N° 144 / 2024 pénal du 17.10.2024 Not. 27772/15/CD Numéro CAS-2023-00174 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, dix-sept octobre deux mille vingt-quatre, sur le pourvoi de 1) PERSONNE1.), né le DATE1.) à Luxembourg, demeurant à I-ADRESSE1.), 2) PERSONNE2.), né le DATE2.) à ADRESSE2.) (B), demeurant à B-
ADRESSE3.), 3) PERSONNE3.), né le DATE3.) à ADRESSE4.) (B), demeurant à B-
ADRESSE5.), demandeurs en cassation, comparant par Maître Nicolas THIELTGEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public l’arrêt qui suit :
Vu l’arrêt attaqué rendu le 31 octobre 2023 sous le numéro 1063/23 Ch.c.C.
par la chambre du conseil de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg ;
Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Fanny GILLIERS, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Nicolas THIELTGEN, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.), suivant déclaration du 28 novembre 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;Vu le mémoire en cassation déposé le 22 décembre 2023 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions du premier avocat général Serge WAGNER ;
Vu le mémoire complémentaire déposé par les demandeurs en cassation au greffe de la Cour en date du 24 septembre 2024.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, un juge d’instruction du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait refusé la communication de deux rapports de police aux demandeurs en cassation en se référant aux articles 8 et 85 du Code de procédure pénale, au motif qu’aucune inculpation n’avait eu lieu. La chambre du conseil de la Cour d’appel a déclaré irrecevable l’appel interjeté contre cette décision.
Sur la recevabilité du pourvoi L’article 416 du Code de procédure pénale dispose « (1) Le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d’instruction ou les jugements en dernier ressort de cette qualité, n’est ouvert qu’après l’arrêt ou le jugement définitif ; (…) (2) Le recours en cassation est toutefois ouvert contre les arrêts ou jugements rendus sur la compétence et contre les dispositions par lesquelles il est statué définitivement sur le principe de l’action civile. ».
Les juges d’appel n’ont statué ni sur une question de compétence ni définitivement sur l’action publique ou sur le principe d’une action civile.
Les demandeurs en cassation concluent néanmoins à la recevabilité du pourvoi en tant que pourvoi en cassation-nullité pour cause d’excès de pouvoir au motif qu’en déclarant irrecevable l’appel-nullité interjeté par les demandeurs en cassation, les juges d’appel auraient consacré un excès de pouvoir commis par le juge d’instruction.
L’excès de pouvoir est la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité.
Les moyens de cassation tirés de la violation du principe de l’appel-nullité en ce qu’ils prennent appui sur la violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du principe du contradictoire, découlant de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après « la Convention »), ne rentrent pas dans la définition de l’excès de pouvoir.
Il s’ensuit que le pourvoi en cassation-nullité est irrecevable.
Les demandeurs en cassation concluent ensuite à la recevabilité du pourvoi en faisant valoir qu’une décision d’irrecevabilité en application des dispositions de l’article 416 du Code de procédure pénale les priverait du droit à un recours effectif garanti par les articles 6, paragraphe 1, et 13 de la Convention et serait contraire au principe d’une bonne administration de la justice.
L’article 13 de la Convention garantit à toute personne, dont les droits et libertés reconnus dans la Convention ont été violés, un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. Le droit d’accès au juge n’est cependant pas absolu. Les Etats membres peuvent édicter des prescriptions destinées à réglementer les recours qu’ils organisent et à en fixer les conditions d’exercice, pourvu que ces réglementations aient pour but d’assurer une bonne administration de la justice. Les limitations au droit d’accès peuvent résulter de règles procédurales tenant aux conditions de recevabilité d’un recours.
Le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire qui n’est ouverte que dans les cas prévus par la loi. L’existence de conditions restrictives pour former un pourvoi en cassation ne porte pas atteinte au droit protégé par l’article 13 de la Convention.
L’article 416 du Code de procédure pénale, en ce qu’il diffère l’exercice du recours en cassation contre l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel jusqu’après la décision définitive, n’enfreint pas les articles 6 et 13 de la Convention.
La considération que l’instruction pénale pourrait ne pas aboutir à une inculpation des demandeurs en cassation ou à une décision définitive n’est pas, en raison de son caractère hypothétique, de nature à invalider cette solution découlant d’une disposition de droit positif.
Il s’ensuit que le pourvoi est irrecevable en application des dispositions de l’article 416 du Code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation déclare le pourvoi irrecevable ;
condamne les demandeurs en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère public étant liquidés à 1,50 euro.
Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, dix-sept octobre deux mille vingt-quatre, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :
Thierry HOSCHEIT, président de la Cour, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Claudine ELCHEROTH, conseiller à la Cour d’appel, qui, à l’exception du conseiller Marie-Laure MEYER, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Thierry HOSCHEIT en présence de l’avocat général Bob PIRON et du greffier Daniel SCHROEDER.
Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) PERSONNE2.) PERSONNE3.) en présence du Ministère public (n° CAS-2023-00174 du registre)
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Par déclaration faite le 28 novembre 2023 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-
Duché de Luxembourg, Maître Fanny GILLIERS, avocat à la Cour, en remplacement de Maître Nicolas THIELTGEN, avocat à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, forma au nom et pour le compte de PERSONNE1.), PERSONNE2.) et PERSONNE3.), un recours en cassation contre un arrêt N° 1063/23 Ch.c.C. rendu le 31 octobre 2023 par la Chambre du conseil de la Cour d’appel.
Cette déclaration de recours a été suivie en date du 22 décembre 2023 du dépôt d’un mémoire en cassation.
Le pourvoi a été déclaré dans les forme et délais de la loi.
De même le mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation a été déposé dans les formes et délais y prévus.
Le pourvoi est dès lors recevable quant à la forme et aux délais.
Quant aux faits Par déclaration du 21 avril 2023 au greffe du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, PERSONNE1.), PERSONNE2.) et PERSONNE3.) ont régulièrement fait relever appel de l’ordonnance du 19 avril 2023 rendue par un juge d’instruction du susdit tribunal.
Aux termes de cette décision, le juge d’instruction, en se référant aux articles 8 et 85 du Code de procédure pénale, a refusé la communication des rapports de police des 7 mai 2020 et 14 novembre 2022 aux actuels demandeurs en cassation.
Par arrêt N° 1063/23 Ch.c.C. rendu le 31 octobre 2023, la Chambre du conseil de la Cour d’appel a déclaré l’appel de PERSONNE1.), PERSONNE2.) et de PERSONNE3.) contre l’ordonnance du 19 avril 2023 du juge d’instruction irrecevable.
Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.
Quant à la recevabilité du pourvoi I) Irrecevabilité sur base de l’article 416 du Code de procédure pénale Aux termes de l'article 416 du Code de procédure pénale, le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d'instruction ou les jugements en dernier ressort de cette qualité n'est ouvert qu'après l'arrêt ou le jugement définitif. Le recours en cassation est toutefois ouvert contre les arrêts et jugements rendus sur la compétence et contre les dispositions par lesquelles il est statué définitivement sur le principe de l'action civile.
L’interdiction de se pourvoir en cassation immédiatement et avant la décision définitive contre les décisions préparatoires ou d’instruction a précisément pour but de prévenir des recours dilatoires1.
Cette disposition légale s'applique à toutes les décisions qui n'épuisent pas la juridiction du juge pénal soit sur l'action publique, soit sur l'action civile. Pour être considérée comme décision définitive au sens de l'article 416, il ne suffit dès lors pas, que la décision du juge épuise sa juridiction sur une question litigieuse précise.
Sont considérées comme arrêts préparatoires ou d’instruction toutes les décisions qui mettent le litige en état de recevoir une solution, mais sans terminer l’instance. Une décision termine l’instance soit lorsqu’elle se prononce au fond - acquittement ou condamnation - soit lorsqu’elle admet une exception d’incompétence ou une autre fin de non-recevoir qui dénie ou enlève au juge la connaissance de la cause.
En l’occurrence, les demandeurs en cassation ont introduit un pourvoi contre l’arrêt de la Chambre du conseil de la Cour d’appel qui a déclaré leur appel dirigé contre l’ordonnance du 19 avril 2023 du juge d’instruction irrecevable.
Etant donné que l’arrêt attaqué n’a statué, ni définitivement sur l’action publique ou sur le principe d’une action civile, ni d’ailleurs sur une question de compétence2, le pourvoi est dès lors à déclarer irrecevable au titre de l’article 416 du Code de procédure pénale.
1 Cour de cassation, arrêt numéro 24/2015 du 20 avril 2015, numéro 3459 du registre 2 Dans ce sens : voir notamment Cour de cassation, arrêt no 107 / 2011 pénal, du 20 octobre 2011, numéro 2946 du registre : pourvoi dirigé contre la partie du dispositif de l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel ayant confirmé l’ordonnance de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement qui a renvoyé les demandeurs II) Pourvoi en cassation-nullité pour excès de pouvoir Les demandeurs en cassation concluent néanmoins à la recevabilité de leur recours en tant que pourvoi en cassation-nullité pour cause d’excès de pouvoir.
