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07/07/2022 | LUXEMBOURG | N°109/22

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 07 juillet 2022, 109/22


N° 109 / 2022 pénal du 07.07.2022 Not. 14532/16/CD Numéro CAS-2021-00135 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, sept juillet deux mille vingt-deux, sur le pourvoi de :

C), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

A), demandeur au civil, défendeur en cassation, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 23 novembre 2021 sous le numéro

379/21 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant ...

N° 109 / 2022 pénal du 07.07.2022 Not. 14532/16/CD Numéro CAS-2021-00135 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, sept juillet deux mille vingt-deux, sur le pourvoi de :

C), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

A), demandeur au civil, défendeur en cassation, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 23 novembre 2021 sous le numéro 379/21 V. par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation au pénal et au civil formé par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, au nom de C), suivant déclaration du 17 décembre 2021 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 14 janvier 2022 par C) au domicile élu de A), déposé le 17 janvier 2022 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du premier avocat général Simone FLAMMANG.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné C) à une amende et à une peine d’emprisonnement ferme du chef de coups et blessures volontaires ayant causé une incapacité de travail personnel à A) et ordonné une expertise aux fins de déterminer le dommage accru à la victime. La Cour d’appel a confirmé ce jugement.

Sur la recevabilité du pourvoi Aux termes de l’article 43, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, le mémoire du défendeur au civil devra, sous peine de déchéance, être signifié à la partie civile avant d’être déposé.

Le demandeur en cassation, tout en déclarant former un pourvoi en cassation au pénal et au civil contre l’arrêt de la Cour d’appel, chambre correctionnelle, n’a pas signifié son mémoire en cassation à la partie civile constituée en cause avant le dépôt dudit mémoire, mais l’a fait signifier au domicile élu de la partie civile.

Il ne résulte d’aucun acte de procédure que A) ait élu domicile en l’étude d’un avocat.

Il s’ensuit que le demandeur en cassation est à déclarer déchu de son pourvoi au civil.

Au pénal, le pourvoi, introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

Sur l’unique moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 195-1 du Code de procédure pénale et de l’article 89 de la Constitution, en ce que la Cour d'appel a prononcé une peine d'emprisonnement ferme de 12 mois, alors que conformément à l'article 195-1 du Code de procédure pénale, en matière correctionnelle et criminelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement (…) sans sursis qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette mesure, et que conformément à l'article 89 de la Constitution, tout jugement est motivé. ».

Réponse de la Cour Vu l’article 195-1 du Code de procédure pénale.

En confirmant la peine d’emprisonnement ferme sans avoir spécialement motivé le refus d’accorder au prévenu un sursis, les juges d’appel ont violé l’article susvisé.

Il s’ensuit que l’arrêt encourt la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

déclare le demandeur en cassation déchu de son pourvoi au civil ;

reçoit le pourvoi au pénal ;

casse et annule l’arrêt rendu le 23 novembre 2021 par la Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle, sous le numéro 379/21 V. ;

déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s’en sont suivis, remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel, autrement composée ;

ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt soit transcrit sur le registre de la Cour d’appel et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt soit consignée en marge de l’arrêt annulé ;

laisse les frais de l’instance en cassation à charge de l’Etat.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, sept juillet deux mille vingt-deux, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, président, Christiane JUNCK, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Jean ENGELS, premier conseiller à la Cour d’appel, Michèle HORNICK, conseiller à la Cour d’appel, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Théa HARLES-WALCH en présence du procureur général d’Etat adjoint John PETRY et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation C) en présence du Ministère Public n° CAS-2021-00135 du registre

________________________________________________________________________

Par déclaration faite le 17 décembre 2021 au greffe de la Cour Supérieure de Justice, Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, forma un recours en cassation au pénal et au civil, au nom et pour le compte de C), contre un arrêt rendu le 23 novembre 2021 sous le numéro 379/21 V. par la Cour d’appel, cinquième chambre, siégeant en matière correctionnelle.

Cette déclaration de recours fut suivie en date du 17 janvier 2022 du dépôt d’un mémoire en cassation, signé par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, au nom et pour le compte de C).

Le pourvoi respecte le délai d’un mois courant à partir du prononcé de la décision attaquée dans lequel la déclaration de pourvoi doit, conformément à l’article 41 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, intervenir. Il respecte en outre le délai d’un mois, prévu par l’article 43 de la loi du 18 février 1885, dans lequel la déclaration du pourvoi doit être suivie du dépôt du mémoire en cassation.

Préalablement à son dépôt au greffe de la Cour, le mémoire a été signifié à la partie civile « en son domicile élu » en date du 14 janvier 2022. Il ne résulte toutefois d’aucun acte de procédure soumis à Votre Cour que la partie civile, A), aurait élu domicile en l’étude de son avocat. La signification du mémoire faite en l’étude de son mandataire, Maître Deidre DU BOIS, n’est donc pas valable et le pourvoi est irrecevable quant au volet civil de l’affaire.

