N° 07 / 2025 pénal du 16.01.2025 Not. 11330/18/CD Numéro CAS-2024-00068 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, seize janvier deux mille vingt-cinq, sur le pourvoi de PERSONNE1.), née le DATE1.) à ADRESSE1.), demeurant à D-ADRESSE2.), prévenue, demanderesse en cassation, comparant par Maître Philippe PENNING, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, assisté de Rechtsanwalt Oliver BRAND, en présence du Ministère public, l’arrêt qui suit :
Vu l’arrêt attaqué rendu le 26 mars 2024 sous le numéro 102/24 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;
Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Christian BIEWER, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Philippe PENNING, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 26 avril 2024 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;
Vu le mémoire en cassation déposé le 27 mai 2024 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions du premier avocat général Serge WAGNER.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné la demanderesse en cassation du chef d’infractions aux articles 379bis, paragraphe 5, 382-1, 382-2, 506-1 et 506-4 du Code pénal à une peine d’emprisonnement avec sursis ainsi qu’à une amende et avait prononcé à son encontre pour la durée de cinq ans l’interdiction de certains droits énumérés à l’article 11 du Code pénal, dont l’interdiction de tenir école, d’enseigner et d’être employée dans un établissement d’enseignement.
La Cour d’appel, réformant, a dit qu’il n’y avait pas lieu de retenir les circonstances aggravantes prévues à l’article 382-2 du Code pénal, a augmenté la peine d’emprisonnement avec sursis et l’amende et a confirmé le jugement pour le surplus.
Sur les deux premiers moyens de cassation réunis Enoncé des moyens le premier, « Pour violation de l’article 78 du code de procédure pénale, En ce que l’arrêt attaqué forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que dispense de l’interdiction d’enseigner pour déroger exceptionnellement à l’interdiction obligatoire d’enseigner pendant cinq ans, ce d’autant plus que PERSONNE1.) dispose d’une formation universitaire en Roumanie, exerce un travail fixe et rémunéré en Allemagne et ne parle pas la langue luxembourgeoise, son seul désir d’enseigner au Luxembourg ne suffisent pas à justifier l’exception demandée. » Alors que S’il est vrai qu’en vertu de l’article 78 (2) cpp, la Cour d’appel peut souverainement ou non remettre l’interdiction des droits mentionnés à l’article 11 2 du code pénal, elle ne peut pas retenir qu’elle ne voit pas la circonstance atténuante pouvant justifier la demande de la dispense de la requérante, alors que la requérante bénéficie d’ores et déjà de circonstances atténuantes, qui lui ont été accordées par les juridictions d’instruction au moment du renvoi, En effet, en l’espèce l’ordonnance de renvoi n°832/21 du 19 mai 2021 de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmée par l’arrêt d’appel du n°1128/21 du 14 décembre 2021 de la chambre du conseil de la Cour d’appel, a retenu qu’il existait des circonstances atténuantes en faveur de la requérante consistant dans l’absence d’antécédents judiciaires spécifiques.
Et cette décision ne peut pas être ignorée par les juges d’appel, de sorte que l’existence de circonstances atténuantes était définitivement acquise à la requérante, Ainsi, pour appliquer l’article 78 (2) cpp, la Cour d’appel n’avait pas à rechercher de nouvelles circonstances atténuantes alors qu’il est inconvenable que des circonstances atténuantes acquises soient appliquées à une partie de la peine et non pas à une autre partie de la peine, sans préjudice de la faculté laissée aux juges de déterminer le taux de la peine à prononcer dans la fourchette légale prévue, Ce faisant, en disant qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes en faveur de la requérante, elle a violé l’article 78 (2) du cpp. » et le deuxième, « Pour violation de l’autorité de chose jugée résultant de l’arrêt de renvoi.
En ce que l’arrêt attaqué forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que dispense de l’interdiction d’enseigner pour déroger exceptionnellement à l’interdiction obligatoire d’enseigner pendant cinq ans, ce d’autant plus que PERSONNE1.) dispose d’une formation universitaire en Roumanie, exerce un travail fixe et rémunéré en Allemagne et ne parle pas la langue luxembourgeoise, son seul désir d’enseigner au Luxembourg ne suffisent pas à justifier l’exception demandée. » 3 Alors que S’il est vrai qu’en vertu de l’article 78 (2) cpp, la Cour d’appel peut souverainement ou non remettre l’interdiction des droits mentionnés à l’article 11 du code pénal, elle ne peut pas retenir qu’elle ne voit pas la circonstance atténuantes pouvant justifier la demande de la dispense de la requérante, alors que la requérante bénéficie d’ores et déjà de circonstances atténuantes, qui lui ont été accordées par les juridictions d’instructions au moment du renvoi, En effet, en l’espèce l’ordonnance de renvoi n°832/21 du 19 mai 2021 de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmée par l’arrêt d’appel du n°1128/21 du 14 décembre 2021 de la chambre du conseil de la cour d’appel, a retenu qu’il existait des circonstances atténuantes en faveur de la requérante consistant dans l’absence d’antécédents judiciaires spécifiques.
Et cette décision qui a autorité de chose jugée ne peut pas être ignorée par les juges d’appel, de sorte que l’existence de circonstances atténuantes était définitivement acquise à la requérante, Ainsi, la Cour d’appel n’avait pas à rechercher de nouvelles circonstance atténuantes pour appliquer l’article 78 (2) cpp, alors qu’il est inconvenable que des circonstances atténuantes acquises soient appliquées à une partie de la peine et non pas à une autre partie de la peine, sans préjudice de la faculté laissée au juges de déterminer le taux de la peine à prononcer dans la fourchette légale prévue, Ce faisant, disant qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes en faveur de la requérante, elle a violé l’autorité de chose jugée découlant dudit arrêt de renvoi. ».
Réponse de la Cour La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé l’article 78 du Code de procédure pénale et le principe de l’autorité de la chose jugée en ayant retenu qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes justifiant la dispense de l’interdiction d’enseigner prévue par l’article 11 du Code pénal, alors que l’ordonnance de renvoi avait retenu qu’il existait des circonstances atténuantes en faveur de la demanderesse en cassation.
A l’article 78 du Code de procédure pénale erronément invoqué par la demanderesse en cassation, il y a lieu de substituer l’article 78 du Code pénal, selon lequel les juges peuvent, s’il existe des circonstances atténuantes, remettre l’interdiction des droits mentionnés à l’article 11 du Code pénal lorsqu’elle est ordonnée.
Selon l’article 381 du Code pénal, dans les cas prévus par les articles 379 et 379bis, les coupables sont en outre condamnés à l’interdiction des droits spécifiés aux points 1, 2, 3, 4, 5 et 7 de l’article 11 du Code pénal.
La décriminalisation et le renvoi devant une chambre correctionnelle par application de circonstances atténuantes en application de l’article 130-1 du Code deprocédure pénale, lient les juges du fond quant à leur compétence, mais ne les lient pas quant à l’existence de circonstances atténuantes justifiant, dans le cadre de la détermination de la peine en application de l’article 78 du Code pénal, une diminution de la peine ou une dispense des interdictions prévues à l’article 11 dudit code.
Il s’ensuit que les deux premiers moyens de cassation ne sont pas fondés.
Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Pour violation de l’article 7-2 du Code de procédure pénale et de l’article 66 alinéa 3 du code pénal, En ce que l’arrêt attaqué forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que personne, la publicité, le racolage, le transport vers le lieu de la prostitution et le transport du gain destiné au proxénète, constituent les éléments de l’infraction du proxénétisme et ont, en l’espèce, tous été localisés sur le territoire luxembourgeois. » (page 13) Et que SOCIETE1.) (Pv 109, du 3 janvier 2013) qui a assisté son compagnon PERSONNE2.) dans la direction et dans l’exploitation du SOCIETE1.). Elle s’occupait du recrutement des prostituées, parlant la langue roumaine.
PERSONNE3.) a fourni des explications quant au fonctionnement du SOCIETE1.) et du Service "Escort" aux filles intéressées. » (page 30) Alors que La cour d’appel retient à bon droit que si un des actes caractérisant l’infraction a été commis au Luxembourg, les tribunaux luxembourgeois sont compétents, 5 De même, c’est à bon droit qu’elle fait le constat que des actes de prostitution ont eu lieu au Luxembourg, De plus, elle retient qu’ont été commis au Luxembourg des actes en vue d’aider la prostitution, notamment par l’encadrement, la publicité, le racolage, le transport des prostitués et celui du gain.
Et il est également constant en cause que la requérante n’a commis elle-
même au Luxembourg aucun acte caractérisant les infractions, Et il est également constant en cause que la requérante ne participait ni à l’organisation du service , ni à la prise de rdv, ni à l‘organisation des transports y relatifs, ni à l’encaissement des gains en cette provenance, Or, la Cour d’appel se borne à retenir que la requérante était responsable du recrutement en Allemagne des prostitués tout en leur fournissant les explications du fonctionnement, sans pour autant caractériser en quoi ces faits commis dans une intention parfaitement légale en Allemagne, constituent une aide sans leur assistance le délit n’eût pu être commis au Luxembourg, Dès lors, en examinant pas en quoi cette aide était indispensable pour la réalisation au Luxembourg de la prostitution, la cour d’appel a violé l’article 7-2 du Code de procédure pénale et l’article 66 alinéa 3 du code pénal. ».
Réponse de la Cour La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir retenu leur compétence sans examiner en quoi les actes posés par elle à l’étranger étaient indispensables à la réalisation des infractions au Grand-Duché de Luxembourg.
En retenant « L’article 66 alinéa 3 du Code pénal punit comme auteurs de l’infraction ceux qui, par un fait quelconque, auront prêté pour l’exécution une aide telle que, sans leur assistance, le crime ou le délit n’eût pu être commis.
Le coopérateur direct ou co-auteur est l’agent qui, bien que ne réalisant pas lui-même l’acte incriminé, y prend directement part. Le fait délictueux peut ainsi être attribué à une personne qui ne l’a pas personnellement exécuté complètement, mais en a participé sous condition qu’il y a eu :
* un acte de participation répondant à l’un des modes énumérés par la loi ;
* une réalisation matérielle de l’infraction principale ou de sa tentative ;
* un lien adéquat effectif entre le mode de participation et la réalisation de l’infraction ou de sa tentative ;
* une incrimination autorisant la poursuite des participants ;
6 * une intention de participer à la réalisation de l’infraction principale: avoir en connaissance de cause l’intention de participer (Hennau et Verhaegen, Droit pénal général, no 297 et suiv. p. 255 - 266).
La participation par aide ou assistance peut en effet se manifester sous les formes les plus diverses, aussi le législateur, pour les embrasser toutes, s’est-il dans l’article 66 du Code pénal servi des termes généraux "par un fait quelconque" (cf.
Cour d’appel, 5 avril 1968, P. 19. 314). Il suffit que l’aide ait été principale en ce sens que, sans elle, l’infraction n’eût pu être commise "telle qu’elle a été commise".
Le législateur n’entend tout d’abord pas incriminer et sanctionner le concours des personnes qui fournissent à des prostituées des services que celles-ci peuvent recevoir en dehors de leur activité de prostitution, sous peine de les priver de tous les actes de la vie courante et de commettre l’ostracisme à l’égard des prostituées.
Dans cet ordre d’idée, mais dans le cadre d’une société ou d’un établissement, la corréité du salarié ne peut s’induire de l’existence de son contrat de travail dans le cadre duquel il exécute une tâche anodine sans relation avec l’activité criminelle.
Si les salariés sont ainsi en principe exemptés de toute responsabilité lorsque leur travail est objectivement anodin et vise le travail normal de simple salarié, leur activité devient, par contre, punissable lorsqu’ils adhèrent au projet et contribuent en connaissance de cause et volontairement à l’action illégale de leur employeur.
Il y a en effet lieu de distinguer entre le salarié neutre exécutant une tâche commune, secondaire et indifférente au délit commis dans ou par l’entreprise et le salarié dont l’attitude implique une véritable adhésion morale à l’activité criminelle et qui fournit des actes d’aides même si ceux-ci consistent dans l’exécution des tâches prévues dans son contrat, afin de faire fonctionner l’activité criminelle de son employeur.
Le "salarié coopérateur" qui entend apporter par son travail, même sous forme d’un contrat de travail régulier et conforme au droit national, en connaissance de cause, un soutien à son employeur dans son activité criminelle, s’associe à cette action criminelle à la fois matériellement et psychologiquement, l’employeur et le salarié agissant "de concert".
Il joue un rôle dans la commission de l’infraction, sans néanmoins réaliser lui-même tous les éléments constitutifs qui la caractérisent. Son comportement personnel est en quelque sorte enchevêtré dans une conduite collective.
Sont ainsi co-auteurs, les salariés dont les actes matériels exécutés et fournis constituent une aide à l’égard de leur employeur, auteur principal, puisque l’activité criminelle de celui-ci s’en trouve facilité. L’employé dont on peut estimer que la présence et son aide fournit en exécution de son contrat de travail, a joué un rôle 7 causal dans la réalisation de l’infraction et son activité implique une adhésion morale à la commission de l’infraction.
Participer à l’exploitation d’un service "Escort" englobe tous les salariés qui, sous forme de participation, quel qu’en soit le titre juridique ou la dénomination interne donnée, comme les chargé de la direction, de l’administration, de la gestion, comme cheffe de personnel ou comme chauffeur, ont un intérêt ou ont joué un rôle dans son fonctionnement puisqu’ils interviennent efficacement dans la réalisation du service "Escort" et ont entendu apporter leur concours volontairement et en connaissance de cause, à leur employeur.
En l’espèce l’activité de l’employeur des prévenus consistait dans l’exploitation d’un service "escorte/visite à domicile" vers le Luxembourg, organisé à partir de la maison de prostitution SOCIETE1.).
L’organisation du service "ENSEIGNE1.)", regroupant un pool de prostituées toujours renouvelé en provenance de quatre clubs, traduit sans équivoque l’existence d’une entente entre PERSONNE2.), le "patron" et exploitant, et les employées "sur place", PERSONNE4.), PERSONNE1.) et PERSONNE5.), garantissant l’exploitation du service "ENSEIGNE1.)" et l’optimisation des profits qui pouvaient en être retirés. Elles ont assuré la continuation du service après l’incarcération de PERSONNE2.) le 28 mai 2018, ayant délégué dans un premier temps pendant trois mois la direction de ses quatre établissements au juriste et homme de confiance PERSONNE6.), pour le remplacer après trois mois par PERSONNE4.), jusqu’au mois de janvier 2019.
