La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/03/2023 | LUXEMBOURG | N°31/23

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 16 mars 2023, 31/23


N° 31 / 2023 du 16.03.2023 Numéro CAS-2022-00070 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, seize mars deux mille vingt-trois.

Composition:

MAGISTRAT1.), président de la Cour, MAGISTRAT2.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT3.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT4.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT5.), conseiller à la Cour de cassation, GREFFIER1.), greffier à la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE1.), demanderesse en cassation, comparant par Maître AVOCAT1.), avocat à

la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et le FONDS NATIONAL DE SOLIDAR...

N° 31 / 2023 du 16.03.2023 Numéro CAS-2022-00070 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, seize mars deux mille vingt-trois.

Composition:

MAGISTRAT1.), président de la Cour, MAGISTRAT2.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT3.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT4.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT5.), conseiller à la Cour de cassation, GREFFIER1.), greffier à la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE1.), demanderesse en cassation, comparant par Maître AVOCAT1.), avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et le FONDS NATIONAL DE SOLIDARITE, établissement public, établi à L-1531 Luxembourg, 8-10, rue de la Fonderie, représenté par le président du conseil d’administration, inscrit au registre de commerce et des sociétés sous le numéro J15, défendeur en cassation, comparant par Maître AVOCAT2.), avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 30 mai 2022 sous le numéro 2022/0171 (Nos du reg.: FNS 2022/0022 et FNS 2022/0035) par le Conseil supérieur de la sécurité sociale ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 11 juillet 2022 par PERSONNE1.) au FONDS NATIONAL DE SOLIDARITE (ci-après « le FNS »), déposé le 12 juillet 2022 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 29 août 2022 par le FNS à PERSONNE1.), déposé le 8 septembre 2022 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du premier avocat général MAGISTRAT6.).

Sur la recevabilité du pourvoi Le ministère public conclut à l’irrecevabilité du pourvoi en cassation pour avoir été introduit après l’expiration du délai légal de quarante jours prévu à l’article 23, paragraphe 5, de la loi modifiée du 30 juillet 1960 concernant la création d’un Fonds national de solidarité.

L’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation prévoit que la partie demanderesse devra, sous peine d’irrecevabilité, dans le délai de deux mois spécifié à l’article, déposer au greffe de la Cour supérieure de justice un mémoire signé par un avocat à la Cour et signifié à la partie adverse.

Par dérogation au délai de deux mois prévu par la loi modifiée du 18 février 1885, l’article 23, paragraphe 5, de la loi modifiée du 30 juillet 1960 concernant la création d’un Fonds national de solidarité prévoit un délai de quarante jours, à partir de la notification de la décision attaquée, pour former un recours en cassation contre les décisions rendues en dernier ressort par le Conseil arbitral et contre les arrêts du Conseil supérieur de la sécurité sociale.

L’arrêt attaqué a été notifié le 1er juin 2022 à la demanderesse en cassation, conformément aux articles 170, paragraphe 1, alinéa 2, et 102, paragraphe 6, du Nouveau Code de procédure civile. Le mémoire en cassation a été déposé au greffe de la Cour supérieure de justice le 12 juillet 2022, soit après l’expiration du délai légal.

Il s’ensuit que le pourvoi est irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation déclare le pourvoi irrecevable, condamne la demanderesse en cassation aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître AVOCAT2.), sur ses affirmations de droit.

Monsieur le Président MAGISTRAT1.), qui a participé au délibéré, étant dans l’impossibilité de signer, la minute du présent arrêt est signée, conformément à l’article 82 de la loi modifiée du 7 mars 1980 sur l’organisation judiciaire, par le conseiller le plus ancien en rang ayant concouru à l’arrêt.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller MAGISTRAT2.) en présence du premier avocat général MAGISTRAT7.) et du greffier GREFFIER1.).

