La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/05/2025 | LUXEMBOURG | N°81/25

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 08 mai 2025, 81/25


N° 81 / 2025 pénal du 08.05.2025 Not. 13226/19/CD Numéro CAS-2024-00126 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, huit mai deux mille vingt-cinq, sur le pourvoi de 1) PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.), et 2) PERSONNE2.), née le DATE2.) à ADRESSE2.), les deux demeurant à L-

ADRESSE3.), 3) la société à responsabilité limitée SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-ADRESSE3.), représentée par le gérant, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), prévenus, d

emandeurs en cassation, comparant par Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, ...

N° 81 / 2025 pénal du 08.05.2025 Not. 13226/19/CD Numéro CAS-2024-00126 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, huit mai deux mille vingt-cinq, sur le pourvoi de 1) PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.), et 2) PERSONNE2.), née le DATE2.) à ADRESSE2.), les deux demeurant à L-

ADRESSE3.), 3) la société à responsabilité limitée SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-ADRESSE3.), représentée par le gérant, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), prévenus, demandeurs en cassation, comparant par Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 15 juillet 2024 sous le numéro 258/24 X. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation au pénal formé par Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, au nom de PERSONNE2.), de PERSONNE1.) et de la société à responsabilité limitée SOCIETE1.), suivant déclaration du 14 août 2024 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;

Vu le mémoire en cassation déposé le 16 septembre 2024 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du procureur général d’Etat adjoint Serge WAGNER.

Entendu Maître Alex PENNING, qui a eu la parole en dernier, et Monsieur Serge WAGNER.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné les demandeurs en cassation sub 1) et 2) du chef de diverses infractions à une peine d’emprisonnement assortie du sursis partiel, à une amende ainsi qu’à l’interdiction, pendant une durée déterminée, de l’exercice de toute activité professionnelle dans le domaine immobilier et avait ordonné la confiscation définitive de l’immeuble leur appartenant pour sa valeur jusqu’à concurrence d’un certain montant. La demanderesse en cassation sub 3) avait été condamnée, du chef des infractions retenues à sa charge, à une amende.

La Cour d’appel, par réformation, a acquitté les demandeurs en cassation du chef de certaines infractions et les a déclarés convaincus du chef de blanchiment-

détention, de blanchiment-justification mensongère et de blanchiment-conversion.

Elle a réduit la peine d’emprisonnement et le sursis prononcés à l’égard des demandeurs en cassation sub 1) et 2) et a réduit l’amende prononcée à l’égard de la demanderesse en cassation sub 3). Pour le surplus, elle a confirmé le jugement.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de la loi, in specie :

° l’article 109 de la Constitution et qui dispose que motivé. Il est prononcé en audience publique. » ° l’article 195 du Code de procédure pénale et aux duquel Tout jugement définitif de condamnation sera motivé. Il déterminera les circonstances constitutives de l'infraction et citera les articles de la loi dont il est fait application sans en reproduire les termes. (1) Dans le dispositif de tout jugement de condamnation seront énoncés les faits dont les personnes citées seront jugées coupables ou responsables, la peine et les condamnations civiles. (2) ».

2 En ce qu’il est, en matière civile, de jurisprudence courante et telle qu’également transposable sur le visa des articles 109 de la Constitution et de l’article 195 du Code de procédure pénale en matière pénale, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs (cf. notamment Cour de cassation, 28/05/2020, rôle n°CAS-2019-00080) ;

alors qu’en ayant, in specie et au visa de l’article 8-1 §3 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie prévoyant, dans le cadre de ladite loi, l’infraction de blanchiment-

détention, ainsi que sur le fondement de l’infraction de blanchiment-justification mensongère au sens de l’article 8-1 §1 de la même loi modifiée du 19 février 1973 encore et d’un côté, retenu qu’il ne résulterait pas au-delà de tout doute des éléments cités à l’arrêt, ni des autres éléments du dossier répressif qu’PERSONNE2.), PERSONNE1.) ou la société SOCIETE1.) savaient ou avaient conscience que les fonds litigieux provenaient d’une infraction à l’article 8 §1 a.) de ladite loi modifiée du 19 février 1973, pour, de l’autre côté et du chef de l’infraction de blanchiment-

détention de droit commun, en l’occurrence sur base des articles 506-1 §3 et 506-4 du Code pénal, avoir (cf. page 178 et 179 de l’arrêt) toutefois retenu les mêmes trois parties coupables au motif qu’elles auraient su que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’auraient eu aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondraient pas aux montants prévus dans le contrat en question, qu’elles auraient fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps er auraient nécessairement eu conscience du fait que PERSONNE3.) n’aurait pas poursuivi d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquelles auraient dû éveiller la méfiance des mêmes prévenus, la Cour considère que les prévenus auraient nécessairement eu conscience de l’origine frauduleuse et qu’ils auraient su que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue et que dans la mesure où il résulterait de tous les développements en fait et en droit ci-dessus, qu’PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) auraient directement participé au blanchiment d’une partie des revenus illicites de PERSONNE3.) en ayant fait revenir à celui-ci ou à son épouse le montant total d’au moins 195.959,40 € provenant de ces revenus, ils seraient à retenir comme auteurs du blanchiment nt d’au moins cette même somme, sans toutefois préciser de quelle(s) infraction(s) primaire(s) spécifiquement à désigner et avancées par le Ministère public au sens du point 1.) de l’article 506-1 du même Code il se serait, toujours sur le même fondement de droit commun, d’une part, agi, alors que celles découlant de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie se trouvent, selon le propre raisonnement de la Cour d’appel, exclus au bénéfice du doute (pages 175 et 176 respectivement 184) et que les mêmes trois parties avaient, toujours sur base de l’arrêt entrepris et à l’instar de Monsieur PERSONNE3.), précisément été acquittées au niveau du prétendu faux compromis de vente portant sur le terrain à ADRESSE4.) (page 188) et en rapport avec la vente prétendument fictive du véhicule BMW 335 (immatriculé NUMERO2.)) (page 117) et en ayant, d’autre part, omis de préciser, toujours au visa de l’article 506-1 §3 du Code pénal, par le biais de quel moyen et dans quelles circonstances, les mêmes trois parties auraient acquis, détenu ou utilisé les fonds prétendument illicites de la part du dénommé PERSONNE3.) ou quel avantage patrimonial quelconque ils en auraient tiré, la même Cour d’appel s’est adonnée à une absence de motivation, 3 sinon du moins à une contradiction de motifs, valant également absence de motifs, pour ainsi ne pas avoir, au sens de l’article 195 du Code de procédure pénale et à suffisance de droit, déterminé les circonstances constitutives de l'infraction en question, défaut de motivation qui constitue, de par définition, un vice de forme, de sorte que l’arrêt entrepris doit encourir la cassation de ce chef. ».

Réponse de la Cour Le défaut de motifs est un vice de forme. Une décision est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, fût-elle incomplète ou viciée, sur le point considéré.

Le grief tiré de la contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, ne peut être retenu que si les motifs incriminés sont contradictoires à un point tel qu’ils se détruisent et s’annihilent réciproquement, aucun ne pouvant être retenu comme fondement de la décision.

