N° 160 /2022 du 22.12.2022 Numéro CAS-2022-00026 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-deux décembre deux mille vingt-deux.
Composition:
MAGISTRAT1.), président de la Cour, MAGISTRAT2.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT3.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT4.), conseiller à la Cour de cassation, MAGISTRAT5.), conseiller à la Cour d’appel, MAGISTRAT6.), premier avocat général, GREFFIER1.), greffier à la Cour.
Entre:
PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE1.), demandeur en cassation, comparant par la société anonyme SOCIETE1.), inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente instance par Maître AVOCAT1.), avocat à la Cour, et:
1) PERSONNE2.), et son épouse 2) PERSONNE3.), les deux demeurant à L-ADRESSE2.), défendeurs en cassation, comparant par Maître AVOCAT2.), avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.
Vu l’arrêt attaqué, numéro 2/22 - VII - CIV, rendu le 5 janvier 2022 sous le numéro CAL-2020-00449 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, septième chambre, siégeant en matière civile ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 23 mars 2022 par PERSONNE1.) à PERSONNE2.) et à PERSONNE3.) (ci-après « les époux GROUPE1.) »), déposé le 24 mars 2022 au greffe de la Cour supérieure de justice ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 19 mai 2022 par les époux GROUPE1.) à PERSONNE1.), déposé le 20 mai 2022 au greffe de la Cour ;
Sur les conclusions du premier avocat général MAGISTRAT7.).
Sur la recevabilité du pourvoi Les défendeurs en cassation soulèvent l’irrecevabilité du pourvoi au motif que le demandeur en cassation ferait, dans le mémoire, référence à des pièces qui n’auraient pas été déposées avec celui-ci.
L’omission de déposer les pièces discutées dans le mémoire ne constitue pas une cause d’irrecevabilité du pourvoi.
Le moyen d’irrecevabilité du pourvoi n’est donc pas fondé.
Le pourvoi, introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.
Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière civile, avait constaté la résolution de plein droit du compromis de vente conclu entre PERSONNE1.) et les époux GROUPE1.) et condamné PERSONNE1.) au paiement d’un certain montant à titre de clause pénale. La Cour d’appel a, par réformation, dit qu’il n’y a pas lieu à réduction de la clause pénale et condamné le demandeur en cassation au paiement du montant réclamé de ce chef et a, pour le surplus, confirmé le jugement attaqué.
Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, de l’article 89 de la Constitution et des articles 249 alinéa 1 et 587 combinés du Nouveau Code de Procédure Civile, en ce que l’arrêt attaqué retient que que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu qu’en diminuant le prix de vente et en supprimant la clause suspensive tendant à l’obtention d’un accord de principe par la commune pour la construction d’un immeuble d’une superficie d’environ 340 m2, PERSONNE1.) n’établit pas que l’existence d’une autorisation de principe ainsi que la possibilité de construire une résidence au lieu et place de l’immeuble existant ayant une superficie habitable d’environ 340 m2 aient déterminé son consentement. En instance d’appel, PERSONNE1.) ne fournit pas d’explication permettant une autre déduction que celle faite par les premiers juges.
Dès lors, il est superflu d’analyser la question de savoir s’il y a eu dol, sinon erreur, étant donné que le dol n’aurait pas été déterminant et l’erreur n’aurait pas porté sur une qualité substantielle de la chose, de sorte que le premier jugement est à confirmer en ce que les moyens de nullité du compromis de vente ont été rejetés : » Alors que ce faisant, la Cour s’est contentée de renvoyer à la motivation insuffisante établie par le Tribunal de première instance sans motiver concrètement et suffisamment sa décision, alors qu’en raison des articles 89 de la Constitution et 249 alinéa 1 et 587 combinés du Nouveau code de procédure civile, la Cour aurait dû énoncer les motifs de la décision et partant procéder par arrêt motivé, que le simple fait d’écrire sans la moindre explication qu’il est superflu d’analyser la question de savoir s’il y a eu dol, sinon erreur, ne suffit pas à motiver la décision, que l’arrêt encourt donc la cassation pour défaut de motivation. ».
