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15/06/2023 | LUXEMBOURG | N°74/23

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 15 juin 2023, 74/23


N° 74 / 2023 pénal du 15.06.2023 Not. 26997/11/CD Numéro CAS-2022-00087 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, quinze juin deux mille vingt-trois, sur le pourvoi de PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.) (France), demeurant à F-

ADRESSE2.), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Benoît ENTRINGER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public, et de 1) la société anonyme de droit portugais SOCIETE1.), établie et ayant son siÃ

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N° 74 / 2023 pénal du 15.06.2023 Not. 26997/11/CD Numéro CAS-2022-00087 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, quinze juin deux mille vingt-trois, sur le pourvoi de PERSONNE1.), né le DATE1.) à ADRESSE1.) (France), demeurant à F-

ADRESSE2.), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Benoît ENTRINGER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public, et de 1) la société anonyme de droit portugais SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à ADRESSE3.), représentée par ses organes statutaires, demanderesse au civil, défenderesse en cassation, comparant par Maître Guy LOESCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, 2) PERSONNE2.), demeurant à P-ADRESSE4.), 3) PERSONNE3.), demeurant à P-ADRESSE4.), 4) PERSONNE4.), demeurant à P-ADRESSE5.), demandeurs au civil, défendeurs en cassation, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 12 juillet 2022 sous le numéro 214/22 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation formé au pénal et au civil par Maître Benoît ENTRINGER, avocat à la Cour, au nom de PERSONNE1.), suivant déclaration du 9 août 2022 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 7 septembre 2022 par PERSONNE1.) à la société anonyme de droit portugais SOCIETE1.), déposé le 9 septembre 2022 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 6 octobre 2022 par la société SOCIETE1.) à PERSONNE1.), déposé le 7 octobre 2022 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du premier avocat général Marc HARPES.

Sur la recevabilité Aux termes de l’article 43, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, le mémoire du défendeur au civil devra, à peine de déchéance, être signifié à la partie civile avant d’être déposé.

Le demandeur en cassation n’a pas signifié son mémoire aux parties civiles PERSONNE2.), PERSONNE3.) et PERSONNE4.).

Il s’ensuit que le demandeur en cassation est déchu de son pourvoi au civil à l’égard des prédits demandeurs au civil.

Le pourvoi au civil est recevable à l’égard de la partie civile SOCIETE1.).

Le pourvoi au pénal, introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné le demandeur en cassation du chef de 2 blanchiment à une peine d’emprisonnement assortie du sursis intégral et à une peine d’amende. Au civil, le tribunal avait déclaré partiellement fondées les demandes en indemnisation dirigées contre le demandeur en cassation. La Cour d’appel a confirmé ce jugement, sauf à retirer au demandeur en cassation le bénéfice du sursis.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation des articles 190-1, 210 et 211 du code de procédure pénale, tels que modifiés par la loi du 9 décembre 2021 portant modification du code pénale, ainsi que de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, en ce que les témoins de l’accusation n’ont pas été cités à comparaitre aux différentes audiences de la Cour d’appel, de sorte qu’aucune confrontation n’a été possible avec l’actuel demandeur, et en ce que la Cour d’appel, dans son arrêt entrepris mentionne expressément que les prévenus ont tous été entendus et appelés à développer leurs moyens de défense aux cours des audiences des 3, 6 et 10, soit avant le Ministère public ne prenne la parole à l’audience du 13 mai, afin d’y développer son réquisitoire. ».

Réponse de la Cour Vu l’article 210 du Code de procédure pénale tel que modifié par la loi du 9 décembre 2021 portant modification du Code de procédure pénale qui dispose « Avant que les juges émettent leur opinion, la partie ayant relevé appel principal expose sommairement les motifs de son appel, ensuite les autres parties ont la parole dans la forme et dans l’ordre prescrits par l’article 190-1 ».

Vu l’article 190-1, paragraphe 4, du même code qui dispose « L’instruction à l’audience terminée, la partie civile est entendue en sa demande, s’il y a lieu, le Ministère public prend ses conclusions et le prévenu et, s’il y a lieu, la personne civilement responsable, présentent leur défense. La partie civile et le Ministère public peuvent répliquer. Le prévenu ou son conseil ont toujours la parole en dernier. ».

Il résulte de l’arrêt attaqué que le demandeur en cassation, qui avait, dans un premier temps, renoncé à l’assistance d’un avocat en instance d’appel, a été entendu en ses explications. Suite au réquisitoire du Ministère public, entamé à l’audience du 10 mai 2022 et continué à celle du 13 mai 2022, un avocat s’est présenté pour le demandeur en cassation à cette dernière audience et a développé les moyens de défense en représentation de son mandant, qui ne comparut plus à l’audience. Après la réplique du Ministère public, les co-prévenus personnellement présents à l’audience eurent la parole en dernier.

