N° 10 / 2025 du 23.01.2025 Numéro CAS-2024-00045 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-trois janvier deux mille vingt-cinq.
Composition:
Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.
Entre PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE1.), demandeur en cassation, comparant par Maître Annie ELFASSI, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, et 1) la société anonyme SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-
ADRESSE2.), représentée par le conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), défenderesse en cassation, comparant par la société en commandite simple KLEYR GRASSO, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente instance par Maître Christian JUNGERS, avocat à la Cour, 2) l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG, pris en sa qualité de gestionnaire du Fonds pour l’emploi, représenté par le Ministre d’Etat, ayant ses bureaux à L-1341 Luxembourg, 2, Place de Clairefontaine, défendeur en cassation.
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Vu l’arrêt attaqué numéro 155/23-III-TRAV rendu le 21 décembre 2023 sous le numéro CAL-2021-00074 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 3 avril 2024 par PERSONNE1.) à la société anonyme SOCIETE1.) et à l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG (ci-après « l’ETAT »), déposé le 4 avril 2024 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 29 mai 2024 par la société SOCIETE1.) à PERSONNE1.) et à l’ETAT, déposé le 31 mai 2024 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions de l’avocat général Bob PIRON.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal du travail de Luxembourg, après avoir déclaré valable la transaction conclue entre la défenderesse en cassation sub 1), prise en sa qualité d’employeur, et le demandeur en cassation, pris en sa qualité de salarié, avait dit irrecevable la demande en indemnisation, pour licenciement abusif, dirigée par ce dernier contre son employeur.
La Cour d’appel a confirmé le jugement.
Sur le moyen unique de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 89 de la constitution, de l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile, de l’article 54 du Nouveau Code de procédure civile, de l’article 249 en combinaison avec l’article 587 du Nouveau Code de 2procédure civile, de l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 2044, 2048, 2049 et 2053 du Code civil, lesquels disposent :
Article 89 de la Constitution :
en audience publique.» Article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne :
Article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales : Article 53 du Nouveau Code de procédure civile :
déterminé par les prétentions respectives des parties ».
Article 54 du Nouveau Code de procédure civile :
prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ».
Article 249 du Nouveau Code de procédure civile :
jugements contiendra les noms des juges, du procureur d'Etat, s'il a été entendu, ainsi que des avoués ; les noms, professions et demeures des parties, leurs conclusions, l'exposition sommaire des points de fait et de droit, les motifs et le dispositif des jugements ».
Article 587 du Nouveau Code de procédure civile :
établies pour les tribunaux inférieurs sont observées en instance d’appel ».
Article 2044 du Code civil :
parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
Le contrat doit être rédigé par écrit. ».
3Article 2048 du Code civil :
objet: la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu. » Article 2049 du Code civil :
qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé. » Article 2053 du Code civil :
rescindée, lorsqu'il y a erreur dans la personne ou sur l'objet de la contestation.
Elle peut l'être dans tous les cas où il y a dol ou violence. » En ce que, pour déclarer non fondé l’appel interjeté par M . PERSONNE1.) et confirmer le jugement entrepris ayant dit que , la Cour d’appel s’est prononcée Aux motifs que (…) parties La transaction est définie par l'article 2044, alinéa 1, du Code civil comme étant Ce contrat doit être rédigé par écrit.
Suivant l'article 2053 dudit Code, la transaction peut être rescindée, lorsqu'il y a erreur dans la personne ou sur l’objet de la contestation et dans tous les cas où il y a dol ou violence.
Une doctrine unanime, entérinée par la jurisprudence, a ajouté au texte une condition supplémentaire : la transaction suppose que les parties se fassent des concessions réciproques.
Il est en effet de l'essence de celle-ci que chaque contractant sacrifie une partie des avantages qu'il pouvait espérer, pour ne pas éprouver toutes les pertes qu'il avait à craindre. La convention transactionnelle où l’une des parties contractantes n'a fait aucune espèce de sacrifice est partant nulle, pour défaut de cause.
La transaction est en principe valable en matière de droit du travail et il n'existe aucune règle ni raison impérative prohibant la conclusion de toute transaction avant la fin des relations de travail et privant de ce fait les parties de leur droit légitime de régler immédiatement à l'amiable un différend en cours d'exécution du contrat. La simple existence d'un lien de subordination entre parties est insuffisante pour justifier une solution contraire.
PERSONNE1.) estime que son consentement a été vicié au regard du fait que l'employeur lui a fait signer une transaction en profitant de son état de choc suite au 4licenciement prononcé et en ne lui donnant pas le temps nécessaire pour appréhender le contenu et les conséquences de la transaction soumise pour signature.
La charge de la preuve de l'existence du vice de consentement invoqué appartient à la prétendue victime.
Il appartient donc à l'appelant d'établir la pression sous laquelle il se serait trouvé, constitutive d'une violence morale annihilant tout libre arbitre dans son chef, affectant sa faculté d'acquiescer ou non aux conditions de l'arrangement finalement signé entre parties.
Force est de constater que le salarié, dont la version des faits est énergiquement contestée par l'employeur, ne verse aucune pièce à cet égard et ne formule aucune offre de preuve susceptible d'établir la réalité du vice de consentement litigieux.
Il reste partant en défaut de rapporter la preuve de pressions ou de manœuvres dolosives exercées par l'employeur à son encontre.
C'est encore en vain que PERSONNE1.) fait plaider qu'il n'aurait pas disposé d'un délai de réflexion suffisant avant de signer l'accord, alors qu'il reconnaît avoir eu un entretien séparé avec la déléguée du personnel, PERSONNE2.), avant la signature de la convention transactionnelle et admet que le montant de la transaction a fait l'objet de discussions entre parties.
En conséquence, aucun vice du consentement dans le chef de l’appelant n'est à retenir.
L'offre de preuve formulée par l'intimée par rapport au déroulement de la réunion litigieuse est dès lors à écarter pour être superfétatoire.
PERSONNE1.) plaide en second lieu que la transaction extrajudiciaire intervenue serait nulle pour absence de concessions réciproques.
La juridiction de première instance a rappelé à juste titre que la transaction, pour être valide, suppose - outre l'adhésion consciente des contractants – que les parties se fassent des concessions réciproques qui ne doivent pas être dérisoires, ni présenter de déséquilibre manifeste entre elles.
