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02/02/2024 | LUXEMBOURG | N°16/24

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 02 février 2024, 16/24


N° 16 / 2024 du 01.02.2024 Numéro CAS-2023-00070 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, premier février deux mille vingt-quatre.

Composition:

Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, président, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à B-ADRESSE1.), demandeur en cassa

tion, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duq...

N° 16 / 2024 du 01.02.2024 Numéro CAS-2023-00070 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, premier février deux mille vingt-quatre.

Composition:

Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, président, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Monique HENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jeanne GUILLAUME, conseiller à la Cour de cassation, Carine FLAMMANG, conseiller à la Cour de cassation, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à B-ADRESSE1.), demandeur en cassation, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et la société anonyme SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-

ADRESSE2.), représentée par le conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), défenderesse en cassation, comparant par Maître Romain ADAM, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 72/22 - III - TRAV, rendu le 2 juin 2022 sous le numéro CAL-2018-00896 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 10 mai 2023 par PERSONNE1.) à la société anonyme SOCIETE1.) (ci-après « la société SOCIETE1.) ») déposé le 12 mai 2023 au greffe de la Cour supérieure de Justice ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 4 juillet 2023 par la société SOCIETE1.) à PERSONNE1.), déposé le 7 juillet 2023 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du premier avocat général Monique SCHMITZ.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le Tribunal du travail de Luxembourg avait déclaré partiellement fondée la demande en paiement de l’indemnité de départ dirigée par le demandeur en cassation contre la défenderesse en cassation et non fondées les autres demandes en indemnisation, le licenciement prononcé par la société SOCIETE1.) ayant été déclaré fondé et non abusif. La Cour d’appel a confirmé le jugement.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, voire d’une application erronée, voire d’une fausse interprétation, in specie de l’article L.124-6 alinéa 1er du code du travail qui dispose que par l’article L. 124-10 ou sans respecter les délais de préavis visés aux articles L.

124-4 et L. 124-5 est tenue de payer à l’autre partie une indemnité compensatoire de préavis égale au salaire correspondant à la durée du préavis ou, le cas échéant, à la partie de ce délai restant à courir », en ce que la Cour d’appel, confirmant le jugement de première instance qui a déclaré non fondée la demande du demandeur en cassation en obtention d’une indemnité compensatoire de préavis, a décidé que l’indemnité compensatoire de préavis, respectivement une partie de celle-ci, devait être calculée sur base de la moyenne du salaire effectivement versé pendant les douze mois antérieurs à la notification du licenciement, alors que d’après l’article L.124-6 alinéa 1er du code du travail, il faut prendre en compte, pour déterminer l’indemnité compensatoire de préavis, le salaire auquel peut prétendre le salarié pendant la période de préavis concernée.

La Cour d’appel aurait donc dû se baser sur le salaire effectif auquel peut prétendre le salarié pendant chacun des mois considérés par la durée du préavis, au lieu de calculer une moyenne sur les 12 derniers mois avant le licenciement.

En jugeant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a donc ajouté une condition à l’article L.124-6 alinéa 1er du code du travail que ce texte de loi ne contient pas. ».

Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir calculé l’indemnité compensatoire de préavis, due pour la période du 15 mars au 14 septembre 2015, sur base du salaire qu’il aurait réellement touché au cours des exercices comptables du 1er mai 2014 au 30 avril 2015 et du 1er mai 2015 au 30 avril 2016.

L’indemnité compensatoire de préavis due en cas de licenciement abusif en application de l’article L.124-6 du Code du travail correspond au salaire dû pendant la durée du préavis que l’employeur aurait dû respecter lors du licenciement conformément à l’article L.124-3(2).

Au vu de la régularité, non contestée par le demandeur en cassation, du licenciement avec préavis, l’article L.124-6 du Code du travail ne trouve pas à s’appliquer.

Le grief est étranger à la disposition visée au moyen.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, voire d’une application erronée, voire d’une fausse interprétation, in specie de l’article L. 124-7 (3) du code du travail qui dispose que effectivement versés au salarié pour les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de la résiliation », en ce que la Cour d’appel, confirmant le jugement de première instance qui a déclaré non fondée la demande du demandeur en cassation en obtention d’un montant supplémentaire à titre d’indemnité de départ, a calculé l’indemnité de départ de 9 mois en appliquant une moyenne des salaires revenant au salarié pendant les 12 mois antérieurs à la notification du licenciement, alors que la Cour d’appel aurait dû tenir compte du fait que les salaires du demandeur en cassation pendant la période des 12 mois antérieurs à la notification du licenciement s’étalent sur 2 exercices comptables et que compte tenu du fait que les salaires sont variables et que leur quantum diffère dès lors d’une année à l’autre, elle aurait dû appliquer une pondération de la période à prendre en considération à titre des 12 mois visés par l’article L. 124-7 (3) du code du travail en fonction du nombre des salaires se rapportant à l’une et à l’autre des deux exercices comptables concernés. ».

Réponse de la Cour Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé l’article L.124-7 (3) du Code du travail en ayant calculé l’indemnité de départ sur base des salaires dus pour les douze derniers mois qui précédaient immédiatement celui de la notification du licenciement, sans tenir compte du fait que ces salaires s’étalaient sur deux exercices comptables et en n’ayant pas appliqué de pondération pour la période se rapportant à l’exercice du 1er mai 2013 au 30 avril 2014 et à celui du 1er mai 2014 au 30 avril 2015.

En retenant « L’article L.124-7 (3) du Code du travail précise en son alinéa premier que l’indemnité de départ est calculée sur la base des salaires bruts effectivement versés au salarié pour les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de la résiliation.