3 Il ne ressort pas des éléments du dossier auxquels la Cour peut avoir égard que le demandeur en cassation, qui avait choisi de se faire représenter par un avocat à la dernière audience, ait renoncé à avoir la parole en dernier.

Le droit de s’exprimer en dernier profite au prévenu ou à son conseil. En s’abstenant de donner la parole en dernier au conseil du prévenu, les juges d’appel ont violé les dispositions visées au moyen.

Il s’ensuit que l’arrêt encourt la cassation.

PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres moyens de cassation, la Cour de cassation déclare le demandeur en cassation déchu de son pourvoi au civil à l’égard de PERSONNE2.), de PERSONNE3.) et de PERSONNE4.) ;

casse et annule l’arrêt attaqué, numéro 214/22 V., rendu le 12 juillet 2022 par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s’en sont suivis, remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, autrement composée ;

laisse les frais de l’instance en cassation à charge de l’Etat ;

ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt soit transcrit sur le registre de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt soit consignée en marge de la minute de l’arrêt annulé.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, quinze juin deux mille vingt-trois, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Thierry HOSCHEIT, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, 4 qui, à l’exception du conseiller Théa HARLES-WALCH, qui se trouvait dans l’impossibilité de signer, ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN en présence du procureur général d’Etat adjoint John PETRY et du greffier Daniel SCHROEDER.

5 Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) en présence du Ministère Public et des parties civiles 1. la société anonyme SOCIETE1.) 2. PERSONNE2.) 3. PERSONNE3.) 4. PERSONNE4.) N° CAS-2022-00087 du registre Par déclaration faite le 9 août 2022 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Benoît ENTRINGER, avocat à la Cour, a formé au nom et pour le compte de PERSONNE1.) (ci-après «PERSONNE1.)») un recours en cassation au pénal et au civil contre un arrêt n° 214/22 rendu le 12 juillet 2022 par la Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle.

Cette déclaration de recours a été suivie le 9 septembre 2022 par le dépôt du mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, signé par Maître Benoît ENTRINGER.

Le pourvoi, dirigé contre un arrêt qui a statué de façon définitive sur l’action publique, a été déclaré dans la forme et le délai de la loi. De même, le mémoire 6 en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 a été déposé dans la forme et le délai y imposés.

Il en suit que le pourvoi est recevable au pénal.

Aux termes de l’article 43, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, le mémoire du défendeur au civil devra, sous peine de déchéance, être signifié à la partie civile avant d’être déposé.

La partie demanderesse en cassation, tout en déclarant former un pourvoi en cassation au pénal et au civil contre l’arrêt de la Cour d’appel, chambre correctionnelle, a signifié son mémoire en cassation préalablement à son dépôt au greffe uniquement à la partie civile SOCIETE1.). Elle n’a pas signifié son mémoire en cassation aux parties civiles PERSONNE2.), PERSONNE3.) et PERSONNE4.).

Il en suit que la partie demanderesse en cassation est à déclarer déchue de son pourvoi au civil à l’égard des parties civiles PERSONNE2.), PERSONNE3.) et PERSONNE4.)1.

Le pourvoi est recevable au civil uniquement à l’égard de la partie civile SOCIETE1.).

Un mémoire en réponse a été signifié par Maître Guy LOESCH, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la défenderesse en cassation, la société anonyme SOCIETE1.), le 6 octobre 2022 et déposé au greffe de la Cour supérieure de justice le 7 octobre 2022. Ce mémoire peut être pris en considération pour avoir été introduit dans les conditions de forme et de délai prévues dans la loi modifiée du 18 février 1885.

Faits et rétroactes Par jugement n° 523/2021 du 8 mars 2021, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en chambre correctionnelle, a condamné PERSONNE1.) à une peine d’emprisonnement de deux ans intégralement assortie du sursis et à une amende de 200.000 euros du chef de blanchiment. Au civil, PERSONNE1.) 1 Cette déchéance du pourvoi ne porte cependant pas à conséquence dans la mesure où les constitutions de partie civile formées contre le demandeur en cassation par PERSONNE2.), PERSONNE3.) et PERSONNE4.) ont toutes été déclarées non fondées.

7 a été condamné à indemniser la partie civile SOCIETE1.) à hauteur de 1.800.000 euros.

Sur l’appel du prévenu et du Ministère public, la Cour d’appel a retiré à PERSONNE1.) le bénéfice du sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement et a confirmé le jugement entrepris pour le surplus.

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Sur le premier moyen de cassation Le premier moyen est tiré de la violation des articles 190-1, 210 et 211 du Code de procédure pénale au sujet du déroulement de l'audience pénale ainsi que de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme au sujet du droit à un procès équitable.