Les prévenus ont contribué au fonctionnement du service d'escorte "ENSEIGNE1.)", à sa promotion au Luxembourg sous forme de publicités affichées et radiodiffusées au Luxembourg, à l’intermédiation au Luxembourg des contacts avec les prostituées, à l’organisation du cheminement de la prostitué sur le territoire luxembourgeois à la destination au Luxembourg, à garantir le type physique choisi par le client, à garanti de la ponctualité et de présence et à assurer la fourniture de la prestation d’un de service de base et en cas de souhait, avec fourniture d’une fille prête à prester le service sexuel spécial réclamé ou d’assouvir, respectivement de subir, les phantasmes sexuels désignés à l’avance par le client prêt à payer le surplus de prix réclamé par la femme.
(…) PERSONNE1.) se décrit comme exploitante ("Betreiberin") du SOCIETE1.) (pv 1009, du 3 janvier 2013) qui a assisté son compagnon PERSONNE2.) dans la direction et dans l’exploitation du SOCIETE1.). Elle s’occupait du recrutement des prostituées, parlant la langue roumaine. Elle a fourni les explications quant au fonctionnement du SOCIETE1.) et du service "Escort" aux filles intéressées.
Dans 107 chats de discussion, PERSONNE1.) dirige et organise le transfert entre les différents clubs des femmes (Rapport 1er août 2018 et rapport du 28 octobre 2019).
(…) Tous les prévenus ont fourni une aide essentielle, dépassant la simple assistance, peu importe à quel titre. Cette aide a été directe, personnelle et simultanée à l’exécution de l’infraction au Luxembourg et indispensable à PERSONNE2.), afin de pouvoir exécuter et continuer, après son incarcération à prester le service d'escorte "ENSEIGNE1.)".
(…) La distribution des rôles dans le cadre d’une activité à tâches multiples, n’empêche pas non plus le salarié occupé, soit dans la gestion administrative, organisationnelle ou personnelle, soit comme chauffeur, d’avoir la qualité d’auteur, étant donné que l’article 66 du Code pénal précise que l’auteur contribue "par un acte quelconque" à l’infraction.
(…) Le service d'escorte "ENSEIGNE1.)" n’a pu fonctionner avec le succès dégagé par l’enquête que grâce à la contribution consciente et volontaire de chacun des six salariés et prévenus actuels, par sa tâche quotidienne précise contribuant et concourant à faire fonctionner le service à l’instar d’une roue dentée qui à l’intérieur du mécanisme d’horlogerie, contribue, quel que soit sa taille, à faire fonctionner l’horloge. », les juges d’appel ont caractérisé la participation indispensable de la demanderesse en cassation aux infractions commises sur le territoire du Grand-
Duché de Luxembourg.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur le quatrième moyen de cassation Enoncé du moyen « Pour violation de l’article 7 alinéa 1 de la Convention européenne des droits de l’homme : En ce que l’arrêt attaqué forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
9 (…) » Aux motifs que tâche commune, secondaire et indifférente au délit commis dans ou par l’entreprise et le salarié dont l’attitude implique une véritable adhésion morale à l’activité criminelle et qui fournit des actes d’aides même si ceux-ci consistent dans l’exécution des tâches prévues dans son contrat, afin de faire fonctionner l’activité criminelle de son employeur.
Le "salarié coopérateur" qui entend apporter par son travail, même sous forme d’un contrat de travail régulier et conforme au droit national, en connaissance de cause, un soutien à son employeur dans son activité criminelle, s’associe à cette action criminelle à la fois matériellement et psychologiquement, l’employeur et le salarié agissant "de concert".
Il joue un rôle dans la commission de l’infraction, sans néanmoins réaliser lui-même tous les éléments constitutifs qui le caractérisent. Son comportement personnel est en quelque sorte enchevêtré dans une conduite collective. » (page 28-29) Et que autorités luxembourgeoises de la légalité du service au Luxembourg. » (page 32) Alors que Il est constant en cause que la requérante a effectué toute prestation de travail dans le cadre de son contrat de travail conclu avec le SOCIETE1.) exclusivement sur le territoire allemand, et qu’elle n’a commis aucun acte qui pourrait, d’une manière ou d’une autre, constituer l’élément matériel de l’article 379 bis, paragraphe 5, CP, sur le territoire luxembourgeois.
Pour établir sa compétence internationale, le tribunal combine l’ensemble des faits présumées de tous les prévenus avec les actes que PERSONNE2.), poursuivi séparément, a accomplis en toute indépendance en sa qualité de propriétaire du SOCIETE1.) et donc aussi d’employeur de la requérante, Or, le Tribunal méconnaît ainsi qu’il n’existe aucune obligation légale pour un travailleur qui exerce son activité exclusivement sur le territoire d’un seul Etat, de suivre et d’analyser les activités de son employeur.
Notamment, il n’y a pas d’obligation juridique ou légale pour le travailleur de vérifier et de constater si son employeur utilise le résultat de sa prestation de travail effectuée sur le territoire national dans un autre État, et si l’utilisation du résultat de la prestation de travail dans un autre État est conforme à la législation en vigueur dans cet État.
10 De même, il n’existe aucune obligation juridique ou légale pour le travailleur de se renseigner de manière autonome auprès des autorités d’un autre Etat pour savoir si l’activité de l’employeur y est légale.
Il découle uniquement de l’article 7, paragraphe 1, de la ConvEDH que l'acteur (en l’occurrence le travailleur) doit simplement veiller à ce que son activité n’enfreigne pas le droit national.
Toute obligation allant au-delà de cette mesure est illégale et ne peut servir de base à une quelconque responsabilité pénale, Dès lors, en constatant, d’une part, que les activités de la requérante ont été exercées exclusivement sur le territoire allemand et y étaient, selon la situation juridique en vigueur, légales sans restriction et donc non punissables, mais en admettant, d’autre part, l’existence d'une obligation juridique de se renseigner auprès des autorités d’un État étranger pour savoir si les actes de l’employeur à l’étranger sont conformes à la situation juridique en vigueur dans cet État, et en considérant le non-respect d’une telle comme fondement à une infraction pénale ou comme une violation de la loi, tout en excluant l’ignorance de la loi étrangère et la justification qui en découle, le Tribunal a violé l’article 7, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’homme. ».
Réponse de la Cour La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé la disposition visée au moyen en ayant retenu à son encontre une obligation de se renseigner auprès des autorités du Grand-Duché de Luxembourg pour savoir si les activités qu’y exerçait son employeur étaient conformes à la législation luxembourgeoise, alors qu’elle avait presté son travail exclusivement sur le territoire allemand où de tels actes ne sont pas répréhensibles.
