La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2025 | LUXEMBOURG | N°100/25

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 12 juin 2025, 100/25


N° 100 / 2025 pénal du 12.06.2025 Not. 30449/20/CC Numéro CAS-2024-00156 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, douze juin deux mille vingt-cinq, sur le pourvoi de PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.) (Roumanie), demeurant à L-

ADRESSE2.), prévenu, demandeur en cassation, comparant par Maître Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 25 novembre 2024 sous le numéro 388

/24 VI. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, sixième chambre, siégeant...

N° 100 / 2025 pénal du 12.06.2025 Not. 30449/20/CC Numéro CAS-2024-00156 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, douze juin deux mille vingt-cinq, sur le pourvoi de PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.) (Roumanie), demeurant à L-

ADRESSE2.), prévenu, demandeur en cassation, comparant par Maître Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 25 novembre 2024 sous le numéro 388/24 VI. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, sixième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Abou BA, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 20 décembre 2024 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;

Vu le mémoire en cassation déposé le 20 janvier 2025 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du substitut près du Parquet général Marianna LEAL ALVES.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné le demandeur en cassation du chef d’infractions à la législation sur la circulation routière à une amende et à deux interdictions de conduire assorties des exceptions pour les trajets professionnels. La Cour d’appel a confirmé le jugement.

Sur les deux moyens de cassation réunis Enoncé des moyens le premier, « Violation de l’article 9bis de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 9bis de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques qui dispose que en relation avec une ou plusieurs infractions à la présente loi ou aux dispositions réglementaires prises en son exécution est puni d’un emprisonnement de 3 mois à 5 ans et d’une amende de 500 à 25.000 euros.

S’il n’est résulté du défaut de prévoyance ou de précaution que des coups ou des blessures, le coupable est puni, par dérogation à l’article 420 du Code pénal, d’un emprisonnement de 8 jours à 3 ans et d’une amende de 500 à 12.500 euros ou d’une de ces peines seulement » En ce que les juges du fond, après pourtant avoir souverainement constaté que tant le prévenu que la victime avaient tous les deux commis une faute, en l’occurrence pour le prévenu d’avoir opéré un freinage soudain ou un arrêt brusque non exigé par des raisons de sécurité, telle qu’incriminé par l’article 140 de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques et, pour la victime, de ne pas avoir observé une distance suffisante, selon les circonstances, entre son véhicule et le véhicule qui précède, pour qu’en cas de ralentissement ou d’arrêt subits du véhicule qui précède, une collision puisse être évitée, telle qu’incriminée par l’article 141 de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, ont dit pour droit que la faute du prévenu en relation causale avec l’accident constituait un évènement imprévisible et irrésistible pour la victime (page 4, in fine de l’arrêt attaqué), Alors que la faute de l’auteur du dommage, en matière de responsabilité délictuelle, comme en l’espèce où la responsabilité pénale du demandeur en cassation a découlé de sa responsabilité délictuelle en vertu de l’article 9 bis de la 2 loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques qui renvoie aux articles 419 et 420 du Code pénal dont le propre est de tirer une responsabilité pénale de l’existence d’une simple faute civile délictuelle, en l’occurrence d’un défaut de prévoyance, à l’exclusion du dol général exigé pour toute infraction pénale, ne peut jamais être considérée comme un évènement imprévisible et irrésistible dans le chef de la victime qui a elle-même commis une faute en matière de responsabilité délictuelle (G. RAVARANI, La responsabilité civile des personnes privées et publiques, 3ème édition, Pasicrisie Luxembourgeoise, 2014, pages 1024 à 1030), Que la faute de l’auteur du dommage pourrait en effet revêtir les caractéristiques de la force majeure que sont l’imprévisibilité et l’irrésistibilité pour la victime dont la responsabilité serait recherchée sur une base objective, telle qu’une présomption de responsabilité sans faute, mais non pas lorsque la victime a elle-même commis une faute, Qu’en omettant de statuer sur l’incidence de la faute de la victime dans la genèse de l’accident, le cas échéant en considérant un partage de responsabilité en fonction de la gravité respectives des fautes commises ou de l’intensité du lien causal entre les fautes respectives du prévenu et de la victime, les juges du fond n’ont pas légalement justifié leur décision sur le plan de la responsabilité délictuelle et par voie de conséquence sur celui de la responsabilité pénale du prévenu qui en a découlé, Qu’en statuant comme ils l’ont fait, les juges du fond ont ainsi violé l’article 9bis de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, tel que visé au moyen. » et le second, « Violation de l’article 141 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques Le second moyen est tiré de la violation, en l’occurrence du défaut d’application de l’article 141 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques qui dispose que :