Conclusions du Parquet général dans l’affaire de cassation de PERSONNE1.) contre FONDS NATIONAL DE SOLIDARITE (CAS-2022-00070 du registre) Par mémoire déposé au greffe de la Cour d’appel le 12 juillet 2022, PERSONNE1.), a introduit un pourvoi en cassation contre l’arrêt no 2022/0171 du rôle, contradictoirement rendu entre parties le 30 mai 2022, par le Conseil supérieur de la sécurité sociale.

Il ressort des pièces au dossier que l’arrêt du 30 mai 2022 a été notifié, conformément à l’article 25(1) de la loi modifiée du 30 juillet 1960 concernant la création d’un Fonds national de solidarité, par courrier recommandé, déposé au bureau des postes le 31 mai 2022. Le destinataire de l’envoi a été avisé de l’envoi le 1er juin 2022 et a retiré le courrier le 3 juin 2022.

Selon l’article 23 (5) de la loi modifiée du 30 juillet 1960 concernant la création d’un Fonds national de solidarité: « Les décisions rendues en dernier ressort par le Conseil arbitral ainsi que les arrêts du Conseil supérieur de la sécurité sociale sont susceptibles, dans le délai de quarante jours à partir de la notification de la décision attaquée, d’un recours en cassation. Le recours ne sera recevable que pour contravention à la loi ou pour violation des formes soit substantielles, soit prescrites à peine de nullité. Le pourvoi sera introduit, instruit et jugé dans les formes prescrites pour la procédure en cassation en matière civile et commerciale ».

Le délai de cassation de quarante jours, prévu par l’article 23, paragraphe 5, de la loi modifiée du 30 juillet 1960 concernant la création d’un Fonds national de solidarité, applicable, par dérogation au droit commun, ainsi qu’il a été décidé par Votre arrêt n° 24/2018, numéro 3934 du registre du 22 mars 2018, a commencé à courir à partir de la notification de la décision.

A défaut de dispositions particulières, les règles de procédure civile sont applicables. Ainsi, conformément aux articles 170 alinéa 2 et 102(6) du Nouveau Code de procédure civile, au cas où le courrier recommandé n’a pas pu être remis à personne, la notification est réputée faite le jour du dépôt de l’avis par l’agent des postes. En l’espèce, le destinataire de l’envoi a été avisé le 1er juin 2022, de sorte que c’est à cette date que l’arrêt doit être considéré comme ayant été notifié à PERSONNE1.), à l’exclusion de la date à laquelle l’actuelle demanderesse en cassation est allée retirer le courrier recommandé à la poste.

Le pourvoi étant introduit, instruit et jugé dans les formes prescrites pour la procédure en cassation en matière civile et commerciale, il est à former, dans le délai de 40 jours, par dépôt au greffe de la Cour supérieure de justice d’un mémoire signé par un avocat à la Cour et signifié à la partie adverse, lequel précisera les dispositions attaquées de l'arrêt ou du jugement, les moyens de cassation et contiendra les conclusions dont l'adjudication sera demandée.

Or, le mémoire en cassation a été déposé au greffe de la Cour supérieure de justice le 12 juillet 2022, donc le 41ème jour suivant celui de la notification, le délai étant venu à expiration le 11 juillet 2022 à minuit.

Le pourvoi en cassation ayant été introduit de manière tardive, il est à déclarer irrecevable.

A titre subsidiaire, pour autant que le pourvoi soit tout de même déclaré recevable :

Maître AVOCAT2.), avocat à la Cour, pris en sa qualité de mandataire, a fait signifier le 29 août 2022, au domicile élu de la partie demanderesse en cassation, un mémoire en réponse et l’a déposé au greffe de la Cour d’appel le 8 septembre 2022.

Ce mémoire peut être pris en considération pour avoir été signifié dans les forme et délai de la loi modifiée du 18 février 1885, sur les pourvois et la procédure en cassation.