En application des dispositions de cet article du Code du travail, la société SOCIETE1.) a calculé l’indemnité de départ sur base de la rémunération effectivement versée pendant les douze mois précédant immédiatement celui de la notification du licenciement en date du 3 mars 2015. » les juges d’appel n’ont pas violé la disposition visée au moyen.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, voire d’une application erronée, voire d’une fausse interprétation, in specie de l’article 89 de la Constitution, de l’article 249 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi que de l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme qui requièrent de la part du juge de motiver la décision, en ce que la Cour d’appel, en confirmant le jugement de première instance qui a déclaré non fondée la demande du demandeur en cassation en obtention d’un montant supplémentaire à titre d’indemnité de départ, a adopté la motivation contradictoire suivante :

-

prendre en considération pour le calcul de la rémunération variable débute le 1er mai et, faute de précisions supplémentaires, est dès lors clôturé le 30 avril de l’année suivante » (page 12) -

redû à titre de rémunération variable s’élève à 35.650 euros » (page 12) -

ADAM, que la rémunération variable pour les années 2014-2015 de PERSONNE1.) s’élevait au montant de 640.335 euros (…) » (page 18) -

pendant la période du 1er mars 2014 au 28 février 2015 s’élevait à 35.650 euros Il en découle que le montant redû à l’appelant au titre de l’indemnité de départ s’élève au montant brut de [35.650 : 12] x 9, soit 26.737,50 euros » (page 19), qu’en statuant ainsi, la Cour d’appel a d’un côté retenu que l’année comptable va du 1er mai d’une année jusqu’au 30 avril de l’année suivante, alors qu’elle a d’un autre côté calculé l’indemnité de départ du 1er mars 2014 au 28 février 2015 sans tenir compte du fait que cette période s’étend sur 2 années comptables, à savoir les périodes du 1.05.2013 au 30.04.2014 et du 1.05.2014 au 30.04.2015, de sorte que l’arrêt est empreint de contradiction dans ses motifs. ».

Réponse de la Cour Le grief tiré de la contradiction de motifs, équivalant à un défaut de motifs, ne peut être retenu que si les motifs critiqués sont contradictoires à un point tel qu’ils se détruisent et s’annihilent réciproquement, aucun ne pouvant être retenu comme fondement de la décision.

En retenant comme assiette de calcul de l’indemnité de départ, la rémunération effectivement versée au demandeur en cassation pour la période visée à l’article L.124-7 (3) du Code du travail, soit du 1er mars 2014 au 28 février 2015, sans tenir compte des commissions perçues par celui-ci postérieurement à cette période, les juges d’appel ne se sont pas contredits.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur les demandes en allocation d’une indemnité de procédure Le demandeur en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, sa demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.

Il serait inéquitable de laisser à charge de la défenderesse en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer une indemnité de procédure de 5.000 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation à payer à la défenderesse en cassation une indemnité de procédure de 5.000 euros ;

rejette la demande du demandeur en cassation en allocation d’une indemnité de procédure ;

le condamne aux frais et dépens de l’instance en cassation.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Agnès ZAGO en présence de l’avocat général Bob PIRON et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) c/ la société anonyme SOCIETE1.) SA (affaire n° CAS-2023-00070 du registre) Le pourvoi en cassation introduit par PERSONNE1.) par mémoire en cassation daté au 8 mai 2023, signifié à la société anonyme SOCIETE1.) SA et l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG en sa qualité de gestionnaire du Fonds pour l’Emploi, le 10 mai 2023, et déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice le 12 mai 2023, est dirigé contre l’arrêt n° 72/22, rendu contradictoirement le 2 juin 2022 par la Cour d’appel, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail, dans la cause inscrite numéro CAL-2018-00896 du rôle.

Le demandeur en cassation, domicilié en Belgique, soutenant que ledit arrêt lui fut signifié en date des 1er mars 2023 et 6 mars 20231, dates de signification non contestées par le défendeur en cassation, et bénéficiant en application de l’article 7 alinéa 2 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure de cassation de l’augmentation des délais prévus à l’article 167 du NCPC2 le pourvoi en cassation a été interjeté dans les forme et délai prévus aux articles 7 et 10 de la loi du 18 février 1885.

La société anonyme SOCIETE1.) SA a signifié un mémoire en réponse le 4 juillet 2023 et l’a déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice le 7 juillet 2023. Ayant été signifié et déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice conformément aux articles 15 et 16 de la loi précitée du 18 février 1885, ce mémoire est à considérer.

Quant aux faits et rétroactes :

Par lettre de licenciement du 1er mars 2015, SOCIETE1.) SA a procédé à la résiliation du contrat de travail conclu avec PERSONNE1.) le 1er mai 1998, ce avec le préavis légal de 6 mois. Le salarié fut dispensé de la prestation du préavis.

Le préavis légal a pris court le 15 mars 2015 pour expirer le 15 septembre 2015.

PERSONNE1.) était également sous contrat de travail avec la société SOCIETE2.) SA, faisant partie du même groupe de sociétés que la défenderesse en cassation, sur base d’un contrat de travail conclu le 4 novembre 1988 dont il a également été mis fin à l’initiative de l’employeur par une deuxième lettre de résiliation en date du 3 mars 2015.

1 (exploits contenant la date du 24.02.2023 avec avis recommandé déposé le 1.03.2023 et retiré le 2.03.2023 respectivement remis à personne par huissier de justice le 6.03.2023) ;

2 soit en l’occurrence de l’augmentation de 15 jours, alors que le demandeur en cassation, domicilié en Belgique, demeure dans un territoire situé en Europe et d’un pays membre de l’Union européenne ;

Pour une meilleure compréhension des moyens de cassation, il y a d’ores et déjà lieu de préciser que, par convention du 31 janvier 2004, les parties avaient arrêté que la rémunération de PERSONNE1.) était variable et globale, ce en ce qu’elle constituait la contrepartie des prestations de travail réalisées par PERSONNE1.) pour les sociétés SOCIETE2.) SA et SOCIETE1.) SA, et qu’elle correspondait à un pourcentage du bénéfice avant impôts de ces sociétés et de leurs filiales et participations. La prédite convention arrêtait le mode de calcul détaillé de la rémunération variable globale attribuée à PERSONNE1.). La particularité en était que l’exercice comptable commença le 1er mai d’une année et fut clôturé le 30 avril de l’année suivante et que c’est donc sur base des comptes au 30 avril que le bénéfice avant impôt sur lequel fut calculée la rémunération variable est déterminé.

Par arrêt dont pourvoi, la Cour d’appel a confirmé le jugement rendu le 28 juin 2018 par le tribunal du travail de Luxembourg (rép. fisc. numéro 2334/18) aux termes duquel la demande introduite par PERSONNE1.) contre la société anonyme SOCIETE3.) fut déclarée irrecevable, sa demande introduite contre la société anonyme SOCIETE1.) fut déclarée recevable, le licenciement prononcé à l’égard de PERSONNE1.) par la société anonyme SOCIETE1.) en date du 3 mars 2015 fut déclaré fondé et non abusif, en conséquence, la demande de PERSONNE1.) en indemnisation des dommages matériel et moral subis suite au licenciement fut déclarée non fondée.