Même si la loi modifiée du 18 février 1985 sur les pourvois et la procédure en cassation n’ouvre pas expressément la voie du pourvoi en cassation-nullité pour excès de pouvoir aux parties, votre Cour a eu l’occasion de se prononcer sur leur recevabilité. Le parquet général renvoie à cet effet notamment aux arrêts numéros 55/2012 pénal (numéro 3098 du registre) du 6 décembre 2012, 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, 29/2015 pénal (numéro 3503 du registre) du 11 juin 2015, 9/2016 pénal (numéro 3588 du registre) du 18 février 2016, 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016, ainsi que 11/2018 pénal (numéro 4030 du registre) du 1er mars 2018.
Vous avez retenu « que l’excès de pouvoir est la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité ».
Vous en avez déduit que ne rentrent pas dans la définition de l’excès de pouvoir les reproches suivants tirés :
- d’une violation de la loi3 et plus particulièrement de règles de procédure, 4 - d’une violation de l’article 89 de la Constitution,5 - d’une violation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,6 - de la violation de l’article 133 de Code de procédure pénale et d’un excès de pouvoir négatif,7 - de la violation des articles 126, 126-1 et 126-2 du Code de procédure pénale,8 en cassation devant le tribunal correctionnel, déclaré irrecevable au titre de l’article 416 du Code de procédure pénale 3 Cour de cassation, arrêt no 55/2012 pénal (numéro 3098 du registre) du 6 décembre 2012 ; Cour de cassation, arrêt no 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015 4 Cour de cassation arrêt no 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016 5 Cour de cassation, arrêt no 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, Cour de cassation, arrêt no 9/2016 pénal (numéro 3588 du registre) du 18 février 2016 ; Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020 6 Cour de cassation, arrêts nos 34/2013 pénal (numéro 3210 du registre) du 6 juin 2013, 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, 29/2015 pénal (numéro 3503 du registre) du 11 juin 2015, 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016 7 Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020 8 Cour de cassation, arrêt no 153/2020 pénal (numéro CAS-2019-00167 du registre) du 19 novembre 2020- de la violation de l’article 2 de la loi du 8 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les médias en combinaison avec l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,9 - d’une abstention de procéder à l’examen moral de l’infraction d’abus de bien sociaux dans le cadre de l’appréciation des charges suffisantes pour ordonner le renvoi, 10 - du défaut de réponse à conclusions quant à l’appréciation du même élément moral, 11 - du refus d’ordonner des devoirs supplémentaires, 12 - de la violation de l’article 7 de la loi modifiée du 10 août 1991 sur la profession d’avocat.13 Dans le présent pourvoi, les demandeurs en cassation formulent deux moyens de cassation :
- le premier moyen de cassation est « Tiré de la violation sinon du refus d’application, sinon de la mauvaise application, sinon de la mauvaise interprétation du principe de l’appel-nullité ;
En ce que l’Arrêt Attaqué a déclaré l’appel-nullité irrecevable au motif que cette voie de recours ne serait ouverte qu’en présence d’un excès de pouvoir ;…. » - le second moyen de cassation (subsidiaire par rapport au premier moyen de cassation) est « Tiré de la violation sinon du refus d’application, sinon de la mauvaise application, sinon de la mauvaise interprétation du principe de l’appel-nullité ;
En ce que l’Arrêt Attaqué a déclaré l’appel-nullité irrecevable au motif que le refus de communication d’acte d’instruction émis par la juge d’instruction ne constituerait pas un excès de pouvoir justifiant l’application du principe de l’appel-nullité…. » Il résulte de la jurisprudence indiquée ci-dessus qu’aucun des deux moyens de cassation formulés ne rentre dans la définition de l’excès de pouvoir.
9 Cour de cassation, arrêt no 153/2020 pénal (numéro CAS-2019-00167 du registre) du 19 novembre 2020 10 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 11 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 12 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 13 Cour de cassation arrêt no 53/2024 pénal (numéro CAS-2023-00133 du registre) du 28 mars 2024En effet, aucun des deux moyens ne vise « la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité », ce qui exclut le cas de figure de l’excès de pouvoir à la base du pourvoi en cassation-nullité.
En effet, en déclarant l’appel dirigé contre l’ordonnance du 19 avril 2023 du juge d’instruction irrecevable, la Chambre du conseil de la Cour d’appel n’a fait qu’appliquer les dispositions du Code de procédure pénale. Les demandeurs en cassation reprochent aux juges d’appel de ne pas avoir déclaré l’appel contre cette ordonnance recevable en tant qu’appel-nullité pour excès de pouvoir.