Aux termes du moyen, le demandeur en cassation formule deux griefs distincts, à savoir, d'une part, il fait reproche aux juges d'appel de ne pas avoir réentendu les témoins entendus en première instance afin de lui permettre, en sa qualité de prévenu, d'être confronté à ces témoins et d'avoir la possibilité de leur poser des questions et, d'autre part, il leur fait reproche de ne avoir respecté l'ordre de parole à l'audience pénale, en permettant au Ministère public de requérir après que les prévenus aient développé leur moyens de défense, violant en cela les dispositions de l'article 190-1 du Code de procédure pénale, telles qu'elles résultent de la réforme apportée par la loi du 9 décembre 2021.

Le soussigné considère que le moyen est recevable alors même qu'il articule deux griefs distincts, puisque le moyen en matière pénale n'est pas soumis à des exigences de forme comparables à celles édictées par l'article 10 de la loi du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, au sujet de la procédure de cassation en matière civile et commerciale, qui impose de ne formuler qu'un grief par moyen ou branche de moyen2.

Quant au grief de ne pas avoir réentendu les témoins entendus en première instance :

Il est souligné en premier lieu qu'aucune disposition légale n'oblige la Cour d'appel à réentendre les témoins entendus en première instance.

2 J. et L. BORÉ, La cassation en matière pénale, 4ème édition 2018/2019, n° 111.12, p. 344.

8 En effet, l'article 190-1 (3) du Code de procédure pénale tel qu’issu de la loi du 9 décembre 20213, déclaré applicable à la procédure d'appel en vertu des articles 210 et 211 du même code, dispose que : « Ensuite, les témoins pour ou contre sont entendus, s’il y a lieu4, et les reproches proposés et jugés ; les pièces pouvant servir à conviction ou à décharge sont représentées aux témoins et aux parties ; le prévenu est interrogé. » L'expression « s’il y a lieu », implique nécessairement une faculté et non une obligation pour les juges du fond d’ordonner l'audition de témoins en première instance ou leur ré-audition en appel.

Votre Cour a retenu dans ce contexte que le droit à faire interroger des témoins n’est pas un droit absolu. Il appartient au juge d’apprécier la nécessité d’entendre ou de réentendre un témoin, au regard des circonstances de l’affaire et des raisons avancées par la défense5.

Ensuite, il résulte de la teneur de l'arrêt entrepris qu'à aucun moment le demandeur en cassation a demandé devant les juges d'appel la ré-audition de témoins entendus en première instance ou l'audition de nouveaux témoins.

Votre Cour a retenu que dans la mesure où aucune prescription légale n'oblige la Cour d'appel à réentendre les témoins entendus en première instance et, à défaut pour la partie demanderesse en cassation d'avoir demandé en instance d'appel l'audition des témoins entendus en première instance, la Cour d'appel qui n'ordonne pas d'office cette ré-audition n'a pas violé les dispositions de la Convention européenne des droit de l'homme consacrant le droit à un procès équitable, et en particulier le droit pour l'accusé d'interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge6.

A titre superfétatoire, il est encore remarqué que les seuls témoins entendus en première instance ont été deux enquêteurs de police qui se sont limités à résumer les éléments de l'enquête tels qu'ils résultent du dossier répressif et que le prévenu 3 Mémorial A n° 861 du 10 décembre 2021.

4 Souligné par le soussigné.

5 Cass. 9 mars 2023, n° 23 / 2023 pénal, n° CAS-2022-00071 du registre, réponse au troisième moyen de cassation.

6 Cass. 1er décembre 2022, n° 145/2022 pénal, n° CAS-2022-

00027 du registre, réponse au troisième moyen de cassation.

9 a été confronté en première instance à ces deux témoins cités par le Ministère public et a eu la possibilité de leur poser telles questions qu'il estimait pertinentes.

Le demandeur en cassation n'établit par ailleurs pas en quoi ses droits de défense auraient concrètement été violés en instance d'appel par le défaut de ré-audition de ces témoins, et notamment quel aurait été le point sur lequel il aurait voulu que les témoins aient encore été interrogés et qui aurait eu une incidence sur l'issue du procès.

Il en suit que le moyen n'est pas fondé en son premier grief.

Quant au grief de ne pas avoir respecté l'ordre de parole à l'audience d'appel :

L’article 210 du Code de procédure pénale tel que modifié par la loi du 9 décembre 2021 portant modification du Code de procédure pénale dispose que la partie ayant relevé appel expose sommairement les motifs de son appel et qu’ensuite les autres parties ont la parole dans la forme et dans l’ordre prescrits par l’article 190-1 du même code. Cet article prévoit que, contrairement au droit antérieur, le Ministère public prend d’abord ses conclusions et qu'ensuite le prévenu présente sa défense. Le Ministère public peut répliquer. Le prévenu ou son conseil ont toujours, comme sous l'empire du droit antérieur, la parole en dernier.