Pour le surplus, le 1er juge a déclaré non fondé - la demande de PERSONNE1.) en paiement d’une rémunération variable pour l’exercice 2013-2014, - la demande de PERSONNE1.) en paiement d’une rémunération variable pour l’exercice 2014-2015, - les demandes subsidiaires de PERSONNE1.) relatives à l’institution d’une expertise et en communication, sous peine d’astreinte, de documents ;

- la demande de PERSONNE1.) relative à la cotisation patronale dans l’assurance groupe sur la rémunération variable, - la demande de PERSONNE1.) relative au pécule de vacances sur la rémunération variable et pertes de commissions pour jours fériés, - la demande de PERSONNE1.) en paiement d’une indemnité compensatoire de préavis.

Le 1er juge a déclaré fondé la demande de PERSONNE1.) en paiement d’une indemnité de départ à concurrence du montant de 6.682,13 euros et non fondé pour le surplus. En conséquence il a condamné SOCIETE1.) à payer à PERSONNE1.) la somme de 6.682,13 euros avec les intérêts légaux à partir du jour de la demande en justice jusqu'à solde.

Les dispositions attaquées de l’arrêt dont pourvoi ont exclusivement trait au volet de l’affaire portant sur l’indemnité compensatoire de préavis et l’indemnité de départ.

Il y a encore lieu de mettre en exergue, que ° les magistrats d’appel ont constaté - que l’exercice comptable à prendre en considération pour le calcul de la rémunération variable débute le 1er mai et, faute de précisions supplémentaires, est dès lors clôturé le 30 avril de l’année suivante3, - que pour l’exercice 2013-2014, les parties s’accordent à dire que le montant redû à titre de rémunération variable s’élève au montant de 35.650 euros4 ; (il s’agit donc de l’exercice comptable s’étalant du 1er mai 2013 au 30 avril 2014) ;

- que la rémunération variable pour les années 2014-2015 de PERSONNE1.) s’élève t au montant de 640.335 euros5 ; (il s’agit donc de l’exercice comptable s’étalant du 1er mai 2014 au 30 avril 2015) ;

° que sous leur raisonnement en relation avec l’indemnité compensatoire de préavis, ils ont tenu compte de la somme de 35.650 euros comme correspondant à la rémunération des douze mois antérieurs à la notification du licenciement du 1ier mars 2015, soit entre le 1ier mars 2014 et le 28 février 2015, et qu’ils ont précisé que ce montant est non contesté par les parties d’après le jugement a quo et les conclusions de l’employeur ;

° qu’ils ont également tenu compte de cette rémunération pour le calcul de l’indemnité de départ.

La motivation des magistrats d’appel en relation avec l’indemnité compensatoire de préavis est la suivante6 :

« L’indemnité compensatoire de préavis équivalente à six mois de salaire L’appelant maintient ses arguments présentés devant la juridiction de première instance et aux termes desquels la société SOCIETE1.) aurait déjà connu en décembre 2014, sinon en janvier 2015, les montants lui redûs à titre de rémunération variable pour les exercices 2013-2014 et 2014-2015, partant avant son congédiement et devraient dès lors entrer en ligne de compte pour le calcul de son indemnité compensatoire de préavis.

Il est établi sur base des développements repris ci-avant que l’exercice social de la société SOCIETE1.) débutait le 1er mai et se clôturait le 30 avril de l’année suivante.

Le délai de préavis de PERSONNE1.) avait commencé le 15 mars 2015 pour finir le 14 septembre 2015.

Il convient de préciser que, d’après le contrat de travail du 18 août 1998 et la convention du 31 janvier 2004 conclu avec la société SOCIETE1.), 3 cf. p. 13 de l’arrêt dont pourvoi ;

4 cf. p. 13 et 19 de l’arrêt dont pourvoi ;

5 cf. p. 19 de l’arrêt dont pourvoi ;

6 cf. p 18-19 de l’arrêt dont pourvoi ;

PERSONNE1.) ne bénéficiait que d’une rémunération variable, calculée, depuis le 31 janvier 2004, selon les stipulations de cette convention.

Il ressort du point IV la pièce 5.3) du classeur I) de Maître Romain ADAM, que la rémunération variable pour les années 2014-2015 de PERSONNE1.) s’élevait au montant de 640.335 euros et que le solde de la commission était de 583.266 euros (bruts) sur base du calcul déjà effectué en relation avec le solde de l’avance non remboursée de 57.070 euro,s résultant de l’avance de 70.000 euros consentie en juillet 2012, du montant de la rémunération négative de 22.720 euros et du montant de 35.650 euros effectivement redû à titre de rémunération variable pour l’exercice 2014-2015. (Le montant de 35.650 euros pour l’exercice 2013-2014, n’est pas contesté par les parties) Il résulte de ce qui précède que, pour l’année 2013-2014, la rémunération variable était négative, pour un montant de [35.650-(22.720+70.000)], soit 57.070 euros.

En tenant compte de ce montant de 57.070 euros, la société SOCIETE1.) a finalement payé le montant de (640.335-57.070), soit 583.266 euros (bruts), à titre de commission variable pour l’exercice 2014-2015, s’acquittant partant du paiement du salaire de l’appelant pour le 30 avril 2015, et dès lors également du montant redû au titre du préavis pour la période du 15 mars au 30 avril 2015.

Pour la partie restante du préavis comprise entre le 1er mai 2015 et le 14 septembre 2015, la société SOCIETE1.) a réglé (pièce 7 du classeur de Maître Romain ADAM), le montant de 13.368,75 euros, correspondant à la moyenne de la rémunération variable effectivement versée pendant les douze mois antérieurs à la notification du licenciement, soit entre le 1er mars 2014 et le 28 février 2015. (L’exercice comptable débute le 1er mai et se clôture le 30 avril de l’année suivante).

Cette rémunération s’élevait au montant de 35.650 euros (non contesté par les parties d’après le jugement a quo et les conclusions de Maître Romain ADAM, notifiées le 24 décembre 2018).

En payant le montant de [35.650 : (12 x 4.5)], soit 13.368,75 euros, la société SOCIETE1.) s’est valablement acquittée du montant redû à titre d’indemnité de préavis pour la période du 1er mai au 14 septembre 2015.7 Le jugement entrepris est à confirmer en ce qu’il a rejeté les demandes principale et subsidiaire de PERSONNE1.) en relation avec le paiement de l’indemnité compensatoire de préavis. » Pour être complet, les premiers juges se sont déterminés comme suit8 :

7 passages mis en exergue par la soussignée ;

8 cf. p. 41-42 de jugement de 1ière instance, versé dans la farde de pièces de Me BAULER sous la pièce n° 2 ;

« ° Indemnité compensatoire de préavis équivalente à six mois de salaire:

A l’appui de cette demande, PERSONNE1.) fait valoir que son ancien employeur lui serait encore redevable à une indemnité de préavis correspondant à six mois de salaires suite à son licenciement intervenu le 3 mars 2015 avec un délai préavis de 6 mois prenant cours le 15 mars 2015 et expirant le 14 septembre 2015.