En retenant, concernant les principes applicables en matière de blanchiment, « Les juges de première instance ont fait une analyse détaillée des éléments constitutifs de l’infraction de blanchiment et des différentes textes légaux applicables à laquelle la Cour se réfère.

Ils ont correctement retenu que l’infraction de blanchiment requiert tout d’abord l’existence d’une infraction primaire et qu’il s’agit, en outre, d’une infraction intentionnelle, l’intention supposant chez l’agent la conscience et la volonté infractionnelle.

Quant à l’élément matériel de l’infraction de blanchiment, à savoir l’existence d’un acte qui facilite la justification mensongère de l’origine des biens illicites (article 8-1, paragraphe 1) de la loi de 1973 et article 506-1, paragraphe 1) du Code pénal), d’un acte qui apporte son concours à une opération de placement, de dissimulation, de déguisement, de transfert ou de conversion de ces biens (article 8-1, paragraphe 2) de la même loi et article 506-1, paragraphe 2) du même code) ou, dans le cadre de l’article 8-1, paragraphe 3) de la même loi et de l’article 506-

1, paragraphe 3) du Code pénal, d’un acte d’acquisition, de détention ou d’utilisation desdits biens, il est renvoyé aux développements du tribunal en fait et en droit à ce sujet auxquels la Cour se rallie ainsi qu’aux développements faits ci-

dessus.

La preuve de l’élément moral de l’infraction de blanchiment résulte de toutes les circonstances de fait qui doivent nécessairement éveiller la méfiance de celui qui prend possession des choses et qui constituent des présomptions suffisamment graves, précises et concordantes pour conclure à l’existence de l’élément de connaissance. La connaissance par la personne poursuivie de l’origine illicite des fonds s’apprécie au moment de la réalisation de l’infraction.

Quant au degré de connaissance requise du blanchisseur, il suffit, pour caractériser l’infraction de blanchiment, d’établir que son auteur avait conscience de l’origine frauduleuse des fonds et non de la nature exacte des infractions 4 d’origine. Il n’est pas nécessaire que l’infraction primaire puisse être identifiée avec précision. Il suffit de savoir ou de se douter, sur la base des données de fait, que toute provenance légale des fonds puisse être exclue.

Comme l’ont relevé correctement les juges de première instance, les infractions primaires sont en l’espèce constituées en très grande majorité par des infractions à la loi de 1973 telles que retenues ci-dessus dans le cadre de l’appréciation en droit du volet stupéfiants.

(…) [L’article 8-1 de la même loi] spécifique aux infractions en matière de stupéfiants reprend les mêmes distinctions en matière de blanchiment que les articles du Code pénal relatifs à l’infraction de blanchiment (articles 506-1 et suivants), mais a la particularité que, pour être applicable à d’autres personnes que les auteurs d’infractions à l’article 8, paragraphe 1. a) et b), qui ont nécessairement connaissance des infractions primaires, il faudra établir que l’agent savait ou avait conscience que le bien acquis, détenu ou utilisé provenait d’une infraction à l’article 8, paragraphe 1. a) ou b), ou que la justification mensongère ou le concours apporté à une opération de dissimulation concernait le revenu, le produit ou l’objet d’une telle infraction en matière de stupéfiants.

Si tel est le cas, il y a lieu de faire application de la disposition spéciale de l’article 8-1 de la loi de 1973 en tant que loi spéciale dérogeant à la loi générale, sous ses différentes distinctions de blanchiment-détention, blanchiment-justification-

mensongère et blanchiment-conversion.

Si, par contre, il n’est pas établi que la personne avait connaissance de l’origine illicite en provenance d’une infraction en matière de stupéfiants, mais que néanmoins il est établi que la personne savait ou avait conscience que l’argent ou le bien acquis, détenu ou utilisé provenait d’un délit et a décidé de participer néanmoins à leur blanchiment, sans qu’il n’ait été établi que le blanchisseur ait eu la connaissance précise, ni de la nature, des circonstances de temps, de lieu, d’exécution ou de la qualification exacte de l’infraction primaire, ni de la personne de la victime ou de celle de son auteur, il y a lieu de faire application des articles 506-1 et suivants du Code pénal libellés à titre subsidiaire par le ministère public. », concernant l’infraction de blanchiment-détention visée à l’article 8-1, paragraphe 3, de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie (ci-après « la loi du 19 février 1973 »), « Les juges de première instance ont retenu que les prévenus avaient connaissance du trafic de stupéfiants de PERSONNE3.) en se basant sur l’importance de ce trafic, sur les montants élevés des commissions payées qui ne correspondent pas aux montants prévus dans le faux contrat d’apporteur d’affaires, sur les déclarations contradictoires des prévenus concernant le contrat d’apporteur d’affaires et les commissions y relatives, sur le fait que PERSONNE1.) a d’abord été l’agent d’assurances de PERSONNE3.) et le connaissait donc pendant une certaine période avant les faits qui lui sont reprochés et sur le fait que les agissements qui 5 leur sont reprochés (faux contrats, fausses commissions, achat-vente de véhicules) correspondent aux méthodes de blanchiment décrites, selon l’agent infiltré, par PERSONNE4.), ami du couple GROUPE1.).

La Cour considère, cependant, qu’il ne résulte pas au-delà de tout doute des éléments précités, ni des autres éléments du dossier répressif, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) ou la société SOCIETE1.) savaient ou avaient conscience que les fonds litigieux provenaient d’une infraction à l’article 8, paragraphe 1. a) et b) de la loi de 1973.

Il s’ensuit que PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) sont, par réformation, à acquitter (…) » et, concernant l’infraction de blanchiment-détention visée aux articles 506-1, paragraphe 3, et 506-4 du Code pénal, « À titre subsidiaire par rapport à l’infraction libellée sous II.A.1.13, le ministère public reproche à PERSONNE2.), à PERSONNE1.) et à la société SOCIETE1.) d’avoir comme auteurs, co-auteurs ou complices, depuis le 21 juillet 2015, sinon le 5 septembre 2016, sinon le ou autour du 3 février 2017 jusqu’à mars 2022, dans l’arrondissement judiciaire de Luxembourg, sciemment détenu le produit direct ou indirect ou un avantage patrimonial quelconque des infractions libellées sub I.B.1.2. et I.B.2.2. ci-dessus, notamment au moins les sommes d’argent reçues en espèces de la part de PERSONNE3.) dans le contexte du faux contrat d’apporteur d’affaires conclu avec la compagne de PERSONNE3.), PERSONNE5.), du virement sans raison en faveur de PERSONNE5.), du compromis de vente portant sur le terrain à ADRESSE4.) et du prêt contracté en rapport avec la vente fictive du véhicule BMW 335 (immatriculé NUMERO2.)), sommes équivalentes au moins aux montants virés en faveur de PERSONNE3.) et PERSONNE5.), soit un total d’au moins 195.959,40 euros, ainsi que leur bien immobilier (terrain et construction) sis à ADRESSE5.) inscrit au cadastre sous (lequel a été saisi), sachant au moment où ils recevaient cet argent et cet immeuble qu’ils provenaient de l’une ou de plusieurs des infractions visées au point 1) de l’article 506-1 du Code pénal ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions.