Le principe de la légalité des délits et des peines, consacré par la disposition visée au moyen, est étranger au grief formulé par la demanderesse en cassation qui a trait à son ignorance de la loi luxembourgeoise.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur le cinquième moyen de cassation Enoncé du moyen « Blanchiment Pour violation des articles 506-1 et 506-4 du Code pénal ;
En ce que l’arrêt attaqué forme ;
11 (…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que dernière et ne peut être considéré comme son salaire personnel duquel elle dispose pourrait disposer librement et entièrement et moyennant lequel elle règle ses dépenses et de la vie courante. Elle ne disposait d’ailleurs aucune latitude d’adapter ses prix selon son propre gré suivant la situation de fortune du client, mais le tarif était préfixé et contrôlé par les exploitants du Club.
Le montant payé par le client a dû être ramené intégralement au SOCIETE1.) et la totalité de la somme gagnée, y compris le prix des prestations spécialement commandée, a dû être remise dans une boîte individuelle prévue à cet effet.
En fin de journée, le récipient a été ouvert et la somme totale vérifiée à l’aide des fiches de travail et le contenu partagé selon la clé de répartition prédéfinie, soit 50% pour la fille et 50% pour le SOCIETE1.) tandis que le prix des "extras" prestés et mentionnés sur la fiche de travail et facturé suivant le tarif fixé par le SOCIETE1.), remis intégralement à la fille.
Les prostituées ont donc transporté le produit du proxénétisme pour le compte des exploitants du club. » (page 37) Alors que En considérant, sans constater concrètement les faits correspondants, que les prostituées ont transporté le produit de la vente en Allemagne pour les exploitants du SOCIETE1.) et non pour la requérante, la cour d’appel fait déjà une application erronée du droit civil luxembourgeois.
En effet, sur le territoire luxembourgeois, il n’est jamais arrivé qu’un client paie directement ou indirectement la rémunération convenue avec la travailleuse du sexe à l’exploitant du club PERSONNE2.) ou lui transfère la propriété des billets de banque, pas plus que la travailleuse du sexe n’a transféré elle-même la propriété des billets de banque à l’exploitant PERSONNE2.).
Si tant est qu’il y ait eu un transfert de propriété de la prostituée à PERSONNE2.), il ne pourrait être vu que dans le dépôt - sur le sol allemand - dans le casier du SOCIETE1.). Dans ce cas, la volonté de la travailleuse du sexe de transférer la propriété à PERSONNE2.), qui est obligatoire selon le droit allemand, fait défaut.
En l’absence d’un transfert de propriété ou même de possession des travailleuses du sexe à PERSONNE2.) ou à une personne mandatée par ce dernier 12 en ce qui concerne le salaire de la prostituée sur le territoire luxembourgeois, les caractéristiques légales de l’élément matériel du blanchiment d’argent selon les articles 506-1 et 506-4 CP font déjà défaut.
Par conséquent, la cour d’appel a violé les dispositions légales des articles 506-1 et 506-4 du Code pénal. ».
Réponse de la Cour La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé les dispositions visées au moyen en ayant retenu à son encontre l’infraction de blanchiment, alors que l’argent que les travailleuses du sexe percevaient grâce à leurs activités au Luxembourg leur aurait appartenu et que ces dernières n’en auraient jamais transféré la propriété aux exploitants du SOCIETE1.).
Sous le couvert du grief tiré de la violation des dispositions visées au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de l’ensemble des éléments de fait leur soumis qui les ont amenés à retenir que les prostituées ont transporté le produit du proxénétisme pour le compte des exploitants du SOCIETE1.), dont la demanderesse en cassation, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Il s’ensuit que le moyen ne saurait être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;
condamne la demanderesse en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux du Ministère public étant liquidés à 19,75 euros.
Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, seize janvier deux mille vingt-cinq, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :
Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence de l’avocat général Christian ENGEL et du greffier Daniel SCHROEDER.
Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) en présence du ministère public No CAS-2024-00068 du registre
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Par déclaration faite le 26 avril 2024 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Christian BIEWER, en remplacement de Maître Philippe PENNING, tous les deux avocats à la Cour à Luxembourg, a formé pour compte et au nom de PERSONNE1.) un recours en cassation contre un arrêt n° 102/24 V. rendu le 26 mars 2024 par la Cour d’appel siégeant en matière correctionnelle.
Cette déclaration de recours a été suivie le 27 mai 2024 par le dépôt du mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.
Le pourvoi a été déclaré dans les formes et délais de la loi. De même le mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 a été déposé dans les formes et délais y imposés.1 Faits et rétroactes :
Par jugement No 695/2023 du 9 mars 2023 d’une chambre correctionnelle du Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, PERSONNE1.) a été condamnée, ensemble avec d’autres personnes, du chef des infractions de proxénétisme, de traite des êtres humains aggravée et de blanchiment de fonds en provenance des infractions de proxénétisme et de traite des êtres humains à une peine d’emprisonnement de 18 mois assortie intégralement du sursis simple, et à une amende de 1.000 euros, à l’interdiction de tenir un débit de boissons pendant 5 ans, d’y participer ou d’y être employée ainsi qu’à l’interdiction de certains droits pour une durée de 5 ans.
1 Le délai pour déposer le mémoire en cassation a expiré le dimanche 26 mai 2024, de sorte qu’il a été reporté au lundi 27 mai 2024 À la suite de l’appel interjeté par PERSONNE1.) et par le ministère public contre ce jugement, la Cour d’appel, par arrêt N° 102/24 V. du 26 mars 2024, a, par réformation, dit qu’il n’y a pas lieu de retenir les circonstances aggravantes prévues à l’article 382-2 (1) et (2) du Code pénal et a condamné PERSONNE1.) du chef des infractions retenues à sa charge à une peine d’emprisonnement de 36 mois assortie intégralement du sursis simple et à une amende correctionnelle de 2.500 euros.
La Cour d’appel a encore restitué un téléphone portable à PERSONNE1.).
Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.
Il est surprenant de constater que les deux premiers moyens de cassation ont trait à la peine accessoire prononcée alors que les moyens suivants concernent la compétence des juridictions luxembourgeoises et les infractions retenues à la charge de la demanderesse en cassation.
Ceci étant dit, le soussigné analyse les moyens tels qu’ils ont été présentés.
Quant aux deux premiers moyens de cassation réunis :
« 1. 1ER MOYEN DE CASSATION « VIOLATION ARTICLE 78 CPP » Pour violation de l’article 78 du code de procédure pénale, En ce que l’arrêt attaqué « reçoit les appels du ministère public et du demandeur au civil en la forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que « La Cour ne voit pas la circonstance atténuante pouvant justifier la dispense de l’interdiction d’enseigner pour déroger exceptionnellement à l’interdiction obligatoire d’enseigner pendant cinq ans, ce d’autant plus que 16 PERSONNE1.) dispose d’une formation universitaire en Roumanie, exerce un travail fixe et rémunéré en Allemagne et ne parle pas la langue luxembourgeoise, son seul désir d’enseigner au Luxembourg ne suffisent pas à justifier l’exception demandée. » Alors que « S’il est vrai qu’en vertu de l’article 78 (2) cpp, la Cour d’appel peut souverainement ou non remettre l’interdiction des droits mentionnés à l’article 11 du code pénal, elle ne peut pas retenir qu’elle ne voit pas la circonstance atténuante pouvant justifier la demande de la dispense de la requérante, alors que la requérante bénéficie d’ores et déjà de circonstances atténuantes, qui lui ont été accordées par les juridictions d’instruction au moment du renvoi, En effet, en l’espèce l’ordonnance de renvoi n°832/21 du 19 mai 2021 de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmée par l’arrêt d’appel du n°1128/21 du 14 décembre 2021 de la chambre du conseil de la Cour d’appel, a retenu qu’il existait des circonstances atténuantes en faveur de la requérante consistant dans l’absence d’antécédents judiciaires spécifiques.
