La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/07/2022 | LUXEMBOURG | N°115/22

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 14 juillet 2022, 115/22


N° 115 / 2022 pénal du 14.07.2022 Not. 35303/16/CD Numéro CAS-2021-00131 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, quatorze juillet deux mille vingt-deux, sur le pourvoi de :

B), demandeur en cassation, comparant par Maître André LUTGEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

L), défendeur en cassation, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqu

é, rendu le 19 octobre 2021 sous le numéro 929/21 Ch.c.C.

par la chambre du conseil de la ...

N° 115 / 2022 pénal du 14.07.2022 Not. 35303/16/CD Numéro CAS-2021-00131 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, quatorze juillet deux mille vingt-deux, sur le pourvoi de :

B), demandeur en cassation, comparant par Maître André LUTGEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

L), défendeur en cassation, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 19 octobre 2021 sous le numéro 929/21 Ch.c.C.

par la chambre du conseil de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Florent KIRMANN, avocat à la Cour, en remplacement de Maître André LUTGEN, avocat à la Cour, au nom de B), suivant déclaration du 18 novembre 2021 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 15 décembre 2021 par B) à L), déposé le 17 décembre 2021 au greffe de la Cour ;Ecartant le mémoire, intitulé « mémoire à destination de la Cour de cassation », déposé le 14 janvier 2022 par L) au greffe de la Cour en ce qu’il n’en ressort pas qu’il a été communiqué au demandeur en cassation ;

Sur les conclusions du premier avocat général Serge WAGNER.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait ordonné un non-lieu à poursuivre à l’encontre de B).

La chambre du conseil de la Cour d’appel a, par réformation, renvoyé B) devant une chambre correctionnelle du même tribunal pour y répondre d’infractions aux articles 447, 448, 418 et 420 du Code pénal commises à l’égard de L).

Sur la recevabilité du pourvoi L’article 416 du Code de procédure pénale dispose :

« (1) Le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d’instruction ou les jugements de dernier ressort de cette qualité, n’est ouvert qu’après l’arrêt ou le jugement définitif ;(…).

(2) Le recours en cassation est toutefois ouvert contre les arrêts et jugements rendus sur la compétence et contre les dispositions par lesquelles il est statué définitivement sur le principe de l’action civile. ».

L’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel n’a pas mis fin à l’action publique poursuivie à charge du prévenu et n’a statué ni sur une question de compétence, ni définitivement sur le principe de l’action civile.

Il s’ensuit que le recours est irrecevable sur base de l’article 416 du Code de procédure pénale.

Le demandeur en cassation conclut néanmoins à la recevabilité du pourvoi au motif qu’il constitue un pourvoi en cassation-nullité pour cause d’excès de pouvoir et que la décision attaquée ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale.

L’excès de pouvoir est la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité.

Le reproche adressé par le demandeur en cassation aux juges d’appel d’avoir violé l’article 21 de la loi modifiée du 28 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les médias ne rentre pas dans cette définition de l’excès de pouvoir.

Le demandeur en cassation ne précise pas la condition essentielle mettant en cause l’existence légale de la décision attaquée.

Il s’ensuit que le pourvoi cassation-nullité est également irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

déclare le pourvoi irrecevable ;

condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance, ceux du Ministère public étant liquidés à 5 euros.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, quatorze juillet deux mille vingt-deux, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Jean ENGELS, premier conseiller à la Cour d’appel, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, Joëlle DIEDERICH, conseiller à la Cour d’appel, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN en présence du premier avocat général Serge WAGNER et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation B) en présence du Ministère public et de L) (Affaire numéro CAS-2021-00131 du registre)

______________________

Par déclaration faite le 18 novembre 2021 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Florent KIRMANN, avocat à la Cour, en remplacement de Maître André LUTGEN, avocat à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg, forma au nom et pour le compte de B), un recours en cassation contre un arrêt N° 929/21 Ch.c.C. rendu le 19 octobre 2021 par la Chambre du conseil de la Cour d’appel.

