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02/12/2021 | LUXEMBOURG | N°20211202-CAS-2020-00134-141a

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 02 décembre 2021, 20211202-CAS-2020-00134-141a


N° 141 / 2021 du 02.12.2021 Numéro CAS-2020-00134 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, deux décembre deux mille vingt-et-un.

Composition:

Roger LINDEN, président de la Cour, Serge THILL, conseiller à la Cour de cassation, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Christiane JUNCK, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Sandra KERSCH, avocat général, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre:

J), demanderesse en cassation, comparant par Maît

re Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1) l’...

N° 141 / 2021 du 02.12.2021 Numéro CAS-2020-00134 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, deux décembre deux mille vingt-et-un.

Composition:

Roger LINDEN, président de la Cour, Serge THILL, conseiller à la Cour de cassation, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Christiane JUNCK, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Sandra KERSCH, avocat général, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre:

J), demanderesse en cassation, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1) l’ETAT DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG, représenté par le Ministre d’Etat, ayant ses bureaux à L-1341 Luxembourg, 2, Place de Clairefontaine, défendeur en cassation, comparant par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, 2) l’ARCHEVÊCHÉ DE LUXEMBOURG, représenté par l’Archevêque, établi à L-1623 Luxembourg, 4, rue Génistre, défendeur en cassation.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 49/20, rendu le 23 avril 2020 sous le numéro CAL-2018-00358 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, huitième chambre, siégeant en matière de droit du travail ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 5 octobre 2020 par J) à l’ARCHEVÊCHÉ DE LUXEMBOURG (ci-après « l’ARCHEVÊCHÉ ») et à l’ETAT DU GRAND-DUCHÉ DE LUXEMBOURG (ci-après « l’ETAT »), déposé le 12 octobre 2020 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en réponse signifié les 26 novembre et 3 décembre 2020 par l’ETAT à J) et à son litismandataire, déposé les 1er et 4 décembre 2020 au greffe de la Cour ;

Sur les conclusions du procureur général d’Etat adjoint John PETRY ;

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le tribunal du travail de Luxembourg avait rejeté la demande de J) tendant à voir dire qu’elle avait droit, en sa qualité d’enseignante de religion engagée par l’ARCHEVÊCHÉ suivant contrat de travail à durée indéterminée, depuis le 1er octobre 2015 à un supplément de salaire sur base de l’article 44, paragraphe 3, de la loi du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat (ci-après « la loi du 25 mars 2015 »). La Cour d’appel a confirmé ce jugement.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation, in specie de l'article 73 alinéa 3 de la loi du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l'État qui requiert que le régime de rémunération/traitement et de classement des chargés de cours de religion est similaire au régime des fonctionnaires et employés de l'Etat.

En ce que la Cour d'appel a retenu à tort notamment que Ces dispositions du contrat de travail, combinées à l'article 3 de la Convention aux termes desquels "L'enseignant de religion est engagé par l'archevêché conformément aux dispositions de la législation sur le contrat de travail des employés privés…", amènent à la conclusion que J) avait, non pas le statut d'employée de l'ETAT ou de fonctionnaire d'ETAT, mais le statut d'employée privée, qui n'est pas visé par la loi du 25 mars 2015 qui concerne les employés de l'ETAT.

De plus, il résulte des termes de l'article 73 alinéa 3 de la loi du 25 mars 2015 que les chargés de cours de religion sont expressément exclus du bénéfice des dispositions de cette loi ».

En arguant ainsi les juges d'appel ont commis une violation de la loi. ».

Réponse de la Cour Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou chaque branche doit préciser, sous peine d’irrecevabilité, la partie critiquée de la décision et ce en quoi celle-ci encourt le reproche allégué.

Les développements en droit qui, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 10 précité peuvent compléter l’énoncé du moyen, ne peuvent suppléer la carence de celui-ci au regard des éléments dont la précision est requise sous peine d’irrecevabilité.

Le moyen ne précise pas en quoi l’article 73, alinéa 3, de la loi du 25 mars 2015 a été violé.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

Sur le second moyen de cassation Enoncé du moyen première branche, « tiré de la violation, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation, in specie de l'article 10bis de la Constitution, qui énonce que .

