZ S.à r.l. WAGNER & FILS S.A., ayant pour mandataire la société à responsabilité limitée PERRARD, cette requête tendant à la suppression, dans l'avis de candidatures publié par la commune de Hespérange en vue de la soumission restreinte dans l'intérêt de la construction d'un centre intégré pour personnes âgées à Howald, certaines spécifications techniques, économiques et financières estimées discriminatoires, ainsi qu'à la suspension de la procédure de passation du marché public ayant pour objet la construction dudit centre intégré, tant que le pouvoir adjudicateur n'aura pas procédé à la correction ordonnée;

Vu l'exploit de l'huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du lendemain, portant signification dudit recours à l'administration communale de Hespérange;

Vu le mémoire en réponse déposé le 25 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Georges MARGUE, avocat inscrit à la liste I du tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, pour le compte de l'administration communale de Hespérange;

Vu les pièces versées;

Ouï Maîtres Roger NOTHAR et Georges MARGUE en leurs plaidoiries respectives.

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2 Le 7 août 1998, l'administration communale de Hespérange, en abrégé "la commune", fit publier dans la presse écrite un avis de candidature en vue d'une soumission restreinte avec présélection dans l'intérêt de la construction d'un centre intégré pour personnes âgées à Howald.

Le 21 septembre 1998, la société à responsabilité limitée PERRARD, avec siège à …, la société à responsabilité limitée MERSCH & SCHMITZ, avec siège à …, et la société anonyme Paul WAGNER & FILS, avec siège à Luxembourg, …, réunies en association momentanée PERRARD S.à r.l. MERSCH & SCHMITZ S.à r.l.

WAGNER & FILS S.A., ci-après dénommée "l'association momentanée", déposèrent un dossier de candidature.

Par lettre du 26 novembre 1998, la commune informa l'association momentanée que sa candidature n'avait pas été retenue. Sur demande d'informations concernant les raison du refus de retenir la candidature en question, la commune expliqua, dans un courrier du 12 janvier 1999, que la candidature n'avait pas été retenue en raison du fait que l'association momentanée "n'a pas pu produire des références valables dans le domaine de travaux similaires d'une valeur de 500 millions de LUF. Dans l'appel de candidature sub point D2 " « critères qui seront retenus pour l’acceptation des candidatures », « qualité des références pour des travaux similaires », il ressort que [les] références en entreprise générale sont insuffisantes." Estimant que l'avis de candidature en question viole les articles 25 et 26 de la directive n° 71/305/CEE du Conseil du 26 juillet 1971 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, les articles 12.7 et 22.1 de la directive 89/440/CEE du Conseil du 18 juillet 1989 modifiant la directive 71/305/CEE, et les articles 11,22, 25 et 26 du règlement grand-ducal modifié du 27 janvier 1994 portant application, en droit luxembourgeois, des directives aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services, en ce que le pouvoir adjudicateur aurait ajouté dans cet avis des conditions et critères dépassant ceux limitativement et impérativement fixés par les prédites dispositions communautaires, et en se basant sur les dispositions de la loi modifiée du 13 mars 1993 relative à l'exécution en droit luxembourgeois de la Directive n° 89/665/CEE du Conseil du 21 décembre 1989 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l'application des procédures de recours en matière de marchés publics, les membres de l'association momentanée ont introduit un recours tendant à voir ordonner en référé la suppression de certaines spécifications techniques, économiques et financières estimées discriminatoires, ainsi que la suspension de la procédure de passation du marché public ayant pour objet la construction dudit centre intégré, tant que le pouvoir adjudicateur n'aura pas procédé à la correction à ordonner.

RECEVABILITE La commune se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité de la requête et la régularité de la procédure.

3 La demande suffit aux conditions de forme et de délai, de sorte qu'elle est recevable à cet égard.

L'association momentanée reproche à l'avis de candidature de contenir des conditions illégales par rapport aux exigences énumérées sub 10), B), "Capacité financière", la preuve d'une assurance des risques professionnels couvrant une responsabilité civile de dommages corporels minimum de 250.000.000,- francs par sinistre et une responsabilité civile après travaux minimum de 100.000.000,- francs par année, sub 10) C), "Capacité technique", - renseignements concernant les "titres d'études et professionnels", - la "liste des travaux exécutés par entreprise générale d'un montant de 500 millions de francs minimum, avec certificats au cours des dernières années avec documents photographiques, référence de sous-traitances et importance de leur participation", - la "déclaration mentionnant l'outillage, le matériel et l'équipement technique", - la "déclaration mentionnant les effectifs moyens annuels et l'importance des cadres", - la "déclaration mentionnant les techniques ou les organes techniques", - sub 10), D), 1), concernant la "capacité de réaliser des ouvrages de même envergure en entreprise générale d'un montant minimum de 500 millions de francs". Elle fait par ailleurs plaider que le point 10) D) 2) de l'avis relatif aux critères qui seront retenus pour l'acceptation des candidatures est étranger aux conditions minimales de caractère économique et technique prévues par les textes en vigueur.

