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28/03/2024 | LUXEMBOURG | N°60/24

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 28 mars 2024, 60/24


N° 60 / 2024 pénal du 28.03.2024 Not. 25937/18/CD + Not. 33489/19/CD Numéro CAS-2023-00136 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-huit mars deux mille vingt-quatre, sur le pourvoi de PERSONNE1.), née le DATE1.) à ADRESSE1.) (France), demeurant à L-ADRESSE2.), prévenue, demanderesse en cassation, comparant par Maître Daniel NOEL, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 5 juillet 2023 sous le numéro 27

0/23 X. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, dixième chambre, si...

N° 60 / 2024 pénal du 28.03.2024 Not. 25937/18/CD + Not. 33489/19/CD Numéro CAS-2023-00136 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-huit mars deux mille vingt-quatre, sur le pourvoi de PERSONNE1.), née le DATE1.) à ADRESSE1.) (France), demeurant à L-ADRESSE2.), prévenue, demanderesse en cassation, comparant par Maître Daniel NOEL, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 5 juillet 2023 sous le numéro 270/23 X. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Daniel NOEL, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 4 août 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;

Vu le mémoire en cassation déposé le 4 septembre 2023 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions de l’avocat général Joëlle NEIS.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné la demanderesse en cassation à une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis partiel et à une peine d’amende du chef d’infractions aux articles 8.1 a), 8.1.b), 8.1.d) et 8-1 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie. La Cour d’appel, par réformation partielle, a acquitté la demanderesse en cassation de l’infraction à l’article 8-1, a réduit la peine d’emprisonnement en l’assortissant d’un sursis partiel et a confirmé le jugement pour le surplus.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon, de la mauvaise application de la Constitution du Grand-Duché de Luxembourg, in specie, de l’article 89 de la Constitution, qui établit, en sa première phrase, que : et de la violation de l’article 195, paragraphe 1er du Code de procédure pénale, disposant, en sa première phrase, que : ;

en ce que la Cour d’appel s’est contentée, à la page 124, 128 et 134 de l’arrêt attaqué et concernant la dame PERSONNE1.) d’indiquer que:

PAGE 124 géographique, particulièrement bien à la vente de de stupéfiants étant donné qu’il permet aux vendeurs de drogue d'avoir une vue dégagée sur les rues adjacentes, d’apercevoir sans difficultés la présence de la police et de communiquer mutuellement tout soupçon de contrôle policier.

La terrasse du café fait partie intégrante de l’établissement "ENSEIGNE1.)" Sur base des déclarations policières de PERSONNE2.) et PERSONNE3.) corroborées par certaines observations policières, c’est également à juste titre que le tribunal a retenu la culpabilité de la prévenue en qualité dOauteur des infractions à l’article 8.1.d de la loi du 19 février 1973, telles que spécifiées au point C du jugement déféré.

PAGE 134 Le fait que la mise à exécution concrète des transactions ait lieu dans les rues avoisinantes n’enlève rien au fait que ces transactions n’ont pu se produire que grâce à une entrée en relation préalable entre vendeurs et acheteurs qui avait lieu dans le local ENSEIGNE1.), ainsi que cela résulte des éléments du dossier répressif.

2 La prévenue, si elle n’a pas encouragé les ventes incriminées, n’a cependant rien effectué pour empêcher les trois vendeurs précités de s’adonner à leurs ventes de drogue. » également, en ce que la Cour d’appel s’est contentée, dans le dispositif de l’arrêt attaqué et concernant la dame PERSONNE1.) de retenir ce qui suit :