Il insiste sur le fait que les montants redûs au titre de la rémunération variable pour les exercices 2013-2014 et 2014-2015 auraient été connus « de SOCIETE1.) déjà en décembre 2014, sinon en tout état de cause en janvier 2015, soit avant son congédiement » et auraient été exigibles à ces mêmes dates, « soit dans tous les cas avant le licenciement, de sorte qu’ils doivent être pris en considération pour le calcul de l’indemnité compensatoire de préavis ».

Pour le calcul du montant réclamé de 514.039,60 euros résultant de sa note de plaidoiries, à laquelle le tribunal renvoie, le requérant s’est référé à ses développements faits dans le cadre de ses demandes en paiement de la rémunération variable.

Il considère encore qu’il y aurait lieu de prendre en considération, dans le calcul de l’indemnité compensatoire de préavis, le montant de 69.006,70 € redû au titre de la cotisation patronale dans l’assurance groupe sur la rémunération variable.

A titre subsidiaire, si uniquement le montant de 583.266 euros déjà versé par la société SOCIETE1.) à titre de rémunération variable était pris en compte, il calcule l’indemnité compensatoire de préavis lui devant revenir comme suit :

[583.266/12 x 6=] 291.633 euros, desquels il y aurait lieu de déduire le montant de 13.368,75 euros €, soit : 278.264,25 euros.

Cette demande est contestée par la partie défenderesse qui estime que, contrairement à ce que le requérant prétend, s’être entièrement acquittée du paiement de l’indemnité compensatoire de préavis de six mois.

Elle rappelle que dans le cadre de son contrat de travail luxembourgeois, le requérant n’aurait touché qu’une rémunération variable payable une fois par an, payée au mois de juillet après l’audit de ses comptes.

Elle donne à considérer que son exercice social débuterait le 1er mai et se clôturerait le 30 avril de l’année suivante et que le délai de préavis du requérant aurait commencé le 15 mars 2015 pour se terminer le 14 septembre 2015.

C’est à juste titre que la partie défenderesse a fait valoir ce qui suit :

Concernant la partie du préavis du 15 mars au 30 avril 2015, le bénéfice avant impôt de la société SOCIETE2.), clôturé au 30 avril 2015, s’est élevé à 7.7741.006 euros et le bénéfice avant impôt de la société SOCIETE1.) pour le même exercice s’est élevé à 29.925.787 euros, ce qui ressort de ses pièces 5.3) et 5.4) déjà discutées.

La rémunération variable du requérant s’est élevé pour l’exercice 2014-2015 à 640.335 euros, soit 1,7% du montant total.

Comme il résulte des développements faits ci-avant, un solde de l’avance non remboursée s’élevant à 57.070 euros a été retenu au vu de l’avance consentie en juillet 2012, de la rémunération négative du mois de juillet 2013 et de la rémunération variable non attribué en 2014 en raison de ces deux éléments, de sorte qu’elle a payé au requérant une rémunération de 583.266 euros.

En ce qui concerne la partie restante du préavis du 1er mai au 14 septembre 2015, la société SOCIETE1.) a pris la moyenne de la rémunération effectivement versée durant les 12 mois précédant celui de la notification du licenciement, à savoir du 1er mars 2014 au 28 février 2015. Ce calcul de la rémunération variable arrêté au 30 avril 2014 a abouti à un montant brut dû égal à 35.650 euros sur base des comptes de la société SOCIETE3.) arrêtés au 30 avril 2014.

Il résulte de la pièce 7) de la partie défenderesse qu’elle a réglé en conséquence à PERSONNE1.) le montant de 13.368,75 euros (35.650 : 12 x 4,5).

Il s’ensuit que la société SOCIETE1.) s’est acquittée du paiement de l’indemnité compensatoire de préavis, de sorte que la demande de PERSONNE1.) est à rejeter. » Quant à l’indemnité de départ, les magistrats d’appel se sont déterminés comme suit9 :

« L’indemnité de départ PERSONNE1.) avait été engagé le 4 novembre 1988 par contrat de travail à durée indéterminée par la société SOCIETE2.) et le 18 août 1998, avec effet au 1er mai 1998, par la société SOCIETE1.), (pièce 1 de la farde I de Maître Jean-

Marie BAULER).

Aux termes de l’article L.124-7 (1) du Code du travail, l’indemnité de départ d’un salarié disposant d’une ancienneté de plus de vingt-cinq ans est équivalente à neuf mois de salaire.

Tel que cela ressort du jugement entrepris, la société SOCIETE1.) a accepté de payer une indemnité de départ correspondant à une ancienneté de plus de vingt-

cinq ans, prenant dès lors en compte l’ancienneté de l’appelant à partir de son engagement par la société SOCIETE2.), soit le 18 août 1998.

9 cf. p. 20-21 de l’arrêt dont pourvoi ;

La seule contestation des parties en présence concerne le montant de l’indemnité de départ.

L’article L.124-7 (3) du Code du travail précise en son alinéa premier que l’indemnité de départ est calculée sur la base des salaires bruts effectivement versés au salarié pour les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de la résiliation.

En application des dispositions de cet article du Code du travail, la société SOCIETE1.) a calculé l’indemnité de départ sur base de la rémunération effectivement versée pendant les douze mois précédant immédiatement celui de la notification du licenciement en date du 3 mars 2015.

Tel que développé antérieurement, la rémunération effectivement versée pendant la période du 1er mars 2014 au 28 février 2015 s’élevait à 35.650 euros.

Il en découle que le montant redû à l’appelant au titre de l’indemnité de départ s’élève au montant brut de [35.650 : 12] x 9, soit 26.737,50 euros.

De ce montant brut de 26.737,50 euros la société SOCIETE1.) a en définitive payé le montant net de 20.056,37 euros, après déduction des charges fiscales et sociales, retenues par l’employeur (pièce 8 du classeur 1 de Maître Romain ADAM).

Par conclusions notifiées le 24 décembre 2018, la société SOCIETE1.) conteste être encore redevable d’un quelconque montant au titre de l’indemnité de départ.

Or, aux termes de l’article L.124-7 (3) du Code du travail, le montant redû à PERSONNE1.) correspond au montant brut de la rémunération à prendre en considération et s’élève au montant de 26.737,50 euros, duquel la société SOCIETE1.) n’avait pas à prélever les charges fiscales et sociales.

