N° 10240 du rôle Inscrit le 18 août 1997 Audience publique du 28 octobre 1998
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Recours formé par Monsieur … CESARINI, … contre le ministre de la Force publique en matière de promotion
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Vu la requête déposée le 18 août 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Edmond DAUPHIN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … CESARINI, fonctionnaire de la gendarmerie grand-
ducale, …, tendant à l’annulation de deux arrêtés du ministre de la Force publique des 28 avril et 29 mai 1997, prononçant une suspension d’avancement à son égard pour une période de six mois, respectivement la ramenant sur recours gracieux à deux mois;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 30 avril 1998;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 29 juin 1998 par Maître Edmond DAUPHIN pour Monsieur … CESARINI;
Vu les pièces versées et notamment les décisions attaquées;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Edmond DAUPHIN et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives en l’audience publique du 28 septembre 1998.
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Monsieur … CESARINI, maréchal des logis-chef de la gendarmerie grand-ducale, membre de la brigade d’X., s’étant trouvé en rang utile pour être promu le 1er mai 1997 au grade d’adjudant de la gendarmerie, le commandant de la gendarmerie confia, par transmis du 7 avril 1997, au commandant d’arrondissement à X. la mission de lui faire parvenir un rapport circonstancié sur la manière de servir de l’intéressé. Ledit commandant d’arrondissement a, à son tour, requis le supérieur hiérarchique direct de Monsieur CESARINI, l’adjudant-chef …, par lettre du 15 avril 1997, de dresser un rapport circonstancié quant au comportement actuel de l’intéressé et, en particulier, quant aux relations de ce dernier avec les autres membres de la brigade d’X..
Sur réception du rapport de l’adjudant-chef …, le commandant d’arrondissement d’X. a fait parvenir son propre rapport quant au comportement actuel de Monsieur … CESARINI au commandant de la gendarmerie par lettre du 17 avril 1997.
Après avoir notifié lesdites appréciations à Monsieur … CESARINI et recueilli ses explications écrites y relatives datant du 22 avril 1997, le commandant de la gendarmerie s’est 1 adressé au ministre de la Force publique par courrier du 24 avril 1997 en le priant de bien vouloir prononcer une suspension de l’avancement à l’encontre de l’intéressé pour une période de six mois, conformément aux alinéas 2 et 3 de l’article 29 du règlement grand-ducal modifié du 10 août 1972 concernant les conditions de recrutement, d’instruction et d’avancement des sous-officiers de la gendarmerie et des gendarmes, ci-après appelé “ le règlement grand-ducal du 10 août 1972 ”.
Par arrêté du 20 avril 1997, le ministre de la Force publique a décidé de suspendre l’avancement de Monsieur … CESARINI pour une période de six mois. Suite à un recours gracieux introduit à l’encontre de cet arrêté ministériel par lettre de son mandataire du 20 mai 1997, ledit ministre a arrêté en date du 29 mai 1997 que “ la suspension de l’avancement prononcée le 28 avril 1997 à l’encontre du maréchal des logis-chef de la gendarmerie … CESARINI est ramenée à deux mois ”.
A l’encontre de ces deux arrêtés ministériels des 28 avril 1997 et 29 mai 1997, Monsieur … CESARINI a fait déposer un recours en annulation par requête du 18 août 1997.
Aucun recours de pleine juridiction n’étant prévu en la matière, le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi à l’encontre de l’arrêté ministériel déféré du 29 mai 1997, étant entendu que ladite décision n’a pas été accompagnée d’une information sur les voies de recours et que partant aucun délai de recours n’a pu commencer à courir à son encontre.
Le recours est par contre irrecevable pour autant que dirigé contre l’arrêté ministériel du 28 avril 1997, alors que la décision du 29 mai 1997, en ramenant la suspension d’avancement à deux mois, est à considérer comme ayant rapporté le premier arrêté ministériel.
Quant au fond, le règlement grand-ducal modifié du 10 août 1972 dispose dans son article 29 que “ nul ne peut prétendre à l’avancement s’il est établi qu’il ne possède pas les qualités professionnelles, morales ou physiques requises pour exercer les fonctions du grade supérieur. La suspension de l’avancement est prononcée par le ministre de la Force publique sur le vu d’un rapport circonstancié établi par le commandant de la gendarmerie et des explications écrites de l’intéressé qui aura reçu copie du rapport précité ”.
Monsieur CESARINI reproche à l’arrêté déféré de s’appuyer, pour prononcer la suspension de l’avancement, sur une motivation pour le moins insuffisante en ce que les faits relatés dans le rapport du commandant de la gendarmerie auquel il se réfère constitueraient avant tout des fautes non sanctionnables par une suspension de l’avancement, ainsi que sur l’implication du demandeur dans une affaire qui n’est pas encore jugée, ce fait lui étant à ce stade inopposable en raison du principe de la présomption d’innocence interdisant toute sanction tant qu’une condamnation n’a pas été prononcée.