La possibilité de voir déclarer abusif le licenciement avec préavis était, au moment de la conclusion de la transaction, certes envisageable, mais non pas certaine. De même, les revendications de l'appelant par rapport aux indemnités pour heures supplémentaires prestées et congés non pris étaient contestées.
Les droits auxquels le salarié soutient avoir renoncé étaient dès lors incertains.
Le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d’une transaction, rechercher, si ces prétentions étaient justifiées (cf. Cass. fr. soc. 27 mars 1996, n°92-
540.448, Bull. civ. V, n°124, D. 1996, IR 108, 1CP 1996, II. 22711), ni, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve (cf. Cass. fr. soc. 21 mai 1997. n95-45.038, Bull. civ. V, n185, D. 1997, IR 146, 1CP 1997, II. 22926).
En effet, en transigeant les parties renoncent à exercer leur action en justice.
Elles acceptent de ne pas soumettre leurs prétentions respectives à une vérification juridictionnelle.
Pour apprécier la réalité de concessions, le juge n'a donc pas à apprécier si les prétentions abandonnées correspondaient à des droits effectifs.
L'appelant ne saurait pas non plus, pour soutenir que l'employeur ne respectait pas lui-même les termes de la transaction et dès lors dénier toute valeur à ce contrat, se baser sur le fait que l'employeur a continué, chaque mois, à verser les salaires jusqu'à la fin du préavis.
En effet, pendant la durée du préavis, le contrat de travail continue d'exister et s'exécute normalement avec en corollaire le paiement du salaire à la fin de chaque mois, la transaction ne prévoyant pas une résiliation avec effet immédiat du contrat de travail.
Eu égard aux éléments du dossier, la Cour rejoint le tribunal du travail en ce qu'il a considéré que les concessions réciproques - d'un côté, paiement d’une indemnité transactionnelle forfaitaire de 14.000 euros en sus des salaires redus pendant la période de préavis et de l'indemnité de départ d'un côté, ainsi que, de l'autre côté, acceptation de ce montant pour solde de tout compte- sont en l'espèce réelles et d’une importance suffisante, sans présenter de déséquilibre manifeste entre elles et que la transaction du 5 avril 2019 est, en conséquence, parfaitement valable. » 1°) Alors que, dans ses conclusions M. PERSONNE1.) a fait valoir l'absence de contestation née ou à naître sur le licenciement en général puisqu'intervenu le même jour que la signature de la transaction et alors même que celui-ci n'a pas eu le temps de consulter un conseil et d'examiner attentivement les clauses de la transaction présentée, outre le fait que tant que M. PERSONNE1.) n'avait pas demandé les motifs de son licenciement, aucune contestation n'aurait pu être soutenue par l'Employeur pour justifier une transaction. En outre, M. PERSONNE1.) a fait valoir auprès de la Cour d’appel l'absence de concessions réciproques dans la mesure où le montant transactionnel octroyé n'était pas additionnel à ce qui était dû légalement à M. PERSONNE1.) et ne couvrait même pas un dixième du montant qui lui était dû légalement en vertu des dispositions légales.
En affirmant que la Cour rejoint le tribunal du travail en ce qu'il a considéré que les concessions réciproques - d'un côté, paiement d’une indemnité transactionnelle forfaitaire de 14.000 euros en sus des salaires redus pendant la période de préavis et de l'indemnité de départ d'un côté, ainsi que, de l'autre côté, acceptation de ce montant pour solde de tout compte- sont en l'espèce réelles et d’une importance suffisante, sans présenter de déséquilibre manifeste entre elles et que la transaction du 5 avril 2019 est, en conséquence, parfaitement valable, la Cour 6d'appel n'a pas exercé ses pouvoirs de contrôle quant au contenu de la transaction en relevant, et notamment si la concession de M. PERSONNE1.) était suffisante pour déclarer la transaction valable, alors que la Cour d'appel aurait dû rechercher si les prétentions étaient justifiées avant de se prononcer sur la validité de la transaction("Le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d’une transaction, rechercher, si ces prétentions étaient justifiées (cf. Cass. fr. soc. 27 mars 1996, n°92-
40.448, Bull. civ. V, n°124, D. 1996, IR 108, 1CP 1996, II. 22711), ni, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve (cf. Cass. fr. soc. 21 mai 1997. N°95-45.038, Bull. civ. V, n°185, D. 1997, IR 146, 1CP 1997, II. 22926) », et a ainsi violé, sinon a fait une fausse application des articles 2044, 2048, 2049 et 2053 du Code civil.
2°) Alors que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs, qui est un vice de forme ; qu’en retenant, pour dire, par confirmation du jugement entrepris, que les concessions réciproques sont réelles et d’une importance suffisante sans présenter de déséquilibre manifeste entre ces concessions réciproques, de sorte qu’il convient de conclure que le transaction litigieuse ne présente pas d’asymétrie certaine et anormale au profit de l’employeur, sans répondre aux moyens de M. PERSONNE1.), tirés de ce que le montant transactionnel octroyé par l'Employeur à M. PERSONNE1.) ne couvrait même pas le dixième du montant des heures supplémentaires dû par l'Employeur à M. PERSONNE1.), ni examiner le calcul opéré par M. PERSONNE1.) confirmant les montants redus par l'Employeur à M. PERSONNE1.) en vertu de la relation de travail, la Cour d’appel a violé les articles 89 de la Constitution, 54 du Nouveau Code de procédure civile, et 249 en combinaison avec l’article 587 du Nouveau Code de procédure civile ;
3°) Alors que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs, qui est un vice de forme ; qu’en retenant, pour dire, par confirmation du jugement entrepris, que les concessions réciproques sont réelles et d’une importance suffisante sans présenter de déséquilibre manifeste entre ces concessions réciproques, de sorte qu’il convient de conclure que le transaction litigieuse ne présente pas d’asymétrie certaine et anormale au profit de l’employeur et que , sans répondre aux moyens de M. PERSONNE1.), tirés de ce que le montant alloué en échange de sa renonciation à tous droits et actions excluait que la transaction puisse s’analyser en une concession, la cour d’appel a violé les articles 89 de la Constitution, 54 du Nouveau Code de procédure civile, et 249 en combinaison avec l’article 587 du Nouveau Code de procédure civile ;
4°) Alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal ; qu’il en résulte que le juge se doit d’examiner et de se prononcer sur les moyens et éléments de preuve invoqués par chacune des parties ; que, dans ses conclusions, M. PERSONNE1.) faisait valoir des offres de preuve relatives à la prétendue erreur sur les fiches de salaires et les jours de congé invoquée par l'Employeur par rapport aux heures supplémentaires revendiquées, qui établiraient le montant important dû par l'Employeur à M. PERSONNE1.) pour justifier que le montant transactionnel alloué ne pouvait constituer une concession réciproque au 7vu des montants importants dus par l'Employeur et que l'effacement par l'Employeur du nombre de ces heures supplémentaires et du nombre de jours de congé ne pouvait que constituer un aveu de l'Employeur que le montant transactionnel alloué à M.