L’appel incident de la société SOCIETE1.) n’étant pas fondé, le jugement entrepris est à confirmer en ce qu’il a déclaré la demande de PERSONNE1.) fondée pour le montant de (26.737,50-20.056,37) euros, soit le montant de 6.682,13 euros. » La motivation du 1ier juge relativement à l’indemnité de départ se se lit comme suit10 :

« * Indemnité de départ :

A titre d’indemnité de départ redûe en application de l’article L.124-7 du Code du travail, et en tenant compte d’une ancienneté de services de 26 ans au moment du licenciement avec préavis, PERSONNE1.) réclame encore le 10 cf. p. 42-43 de jugement de 1ière instance, versé dans la farde de pièces de Me BAULER sous la pièce n° 2 ;

paiement d’une indemnité de départ équivalente à 9 mois de salaires pour le montant de 771.057,16 euros.

Or, la société SOCIETE1.) ne lui aurait réglé qu’un montant net de 20.055,37 euros.

A titre subsidiaire, si uniquement le montant de 583.266 euros déjà versé par la société SOCIETE1.) à titre de rémunération variable était pris en compte, il calcule l’indemnité compensatoire de préavis lui devant revenir comme suit :

[583.266/12 x 9=] 437.449,50 € desquels il y aurait lieu de faut retrancher les 20.055,37 euros payés, soit donc un total de : 417.394,13 euros.

Cette demande est formellement contestée par la partie défenderesse.

Celle-ci fait valoir qu’elle a réglé au requérant le montant de 26.737,50 euros à titre de l’indemnité de départ ceci conformément au calcul de l’article L.124-7 (3) du Code du travail, calculée comme suit : la rémunération effectivement versée s’est élevé à 35.650 euros pour la période du 1er mars 2014 au 28 février 2015, de sorte que le requérant aurait eu droit à (35.650 : 12 X 9) = 26.737,50 euros à titre d’indemnité de départ, en prenant en compte la rémunération effectivement versée au salarié durant les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de résiliation, soit la période du 1er mars 2014 au 28 février 2015.

Sur base des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que la société SOCIETE1.) a correctement évalué l’indemnité de départ du requérant.

Toutefois, la société SOCIETE1.) admet qu’elle n’a payé au requérant qu’un montant de 20.055,37 euros au lieu de 26.737,50 euros.

Il s’ensuit que la de demande de PERSONNE1.) est à déclarer fondée pour le montant de (26.737,50 – 20.055,37) = 6.682,13 euros et non fondée pour le surplus. » Premier moyen de cassation Le premier moyen de cassation est tiré de la violation, voire d’une application erronée, voire d’une fausse interprétation, in specie de l’article L.124-6 alinéa 1er du Code du travail en ce que la Cour d’appel, confirmant le jugement de première instance qui a déclaré non fondée la demande du demandeur en cassation en obtention d’une indemnité compensatoire de préavis, a décidé que l’indemnité compensatoire de préavis, respectivement une partie de celle-ci, devait être calculée sur base de la moyenne du salaire effectivement versé pendant les douze mois antérieurs à la notification du licenciement, alors que d’après l’article L.124-6 alinéa 1er du code du travail, il faut prendre en compte, pour déterminer l’indemnité compensatoire de préavis, le salaire auquel peut prétendre le salarié pendant la période de préavis concernée. Autrement-dit, le demandeur en cassation fait valoir que les juges du fond, pour calculer l’indemnité compensatoire de préavis, aurait dû se baser sur le salaire effectif auquel peut prétendre le salarié pendant chacun des mois considérés pendant le préavis.

Il appert de la discussion du moyen que le demandeur en cassation ne critique pas la durée du préavis légal lui notifié, mais la méthode de calcul opérée par l’employeur et entérinée tant par le 1ier juge que par les magistrats d’appel.

Le moyen, lu conjointement avec la discussion subséquente, se comprend dans le sens que le demandeur en cassation reproche aux juges du fond d’avoir, pour le calcul de l’indemnité compensatoire de préavis, pris en considération ses revenus se situant en amont du licenciement, soit une moyenne calculée sur la période des 12 derniers mois ayant précédé le licenciement, au lieu de ceux se situant postérieurement du licenciement, soit pendant la durée et le cours du préavis du 15 mars 2015 au 15 septembre 2015 et s’étalant en l’occurrence nécessairement sur 2 exercices comptables, à savoir la période du 15 mars 2014 au 30 avril 2015 et la période du 1er mai 2015 au 30 avril 2016.

Il y a lieu de rendre attentif à ce que l’article L.124-6 alinéa 1er du Code du travail vise deux hypothèses, à savoir 1.) l’hypothèse du licenciement pour faute grave déclaré abusif, cas de figure exigeant le paiement d’une indemnité qui compense le préavis auquel le salarié aurait eu droit s’il avait été licencié avec préavis et qui correspond à la durée du préavis auquel il aurait légalement pu prétendre, et 2.) l’hypothèse où le délai de préavis visé aux articles L.124-3 (licenciement avec préavis par l’employeur) et L.124-4 du Code du travail (licenciement avec préavis de la part du salarié/employé) n’a pas été respecté, cas de figure qui exige le paiement sous forme d’indemnité de la partie de ce délai restant à courir ;

il importe de préciser qu’une fois la lettre de licenciement, comprenant un délai de préavis insuffisant, notifié, l’employeur ne peut y remédier en p.ex. notifiant une nouvelle lettre de licenciement comprenant un délai de préavis correct ; il ne peut revenir sur son erreur et prolonger ultérieurement le préavis, sauf accord du salarié11; pour cette raison, l’employeur lui doit le « solde » du préavis légal non respecté sous forme d’indemnité correspondant à la durée de préavis manquante.

11 cf. CCass n° 31/2019 du 14 février 2019, n° 4092 du registre, visant l’hypothèse de l’impossibilité par le salarié-démissionnaire de revenir de sa propre initiative et sans l’accord de l’autre partie, sur la durée du préavis, et devant s’appliquer logiquement également à l’hypothèse de l’employeur ayant procédé au licenciement ;

Ainsi, pour pouvoir prétendre à l’indemnité telle que prescrite à la disposition légale visée au moyen, le salarié doit soit apporter la preuve que le licenciement est abusif, soit que le délai légal de préavis n’a pas été respecté. Ces preuves rapportées, le droit à l’indemnité est ouvert.