En ce que dans l'arrêt attaqué les juges d'appel ont décidé de rejeter le moyen de la demanderesse en cassation au motif qu'une question de conformité à la Constitution ne se conçoit pas par rapport à un contrat, mais seulement par rapport à une disposition légale.

La Cour d'appel a manifestement méconnu l'article 10bis de la Constitution en refusant d'appliquer le principe d'égalité de traitement aux enseignants de religions, alors que nonobstant le principe de la liberté contractuelle, dans le cadre spécifique des relations entre l'Etat et ses administrés, les contrats et les normes réglementaires doivent faire l'objet d'un contrôle du juge par rapport aux règles législatives et constitutionnelles.

deuxième branche, « tiré de la violation, voire d'une application erronée, voire d'une fausse interprétation, in specie de l'article 10bis de la Constitution, qui énonce que Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi ».

En ce que dans l'arrêt attaqué les juges d'appel ont décidé de rejeter le moyen de la demanderesse en cassation au motif que la loi de 2015 n'est pas applicable à la demanderesse en cassation, puisqu'elle n'est pas employée ou fonctionnaire de l'Etat.

La Cour d'appel a manifestement méconnu l'article 10bis de la Constitution en refusant d'appliquer le principe d'égalité de traitement aux enseignants de religions, alors que ces derniers se trouvent dans une situation similaire à celle de tous les autres enseignants en matière de classement et de rémunération. ».

Réponse de la Cour Sur les deux branches réunies du moyen Le moyen, dans ses deux branches, fait grief aux juges d’appel d’avoir violé le principe d’égalité devant la loi inscrit à l’article 10bis de la Constitution en refusant à la demanderesse en cassation, en sa qualité d’enseignante de religion, le bénéfice des dispositions de l’article 44, paragraphe 3, de la loi du 25 mars 2015.

La discrimination alléguée trouve sa source dans les stipulations d’un contrat de droit privé conclu entre la demanderesse en cassation et l’ARCHEVÊCHÉ en vertu duquel la demanderesse en cassation n’a pas la qualité d’employée de l’Etat, mais celle d’employée privée.

La non attribution des avantages revendiqués par la demanderesse en cassation ne saurait en conséquence être contrôlée au regard de sa conformité avec la disposition constitutionnelle invoquée.

Il s’ensuit que le moyen, pris en ses deux branches, est inopérant.

Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure La demanderesse en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, sa demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

rejette le pourvoi ;

rejette la demande de la demanderesse en cassation en allocation d’une indemnité de procédure ;

la condamne aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Albert RODESCH, sur ses affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN en présence de l’avocat général Sandra KERSCH et du greffier Daniel SCHROEDER.

PARQUET GENERAL Luxembourg, 19 mars 2021 DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG

________

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation J) c/ 1) ARCHEVÊCHÉ DE Luxembourg 2) ÉTAT DU GRAND-DUCHÉ DE LUXEMBOURG (affaire n° CAS-2020-00134 du registre) Le pourvoi de la demanderesse en cassation, par dépôt au greffe de la Cour en date du 12 octobre 2020 d’un mémoire en cassation, signifié le 5 octobre 2020 aux parties défenderesses en cassation, est dirigé contre un arrêt numéro 49/20 – VIII – Travail rendu contradictoirement en date du 23 avril 2020 par la Cour d’appel, huitième chambre, siégeant en matière de droit du travail, sous le numéro CAL-2018-00358 du rôle.

Sur la recevabilité du pourvoi Le pourvoi est recevable en ce qui concerne le délai1 et la forme2.

Il est dirigé contre une décision contradictoire, donc non susceptible d’opposition, rendue en dernier ressort, qui tranche tout le principal, de sorte qu’il est également recevable au regard des articles 1 et 3 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation de 1885.

Il en suit qu’il est recevable.

1 Il ne résulte pas de pièces auxquelles vous pouvez avoir égard que l’arrêt attaqué a été signifié à la demanderesse en cassation, de sorte que le délai du pourvoi, de deux mois, prévu par l’article 7, alinéa 1, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation (la demanderesse en cassation demeurant au Grand-

Duché), qui n’a pas commencé à courir, n’a pas pu être méconnu.

