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21/11/2024 | LUXEMBOURG | N°168/24

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 21 novembre 2024, 168/24


N° 168 / 2024 du 21.11.2024 Numéro CAS-2024-00005 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-et-un novembre deux mille vingt-quatre.

Composition:

Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre la CAISSE POUR L’AVENIR DES ENFANTS, établissement public, établie à L-24

49 Luxembourg, 6, boulevard Royal, représentée par le président du conseil d’adm...

N° 168 / 2024 du 21.11.2024 Numéro CAS-2024-00005 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-et-un novembre deux mille vingt-quatre.

Composition:

Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre la CAISSE POUR L’AVENIR DES ENFANTS, établissement public, établie à L-2449 Luxembourg, 6, boulevard Royal, représentée par le président du conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro J93, demanderesse en cassation, comparant par la société à responsabilité limitée RODESCH Avocats à la Cour, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Rachel JAZBINSEK, avocat à la Cour, et 1) PERSONNE1.), et 2) PERSONNE2.), les deux demeurant ensemble à L-ADRESSE1.), défendeurs en cassation, comparant par Maître Patricia Junqueira OLIVEIRA, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu.

___________________________________________________________________

Vu l’arrêt attaqué numéro 2023/0218 rendu le 9 novembre 2023 sous le numéro du registre ALFA 2023/0078 par le Conseil supérieur de la sécurité sociale ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 4 janvier 2024 par la CAISSE POUR L’AVENIR DES ENFANTS (ci-après « la CAE ») à PERSONNE1.) et à PERSONNE2.), déposé le 9 janvier 2024 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 4 mars 2024 par PERSONNE1.) et PERSONNE2.) à la CAE, déposé le même jour au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du procureur général d’Etat adjoint John PETRY.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le conseil d’administration de la CAE avait confirmé, sur opposition, la décision du président de la CAE portant rejet de la demande présentée par PERSONNE1.) et son épouse, PERSONNE2.), tendant à l’octroi de l’allocation familiale pour leurs trois enfants, au motif qu’ils n’avaient pas leur domicile légal au Luxembourg.

Le Conseil arbitral de la sécurité sociale avait fait droit au recours des défendeurs en cassation et dit qu’ils avaient droit au paiement de l’allocation familiale.

Le Conseil supérieur de la sécurité sociale a confirmé la décision.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré, de la violation de l'article 89 de la Constitution luxembourgeoise et de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure civile, en sa première branche, pour motifs hypothétiques et, en sa deuxième branche, pour défaut de réponse à conclusions ;

alors qu’il est prévu d’une part à l’article 89 de la Constitution que jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique » et d’autre part il est prévu à la disposition légale précitée que la rédaction des jugements contiendra les noms des juges, du procureur d’Etat, s’il a été entendu, ainsi que des avoués ; les noms, professions et demeures des parties, leurs conclusions, l’exposition sommaire des points de fait et de droit, les motifs et le dispositif des jugements » en ce que le CSSS a pourtant retenu dans sa motivation un abandon total du domicile au Brésil de la famille GANEM sans aucune preuve en ce sens et a rejeté l’argument de l’article 269 alinéa 3 de la sécurité sociale ;

de sorte qu’ Première branche En statuant ainsi, le CSSS a fondé sa décision sur un motif hypothétique. En effet il n’existe aucun élément au dossier démontrant l’abandon du domicile au Brésil. Il est de jurisprudence constante que le fait de fonder une décision sur des motifs hypothétiques est une forme de défaut de motifs et constitue un cas d’ouverture à cassation.

Deuxième branche Et le CSSS n’a donc pas répondu au moyen soulevé sur base de l’article 269 alinéa 3 de la sécurité sociale alors qu’il a estimé que la configuration factuelle n’était pas donnée. ».

Réponse de la Cour A l’article 89 de la Constitution invoqué à l’appui du moyen, il convient de substituer l’article 109 de la Constitution dans sa version applicable depuis le 1er juillet 2023, partant au jour du prononcé de l’arrêt attaqué.

Sur la première branche du moyen La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir fondé leur décision sur un motif hypothétique, à savoir l’abandon, par les défendeurs en cassation, de leur domicile au Brésil en l’absence de preuve en ce sens.