Quant à l’hypothèse sub 1.), la disposition légale visé au moyen est étrangère à l’espèce en ce qu’en l’occurrence PERSONNE1.) a fait l’objet d’un licenciement avec préavis, et non d’un licenciement pour faute grave déclaré abusif.

Il en est de même en ce qui concerne l’hypothèse visée sub 2.) en ce qu’aux termes de la lettre de licenciement du 3 mars 2015, le contrat de travail conclu avec PERSONNE1.) fut résilié avec le préavis légal de six mois et que la durée du préavis en tant que telle n’a pas fait l’objet de contestations. En effet, c’est la seule méthode de calcul appliquée par l’employeur qui fut querellée.

Le moyen sous examen procède d’une mauvaise compréhension de la disposition légale en sa 2e hypothèse, ce en ce que le demandeur en cassation entend en déduire l’exigence que l’indemnité compensatoire de préavis corresponde aux revenus touchés postérieurement au licenciement pendant la période du préavis et qu’il faudrait tenir compte des salaires qu’il aurait touché s’il avait presté son préavis.

Or, l’hypothèse visée sub 2.) est relative à la durée du préavis, et à la seule question de la durée.

Elle n’embrasse pas de méthode de calcul de l’indemnité compensatoire de préavis due en cas de non-respect de la durée légale de préavis.

En ce que le législateur a fait référence à « (…) ou, le cas échéant à la partie de ce délai restant à courir (…) », il a visé le seul solde du préavis en termes de durée non respectée, et n’a préconisé aucune méthode de calcul12. A fortiori il n’a pas visé de méthode de calcul se greffant sur les revenus touchés pendant le préavis légal. Aucune disposition légale ne traite directement du mode calcul de l’indemnité prévue à l’article L.124-6 alinéa 1ier du Code du travail, ce par opposition à ce qui est le cas à propos de l’indemnité de départ, relativement à laquelle le législateur a pris le soin de la prescrire à l’article L.124-7 (3) du Code du travail.

Dans la mesure où en l’occurrence la durée du préavis en tant que telle n’est pas en cause, le grief est étranger à la disposition légale visée au moyen. Sous ce rapport, le moyen est dès lors irrecevable.

Si certes, dans le cas de figure d’une prestation de travail effective pendant le préavis légal, le salarié touche son salaire à la fin de chaque mois durant la période de préavis, la situation en est une autre en cas de dispense de l’exécution du travail pendant le délai de préavis.

Le contexte factuel de l’espèce, soit la dispense de travail pendant le préavis, et la question de la rémunération du salarié jusqu’à l’expiration du préavis, sont régis par l’article L.124-9 (1) alinéa 2 du Code du travail. En vertu de cette disposition légale, jusqu’à l’expiration du délai de préavis, la dispense ne doit, abstraction faite des frais occasionnés par le travail, entraîner pour le salarié aucune diminution de salaires, traitements, indemnités et autres avantages. C’est 12 cf. à titre d’exemple dans ce sens CA n° 26/17 – VII – travail du 16 février 2017, n° 43507 du rôle ;

en réalité en application de ce texte que le demandeur en cassation exige la prise en considération des revenus pendant la période du préavis.

Or, en ce faisant valoir, son grief est étranger à la disposition légale visée au moyen, ayant trait à l’article L.124-6 du Code du travail et non pas à l’article L.124-7 (1) alinéa 2 du même code.

Le moyen sous examen est dès lors encore irrecevable sous cette considération.

Pour surplus et finalement, l’on puise de la discussion du moyen13 qu’in fine le demandeur en cassation reproche aux juges du fond de ne pas avoir, vu la rémunération variable se calculant par année comptable allant du 1er mai au 30 avril de l’année suivante, tenu compte des deux exercices sociaux 2014-2015 et 2015-2016 dans les proportions suivantes, à savoir -1,5 mois (du 15.03.2015 au 30.04.2015) sur la période du 1.05.2014 au 30.04.2015 -4,5 mois (du 1.05.2015 au 14.09.2015) sur la période du 1.05.2015 au 30.04.2016.

Toutefois, dans la mesure où le demandeur en cassation, ayant maintenu en instance d’appel ses arguments formulés en 1ière instance, a lui-même calculé l’indemnité compensatoire de préavis sur la seule rémunération variable de l’année 2014-201514 et n’a pas soumis ni au 1ier juge ni aux magistrats d’appel la méthode de calcul ci-avant reproduite (s’étalant par ventilation sur l’année comptable 2014-2015 et sur l’année comptable 2015-2016), il ne saurait reprocher aux juges du fond de ne pas avoir procédé à la ventilation telle que proposée dans la discussion du moyen.

Dans cet ordre d’idées, le moyen sous examen se heurte à l’exception de nouveauté et est encore à ce titre irrecevable.

Deuxième moyen de cassation Le deuxième moyen de cassation est tiré de la violation, voire d’une application erronée, voire d’une fausse interprétation, in specie de l’article L. 124-7 (3) du code du travail en ce que la Cour d’appel, en confirmant le premier juge, a déclaré non fondé la demande du demandeur en cassation en obtention d’un montant supplémentaire à titre d’indemnité de départ, a calculé l’indemnité de départ de 9 mois en appliquant une moyenne des salaires revenant au salarié pendant les 12 mois antérieurs à la notification du licenciement, alors que la Cour d’appel aurait dû tenir compte du fait que les salaires du demandeur en cassation pendant la période des 12 mois antérieurs à la notification du licenciement s’étalent sur 2 exercices comptables et que compte tenu du fait que les salaires sont variables et que leur quantum diffère dès lors d’une année à l’autre, elle aurait dû appliquer une pondération de la période à prendre en considération à titre des 12 mois visés par l’article L. 124-7 (3) du code du travail en fonction du nombre des salaires se rapportant à l’une et à l’autre des deux exercices comptables concernés.

13 cf. p. 6-7 du mémoire en cassation sous le 1er moyen ;

14 cf. p. 18 de l’arrêt dont pourvoi et p. 42 du jugement de 1iere instance ;

Pour rappel, l’indemnité de départ est une indemnité autonome. Elle représente la contrepartie du droit de l’employeur de licencier le salarié ayant une certaine ancienneté dans l’entreprise et elle est censée réparer le préjudice lui causé par la rupture unilatérale. Elle n’a pas un fondement rémunératoire et garde la nature d’une créance indemnitaire.

La durée de l’indemnité de départ dépend de l’ancienneté de service continue du salarié auprès du même employeur. Elle est déterminée en fonction des critères prévus à l’article L.124-7(1) à (2) du Code du travail.