2 La demanderesse en cassation a déposé au greffe de la Cour supérieure de justice un mémoire signé par un avocat à la Cour et signifié aux parties adverses antérieurement à son dépôt, de sorte que ces formalités, prévues par l’article 10, alinéa 1, de la loi précitée de 1885, ont été respectées.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, saisi par J), titulaire d’un diplôme de Bachelor en pédagogie religieuse, engagée par l’ARCHEVÊCHÉ DE LUXEMBOURG par contrat de travail en qualité de chargée de cours de religion, résilié d’un commun accord entre parties par suite de l’entrée en vigueur de la loi du 2 août 2017 portant organisation de la reprise des enseignants de religion et des chargés de cours de religion (ci-après « la loi de 2017 »)3, d’un recours dirigé contre son employeur, en présence de l’ÉTAT DU GRAND-DUCHÉ DE LUXEMBOURG, aux fins de voir dire qu’elle avait droit au bénéfice d’un supplément de traitement par suite de son droit de se voir classer, en sa qualité de détenteur d’un diplôme de Bachelor, dans le groupe indemnitaire A2, respectivement E3 du régime transitoire, sur base de l’article 44, paragraphe 3, de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’État (ci-

après « la loi de 2015 »), le tribunal de travail de Luxembourg disait la demande non fondée.

Sur appel de la requérante, la Cour d’appel confirma le jugement entrepris, tout en rejetant comme non pertinent un grief tiré de ce que le contrat de travail, en ce qu’il prévoit une rémunération inférieure à celle à laquelle ont droit les employés de l’État qui sont titulaires d’un diplôme de Bachelor, contrevient à l’article 10bis de la Constitution.

Sur le cadre juridique Une Convention du 31 octobre 1997 entre le Gouvernement et l’Archevêché de Luxembourg4 concernant l’organisation de l’enseignement religieux dans l’enseignement primaire, actuellement désigné sous le terme « enseignement fondamental », disposait :

« […] Article 3. L’archevêque peut confier l’enseignement religieux [dans les écoles publiques de l’enseignement fondamental] soit à un enseignant de religion, soit à un ministre du culte. L’enseignant de religion est engagé par l’archevêque conformément aux dispositions de la législation sur le contrat de travail des employés privés. L’État garantit, en tant que tiers-payant, la rémunération sous forme de subvention-salaire payable directement à l’enseignant de religion.

[…] »5.

La loi du 10 juillet 1998 portant approbation de la Convention précitée disposait :

« […] 3 Mémorial, A, 2017, n° 696.

4 L’Archevêché de Luxembourg, à l’époque encore Évêché, se vit reconnaître la personnalité juridique de droit public par une loi du 30 avril 1981 (Mémorial, A, 1981, n° 28, page 692). La Convention de 1997 est devenue pour l’avenir sans objet par suite de l’entrée en vigueur de la loi de 2017, qui porte organisation de la reprise des enseignants de religion et des chargés de cours de religion.

5 Mémorial, A, 1998, n° 67, page 1340.

Article 3. Les subventions-salaires des enseignants et chargés de cours de religion prévues à l’article 3 de la Convention approuvée par l’article 1er [donc la Convention précitée] sont fixées par la présente loi et prises en charge par l’État. Elles sont calculées par l’administration du personnel de l’État et versées directement par celle-

ci aux enseignants et aux chargés de cours de religion.

Article 4. Le régime des rémunérations des enseignants et des chargés de cours est fixé par règlement grand-ducal.

Pour les enseignants et chargés de cours de religion titulaires du certificat luxembourgeois de fin d’études secondaires ou d’un certificat reconnu équivalant par le Ministère de l’Éducation nationale, la rémunération maximale ne peut dépasser celle prévue au grade C2 tel que fixé à la rubrique V « Cultes » de l’annexe C de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’État.

[…] »6.

Le règlement grand-ducal du 7 août 1998 portant fixation des subventions-salaires des enseignants et chargés de cours de religion (ci-après « le règlement grand-ducal de 1998 ») disposait :

« Art. 1. Les subventions-salaires des enseignants et des chargés de cours de religion sont fixées par référence aux principes généraux déterminés au chapitre premier du règlement du Gouvernement en conseil modifié du 1er mars 1974 fixant le régime des indemnités des employés occupés dans les administrations et services de l’État, conformément aux dispositions ci-après.