Il fait valoir en outre que sa moralité n’aurait jamais été mise en cause par ses supérieurs, de sorte que l’on ne saurait conclure à une absence en sa personne des qualités professionnelles, morales ou physiques requises pour exercer les fonctions du grade supérieur, ce d’autant plus que le rapport établi par son supérieur hiérarchique direct lui serait somme toute élogieux, alors qu’il y est fait mention de son ardeur au travail et de son zèle, de sa ponctualité et de son esprit de discipline.
2 Il y a lieu de relever que le ministre a pris la décision litigieuse au vu d’un rapport circonstancié établi par le commandant de la gendarmerie et des explications écrites de Monsieur … CESARINI, conformément à la procédure prévue à l’article 29 précité du règlement grand-ducal du 10 août 1972. Ledit rapport est libellé en quatre parties intitulées comme suit: 1. situation, 2. casier disciplinaire du mdlch CESARINI, 3. la situation actuelle, 4.
enquête pénale.
Les qualités professionnelles et morales requises pour prétendre à l’avancement au sens des dispositions précitées de l’article 29 du règlement grand-ducal du 10 août 1972 doivent être appréciées en fonction de l’attitude globale du fonctionnaire concerné, c’est-à-dire en considération de tous les éléments permettant de conclure à l’aptitude dans son chef de revêtir une fonction supérieure, exigeant davantage de sens des responsabilités et d’intégrité.
En effet, si l’avancement prévu par les dispositions qui précèdent ne se résume pas en un automatisme, mais revient uniquement aux fonctionnaires remplissant un certain nombre de conditions limitativement énumérées, l'autorité de nomination se doit d’apprécier dans quelle mesure le candidat à l’avancement répond, compte tenu de sa situation globalement considérée, aux exigences ainsi posées en la matière. Elle peut à cet égard tenir compte du casier disciplinaire de l’intéressé, qui, bien que ne renseignant que sur une partie des antécédents du fonctionnaire, ne saurait pour autant être écarté des débats au motif invoqué par le demandeur tendant à le considérer comme étranger aux éléments susceptibles d'appréciation en la matière sous peine de sanctionner une deuxième fois les mêmes faits.
L’autorité de nomination peut également arriver à la conclusion que, même en présence de certains éléments positifs mis en avant comme en l’espèce, d’autres facteurs sont néanmoins à considérer comme prépondérants, de sorte que d’éventuelles remarques élogieuses doivent le cas échéant pouvoir s’évincer par rapport à d’autres considérations.
En l’espèce, il découle des pièces versées au débat que l’auteur de l’avis ayant motivé la décision déférée, tout en prenant en considération le casier disciplinaire du demandeur renseignant en tout huit condamnations, s’est intéressé au-delà de son l’historique disciplinaire également à son comportement professionnel et humain en ce qu’il retient qu’il semble y avoir de sérieux problèmes concernant la vie commune avec ses collègues de travail, voire avec le public, ces propos reposant sur les affirmations du commandant de la brigade d’X. suivant lesquelles il existe avec les autres membres de la brigade d’X. “ certaines tensions dues notamment à des problèmes de camaraderie ” ; “ que l’intéressé présente une nette tendance à brusquer, souvent sans raison apparente, ses collègues de travail ” ; et que “ cette tendance se présente également dans (ses) relations avec le public qui ne le qualifie probablement pas de Freund und Helfer ”.
Il résulte en outre des précisions apportées en cours d’instance par le délégué du Gouvernement dans son mémoire en réponse du 30 avril 1998, non autrement contestées en cause, que le demandeur a déjà fait, par le passé plus ou moins récent, l’objet de certaines critiques de la part de ses supérieurs hiérarchiques résultant notamment d’un rapport du commandant d’arrondissement de Luxembourg du 15 novembre 1985 retenant, entre autres, que “ Monsieur CESARINI est un élément travailleur, mais souvent malhabile et d’un tempérament incontrôlé. Il lui faut un dirigeant et un surveillant, ce qui est difficilement réalisable à la brigade de Luxembourg… ”, ainsi que d’un rapport du commandant d’arrondissement d’X. du 21 novembre 1990, établi dans le cadre d’une demande de déplacement de l’intéressé, retenant que des arguments cités antérieurement restent toujours 3 valables, à savoir “ que CESARINI doit être surveillé de façon permanente et étroite par ses supérieurs, en particulier par son commandant de brigade. En tant que supérieur, on ne peut pas avoir confiance dans le fonctionnaire en question. ” Le passé disciplinaire, ensemble les considérations d’ordre humain susvisées, corroborées partiellement encore en cours d’instance par les précisions apportées par le rapport détaillé sur les activités de service du demandeur dressé par le commandant d’arrondissement à X. en date du 27 septembre 1997, dans la mesure où il recouvre la période antérieure à l’arrêté du 29 mai 1997, à l’attention du commandant de la gendarmerie et versé aux débats par la partie défenderesse, confirmant les problèmes de relations humaines invoqués antérieurement et précisant que ces derniers existaient déjà au moment où le demandeur faisait encore partie de la brigade de Y., constituent des éléments de nature à justifier à suffisance la décision déférée.
Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé.
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, stautant contradictoirement;
reçoit le recours en annulation en la forme;
au fond le dit non justifié;
partant en déboute;
laisse les frais à charge du demandeur.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 octobre 1998 par:
M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.
Schmit Delaporte 4