Et cette décision ne peut pas être ignorée par les juges d’appel, de sorte que l’existence de circonstances atténuantes était définitivement acquise à la requérante, Ainsi, pour appliquer l’article 78 (2) cpp, la Cour d’appel n’avait pas à rechercher de nouvelles circonstances atténuantes alors qu’il est inconvenable que des circonstances atténuantes acquises soient appliquées à une partie de la peine et non pas à une autre partie de la peine, sans préjudice de la faculté laissée aux juges de déterminer le taux de la peine à prononcer dans la fourchette légale prévue, Ce faisant, en disant qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes en faveur de la requérante, elle a violé l’article 78 (2) du cpp. » Quant au deuxième moyen de cassation « . 2EME MOYEN DE CASSATION « VIOLATION AUTORITE DE LA CHOSE JUGEE » Pour violation de l’autorité de chose jugée résultant de l’arrêt de renvoi.
17 En ce que l’arrêt attaqué « reçoit les appels du ministère public et du demandeur au civil en la forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que 18 « La Cour ne voit pas la circonstance atténuante pouvant justifier la dispense de l’interdiction d’enseigner pour déroger exceptionnellement à l’interdiction obligatoire d’enseigner pendant cinq ans, ce d’autant plus que PERSONNE1.) dispose d’une formation universitaire en Roumanie, exerce un travail fixe et rémunéré en Allemagne et ne parle pas la langue luxembourgeoise, son seul désir d’enseigner au Luxembourg ne suffisent pas à justifier l’exception demandée. » Alors que « S’il est vrai qu’en vertu de l’article 78 (2) cpp, la Cour d’appel peut souverainement ou non remettre l’interdiction des droits mentionnés à l’article 11 du code pénal, elle ne peut pas retenir qu’elle ne voit pas la circonstance atténuante pouvant justifier la demande de la dispense de la requérante, alors que la requérante bénéficie d’ores et déjà de circonstances atténuantes, qui lui ont été accordées par les juridictions d’instructions au moment du renvoi, En effet, en l’espèce l’ordonnance de renvoi n°832/21 du 19 mai 2021 de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmée par l’arrêt d’appel du n°1128/21 du 14 décembre 2021 de la chambre du conseil de la cour d’appel, a retenu qu’il existait des circonstances atténuantes en faveur de la requérante consistant dans l’absence d’antécédents judiciaires spécifiques.
Et cette décision qui a autorité de chose jugée ne peut pas être ignorée par les juges d’appel, de sorte que l’existence de circonstances atténuantes était définitivement acquise à la requérante, 18 Ainsi, la Cour d’appel n’avait pas à rechercher de nouvelles circonstances atténuantes pour appliquer l’article 78 (2) cpp, alors qu’il est inconvenable que des circonstances atténuantes acquises soient appliquées à une partie de la peine et non pas à une autre partie de la peine, sans préjudice de la faculté laissée aux juges de déterminer le taux de la peine à prononcer dans la fourchette légale prévue, Ce faisant, disant qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes en faveur de la requérante, elle a violé l’autorité de chose jugée découlant dudit arrêt de renvoi. » L’article 381 du Code pénal dispose : « Dans les cas prévus par les articles 379 et 379bis les coupables seront2 en outre condamnés à une amende de 251 € à 15.000 € et à l’interdiction des droits spécifiés aux numéros 1,2,3,4,5 et 7 de l’article 11. » Selon l’article 78 du Code pénal : « S’il existe des circonstances atténuantes, la peine d’emprisonnement peut ne pas être prononcée et l’amende peut être réduite au-dessous de 251 €, sans qu’elle puisse être inférieure à 25 €.
Si l’interdiction des droits mentionnés à l’article 11 est ordonnée et autorisée, les juges peuvent3 prononcer ces peines pour un terme d’un à cinq ans ou les remettre entièrement. » Il résulte de la simple lecture de ces articles qu’en cas de condamnation pour infractions visées aux articles 379 et 379bis du Code pénal, la condamnation à l’interdiction de certains droits prévus à l’article 11 du Code pénal est obligatoire.
La possibilité prévue à l’article 78 du Code pénal pour les juges de remettre entièrement l’interdiction de ces droits est une simple faculté laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond tel que le reconnaît d’ailleurs la demanderesse en cassation dans son mémoire en cassation.4 En d’autres termes, les juges du fond apprécient souverainement s’ils retiennent ou non des circonstances atténuantes dans le chef d’une personne condamnée du chef de proxénétisme (article 379bis du Code pénal) permettant de remettre entièrement la condamnation à l’interdiction de certains droits prévus à l’article 11 du Code pénal.
La Cour d’appel a donc valablement pu retenir :
« Aux termes de l’article 381 du Code pénal, dans les cas prévus par l’article 379bis du Code pénal, les coupables seront en outre condamnés à 2 Mis en évidence par le soussigné 3 Mis en évidence par le soussigné.
4 Mémoire en cassation p.3 deuxième alinéa et p.4 troisième alinéa.l’interdiction des droits spécifiés au numéros 1, 2, 3, 4, 5 et 7 de l’article 11 du Code pénal.
Le mandataire de PERSONNE1.) demande en application de l’article 78 alinéa 2 du Code pénal, permettant au juge de remettre entièrement l’interdiction des droits visée à l’article 11 du même code, à voir sa mandante être exemptée de l’interdiction du droit d’enseigner au motif qu’elle envisagerait éventuellement d’enseigner au Grand-Duché de Luxembourg.
La Cour ne voit pas la circonstance atténuante pouvant justifier la dispense de l’interdiction d’enseigner pour déroger exceptionnellement à l’interdiction obligatoire d’enseigner pendant cinq ans, ce d’autant plus que PERSONNE1.) dispose d’une formation universitaire en Roumanie, exerce un travail fixe et rémunéré en Allemagne et ne parle pas la langue luxembourgeoise, son seul désir d’enseigner au Luxembourg ne suffisant pas justifier l’exception demandée. »5 Le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine des juges d’appel de ne pas retenir dans le chef de PERSONNE1.) de circonstance atténuante pouvant justifier de remettre entièrement l’interdiction d’enseigner pour déroger exceptionnellement à l’interdiction obligatoire d’enseigner pendant cinq ans.
Cette appréciation échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Il s’ensuit que les deux premiers moyens de cassation ne sauraient être accueillis.
Pour être tout à fait complet, il y a lieu d’ajouter que l’argumentation tirée de l’autorité de chose jugée de l’ordonnance de renvoi n° 832/21 du 19 mai 2021 de la chambre du conseil du Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmée par l’arrêt d’appel n° 1128/21 du 14 décembre 2021 de la chambre du conseil de la Cour d’appel ne tient pas la route.