PERSONNE1.) ne pouvait constituer une concession valable ; qu'en s'abstenant de répondre aux moyens essentiels de M. PERSONNE1.), soumis pour la première fois au juge et d’examiner les éléments de preuve nouvellement offerts, la Cour d’appel a encore méconnu le droit de M. PERSONNE1.) à un procès équitable, en violation de l’article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Sur la première branche du moyen, 4.1.1. Il n’est pas besoin de rappeler que les conclusions des parties, en ce qu’elles contiennent leurs demandes et les moyens et pièces fondant ces demandes, déterminent l’étendue du litige soumis au juge.
C’est au regard de ces demandes, de ces moyens et de ces pièces que le juge doit statuer.
Le juge ne saurait dès lors, sans modifier l’étendue du litige qui lui est soumis, méconnaître les termes des conclusions des parties.
En droit français, en application de l’article 4 du code de procédure civile, dont les dispositions sont identiques à celles de l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile luxembourgeois, la Cour de cassation française censure très régulièrement les arrêts qui méconnaissent les termes clairs et précis des conclusions des parties.
A titre d’exemple, dans un litige où la cour d’appel, pour condamner une société à payer une facture litigieuse, avait retenu qu’ n’était avancé par la société pour contester la créance, la Cour de cassation française, au visa de l’article 4 du code de procédure civile, a censuré l’arrêt ayant méconnu que la société avait fait valoir, en cause d’appel, le moyen tiré de la prescription, (Cass Com, 8 décembre 2021, pourvoi n° 20-12195 ; add. Cass Soc, 29 mars 2023, pourvoi n° 20-14180 ; Cass Civ 3ème, 18 janvier 2023, pourvoi n°21-
15499 ; Cass Com 4 janvier 2023, pourvoi n° 21-20225).
Ces mêmes principes justifient la censure de l’arrêt déféré.
4.1.2. Dans leurs conclusions, M. PERSONNE1.), faisait valoir que c’était à tort que les premiers juges avaient retenu que la transaction était valable et que les concessions réciproques sont en l'espèce réelles et d'une importance suffisante, sans présenter de déséquilibre manifeste entre elles.
Il rappelait qu'il avait été convoqué à une entrevue, qu'il pensait que lors de cette entrevue, le paiement de ses heures supplémentaires et de ses congés accumulés et non pris allait être discuté dans la mesure où depuis 2017, il réclamait paiement de son dû. Que le même jour, son licenciement lui était annoncé et il lui était demandé de signer une transaction sans avoir eu le temps de consulter un conseil. Que la transaction portait sur un montant de EUR 14.000 à titre d'indemnité 8transactionnelle pour solde de tous comptes alors que rien que le montant à titre d'arriérés d'heures supplémentaires du par l'Employeur dépassait la somme de 60.000 EUR.
Et il faisait valoir, pour la première fois en cause d’appel des offres de preuve afin que la Cour d'appel puisse constater que le nombre de ses heures supplémentaires et de ses congés qui figuraient sur les précédentes fiches de salaire avaient disparu.
Il observait ainsi :
le consentement de M. PERSONNE1.) a été vicié alors que qu'il a été convoqué inopinément à une réunion dont il ne connaissait pas la teneur, sans la possibilité de pouvoir être accompagné. Lors de cette réunion, l'Employeur a annoncé à M.
PERSONNE1.) son licenciement avant de lui soumettre une transaction préparée à l'avance par ses soins avec l'aide de son conseil, en profitant de la situation de surprise et de faiblesse de ce dernier, pour l'inciter à signer, en dissimulant sciemment le fait que par cette transaction, M. PERSONNE1.) renonçait à toute action en justice, notamment vis-à-vis de ses prétentions salariales qu'il réclamait depuis des années à l'Employeur.
Par ailleurs, la matérialité, le caractère injuste, le sentiment de crainte et le caractère suffisamment grave de la situation de violence sont rapportés.
En effet, la transaction a été signée dans une situation suffisamment grave et injuste, puisque M. PERSONNE1.) n'a pas été autorisé à se faire assister d'un avocat, alors que l'Employeur était assisté d'un avocat. De plus, la transaction a été rédigée en avance, de manière unilatérale et sans avoir négocié avec M. PERSONNE1.) ou son conseil, comme cela se pratique régulièrement. En effet, l'Employeur n'a pas autorisé M. PERSONNE1.) à emporter la transaction avec lui afin de la faire relire par un avocat.
M. PERSONNE1.) a signé la transaction ce 5 avril 2019 dans un sentiment de crainte important. En effet, il travaillait auprès de l'Employeur depuis plus de 9 ans, et l'annonce soudaine du licenciement a fait naître la crainte d'un mal considérable et présent sur son avenir, et notamment par le fait de se retrouver, à son âge, et après plus de 9 ans de stabilité, dans l'incertitude quant à la possibilité de pouvoir retrouver un travail avec les mêmes conditions.» Il faisait observer les conditions dans lesquelles la transaction a été présentée à lui pour signature :
Salarié n'y participe.
L'article 4 de la transaction prévoit qu'en "contrepartie, le Salarié renonce à toute action judiciaire et/ou extrajudiciaire contre l'Employeur en rapport avec son contrat de travail, l'exécution et/ou la résiliation de celui-ci. En particulier, il renonce à toute action en dommages et intérêts pour licenciement abusif et/ou 9irrégulier, en paiement d'arriéré de salaires, d'indemnité pour congé non pris, primes, treizième mois, ou tout autre paiement de quelque nature qu'il soit (…)".
Il s'agit d'une rédaction que l'on retrouve en principe dans les transactions qui interviennent après le départ du salarié de l'entreprise et lorsqu'un employeur n'a plus rien à verser à son salarié Or, en l'espèce, ce n'est absolument pas le cas, l'Employeur devant encore notamment les 1329,12 heures supplémentaires prestées qui représentent un montant de EUR 63.359,16.