Réponse de la Cour En tant que tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution et des articles 249, alinéa 1er, et 587 du Nouveau Code de procédure civile, le moyen vise le défaut de motifs, qui est un vice de forme.
Une décision judiciaire est régulière en la forme, dès lors qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite sur le point considéré.
Par les passages de l’arrêt reproduits au moyen, les juges d’appel ont motivé la décision.
Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.
Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 1175 du Code civil, sinon de la mauvaise application de l’article 1175 du Code civil, en ce que l’arrêt attaqué retient que : C’est à bon escient que les premiers juges ont décidé qu’il était dans la commune intention des parties de fixer la durée de validité du contrat à la date du 31 mars 2017 sous peine de rendre les clauses du compromis inconciliables et l’ensemble du contrat incohérent.
Il est constant en cause que PERSONNE1.) ne disposait pas encore d’une décision de la banque au 31 mars 2017.
Suivant lettre du 14 avril 2017, les époux GROUPE1.) ont rappelé à PERSONNE1.) qu’ils n’avaient pas encore reçu ni l’accord, ni le refus de la banque et ils l’ont sommé de leur présenter le courrier d’acceptation du financement au plus tard le 21 avril 2017, sous peine de l’application de la clause pénale.
Il en résulte que les vendeurs ont prorogé le délai pour la réalisation de la condition suspensive jusqu’au 21 avril 2017 », que toutefois, les juges d’appel ont décidé que :
à confirmer en ce qu’il a été retenu que PERSONNE1.) n’a pas accompli les diligences nécessaires en vue de l’accomplissement de la condition suspensive, de sorte que la défaillance de la condition lui est imputable.
(…) Conformément à l’article XV du compromis de vente, si PERSONNE1.) ne présente pas l’accord ou le refus bancaire jusqu’au 20 mars 2017, le compromis est considéré comme résolu et le montant prévu par la clause pénale doit être versé aux époux GROUPE1.).
C’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont constaté que le compromis de vente était résolu de plein droit aux torts de PERSONNE1.) et que ce dernier est redevable de la clause pénale, dont le montant sera déterminé dans le cadre de l’analyse du bien- fondé de l’appel incident. » Ainsi, la Cour d’appel a dénaturé les termes de l’accord entre les parties, mais a également fait une fausse interprétation de la volonté des parties.
Première branche du moyen L’article 1175 du Code civil dispose : Toute condition doit être accomplie de la manière que les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu'elle le fût. » En l’espèce, les parties ont prévu au compromis :
financier auprès du Grand-Duché de Luxembourg, pour règlement du prédit prix de vente. Il est expressément entendu que le prédit contrat ne sortira ses effets qu’au cas où l’acquéreur devrait se voir accorder le prêt en question. En cas de refus du prêt, les parties seront libres de tout engagement sans que le vendeur puisse invoquer des dommages et intérêts à l’encontre de l’acquéreur.
Il est expressément convenu que l’acquéreur s’engage à présenter au vendeur la lettre d’acceptation, respectivement de refus du prédit prêt au plus tard le 20 février 2017 (20 mars 2017). Si l’acquéreur ne présente pas l’une des prédites lettres ; ou pour le cas où aucune demande de crédit n’aurait été introduite, le compromis sera considéré comme résolu et le montant prévu par la clause pénale devrait être versé au vendeur ».
Toutefois, en prenant appui sur la lettre du 14 avril 2017 émanant des vendeurs, les parties GROUPE1.), les juges d’appel en ont déduit que les vendeurs ont prorogé le délai pour la réalisation de la condition suspensive jusqu’au 21 avril 2017.
Toutefois, dans le cadre de leur motivation, les juges en ont déduit que :
ne présente pas l’accord ou le refus bancaire jusqu’au 20 mars 2017, le compromis est considéré comme résolu et le montant prévu par la clause pénale doit être versé aux époux GROUPE1.). » Ainsi, en interprétant que l’intention des vendeurs était celle de proroger le délai pour la réalisation de la condition suspensive, les juges d’appel ne pouvaient alors s’en tenir aux termes stricts du compromis pour condamner la partie demanderesse en cassation.
En motivant leur décision de la sorte et en statuant comme ils l’ont fait, les juges ont violé, sinon mal appliqué, l’article 1175 du Code civil, avec la conséquence que l’arrêt encourt la cassation.