Cette déclaration de recours a été suivie en date du 17 décembre 2021 du dépôt d’un mémoire en cassation, qui a été signifié en date du 15 décembre 2021 à la partie civile L).

Le pourvoi a été déclaré dans les forme et délais de la loi.

De même le mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation a été déposé dans les formes et délais y prévus.

Le pourvoi est dès lors recevable quant à la forme et aux délais.

La partie civile L) a déposé un mémoire en date du 14 janvier 2022.

Quant aux faits Par ordonnance n°422/21 du 17 mars 2021, la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg a ordonné le renvoi de T), S) et X) devant une chambre correctionnelle du chef d’un certain nombre d’infractions, B) bénéficiant d’un non-lieu.

Sur appel de T), S), S) et de la partie civile L), la chambre du conseil de la Cour d’appel, par arrêt n° 929/21 du 19 octobre 2021, a déclaré l’appel d’L) partiellement fondé et les autres appels non-fondés, et par réformation a dit qu’il y a lieu à renvoi de B) devant unechambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, confirmant pour le surplus le renvoi de T), S) et X).

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Quant à la recevabilité du pourvoi I) Irrecevabilité sur base de l’article 416 du Code de procédure pénale Aux termes de l'article 416 du Code de procédure pénale, le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d'instruction ou les jugements en dernier ressort de cette qualité n'est ouvert qu'après l'arrêt ou le jugement définitif. Le recours en cassation est toutefois ouvert contre les arrêts et jugements rendus sur la compétence et contre les dispositions par lesquelles il est statué définitivement sur le principe de l'action civile.

L’interdiction de se pourvoir en cassation immédiatement et avant la décision définitive contre les décisions préparatoires ou d’instruction a précisément pour but de prévenir des recours dilatoires1.

Cette disposition légale s'applique à toutes les décisions qui n'épuisent pas la juridiction du juge pénal soit sur l'action publique, soit sur l'action civile. Pour être considérée comme décision définitive au sens de l'article 416, il ne suffit dès lors pas, que la décision du juge épuise sa juridiction sur une question litigieuse précise.

Sont considérées comme arrêts préparatoires ou d’instruction toutes les décisions qui mettent le litige en état de recevoir une solution, mais sans terminer l’instance. Une décision termine l’instance soit lorsqu’elle se prononce au fond - acquittement ou condamnation – soit lorsqu’elle admet une exception d’incompétence ou une autre fin de non-recevoir qui dénie ou enlève au juge la connaissance de la cause.

En l’occurrence, le demandeur en cassation a introduit un pourvoi contre l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel qui a déclaré son appel dirigé contre l’ordonnance de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de Luxembourg ayant ordonné son renvoi devant une chambre correctionnelle recevable mais non fondé.

Etant donné que l’arrêt attaqué n’a statué ni définitivement sur l’action publique ou sur le principe d’une action civile et n’a d’ailleurs pas statué sur une question de compétence2, le pourvoi est dès lors à déclarer irrecevable au titre de l’article 416 du Code de procédure pénale.

1 Cour de cassation, arrêt numéro 24/2015 du 20 avril 2015, numéro 3459 du registre 2 Dans ce sens : Cour de cassation, arrêt no 107 / 2011 pénal, du 20 octobre 2011, numéro 2946 du registre :

pourvoi dirigé contre la partie du dispositif de l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel ayant confirmé l’ordonnance de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement qui a renvoyé les demandeurs en cassation devant le tribunal correctionnel, déclaré irrecevable au titre de l’article 416 du Code de procédure pénale II) Pourvoi en cassation-nullité pour excès de pouvoir Le demandeur en cassation conclut néanmoins à la recevabilité de son recours en tant que pourvoi en cassation-nullité pour cause d’excès de pouvoir.