Il résulte de l’arrêt attaqué7 que le demandeur en cassation avait relevé appel du jugement de première instance et que cet appel avait été suivi d'un appel incident de la part du Ministère public. Le demandeur en cassation qui, dans un premier temps, avait renoncé à l'assistance d'un avocat, a été entendu par la Cour en ses explications et moyens d'appel. Suite au réquisitoire du Ministère public, Maître Arash DERAMBRASH, avocat inscrit au barreau de Paris, s'est présenté pour le demandeur en cassation. Celui-ci développa les moyens de défense et d'appel en représentation de son mandant qui ne se présenta plus à l'audience. Sur ce, le Ministère public répliqua. Les prévenus présents personnellement eurent la parole en dernier.

Il en suit que les juges d'appel n'ont pas violé l'ordre de parole à l'égard du demandeur en cassation. Le demandeur en cassation ayant relevé appel du jugement de condamnation de première instance, les juges d'appel l'ont, conformément à l'article 210 du Code de procédure pénale, entendu sur les motifs de son appel qui ont été développés plus amplement par son avocat après8 le 7 Arrêt entrepris, pages 112-114.

8 Souligné par le soussigné.

10 réquisitoire du Ministère public, ce dernier ayant fait usage de son droit de réplique, le tout conformément à l'article 190-1 du Code de procédure pénale.

Le prévenu a choisi de ne pas comparaître personnellement à la dernière audience où l'affaire a été prise en délibéré, de sorte qu'il a nécessairement renoncé à prendre la parole en dernier. Le demandeur en cassation qui a renoncé à avoir la parole en dernier, n'établit ainsi pas en quoi ses droits auraient été violés.

Il en suit que le moyen n'est pas fondé non plus en son second grief.

Sur le deuxième moyen de cassation Le deuxième moyen de cassation est tiré de la violation des articles 7-5 et 626 du Code de procédure pénale qui disposent comme suit :

Article 7-5 : « Les condamnations définitives prononcées à l’étranger sont assimilées quant à leurs effets aux condamnations prononcées par les juridictions luxembourgeoises, sauf en matière de réhabilitation, pour autant que les infractions ayant donné lieu à ces condamnations sont également punissables suivant les lois luxembourgeoises ».

Article 626 : « En cas de condamnation contradictoire à une peine privative de liberté et à l'amende, ou à l'une de ces peines seulement, les cours et tribunaux peuvent ordonner, par la même décision motivée, qu'il sera sursis à l'exécution de tout ou partie de la peine.

Le sursis est exclu à l’égard des personnes physiques si, avant le fait motivant sa poursuite, le délinquant a été l’objet d’une condamnation devenue irrévocable, à une peine d’emprisonnement correctionnel ou à une peine plus grave du chef d’infraction de droit commun. Le sursis est exclu à l’égard des personnes morales si, avant le fait motivant sa poursuite, le délinquant a été l’objet d’une condamnation devenue irrévocable, à une amende correctionnelle ou à une peine plus grave du chef d’infraction de droit commun. » Aux termes de ce moyen, le demandeur en cassation fait grief aux juges d'appel d'avoir décidé qu'il n'était pas en droit de bénéficier du sursis à l'exécution de la peine de prison prononcée, alors même que, selon lui, il était à considérer comme primo délinquant.

11 L'arrêt entrepris est motivé comme suit sur le point considéré:

« Etant donné qu’il résulte du casier judiciaire français que PERSONNE1.) a été condamné le 12 septembre 1996, par les juridictions répressives françaises, pour l’infraction de recel, à une peine d’emprisonnement d’un an et trois mois assortie d’un sursis partiel, outre une amende, que cette condamnation française, à l’heure à laquelle la Cour d’appel statue, n’est pas effacée, ni retirée du casier judiciaire, l’extrait ECRIS renseignant, de surcroît, que la « fin de la période de rétention » de cette condamnation se situe au 12 septembre 2059, il en suit que PERSONNE1.) en application des articles 7-5 et 658 du Code de procédure pénale et indépendamment de tout autre débat, ne saurait, contrairement à ce que le tribunal a dit, se voir accorder un aménagement de la peine d’emprisonnement, de sorte qu’il y a lieu, par réformation du jugement entrepris, de faire abstraction d’un sursis. » Il est relevé à cet égard qu'au cours des débats devant la Cour d'appel, l'actuel demandeur en cassation avait contesté l'inscription de la condamnation française sur le casier judiciaire et avait annoncé avoir déposé une requête de « référé-

liberté » auprès du tribunal administratif de Paris aux fins de voir effacer la condamnation litigieuse et avait demandé à la Cour d'appel de surseoir à statuer en attendant la décision du tribunal administratif à cet égard9.