Deuxième branche du moyen La Cour d’appel a encore violé l’article 1175 du Code civil en ce qu’elle a mal qualifié l’intention des parties.
En effet, dans le cadre de sa motivation, la Cour d’appel indique : Suivant lettre du 14 avril 2017, les époux GROUPE1.) ont rappelé à PERSONNE1.) qu’ils n’avaient pas encore reçu ni l’accord, ni le refus de la banque et ils l’ont sommé de leur présenter le courrier d’acceptation du financement au plus tard le 21 avril 2017, sous peine de l’application de la clause pénale.
Il en résulte que les vendeurs ont prorogé le délai pour la réalisation de la condition suspensive jusqu’au 21 avril 2017. » Or, une prorogation tacite du terme d’une convention d’un commun accord des parties ne peut se déduire que de faits intervenus antérieurement à l’arrivée du terme (Cour de cassation, 29 juin 2006, P.31, p.440 ; Cour d’appel, 16 mars 2011, n° 35036 du rôle).
En l’espèce, le courrier est postérieur à l’arrivée du terme.
En qualifiant l’intention des parties de volonté de proroger le délai » les juges d’appel ont fait une interprétation contra legem de l’intention des parties.
En qualifiant l’intention des parties de les juges d’appel ont fait une interprétation tronquée de leur intention.
En motivant leur décision de la sorte et en statuant comme ils l’ont fait, les juges ont violé, sinon mal appliqué, l’article 1175 du Code civil, avec la conséquence que l’arrêt encourt la cassation. ».
Réponse de la Cour Sur les deux branches du moyen réunies Sous le couvert du grief de la violation de la disposition visée au moyen, celui-
ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des éléments de fait qui les ont amenés à retenir que le demandeur en cassation n’avait pas accompli les diligences nécessaires en vue de l’accomplissement de la condition suspensive de sorte que le compromis de vente était résolu de plein droit, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.
Il s’ensuit que le moyen ne saurait être accueilli.
Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la mauvaise application, des articles 1176 et 1178 du Code civil.
en ce que les juges d’appel, qui ont pourtant rappelé l’article 1178 du Code civil n’ont pas appliqué ou ont mal appliqué cette disposition légale, qu’en effet, l’arrêt attaqué retient que :
que : "C’est à bon escient que les premiers juges ont décidé qu’il était dans la commune intention des parties de fixer la durée de validité du contrat à la date du 31 mars 2017 sous peine de rendre les clauses du compromis inconciliables et l’ensemble du contrat incohérent.
Il est constant en cause que PERSONNE1.) ne disposait pas encore d’une décision de la banque au 31 mars 2017.
Suivant lettre du 14 avril 2017, les époux GROUPE1.) ont rappelé à PERSONNE1.) qu’ils n’avaient pas encore reçu ni l’accord, ni le refus de la banque et ils l’ont sommé de leur présenter le courrier d’acceptation du financement au plus tard le 21 avril 2017, sous peine de l’application de la clause pénale.
Il en résulte que les vendeurs ont prorogé le délai pour la réalisation de la condition suspensive jusqu’au 21 avril 2017." », Que toutefois, les juges d’appel ont décidé que : Le jugement est dès lors à confirmer en ce qu’il a été retenu que PERSONNE1.) n’a pas accompli les diligences nécessaires en vue de l’accomplissement de la condition suspensive, de sorte que la défaillance de la condition lui est imputable.
En vertu des dispositions de l’article 1178 du Code civil, la condition est dès lors accomplie.
Conformément à l’article XV du compromis de vente, si PERSONNE1.) ne présente pas l’accord ou le refus bancaire jusqu’au 20 mars 2017, le compromis est considéré comme résolu et le montant prévu par la clause pénale doit être versé aux époux GROUPE1.).
C’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont constaté que le compromis de vente était résolu de plein droit aux torts de PERSONNE1.) et que ce dernier est redevable de la clause pénale, dont le montant sera déterminé dans le cadre de l’analyse du bien- fondé de l’appel incident. » ».