Faits et rétroactes Par décision du comité directeur prise en séance du 28 novembre 2019, le Fonds national de solidarité (ci-après « FNS ») a réclamé à PERSONNE1.) la restitution du montant de 71.418,41 euros, correspondant au trop-payé qu’elle a touché au titre du revenu d’inclusion sociale (ci-

après « REVIS ») pendant la période allant du 1er janvier 2004 au 1er septembre 2019.

La décision du 28 novembre 2019 a été prise sur base de l’article 29 de la loi modifiée du 28 juillet 2018 relative au REVIS. Elle se fonde sur une décision antérieure du FNS du 29 août 2019, annulant une décision du 31 juillet 2019, réduisant le droit de l’assurée au paiement de l’allocation d’inclusion à 139,27 euros par mois à partir du 1er septembre 2019. Ce montant résulte d’un recalcul du REVIS redu à l’assurée, après prise en compte de pensions touchées par l’assurée, non prises en compte antérieurement, dont notamment une pension accordée rétroactivement par la Caisse nationale d’assurance pension (ci-après « CNAP »), ayant donné lieu à un paiement en faveur de l’assurée de la somme de 68.006,67 euros.

Par requête déposée en date du 18 décembre 2019 au siège du Conseil arbitral de la sécurité sociale (ci-après « Conseil arbitral »), PERSONNE1.) a introduit un recours contre la décision du 28 novembre 2019.

Par jugement du 13 janvier 2022, le Conseil arbitral a rejeté le recours comme étant irrecevable.

Pour statuer en ce sens, il a retenu que c’est par la décision du 29 août 2019 que le FNS a réduit le montant du REVIS payé mensuellement à l’assurée à 139,27 euros à partir du 1er septembre 2019. Ce serait à l’encontre de cette décision que l’assurée aurait dû faire valoir ses contestations relatives notamment à la prise en compte d’une pension belge. Faute de recours interjeté contre la décision de recalcul du 29 août 2019, celle-ci aurait acquis autorité de chose décidée. L’assurée ne saurait plus la critiquer par le biais d’un recours introduit contre la décision du 28 novembre 2019 lui réclamant la restitution du montant indument touché. Le Conseil arbitral a ajouté que le FNS a rectifié l’erreur alléguée par l’assurée quant à la pension belge au moyen de la décision rectifiée du 29 août 2019, annulant la décision antérieure du 31 juillet 2019.

Par requête déposée en date du 14 février 2022 au secrétariat du Conseil supérieur de la sécurité sociale, PERSONNE1.) personnellement interjeté appel contre ce jugement. Par une requête déposée en date du 9 mars 2022 par son mandataire auprès du même secrétariat, cet appel a été réitéré.

Dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, les deux recours ont été joints pour y statuer par un seul et même arrêt.

Par arrêt du 30 mai 2022 le Conseil supérieur de la sécurité sociale a déclaré l’appel non fondé et confirmé la décision de première instance.

Quant au premier moyen de cassation Dans son premier moyen, la partie demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé l’article 65 du Nouveau Code de procédure civile. Selon la demanderesse en cassation 1« l’arrêt attaqué encourt la cassation de ce chef, c’est-à-dire pour avoir ostensiblement violé le principe sacro-saint du contradictoire, alors même que le contraire se trouve expressément déclaré au niveau du dispositif même (« conclusions contradictoires des parties à l’audience »), la requête d’appel première en date n’ayant pas été contradictoirement « discutée » à l’audience des plaidoiries visée, les juges d’appel n’ayant au niveau des motifs de l’arrêt attaqué lui-même, omis de préciser que les demandes et moyens de fait et de droit figurant dans la première requête d’appel ont fait l’objet d’un débat contradictoire digne de ce nom, en s’enquérant dans un même contexte toujours, auprès du conseil soussigné, si le précité entendait expressément prendre position par rapport aux autres demandes et moyens soulevés par l’appelante LW en personne dans la requête d’appel première en date, à défaut de mandat conféré au mandataire soussigné à ce moment, c’est-à-dire au moment du dépôt par LW de sa requête d’appel, ce qui n’a pas été le cas, omission confirmée par l’arrêt attaqué muet à ce sujet, sinon tout du moins ambigu. ».

Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou un élément de moyen ne doit mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture et chaque moyen ou chaque branche doit préciser, sous peine d’irrecevabilité, le cas d’ouverture invoqué, la partie critiquée de la décision et ce en quoi la décision attaquée encourt le reproche allégué.

Les développements en droit qui, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 10 précité, peuvent compléter l’énoncé du moyen, ne peuvent suppléer la carence de celui-ci au regard des éléments dont la précision est requise sous peine d’irrecevabilité.

La lecture du premier moyen montre qu’au niveau de sa forme de présentation, il n’entre guère dans le cadre strict posé par la loi. En premier lieu il n’indique pas la partie critiquée de la décision, mais se limite à citer certains extraits de phrases, tirés pêle-mêle de la décision 1 Page 4 du mémoire en cassation. En l’absence d’un énoncé du moyen, l’alinéa cité synthétise l’argumentation de la partie demanderesse.

critiquée. Ensuite il ne précise pas en quoi le texte de loi en question a été violé et quelle aurait dû être la solution juridique à retenir.

La formulation vague et imprécise du moyen le rend dès lors irrecevable au regard des exigences de l’article 10 précité.

A titre subsidiaire, pour autant que le moyen est reconnu conforme aux exigences de forme, prévues par l’article 10 :

L’article 65 du Nouveau Code de procédure civile se lit comme suit:

« Le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir dans sa décision les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.

Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. ».

Cet article a été repris de l’article 16 du Code de procédure civile français. Il oblige le juge, lorsqu’il relève d’office un moyen de droit, d’inviter les parties à présenter leurs observations, de manière à ce que sa décision ne soit pas rendue en violation du principe de contradiction.

"Selon l'article 16, alinéa 1er, du Code de procédure civile, “le juge doit, en toutes circonstances… observer lui-même le principe de la contradiction”. Du point de vue de l'office du juge, la jurisprudence ne tire guère de conséquences de cette formulation très générale. Elle concentre toute son attention sur l'article 16, alinéa 3, du Code de procédure civile. “Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations” et retient de ce texte une interprétation très stricte.

En conséquence, l'obligation de respecter le principe de la contradiction s'applique essentiellement au relevé d'office des moyens de droit, c'est-à-dire aux cas dans lesquels le juge tranche le litige par application d'une règle différente de celle qui était invoquée devant lui »2.

En l’espèce la partie demanderesse en cassation reste en défaut de préciser quels moyens de droit auraient été soulevés d’office par les juges d’appel et n’auraient pas été soumis à un débat contradictoire. Il ressort d’ailleurs de la lecture conjointe des pièces versées en cause, et plus particulièrement des requêtes d’appel, avec la décision dont pourvoi, qu’aussi bien les moyens soulevés par la demanderesse en cassation en personne, que repris par son mandataire, ont trouvé une réponse dans le cadre de la décision critiquée.

Le moyen est dès lors à déclarer non fondé.

Quant au deuxième moyen de cassation Le deuxième moyen est tiré du défaut de motivation, sinon de la motivation insuffisante de l’arrêt attaqué, constitutif d’une violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de procédure civile.

2 JurisClasseur Procédure civile - Encyclopédies - Fasc. 500-35 : PRINCIPES DIRECTEURS DU PROCÈS. – Office du juge. – Fondement des prétentions litigieuses – no 71 Pour autant que le moyen vise une insuffisance de motifs, il est tiré du grief du défaut de base légale. Le défaut de base légale est un vice de fond non concerné par les textes de loi énoncés, d’où il suit que, sur ce point, le moyen est irrecevable.

Tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution et, dans ce contexte, de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le moyen vise le défaut de motifs, qui est un vice de forme.