;

qu’en ayant statué ainsi, la Cour n’a pas justifié en quoi le Tribunal d’arrondissement aurait ;

que la Cour n’a pas non plus justifié en quoi ce serait à que le Tribunal aurait retenu la prévenue PERSONNE1.) dans les liens des préventions retenues à sa charge, ni comment elles seraient ;

que l’arrêt attaqué ne fait état d'aucun raisonnement juridique à l’origine de sa motivation ;

qu’une décision ne peut être considérée comme valablement motivée au sens des articles précités, que, si elle est le résultat d’un travail préliminaire de réflexion et de raisonnement ;

que la motivation du juge doit être le fruit d'un raisonnement juridique procédé par syllogisme ;

qu’il en découle qu’à défaut de motivation, tel qu’en l’espèce, le justiciable ayant exercé une voie de recours contre une décision qu’il considérait comme étant injustifiée en Droit, reste dans l’impossibilité de comprendre la motivation juridique à la base de sa condamnation ;

que la motivation doit répondre à un impératif technique et didactique. Le premier est ancien. En effet, pour permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle de légalité et disciplinaire, les jugements doivent suivre des règles de rédaction très strictes dont l’inobservation est lourdement sanctionnée par la nullité du jugement (P. Minim, Le style des jugements 4e ed., Librairies Techniques, 1970). La seconde idée est beaucoup plus récente dans l’histoire du droit judiciaire. Dans une approche plus moderne, et sous l’impulsion de la Cour européenne des droits de l’homme, la motivation s’est enrichie d’une autre exigence au regard du droit à un procès équitable, celle que le justiciable soit en mesure de comprendre la décision qui est rendue, surtout si elle lui est défavorable (CEDH 16 novembre 2010, req. n° 926/05 ; Taxquet c/ Belgique). » ;

que dans ces conditions, les juges de la Cour d’appel ont violé les articles 89 de la Constitution et 195, paragraphe 1er, du Code de procédure pénale, pris en sa première phrase ;

3 que la cassation est encourue de ce chef ; ».

Réponse de la Cour Le moyen vise le défaut de motifs qui est un vice de forme.

Une décision est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.

Les juges d’appel, pour confirmer la déclaration de culpabilité de la demanderesse en cassation, se sont référés aux faits tels que reproduits dans le jugement et ont relaté de manière circonstanciée le résultat de l’enquête menée, dont notamment les observations policières, les arrestations en flagrant délit de vendeurs de stupéfiants à l’intérieur du local exploité par la demanderesse en cassation, les perquisitions diligentées dans ce même local et les déclarations de consommateurs de stupéfiants devant la police.

Ils ont, partant, motivé leur décision sur le point considéré.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon, de la mauvaise application de la Constitution du Grand-Duché de Luxembourg, in specie, de l’article 89 de la Constitution, qui établit, en sa première phrase que : et de la violation de l’article 195, 1er paragraphe du Code de procédure pénale, disposant en sa deuxième phrase que : ;

en ce que la Cour d’appel s’est contentée, à la page 136 de l’arrêt attaqué et concernant la dame PERSONNE1.) dans le dispositif de l’arrêt attaqué de retenir ce qui suit :

;

que force est de constater que la Cour d’appel n’a pas déterminé les circonstances constitutives de l’infraction ni cité les articles de la loi qu’elle a appliqué ;

que dans ces conditions, les juges de la Cour d’appel ont encore violé les articles 89 de la Constitution et 195, paragraphe 1er, du Code de procédure pénale, pris en sa deuxième phrase ; ».

4 Réponse de la Cour Il résulte de la réponse donnée au premier moyen que les juges d’appel ont motivé leur décision par rapport à la déclaration de culpabilité de la demanderesse en cassation, cette motivation comprenant les circonstances constitutives des infractions retenues à sa charge. Ils ont précisé, dans la motivation de leur décision, les articles de loi incriminant les agissements de la demanderesse en cassation et ont renvoyé, dans le dispositif, aux textes de loi cités par la juridiction de première instance.

Les juges d’appel ont, partant, motivé leur décision sur les points considérés.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 2, de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en vertu duquel La présomption d’innocence exige que la charge de la preuve revient à la seule autorité publique qui doit enquêter à charge et à décharge, de sorte que le même standard de preuve doit s’appliquer aux éléments à charge qu’aux éléments à décharge, standard de preuve qui n’a pas été respecté en l’espèce dans la mesure où la Cour d’appel a condamné le demandeur en cassation sur base d'indices et en l'absence de toute preuve tangible.

qu’il en découle que les juges de la Cour d’appel ont violé, sinon, procédé par une application erronée dudit article. ».