Réponse de la Cour Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou chaque branche doit, sous peine d’irrecevabilité, préciser en quoi la partie critiquée de la décision encourt le reproche allégué. Les développements en droit qui, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 10 précité peuvent compléter l’énoncé du moyen, ne peuvent suppléer la carence de celui-ci au regard des éléments dont la précision est requise sous peine d’irrecevabilité.
Le moyen ne précise pas en quoi la partie critiquée de l’arrêt viole les dispositions visées au moyen.
Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.
Sur les demandes en allocation d’une indemnité de procédure Le demandeur en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, sa demande en allocation d'une indemnité de procédure est à rejeter.
Il serait inéquitable de laisser à charge des défendeurs en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de leur allouer une indemnité de procédure de 2.500 euros.
PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :
rejette le pourvoi ;
rejette la demande du demandeur en cassation en allocation d’une indemnité de procédure ;
condamne le demandeur en cassation à payer aux défendeurs en cassation une indemnité de procédure de 2.500 euros ;
le condamne aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître AVOCAT2.), sur ses affirmations de droit.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président MAGISTRAT1.) en présence du premier avocat général MAGISTRAT6.) et du greffier GREFFIER1.).
Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) contre 1. PERSONNE2.) 2. PERSONNE3.) N° CAS-2022-00026 du registre Le pourvoi en cassation, introduit à la requête de PERSONNE1.), signifié en date du 23 mars 2022 à PERSONNE2.) et PERSONNE3.) et déposé le 24 mars 2022 au greffe de la Cour, est dirigé contre un arrêt rendu le 5 janvier 2022 par la Cour d’appel, septième chambre, siégeant en matière civile, dans la cause inscrite sous le numéro CAL-2020-00449 du rôle.
L’arrêt a été signifié le 25 janvier 2022 à PERSONNE2.) et PERSONNE3.).
Le pourvoi, déposé dans les forme et délai de la loi du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation telle que modifiée, est recevable.
Le mémoire en réponse de PERSONNE2.) et PERSONNE3.), signifié le 19 mai 2022 à PERSONNE1.) en son domicile élu et déposé le 20 mai 2022 au greffe de la Cour, peut être pris en considération pour avoir été signifié dans le délai et déposé conformément aux prescriptions de la loi.
Faits et rétroactes Saisi d’une demande des époux GROUPE1.), dirigée contre PERSONNE1.), en résolution, sinon en résiliation d’un compromis de vente aux torts exclusifs de ce dernier ainsi que d’une demande en allocation de dommages-intérêts à hauteur de 55.391.- euros en vertu d’une clause pénale, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière civile, a, par jugement du 24 janvier 2020, constaté la résolution de plein droit du compromis de vente et condamné le défendeur au paiement de la somme de 21.000.- euros au titre de la clause pénale.
Sur appel de PERSONNE1.), la Cour d’appel, septième chambre, a, par arrêt du 5 janvier 2022, réformé le jugement entrepris en condamnant l’appelant à payer la somme de 41.000.- euros en vertu de la clause pénale et confirmé la décision de première instance pour le surplus.
Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.
Quant à la recevabilité du pourvoi qui est contestée:
Les défendeurs en cassation critiquent la circonstance que la partie adverse a versé, à titre de pièces en instance de cassation, uniquement le jugement de première instance, l’arrêt attaqué ainsi que le compromis de vente du 6 février 2017. Selon leur raisonnement, Votre Cour aurait besoin de l’ensemble des actes de procédure échangés entre parties pour apprécier le bien-fondé des trois moyens de cassation.
Or, les considérations ayant trait à la recevabilité, respectivement au bien-
fondé des moyens de cassation n’ont pas d’incidence sur la recevabilité du pourvoi, de sorte que ces arguments sont à rejeter.
De plus, ils font valoir que le demandeur en cassation resterait en défaut de verser l’acte de signification de l’arrêt attaqué.
Toutefois, cet acte a bien été versé ensemble avec une copie de l’arrêt du 5 janvier 2022. Il s’y ajoute qu’aucune disposition légale n’impose au demandeur en cassation de verser l’acte de signification de la décision attaquée, de sorte que cette critique n’est pas fondée non plus.
Le pourvoi est donc recevable.