distance suffisante, selon les circonstances, entre son véhicule et le véhicule qui précède, pour qu’en cas de ralentissement ou d’arrêt subits du véhicule qui précède, une collision puisse être évitée. » En ce que les juges du fond, après avoir souverainement constaté que la victime de l’infraction reprochée au prévenu avait elle-même commis une faute en omettant d’observer une distance suffisante, selon les circonstances, entre son véhicule et le véhicule qui précède, pour qu’en cas de ralentissement ou d’arrêt subits du véhicule qui précède, une collision puisse être évitée, telle que cette faute est incriminée par l’article 141 de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, ont omis de tirer les conséquences de cette faute dans la genèse de l’accident pour lequel le prévenu a été 3 condamné, au motif que la faute du prévenu en relation causale avec l’accident constituait une circonstance imprévisible et irrésistible pour la victime, alors que la faute du prévenu ne peut, en matière de responsabilité délictuelle, revêtir les caractéristiques de la force majeure pour la victime qui a elle-même commis une faute et qu’il appartient donc au juge de déterminer l’incidence de chacune des fautes dans la genèse du dommage, le cas échéant par application de la théorie de l’équivalence des conditions, avec les conséquences favorables de droit qui doivent nécessairement en découler pour le prévenu dans l’appréciation de sa responsabilité pénale, Qu’en statuant comme ils l’ont fait, donc en omettant de rechercher quelle était l’incidence de cette faute de la victime commise en violation de l’article 141 de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, dans la survenant ce l’accident, les juges du fond ont violé cette disposition réglementaire visée au moyen en omettant de l’appliquer. ».

Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas s’être prononcés sur l’incidence de la faute de la victime dans la genèse de l’accident, après avoir constaté que la victime avait elle-même commis une faute en omettant d’observer une distance de sécurité suffisante par rapport au véhicule du demandeur en cassation.

Les moyens procèdent d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué en ce que les juges d’appel n’ont pas retenu que la victime avait commis une faute.

Il s’ensuit que les moyens manquent en fait.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère public étant liquidés à 3,75 euros.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, douze juin deux mille vingt-cinq, à la Cité judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, président, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Gilles HERRMANN, conseiller à la Cour de cassation, qui, à l’exception du conseiller Marie-Laure MEYER, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Agnès ZAGO en présence du premier avocat général Monique SCHMITZ et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.), en présence du Ministère Public (affaire n° CAS-2024-00156 du registre) Par déclaration faite le 20 décembre 2024 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-

Duché de Luxembourg, Maître Abou BA, en remplacement de Maître Patrice Rudatiny MBONYUMUTWA, tous deux avocats à la Cour, a formé au nom et pour le compte de PERSONNE1.), un recours en cassation contre un arrêt n° 388/24 VI. rendu le 25 novembre 2024 par la Cour d’appel, sixième chambre, siégeant en matière correctionnelle.

Cette déclaration de recours a été suivie le 20 janvier 2025 par le dépôt du mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, signé par Maître Patrice Rudatiny MBONYUMUTWA.

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt qui a statué de façon définitive sur l’action publique. Le pourvoi a, par ailleurs, été fait dans la forme et le délai de la loi. Le mémoire en cassation, prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885, a également été déposé dans la forme et le délai y imposés.

Il en suit que le pourvoi est recevable.

Quant aux faits et rétroactes :

Le Ministère Public a reproché au demandeur en cassation, à PERSONNE1.) d’avoir en tant que conducteur d’un véhicule automoteur sur la voie publique par défaut de prévoyance ou de précaution, mais sans intention d’attenter à la personne d’autrui, partant involontairement, causé des coups ou des blessures à PERSONNE2.) (article 9bis de la loi du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques), d’avoir enfreint des dispositions de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, ainsi que d’avoir commis un délit de fuite.

Par jugement n°1276/2024 du 6 juin 2024, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en chambre correctionnelle, a condamné PERSONNE1.) du chef des infractions retenues à sa charge à une amende correctionnelle de mille (1.000) euros, et a prononcé deux interdictions de conduire de 12 mois chacune respectivement pour les infractions de coups et blessures involontaires et pour le délit de fuite assorties toutes les deux des exceptions pour les trajets professionnels.