Au vu du fait que les prévenus savaient que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’avaient aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondaient pas aux montants prévus dans le contrat en question, que les prévenus ont fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps et avaient nécessairement conscience du fait que PERSONNE3.) ne poursuivait pas d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquels devaient éveiller la méfiance des prévenus, la Cour considère que les prévenus avaient nécessairement conscience de l’origine frauduleuse des fonds et qu’ils savaient que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue.

Dans la mesure où il résulte de tous les développements en fait et en droit ci-

dessus, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) ont 6 directement participé au blanchiment d’une partie des revenus illicites de PERSONNE3.) en faisant revenir à celui-ci ou à son épouse le montant total d’au moins 195.959,40 euros provenant de ces revenus, ils sont à retenir comme auteurs du blanchiment d’au moins cette même somme.

L’enquête n’a cependant pas établi que PERSONNE2.), PERSONNE1.) ou la société SOCIETE1.) auraient encore touché une commission supplémentaire pour les services rendus, ni, en conséquence, qu’ils auraient détenu des sommes au-delà des 195.959,40 euros, de sorte qu’il y a lieu de limiter leur intervention en matière de blanchiment à cette même somme.

Il y a, partant, lieu de retenir PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) dans les liens de la prévention aux articles 506-1, paragraphe 3) et 506-

4 du Code pénal, sauf à limiter la période infractionnelle telle que retenue ci-dessus et à la limiter à la somme de 195.959,40 euros, à l’exclusion de toutes autres sommes d’argent et objets tant mobiliers qu’immobiliers. », les juges d’appel ont, sans se contredire, motivé leur décision d’acquitter les demandeurs en cassation du chef de l’infraction de blanchiment-détention visée à l’article 8-1, paragraphe 3, de la loi du 19 février 1973 et de les condamner du chef de l’infraction de blanchiment-détention visée aux articles 506-1, paragraphe 3, et 506-4 du Code pénal.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de la loi, in specie :

° l’article 506-1 paragraphe 3 du Code pénal et aux termes duquel : (Sont punis d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 1.250 euros à 1.250.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement): Ceux qui ont acquis, détenu ou utilisé des biens visés à l’article 31, paragraphe 2, point 1°, formant l’objet ou le produit, direct ou indirect, des infractions énumérées au point 1) de cet article ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l’une ou de plusieurs de ces infractions, sachant, au moment où ils les recevaient, qu’ils provenaient de l’une ou de plusieurs des infractions visées au point 1) ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions » En ce que l’infraction de blanchiment-détention de droit commun consiste, à la lecture de l’article 506-1 §3 du Code pénal en l’acquisition, la détention ou l’utilisation d’un bien dont l’auteur savait, au moment où il recevait ledit bien, qu’il provenait d’une des infractions visées à l’article 31 §2 point 1.) ou au point 1.) dudit article 506-1 du Code pénal ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions ;

7 alors qu’en ayant, in specie retenu les trois demandeurs coupables du chef de l’infraction de blanchiment-détention de droit commun, en l’occurrence sur base des articles 506-1 §3 et 506-4 du Code pénal, avoir (cf. page 178 et 179 de l’arrêt) ce au motif qu’elles auraient su que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’auraient eu aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondraient pas aux montants prévus dans le contrat en question, qu’elles auraient fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps er auraient nécessairement eu conscience du fait que PERSONNE3.) n’aurait pas poursuivi d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquelles auraient dû éveiller la méfiance des mêmes prévenus, la Cour considère que les prévenus auraient nécessairement eu conscience de l’origine frauduleuse et qu’ils auraient su que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue et que dans la mesure où il résulterait de tous les développements en fait et en droit ci-dessus, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) auraient directement participé au blanchiment d’une partie des revenus illicites de PERSONNE3.) en ayant fait revenir à celui-ci ou à son épouse le montant total d’au moins 195.959,40 € provenant de ces revenus, ils seraient à retenir comme auteurs du blanchiment nt d’au moins cette même somme, sans toutefois préciser de quelle(s) infraction(s) primaire(s) spécifiquement à désigner et avancées par le Ministère public au sens du point 1.) de l’article 506-1 du même Code il se serait, toujours sur le même fondement de droit commun, d’une part, agi, alors que celles découlant de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie se trouvent, selon le propre raisonnement de la Cour d’appel, exclus au bénéfice du doute (pages 175 et 176 respectivement 184) et que les mêmes trois parties avaient, toujours sur base de l’arrêt entrepris et à l’instar de Monsieur PERSONNE3.), précisément été acquittées au niveau du prétendu faux compromis de vente portant sur le terrain à ADRESSE4.) (page 188) et en rapport avec la vente prétendument fictive du véhicule BMW 335 (immatriculé NUMERO2.)) (page 117) et en ayant, d’autre part, omis d’établir et de rapporter, toujours au visa de l’article 506-1 §3 du Code pénal, par le biais de quel moyen et dans quelles circonstances, les mêmes trois parties auraient acquis, détenu ou utilisé les fonds prétendument illicites de la part du dénommé PERSONNE3.) ou quel avantage patrimonial quelconque ils en auraient tiré, la même Cour d’appel n’a pas caractérisé et établi l’élément matériel de l’infraction de blanchiment-détention de droit commun et qui requiert, en tout état de cause, la preuve de l’acquisition, de la détention ou de l’utilisation des biens visés à l’article 506-1 §3, renvoyant, à son tour, à l’article 31, §2 sous 1.) du Code pénal, formant l’objet ou le produit, direct ou indirect, des infractions énumérées au point 1) de cet article ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l’une ou de plusieurs de ces infractions, la Cour d’appel a violé le texte repris au deuxième moyen, pour en effet ne pas avoir déterminé les circonstances constitutives de l'infraction, in casu l’élément matériel de ladite infraction, de sorte que l’arrêt doit encourir la cassation. ».

Réponse de la Cour Les demandeurs en cassation font grief aux juges d’appel d’avoir violé la disposition visée au moyen en n’ayant pas précisé les infractions primaires aublanchiment et en n’ayant pas caractérisé l’élément matériel de l’infraction de blanchiment-détention de droit commun.

Vu l’article 506-1, paragraphe 3, du Code pénal.

Les juges d’appel ont déclaré les demandeurs en cassation convaincus « comme auteurs, co-auteurs ou complices, en infraction aux articles 506-1, paragraphe 3) et 506-4 du Code pénal, entre le 5 septembre 2016, sinon le ou autour du 3 février 2017 et le 11 septembre 2018, dans l’arrondissement judiciaire de Luxembourg, d’avoir sciemment détenu le produit direct ou indirect ou un avantage patrimonial quelconque des infractions libellées sub I.B.1.2. et I.B.2.2. ci-dessus, notamment au moins les sommes d’argent reçues en espèces de la part de PERSONNE3.) dans le contexte du faux contrat d’apporteur d’affaires conclu avec la compagne de PERSONNE3.), PERSONNE5.), du virement sans raison en faveur de PERSONNE5.), du compromis de vente portant sur le terrain à ADRESSE4.) et du prêt contracté en rapport avec la vente fictive du véhicule BMW 335 (immatriculé NUMERO2.)), sommes équivalentes au moins aux montants virés en faveur de PERSONNE3.) et PERSONNE5.), soit un total d’au moins 195.959,40 euros, sachant au moment où ils recevaient cet argent qu’il provenait de l’une ou de plusieurs des infractions visées au point 1) de l’article 506-1 du Code pénal ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions ».