Quant aux moyens de cassation :
Quant au premier moyen de cassation :
tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution, et des articles 249 alinéa 1 et 587 combinés du Nouveau code de procédure civile, en ce que l’arrêt attaqué retient que « C’est à bon droit et pour les motifs que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu qu’en diminuant le prix de vente et en supprimant la clause suspensive tendant à l’obtention d’un accord de principe par la commune pour la construction d’un immeuble d’une superficie d’environ 340 m2, PERSONNE1.) n’établit pas que l’existence d’une autorisation de principe ainsi que la possibilité de construire une résidence au lieu et place de l’immeuble existant ayant une superficie habitable d’environ 340m2 aient déterminé son consentement. En instance d’appel, PERSONNE1.) ne fournit pas d’explication permettant une autre déduction que celle faite par les premiers juges.
Dès lors, il est superflu d’analyser la question de savoir s’il y a eu dol, sinon erreur, étant donné que le dol n’aurait pas été déterminant et l’erreur n’aurait pas porté sur une qualité substantielle de la chose, de sorte que le premier jugement est à conformer en ce que les moyens de nullité du compromis de vente ont été rejetés. » alors que ce faisant, la Cour s’est contentée de renvoyer à la motivation insuffisante établie par le Tribunal de première instance sans motiver concrètement et suffisamment sa décision, alors qu’en raison des articles 89 de la Constitution et 249 alinéa 1 et 587 combinés du Nouveau code de procédure civile, la Cour aurait dû énoncer les motifs de la décision et partant procéder par arrêt motivé.
que le simple fait d’écrire sans la moindre explication qu’il est superflu d’analyser la question de savoir s’il y a eu dol, sinon erreur, ne suffit pas à motiver la décision, que l’arrêt encourt donc la cassation pour défaut de motivation.
Le premier moyen de cassation fait valoir, en visant les articles 89 de la Constitution et 249 et 587 du Nouveau code de procédure civile, un vice de forme, même s’il fait état, en même temps, d’une motivation insuffisante, qui s’analyse cependant en un défaut de base légale, vice de fond de l’arrêt attaqué.
La soussignée se rapporte à la sagesse de Votre Cour concernant la recevabilité du premier moyen de cassation en la forme et se propose de l’analyser uniquement en tant que vice de forme.
Selon la jurisprudence de Votre Cour, le jugement est régulier en la forme dès qu’il comporte un motif exprès ou implicite, si incomplet ou vicieux soit-il sur le point considéré1. Il suffit dès lors de constater qu’une décision est motivée sur le point concerné pour écarter le moyen tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution. Il est encore admis que le juge d’appel peut reprendre la motivation des juges de première instance.
1 J. et L. BORE, La cassation en matière civile, n°77.31, éd.2003/2004 A bien saisir le sens du moyen, il critique les magistrats d’appel pour ne pas avoir motivé leur décision de rejeter son argumentation relative au dol, respectivement à l’erreur qui auraient vicié son consentement, de sorte que le compromis de vente devrait être annulé.
Ce reproche fait penser à un défaut de réponse à conclusions. Or, le demandeur en cassation reste en défaut de verser les conclusions par lesquelles il a fait valoir ces moyens, de sorte que Votre Cour se trouve dans l’impossibilité d’examiner la pertinence de ce grief.
De toute façon, il se dégage de la lecture de l’arrêt attaqué et notamment des extraits cités au moyen que l’arrêt est motivé quant à la question du dol et de l’erreur, tant par une motivation propre, que par adoption des motifs des premiers juges sur ces points.
Le jugement de première instance se trouve longuement motivé2 par rapport à la demande d’annulation du compris de vente formulée par l’actuel demandeur en cassation sur base du dol, sinon de l’erreur, et cela aussi bien en fait qu’en droit.
Plus précisément, quant au dol, après des développements en droit et après avoir analysé les pièces versées en cause, les premiers juges ont écrit :
« Nonobstant le fait que dans son courriel précité du 29 novembre 2016, l’agent immobilier PERSONNE4.) de l’agence immobilière SOCIETE2.) fait état d’une autorisation de principe concernant le bien immobilier litigieux, il faut retenir au vu du libellé de la condition suspensive précitée contenue dans la première version du compromis de vente du 18 janvier 2017 que PERSONNE1.) doit nécessairement avoir été au courant de l’absence de l’autorisation de principe au moment de la signature de la version définitive du compromis de vente.