Même si la loi modifiée du 18 février 1985 sur les pourvois et la procédure en cassation n’ouvre pas expressément la voie du pourvoi en cassation-nullité pour excès de pouvoir aux parties, Votre Cour a eu l’occasion de se prononcer sur leur recevabilité. Le parquet général renvoie à cet effet aux arrêts numéros 55/2012 pénal (numéro 3098 du registre) du 6 décembre 2012, 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, 29/2015 pénal (numéro 3503 du registre) du 11 juin 2015, 9/2016 pénal (numéro 3588 du registre) du 18 février 2016, 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016, ainsi que 11/2018 pénal (numéro 4030 du registre) du 1er mars 2018.

Vous avez retenu « que l’excès de pouvoir est la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité.

» Vous en avez déduit que ne rentrent pas dans la définition de l’excès de pouvoir les reproches suivants :

- d’une violation de la loi3 et plus particulièrement de règles de procédure, 4 - d’une violation de l’article 89 de la Constitution,5 - d’une violation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,6 -de la violation de l’article 133 de Code de procédure pénal et d’un excès de pouvoir négatif,7 -de la violation des articles 126, 126-1 et 126-2 du Code de procédure pénale,8 -de la violation de l’article 2 de la loi du 8 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les médias en combinaison avec l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,9 3 Cour de cassation, arrêt no 55/2012 pénal (numéro 3098 du registre) du 6 décembre 2012 ; Cour de cassation, arrêt no 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015 4 Cour de cassation arrêt no 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016 5 Cour de cassation, arrêt no 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, Cour de cassation, arrêt no 9/2016 pénal (numéro 3588 du registre) du 18 février 2016 ; Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020 6 Cour de cassation, arrêts nos 34/2013 pénal (numéro 3210 du registre) du 6 juin 2013, 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, 29/2015 pénal (numéro 3503 du registre) du 11 juin 2015, 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016 7 Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020 8 Cour de cassation, arrêt no 153/2020 pénal (numéro CAS-2019-00167 du registre) du 19 novembre 2020 9 Cour de cassation, arrêt no 153/2020 pénal (numéro CAS-2019-00167 du registre) du 19 novembre 2020-d’une abstention de procéder à l’examen moral de l’infraction d’abus de bien sociaux dans le cadre de l’appréciation des charges suffisantes pour ordonner le renvoi, 10 -du défaut de réponse à conclusions quant à l’appréciation du même élément moral, 11 -du refus d’ordonner des devoirs supplémentaires. 12 Dans le présent pourvoi, le demandeur en cassation formule un seul moyen de cassation qui est tiré :

- de la violation de l’article 21 de la loi du 8 juin 2004 (en ne se donnant même pas la peine d’indiquer quelle loi du 8 juin 2004 est visée par son pourvoi)13.

Il résulte de la jurisprudence indiquée ci-dessus que le moyen de cassation formulé ne rentre dans la définition de l’excès de pouvoir.

En effet, le moyen ne vise « la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité », ce qui exclut le cas de figure de l’excès de pouvoir à la base du pourvoi en cassation-nullité.

Le pourvoi est dès lors irrecevable en tant que pourvoi en cassation-nullité.

III) La décision attaquée ne satisferait pas aux conditions essentielles de son existence légale Quant au reproche que la décision attaquée ne satisferait pas aux conditions essentielles de son existence légale, le demandeur en cassation ne fournit aucun motif mettant en cause une des conditions essentielles de l’existence légale de la décision attaquée.14 Il s’ensuit que le pourvoi est également irrecevable sur cette base.

Conclusion Le pourvoi est irrecevable.

10 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 11 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 12 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 13 Pour autant que la loi du 8 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les médias soit visée, il est, à titre superfétatoire, important de noter que la Cour d’appel a correctement appliqué cette loi en renvoyant le demandeur en cassation devant une chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg en sa qualité de collaborateur au sens de cette loi 14 Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020 :

il s’agissait d’un premier pourvoi en cassation de l’actuel demandeur en cassation dans le même dossier Pour le Procureur général d’Etat, le premier avocat général, Serge WAGNER 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 115/22
Date de la décision : 14/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2022-07-14;115.22 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award