Il résulte de l’arrêt attaqué que, concernant les « infractions libellées sub I.B.1.2. et I.B.2.2 », les infractions de faux compromis de vente d’un terrain à ADRESSE4.) et faux acte notarié en résultant (infraction libellée sub B.1.2.2.), de faux contrat de vente BMW 335 (infraction libellée sub B.1.2.3.) et d’escroquerie en relation avec le prêt à tempérament Record Credits (infraction libellée sub B.2.2.) n’ont été retenues à charge d’aucun des prévenus.

En retenant les trois demandeurs en cassation dans les liens de l’infraction de blanchiment-détention visée aux articles 506-1, paragraphe 3, et 506-4 du Code pénal par rapport à des infractions primaires pour lesquelles tous les prévenus ont été acquittés au motif que les faits à la base de ces infractions n’étaient pas établis, les juges d’appel ont violé la disposition visée au moyen.

Il résulte encore de l’arrêt attaqué que les demanderesses en cassation sub 2) et sub 3) et PERSONNE3.) ont été retenus dans les liens de l’infraction de faux contrat d’apporteur d’affaires et de fausses factures (infraction libellée sub B.1.2.1.) et le demandeur en cassation sub 1) a été retenu dans les liens de l’infraction de faux contrat de vente Audi A7 (infraction libellée sub B.1.2.4).

En retenant « Dans la mesure où il résulte de tous les développements en fait et en droit ci-dessus, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) ont 9 directement participé au blanchiment d’une partie des revenus illicites de PERSONNE3.) en faisant revenir à celui-ci ou à son épouse le montant total d’au moins 195.959,40 euros provenant de ces revenus, ils sont à retenir comme auteurs du blanchiment d’au moins cette même somme. », les juges d’appel n’ont pas caractérisé l’élément matériel de l’infraction de blanchiment-détention visée aux articles 506-1, paragraphe 3, et 506-4 du Code pénal.

Il s’ensuit que l’arrêt encourt la cassation sur ces points, l’annulation de la décision affectant aussi la peine et notamment la confiscation.

Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de la loi, in specie :

° l’article 6 § 2 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales du 4 novembre 1950 et telle que ratifiée par le Grand-

duché de Luxembourg par une loi du 29 août 1953 (ci-dessous la ) et selon lequel ;

qu’en ce qu’il découle de la combinaison de ces textes que accusé à être présumé innocent et à faire supporter à l’accusation la charge de prouver les allégations formulées à son encontre relève de la notion générale de procès équitable au sens de l’article 6 § 1, qui s’applique à la procédure de fixation de la peine (ibidem, §§ 39-40 ; Grayson et Barnham c. Royaume-Uni, 2008, §§ 37 et 39), alors qu’il se dégage, d’autre part, du point 348 de l'article 6, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que "le droit de tout accusé à être présumé innocent et à faire supporter à l’accusation la charge de prouver les allégations formulées à son encontre relève de la notion générale de procès équitable au sens de l’article 6 § 1, qui s’applique à la procédure de fixation de la peine." (ibidem, §§ 39-40 ; Grayson et Barnham c. Royaume-Uni, 2008, §§ 37 et 39). ».

que cette présomption d’innocence n’a pas été respectée au regard des divers rapports de Police qui soulèvent fortement le doute et l’incertitude quant aux diverses infractions libellées à l’encontre des co-inculpés, alors que le contraire ressort pourtant du réquisitoire du Parquet, le tout à défaut d’un quelconque élément à charge nouveau.

qu’il ensuit que l’arrêt entrepris doit encourir la cassation. ».

Réponse de la Cour Les demandeurs en cassation, qui invoquent la violation de la présomption d’innocence « au regard des divers rapports de Police qui soulèvent fortement le doute et l’incertitude quant aux diverses infractions libellées à l’encontre des co-

inculpés, alors que le contraire ressort pourtant du réquisitoire du Parquet, le tout à défaut d’un quelconque élément à charge nouveau », ne formulent aucune critique à l’égard de l’arrêt attaqué.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation casse et annule, dans la mesure où les demandeurs en cassation ont été condamnés du chef de l’infraction de blanchiment-détention visée aux articles 506-

1, paragraphe 3, et 506-4 du Code pénal, l’arrêt attaqué rendu le 15 juillet 2024 sous le numéro 258/24 X. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

dans cette mesure, déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s’en sont suivis, remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, autrement composée ;

laisse les frais de l’instance en cassation à charge de l’Etat ;

ordonne qu’à la diligence du Procureur général d’Etat, le présent arrêt soit transcrit sur le registre de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt soit consignée en marge de l’arrêt annulé.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, huit mai deux mille vingt-cinq, à la Cité judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, qui, à l’exception du président Thierry HOSCHEIT, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Agnès ZAGO en présence du procureur général d’Etat adjoint Marie-

Jeanne KAPPWEILER et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE2.) PERSONNE1.) la société à responsabilité limitée SOCIETE1.) SARL en présence du ministère public (No CAS-2024-00126 du registre)

_______________________________________________

Par déclaration faite le 14 août 2024 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Alex PENNING, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, a formé pour compte et au nom de PERSONNE2.), de PERSONNE1.) et de la société à responsabilité limitée SOCIETE1.) SARL un recours en cassation contre un arrêt n° 258/24 X rendu le 15 juillet 2024 par la Cour d’appel siégeant en matière correctionnelle.

Cette déclaration de recours a été suivie le 16 septembre 2024 par le dépôt du mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.

Le pourvoi a été déclaré dans les formes et délais de la loi. De même le mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 a été déposé dans les formes et délais y imposés.1 Faits et rétroactes :

Par jugement No 1670/2023 du 13 juillet 2023 rendu par une chambre correctionnelle du Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, PERSONNE2.) a été condamnée à une peine d’emprisonnement de 8 ans dont 6 ans avec sursis et à une amende de 10.000 euros, pour avoir :

1 Le délai pour déposer le mémoire en cassation a expiré le samedi 14 septembre 2024, de sorte qu’il a été reporté au lundi 16 septembre 2024.- entre le 5 septembre 2016, sinon le ou autour du 3 février 2017 et le 11 septembre 2018, commis des faux en écritures privées, - entre le 22 décembre 2016, sinon à une date proche de cette date, et le 30 mars 2017, commis un faux en écritures privées, avoir fait usage de ce faux et avoir commis un faux en écritures authentiques publiques.

Elle a encore été retenue dans les liens des préventions de blanchiment-détention, de blanchiment-justification mensongère et de blanchiment-conversion.

Elle a été acquittée du chef d’autres infractions de faux et d’usages de faux et d’escroquerie.

En vertu du même jugement, PERSONNE1.) a été condamné à une peine d’emprisonnement de 6 ans dont 5 ans avec sursis et à une amende de 5.000 euros, pour avoir :

- entre le 22 décembre 2016, sinon à une date proche de cette date, et le 30 mars 2017, commis un faux en écritures privées, avoir fait usage de ce faux et avoir commis un faux en écritures authentiques publiques et - le 2 février 2017, commis un faux en écritures privées et avoir fait usage de ce faux.