Or, vous refusez de connaître de ce second excès de pouvoir allégué en déclarant irrecevables des pourvois-nullités destinés à sanctionner l’irrecevabilité d’un appel-nullité14.
A suivre votre jurisprudence le pourvoi-nullité est donc par principe irrecevable lorsqu’il est dirigé contre une décision refusant d’accueillir un appel-nullité15.
Le pourvoi est dès lors également irrecevable en tant que pourvoi en cassation-nullité.
III) Irrecevabilité sur base de l’article 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales Selon les demandeurs en cassation, « en ouvrant la voie de la Cassation contre une décision de la Chambre du conseil de la Cour d’appel que postérieurement à l’arrêt ou au jugement définitif, le législateur prive cette voie de recours de tout caractère effectif au sens de l’article 13 de la Convention. »16 Les demandeurs en cassation estiment que leur recours « doit être déclaré recevable et ce afin de respecter le droit à un recours effectif tel que garanti par les articles 6§1 et 13 de la Convention. »17 14 Cour de cassation, 30 juin 2016, n° 70/16, numéro 3670 du registre; idem, même date, n° 71/16, numéro 3671 du registre ; idem, même date, n° 72/16, numéro 3673 du registre ; idem, même date, n° 73/16, numéro 3674 du registre. Dans ces affaires, dans lesquelles des pourvois-nullités (immédiats formés dans des cas dans lesquels la loi obligeait de différer le pourvoi jusqu’à la décision au fond) ont été dirigés contre des arrêts d’irrecevabilité d’appels-nullité et dans lesquelles les pourvois-nullités avaient été déclarés irrecevables, le Parquet général avait conclu à la recevabilité des pourvois.
15 Votre arrêt précité n° 11/2018 pénal, numéro 4030 du registre, concerne également un pourvoi-nullité dirigé contre un arrêt d’irrecevabilité d’un appel-nullité, et ce d’ailleurs en matière d’entraide judiciaire internationale en matière pénale. Pour déclarer ce pourvoi-nullité irrecevable, vous vous limitez à constater « que les demandeurs en cassation ne précisent pas en quoi l’arrêt entrepris serait entaché d’excès de pouvoir ». Cette motivation pourrait être lue comme impliquant qu’un tel pourvoi est recevable si un excès de pouvoir est invoqué.
Il peut toutefois également être lu comme se limitant à constater que la question du principe de la recevabilité d’un tel pourvoi ne se pose même pas dès lors qu’aucun excès de pouvoir n’a été invoqué, ce qui implique que le pourvoi ne peut même pas être qualifié de pourvoi-nullité.
16 Mémoire en cassation p.4 17 Mémoire en cassation p.5 Le droit d’accès au juge n’est pas absolu. Les Etats peuvent édicter des prescriptions destinées à réglementer les recours qu’ils organisent et à en fixer les conditions d’exercice, pourvu que ces réglementations aient pour but d’assurer une bonne administration de la justice.
L’interdiction de se pourvoir en cassation immédiatement et avant la décision définitive contre les décisions préparatoires ou d’instruction a précisément pour but de prévenir les recours dilatoires18.
L’article 416 du Code de procédure pénale, en ce qu’il diffère l’exercice du recours en cassation contre l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel jusqu’après la décision définitive en dernier ressort, n’enfreint dès lors pas les articles 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales19.
Le pourvoi différé réservé par l’article 416 du Code de procédure pénale contre la décision attaquée constitue un recours qui est accessible, susceptible de remédier aux griefs du requérant et présente des perspectives raisonnables de succès au même titre qu’un pourvoi immédiat, de sorte que le grief tiré de l’absence de toute voie de recours réelle et effective est à rejeter.
Les demandeurs en cassation n’ont par ailleurs pas été en mesure de justifier en quoi la circonstance du pourvoi différé aurait eu pour effet de les priver d’une voie de recours réelle et effective. Ils disposent en effet d’un pourvoi, même si ce dernier est différé, et ce pourvoi, s’il est fondé, aurait pour effet de mettre à néant, outre la décision attaquée, également les décisions qui en constituent la suite20.
Conclusion Le pourvoi est irrecevable.
Pour le Procureur général d’Etat, le premier avocat général, Serge WAGNER 18 Voir, à titre d’illustration : Cour de cassation, 14 juillet 2016, n° 32/2016 pénal.
19 Idem.
20 Cour de cassation, 29 janvier 2015, n° 8/2015 pénal.