En retenant l’abandon complet de leur ancien lieu de domicile à l’étranger sur base d’éléments factuels, tels la fixation pour « toute la famille » du « centre principal de leurs intérêts personnels, familiaux, scolaires et sociaux » au Luxembourg et la suspension temporaire par les défendeurs en cassation de leur contrat de travail de fonctionnaires brésiliens préalablement à leur établissement au Luxembourg, les juges d’appel se sont appuyés sur des éléments concrets pour motiver leur décision.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, n’est pas fondé.

Sur la seconde branche du moyen La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir répondu à ses conclusions suivant lesquelles « le législateur n’a manifestement pas visé ces situations de déplacement dans un pays pour suivre des études tout en continuant, par le biais du télétravail, à garder son travail dans l’Etat d’origine pour ouvrir droit aux prestations familiales alors qu’il a, a contrario, précisé à l’article 269(3) du code de la sécurité sociale que La condition de la résidence effective et continue dans le chef de l’enfant est présumée remplie lorsque l’enfant réside temporairement à l’étranger avec le parent qui : - y poursuit des études supérieures, universitaires ou professionnelles » » .

Le défaut de réponse à conclusions constitue une forme du défaut de motifs, qui est un vice de forme.

Une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.

En retenant « Comme il n’est pas contesté par la CAE que la famille GANEM n’a plus de domicile au Brésil, le raisonnement par analogie avancé par la CAE sur base de l’article 269(3) du code de la sécurité sociale tombe déjà à faux alors que dans l’hypothèse citée par l’appelante, les concernés ont toujours gardé leur ancien domicile », les juges d’appel ont répondu aux conclusions visées à la branche du moyen.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa seconde branche, n’est pas fondé.

Sur le second moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré, de la violation de l’article 89 de la Constitution luxembourgeoise et de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure civile en ce que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ;

alors qu’il est prévu d’une part à l’article 89 de la Constitution que jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique » et d’autre part il est prévu à la disposition légale précitée que la rédaction des jugements contiendra les noms des juges, du procureur d’Etat, s’il a été entendu, ainsi que des avoués ; les noms, professions et demeures des parties, leurs conclusions, l’exposition sommaire des points de fait et de droit, les motifs et le dispositif des jugements » en ce que le CSSS a pourtant retenu dans sa motivation un abandon total du domicile au Brésil de la famille GANEM bien que la requête d’appel de la CAE reposait notamment sur le fait qu’un domicile existait toujours au Brésil de sorte qu’en statuant ainsi, le CSSS a manifestement caractérisé une contradiction de motifs. ».

Réponse de la Cour A l’article 89 de la Constitution invoqué à l’appui du moyen, il convient de substituer l’article 109 de la Constitution dans sa version applicable depuis le 1er juillet 2023, partant au jour du prononcé de l’arrêt attaqué.

La contradiction de motifs valant absence de motifs ne saurait exister qu’au sein d’une seule et même décision.

La contradiction de motifs est déduite, en l’espèce, de l’incompatibilité qui existerait entre la position de la CAE exposée en instance d’appel quant au défaut d’abandon, par les défendeurs en cassation, de leur domicile au Brésil et celle des juges d’appel qui ont considéré que cet abandon n’avait pas été contesté par la CAE.

Cette divergence ne révèle pas de contradiction de motifs entre les dispositions de l’arrêt attaqué.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure Il serait inéquitable de laisser à charge des défendeurs en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de leur allouer l’indemnité de procédure sollicitée de 1.500 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne la demanderesse en cassation à payer aux défendeurs en cassation une indemnité de procédure de 1.500 euros ;

la condamne aux frais et dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Patricia Junqueira OLIVEIRA, sur ses affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence du premier avocat général Marc HARPES et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation CAISSE POUR L’AVENIR DES ENFANTS c/ PERSONNE1.) et son épouse PERSONNE2.) (affaire n° CAS-2024-00005 du registre) Le pourvoi de la demanderesse en cassation, par dépôt au greffe de la Cour en date du 9 janvier 2024 d’un mémoire en cassation signifié le 4 janvier 2024 aux parties défenderesses en cassation, est dirigé contre un arrêt n° 2023/0218 rendu contradictoirement le 9 novembre 2023 par le Conseil supérieur de la sécurité sociale dans la cause inscrite sous le numéro ALFA 2023/0078 du registre.