Le pourvoi est cependant recevable en ce qui concerne le volet pénal.

Faits et rétroactes :

Par jugement réputé contradictoire n°946/2019 du 2 avril 2019, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, chambre correctionnelle, a condamné C) à une peine d’emprisonnement ferme de 12 mois ainsi qu’à une amende de 1.000.- euros du chef de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité de travail personnel.

Sur appel de C) et du procureur d’Etat de Luxembourg, la Cour d’appel, cinquième chambre, a, par un arrêt n°379/21 rendu le 23 novembre 2021, déclaré les appels non fondés, sauf à préciser que la durée de l’incapacité de travail subie par la victime est de 28 jours et non pas de 4 jours, tel que retenu par le premier juge. Elle a confirmé tant la peine prononcée à l’égard du prévenu que la décision prise quant au volet civil de l’affaire, renvoyée en prosécution de cause devant le tribunal d’arrondissement, au vu de l’expertise ordonnée en première instance.

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Quant aux dispositions attaquées de l’arrêt Aux termes du mémoire en cassation, l’arrêt est attaqué « en ce qu’il a dit non fondés les appels du demandeur en cassation »1.

La décision d’appel semble donc être attaquée en son intégralité. Toutefois, le moyen unique de cassation concerne exclusivement la peine prononcée à l’encontre de l’actuel demandeur en cassation et plus particulièrement le caractère ferme de la peine d’emprisonnement retenue.

Quant à l’unique moyen de cassation :

tiré de la violation de l’article 195-1 du Code de procédure pénale et de l’article 89 de la Constitution en ce que la Cour d’appel a prononcé une peine d’emprisonnement ferme de 12 mois, alors que conformément à l’article 195-1 du Code de procédure pénale, en matière correctionnelle et criminelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d’emprisonnement (…) sans sursis qu’après avoir spécialement motivé le choix de cette mesure, et que conformément à l’article 89 de la Constitution, tout jugement est motivé.

1 Mémoire en cassation, page 2, dernier alinéaLe moyen consiste à reprocher à la Cour d’appel d’avoir prononcé une peine d’emprisonnement ferme à l’encontre de l’actuel demandeur en cassation sans avoir spécialement motivé ce choix, tel que l’exige l’article 195-1 du Code de procédure pénale.

Etant donné que le moyen vise également l’article 89 de la Constitution, il concerne le défaut de motivation quant au refus d’accorder un sursis. Il s’agit donc d’un vice de forme.

Concernant les condamnations à des peines d’emprisonnement ou de réclusion criminelle fermes, l’article 195-1 du Code de procédure pénale est rédigé comme suit :

« En matière correctionnelle et criminelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d’emprisonnement ou de réclusion sans sursis qu’après avoir spécialement motivé le choix de cette mesure. Toutefois, il n’y a pas lieu à motivation spéciale lorsque la personne est en état de récidive légale. » Cette disposition légale, introduite dans le Code de procédure pénale par une loi du 20 juillet 2018, impose dorénavant au juge répressif de motiver spécialement sa décision lorsqu’il prononce une condamnation à une peine de prison ferme.

Les passages de l’arrêt attaqué relatifs à la peine se lisent comme suit :

« Les peines prononcées sont légales.

Au vu de la gravité et surtout de la gratuité du coup porté à A), la peine d’emprisonnement prononcée est également adéquate, aucun élément de la cause ne justifiant de la réduire.

Par ailleurs, c’est à juste titre que le juge de première instance a fait abstraction d’une quelconque mesure de sursis à l’exécution de cette peine d’emprisonnement. Finalement, le juge de première instance est à confirmer en ce qu’il a condamné C) à une peine d’amende de mille euros.

Le jugement entrepris est, partant, à confirmer dans son intégralité au pénal. »2 Selon la jurisprudence de Votre Cour, une décision est régulière en la forme dès lors qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré3.

En se prononçant dans les termes reproduits ci-dessus ainsi qu’en se fondant sur la gravité des faits ainsi que sur la gratuité du coup porté, les magistrats d’appel ont non seulement justifié leur décision de confirmer la durée de la peine d’emprisonnement, mais ils ont également motivé celle consistant à ne pas faire bénéficier l’actuel demandeur en cassation du sursis, tout en renvoyant à l’appréciation du juge de première instance.

Ils ont donc motivé leur décision sur le point considéré, de sorte que le moyen laisse d’être fondé.

2 Arrêt attaqué, page 10, alinéas 6 à 9 3 Voir, à titre d’illustration, concernant la motivation quant à l’article 195-1 du CPP : Cass. 10 février 2022, n° CAS-2021-00027 du registre, réponse à la seconde branche du premier moyen et au deuxième moyen réunis Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.

Pour le Procureur Général d’Etat, le premier avocat général, Simone FLAMMANG 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 109/22
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2022-07-07;109.22 ?

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