L'Employeur s'est bien gardé d'attirer l'attention de M. PERSONNE1.) sur cet article 4 de la transaction, en se contentant de lui demander de signer la transaction.
M. PERSONNE1.) n'aurait jamais renoncé à obtenir le paiement de ses heures supplémentaires, salaires et autres indemnités jusqu'à la fin de son contrat, d'autant plus qu'il n'a strictement rien à se reprocher étant donné que l'Employeur l'a licencié sans raison valable.
Suivant cette transaction, l'Employeur ne devait plus rien verser à M.
PERSONNE1.) à compter du 5 avril 2019, hormis l'indemnité transactionnelle de EUR 14.000.-. Cependant, l'Employeur a tout de même continué à verser les salaires de M. PERSONNE1.) jusqu'à la fin de son préavis, ainsi qu'une partie de l'indemnité de départ, de sorte que l'Employeur aurait dû verser le paiement des heures supplémentaires.
En réalité, l'Employeur n'avait aucune intention de respecter la transaction soumise à M. PERSONNE1.), au contraire elle n'était que l'opportunité d'empêcher M. PERSONNE1.) de pouvoir réclamer des arriérés de salaires et ses heures supplémentaires.
M. PERSONNE1.) n'avait ni le recul, ni les compétences nécessaires pour savoir ce à quoi il s'engageait. C'est bien pour cela qu'il a demandé à l'Employeur de pouvoir contacter un proche afin d'être conseillé, ou bien que la réunion soit remise à plus tard, ce qui lui a été refusé. » 4.1.3. Quant à l'absence de conseils reçus par M. PERSONNE1.), il indiquait :
transaction qui lui a été soumise le 5 avril 2019, que ce soit d'un avocat ou d'un proche.
Dans ses conclusions du 5 mai 2022, la Partie intimée prétend que M.
PERSONNE1.) aurait pu s'entretenir seul avec Mme PERSONNE2.), en sa qualité de déléguée du personnel, au sujet de la transaction, et qu'il aurait passé un appel téléphonique à une personne externe pour demander conseil avant de signer la transaction.
10Dans ses conclusions du 14 octobre 2022, la Partie intimée prétend également que M. PERSONNE1.) aurait eu la possibilité de passer un appel téléphonique en restant seul dans la salle de réunion.
En premier lieu, M. PERSONNE1.) conteste formellement avoir contacté une personne externe pour demander conseil en date du 5 avril 2019.
En effet, M. PERSONNE1.) n'a pas été en mesure de joindre quiconque ce jour, et le relevé de ses appels téléphoniques en est la preuve incontestable. » A cet égard, il faisait valoir, qu’en raison de sa position de faiblesse, celui-ci se trouvait de fait dans une position désavantageuse face à l'Employeur, d'autant plus que sa qualité de cuisinier ne lui permet effectivement pas d'apprécier le contenu d'une transaction, et qu'un déséquilibre entre parties était latent.
Il énonçait :
profession de "chef cuisiner", étant plutôt une activité manuelle et non intellectuelle.
Dans son activité, M. PERSONNE1.) n'a pas été confronté à des contrats, ce qui explique son incompréhension quant aux finalités des clauses prévues dans la transaction. En effet, il est à noter que même un diplômé universitaire n'a pas la compréhension nécessaire de dispositions contractuelles à des finalités précises s'il n'a pas la spécialité requise pour les comprendre, comme par exemple, une personne travaillant dans le secteur de la gastronomie.
Le domaine juridique est donc totalement inconnu à l'Appelant, peu importe la prétendue explication qu'aurait pu lui faire l'Employeur, et il était ainsi en droit de demander un report de la signature de la transaction qui lui a été refusé, pour pouvoir analyser cette dernière.
En outre, une transaction est destinée à valablement régler le différend né entre les parties sur la qualification de la rupture du contrat de travail et/ou sur ses effets. Or, le Salarié s'est vu recevoir sa lettre de licenciement et immédiatement après, il lui a été demandé de signer la transaction. Il est à se demander quel différend était déjà né au moment de la signature de la transaction pour pouvoir transiger. » (conclusions récapitulatives, page 14.).
Il observait encore que un arrangement transactionnel avec l'Employeur. En effet, il a été licencié sans motif valable, ce qui aurait entrainé un licenciement abusif avec de substantielles indemnités à la clé, ainsi que le paiement de ses heures supplémentaires.
L'Employeur est le seul à tirer un avantage financier de cette situation et il n'a fait aucune concession de son côté, si ce n'est de verser la modique somme de EUR 14.000.- pour solde de tout compte, alors que M. PERSONNE1.) pouvait prétendre à beaucoup plus, sur base du Code du travail.
En effet, cette transaction litigieuse aurait fait renoncer à tous les arriérés de salaires, soit au minimum EUR 110.000.-, et à près de EUR 100.000.- de préjudices 11liés au licenciement abusif, soit un total de EUR 210.000.-, pour une indemnité transactionnelle de EUR 14.000..
M. PERSONNE1.) a droit en réalité au paiement du/des :
- Salaire jusqu'à la fin du préavis (6 mois de salaire: 35.340,54.-EUR) ;
- Indemnité de départ (1 mois de salaire: 5.890,09.-EUR) ;
- Indemnité pour congé non pris (4.426,50.-EUR) ;
- Heures supplémentaires (63.359,16.-EUR) ;
- Indemnités pour les préjudices matériel et moral subis par un licenciement abusif après plus de 9 ans d'ancienneté (100.000.- EUR environ).
L'asymétrie financière est anormale et exclusivement au profit de l'Employeur au vu du montant de la transaction.
Dès lors, il est clairement établi que le montant de la transaction est dérisoire à côté des montants réellement dus à M. PERSONNE1.). » (conclusions récapitulatives, page 19).
4.1.4. Et pour écarter le témoignage sur lequel s'est basé le premier juge, il énonçait ainsi :
attestations testimoniales versées par l'Employeur dont M. PERSONNE1.) avait pourtant demandé le rejet au vu notamment des relations étroites qu'entretiennent les témoins avec l'Employeur.
En effet, Votre Cour pourra constater les éléments suivants:
M. PERSONNE3.) se présente dans son attestation comme étant membre de la direction » et se trouve être également le fils de l'un des deux bénéficiaires économiques de la société SOCIETE1.) (à savoir l'Employeur), M.
PERSONNE3.), également administrateur au sein de la société SOCIETE1.) (cf.
Pièce n° 16).