Sur la recevabilité du pourvoi Le pourvoi est dirigé contre un arrêt du Conseil supérieur de la sécurité sociale, contre lequel un pourvoi en cassation peut être formé sur base de l’article 455 alinéa 4 du Code de la sécurité sociale.

Il est par ailleurs recevable en ce qui concerne le délai1 et la forme2.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, saisi par PERSONNE1.) et son épouse PERSONNE2.) d’un recours contre une décision de la CAISSE POUR L’AVENIR DES ENFANTS (ci-après « CAE ») ayant, par confirmation sur opposition d’une décision rendue par le Président de cette Caisse, rejeté une demande d’octroi d’allocations familiales, le Conseil arbitral de la sécurité sociale faisait droit au recours, partant, réformait la décision attaquée. Sur appel de la CAE, le Conseil supérieur de la sécurité sociale confirma le jugement entrepris, donc dit que les demandeurs ont droit au bénéfice des allocations familiales sollicitées, au motif que, eu égard aux éléments factuels du dossier, les demandeurs ont leur domicile légal au Luxembourg et remplissent dès lors les conditions de l’article 269 du Code de la sécurité sociale3.

1 L’arrêt contradictoire attaqué a été notifié, conformément à l’article 458 du Code de la sécurité sociale, à la demanderesse en cassation par lettre recommandée reçue le 13 novembre 2023. Comme le pourvoi a été formé le 9 janvier 2024, le délai de recours de deux mois, prévu par l’article 7 alinéas 1 et 2 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, a été respecté.

2 La demanderesse en cassation a déposé un mémoire signé par un avocat à la Cour et signifié aux parties adverses antérieurement au dépôt du pourvoi, de sorte que les formalités de l’article 10 de la loi de 1885 ont été respectées.

3 « Art. 269. (1) Il est introduit une allocation pour l’avenir des enfants, ci-après « allocation familiale ».

Ouvre droit à l’allocation familiale :

a) chaque enfant, qui réside effectivement et de manière continue au Luxembourg et y ayant son domicile légal;

b) les membres de famille tels que définis à l’article 270 de toute personne soumise à la législation luxembourgeoise et relevant du champ d’application des règlements européens ou d’un autre instrument bi- ou multilatéral conclu par le Luxembourg en matière de sécurité sociale et prévoyant le paiement des allocations Sur le premier moyen de cassation Le premier moyen de cassation est tiré de la violation des articles 89 de la Constitution (devenu l’article 109, nouveau, de la Constitution révisée) et 249, alinéa 1er, du Nouveau Code de procédure civile, en ce que le Conseil supérieur de la sécurité sociale, pour confirmer, motif pris de ce que les défendeurs en cassation ont leur domicile légal à Luxembourg, la réformation de la décision de rejet de l’octroi à ces derniers d’allocations familiales, en retenant notamment que « [f]ace à l’abandon complet de l’ancien lieu de domicile [des défendeurs en cassation au Brésil] et les éléments objectifs mis en exergue, rien dans l’argumentation de la CAE ne permet de conclure que le nouveau lieu à Luxembourg soit passager ou provisoire »4, alors que, première branche, il n’existe aucune preuve que les défendeurs en cassation ont abandonné leur domicile au Brésil, de sorte que l’arrêt attaqué repose à cet égard sur un motif hypothétique et que, seconde branche, l’arrêt ne répond pas au moyen, présenté par la CAE en instance d’appel, tiré de l’article 269, paragraphe 3, du Code de la sécurité sociale, de sorte qu’il est entaché d’un défaut de réponse à conclusions.

Sur la première branche du moyen Dans la première branche du moyen, la CAE reproche aux juges d’appel d’avoir fondé leur décision sur un motif hypothétique. Ce dernier « est celui qui, au lieu de reposer sur la familiales suivant la législation du pays d’emploi. Les membres de la famille doivent résider dans un pays visé par les règlements ou instruments en question.