Statuant sur les appels interjetés par le demandeur en cassation et par le Ministère Public, la Cour d’appel a, par arrêt du 25 novembre 2024, confirmé le jugement entrepris dans son intégralité.

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt du 25 novembre 2024.

Quant au premier moyen de cassation :

Le premier moyen est tiré de la violation de la loi, plus précisément de l’article 9bis de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques, en ce que la Cour d’appel a retenu la culpabilité du demandeur en cassation pour coups et blessures involontaires en omettant de rechercher l’incidence de la faute de la victime dans la genèse de l’accident afin de prononcer une éventuelle exonération pénale du demandeur en cassation, voire un partage de responsabilité en son chef, alors que la faute de l’auteur du dommage ne peut être considérée comme un évènement imprévisible et irrésistible dans le chef de la victime qui a elle-même commis une faute en matière de responsabilité délictuelle.

En d’autres termes, le premier moyen de cassation invoqué par Monsieur PERSONNE1.) est tiré d’une violation de la loi, en l’occurrence de l’article 9bis de la loi modifiée du 14 février 1955 sur la circulation routière dans l’arrêt attaqué.

Le demandeur reproche aux juges d’appel d’avoir omis de rechercher l’incidence de la faute de la victime dans la genèse de l’accident et, partant, de ne pas avoir légalement justifié la condamnation. Selon le pourvoi, en ne tenant pas compte d’une éventuelle faute de Monsieur PERSONNE2.), qui aurait consisté à ne pas observer une distance de sécurité suffisante, la Cour d’appel aurait violé les principes gouvernant la responsabilité en la matière, alors qu’un partage de responsabilités aurait dû, selon lui, être opéré.

Il convient de rappeler, qu’il est de jurisprudence constante qu’une faute de la victime, même établie, n’exonère nullement le prévenu de sa responsabilité pénale dès lors que la faute de ce dernier a contribué au dommage. Autrement dit, la participation causale du prévenu à la réalisation du résultat prohibé suffit à engager sa culpabilité, quelle que soit l’éventuelle faute concomitante de la victime.

Les premiers juges en caractérisant la faute, ont retenu que « la faute la plus légère suffit pour entraîner la condamnation pour coups et blessures involontaires. Le législateur a entendu punir toutes les formes de la faute, quelque minime qu’elle soit (CSJ, 16 février 1968).

Ainsi, une telle faute peut être constituée par toute maladresse, imprudence, inattention, négligence ou défaut de prévoyance et de précaution, une abstention devant même être retenue comme faute-cause de lésions si elle constitue la violation d’une obligation légale, réglementaire ou conventionnelle (ibidem).

Toute infraction à la loi pénale, et notamment à la réglementation sur la circulation constitue une telle faute.

L’article 140 in fine de l’arrêté grand-ducal du 23 novembre 1955 précise qu’il est interdit d’empêcher la marche normale des autres véhicules en effectuant un freinage soudain ou un arrêt brusque non exigé par des raisons de sécurité. » 1 1 Arrêt litigieux n°388/24 rendue par la VIe chambre de la Cour d’appel du 25 novembre 2024, p.4Toute imprudence ou négligence du prévenu, si minime soit-elle, dès lors qu’elle est en lien causal avec le dommage, constitue donc une faute punissable. En conséquence, la présence d’une faute de la victime n’a d’effet juridique, le cas échéant, que sur le plan civil (partage d’indemnisation) et non sur le plan pénal.

Il ressort de la motivation même de l’arrêt attaqué que les juges du fond n’ont nullement ignoré la faute éventuelle de la victime, mais ont au contraire estimé qu’elle ne pouvait avoir aucune incidence exonératoire en droit pénal.

La Cour d’appel a expressément retenu que, « même à supposer qu’il puisse être reproché à PERSONNE2.) de ne pas avoir été en mesure d’éviter une collision, toujours est-il que cette faute de conduite […] ne serait nullement de nature à exonérer PERSONNE1.) sur le plan pénal, l’infraction de coups et blessures involontaires étant établie par le seul fait d’une faute, aussi minime soit-elle, se trouvant en lien de causalité avec les blessures essuyées par la victime »2.

L’existence d‘une faute dans le chef de la victime, si elle n’est pas exonératoire, n’est pas requise pour la constatation de l’infraction de coups et blessures involontaires. Le motif critiqué au moyen est partant sans incidence sur la décision attaquée.