Il a encore été retenu dans les liens des préventions de blanchiment-détention, de blanchiment-justification mensongère et de blanchiment-conversion.

Il a été acquitté du chef d’autres infractions de faux et d’usages de faux et d’escroquerie.

Par même jugement, la société SOCIETE1.) a été condamnée à une amende de 50.000 euros, pour avoir entre le 5 septembre 2016, sinon le ou autour du 3 février 2017 et le 11 septembre 2018, commis des faux en écritures privées.

Elle a encore été retenue dans les liens des préventions de blanchiment-détention, de blanchiment-justification mensongère et de blanchiment-conversion.

Elle a été acquittée du chef d’infractions de faux et d’usage de faux.

Le tribunal a encore retenu que l’ensemble des infractions ont été commises par les prévenus, et notamment par PERSONNE3.), PERSONNE6.), PERSONNE7.), PERSONNE8.), PERSONNE4.), la société SOCIETE2.), PERSONNE9.), PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) dans le cadre d’une organisation criminelle et a appliqué la circonstance aggravante de l’article 10 de la loi de 1973.

Par arrêt no 258/24 X du 15 juillet 2024, la Cour d’appel a acquitté PERSONNE2.) des préventions non retenues à sa charge, l’a condamnée du chef des infractions retenues à sa charge à une peine d’emprisonnement de 4 (quatre) ans, a dit qu’ilsera sursis à l’exécution de 3 (trois) ans de cette peine d’emprisonnement et a maintenu la peine d’amende prononcée en première instance.

En vertu du même arrêt, la Cour d’appel a acquitté PERSONNE1.) des préventions non retenues à sa charge, a condamné PERSONNE1.) du chef des infractions retenues à sa charge à une peine d’emprisonnement de 3 (trois) ans, a dit qu’il sera sursis à l’exécution de 2 (deux) ans de cette peine d’emprisonnement et a maintenu la peine d’amende prononcée en première instance.

Par même arrêt, la Cour d’appel a acquitté la société SOCIETE1.) des préventions non retenues à sa charge et l’a condamnée du chef des infractions retenues à sa charge à une peine d’amende de 40.000 (quarante mille) euros.

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Remarque introductive:

Le dossier pénal à la base des poursuites pénales contre les actuels demandeurs en cassation et les autres prévenus, extrêmement volumineux, est composé de plusieurs centaines de rapports dressés par la Police Grand-Ducale auxquels il faut ajouter notamment les rapports d’expertise, les nombreux devoirs ordonnées d’abord par Monsieur le Procureur d’Etat ensuite par Madame le juge d’instruction qui a notamment émis plusieurs décisions d’enquête européenne et des mandats d’arrêt.

A titre d’exemple, Madame le juge d’instruction a auditionné à 76 reprises les 22 personnes prévenues et finalement renvoyées devant une chambre correctionnelle du Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg.

Le dossier comporte ainsi plusieurs milliers de pages.

Tant les juges de première instance que les juges d’appel se sont basés sur l’entièreté du dossier pénal leur soumis pour analyser les infractions reprochées aux actuels demandeurs en cassation et aux autres prévenus.

Le jugement de première instance comporte 713 pages et l’arrêt de la Cour d’appel comporte 239 pages.

15 Quant au premier moyen de cassation « PREMIER MOYEN DE CASSATION Tiré de la violation de la loi, in specie :

l’article 109 de la Constitution et qui dispose que « Tout jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique. » l’article 195 du Code de procédure pénale et aux duquel « Tout jugement définitif de condamnation sera motivé. Il déterminera les circonstances constitutives de l'infraction et citera les articles de la loi dont il est fait application sans en reproduire les termes. (1) Dans le dispositif de tout jugement de condamnation seront énoncés les faits dont les personnes citées seront jugées coupables ou responsables, la peine et les condamnations civiles. (2) ».

En ce qu’il est, en matière civile, de jurisprudence courante et telle qu’également transposable sur le visa des articles 109 de la Constitution et de l’article 195 du Code de procédure pénale en matière pénale, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs (cf. notamment Cour de cassation, 28/05/2020, rôle n°CAS-2019-00080) ;

alors qu’en ayant, in specie et au visa de l’article 8-1 §3 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie prévoyant, dans le cadre de ladite loi, l’infraction de blanchiment-

détention, ainsi que sur le fondement de l’infraction de blanchiment-justification mensongère au sens de l’article 8-1 §1 de la même loi modifiée du 19 février 1973 encore et d’un côté, retenu qu’il ne résulterait pas au-delà de tout doute des éléments cités à l’arrêt, ni des autres éléments du dossier répressif que PERSONNE2.), PERSONNE1.) ou la société SOCIETE1.) savaient ou avaient conscience que les fonds litigieux provenaient d’une infraction à l’article 8 §1 a.) de ladite loi modifiée du 19 février 1973, pour, de l’autre côté et du chef de l’infraction de blanchiment-détention de droit commun, en l’occurrence sur base des articles 506-1 §3 et 506-4 du Code pénal, avoir (cf. page 178 et 179 de l’arrêt) toutefois retenu les mêmes trois parties coupables au motif qu’elles auraient su que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’auraient eu aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondraient pas aux montants prévus dans le contrat en question, qu’elles auraient fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps er auraient nécessairement eu conscience du fait que PERSONNE3.) n’aurait pas poursuivi d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquelles auraient dû éveiller la méfiance des mêmes prévenus, la Cour considère que les prévenus auraient nécessairement eu 16 conscience de l’origine frauduleuse et qu’ils auraient su que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue et que dans la mesure où il résulterait de tous les développements en fait et en droit ci-dessus, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) auraient directement participé au blanchiment d’une partie des revenus illicites de PERSONNE3.) en ayant fait revenir à celui-ci ou à son épouse le montant total d’au moins 195.959,40 € provenant de ces revenus, ils seraient à retenir comme auteurs du blanchiment nt d’au moins cette même somme, sans toutefois préciser de quelle(s) infraction(s) primaire(s) spécifiquement à désigner et avancées par le Ministère public au sens du point 1.) de l’article 506-1 du même Code il se serait, toujours sur le même fondement de droit commun, d’une part, agi, alors que celles découlant de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie se trouvent, selon le propre raisonnement de la Cour d’appel, exclus au bénéfice du doute (pages 175 et 176 respectivement 184) et que les mêmes trois parties avaient, toujours sur base de l’arrêt entrepris et à l’instar de Monsieur PERSONNE3.), précisément été acquittées au niveau du prétendu faux compromis de vente portant sur le terrain à ADRESSE4.) (page 188) et en rapport avec la vente prétendument fictive du véhicule BMW 335 (immatriculé NUMERO2.)) (page 117) et en ayant, d’autre part, omis de préciser, toujours au visa de l’article 506-1 §3 du Code pénal, par le biais de quel moyen et dans quelles circonstances, les mêmes trois parties auraient acquis, détenu ou utilisé les fonds prétendument illicites de la part du dénommé PERSONNE3.) ou quel avantage patrimonial quelconque ils en auraient tiré, la même Cour d’appel s’est adonnée à une absence de motivation, sinon du moins à une contradiction de motifs, valant également absence de motifs, pour ainsi ne pas avoir, au sens de l’article 195 du Code de procédure pénale et à suffisance de droit, déterminé les circonstances constitutives de l'infraction en question, défaut de motivation qui constitue, de par définition, un vice de forme, de sorte que l’arrêt entrepris doit encourir la cassation de ce chef. » Les demandeurs en cassation reprochent donc aux juges d’appel une contradiction de motifs valant défaut de motifs.