Il se dégage tant de la lettre de la commune du 12 janvier 1999 exposant les motifs du refus de la candidature de l'association momentanée que des explications supplémentaires fournies à l'audience que cette exclusion est due à la seule insuffisance des renseignements concernant l'exécution en entreprise générale de travaux d'un montant minimum de 500 millions de francs.

L'intérêt étant la mesure de l'action et l'article 2 de la loi modifiée du 13 mars 1993, précitée rappelant ce principe à son article 2 en précisant que le président du tribunal administratif peut prendre par voie de référé des mesures provisoires ayant pour but de faire corriger la violation alléguée du droit communautaire ou d'empêcher d'autres dommages d'être causés aux intérêts concernés, la demande est irrecevable dans la mesure où elle vise les dispositions de l'avis de candidature qui n'ont pas conduit à l'exclusion de la candidature de l'association momentanée. Il s'ensuit que la demande est recevable dans la seule mesure où elle entend corriger la demande de renseignements concernant la capacité de réaliser des travaux d'un montant minimum de 500 millions de francs.

FOND Il reste à examiner le demande de suppression, dans l'avis de candidature publié par la commune, de la disposition libellée sub 10), C), "Capacité technique", relative à la "liste des travaux exécutés par entreprise générale d'un montant de 500 millions de francs minimum, avec certificats au cours des dernières années avec documents photographiques, référence de sous-traitances et importance de leur participation", d'une part, et de celle libellée sub 10) D), "Conditions minimales de caractère économique et technique", 1) "Capacité: capacité de réaliser des ouvrages de même 4 envergure en entreprise générale d'un montant minimum de 500.000.000,- francs; 2) "Critères qui seront retenus pour l'acceptation des candidatures: - qualité des références sur des travaux similaires et expérience de l'entreprise; - importance relative des prestations pour lesquelles l'entreprise envisage de faire appel à la sous-

traitance; - capacité financière de l'entreprise; - capacité technique et d'encadrement de l'entreprise." Concernant le point 10), C), l'association momentanée fait plaider que les articles 26 b tant de la directive 71/305/CEE que du règlement grand-ducal du 27 janvier 1994, précités, limiteraient la demande de renseignements concernant la justification des capacités techniques de l'entrepreneur pour les travaux exécutés à la liste des travaux exécutés au cours des cinq dernières années, cette liste étant appuyée de certificats de bonne exécution pour les travaux les plus importants, les certificats indiquant le montant, l'époque et le lieu d'exécution des travaux et précisant s'ils ont été effectués selon les règles de l'art et menés régulièrement à bonne fin, le droit communautaire ne permettant dès lors pas de restreindre la liste des travaux à ceux qui ont été exécutés par l'entreprise générale d'un montant de 500.000.000,- francs minimum, et n'étendant pas non plus la demande de renseignements à la production de documents photographiques et à des références concernant les sous-traitants, respectivement l'importance de leur participation. - Elle estime par ailleurs, concernant le point 10), D), 1), que la capacité de réalisation d'ouvrages n'est pas une exigence minimale rentrant dans les prévisions des critères de sélection prévus par les articles 25 et 26 des directive et règlement grand-ducal précités, et qu'en réalité, la capacité de réaliser l'ouvrage constituerait le jugement que le pouvoir adjudicateur tirerait en conclusion de l'examen des renseignements fournis par les candidats. Elle soutient par ailleurs qu'on ne saurait raisonnablement admettre que la commune exige des candidats qu'ils soient capables au minimum de réaliser des ouvrages de même envergure en entreprise générale d'un tel montant, dès lors que la soumission concerne un seul ouvrage, et qu'imposer à une entreprise la capacité de réaliser, sans limitation de nombre, sur une période non précisée, des ouvrages de même envergure que celui faisant l'objet de la soumission critiquée relèverait de la "magie pure." - Elle fait finalement plaider que le point 10) D), 2) de l'avis de candidature serait étranger aux conditions minimales de caractère économique et technique prévues par les textes, et que si le pouvoir adjudicateur entend imposer des conditions minimales de caractère économique et technique qu'il exige des entrepreneurs pour la sélection, il doit les formuler de manière objective, claire et précise.