La Cour d'appel avait répondu comme suit:

« S’agissant, ensuite, de l’incidence du dépôt de la requête de PERSONNE1.) en référé-liberté, c’est à bon droit que le représentant du ministère public estime que l’argumentation de la défense tombe à faux, ce au regard, d’une part, de l’article 113-16 [lisez 133-16] in fine du Code pénal [français] qui dispose que la réhabilitation n’interdit pas la prise en compte de la condamnation, par les autorités judiciaires, en cas de nouvelles poursuites pour l’application des règles sur la récidive légale, et d’autre part, de l’article 769 du Code de procédure pénale français en vertu duquel il faut admettre que la condamnation prononcée contre PERSONNE1.) en 1996 reste inscrite dans son casier judiciaire jusqu’à l’an 2036. » A titre principal, ainsi que cela résulte de l'extrait ECRIS (European Criminal Records Information System10) versé en cause et comme retenu à juste titre par 9 Arrêt entrepris, page 132, alinéa 5.

10 ECRIS a été instauré par la décision-cadre n° 2009/315/JAI du Conseil de l'Union européenne du 26 février 2009 concernant l'organisation et le contenu des échanges d'informations extraites du casier 12 la Cour d'appel, PERSONNE1.) a été condamné le 12 septembre 1996, par une juridiction répressive française, pour l’infraction de recel, à une peine d’emprisonnement d’un an et trois mois assortie d’un sursis partiel, ainsi qu'à une amende.

Il est relevé que contrairement à ce que fait valoir le demandeur en cassation dans son mémoire11, le sursis sur la peine d'emprisonnement n'a pas été intégral, mais seulement partiel. Ce constat est important puisqu'en vertu de l'article 627 du Code de procédure pénale, une condamnation assortie du sursis intégral est considérée comme non avenue si au cours de la durée d'épreuve le condamné n’a pas commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à l’emprisonnement ou à une peine plus grave pour crime ou délit de droit commun et qu'une condamnation non avenue ne s'oppose pas à l'octroi d'un nouveau sursis12. Dans la mesure où une partie de la peine d'emprisonnement a été ferme, l'article 627 du Code de procédure pénale n'a pas vocation à s'appliquer.

Reste la question de savoir si la condamnation française peut être prise en compte pour refuser au prévenu l'octroi d'un nouveau sursis.

L'article 7-5 du Code de procédure pénale assimile les condamnations définitives prononcées à l’étranger quant à leurs effets aux condamnations prononcées par les juridictions luxembourgeoises, sauf en matière de réhabilitation13, pour autant que les infractions ayant donné lieu à ces condamnations sont également punissables suivant les lois luxembourgeoises.

En l'espèce, la condamnation française en cause vise l'infraction de recel, punissable en droit pénal luxembourgeois suivant l'article 505 du Code pénal.

La décision de condamnation française est dès lors assimilée à une condamnation luxembourgeoise, sauf pour ce qui est de sa réhabilitation qui reste soumise aux règles françaises. La réhabilitation de cette condamnation ne s'accomplit donc pas selon les règles de réhabilitation luxembourgeoises, mais françaises. Outre l'article 7-5 du Code de procédure pénale, ce principe se traduit encore à l'article 658 du Code de procédure pénale en ce que « les condamnations, visées à l'article 644 [soit les condamnations à des peines criminelles, correctionnelles ou de police prononcées par des juridictions répressives luxembourgeoises], judiciaire entre les États membres et la décision n° 2009/316/JAI du Conseil de l'Union européenne du 6 avril 2009 relative à la création du système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS).

11 Mémoire de cassation, page 19.

12 Cour d'appel, ch. crim., 22 février 2017, n° 08/17, page 25.

13 Souligné par le soussigné.

13 seront effacées du casier judiciaire lorsque la réhabilitation légale ou judiciaire sera acquise au condamné », alors que « les inscriptions des condamnations prononcées à l'étranger sont modifiées ou supprimées dès transmission de l'information afférente par l'autorité centrale de l'Etat de condamnation ».

En l'espèce, il n'est pas contesté que la condamnation en cause, si elle avait été luxembourgeoise, aurait été réhabilitée suivant les règles luxembourgeoises de réhabilitation, à savoir, en application de l'article 646 (1) c) du Code de procédure pénale, après l'écoulement d'un délai de 15 ans qui aurait commencé à courir, en vertu de l'article 646 (3) b) du même code à partir du jour de l'expiration de la peine subie ou de la prescription acquise. L'extrait ECRIS renseigne que la peine d'emprisonnement a été exécutée le 13 novembre 1999. La condamnation, si elle avait été prononcée par une juridiction répressive luxembourgeoise, aurait été réhabilitée le 13 novembre 2014 et par conséquent effacée du casier judiciaire, en application de l'article 658 du Code de procédure pénale, au moment où les juges d'appel ont statué.