Les juges de première instance ont énoncé les principes en matière de blanchiment aux pages 557 à 560 de leur jugement.

Les juges d’appel ont repris correctement ces principes dans les termes suivants aux pages 163 à 165 de leur arrêt :

« D. Volet blanchiment Les juges de première instance ont fait une analyse détaillée des éléments constitutifs de l’infraction de blanchiment et des différentes textes légaux applicables à laquelle la Cour se réfère.

17 Ils ont correctement retenu que l’infraction de blanchiment requiert tout d’abord l’existence d’une infraction primaire et qu’il s’agit, en outre, d’une infraction intentionnelle, l’intention supposant chez l’agent la conscience et la volonté infractionnelle.

Quant à l’élément matériel de l’infraction de blanchiment, à savoir l’existence d’un acte qui facilite la justification mensongère de l’origine des biens illicites (article 8-1, paragraphe 1) de la loi de 1973 et article 506-1, paragraphe 1) du Code pénal), d’un acte qui apporte son concours à une opération de placement, de dissimulation, de déguisement, de transfert ou de conversion de ces biens (article 8-1, paragraphe 2) de la même loi et article 506-1, paragraphe 2) du même code) ou, dans le cadre de l’article 8-1, paragraphe 3) de la même loi et de l’article 506-1, paragraphe 3) du Code pénal, d’un acte d’acquisition, de détention ou d’utilisation desdits biens, il est renvoyé aux développements du tribunal en fait et en droit à ce sujet auxquels la Cour se rallie ainsi qu’aux développements faits ci-dessus.

La preuve de l’élément moral de l’infraction de blanchiment résulte de toutes les circonstances de fait qui doivent nécessairement éveiller la méfiance de celui qui prend possession des choses et qui constituent des présomptions suffisamment graves, précises et concordantes pour conclure à l’existence de l’élément de connaissance. La connaissance par la personne poursuivie de l’origine illicite des fonds s’apprécie au moment de la réalisation de l’infraction.

Quant au degré de connaissance requise du blanchisseur, il suffit, pour caractériser l’infraction de blanchiment, d’établir que son auteur avait conscience de l’origine frauduleuse des fonds et non de la nature exacte des infractions d’origine. Il n’est pas nécessaire que l’infraction primaire puisse être identifiée avec précision. Il suffit de savoir ou de se douter, sur la base des données de fait, que toute provenance légale des fonds puisse être exclue.

Comme l’ont relevé correctement les juges de première instance, les infractions primaires sont en l’espèce constituées en très grande majorité par des infractions à la loi de 1973 telles que retenues ci-dessus dans le cadre de l’appréciation en droit du volet stupéfiants.

L’article 8-1 de la même loi, libellé à titre principal par le ministère public, en sa version applicable au moment des faits, dispose que « [s]ont punis d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 1.250 à 1.250.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement :

1) ceux qui ont sciemment facilité par tout moyen, la justification mensongère de la nature, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la propriété des biens ou revenus tirés de l’une des infractions mentionnées à l’article 8, paragraphe 1. a) et b) ;

2) ceux qui ont sciemment apporté leur concours à une opération de placement, de dissimulation, de déguisement, de transfert ou de conversion de l’objet ou du produit direct ou indirect de l’une des infractions mentionnées à l’article 8, paragraphe 1. a) et b) ;

18 3) ceux qui ont acquis, détenu ou utilisé l’objet ou le produit direct ou indirect de l’une des infractions mentionnées à l’article 8, paragraphe 1. a) et b), sachant au moment où ils le recevaient, qu’il provenait de l’une de ces infractions ou de la participation à l’une de ces infractions ;

4) Les infractions visées aux points 1) à 3) sont également punissables :

- lorsque l’infraction primaire a été commise à l’étranger, - lorsque l’auteur est aussi l’auteur ou le complice de l’infraction primaire.

5) Les infractions visées aux points 1) à 3) sont punissables indépendamment de toutes poursuites ou condamnations pour l’une des infractions mentionnées à l’article 8, paragraphe 1. a) et b).

Seront punis des mêmes peines ceux qui auront acquis, détenu ou utilisé des biens, sachant, au moment où ils les recevaient, qu’ils provenaient de l’une des infractions mentionnées à l’article 8 sous a) et b) ou de la participation à l’une de ces infractions. ».

Cet article spécifique aux infractions en matière de stupéfiants reprend les mêmes distinctions en matière de blanchiment que les articles du Code pénal relatifs à l’infraction de blanchiment (articles 506-1 et suivants), mais a la particularité que, pour être applicable à d’autres personnes que les auteurs d’infractions à l’article 8, paragraphe 1. a) et b), qui ont nécessairement connaissance des infractions primaires, il faudra établir que l’agent savait ou avait conscience que le bien acquis, détenu ou utilisé provenait d’une infraction à l’article 8, paragraphe 1. a) ou b), ou que la justification mensongère ou le concours apporté à une opération de dissimulation concernait le revenu, le produit ou l’objet d’une telle infraction en matière de stupéfiants.

Si tel est le cas, il y a lieu de faire application de la disposition spéciale de l’article 8-1 de la loi de 1973 en tant que loi spéciale dérogeant à la loi générale, sous ses différentes distinctions de blanchiment-détention, blanchiment-justification-

mensongère et blanchiment-conversion.

Si, par contre, il n’est pas établi que la personne avait connaissance de l’origine illicite en provenance d’une infraction en matière de stupéfiants, mais que néanmoins il est établi que la personne savait ou avait conscience que l’argent ou le bien acquis, détenu ou utilisé provenait d’un délit et a décidé de participer néanmoins à leur blanchiment, sans qu’il n’ait été établi que le blanchisseur ait eu la connaissance précise, ni de la nature, des circonstances de temps, de lieu, d’exécution ou de la qualification exacte de l’infraction primaire, ni de la personne de la victime ou de celle de son auteur, il y a lieu de faire application des articles 506-1 et suivants du Code pénal libellés à titre subsidiaire par le ministère public.