M. PERSONNE3.) a pris le soin de ne pas divulguer cette information sur son attestation, d'autant qu'il travaille principalement dans la société de construction familiale SOCIETE2.) S.A. (cf. Pièce n° 17), société qui elle-même est administrée par le trio familial.
Il faut noter que la société SOCIETE1.) est détenue indirectement à raison de (Pièce n° 18):
30% par Monsieur PERSONNE4.);
30% par Monsieur PERSONNE5.);
30% par Madame PERSONNE6.);
Le conseil d'administration de la société SOCIETE1.) était composé à l'époque de 4 membres (Pièce n° 1):
Monsieur PERSONNE4.) (père de Monsieur PERSONNE3.)) ;
12Monsieur PERSONNE5.) (frère de Monsieur PERSONNE4.)) ;
Monsieur PERSONNE7.) ;
Monsieur PERSONNE8.) ;
Cependant, et conformément à la jurisprudence;
d'administration représente la société à l'égard des tiers et en justice et que les administrateurs, membres du Conseil d'administration, représentent physiquement le conseil d'administration à l'égard des tiers et en justice, ils ne peuvent pas être témoins ».
En l'occurrence:
M. PERSONNE9.) est le DRH de la société de construction SOCIETE2.) S.A.
et est donc étroitement lié à la société SOCIETE1.) (Pièce n° 20).
M. PERSONNE9.) est arrivé après le commencement de la réunion et n'était donc pas présent au moment des discussions.
M. PERSONNE7.) est l'administrateur délégué de la société SOCIETE1.) et a quitté cette dernière quelques instants plus tard (Pièce n° 1 et n° 19). Son témoignage a été écarté en première instance (page 4 du jugement).
M. PERSONNE2.) est l'assistante de la direction depuis 10 ans et déléguée du personnel. Elle n'a pas participé à la réunion et n'a fait que rapporter les propos de M. PERSONNE9.). Son témoignage n'est donc qu'un témoignage indirect. » (conclusions récapitulatives, pages 15 et 16).
Et il poursuivait :
aux relations existantes entre les témoins et l'Employeur. » Il n’y est fait état dans l'arrêt attaqué d’aucun moyen fondé sur la validité de ces témoignages. Et il n’est pas plus fait état, quant aux offres de preuve faites par M. PERSONNE1.) si ce n'est pour les déclarer à écarter pour défaut de pertinence.
4.1.5. La Cour d’appel a cependant retenu, pour confirmer le jugement entrepris, qu'il n'existe aucune règle ni raison impérative prohibant la conclusion de toute transaction avant la fin des relations de travail et privant de ce fait les parties de leur droit légitime de régler immédiatement à l'amiable un différend en cours d'exécution du contrat, sans avoir vérifié qu'au jour du licenciement de M.
PERSONNE1.), aucun différend n'était né, ni n'existait (page 7 de l'arrêt).
Mais, ce faisant, la Cour d’appel a dénaturé les faits et les conclusions de M.
PERSONNE1.).
A ce premier titre déjà, la cassation de l’arrêt doit être prononcée.
4.1.6. Dans son arrêt du 21 décembre 2023, la Cour d’appel énonce à juste titre, au début de son appréciation, les règles régissant la validité d’une transaction :
13La transaction est définie par l'article 2044, alinéa 1, du Code civil comme étant "un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naitre" Ce contrat doit être rédigé par écrit.
Suivant l'article 2053 dudit Code, la transaction peut être rescindée, lorsqu'il y a erreur dans la personne ou sur l’objet de la contestation et dans tous les cas où il y a dol ou violence.
Une doctrine unanime, entérinée par la jurisprudence, a ajouté au texte une condition supplémentaire : la transaction suppose que les parties se fassent des concessions réciproques.
Il est en effet de l'essence de celle-ci que chaque contractant sacrifie une partie des avantages qu'il pouvait espérer, pour ne pas éprouver toutes les pertes qu'il avait à craindre. La convention transactionnelle où l’une des parties contractantes n'a fait aucune espèce de sacrifice est partant nulle, pour défaut de cause. (…) La juridiction de première instance a rappelé à juste titre que la transaction, pour être valide, suppose - outre l'adhésion consciente des contractants – que les parties se fassent des concessions réciproques qui ne doivent pas être dérisoires, ni présenter de déséquilibre manifeste entre elles. » La Cour d’appel fait l’application d’une jurisprudence constante qui énonce que le dessaisissement du juge en cas de transaction ne fait pas obstacle à ce qu’il puisse statuer sur la validité de la transaction si l’un des plaideurs en demande l’annulation (CA Lux., 9ème ch., 12 juin 2008, n° 29022, BIJ 10/2008, p. 229. V.
aussi JCl., Civ., Articles 2044 à 2058, Fasc. 60, n° 12).
Ainsi, la transaction est en principe valable en matière de droit du travail sous certaines conditions.
Le juge doit vérifier si les différentes conditions de validité d’une transaction, à savoir la nécessité d’un écrit, l’existence d’une situation contentieuse ou précontentieuse, le respect de l’ordre public social qui impose que l’on ne puisse transiger que sur des droits dont on dispose et non sur des droits à venir et éventuels, l’existence d’un consentement non vicié et de concessions réciproques, sont remplies (C.S.J. 26 mai 2011, N° 36087 du rôle).
Cependant, alors même que la Cour d’appel rappelle le principe de validité d’une transaction et l’intervention du juge dans ce contrôle de régularité de la transaction, elle énonce - de façon erronée et de manière contradictoire avec les principes précités - que :
au moment de la conclusion de la transaction, certes envisageable, mais non pas certaine. De même, les revendications de l'appelant par rapport aux indemnités pour heures supplémentaires prestées et congés non pris étaient contestées.
14 Les droits auxquels le salarié soutient avoir renoncé étaient dès lors incertains.
Le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d’une transaction, rechercher, si ces prétentions étaient justifiées (cf. Cass. fr. soc. 27 mars 1996, n°92-
40.448, Bull. civ. V, n°124, D. 1996, IR 108, 1CP 1996, II. 22711), ni, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve (cf. Cass. fr. soc. 21 mai 1997. n95-45.038, Bull. civ. V, n185, D. 1997, IR 146, 1CP 1997, II. 22926).
En effet, en transigeant les parties renoncent à exercer leur action en justice.
Elles acceptent de ne pas soumettre leurs prétentions respectives à une vérification juridictionnelle.