Par réquisitoire du 2 juin 2020, le procureur d’Etat a constaté que les infractions libellées sub I.2.), II.2), III.2.), IV.2.), V.2) sont passibles de peines criminelles et par application de circonstances atténuantes en ce qui concerne ces infractions en faveur de PERSONNE1.) et des 4 autres prévenus consistant dans l’absence d’antécédents judiciaires spécifiques, le procureur d’Etat a demandé le renvoi des 5 prévenus devant une chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg.
Par ordonnance de renvoi n° 832/21 du 19 mai 2021, la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmée par l’arrêt d’appel n° 1128/21 du 14 décembre 2021 de la chambre du conseil de la Cour d’appel, a fait droit à ce réquisitoire.
5 Arrêt entrepris p. 73Il y a donc eu une décriminalisation de certains crimes au niveau de la procédure de renvoi.
La chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg et en appel la chambre correctionnelle de la Cour d’appel, saisies d’une infraction devenue délit par l’effet d’une décriminalisation, sont seulement tenues de respecter cette décriminalisation effectuée au niveau de la procédure de renvoi et ne peuvent pas se déclarer incompétentes pour connaître des crimes décriminalisés devenus délits.
Cette décriminalisation n’oblige évidemment pas les juges du fond à retenir de quelconques circonstances atténuantes dans le cadre de l’application éventuelle de l’article 78 alinéa 2 du Code pénal.
Comme indiqué ci-avant, les juges du fond apprécient souverainement s’ils appliquent ou non l’article 78 alinéa 2 du Code pénal.
Les deux premiers moyens ne sauraient partant être accueillis sinon ne sont pas fondés.
Quant au troisième moyen de cassation « 3EME MOYEN DE CASSATION « Compétence internationale » Pour violation de l’article 7-2 du Code de procédure pénale et de l’article 66 alinéa 3 du code pénal, En ce que l’arrêt attaqué « reçoit les appels du ministère public et du demandeur au civil en la forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que 21 « La prostitution des femmes soutenues, aidées et encadrées par une tierce personne, la publicité, le racolage, le transport vers le lieu de la prostitution et le transport du gain destiné au proxénète, constituent les éléments de l’infraction du proxénétisme et ont, en l’espèce, tous été localisés sur le territoire luxembourgeois. » (page 13) Et que « PERSONNE1.) se décrit comme exploitante (« Betreiberin ») du SOCIETE1.) (Pv 109, du 3 janvier 2013) qui a assisté son compagnon PERSONNE2.) dans la direction et dans l’exploitation du SOCIETE1.). Elle s’occupait du recrutement des prostituées, parlant la langue roumaine.
PERSONNE3.) a fourni des explications quant au fonctionnement du SOCIETE1.) et du Service « Escort » aux filles intéressées. » (page 30) Alors que La cour d’appel retient à bon droit que si un des actes caractérisant l’infraction a été commis au Luxembourg, les tribunaux luxembourgeois sont compétents, De même, c’est à bon droit qu’elle fait le constat que des actes de prostitution ont eu lieu au Luxembourg, De plus, elle retient qu’ont été commis au Luxembourg des actes en vue d’aider la prostitution, notamment par l’encadrement, la publicité, le racolage, le transport des prostitués et celui du gain.
Et il est également constant en cause que la requérante n’a commis elle-même au Luxembourg aucun acte caractérisant les infractions, Et il est également constant en cause que la requérante ne participait ni à l’organisation du service « Escort », ni à la prise de rdv, ni à l‘organisation des transports y relatifs, ni à l’encaissement des gains en cette provenance, Or, la Cour d’appel se borne à retenir que la requérante était responsable du recrutement en Allemagne des prostitués tout en leur fournissant les explications du fonctionnement, sans pour autant caractériser en quoi ces faits commis dans une intention parfaitement légale en Allemagne, constituent une aide sans leur assistance le délit n’eût pu être commis au Luxembourg, Dès lors, en examinant pas en quoi cette aide était indispensable pour la réalisation au Luxembourg de la prostitution, la cour d’appel a violé l’article 7-2 du Code de procédure pénale et l’article 66 alinéa 3 du code pénal. » 22 En ce qui concerne la compétence internationale des juridictions luxembourgeoises, la Cour d’appel a retenu que :
« En vertu de l’article 3 du Code pénal, le critère du lieu de la commission du fait punissable, détermine la compétence territoriale luxembourgeoise pour toutes les infractions commises sur le territoire luxembourgeois. Cette disposition est complétée par l’article 7-2 du Code de procédure pénale qui énonce le critère de la localisation de l’infraction dès lors qu’un acte caractérisant un de ses éléments constitutifs a été accompli au Grand-Duché de Luxembourg. Il suffit ainsi qu’un acte d’un seul des éléments constitutifs du délit se soit produit au Grand-Duché de Luxembourg, pour rendre compétents les tribunaux répressifs luxembourgeois.
Dans le cadre d’infraction complexe, comme le délit de proxénétisme, de traite des êtres humains et de blanchiment, il se produit une décomposition de l’élément matériel de l’infraction et une multiplication de contact avec divers territoires nationaux et donc de rattachement à la compétence territoriale luxembourgeoise. Il y a un démembrement de la matérialité des faits, dès lors que l’élément matériel de telles infractions renferme des composantes. Par le biais de la théorie de l’ubiquité objective consacrée par l’article 7-2 du Code de procédure pénale, il est permis d’asseoir la compétence des juridictions nationales si au moins un élément caractérisant l’un de des éléments constitutifs du fait incriminé ou l’une des circonstances aggravantes de l’infraction aient été réalisé sur le territoire national, à l’exclusion toutefois des aspects purement subjectifs comme l’élément moral.
Il est dès lors indifférent si d’autres éléments constitutifs se soient réalisés en dehors du territoire luxembourgeois, dès lors que des éléments caractérisant les infractions de proxénétisme, de traite d’êtres humain et de blanchiment se seraient réalisés sur le territoire national.
L’« acte caractérisant l’élément constitutif » est constitué par une composante de l’élément constitutif et, en soi, dépourvu de signification pénale.
Le proxénétisme est l’activité d’un individu qui facilite la prostitution d’autrui ou qui en tire profit.
L’infraction suppose le concours de deux personnes au moins : le proxénète qui est l’auteur et la personne qui se livre à la prostitution, la prostituée. La prostitution est donc non seulement un « acte caractérisant un élément constitutif » du proxénétisme, mais un véritable élément constitutif.
23 Sans prostitution, il n’y a pas de proxénétisme : c’est la prostituée qui fait le proxénète (A. Maron, Dr. Pénal, 1990, n°2, Chron. 1).