La demanderesse en cassation reproche à la juridiction d’appel d’avoir omis de prendre position sur ses contestations émises en relation avec les calculs opérés par le FNS, voire d’avoir motivé de manière contradictoire le point en question.

Il ressort de la lecture de la discussion du moyen que la partie demanderesse en cassation y fait un amalgame de développements relatifs à la contradiction de motifs, valant absence de motifs, et à l’absence totale de motifs sur le point considéré. Les développements en question s’apparentent de par leur forme plus à une note de plaidoiries qu’à la discussion d’un moyen de cassation.

La formulation vague, imprécise, voire confuse, du moyen le rend dès lors irrecevable au regard des exigences de l’article 10 précité.

A titre subsidiaire, pour autant que le moyen est reconnu conforme aux exigences de forme, posées par l’article 10 :

Une décision judiciaire est régulière en la forme, dès lors qu’elle comporte une motivation, si incomplète, inopérante ou implicite soit-elle, sur le point considéré. Il suffit dès lors de constater qu’une décision est motivée sur le point concerné pour écarter ce moyen.

Sur le point critiqué par la demanderesse en cassation, la juridiction d’appel a retenu ce qui suit :

« Suivant l’article 29 de la loi du 28 juillet 2018 relative au REVIS, l’allocation d’inclusion est supprimée si les conditions de son octroi viennent à défaillir. Selon le même article, l’allocation est relevée, réduite ou retirée si des éléments de calcul de l’allocation se modifient. Il est précisé au point 2 de l’article que lorsque pendant la période pour laquelle l’allocation a été payée, le bénéficiaire a disposé de ressources qui auraient dû être prises en compte pour son calcul, les sommes payées en trop peuvent être récupérées à charge du bénéficiaire ou de ses ayants droit.

En l’espèce, il est constant en cause que depuis le 1er janvier 2004, l’appelante a touché un revenu mensuel de la part du FNS au titre de revenu minimum garanti, respectivement au titre du REVIS.

Par un courrier du 22 juillet 2019, le FNS a informé l’appelante qu’il entendait lui retirer le bénéfice de ces allocations au motif qu’elle ne remplissait plus les conditions de son octroi.

Cette attitude du FNS résulte de l’information qu’il avait reçue de la part de la CNAP lui disant que l’appelante s’était vu accorder rétroactivement, depuis 2013, le droit au paiement d’une pension de vieillesse.

Par une première décision du 31 juillet 2019, le FNS a décidé que l’appelante n’avait plus droit à un quelconque montant au titre de REVIS au vu de la pension qui lui a été accordée. Suite à une contestation de l’appelante, la décision du 31 juillet 2019 a été annulée et remplacée par une nouvelle décision, datée du 29 août 2019, fixant le montant du REVIS auquel l’appelant peut prétendre de la part du FNS à 139,27 euros par mois à partir du 1er septembre 2019.

L’appelante n’a pas introduit de recours contre cette décision. C’est dès lors à bon droit, par application d’une jurisprudence constante, que le Conseil arbitral a retenu que cette décision a acquis autorité de chose décidée et que l’appelante ne peut plus la remettre en cause par le biais du recours introduit contre la décision du 28 novembre 2019 lui réclamant le remboursement de la somme de 71.418,41 euros.

Par une lettre du 1er novembre 2019, le FNS a informé l’appelante qu’elle a touché des avances sur l’allocation d’inclusion entre le 1er août 1994 et le 1er septembre 2019 et que par la décision du 29 août 2019, l’allocation d’inclusion qui lui a été accordée avec effet au 1er septembre 2019 a été réduite à 139,27 euros par mois. Le FNS a déduit de ces éléments que l’appelante a indument touché la somme de 71.418,41 euros entre le 1er janvier 2004 et le 1er septembre 2019.

L’appelante n’a pas fait parvenir d’observations à l’encontre de cette lettre d’information au FNS, de sorte que par la décision attaquée du 28 novembre 2019, le FNS a demandé à l’appelante de lui restituer la somme de 71.418,41 euros qu’elle aurait indument touchée entre le 1er janvier 2004 et le 1er septembre 2019.