(2) Est considérée comme ayant son domicile légal au Luxembourg toute personne qui est autorisée à y résider, y est légalement déclarée et y a établi sa résidence principale.

(3) La condition de la résidence effective et continue dans le chef de l’enfant est présumée remplie lorsque l’enfant réside temporairement à l’étranger avec le parent qui:

- y poursuit des études supérieures, universitaires ou professionnelles, ou bien - y est détaché par son employeur et qui reste soumis à la législation luxembourgeoise sur la sécurité sociale, ou bien - fait partie d’une mission diplomatique luxembourgeoise à l’étranger ou du personnel de pareille mission, ou bien - se trouve en mission de coopération au développement en qualité d’agent de la coopération ou de coopérant dans le cadre de la loi du 25 avril 1989 remplaçant la loi du 13 juillet 1982 relative à la coopération au développement, ou bien - participe à une opération pour le maintien de la paix en exécution de la loi du 27 juillet 1992 relative à la participation du Grand-Duché de Luxembourg à des opérations pour le maintien de la paix dans le cadre d’organisations internationales, ou bien - exerce une activité en qualité de volontaire au sens de la loi du 28 janvier 1999 sur le service volontaire.

(4) La Caisse pour l’avenir des enfants peut déroger, à titre exceptionnel et individuel, à l’une des conditions ci-

avant. ».

4 Arrêt attaqué, page 5, dernier alinéa.

constatation d’un fait réel et certain, en tout cas d’un fait que le juge tient pour établi, s’appuie sur une hypothèse avouée et gratuite, que le juge émet en tant que telle »5.

Les juges d’appel ont retenu, en l’espèce :

- que, suite à son arrivée du Brésil, « toute la famille a le centre principal de leurs intérêts personnels, familiaux, scolaires et sociaux au Luxembourg »6, - que « [l]e fait que les époux […] sont fonctionnaires brésiliens avec suspension temporaire du contrat de travail pendant des études supplémentaires et exercent leur travail sous forme de télétravail n’est pas de nature à invalider le constat qu’il y a eu changement de domicile par le fait d’une habitation réelle au Luxembourg, joint à l’intention d’y fixer leur principal établissement, d’autant plus qu’ils n’ont plus de domicile au Brésil »7, - que, « [c]omme il n’est pas contesté par la CAE que la famille […] n’a plus de domicile au Brésil, le raisonnement par analogie avancé par la CAE sur base de l’article 269(3) du code de la sécurité sociale tombe déjà à faux alors que dans l’hypothèse citée par l’appelante, les concernés ont toujours gardé leur ancien domicile »8 et - que « [f]ace à l’abandon complet de l’ancien lieu de domicile [des défendeurs en cassation au Brésil] et les éléments objectifs mis en exergue, rien dans l’argumentation de la CAE ne permet de conclure que le nouveau lieu à Luxembourg soit passager ou provisoire »9.

Les juges d’appel ont donc constaté de façon certaine, partant non de façon seulement hypothétique, que les défendeurs en cassation avaient abandonné leur ancien domicile au Brésil.

Le bien-fondé de ce constat n’est pas susceptible d’être critiqué par le grief, de forme, d’un défaut de motifs.

Il s’ensuit que la première branche du moyen n’est pas fondée.

Sur la seconde branche du moyen La seconde branche est tirée d’un défaut de réponse à conclusions.

La CAE avait soutenu devant les juges d’appel « que le législateur n’a manifestement pas visé ces situations de déplacement dans un pays pour suivre des études tout en continuant, par le biais du télétravail, à garder son travail dans l’Etat d’origine pour ouvrir droit aux prestations familiales alors qu’il a, a contrario, précisé à l’article 269 (3) du code de la sécurité sociale que « La condition de la résidence effective et continue dans le chef de l’enfant est présumée remplie lorsque l’enfant réside temporairement à l’étranger avec le parent qui : - y poursuit des études supérieures, universitaires ou professionnelles » »10.