Réponse de la Cour Le moyen est tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après « la Convention »), la demanderesse en cassation faisant grief aux juges d’appel d’avoir statué sur base d’indices pour confirmer la déclaration de culpabilité à sa charge sans respecter la présomption d’innocence.

L’article 6, paragraphe 2, de la Convention consacre la présomption d’innocence. Il ne réglemente pas l’admissibilité des preuves, ni leur appréciation par le juge pénal.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de la valeur probante des faits et éléments de preuve du dossier répressif desquels ils ont déduit la culpabilité de la demanderesse en cassation, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le quatrième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 2, de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en vertu duquel en ce que la Cour d'appel sOest basé sur des témoignages des consommateurs de stupéfiants PERSONNE2.), PERSONNE3.), PERSONNE4.), et PERSONNE5.) pour assoir une condamnation alors que ces témoignages n’ont partant pas de force probante. Il s’agit de simples éléments de l’enquête policière et non d’éléments tangibles. Ces déclarations peuvent être prises en considération pour fonder la conviction du juge, mais ne constituent cependant pas des preuves légalement admissibles et ne permettent pas à elles seules à assoir une condamnation.

qu’il y a donc lieu de retenir que la Cour d’appel a violé, sinon, mal appliqué le prédit principe confirmé par l’arrêt n° 459/15X du 4 novembre 2015 ;

qu’il en découle que les juges de la Cour d'appel ont violé, sinon, procédé par une application erronée dudit article que l'arrêt encours également la cassation de ce chef ; ».

Réponse de la Cour Le moyen procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué en ce que les juges d’appel, pour confirmer la déclaration de culpabilité de la demanderesse en cassation, ont tenu compte, outre les déclarations de consommateurs de stupéfiants entendus comme témoins, des observations faites par la police, des arrestations en flagrant délit de vendeurs de stupéfiants à l’intérieur du local exploité par la demanderesse en cassation et du résultat des perquisitions diligentées dans ce même local.

Il s’ensuit que le moyen manque en fait.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne la demanderesse en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère public étant liquidés à 34,50 euros.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, vingt-huit mars deux mille vingt-quatre, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, président, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Agnès ZAGO en présence du premier avocat général Marc HARPES et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) c/ Ministère Public N° CAS-2023-00136 du registre Par déclaration faite le 4 août 2023 au greffe de la Cour Supérieure de Justice, Maître Daniel NOEL, avocat à la Cour, demeurant à Esch-sur-Alzette, forma au nom et pour le compte de PERSONNE1.) un recours en cassation au pénal contre l'arrêt no 270/23 X.

rendu le 5 juillet 2023 par la Cour d'appel siégeant en matière correctionnelle.

Cette déclaration de recours a été suivie en date du 4 septembre 2023 du dépôt au greffe de la Cour supérieure de justice d'un mémoire en cassation, signé par Maître Daniel NOEL, avocat à la Cour, demeurant à Esch-sur-Alzette, au nom et pour le compte de PERSONNE1.).

Le pourvoi respectant les conditions de recevabilité requises par les articles 41 et 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, il est recevable en la pure forme.

Quant aux faits et rétroactes :

Par jugement n° 196/2020 du 23 janvier 2020 rendu par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg siégeant en matière correctionnelle et statuant contradictoirement, PERSONNE1.) a été condamnée à une peine d’emprisonnement de 4 ans, dont 3 ans avec sursis et à une amende de 10.000 euros du chef d’infractions aux articles 8.1.a, 8.1.b, 8.1.d et 8-1 de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie. Le même jugement a ordonné la fermeture définitive du café « ENSEIGNE1.) » sis à ADRESSE3.).