Par ailleurs, au vu de la suppression de cette composition suspensive dans la version définitive du compromis de vente, il est établi que l’absence d’une telle autorisation de principe ainsi que l’impossibilité de réaliser le projet tel qu’initialement prévu, à savoir la construction d’une résidence au lieu et place de l’immeuble existant ayant une superficie habitable d’environ 341,04m2, n’ont pas engendré dans son chef une erreur ayant déterminé son consentement au moment de la signature du compromis de vente du 6 février 2017.
De surcroît, il ressort du courrier précité du 30 octobre 2018 du maire de LIEU1.) qu’il est toujours possible de construire des maisons unifamiliales et plurifamiliales avec 4 logements au maximum, en respectant les contraintes 2 Farde de pièces de Maître AVOCAT1.), jugement du 24 janvier 2020, pages 7 à 15 imposées liées au gabarit protégé de l’immeuble litigieux.
PERSONNE1.) ne rapporte la preuve ni que les vendeurs, ni que l’agent immobilier PERSONNE4.) aient employé des manœuvres dolosives ou aient menti, ni qu’ils se seraient rendus coupables d’une réticence dolosive pour l’amener à signer le compromis de vente du 6 février 2017 dans une croyance erronée.
Dans la mesure où PERSONNE1.) n’établit pas le dol qu’il invoque, sa demande en annulation du compromis de vente du 6 février n’est pas fondée. »3 Concernant l’erreur, après avoir exposé en droit les principes régissant cette matière, leur motivation in concreto se lit comme suit :
« Tel que ci-avant exposé concernant le dol, PERSONNE1.) n’établit pas que l’existence d’une autorisation de principe ainsi que la possibilité de construire une résidence au lieu et place de l’immeuble existant ayant une superficie habitable d’environ 341,04m2 aient déterminé son consentement.
Dans la mesure où il ne rapporte pas cette preuve, sa demande en annulation sur base de l’erreur n’est pas fondée. »4 En examinant les clauses pertinentes des deux compromis de vente successifs du 18 janvier 2017 et du 6 février 2017, ainsi qu’en se référant à la motivation exhaustive sus-citée, tout en y ajoutant :« C’est à bon droit et pour des motifs que la Cour adopte que les premiers juges ont retenu qu’en diminuant le prix de vente et en supprimant la clause suspensive tendant à l’obtention d’un accord de principe par la commune pour la construction d’un immeuble d’une superficie d’environ 340 m2, PERSONNE1.) n’établit pas que l’existence d’une autorisation de principe ainsi que la possibilité de construire une résidence au lieu et place de l’immeuble existant ayant une superficie habitable d’environ 340 m2 aient déterminé son consentement. En instance d’appel, PERSONNE1.) ne fournit pas d’explication permettant une autre déduction que celle faite par les premiers juges.
Dès lors, il est superflu d’analyser la question de savoir s’il y a eu dol, sinon erreur, étant donné que le dol n’aurait pas été déterminant et l’erreur n’aurait pas porté sur une qualité substantielle de la chose, de sorte que le premier jugement est à confirmer en ce que les moyens de nullité du compromis de vente ont été rejetés. », les magistrats d’appel ont dûment motivé leur décision de rejeter les moyens de l’actuel demandeur en cassation en relation avec le dol et l’erreur, par confirmation de la décision entreprise.
3 Jugement du 24 janvier 2020 précité, page 13, alinéas 7 et 8, et page 14, alinéas 1 à 4 4 Idem, page 15, alinéas 4 et 5 Il en découle que le premier moyen de cassation n’est pas fondé.
Quant au deuxième moyen de cassation, pris en ses deux branches :
tiré de la violation de l’article 1175 du Code civil, sinon de la mauvaise application de l’article 1175 du Code civil, en ce que l’arrêt attaqué retient que : « C’est à bon escient que les premiers juges ont décidé qu’il était dans la commune intention des parties de fixer la durée de validité du contrat à la date du 31 mars 2017 sous peine de rendre les clauses du compromis inconciliables et l’ensemble du contrat incohérent.