Les juges d’appel apportèrent à ce moyen la réponse suivante :

5 Jacques et Louis BORÉ, La cassation en matière civile, Paris, Dalloz, 6e édition, 2023, n° 77.167, page 426.

6 Arrêt attaqué, page 5, antépénultième alinéa.

7 Idem et loc.cit. (c’est nous qui soulignons).

8 Idem, même page, avant-dernier alinéa (c’est nous qui soulignons).

9 Idem, même page, dernier alinéa (c’est nous qui soulignons).

10 Idem, page 3, deuxième alinéa.

« Comme il n’est pas contesté par la CAE que la famille […] n’a plus de domicile au Brésil, le raisonnement par analogie avancé par la CAE sur base de l’article 269(3) du code de la sécurité sociale tombe déjà à faux alors que dans l’hypothèse citée par l’appelante, les concernés ont toujours gardé leur ancien domicile »11.

Le moyen ayant reçu une réponse et le grief du défaut de réponse à conclusions qui, étant une variante du défaut de motifs, donc un vice de forme, ne pouvant avoir pour objet de critiquer le bien-fondé ou le caractère suffisant de cette réponse, la seconde branche n’est pas fondée.

Sur le second moyen de cassation Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution (devenu l’article 109, nouveau, de la Constitution révisée) et de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de procédure civile pour contradiction de motifs, en ce que le Conseil supérieur de la sécurité sociale, pour confirmer, motif pris de ce que les défendeurs en cassation ont leur domicile légal à Luxembourg, la réformation de la décision de rejet de l’octroi à ces derniers d’allocations familiales, en retenant notamment que « [c]omme il n’est pas contesté par la CAE que la famille […] n’a plus de domicile au Brésil »12 et que « [f]ace à l’abandon complet de l’ancien lieu de domicile [des défendeurs en cassation au Brésil] et les éléments objectifs mis en exergue, rien dans l’argumentation de la CAE ne permet de conclure que le nouveau lieu à Luxembourg soit passager ou provisoire »13, alors que, la CAE ayant dans sa requête d’appel soutenu que les défendeurs en cassation avaient toujours un domicile au Brésil, donc n’ayant pas accepté l’abandon de ce domicile, le Conseil supérieur, en déduisant cet abandon d’un défaut de contestation de ce fait par la CAE, s’est contredit.

« La contradiction de motifs valant absence de motifs [suppose] une contradiction entre deux dispositions du même arrêt. »14. Plus précisément, elle « ne peut exister qu’entre deux affirmations de l’arrêt pouvant être attribuées au juge comme constituant de sa part une appréciation personnelle »15. Il s’ensuit qu’elle ne peut exister entre les affirmations du demandeur en cassation et les considérants par lesquels la juridiction d’appel a motivé sa décision16.

En l’espèce, le moyen est tiré d’une contradiction entre la position que la CAE affirme avoir défendue devant les juges d’appel, à savoir celle de contester l’abandon par les défendeurs en cassation de leur domicile brésilien, et celle que ces juges ont considéré avoir été la sienne, à savoir celle de ne pas contester cet abandon. Il critique donc en réalité, non une contradiction de motifs, mais une mauvaise interprétation par les juges du fond des conclusions d’appel de la demanderesse en cassation.

Le moyen est dès lors étranger au grief de la contradiction de motifs.

11 Idem, page 5, avant-dernier alinéa.

12 Arrêt attaqué, page 5, avant-dernier alinéa.

13 Idem, même page, dernier alinéa.

14 Cour de cassation, 8 juin 2023, n° 69/2023, numéro CAS-2022-00100 du registre (réponse au premier moyen).

15 Idem, 6 novembre 2014, n° 71/14, numéro 3379 du registre (réponse au deuxième moyen).

16 Idem et loc.cit.

Il s’ensuit qu’il est irrecevable17.

Conclusion :

Le pourvoi est recevable, mais il est à rejeter.

Pour le Procureur général d’État Le Procureur général d’État adjoint John PETRY 17 Voir, à titre d’illustration de l’irrecevabilité du moyen qui est étranger au grief invoqué : idem, 28 mars 2024, n° 53/2024 pénal, numéro CAS-2023-00133 du registre ; idem, 7 juin 2018, n° 57/2018, numéro 3977 du registre (réponse au premier moyen).


Synthèse
Numéro d'arrêt : 168/24
Date de la décision : 21/11/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/11/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2024-11-21;168.24 ?

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