Par arrêt no 270/23 X. rendu le 5 juillet 2023 par la Cour d'appel, siégeant en matière correctionnelle, les juges d'appel ont, par réformation du jugement de première instance, acquitté la prévenue de l’infraction à l’article 8-1 de la prédite loi modifiée du 19 février 1973 et l’ont condamnée à une peine d’emprisonnement de 3 ans, dont 2 ans avec sursis, et, pour le surplus, ont confirmé le jugement de première instance.

Le pourvoi en cassation est dirigé contre cet arrêt.

Quant au premier moyen de cassation Le premier moyen de cassation est tiré de la violation sinon de la mauvaise application de l’article 89 de la Constitution qui dispose en sa première phrase que : « Tout jugement est motivé » et de la violation de l’article 195 paragraphe 1er du Code de procédure pénale disposant en sa première phrase que : « Tout jugement définitif de condamnation sera motivé » ; en ce que la Cour d’appel s’est contentée aux pages 124, 128 et 134 de l’arrêt attaqué et concernant la dame PERSONNE1.) d’indiquer que : page 124 « Les enquêteurs ont constaté que ce café se prête, de par sa situation géographique, particulièrement bien à la vente de stupéfiants étant donné qu'il permet aux vendeurs de drogue d'avoir une vue dégagée sur les rues adjacentes, d'apercevoir sans difficultés la présence de la police et de se communiquer mutuellement tout soupçon de contrôle policier. La terrasse du café fait partie intégrante de l'établissement « ENSEIGNE1.) », page 128 « Sur base des déclarations policières de PERSONNE2.) et PERSONNE3.), corroborées par certaines observations policières, c'est également à juste titre que le tribunal a retenu la culpabilité de la prévenue en qualité d'auteur des infractions à l'article 8.1.d de la loi du 19 février 1973, telles que spécifiées au point C du jugement déféré. » et page 134 « Le fait que la mise à exécution concrète des transactions ait eu lieu dans des rues avoisinantes n'enlève rien au fait que ces transactions n'ont pu se produire que grâce à une entrée en relation préalable entre vendeurs et acheteurs qui avait lieu dans le local «ENSEIGNE1.) », ainsi que cela résulte des éléments du dossier répressif. La prévenue, si elle n'a pas encouragé les ventes incriminées, n'a cependant rien effectué pour empêcher les trois vendeurs précités de s'adonner à leurs ventes de drogue. » également en ce que la Cour d’appel s’est contentée dans le dispositif de l’arrêt attaqué et concernant la dame PERSONNE1.) de retenir ce qui suit : « confirme le jugement entrepris pour le surplus », alors qu’en ayant statué ainsi, la Cour n’a pas justifié en quoi le tribunal d’arrondissement aurait fait une analyse correcte des circonstances de la cause, et que ces motifs, qui n’expriment aucun raisonnement juridique, sont insuffisants pour en déduire une confirmation du jugement de condamnation entrepris.

En tant que tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution - actuellement 109 de la Constitution1 - et de l’article 195, paragraphe 1, du Code de procédure pénale, le moyen vise le défaut de motif qui est un vice de forme.

Une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.

Il résulte de l’arrêt entrepris, que les juges d’appel, après avoir analysé sur une quinzaine de pages2 les déclarations de la prévenue, les éléments objectifs du dossier tels les constatations et observations de la police grand-ducale, les procès-verbaux et les rapports de police, ainsi que les dépositions des témoins, et après avoir qualifié les faits retenus sur base de ces éléments de preuve, ont acquitté la prévenue de l’infraction à l’article 8-1 de la loi modifiée du 19 février 1973 et ont confirmé les premiers juges en ce qu’ils ont retenu la prévenue dans les liens des articles 8.1.a, 8.1.b et 8.1.d de la loi modifiée du 19 février 1973.