Il est constant en cause que PERSONNE1.) ne disposait pas encore d’une décision de la banque au 31 mars 2017.
Suivant lettre du 14 avril 2017, les époux GROUPE1.) ont rappelé à PERSONNE1.) qu’ils n’avaient pas encore reçu ni l’accord, ni le refus de la banque et ils l’ont sommé de leur présenter le courrier d’acceptation du financement au plus tard le 21 avril 2017, sous peine de l’application de la clause pénale.
Il en résulte que les vendeurs ont prorogé le délai pour la réalisation de la condition suspensive jusqu’au 21 avril 2017 » que toutefois, les juges d’appel ont décidé que : « Le jugement est dès lors à confirmer en ce qu’il a été retenu que PERSONNE1.) n’a pas accompli les diligences nécessaires en vue de l’accomplissement de la condition suspensive, de sorte que la défaillance lui est imputable.
(…) Conformément à l’article XV du compromis de vente, si PERSONNE1.) ne présente pas l’accord ou le refus bancaire jusqu’au 20 mars 2017, le compromis est considéré comme résolu et le montant prévu par la clause pénale doit être versé aux époux GROUPE1.).
C’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont constaté que le compromis de vente était résolu de plein droit aux torts de PERSONNE1.) et que ce dernier est redevable de la clause pénale, dont le montant sera déterminé dans le cadre de l’analyse du bien-fondé de l’appel incident. » ainsi, la Cour d’appel a dénaturé les termes de l’accord des parties, mais a également fait une fausse interprétation de la volonté des parties. » Le deuxième moyen de cassation, articulé en deux branches5, tend à reprocher à la Cour d’appel d’avoir dénaturé l’accord des parties concernant la clause de condition suspensive stipulée dans le compromis de vente.
L’article 1175 du Code civil, que les magistrats d’appel auraient violé, dispose que toute condition doit être accomplie de la manière que les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu’elle fût. Il s’agit d’une ligne de conduite à l’intention du juge saisi d’une clause contractuelle instituant une condition dont le sens précis donne lieu à interprétation.
Il est rappelé que Votre Cour retient de façon constante que les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour interpréter les clauses d’une convention ainsi que l’intention des parties contractantes et que leur décision à ce sujet échappe à Votre contrôle. Sur base de cette considération, Votre Cour refuse de connaître du grief de la dénaturation des écrits, qu’il s’agisse de la dénaturation de conventions ou d’écrits autres que les conventions6.
Plus particulièrement, Votre Cour a décidé que l’appréciation qui mène les juges du fond de retenir qu’une condition suspensive s’est réalisée relève de leur pouvoir souverain et échappe à Votre contrôle7.
En l’espèce, les juges d’appel ont considéré, en vertu de leur pouvoir souverain d’interprétation des conventions, que le contrat de vente était résolu de plein droit, étant donné que l’actuel demandeur en cassation n’avait pas accompli les diligences nécessaires en vue de l’accomplissement de la condition suspensive, la défaillance de la condition lui étant ainsi imputable, de sorte qu’il était redevable de la clause pénale.
Il en suit que sous le couvert du grief tiré d’une violation de l’article 1175 du Code civil, le deuxième moyen de cassation, en ses deux branches réunies, ne tend qu’à remettre en discussion l’interprétation des dispositions contractuelles entre parties et leur application aux faits qui relèvent du pouvoir souverain des juges du fond et échappent à Votre contrôle.
Partant le moyen, pris en ses deux branches, ne saurait être accueilli.
Quant au troisième moyen de cassation :
tiré de la violation, sinon de la mauvaise application des articles 1176 et 1178 du Code civil.
5 Non reproduites ci-dessus 6 P.ex.: Cass. 23 mai 2013, n°3211 du registre ; Cass. 28 avril 2016, n°3630 du registre ; Cass. 7 juillet 2016, n°3626 du registre 7 Cass. 10 décembre 2020 n° CAS-2019-00176 du registre en ce que les juges d’appel, qui ont pourtant rappelé l’article 1178 du Code civil n’ont pas appliqué ou mal appliqué cette disposition légale, qu’en effet, l’arrêt attaqué retient que : « C’est à bon escient que les premiers juges ont décidé qu’il était dans la commune intention des parties de fixer la durée de validité du contrat à la date du 31 mars 2017 sous peine de rendre les clauses du compromis inconciliables et l’ensemble du contrat incohérent.