Or, force est de constater que la condamnation en cause figurait toujours sur l'extrait ECRIS français communiqué. Cette inscription est conforme à l'article 769, alinéa 3 du Code de procédure pénale français qui prévoit que les fiches relatives aux condamnations sont retirées du casier au bout de quarante ans, du moment qu'elles n'ont pas été suivies d'une nouvelle condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle14.

Le demandeur en cassation fait valoir que la condamnation française aurait été réhabilitée en vertu des règles françaises figurant à l'article 133-13 du Code pénal français.

Or, le juge pénal luxembourgeois applique la loi luxembourgeoise. Il n'a pas à appliquer la loi pénale étrangère ou la loi de procédure pénale étrangère à l'effet de déterminer si une condamnation étrangère qui n'a pas été supprimée du casier judiciaire y figure encore à juste titre. En vertu des dispositions luxembourgeoises, et en particulier l'article 658 du Code de procédure pénale, l'inscription d'une condamnation étrangère n'est à supprimer que sur transmission de l'information quant à sa suppression par l'autorité étrangère.

14 L'article 769, alinéa 3 du Code de procédure pénale français dispose comme suit: « Sont retirées du casier judiciaire les fiches relatives à des condamnations effacées par une amnistie ou réformées en conformité d'une décision de rectification du casier judiciaire. Il en est de même, sauf en ce qui concerne les condamnations prononcées pour des faits imprescriptibles ou par une juridiction étrangère, des fiches relatives à des condamnations prononcées depuis plus de quarante ans et qui n'ont pas été suivies d'une nouvelle condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle ».

14 Du moment que l'information sur sa suppression n'a pas été transmise à l'autorité luxembourgeoise, il peut être fait état de la condamnation française en cause qui est, en application de l'article 7-5 du Code de procédure pénale, à assimiler à une condamnation luxembourgeoise quant à ses effets. La condamnation française produit partant les mêmes effets qu'une condamnation luxembourgeoise, notamment au niveau de la possibilité d'octroi d'un sursis sur une nouvelle condamnation luxembourgeoise.

En l'espèce, comme déjà exposé ci-avant, la condamnation française, de nature correctionnelle, qui n'était pas assortie du sursis intégral, n'est pas à considérer comme non avenue en application de l'article 627, alinéa 2 du Code de procédure pénale. Le fait que le quantum de la peine d'emprisonnement dépasse un an et qu'elle est pour partie ferme s'oppose, par application des articles 626 et 629 du Code de procédure pénale, tant à l'octroi d'un sursis simple que d'un sursis probatoire.

C'est partant à juste titre que les juges d'appel ont considéré que PERSONNE1.) ne pouvait prétendre à aucun sursis sur la peine d'emprisonnement et qu'ils lui ont retiré le bénéfice sur sursis sur la peine d'emprisonnement octroyé par les juges de première instance.

En statuant comme ils n'ont fait, les juges d'appel n'ont pas violé les dispositions égales visées au moyen.

Il en suit que le moyen n'est pas fondé.

A titre subsidiaire, il est relevé qu'en droit français, la réhabilitation n'a pas les mêmes effets qu'en droit luxembourgeois.

D'après l'article 133-16 du Code pénal français, la réhabilitation produit les mêmes effets que ceux qui sont prévus par les articles 133-10 et 133-11 au même code au sujet de l'amnistie.

L'article 133-10 dispose que l'amnistie ne préjudicie pas aux tiers et l'article 133-

11 dispose qu' « il est interdit à toute personne qui, dans l'exercice de ses fonctions, a connaissance de condamnations pénales, de sanctions disciplinaires ou professionnelles ou d'interdictions, déchéances et incapacités effacées par l'amnistie, d'en rappeler l'existence sous quelque forme que ce soit ou d'en laisser subsister la mention dans un document quelconque. Toutefois, les minutes 15 des jugements, arrêts et décisions échappent à cette interdiction. En outre, l'amnistie ne met pas obstacle à l'exécution de la publication ordonnée à titre de réparation. » Contrairement au droit luxembourgeois, la réhabilitation n'a en droit français donc pas pour effet la suppression de la condamnation sur le casier judiciaire. Au contraire, en application de l'article 769, alinéa 3 du Code de procédure pénale français, la condamnation litigieuse doit rester inscrite au casier judiciaire pendant le délai de quarante ans, qui, à la date de l'arrêt entrepris, n'était pas expiré. L'article 133-11 du Code pénal français prévoit en outre expressément que les jugements et arrêts peuvent rappeler l'existence de condamnations réhabilitées et l’article 133-16, dernier alinéa du même code dispose que la réhabilitation n’interdit pas la prise en compte de la condamnation, par les autorités judiciaires, en cas de nouvelles poursuites pour l’application des règles sur la récidive légale.