1 Texte coordonné de la Constitution du Grand-Duché de Luxembourg, Mém. A 29 du 18/01/2023 2 pages 118 à 134 de l’arrêt du 5 juillet 2023 Les motifs cités ci-avant par la demanderesse en cassation pour invoquer un défaut de motivation ne sont qu’incomplets en ce qu’ils ne reproduisent que quelques extraits de l’arrêt attaqué et procèdent d’une lecture erronée de l’arrêt. En prenant lecture de l’arrêt complet, il appert que le moyen procède d’une lecture lacunaire en ce que la motivation reproduite par la demanderesse en cassation n’est qu’incomplète, de sorte que principalement, le moyen manque en fait.

Subsidiairement, en statuant comme ils l’ont fait et en examinant sur une quinzaine de pages les éléments objectifs du dossier, les procès-verbaux et rapports de police, les observations de la police et les dépositions de témoins et en confirmant partiellement la décision des juges de première instance de retenir la prévenue dans les liens des préventions lui reprochées, les juges d’appel ont motivé leur décision.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Enfin, plus subsidiairement, le moyen, sous le couvert de la violation des dispositions invoquées, ne tend en réalité qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de preuve leur soumis et ne saurait de ce fait être accueilli.

Quant au deuxième moyen de cassation Le deuxième moyen de cassation est tiré de la violation, sinon de la mauvaise application de l’article 89 de la Constitution qui dispose en sa première phrase que :

« Tout jugement est motivé » et de la violation de l’article 195 paragraphe 1er du Code de procédure pénale disposant en sa deuxième phrase que « Il déterminera les circonstances constitutives de l’infraction et citer les articles de la loi dont il est fait application sans en reproduire les termes » en ce que la Cour d’appel s’est contentée à la page 136 de l’arrêt attaqué et concernant PERSONNE1.) de retenir ce qui suit :

« confirme le jugement entrepris pour le surplus », alors que force est de constater que la Cour d’appel n’a pas déterminé les circonstances constitutives de l’infraction, ni cité les articles de la loi qu’elle a appliquée.

Ce moyen est tiré de la violation par défaut de motifs des articles visés par le moyen, la demanderesse en cassation se basant sur l’article 195, alinéa 1er, seconde phrase, du Code de procédure pénale, faisant soutenir que la Cour d’appel aurait dû déterminer les circonstances constitutives des infractions et citer les articles de la loi qu’elle a appliqués.

Le moyen procède d’une lecture incorrecte de l’arrêt. La Cour d’appel, en confirmant partiellement le jugement de première instance, confirma la détermination par les premiers juges des circonstances constitutives des infractions retenues et la citation par ce jugement des articles de la loi dont il a été fait application pour retenir ces infractions.

Ainsi, ce n’est qu’après avoir analysé sur une quinzaine de pages3 les déclarations de la prévenue, les éléments objectifs du dossier tels les constatations et observations de la police grand-ducale, les procès-verbaux et les rapports de police, ainsi que les 3 pages 118 à 134 de l’arrêt du 5 juillet 2023dépositions des témoins, et après avoir qualifié les faits retenus sur base de ces éléments de preuve qu’elle a partiellement confirmé le jugement de première instance.

Il s’ensuit que principalement, le moyen manque en fait et ne peut donc être accueilli.

Subsidiairement, la citation des articles de la loi dont il est fait application et prévue à l’article 195 du Code de procédure pénale, n’est pas prescrite à peine de nullité, de sorte que l’absence de cet énoncé ne peut dès lors donner ouverture à cassation4.

Le moyen n’est donc pas fondé.

Quant au troisième moyen de cassation Le troisième moyen de cassation est tiré de la violation de l’article 6 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ci-après la Convention, en vertu duquel « toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. ». Selon la demanderesse en cassation, la présomption d’innocence exige que la charge de la preuve revient à la seule autorité publique qui doit enquêter à charge et à décharge, de sorte que le même standard de preuve doit s’appliquer aux éléments à charge qu’à ceux à décharge, standard de preuve qui n’a pas été respecté en l’espèce dans la mesure où la Cour d’appel a condamné la demanderesse en cassation sur base d’indices et en l’absence de toute preuve tangible.