Pour apprécier la réalité de concessions, le juge n'a donc pas à apprécier si les prétentions abandonnées correspondaient à des droits effectifs. » Contrairement à ce qu’affirme la Cour d’appel, le juge a nécessairement un rôle actif pour rechercher si la transaction est valable et apprécier la validité de la transaction. Ce rôle lui est attribué en raison du contrôle qu’il doit faire sur l’existence et l’importance des concessions réciproques.
La transaction exige pour sa validité que des concessions réciproques aient été accordées, l’importance de ces concessions requises est laissée à l’appréciation des juridictions saisies (C.S.J., 26 mai 2011, N° 36087 du rôle ; JPL/ Travail, 11 décembre 2019, n°3802/2019).
Ainsi, la Cour d’appel se devait de procéder à un examen des éléments de faits et de preuve pour apprécier l’importance des concessions réciproques.
La jurisprudence retient que s’il importe peu que les concessions soient d’importance inégale, elles ne doivent pas être dérisoires, sauf à entacher la transaction de nullité (cf. C.S.J., 26 mai 2011, N° 36087 du rôle ; JPL/ Travail, 11 décembre 2019, n°3802/2019).
La jurisprudence retient également qu’il n’y a pas de transaction lorsqu’une partie abandonne ses droits pour une contrepartie si faible qu’elle est pratiquement inexistante (cf. Cass.fr. 1ère civ., 4 mai 1976, Bull.Civ.I, N° 157, p.124 ; Cour d’appel, 23 avril 2020, n°CAL-2019-00034 du rôle).
Dans le cadre d'une transaction entre salarié et employeur, il est de principe que les règles relatives aux droits du salarié en cas de licenciement sont édictées dans un but de protection du salarié qui ne peut y renoncer à l'avance, ni aussi longtemps que la relation de travail et donc le lien de dépendance qui la caractérise est en cours. Seules les renonciations postérieures à la fin de la relation de travail, à un moment où le salarié se trouve de nouveau sur pied d'égalité avec l'employeur, sont valables. Transiger pour un montant de EUR 14.000.- au total alors que des montants excédant les 110.000 EUR étaient encore dus à M. PERSONNE1.) le jour 15de la signature de la transaction constitue nécessairement l'absence de concession faite par M. PERSONNE1.) et par voie de conséquence, une asymétrie certaine et anormale au profit de l'Employeur, et la Cour d'appel aurait dû de ce chef être déclarer nulle et sans effet la transaction signée par M. PERSONNE1.).
Enfin, il est important de rappeler que pour apprécier les concessions réciproques des parties dans le cadre de la transaction et l'existence d'une éventuelle asymétrie financière, il faut se placer au moment de la signature du contrat. La Cour d'appel aurait du se référer aux prétentions des parties au moment de la signature de la transaction, ce qu'elle n'a pas fait.
La Cour aurait dû ainsi se placer au moment de la signature de la transaction pour apprécier les concessions réciproques et constater que la transaction prévoyait la renonciation à toutes ses prétentions, notamment aux montants légalement dus, en contrepartie d'une indemnité transactionnelle faible, d'un montant de 14.000.-EUR et sans rapport avec les concessions faites par M. PERSONNE1.), et déclarer la transaction nulle pour défaut de concessions réciproques.
Dans tous les cas, M. PERSONNE1.) n'a jamais eu l'intention de renoncer à ses droits découlant des heures supplémentaires prestées qui constituent la rémunération en contrepartie d'un travail. Seul l'Employeur a cherché par tous les moyens à se prémunir des risques d'une condamnation tant pour le licenciement abusif, que pour les prétentions financières de son Salarié.
L'indemnité transactionnelle de EUR 14.000.- ne représente même pas deux mois et demi de salaire de sorte que la transaction extrajudiciaire présente nécessairement une asymétrie financière certaine et anormale au profit de l'Employeur.
A titre d’illustration, la Cour d’appel de Nancy a estimé que le versement d’une indemnité transactionnelle inférieure à un mois de salaire pour un salarié ayant plus de 4 ans d’ancienneté rendait nulle la transaction. Cette considération a été faite par les magistrats alors que l'indemnité transactionnelle avait été allouée au salarié en sus de tous ses droits légaux.
M. PERSONNE1.) qui avait 9 années d'ancienneté au jour du licenciement et de la signature de la transaction, a reçu 14.000.- EUR alors qu'au moins 67.000.-
EUR n'avaient pas été soldés par l'Employeur.
Conformément à l'article L. 211-27 du Code du travail, les heures supplémentaires sont payées au salarié à raison d'une heure supplémentaire augmentée de 40%. S'agissant des congés non pris, l'article L. 233-12 du Code du travail - qui est également impératif - prévoit que . Ces règles sont d'ordre public.
16Il est donc exclu qu'une indemnité transactionnelle inférieure à ce qui est dû légalement par l'Employeur en vertu des règles d'ordre public puisse représenter une concession.
La Cour d’appel aurait dû procéder à un contrôle des concessions pour constater que l'asymétrie financière est anormale et exclusivement au profit de l'Employeur au vu du montant transactionnel, ce qu'elle a omis de faire. ».
Réponse de la Cour A l’article 89 de la Constitution invoqué, entre autres, à l’appui du moyen, il y a lieu de substituer l’article 109 de la Constitution, dans sa version applicable depuis le 1er juillet 2023, partant au jour du prononcé de l’arrêt attaqué.
Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou un élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.
Le moyen articule, à la fois, la violation des articles 109 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile ayant trait à l’obligation faite au juge de motiver ses décisions, de répondre aux conclusions des parties et de ne pas se contredire, la violation des articles 53 et 54 du Nouveau Code de procédure civile faisant obligation au juge de statuer sur l’objet du litige tel que déterminé par les prétentions des parties, la violation des droits de la défense consacrés à l’article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantissant le droit à un procès équitable et la violation de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ayant trait au recours effectif, ainsi que la violation des articles 2044, 2048, 2049 et 2053 du Code civil, dispositions de fond régissant les transactions, partant plusieurs cas d’ouverture distincts.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure Il serait inéquitable de laisser à charge de la défenderesse en cassation sub 1) l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer l’indemnité de procédure sollicitée de 2.000 euros.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;
condamne le demandeur en cassation à payer à la défenderesse en cassation sub 1) une indemnité de procédure de 2.000 euros ;
17 le condamne aux frais et dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de la société en commandite simple KLEYR GRASSO, sur ses affirmations de droit.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence de l’avocat général Christian ENGEL et du greffier Daniel SCHROEDER.