C'est partant à tort que le demandeur en cassation fait valoir que l'inscription litigieuse française ne devrait plus figurer sur son casier judiciaire français et que les juges d'appel auraient violé les dispositions légales reprises au moyen en en tenant compte pour apprécier s'il était en droit de se voir octroyer un sursis sur l'exécution de peine d'emprisonnement prononcée contre lui.

Ainsi, même à appliquer les dispositions françaises sur le réhabilitation, le moyen n'est pas fondé.

Sur le troisième moyen de cassation Le troisième moyen est tiré de la violation combinée de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme au sujet du droit à un procès équitable.

Aux termes du moyen, le demandeur en cassation fait grief à l'arrêt entrepris, tout en constatant le principe d'un dépassement du délai raisonnable, de ne pas avoir réparé cette violation de manière réelle et effective par le bais d'une réduction sensible de la peine d'emprisonnement et de l'amende prononcées contre lui.

A titre principal, ce moyen ne saurait être accueilli, en ce que sous le couvert du grief de la violation de la disposition légale visée au moyen, celui-ci ne tend qu'à 16 remettre en discussion l'appréciation, par les juges du fond, des conséquences à tirer de la constatation d'un dépassement du délai raisonnable sur la peine à prononcer, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et qui échappe au contrôle de Votre Cour15.

A titre subsidiaire, la Cour d'appel, après avoir approuvé les juges de première instance pour avoir dit qu'il y a eu dépassement du délai raisonnable, a limité ce dépassement à la période d'inaction de la partie poursuivante entre la date de la clôture de l'instruction et la date du réquisitoire de renvoi.

Elle a ensuite constaté, par renvoi au jugement de première instance, que la peine encourue par PERSONNE1.) pour l'infraction à l'article 506-1 du Code pénal retenue à son encontre était une peine d'emprisonnement d'un an à cinq ans et / ou une amende de 1.250 à 1.250.000 euros.

Pour déterminer la peine à prononcer contre PERSONNE1.), elle a considéré ce qui suit : « S’agissant de PERSONNE1.), il faut souligner que c’est par son intermédiaire qu’une part importante des fonds détournés a pu être acheminée vers la filière Liechtenstein, ce prévenu ayant joué un rôle clé au sein de cette filière qui a servi à blanchir les fonds détournés, de sorte que la Cour retient que le seul élément qui s’interprète en faveur de ce prévenu est le dépassement du délai raisonnable, et elle constate, par ailleurs, l’absence totale d’une quelconque circonstance atténuante dans le chef de PERSONNE1.).

La Cour, en tenant compte du dépassement du délai raisonnable, estime que les peines d’emprisonnement de deux ans et d’amende de 200.000 euros, tiennent compte, à suffisance de droit, de ce critère qui est le seul élément favorable dont ce prévenu puisse bénéficier.

Etant donné qu’il résulte du casier judiciaire français que PERSONNE1.) a été condamné le 12 septembre 1996, par les juridictions répressives françaises, pour l’infraction de recel, à une peine d’emprisonnement d’un an et trois mois assortie d’un sursis partiel, outre une amende, que cette condamnation française, à l’heure à laquelle la Cour d’appel statue, n’est pas effacée, ni retirée du casier judiciaire, l’extrait ECRIS renseignant, de surcroît, que la « fin de la période de rétention » de cette condamnation se situe au 12 septembre 2059, il en suit que PERSONNE1.) en application des articles 7-5 et 658 du Code de procédure pénal et indépendamment de tout autre débat, ne saurait, 15 Cass. 30 avril 2020, n° 60/2020 pénal, n° CAS-2019-00068 du registre ; Cass. 10 mars 2022, n° 39/2022 pénal, n° CAS-2021-00017 du registre.

17 contrairement à ce que le tribunal a dit, se voir accorder un aménagement de la peine d’emprisonnement, de sorte qu’il y a lieu, par réformation du jugement entrepris, de faire abstraction d’un sursis.

A noter que même si l’amende est facultative, aucun élément de la cause ne permet, toutefois, de faire abstraction de cette peine, étant renvoyé par rapport aux principes régissant l’amende et la contrainte par corps, aux développements faits ci-avant.