La base de calcul de l’indemnité est prescrite au point (3) du même article, préconisant que « l’indemnité de départ est calculée sur la base des salaires bruts effectivement versés au salarié pour les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de la résiliation.» Même si l’article L.124-7 (3) fait référence aux salaires versés, il se comprend dans le sens des salaires auxquels le salarié avait effectivement droit et qui lui étaient effectivement dus pendant les douze mois précédant la notification du licenciement.

En l’occurrence, au regard de l’ancienneté de service de son salarié d’au moins 25 ans, l’employeur lui a réglé la somme de 20.056,37 euros, correspondant, selon lui, à l’indemnité de départ équivalant à 9 mois de salaire.

Le salarié, ne contestant pas la durée de l’indemnité de départ de 9 mois de salaire, a contesté l’assiette de calcul prise en compte par les juges du fond pour appliquer la méthode de calcul de l’indemnité de départ. Il a requis à titre d’indemnité de départ calculé en application de l’article L.124-7 du Code de travail la somme de 1.054.816,70 euros15.

Sur le point considéré, les magistrats d’appel se sont déterminés comme suit :

« L’article L.124-7 (3) du Code du travail précise en son alinéa premier que l’indemnité de départ est calculée sur la base des salaires bruts effectivement versés au salarié pour les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de la résiliation.

En application des dispositions de cet article du Code du travail, la société SOCIETE1.) a calculé l’indemnité de départ sur base de la rémunération effectivement versée pendant les douze mois précédant immédiatement celui de la notification du licenciement en date du 3 mars 2015.

Tel que développé antérieurement, la rémunération effectivement versée pendant la période du 1er mars 2014 au 28 février 2015 s’élevait à 35.650 euros.

Il en découle que le montant redû à l’appelant au titre de l’indemnité de départ s’élève au montant brut de [35.650 : 12] x 9, soit 26.737,50 euros.

15 cf. p. 9 de l’arrêt dont pourvoi ;

De ce montant brut de 26.737,50 euros la société SOCIETE1.) a en définitive payé le montant net de 20.056,37 euros, après déduction des charges fiscales et sociales, retenues par l’employeur (pièce 8 du classeur 1 de Maître Romain ADAM). (…) ».

Les magistrats d’appel ont dès lors retenu que sur les douze mois précédant la notification du licenciement (càd pour la période du 1ier mars 2014 au 28 février 2015), le salarié avait droit à une rémunération brute correspondant à la somme de 35.650 euros.

Par le renvoi aux développements en relation avec l’indemnité compensatoire de préavis, la motivation ci-avant reproduite se lit dans le sens que pour les magistrats d’appel la somme de 35.650 euros correspond à la rémunération variable pour l’année 2014-2015 (càd l’exercice comptable du 1ier mai 2014 au 30 avril 2015). Ils ont précisé que ce montant est non contesté par les parties d’après le jugement a quo et les conclusions de l’employeur.16 Or, force est de constater que le 1ier juge a relevé aux termes de son jugement17 « que les parties s’accordent pour admettre que la rémunération variable totale pour l’exercice 2013-2014 devait s’élever à 35.650 euros sur base des résultats réalisés pendant cet exercice. » et les juges d’appel ont retenu eux-mêmes retenu que « Pour l’exercice 2013-2014, les parties s’accordent à dire que le montant redû à titre de rémunération variable s’élève à 35.650 euros »18. La rémunération variable portant sur le montant de 35.650 euros est donc celle correspondant à l’année comptable 2013-2014 et non celle correspondant à l’année 2014-2015, pourtant retenue par les magistrats d’appel sous le calcul de l’indemnité compensatoire de préavis et également reprise sous le calcul de l’indemnité de départ.

Le demandeur en cassation ne fait pas valoir que les magistrats d’appel auraient appliqué une méthode de calcul autre que celle prescrite à l’article L.124-7 (3) du Code du travail.

Par contre, il leur reproche de s’être adonnés à une erreur de calcul, ce en ce qu’ils ont calculé la moyenne des salaires des 12 mois antérieurs à la notification du licenciement sur la somme de 35.650 euros, correspondant à la rémunération variable d’un seul exercice comptable (à savoir l’exercice comptable 2013/2014), alors que, pour faire juste, ils auraient dû tenir compte du fait que le salaire à prendre en considération pendant la période de 12 mois précédant la notification de la lettre de licenciement s’étale sur les 2 exercices sociaux suivants et qu’ils auraient dû procéder par la ventilation suivante :

16 extrait de motivation à la page 19 de l’arrêt dont pourvoi : « Pour la partie restante du préavis comprise entre le 1er mai 2015 et le 14 septembre 2015, la société SOCIETE1.) a réglé (pièce 7 du classeur de Maître Romain ADAM), le montant de 13.368,75 euros, correspondant à la moyenne de la rémunération variable effectivement versée pendant les douze mois antérieurs à la notification du licenciement, soit entre le 1er mars 2014 et le 28 février 2015. (L’exercice comptable débute le 1er mai et se clôture le 30 avril de l’année suivante).

Cette rémunération s’élevait au montant de 35.650 euros (non contesté par les parties d’après le jugement a quo et les conclusions de Maître Romain ADAM, notifiées le 24 décembre 2018). » 17 cf. p. 22 du jugement de première instance ;

18 cf. p. 13 de l’arrêt dont pourvoi ;

-la période du 1.05.2013 au 30.04.2014 -la période du 1.05.2014 au 30.04.2015.

En tenant compte des résultats comptables à raison de -2 mois pour la période du 1.05.2013 au 30.04.2014 et -10 mois pour la période du 1.05.2014 au 30.04.2015 et en tenant compte de la rémunération variable arrêtée par les parties comme s’élevant - pour l’année 2013/2014 à 35.650 euros - et pour l’année 2014/2015 à 640.335 euros, le montant mensuel de l’indemnité de départ, calculée sur une durée de 12 mois, devait dès lors se calculer comme suit :

-(35.650 / 12) X 2 :

5.941,67 euros -(640.335 / 12) X 10 :

533,612,50 euros total :

539.554,17 euros et s’élever au montant mensuel de 539.554,1/12 = 44.962,84 euros, si bien que le montant équivalant à la durée de 9 mois auquel le demandeur en cassation pouvait prétendre à titre d’indemnité de départ s’élevait à 9 X 44.962,84 = 404.665,56 euros, et non pas à la somme de 26.737,50 euros calculés sur la seule rémunération variable de l’année 2013-2014.