Il est constant en cause que PERSONNE1.) ne disposait pas encore d’une décision de la banque au 31 mars 2017.
Suivant lettre du 14 avril 2017, les époux GROUPE1.) ont rappelé à PERSONNE1.) qu’ils n’avaient pas encore reçu ni l’accord, ni le refus de la banque et ils l’ont sommé de leur présenter le courrier d’acceptation du financement au plus tard le 21 avril 2017, sous peine de l’application de la clause pénale.
Il en résulte que les vendeurs ont prorogé le délai pour la réalisation de la condition suspensive jusqu’au 21 avril 2017. » que toutefois, les juges d’appel ont décidé que : « Le jugement est dès lors à confirmer en ce qu’il a été retenu que PERSONNE1.) n’a pas accompli les diligences nécessaires en vue de l’accomplissement de la condition suspensive, de sorte que la défaillance de la condition lui est imputable.
En vertu des dispositions de l’article 1178 du Code civil, la condition est dès lors accomplie.
Conformément à l’article XV du compromis de vente, si PERSONNE1.) ne présente pas l’accord ou le refus bancaire jusqu’au 20 mars 2017, le compromis est considéré comme résolu et le montant prévu par la clause pénale doit être versé aux époux GROUPE1.).
C’est dès lors à bon droit que les premiers juges ont constaté que le compromis de vente était résolu de plein droit aux torts de PERSONNE1.) et que ce dernier est redevable de la clause pénale, dont le montant sera déterminé dans le cadre de l’analyse du bien-fondé de l’appel incident. » » Le troisième moyen de cassation est lacunaire en sa rédaction. Il se limite à indiquer un grief, à savoir la violation des articles 1176 et 1178 du Code civil, et à citer deux passages de l’arrêt attaqué. Il reste en défaut d’exposer en quoi l’arrêt encourt le reproche invoqué et ne précise pas non plus quelle aurait dû être la solution à adopter par les magistrats d’appel.
S’il est vrai que des développements en droit peuvent compléter l’énoncé du moyen, ils ne sauraient, selon la jurisprudence de Votre Cour8, suppléer à la 8 p.ex.: Cass. 6 juin 2019, n°CAS-2018-00059 du registre carence de celui-ci au regard des éléments dont la précision est requise sous peine d’irrecevabilité.
En omettant de préciser en quoi l’arrêt encourt le reproche invoqué, le moyen manque de la précision requise par l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, de sorte que la soussignée conclut, à titre principal, qu’il est irrecevable.
A titre subsidiaire, il faut constater que le moyen ne devient guère plus compréhensible à la lecture de la partie réservée à sa discussion. Les développements y figurant n’expliquent pas en quoi la décision d’appel violerait les articles 1176 et 1178 du Code civil. Ils reviennent en substance à reprocher aux magistrats d’appel de ne pas avoir pris en compte la circonstance que l’actuel demandeur en cassation n’aurait signé le compromis que parce qu’il voulait construire une résidence en lieu et place de la maison acquise, ce qui n’aurait pas été possible au vu de l’interdiction par le plan d’aménagement général de dépasser le gabarit existant.
Or, cette considération est totalement étrangère aux textes légaux visés par le moyen et ne présente aucun lien avec la condition suspensive sous laquelle la vente était conclue, à savoir l’obtention d’un prêt bancaire par l’acheteur.
Sous cet aspect, le moyen est donc irrecevable, sinon inopérant.
Par ailleurs et de surcroît, il ne saurait être accueilli, dès lors qu’à l’instar du deuxième moyen de cassation, sous le couvert de la violation des articles 1176 et 1178 du Code civil, il ne tend qu’à remettre en discussion l’interprétation des dispositions contractuelles entre parties et leur application aux faits, en l’occurrence de la condition suspensive figurant au compromis de vente, qui relèvent du pouvoir souverain des juges du fond et échappent à Votre contrôle.
Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.
Pour le Procureur général d’Etat, le premier avocat général, MAGISTRAT7.) 17