La prostitution des femmes soutenues, aidées et encadrées par une tierce personne, la publicité, le racolage, le transport vers le lieu de la prostitution et le transport de la partie du gain destiné au proxénète, constituent les éléments de l’infraction du proxénétisme et ont, en l’espèce, tous été localisés sur le territoire luxembourgeois.6 Les juridictions répressives luxembourgeoise sont territorialement compétentes pour vérifier et connaître la prévention de proxénétisme, nonobstant le fait que le proxénète et la prostituée n’ont ni la nationalité luxembourgeoise, ni une résidence au Luxembourg, dès lors que l’acte de prostitution soutenu et encadré et dont un tiers tire un quelconque bénéfice, a eu lieu au Luxembourg.7 Pour les mêmes raisons les juridictions luxembourgeoises sont compétentes pour connaître de l’infraction de la traite des êtres humains vu que la prostitution en vertu de laquelle les femmes avaient été embauchées, a eu lieu au Luxembourg.8 Les tribunaux luxembourgeois sont de même compétents pour connaître des infractions de blanchiment vu que le produit de la prostitution soutenue, a été détenu et transporté sur le territoire luxembourgeois.9 Le jugement est dès lors à confirmer en ce qui concerne la compétence internationale territoriale quoique pour d’autres motifs. »10 La Cour d’appel a souverainement constaté que les éléments constitutifs des différentes infractions ont eu lieu au Luxembourg.
Dans son mémoire en cassation, la demanderesse en cassation écrit notamment « Si l’on examine le catalogue, on peut faire les constatations suivantes : … (suit une liste de 2 pages). »11 Il en résulte clairement que la demanderesse en cassation présente une argumentation en fait, qui outre le fait qu’elle est contestée, échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Sous le couvert de la violation de l’article 7-2 du Code de procédure pénale et de l’article 66 alinéa 3 du Code pénal, le moyen ne tend qu’à remettre en cause 6 Souligné par le soussigné 7 Souligné par le soussigné 8 Souligné par le soussigné 9 Souligné par le soussigné 10 Arrêt entrepris p.12 et 13 11 Mémoire en cassation p. 7 et 8l’appréciation souveraine des juges du fond que les éléments constitutifs des différentes infractions ont eu lieu au Luxembourg, appréciation échappant au contrôle de la Cour de cassation.
Il s’ensuit que le troisième moyen de cassation ne saurait être accueilli.
Quant au quatrième moyen de cassation « 4EME MOYEN DE CASSATION « VIOLATION ARTICLE 7 ALINEA 1 CONVEDH » Pour violation de l’article 7 alinéa 1 de la Convention européenne des droits de l’homme : « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international12. » En ce que l’arrêt attaqué « reçoit les appels du ministère public et du demandeur au civil en la forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que « Il y a en effet lieu de distinguer entre le salarié neutre exécutant une tâche commune, secondaire et indifférente au délit commis dans ou par l’entreprise et le salarié dont l’attitude implique une véritable adhésion morale à l’activité criminelle et qui fournit des actes d’aides même si ceux-ci consistent dans l’exécution des tâches prévues dans son contrat, afin de faire fonctionner l’activité criminelle de son employeur.
Le « salarié coopérateur » qui entend apporter par son travail, même sous forme d’un contrat de travail régulier et conforme au droit national, en connaissance de cause, un soutien à son employeur dans son activité 12 Nous soulignonscriminelle, s’associe à cette action criminelle à la fois matériellement et psychologiquement, l’employeur et le salarié agissant « de concert ».
Il joue un rôle dans la commission de l’infraction, sans néanmoins réaliser lui-même tous les éléments constitutifs qui le caractérisent. Son comportement personnel est en quelque sorte enchevêtré dans une conduite collective. » (page 28-29) Et que « La moindre des précautions aurait été de se renseigner auprès des autorités luxembourgeoises de la légalité du service au Luxembourg. » (page 32) Alors que Il est constant en cause que la requérante a effectué toute prestation de travail dans le cadre de son contrat de travail conclu avec le SOCIETE1.) exclusivement sur le territoire allemand, et qu’elle n'a commis aucun acte qui pourrait, d'une manière ou d'une autre, constituer l'élément matériel de l'article 379 bis, paragraphe 5, CP, sur le territoire luxembourgeois.
Pour établir sa compétence internationale, le tribunal combine l’ensemble des faits présumées de tous les prévenus avec les actes que PERSONNE2.), poursuivi séparément, a accomplis en toute indépendance en sa qualité de propriétaire du SOCIETE1.) et donc aussi d'employeur de la requérante, Or, le Tribunal méconnaît ainsi qu'il n’existe aucune obligation légale pour un travailleur qui exerce son activité exclusivement sur le territoire d'un seul Etat, de suivre et d'analyser les activités de son employeur.
Notamment, il n'y a pas d'obligation juridique ou légale pour le travailleur de vérifier et de constater si son employeur utilise le résultat de sa prestation de travail effectuée sur le territoire national dans un autre État, et si l'utilisation du résultat de la prestation de travail dans un autre État est conforme à la législation en vigueur dans cet État. » De même, il n'existe aucune obligation juridique ou légale pour le travailleur de se renseigner de manière autonome auprès des autorités d'un autre Etat pour savoir si l'activité de l'employeur y est légale.
Il découle uniquement de l'article 7, paragraphe 1, de la ConvEDH que l'acteur (en l'occurrence le travailleur) doit simplement veiller à ce que son activité n'enfreigne pas le droit national.
26 Toute obligation allant au-delà de cette mesure est illégale et ne peut servir de base à une quelconque responsabilité pénale, Dès lors, en constatant, d'une part, que les activités de la requérante ont été exercées exclusivement sur le territoire allemand et y étaient, selon la situation juridique en vigueur, légales sans restriction et donc non punissables, mais en admettant, d'autre part, l'existence d'une obligation juridique de se renseigner auprès des autorités d'un État étranger pour savoir si les actes de l'employeur à l'étranger sont conformes à la situation juridique en vigueur dans cet État, et en considérant le non-respect d'une telle « obligation juridique » comme fondement à une infraction pénale ou comme une violation de la loi, tout en excluant l'ignorance de la loi étrangère et la justification qui en découle, le Tribunal a violé l'article 7, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme.
A titre principal Le grief est étranger au cas d’ouverture invoqué.
En effet, en argumentant qu’« il n'existe aucune obligation juridique ou légale pour le travailleur de se renseigner de manière autonome auprès des autorités d'un autre Etat pour savoir si l'activité de l'employeur y est légale » le grief a trait à l’ignorance de la loi et à la bonne foi, moyen auquel la Cour d’appel a répondu aux pages 31 et 32 de son arrêt, et non au principe de la légalité des infractions pénales et des peines prévu à l’article 7 alinéa 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après CEDH).
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
A titre subsidiaire Le moyen est nouveau et, en ce qu’il comporterait un examen des circonstances de fait, mélangé de fait et de droit.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
A titre très subsidiaire La législation luxembourgeoise prévoit les infractions de proxénétisme, traite des êtres humains et blanchiment d’argent pour lesquelles l’actuelle demanderesse en cassation a été condamnée.
L’arrêt de la Cour d’appel n’a donc pas violé l’article 7 alinéa 1 de la CEDH.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Quant au cinquième moyen de cassation « 5EME MOYEN DE CASSATION « BLANCHIMENT » Pour violation des articles 506-1 et 506-4 du Code pénal ;
En ce que l’arrêt attaqué « reçoit les appels du ministère public et du demandeur au civil en la forme ;
(…) confirme le jugement pour le surplus ;
(…) » Aux motifs que « En l’espèce, le gain tiré de la prostitution n’appartenait pas à cette dernière et ne peut être considéré comme son salaire personnel duquel elle dispose pourrait disposer librement et entièrement et moyennant lequel elle règle ses dépenses et de la vie courante. Elle ne disposait d’ailleurs aucune latitude d’adapter ses prix selon son propre gré suivant la situation de fortune du client, mais le tarif était préfixé et contrôlé par les exploitants du Club.