A titre principal, le moyen manque de précision en ce qu'il formule un grief de manière abstraite par référence à la disposition légale visée au moyen dont la violation est invoquée, sans préciser ni la partie critiquée de la décision attaquée, ni en quoi celle-ci encourt le reproche allégué. Le moyen est donc irrecevable.

A titre subsidiaire, l’article 6 de la Convention ne règlemente pas la question de l’admissibilité des éléments de preuve en tant que telle, matière qui relève en premier lieu du droit interne. Ainsi l’article 6, paragraphe 2, est étranger à l’obtention, à l’administration et à l’appréciation des preuves qui relèvent du droit à un procès équitable garanti par l’article 6, paragraphe 1er de la Convention. Cela n’exclut toutefois pas que le respect du droit à la présomption d’innocence exige que les décisions de condamnation reposent sur des éléments de preuve suffisants et régulièrement présentés5.

Dans notre système de preuve, qui est celui de l'intime conviction du juge pénal, le juge apprécie librement la valeur des preuves versées aux débats et les résultats des mesures d'instruction ordonnées, sans que la loi en règle l'effet probatoire, et ce hors de tout 4 Cass n° 24 / 2009 pénal du 7.5.2009, numéro 2660 du registre ;

5 Franklin KUTY, justice pénale et procès équitable, volume 2, no 1608, page 226 et références jurisprudentielles y citées.contrôle de la Cour de Cassation autre que celui de la motivation6. Le moyen ne saurait être accueilli de ce point de vue.

A titre plus subsidiaire, sous le couvert du grief de la violation des textes visés au moyen, celui-ci ne tend en réalité qu'à remettre en discussion l'appréciation par les juges d'appel de la valeur probante des éléments de preuve contradictoirement débattus devant eux.

Cette appréciation relevant de leur pouvoir souverain et échappant au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le moyen sous examen ne saurait être accueilli.

Quant au quatrième moyen de cassation Le quatrième moyen de cassation est tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en vertu duquel « toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie », en ce que la Cour d’appel s’est basée sur des témoignages des consommateurs de stupéfiants PERSONNE2.), PERSONNE3.), PERSONNE4.) et PERSONNE5.) pour asseoir une condamnation, alors que ces témoignages n’ont pas de force probante, qu’il s’agit de simples éléments de l’enquête policière et non d’éléments tangibles. Ces déclarations peuvent être prises en considération pour fonder l’intime conviction du juge, mais ne constituent cependant pas des preuves légalement admissibles et ne permettent pas à elles seules à asseoir une condamnation.

A titre principal, il faut constater que le moyen manque en fait, dès lors qu’il procède d’une lecture incomplète, voire erronée de l’arrêt attaqué.

Contrairement aux termes du moyen, les magistrats d’appel n’ont pas fondé leur décision quant à la culpabilité de la demanderesse en cassation sur les seules déclarations des témoins cités, mais ils ont analysé sur une quinzaine de pages tous les éléments du dossier, dont les procès-verbaux et rapports de police et les observations policières ensemble avec les dépositions des témoins au dossier.

Ils ont ainsi analysé de manière exhaustive tous les faits et éléments de preuve leur soumis et librement discutés par les parties. Sur base de l’ensemble de ces éléments, ils ont retenu que les infractions reprochées à PERSONNE1.) s’avéraient établies à l'exclusion de tout doute. Le moyen, en ce qu’il procède d’une lecture erronée de l’arrêt, manque en fait.

A titre subsidiaire, sous le couvert de la violation des dispositions invoquées, le moyen ne tend en réalité qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine par les juges du fond des faits et des éléments de preuve leur soumis et desquels ils ont déduit la culpabilité 6 J. Boré, La cassation en matière pénale, éd. 2018/2019, n° 74.1 et 74.13 ;

de PERSONNE1.), appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le moyen, sous cette considération, ne saurait être accueilli.

Conclusion Le pourvoi est recevable mais à rejeter.

Pour le Procureur général d’Etat, l’avocat général, Joëlle NEIS 13


Synthèse
Numéro d'arrêt : 60/24
Date de la décision : 28/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2024-03-28;60.24 ?

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