En l’espèce, la peine d’amende prononcée à hauteur de 200.000 euros par le tribunal à l’encontre du prévenu est légale et adaptée à la gravité des faits qui ont été retenus à l’encontre du prévenu. Elle tient, en outre, compte du fait que le prévenu dont il est établi qu’il a apporté son concours aux opérations de blanchiment à hauteur du montant conséquent de 1,8 millions d’euros sur lequel la société SOCIETE2.), dont PERSONNE1.) a été le bénéficiaire économique, a touché la coquette somme de l’ordre de 464.000 euros, dispose manifestement de ressources, la Cour constatant que la tentative de ce prévenu à voir admettre qu’il est sans ressources, outre le fait qu’elle n’est étayée par aucune pièce pertinente, est vaine.

L’amende prononcée à l’encontre de PERSONNE1.) est, partant, à confirmer. » Par conséquent, en prononçant une peine d'emprisonnement située de trois années en deçà du maximum encouru et ne prononçant une peine amende largement en deçà du maximum encouru, tout en renvoyant de manière expresse au dépassement du délai raisonnable comme seul élément favorable dont le prévenu puisse bénéficier, les juges d'appel ont procédé de façon expresse à une allégement sensible de peine pour sanctionner la violation du droit de voir entendre sa cause jugée dans un délai raisonnable.

Il en suite qu'à titre subsidiaire, le moyen n'est pas fondé.

Sur le quatrième moyen de cassation Le quatrième moyen de cassation est tiré de la violation des article 1382 du Code civil, 3 du Code de procédure pénale et 50 du Code pénal.

Aux termes du moyen, le demandeur en cassation fait grief aux juges d'appel de l'avoir condamné à indemniser un dommage qu'il n'a pas causé. Il fait valoir en 18 substance que le dommage accru à SOCIETE1.) aurait déjà été complètement constitué au moment où l'auteur de l'infraction primaire PERSONNE5.) avait procédé au détournement frauduleux des fonds du client de SOCIETE1.) et que l'infraction secondaire de blanchiment d'une partie de ces fonds du chef de laquelle le demandeur en cassation a été condamné ne saurait avoir causé un nouveau dommage. Le demandeur en cassation conteste ainsi l'existence d'un lien causal entre l'infraction de blanchiment du chef de laquelle il a été condamné par les juges d'appel et le préjudice accru à la partie civile SOCIETE1.).

Il résulte de l'arrêt entrepris que le demandeur en cassation a été condamné solidairement avec PERSONNE5.) à payer à SOCIETE1.) le montant de 1.800.000 euros sur lequel porte l'infraction de blanchiment pour laquelle le demandeur en cassation a été déclaré coupable16. Les juges d'appel avaient confirmé en cela les juges de première instance qui avaient retenu que : « Le dommage dont la demanderesse au civil entend obtenir réparation est en effet en relation causale avec les infractions de faux, d’usage de faux, d’escroquerie et de blanchiment-détention retenues à charge de PERSONNE5.) sub I), avec l’infraction de blanchiment retenue à charge de PERSONNE5.), PERSONNE1.) et PERSONNE6.) sub II), ainsi qu’avec l’infraction de blanchiment retenue à charge de PERSONNE5.), PERSONNE7.), PERSONNE8.) et PERSONNE9.) sub III). »17 Il ne résulte ni du jugement d’appel entrepris, ni du jugement de première instance, que l'existence du lien causal entre l’infraction de blanchiment reprochée au demandeur en cassation ait été contestée devant les juges du fond.

Il est rappelé que c’est au demandeur en cassation qu’incombe la charge de la preuve de justifier de la recevabilité du moyen qu’il présente, et par conséquent, d’établir son défaut de nouveauté s’il ne résulte pas des énonciations de la décision attaquée ou du dépôt de conclusions18.

Le moyen de cassation invoqué, mélangé de droit et de fait, en ce qu'il comporte l'examen de l'existence d'un lien causal entre une infraction et la dommage accru à la partie civile, est partant à déclarer irrecevable pour être nouveau.

A titre subsidiaire, le moyen de cassation ne saurait être accueilli dans la mesure où il ne tend qu'à remettre en discussion l'appréciation par les juges du fond quant 16 Arrêt entrepris, page 168.

17 Arrêt entrepris, page 101.

18 J. et L. BORÉ, précité, n°s 112.09 et s.

19 à l'existence d'un lien causal entre une infraction pénale et le dommage accru à la partie civile, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de Votre Cour19.

Conclusion Le pourvoi est recevable, mais n'est pas fondé.

Pour le Procureur Général d’Etat, Le premier avocat général Marc HARPES Annexe: Extrait ECRIS français de PERSONNE1.) 19 Cass. 15 octobre 2015, n° 45/2015 pénal, n° 3533 du registre, réponse au quatrième moyen de cassation ; Cass. 24 janvier 2008, n° 2/2008 pénal, n° 2508 du registre.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 74/23
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2023-06-15;74.23 ?

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