Il en est de même pour les infractions primaires de droit commun ayant engendré des bénéfices illicites, auxquelles les dispositions générales des articles 506-1 et suivants du Code pénal s’appliquent. »2 2 Souligné par le soussigné Sur base des principes ci-avant énoncés, les juges d’appel ont d’une part, valablement pu acquitter les actuels demandeurs en cassation du chef de blanchiment-détention prévu à l’article 8-1 paragraphe 3) de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie (arrêt entrepris p. 175 et 176 ), du chef de blanchiment-justification mensongère prévu à l’article 8-1 paragraphe 1) de la loi précitée du 19 février 1973 (arrêt entrepris p. 184-186) et du chef de blanchiment-conversion prévu à l’article 8-1 paragraphe 2) de la loi précitée du 19 février 1973 (arrêt entrepris p. 209) aux motifs :

« qu’il ne résulte pas au-delà de tout doute des éléments précités, ni des autres éléments du dossier répressif, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) ou la société SOCIETE1.) savaient ou avaient conscience que les fonds litigieux provenaient d’une infraction à l’article 8, paragraphe 1. a) et b) de la loi de 1973 »3 et d’autre part, valablement pu condamner les actuels demandeurs en cassation du chef de blanchiment-détention prévu aux articles 506-1 paragraphe 3) et 506-4 du Code pénal (arrêt entrepris p. 178 et 179), du chef de blanchiment-justification mensongère prévu aux articles 506-1 paragraphe 1) et 506-4 du Code pénal (arrêt entrepris p. 198 à 200) et du chef de blanchiment-conversion prévu aux articles 506-

1 paragraphe 2) et 506-4 du Code pénal (arrêt entrepris p. 211 et 212) aux motifs :

« Au vu du fait que les prévenus savaient que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’avaient aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondaient pas aux montants prévus dans le contrat en question, que les prévenus ont fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps et avaient nécessairement conscience du fait que PERSONNE3.) ne poursuivait pas d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquels devaient éveiller la méfiance des prévenus, la Cour considère que les prévenus avaient nécessairement conscience de l’origine frauduleuse des fonds et qu’ils savaient que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue. »4 Il n’y a donc aucunement contradiction de motifs.

Il s’ensuit que le premier moyen de cassation n’est pas fondé.

3 Arrêt entrepris p. 175, 184 et 209 4 Arrêt entrepris p. 178-179, p.198-199 et p. 211 (en des termes légèrement différents)Quant au deuxième moyen de cassation « DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION Tiré de la violation de la loi, in specie :

l’article 506-1 paragraphe 3 du Code pénal et aux termes duquel : (Sont punis d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 1.250 euros à 1.250.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement): « Ceux qui ont acquis, détenu ou utilisé des biens visés à l’article 31, paragraphe 2, point 1°, formant l’objet ou le produit, direct ou indirect, des infractions énumérées au point 1) de cet article ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l’une ou de plusieurs de ces infractions, sachant, au moment où ils les recevaient, qu’ils provenaient de l’une ou de plusieurs des infractions visées au point 1) ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions » En ce que l’infraction de blanchiment-détention de droit commun consiste, à la lecture de l’article 506-1 §3 du Code pénal en l’acquisition, la détention ou l’utilisation d’un bien dont l’auteur savait, au moment où il recevait ledit bien, qu’il provenait d’une des infractions visées à l’article 31 §2 point 1.) ou au point 1.) dudit article 506-1 du Code pénal ou de la participation à l’une ou plusieurs de ces infractions ;

alors qu’en ayant, in specie retenu les trois demandeurs coupables du chef de l’infraction de blanchiment-détention de droit commun, en l’occurrence sur base des articles 506-1 §3 et 506-4 du Code pénal, avoir (cf. page 178 et 179 de l’arrêt) ce au motif qu’elles auraient su que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’auraient eu aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondraient pas aux montants prévus dans le contrat en question, qu’elles auraient fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps er auraient nécessairement eu conscience du fait que PERSONNE3.) n’aurait pas poursuivi d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquelles auraient dû éveiller la méfiance des mêmes prévenus, la Cour considère que les prévenus auraient nécessairement eu conscience de l’origine frauduleuse et qu’ils auraient su que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue et que dans la mesure où il résulterait de tous les développements en fait et en droit ci-dessus, que PERSONNE2.), PERSONNE1.) et la société SOCIETE1.) auraient directement participé au blanchiment d’une partie des revenus illicites de PERSONNE3.) en ayant fait revenir à celui-ci ou à son épouse le montant total d’au moins 195.959,40 € provenant de ces revenus, ils seraient à retenir comme auteurs du blanchiment nt d’au moins cette même somme, sans toutefois préciser de quelle(s) infraction(s) primaire(s) spécifiquement à désigner et avancées par le Ministère public au sens du point 1.) de l’article 506-1 du même Code il se serait, toujours sur le même 21 fondement de droit commun, d’une part, agi, alors que celles découlant de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie se trouvent, selon le propre raisonnement de la Cour d’appel, exclus au bénéfice du doute (pages 175 et 176 respectivement 184) et que les mêmes trois parties avaient, toujours sur base de l’arrêt entrepris et à l’instar de Monsieur PERSONNE3.), précisément été acquittées au niveau du prétendu faux compromis de vente portant sur le terrain à ADRESSE4.) (page 188) et en rapport avec la vente prétendument fictive du véhicule BMW 335 (immatriculé NUMERO2.)) (page 117) et en ayant, d’autre part, omis d’établir et de rapporter, toujours au visa de l’article 506-1 §3 du Code pénal, par le biais de quel moyen et dans quelles circonstances, les mêmes trois parties auraient acquis, détenu ou utilisé les fonds prétendument illicites de la part du dénommé PERSONNE3.) ou quel avantage patrimonial quelconque ils en auraient tiré, la même Cour d’appel n’a pas caractérisé et établi l’élément matériel de l’infraction de blanchiment-

détention de droit commun et qui requiert, en tout état de cause, la preuve de l’acquisition, de la détention ou de l’utilisation des biens visés à l’article 506-1 §3, renvoyant, à son tour, à l’article 31, §2 sous 1.) du Code pénal, formant l’objet ou le produit, direct ou indirect, des infractions énumérées au point 1) de cet article ou constituant un avantage patrimonial quelconque tiré de l’une ou de plusieurs de ces infractions, la Cour d’appel a violé le texte repris au deuxième moyen, pour en effet ne pas avoir déterminé les circonstances constitutives de l'infraction, in casu l’élément matériel de ladite infraction, de sorte que l’arrêt doit encourir la cassation ; » Les demandeurs en cassation reprochent aux juges d’appel de ne pas avoir déterminé l’élément matériel de l’infraction de blanchiment-détention de droit commun et d’avoir ainsi violé l’article 506-1 paragraphe 3) du Code pénal.

Tel qu’indiqué à la réponse au premier moyen de cassation, les juges d’appel ont correctement retenu les principes suivants en matière de blanchiment-détention de droit commun à la page 165 de leur arrêt :

« Cet article5 spécifique aux infractions en matière de stupéfiants reprend les mêmes distinctions en matière de blanchiment que les articles du Code pénal relatifs à l’infraction de blanchiment (articles 506-1 et suivants), mais a la particularité que, pour être applicable à d’autres personnes que les auteurs d’infractions à l’article 8, paragraphe 1. a) et b), qui ont nécessairement connaissance des infractions primaires, il faudra établir que l’agent savait ou avait conscience que le bien acquis, détenu ou utilisé provenait d’une infraction à l’article 8, paragraphe 1. a) ou b), ou que la justification mensongère ou le concours apporté à une opération de dissimulation concernait le revenu, le produit ou l’objet d’une telle infraction en matière de stupéfiants.

5 L’article 8-1 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanieSi tel est le cas, il y a lieu de faire application de la disposition spéciale de l’article 8-1 de la loi de 1973 en tant que loi spéciale dérogeant à la loi générale, sous ses différentes distinctions de blanchiment-détention, blanchiment-justification-

mensongère et blanchiment-conversion.