S'il est vrai que dans le cadre d'une soumission restreinte, le pouvoir adjudicateur dispose d'un pouvoir d'appréciation, il ne peut effectuer la vérification de l'aptitude des candidats que sur la base de critères fondés sur leur capacité économique, financière et technique. Les critères de capacité technique, énumérés à l'article 26 de la directive 71/305/CEE et à l'article 26 du règlement grand-ducal du 27 janvier 1994, précités, sont exhaustifs, tandis que les critères de capacités financière et économique, énumérés aux articles 25 respectifs des mêmes directive et règlement grand-ducal, ne sont pas limitatifs (v. Juris-classeur Europe, fasc. 1053, n° 57).

Par ailleurs, les pouvoirs adjudicateurs peuvent subordonner la conclusion des marchés publics à des conditions autres que celles relatives à la vérification de l'aptitude des entrepreneurs sur la base de leur capacité économique, financière et 5 technique. Il ne s'agit pas de critères, mais de conditions de sélection, admissibles si, d'une part, elles respectent toutes les conditions pertinentes du droit communautaire, et notamment les interdictions qui découlent des principes consacrés par le traité de Rome et les textes complémentaires en matière de droit d'établissement et de libres prestations de services, en d'autres termes si elles n'ont pas d'incidence discriminatoire à l'égard des soumissionnaires provenant d'autres Etats membres, et d'autre part, si elles sont mentionnées dans l'avis de candidature de manière à ce que les entreprises intéressées puissent en prendre connaissance (v. Juris-classeur Europe, loc. cit., nos.

60 et 84).

En l'espèce, la spécification mentionnée dans l'avis de candidature sub 10), C) "Capacité technique", relative à la liste des travaux exécutés par entreprise générale d'un montant de 500 millions de francs au minimum, constitue en réalité une condition particulière de l'attribution du marché. Etant donné qu'elle est clairement mentionnée dans l'avis de candidature, qu'elle n'est pas discriminatoire par rapport à des soumissionnaires originaires d'autres Etats membres de l'Union européenne, et qu'il ne se dégage pas des pièces versées ni des renseignements fournis qu'elle aurait pour but de favoriser un soumissionnaire déterminé, elle n'est pas contraire à la réglementation communautaire, ni à la réglementation nationale applicables en la matière.

Il s'ensuit que c'est à tort que l'association momentanée sollicite la suppression de la condition afférente de l'avis de candidature.

Il en va de même de la condition formulée sub 10) D), 1) de l'avis de candidature, l'exigence de la capacité de réaliser des ouvrages de même envergure en entreprise générale d'un montant minimum de 500 millions de francs se résumant à la même condition, formulée pour l'avenir, que celle d'avoir, dans le passé, exécuté des marchés d'une telle envergure.

Finalement, les mentions reproduites sub 10), D), 2) de l'avis de candidature ne constituent pas des conditions, mais des critères d'aptitude des soumissionnaires à retenir pour l'attribution du marché. Etant donné que le pouvoir adjudicateur n'est pas obligé de mentionner les critères indissociables de la notion même de vérification de l'aptitude des entrepreneurs (v. Juris-classeur Europe, loc. cit., n° 56), et qu'il peut légitimement prendre en considération les critères énumérés dans le cadre de sa compétence d'appréciation propre à la nature restreinte de la procédure d'attribution du marché, les mentions en question, si elles sont reproduites de manière superflue, n'en sont pour autant pas contraires au droit applicable en la matière.

Il suit de ce qui précède que c'est à tort que l'association momentanée sollicite la suppression des spécifications en question de l'avis de candidature publié par la commune en vue de la soumission restreinte ans l'intérêt de la construction d'un centre intégré pour personnes âgées à Howald, de sorte que la demande est à rejeter.

La présente ordonnance ne préjudicie en rien une éventuelle décision concernant la régularité de la décision d'écarter la candidature de l'association momentanée.

6 Par ces motifs, le président du tribunal administratif, siégeant en matière de référé, après avoir entendu les mandataires des parties, statuant contradictoirement et en audience publique, déclare la demande irrecevable en tant qu'elle vise les mentions sub 10) B) et 10) C), à l'exception du deuxième point du point 10) C), de l'avis de candidature publié par la commune de Hespérange en vue de la soumission restreinte dans l'intérêt de la construction d'un centre intégré pour personnes âgées à Howald, déclare la demande non fondée pour le surplus, condamne les parties demanderesses aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 2 mars 1999 à 16.00 heures par M. Ravarani, président du tribunal, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11120
Date de la décision : 02/03/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-03-02;11120 ?

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