Sur base de ces faits et au vu des dispositions de l’article 29 de la loi du 28 juillet 2018 relative au REVIS, la décision de recalcul et à sa suite la décision de demande de restitution du FNS ont été prises sur base d’un texte légal clair et précis, de sorte à ne pouvoir être qualifiées d’illicites par l’appelante.

L’appel de PERSONNE1.) est dirigé contre la décision de demande de restitution du trop-payé.

Tel que retenu ci-dessus, le recours dirigé contre la décision de restitution de l’allocation complémentaire ne saurait remettre en cause la décision de recalcul antérieure qui a acquis autorité de chose décidée.

Or les arguments invoqués par l’appelante dans le cadre de son appel sont relatifs au recalcul du REVIS qui lui a été attribué par la décision du 29 août 2018.

L’appelante reproche notamment au FNS de s’être trompé au niveau de la prise en compte d’une pension belge qui aurait à tort été comptabilisée à son profit. Cet argument concerne clairement le recalcul du revenu auquel l’appelante a droit et ne saurait fonder le recours dirigé contre la décision de restitution des montants indument touchés. Il convient d’ailleurs de préciser, tel que relevé par le Conseil arbitral, que, tel que constaté plus haut, le FNS a pris en compte cette contestation de l’appelante dans sa décision du 29 août 2019, annulant précisément pour ce motif la décision antérieure du 31 juillet 2019.

Aucun argument pertinent et concluant concernant le montant dont restitution lui est réclamé n’a été avancé par l’appelante. Celle-ci s’est en effet bornée à contester le montant qui lui est réclamé et à souligner l’injustice dont elle serait victime du fait de la décision attaquée, sans néanmoins fournir de moyens concrets et précis remettant en cause le bien-fondé de cette décision.

Avant de discuter ces moyens, il convient de cerner l’argumentation de l’appelante. Celle-ci critique la décision du FNS en ce qu’elle se voit priver de son droit au paiement de la somme de 68.006,67 euros qui lui a été reconnue par la CNAP, montant au paiement duquel elle estime avoir droit et du bénéfice duquel le FNS ne saurait la priver. Elle conteste par ailleurs devoir rembourser un quelconque montant au FNS. L’appelante estime partant implicitement avoir droit cumulativement au paiement de la somme qui lui a été accordée rétroactivement par la CNAP au titre de pension et à garder les sommes qui lui ont été payées par le FNS au titre de REVIS pendant la même période.

En argumentant de la sorte, l’appelante se méprend sur la nature du REVIS qui, suivant l’article 1er de loi du 28 juillet 2018 relative au REVIS, est un revenu minimum reconnu aux personnes visées par la loi afin de leur permettre de disposer des moyens d’existence de base.

Il est clairement prévu à l’article 29 point 2 de la loi que lorsque pendant la période pour laquelle l’allocation a été payée, le bénéficiaire a disposé de ressources qui auraient dû être prises en compte pour son calcul, les sommes payées en trop peuvent être récupérées auprès du bénéficiaire ou de ses ayants droit. C’est sur cette disposition que se fondent les décisions du FNS du 29 août 2019 et 28 novembre 2019, dont seule la dernière a fait l’objet d’un recours de la part de l’appelante. ».

Il ressort de l’extrait de la décision dont pourvoi, reproduit ci-dessus que la juridiction d’appel a motivé de manière explicite et sans se contredire les raisons pour lesquelles la décision de recalcul du FNS a acquis autorité de chose décidée et ne saurait être remise en cause dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision de demande de restitution du trop-payé.

Le moyen est dès lors à déclarer non fondé.

Conclusion Le pourvoi est irrecevable, sinon non fondé.

Pour le Procureur général d’Etat, le premier avocat général, MAGISTRAT6.) 10


Synthèse
Numéro d'arrêt : 31/23
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2023-03-16;31.23 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award