Toutefois, que les magistrats d’appel aient commis une erreur de calcul en ce qu’ils auraient constaté, à tort, que la rémunération variable pour l’année 2014-2015 porte sur la somme de 35.650 euros (au lieu de la somme de 640.335 euros), ou qu’ils auraient effectivement dû tenir compte des deux exercices comptables 2013/2014 et 2014/2015 en ce que la période des 12 mois précédant la notification du licenciement recoupe effectivement les deux exercices comptables, toujours est-il que le calcul opéré par les magistrats d’appel relève des constatations souveraines des juges du fond et de leur pouvoir d’appréciation qui est souverain.

En effet, l’interdiction faite à la Cour de cassation de connaître du fond des affaires s’oppose même à ce que la Cour régulatrice réexamine les pièces qui ont été produites devant les juges de fond et révise les appréciations de fait des décisions dont elle juge la légalité ; tout moyen de cassation tendant à discuter des faits souverainement appréciés, devrait être écarté19.

Ainsi jugé qu’en commettant une erreur d’appréciation d’une pièce ou une erreur de calcul, le juge commet une erreur, un mal jugé, mais il ne sort pas de son domaine souverain d’appréciation dont l’exercice échappe au contrôle de la Cour de cassation20.

En considération de ce qui précède, le moyen sous examen ne saurait être accueilli.

19 Boré, La cassation en matière civile, éd. 6, n° 64.51, p. 293 ;

20 Cass. 15 mars 1990, n° 10/90 ; Cass. 18 juin 1987, Pas. 27, p. 117 ;

Troisième moyen de cassation :

Le troisième moyen de cassation est tiré de la violation, voire d’une application erronée, voire d’une fausse interprétation, in specie de l’article 89 de la Constitution, de l’article 249 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi que de l’article 6.1 de la CEDH qui requièrent de la part du juge de motiver la décision, en ce que la Cour d’appel, en confirmant le jugement de première instance qui a déclaré non fondée la demande du demandeur en cassation en obtention d’un montant supplémentaire à titre d’indemnité de départ, a adopté la motivation contradictoire suivante :

-

« Il ressort de l’alinéa 1er de cette convention, que l’exercice comptable à prendre en considération pour le calcul de la rémunération variable débute le 1er mai et, faute de précisions supplémentaires, est dès lors clôturé le 30 avril de l’année suivante » (page 12) -

« Pour l’exercice 2013-2014, les parties s’accordent à dire que le montant redû à titre de rémunération variable s’élève à 35.650 euros » (page 12) -

« Il ressort du point IV [de] la pièce 5.3) du classeur I) de Maître Romain ADAM, que la rémunération variable pour les années 2014-2015 de PERSONNE1.) s’élevait au montant de 640.335 euros (…) » (page 18) -

« Tel que développé antérieurement, la rémunération effectivement versée pendant la période du 1er mars 2014 au 28 février 2015 s’élevait à 35.650 euros Il en découle que le montant redû à l’appelant au titre de l’indemnité de départ s’élève au montant brut de [35.650 : 12] x 9, soit 26.737,50 euros » (page 19), alors qu’en statuant ainsi, la Cour d’appel a, d’un côté retenu que l’année comptable va du 1er mai d’une année jusqu’au 30 avril de l’année suivante, alors qu’elle a d’un autre côté calculé l’indemnité de départ du 1er mars 2014 au 28 février 2015 sans tenir compte du fait que cette période s’étend sur 2 années comptables, à savoir les périodes du 1ier mai 2013 au 30 avril 2014 et du 1ier mai 2014 au 30 avril 2015, et elle a ainsi empreint sa décision d’une contradiction dans ses motifs.

Il est vrai que la contradiction des motifs équivaut à un défaut de motifs. Il est en effet unanimement reconnu que les motifs contradictoires se détruisent et s’annihilent réciproquement, de sorte qu’il y a lieu de conclure à une absence de motivation de la décision qui encourt la censure.

Tel que relevé à juste titre par le demandeur en cassation, les magistrats d’appel ont dans un premier temps constaté que l’exercice comptable à prendre en considération pour le calcul de la rémunération variable du demandeur en cassation ne correspond pas à l’année civile, mais qu’il débute le 1ier mai d’une année considérée pour se terminer le 30 avril de l’année suivante21.

Ils ont ensuite retenu comme assiette de calcul des rémunérations variables du demandeur en cassation les montants suivants : pour l’année 2013-2014 : 35.650 euros22 et pour l’année 2014-

2015 : 640.335 euros23, et ont calculé l’indemnité de départ de 9 mois sur base du montant de 35.650 euros.

Par le renvoi aux développements en relation avec l’indemnité compensatoire de préavis, la motivation des magistrats d’appel ci-avant reproduite sous le deuxième moyen, se lit dans le sens que pour les magistrats d’appel la somme de 35.650 euros correspond à la rémunération variable pour l’année 2014-2015 (càd l’exercice comptable du 1ier mai 2014 au 31 avril 2015).

Partant, en retenant sous le calcul de l’indemnité de départ la somme de 35.650 euros à titre de rémunération variable pour l’année 2014-2015, alors qu’ils ont constaté au préalable que la rémunération variable pour l’année 2014-2015 s’élève à 640.335 euros et que celle pour l’année 2013-2014 s’élève à 35.650 euros, ils se sont déterminés par des motifs incompatibles entre eux.

Ils ont encore opté pour une motivation contradictoire, en ce qu’en retenant à la fois - que l’année comptable va du 1ier mai d’une année jusqu’au 30 avril de l’année suivante, et - que la période à prendre en considération pour calculer l’indemnité de départ s’étend du 1er mars 2014 au 28 février 2015, ils n’ont pas procédé en application de leurs propres constatations et considérations, ce en ce qu’ils n’ont pas tenu compte du fait que cette période de 12 mois précédant la notification du licenciement s’étend sur 2 années comptables, à savoir sur les périodes du 1er mai 2013 au 30 avril 2014 et du 1er mai 2014 au 30 avril 2015.

En considération ce qui précède, le moyen sous examen est fondé.

Conclusion :

déclarer recevable le pourvoi, déclarer irrecevable le premier moyen de cassation, dire que le deuxième moyen de cassation ne saurait être accueilli, déclarer fondé le troisième moyen de cassation.

21 cf. p. 12-13 de l’arrêt dont pourvoi ;

22 cf. p. 13 de l’arrêt dont pourvoi ;

23 cf. p. 19 de l’arrêt dont pourvoi ;

Luxembourg, le 21 décembre 2023 Pour le Procureur général d’Etat le premier avocat général Monique SCHMITZ 23


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16/24
Date de la décision : 02/02/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/02/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2024-02-02;16.24 ?

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