Le montant payé par le client a dû être ramené intégralement au SOCIETE1.) et la totalité de la somme gagnée, y compris le prix des prestations spécialement commandée, a dû être remise dans une boîte individuelle prévue à cet effet.
En fin de journée, le récipient a été ouvert et la somme totale vérifiée à l’aide des fiches de travail et le contenu partagé selon la clé de répartition prédéfinie, soit 50% pour la fille et 50% pour le SOCIETE1.) tandis que le prix des « extras » prestés et mentionnés sur la fiche de travail et facturé suivant le tarif fixé par le SOCIETE1.), remis intégralement à la fille.
Les prostituées ont donc transporté le produit du proxénétisme pour le compte des exploitants du club. » (page 37) 28 Alors que En considérant, sans constater concrètement les faits correspondants, que les prostituées ont transporté le produit de la vente en Allemagne pour les exploitants du SOCIETE1.) et non pour la requérante, la cour d'appel fait déjà une application erronée du droit civil luxembourgeois.
En effet, sur le territoire luxembourgeois, il n'est jamais arrivé qu'un client paie directement ou indirectement la rémunération convenue avec la travailleuse du sexe à l’exploitant du club PERSONNE2.) ou lui transfère la propriété des billets de banque, pas plus que la travailleuse du sexe n'a transféré elle-même la propriété des billets de banque à l’exploitant PERSONNE2.).
Si tant est qu'il y ait eu un transfert de propriété de la prostituée à PERSONNE2.), il ne pourrait être vu que dans le dépôt - sur le sol allemand - dans le casier du SOCIETE1.). Dans ce cas, la volonté de la travailleuse du sexe de transférer la propriété à PERSONNE2.), qui est obligatoire selon le droit allemand, fait défaut.
En l'absence d'un transfert de propriété ou même de possession des travailleuses du sexe à PERSONNE2.) ou à une personne mandatée par ce dernier en ce qui concerne le salaire de la prostituée sur le territoire luxembourgeois, les caractéristiques légales de l'élément matériel du blanchiment d'argent selon les articles 506-1 et 506-4 CP font déjà défaut.
Par conséquent, la cour d'appel a violé les dispositions légales des articles 506-1 et 506-4 du Code pénal. » La Cour d’appel a retenu à bon droit ce qui suit :
« La Cour rappelle que les juges du fond, saisis d’une poursuite du chef du délit de blanchiment, doivent constater, à tout le moins de manière implicite, mais certaine, l’existence des éléments constitutifs de l’infraction de base, notamment l’origine délictueuse des fonds ainsi que la circonstance que le prévenu avait connaissance de cette origine délictueuse. Les juges peuvent asseoir leur conviction sur un ensemble de présomptions précises et concordantes. Il n’est toutefois pas requis que l’auteur de l’infraction primaire ait fait l’objet de poursuites ou qu’il ait fait l’objet d’une condamnation identifiant le crime ou le délit à l’aide duquel les avantages patrimoniaux ont été obtenus.
29 En l’espèce l’infraction primaire est caractérisée vu que le délit de proxénétisme sera à retenir, alors qu’il est caractérisé au Luxembourg par la prostitution-hôtelière au Luxembourg et par le biais des visites à domicile dans les villes et communes luxembourgeoises, organisées par le SOCIETE1.) par le biais de son service d'escorte « ENSEIGNE1.) ».
Il résulte des développements ci-avant que le délit de proxénétisme ait été réalisé sur le territoire luxembourgeois et constitue aux termes de l’article 506 -1, point 1), du Code pénal, l’une des infractions primaires du délit de blanchiment d’argent Les personnes qui auront sciemment effectué un acte de blanchiment-
détention, c’est-à-dire qui ont détenu l’objet ou le produit d’une infraction primaire en connaissance de cause de son origine délictuelle et criminelle au moment où ils l’ont reçu, seront punies comme auteur du délit de blanchiment.
En l’espèce, le gain tiré de la prostitution n’appartenait pas à cette dernière et ne peut être considéré comme son salaire personnel duquel elle dispose pourrait disposer librement et entièrement et moyennant lequel elle règle ses dépenses de la vie courante. Elle ne disposait d’ailleurs d’aucune latitude d’adapter ses prix selon son propre gré suivant la situation de fortune du client, mais le tarif était préfixé et contrôlé par les exploitants du SOCIETE1.).
Le montant payé par le client a dû être ramené intégralement au SOCIETE1.) et la totalité de la somme gagnée, y compris le prix de la prestation spécialement commandée, a dû être remise dans une boîte individuelle prévue à cet effet.
En fin de journée, le récipient a été ouvert et la somme totale vérifiée à l’aide des fiches de travail et le contenu partagé selon la clé de répartition prédéfinie, soit 50% pour la fille et 50% pour le SOCIETE1.) tandis que le prix des « extras » prestés et mentionnés sur la fiche de travail et facturé suivant le tarif fixé par le SOCIETE1.), remis intégralement à la fille.
Les prostituées ont donc transporté le produit du proxénétisme pour le compte des exploitants du SOCIETE1.) en Allemagne.13 Les prévenus PERSONNE7.), PERSONNE8.) et PERSONNE9.), pris en leur qualité de chauffeurs ont commis le délit de blanchiment-détention en acheminant en connaissance de cause et volontairement le produit généré en faveur du proxénète du Luxembourg vers la frontière en ramenant la prostituée au SOCIETE1.).
L’ensemble des prévenus est à retenir dans la prévention de blanchiment pour avoir tiré un profit sous forme de leur salaire, du produit de la prostitution 13 Souligné par le soussignéencadrée, assistée et promue par un proxénète en faveur de la prostituée, embauchée en vue de la prostitution au Luxembourg.14 Les premiers juges sont encore à confirmer en ce qu’ils ont retenu cette prévention à l’égard de tous les prévenus ».15 Les juges d’appel ont souverainement constaté les faits et éléments de preuve qui les ont amenés à retenir l’infraction de blanchiment dans le chef de PERSONNE1.).
Dans son mémoire en cassation, la demanderesse en cassation présente une version des faits différente et énonce longuement les faits et éléments prouvés selon elle.16 Il en résulte clairement que la demanderesse en cassation présente une argumentation en fait, qui outre le fait qu’elle est contestée, échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Sous le couvert de la violation des articles 506-1 et 506-4 du Code pénal, le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine par les juges du fond des faits et éléments de preuve leur soumis, appréciation échappant au contrôle de la Cour de cassation.
Il s’ensuit que le cinquième moyen de cassation ne saurait être accueilli.
Conclusion Le pourvoi est recevable.
Le pourvoi est à rejeter.
Pour le Procureur général d’Etat, Le premier avocat général, Serge WAGNER 14 Souligné par le soussigné 15 Arrêt entrepris p. 37 et 38 16 Mémoire en cassation p. 11 et 12 31