Si, par contre, il n’est pas établi que la personne avait connaissance de l’origine illicite en provenance d’une infraction en matière de stupéfiants, mais que néanmoins il est établi que la personne savait ou avait conscience que l’argent ou le bien acquis, détenu ou utilisé provenait d’un délit et a décidé de participer néanmoins à leur blanchiment, sans qu’il n’ait été établi que le blanchisseur ait eu la connaissance précise, ni de la nature, des circonstances de temps, de lieu, d’exécution ou de la qualification exacte de l’infraction primaire, ni de la personne de la victime ou de celle de son auteur, il y a lieu de faire application des articles 506-1 et suivants du Code pénal libellés à titre subsidiaire par le ministère public.

Il en est de même pour les infractions primaires de droit commun ayant engendré des bénéfices illicites, auxquelles les dispositions générales des articles 506-1 et suivants du Code pénal s’appliquent. »6 Sur base des principes ci-avant énoncés, les juges d’appel ont pu retenir l’infraction de blanchiment-détention de droit commun dans le chef des actuels demandeurs en cassation dans les termes suivants :

« Au vu du fait que les prévenus savaient que les commissions payées dans le cadre du contrat d’apporteur d’affaires n’avaient aucune contrepartie réelle économique, que les montants payés ne correspondaient pas aux montants prévus dans le contrat en question, que les prévenus ont fait des déclarations contradictoires au sujet des commissions et de leur calcul, qu’ils se connaissaient depuis longtemps et avaient nécessairement conscience du fait que PERSONNE3.) ne poursuivait pas d’activité régulière licite et en tenant compte des moyens utilisés (faux, escroquerie) et de toutes les circonstances de fait en l’espèce lesquels devaient éveiller la méfiance des prévenus, la Cour considère que les prévenus avaient nécessairement conscience de l’origine frauduleuse des fonds et qu’ils savaient que toute provenance légale des fonds pouvait être exclue. »7 Il s’ensuit que le deuxième moyen de cassation n’est pas donné.

6 Souligné par le soussigné 7 Arrêt entrepris p. 178-179Quant au troisième moyen de cassation « Tiré de la violation de la loi, in specie :

l’article 6 § 2 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales du 4 novembre 1950 et telle que ratifiée par le Grand-

duché de Luxembourg par une loi du 29 août 1953 (ci-dessous la « Convention européenne des Droits de la l’Homme ») et selon lequel « Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. » ;

qu’en ce qu’il découle de la combinaison de ces textes que « le droit de tout accusé à être présumé innocent et à faire supporter à l’accusation la charge de prouver les allégations formulées à son encontre relève de la notion générale de procès équitable au sens de l’article 6 § 1, qui s’applique à la procédure de fixation de la peine (ibidem, §§ 39-40 ; Grayson et Barnham c. Royaume-Uni, 2008, §§ 37 et 39), alors qu’il se dégage, d’autre part, du point 348 de l'article 6, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que « le droit de tout accusé à être présumé innocent et à faire supporter à l’accusation la charge de prouver les allégations formulées à son encontre relève de la notion générale de procès équitable au sens de l’article 6 § 1, qui s’applique à la procédure de fixation de la peine. » (ibidem, §§ 39-40 ; Grayson et Barnham c.

Royaume-Uni, 2008, §§ 37 et 39). ».

que cette présomption d’innocence n’a pas été respectée au regard des divers rapports de Police qui soulèvent fortement le doute et l’incertitude quant aux diverses infractions libellées à l’encontre des co-inculpés, alors que le contraire ressort pourtant du réquisitoire du Parquet, le tout à défaut d’un quelconque élément à charge nouveau.

qu’il ensuit que l’arrêt entrepris doit encourir la cassation ».

Tout d’abord, les demandeurs en cassation se réfèrent notamment aux points 343, 344, 386 et 387 de l’article 6 paragraphe 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la CEDH).

Il échet de constater que l’article 6 paragraphe 2 de la CEDH est composé d’une seule phrase et ne comporte évidemment pas les points énumérés ci-dessus.

Ensuite, les demandeurs en cassation citent des extraits de certains rapports dressés par la Police Grand-Ducale pour conclure à une violation du principe de la présomption d’innocence par la Cour d’appel.

Il est rappelé que le principe de la présomption d’innocence apparaît comme une règle probatoire qui conforte la position du prévenu confronté aux organes de poursuite. Elle implique entre autres que la charge de la preuve de tous les éléments de l’infraction pèse sur le ministère public et que le prévenu n’a pas la charge de la preuve de son innocence8.

L’article 6 de la Convention ne règlemente pas la question de l’admissibilité des éléments de preuve en tant que telle, matière qui relève au premier chef du droit interne. Ainsi l’article 6, paragraphe 2 est étranger à l’obtention, à l’administration et à l’appréciation des preuves qui relèvent du droit à un procès équitable garanti par l’article 6, paragraphe 1 de la Convention. Cela n’exclut toutefois pas que le respect du droit à la présomption d’innocence exige que les décisions de condamnation reposent sur des éléments de preuve suffisants et régulièrement présentés9.

Dans notre système de preuve qui est celui de l’intime conviction du juge pénal, le juge apprécie librement la valeur des preuves, sans que la loi en règle l’effet probatoire. Le juge répressif apprécie librement les résultats des mesures d’instruction ordonnées et la valeur des preuves versées aux débats, hors de tout contrôle de la Cour de cassation, autre que celui de la motivation10.

Votre Cour est régulièrement amenée à affirmer le principe de l’appréciation souveraine des éléments de preuve par les juges du fond11.

Les juges d’appel ont valablement pu se baser sur tous les éléments de fait et de preuve leur soumis pour retenir la responsabilité pénale des actuels demandeurs en cassation sans devoir se limiter à certains termes utilisés par la Police Grand-Ducale dans l’un ou l’autre rapport.12 Il résulte de la simple lecture du troisième moyen de cassation que les demandeurs en cassation présentent une argumentation en fait qui échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Sous le couvert de la violation de l’article 6 paragraphe 2 de la CEDH, le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine par les juges du fond des faits 8 Franklin KUTY, justice pénale et procès équitable, volume 2, no 1601, page 220 ; Boré, La cassation en matière pénale, Dalloz Action 2025-2026, no 74.41, page 213 9 Franklin KUTY, justice pénale et procès équitable, volume 2, no 1608, page 226 et références jurisprudentielles y citées.

10 Boré, La cassation en matière pénale, Dalloz Action 2025-

2026, no 74.13, page 212 11 Voir notamment Cass 25 janvier 2018, No 07/2018 pénal, n° 3901 du registre, réponse au dernier moyen de cassation ; Cass 11 février 2010, No 6/2010 pénal, n° 2710 du registre ; Cass 11 mars 2010, No 12/2010 pénal, n° 2318 du registre 12 Voir remarque introductiveet éléments de preuve leur soumis, appréciation échappant au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le troisième moyen de cassation ne saurait être accueilli.

Conclusion Le pourvoi est recevable.

Le pourvoi est à rejeter.

Pour le Procureur général d’Etat, le Procureur général d’Etat adjoint, Serge WAGNER 26


Synthèse
Numéro d'arrêt : 81/25
Date de la décision : 08/05/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2025-05-08;81.25 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award