18Conclusions du Parquet général dans l’affaire de cassation de PERSONNE1.) contre 1. la société anonyme SOCIETE1.), 2. l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, (CAS-2024-00045 du registre) Par mémoire déposé au greffe de la Cour supérieure de justice du Grand-Duché de Luxembourg le 4 avril 2024, PERSONNE1.) a introduit un pourvoi en cassation contre l’arrêt portant le numéro N° 155/23 - III - TRAV, contradictoirement rendu entre parties le 21 décembre 2023, par la Cour d’appel, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail.
Le demandeur en cassation a déposé un mémoire, signé par un avocat à la Cour, signifié le 3 avril 2024 aux parties adverses, antérieurement au dépôt du pourvoi, de sorte que le pourvoi est recevable pour avoir été introduit dans le délai1 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.
Maître Christian JUNGERS, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, représentant la société à responsabilité limitée KLEYR GRASSO GP, en sa qualité de gérant de la société en commandite simple KLEYR GRASSO, demeurant à Luxembourg, prise en sa qualité de mandataire de la société anonyme SOCIETE1.), a fait signifier le 29 mai 2024, à la partie demanderesse en cassation ainsi qu’à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg un mémoire en réponse et l’a déposé au greffe de la Cour supérieure de justice le 31 mai 2024.
Faits et rétroactes PERSONNE1.) a été au service de la société anonyme SOCIETE1.) suivant contrat de travail à durée indéterminée depuis le 1er avril 2010.
Le 5 avril 2019, la société anonyme SOCIETE1.) a procédé au licenciement, avec préavis, de PERSONNE1.).
A la suite de la remise en mains propres de la lettre de licenciement à PERSONNE1.), une transaction extrajudiciaire a été signée entre la société anonyme SOCIETE1.) et PERSONNE1.) le 5 avril 2019.
1 A défaut d’acte de notification de l’arrêt dont pourvoi, versé au dossier, il doit être admis qu’aucun délai n’a commencé à courir.
19 Par courrier du 9 avril 2019, PERSONNE1.) a sollicité la communication des motifs.
Par courrier du 3 mai 2019, la société anonyme SOCIETE1.) a refusé de communiquer les motifs du licenciement en invoquant la transaction signée.
PERSONNE1.) a contesté son licenciement par un courrier de son mandataire datant du 17 mai 2019.
Par requête du 14 juin 2019, PERSONNE1.) a saisi le tribunal du travail de Luxembourg d’une requête tendant à voir déclarer la transaction conclue entre parties en date du 5 avril 2019 nulle et de nul effet, à voir déclarer son licenciement avec préavis, intervenu le même jour, abusif et à voir condamner la société anonyme SOCIETE1.) à lui payer diverses indemnités de ce chef, ainsi qu’un montant à titre d’heures supplémentaires prestées.
Par jugement contradictoire du 26 octobre 2020, le tribunal du travail de Luxembourg a déclaré valable la transaction du 5 avril 2019 intervenue entre parties et a déclaré irrecevable la demande de PERSONNE1.) tendant à voir déclarer son licenciement avec préavis abusif.
Par même jugement, la demande reconventionnelle de l’employeur, celle de l’ÉTAT DU GRAND-DUCHÉ DE LUXEMBOURG, pris en sa qualité de gestionnaire du Fonds pour l’emploi, ainsi que les demandes respectives des parties en allocation d’une indemnité de procédure, ont été rejetées comme non fondées.
PERSONNE1.) a interjeté appel dudit jugement par exploit d’huissier du 2 décembre 2020.
Par arrêt du 21 décembre 2023, la Cour d’appel, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail, a confirmé le jugement du tribunal du travail de Luxembourg du 26 octobre 2020.
Sur l’unique moyen de cassation Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi précitée du 18 février 1885, un moyen ou un élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.
L’unique moyen de cassation articule des cas d’ouverture distincts, en reprochant aux juges d’appel une violation de la loi, un défaut de réponse à conclusions et une dénaturation de l’écrit, en l’espèce des conclusions du demandeur en cassation, de telle sorte que le moyen est à déclarer irrecevable pour constituer un moyen complexe.
En ordre subsidiaire :
En substance, le demandeur en cassation reproche à la Cour d’appel, sous le couvert des différents cas d’ouverture visés, d’avoir décidé qu’en présence de concessions réciproques, la transaction du 5 avril 2019 était valable, sans se prononcer sur le litige que cette transaction avait pour objet de clore alors que les magistrats d’appel auraient dû rechercher si les prétentions du demandeur en cassation en rapport avec le litige en question étaient fondées ou non.
20 La violation des articles 2044, 2048, 2029 et 2053 du Code civil Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel d’avoir violé la loi, plus précisément les dispositions textuelles précitées en décidant que les concessions réciproques faites aux termes de la transaction litigieuse sont réelles et d’une importance suffisante, sans présenter de déséquilibre manifeste entre elles, et que la transaction du 5 avril 2019 est ainsi valable, alors que les magistrats d’appel auraient dû rechercher si les prétentions du demandeur en cassation au sujet d’une contestation née ou à naître sur le licenciement et au sujet du montant des indemnités qui lui étaient légalement dues, étaient justifiées avant de se prononcer sur la validité de la transaction en question.
Le moyen reprend, sous le couvert des différentes dispositions légales visées, le même grief, à savoir celui que les juges d’appel auraient retenu à tort que le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d’une transaction, trancher le litige qui oppose les parties et que la transaction a pour objet de clore.
L'article 2052, alinéa 1er, du Code civil dispose que les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.
Cette disposition est directement reprise de l’article 2052, alinéa 1er, du Code civil français.
L’interprétation de ce dernier par la Cour de cassation française pourra donc constituer une source d’inspiration utile.
Aux termes de la jurisprudence constante de la Cour de cassation française, pour déterminer la réalité des concessions, le juge ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve2.
La Cour d'appel ne pouvait pas procéder à la recherche sollicitée sur le caractère justifié des prétentions du demandeur en cassation. En retenant que la possibilité de voir déclarer le licenciement abusif était certes envisageable mais non certaine et que les revendications du demandeur en cassation par rapport aux indemnités réclamées étaient contestées pour conclure que le paiement d’une indemnité transactionnelle de 14.000 euros en sus des salaires durant la période d’essai et de l’indemnité de départ constitue une concession réelle et d’une importance suffisante par rapport à celles faites par le salarié, la Cour d’appel a suffi aux exigences de la loi en vertu desquelles une transaction valable suppose des concessions réciproques.
Sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, le moyen du demandeur en cassation ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par la Cour d'appel des éléments au vu desquels elle a estimé que des concessions réciproques avaient été faites.
Il en suit que le moyen est non fondé sinon ne saurait être accueilli.
Le défaut de réponse à conclusions 2En ce sens : Cour de cassation, chambre sociale, 7 juillet 2015, Pourvoi n° 14-12.247; Cour de cassation, chambre sociale, 11 septembre 2024, pourvoi n°22-18.438 21Il est reproché aux magistrats d’appel ne pas avoir répondu au moyen du demandeur en cassation sur l’absence de concessions réciproques tiré de ce que le montant transactionnel octroyé par l’employeur ne couvrait même pas un dixième du montant des heures supplémentaires prétendument dû au demandeur en cassation et tiré de ce que le montant transactionnel alloué en échange de sa renonciation à tous droits et actions excluait que la transaction puisse s’analyser en une concession.
Contrairement à ce qui est critiqué par le demandeur en cassation, la Cour d’appel a formellement pris position par rapport au moyen comme suit :
« La juridiction de première instance a rappelé à juste titre que la transaction, pour être valide, suppose - outre l’adhésion consciente des contractants - que les parties se fassent des concessions réciproques qui ne doivent pas être dérisoires, ni présenter de déséquilibre manifeste entre elles.
La possibilité de voir déclarer abusif le licenciement avec préavis était, au moment de la conclusion de la transaction, certes envisageable, mais non pas certaine. De même, les revendications de l’appelant par rapport aux indemnités pour heures supplémentaires prestées et congés non pris étaient contestées.
Les droits auxquels le salarié soutient avoir renoncé étaient dès lors incertains.
Le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d’une transaction, rechercher, si ces prétentions étaient justifiées (cf. Cass. fr. soc. 27 mars 1996, n°92-40.448, Bull. civ. V, n°124, D. 1996, IR 108, JCP 1996, II. 22711), ni, sans heurter l’autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l’examen des éléments de fait et de preuve (cf. Cass. fr. soc. 21 mai 1997, n°95-45.038, Bull.
civ. V, n°185, D. 1997, IR 146, JCP 1997, II. 22926).
En effet, en transigeant les parties renoncent à exercer leur action en justice. Elles acceptent de ne pas soumettre leurs prétentions respectives à une vérification juridictionnelle.
Pour apprécier la réalité de concessions, le juge n’a donc pas à apprécier si les prétentions abandonnées correspondaient à des droits effectifs.
(…) Eu égard aux éléments du dossier, la Cour rejoint le tribunal du travail en ce qu’il a considéré que les concessions réciproques – d’un côté, paiement d’une indemnité transactionnelle forfaitaire de 14.000 euros en sus des salaires redus pendant la période de préavis et de l’indemnité de départ d’un côté, ainsi que, de l’autre côté, acceptation de ce montant pour solde de tout compte – sont en l’espèce réelles et d’une importance suffisante, sans présenter de déséquilibre manifeste entre elles et que la transaction du 5 avril 2019 est, en conséquence, parfaitement valable».
Il en suit que le moyen manque en fait.
À titre subsidiaire, il n’est pas fondé. Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs, c’est-à-dire un vice de forme. Une décision judiciaire est régulière en la forme, dès 22lors qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré, ce qui est le cas en l’espèce.
La méconnaissance du droit à un procès équitable et la violation de l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel de ne pas s’être prononcés sur les moyens et éléments de preuve invoqués par chacune des parties et d’avoir ainsi, en violation de de l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, méconnu le droit du demandeur en cassation à ce que sa cause soit équitablement entendue par un tribunal impartial et indépendant.
Le moyen procède d’une lecture erronée de la décision des magistrats d’appel, qui ont à bon droit, conformément à ce qui a été développé précédemment, refusé de trancher le litige que la transaction litigieuse avait pour objet de clore en s’abstenant de se livrer à l'examen des éléments de fait et de preuve, invoqués à ce sujet.
En procédant de la sorte les magistrats d’appel ont mis en œuvre la règle de droit applicable au litige et n’ont pas violé le droit du demandeur en cassation à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial et indépendant.
Le moyen n’est partant pas fondé.
La méconnaissance du droit à un recours effectif prévu à l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel de ne pas s’être prononcés sur les moyens et éléments de preuve invoqués par chacune des parties et d’avoir ainsi, en violation de de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, méconnu son droit à un procès équitable.
La procédure de droit du travail impliquant le demandeur en cassation ne présente aucun lien avec la mise en œuvre par le Luxembourg du droit de l’Union européenne, de sorte que le grief tiré de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne est étranger au litige.
Le moyen est partant inopérant.
La dénaturation des conclusions du demandeur en cassation.
Le demandeur en cassation, aux termes de développements à l’appui de l’énoncé de son moyen, lesquels sont quelque peu désordonnés et difficilement intelligibles au soussigné, reproche aux magistrats d’appel d’avoir dénaturé « les faits et les conclusions de M. PERSONNE1.) ».
D’une part, la théorie de la dénaturation, qui a été créée de façon prétorienne par la Cour de cassation française en 1872 sur le fondement de l’article 1134 du Code civil3, n’a été reprise ni en Belgique ni au Luxembourg.
3 J. Boré, La cassation en matière civile, éd. 2023/2024, n° 79.05 ainsi que les références y citées 23 D’autre part, à supposer qu’elle puisse être appliquée, elle serait néanmoins inapplicable en l’espèce.
Le demandeur en cassation déduit de l’énonciation d’une règle de droit par les magistrats d’appel une dénaturation par la Cour d’appel de ses écrits, c’est-à-dire une méconnaissance du sens de ses conclusions.
Or, la Cour d’appel a uniquement rappelé le principe selon lequel une transaction peut être valablement conclue pour régler à l’amiable un différend en cours d’exécution d’un contrat de travail. Le soussigné n’est pas en mesure de cerner une méconnaissance du sens des conclusions d’appel du demandeur en cassation dans l’énonciation de cette règle générale.
Le moyen n’est donc pas fondé.
La contrariété des motifs Sous le grief non fondé de contrariété des motifs, le moyen du demandeur en cassation ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par la Cour d'appel des éléments au vu desquels elle a estimé que des concessions réciproques avaient été faites.
Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.
Pour le Procureur général d’Etat, L’avocat général, Bob PIRON 24