Il en suit que le moyen est inopérant.

Subsidiairement il est encore établi que les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour apprécier la relation causale entre un accident, les blessures subies par la victime et la faute de l’auteur, de telle sorte que le contrôle de cet élément échappe à Votre Cour, de sorte que le moyen n’est pas fondé.

Quant au deuxième moyen de cassation Le deuxième moyen est tiré de la violation, sinon du défaut d’application de l’article 141 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques, en ce que les juges du fond après avoir constaté l’existence d’une faute dans le chef de la victime, ont omis de tirer les conséquences de cette faute dans la genèse de l’accident et par conséquent l’incidence de chacune des fautes dans la genèse du dommage, alors que l’article 141 prévoit que tout conducteur d’un véhicule en mouvement doit observer une distance suffisante, selon les circonstances, entre son véhicule et le véhicule qui le précède, pour qu’une collision puisse être évitée le cas échéant.

Le second moyen soutient que la Cour d’appel aurait violé l’article 141 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 en ne tirant pas les conséquences de la violation de cette disposition par la victime.

Pour mémoire, l’article 141 impose à tout conducteur de garder une distance suffisante entre son véhicule et celui qui le précède, de sorte que « en cas de ralentissement ou d’arrêt subits du véhicule qui précède, une collision puisse être évitée ».

2 idem En l’espèce, il est constant que Monsieur PERSONNE2.), qui suivait le véhicule de Monsieur PERSONNE1.), n’a pas respecté cette distance de sécurité. Les juges du fond l’ont d’ailleurs relevé dans leurs constatations de fait.

Le pourvoi reproche cependant à l’arrêt de ne pas avoir appliqué cette règle en faveur du prévenu : selon le moyen, en considérant à tort le freinage brusque du prévenu comme un événement imprévisible et irrésistible pour la victime, la Cour aurait indûment écarté la faute de Monsieur PERSONNE2.) et, ce faisant, violé l’article 141 précité. En d’autres termes, le demandeur en cassation estime que la faute du prévenu ne pouvait être qualifiée de “circonstance imprévisible et irrésistible” pour la victime qu’à la condition que celle-ci n’ait commis aucune faute ; dès lors que Monsieur PERSONNE2.) a manqué à son obligation de distance, l’événement ne saurait juridiquement être qualifié de totalement imprévisible, et aurait dû, selon le moyen, conduire la Cour d’appel à atténuer ou exclure la responsabilité de Monsieur PERSONNE1.).

Ce moyen n’est pas fondé. D’une part, il se méprend sur la portée de l’article 141 du règlement de 1955. En effet, le manquement de la victime à la distance de sécurité prévue par l’article 141 n’implique pas que l’auteur du freinage intempestif échappe à toute faute. Comme exposé ci-

dessus, la faute de la victime n’a pas pour effet d’exonérer automatiquement le prévenu.

D’autre part, et surtout, la critique formulée par le moyen revient en réalité à remettre en cause l’appréciation souveraine des juges du fond quant au lien de causalité et aux circonstances de l’accident. La Cour d’appel a en effet apprécié in concreto le comportement des deux protagonistes et a jugé, au vu des éléments de preuve, que le freinage brutal de Monsieur PERSONNE1.) était si abrupt et inattendu qu’il constituait, pour le conducteur qui le suivait, un événement imprévisible et irrésistible.

Une telle évaluation relève éminemment du pouvoir d’appréciation des juges du fond, qui jugent des circonstances et de la causalité au vu des éléments produits à l’audience. Il n’appartient pas à Votre Cour de substituer son appréciation des faits à celle souverainement opérée par les juges du fond, dès lors que leur décision est exempte de contradiction ou d’erreur de droit.

L’arrêt attaqué n’a donc méconnu aucune disposition légale, il a au contraire concilié l’article 141 précité avec le principe selon lequel toute faute causalement liée au dommage engage la responsabilité de son auteur.

Le moyen remettant en cause l’appréciation souveraine des juges du fond de la relation causale entre l’accident, les blessures subies et la faute de la victime est partant à déclarer non fondé.

Les deux moyens de cassation sont partant à rejeter.

Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.

Pour le Procureur Général d’Etat, Le substitut près du Parquet général Marianna LEAL ALVES 10


Synthèse
Numéro d'arrêt : 100/25
Date de la décision : 12/06/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2025-06-12;100.25 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award