[…] Art. 3. Les enseignants et les chargés de cours de religion sont classés conformément aux modalités ci-après :

A. Enseignants et chargés de cours de religion titulaires du certificat luxembourgeois de fin d’études secondaires ou d’un certificat reconnu équivalent par le Ministre d de l’Éducation Nationale :

Âge fictif de début de carrière : 21 ans Grade de début de carrière : 5 Développement ultérieur de la carrière :

- Avancement au grade 7 après 6 années de bons et loyaux services depuis le début de carrière, mais au plus tôt à l’âge de 27 ans.

- Avancement au grade 8 après 9 années de bons et loyaux services depuis le début de carrière, mais au plus tôt à l’âge de 30 ans.

6 Ces dispositions, à l’exception de l’alinéa 1 de l’article 4, ont été supprimées par l’article 27 de la loi de 2017.

- Avancement au grade 9 après 25 années de bons et loyaux services depuis le début de carrière, mais au plus tôt à l’âge de 50 ans.

[…] Art. 4. Les décisions individuelles de classement sont prises par le ministre des Cultes, sur proposition du ministre de la Fonction Publique.

[…] »7.

La loi de 2015 dispose :

« Art. 1. La présente loi détermine le régime et les indemnités des employés de l’État sans préjudice des dispositions de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’État et de la loi du 25 mars 2015 sur les traitements et les conditions et modalités d’avancement des fonctionnaires de l’État qui sont applicables aux employés de l’État.

[…] Art. 41. Sans préjudice de l’application de l’article 19, les employés assimilés aux fonctionnaires de l’État des catégories de traitement correspondantes A, B, C et D de l’Administration générale sont classés par référence au tableau indiciaire sous I.

« Administration générale » repris à l’annexe de la présente loi et conformément aux dispositions des articles 42 à 49.

[…] Art. 44. (1) La catégorie d’indemnité A, groupe d’indemnité A2, comprend les quatre sous-groupes suivants:

a) un sous-groupe administratif;

b) un sous-groupe scientifique et technique;

c) un sous-groupe éducatif et psycho-social;

d) un sous-groupe de l’enseignement.

[…] (3) Pour être classé à un emploi du sous-groupe de l’enseignement visé sous le point d) du paragraphe 1er, à l’exception de l’enseignement fondamental, l’employé doit soit être détenteur du diplôme du bachelor, soit présenter un certificat sanctionnant des 7 Ce règlement grand-ducal est devenu pour l’avenir sans objet par suite de l’entrée en vigueur de la loi de 2017, qui porte organisation de la reprise des enseignants de religion et des chargés de cours de religion.

études reconnues équivalentes correspondant à la formation exigée pour la vacance de poste sollicitée.

Pour ce sous-groupe, le niveau général comprend les grades 8, 9 et 10, et les avancements aux grades 9 et 10 se font après respectivement 4 et 7 années de grade depuis le début de carrière.

Le niveau supérieur comprend le grade 11, et l’avancement à ce grade intervient, sous réserve que toutes les conditions prévues par la loi soient remplies, après 20 années de grade depuis le début de carrière. Cet avancement est en outre lié à la condition d’avoir accompli au moins trente journées de formation continue attestées par des certificats de perfectionnement établis par le ministre ayant l’Education nationale dans ses attributions, ou d’avoir suivi une autre formation reconnue équivalente ou d’en avoir été dispensé pour des raisons dûment motivées par celui-ci.

Pour les employés de ce sous-groupe, le grade 11 est allongé d’un douzième échelon ayant l’indice 400.

[…] Art. 58. Les carrières visées au point III. «Tableau transitoire des carrières» de l’annexe et dans lesquelles sont classés les employés en activité de service, en congé de maternité, en congé parental ou en congé sans indemnité au moment de l’entrée en vigueur de la présente loi sont intégrées comme suit dans les catégories, groupes et sous-groupes d’indemnité nouvellement créés et définis aux articles 43 à 49.

Les anciennes dénominations de carrières sont remplacées par les catégories, groupes et sous-groupes d’indemnité correspondants nouveaux.

1. Catégorie d’indemnité A :

[…] b) groupe d’indemnité A2 :

[…] - le sous-groupe de l’enseignement regroupe les anciennes carrières des chargés de cours classés aux grades E3 et E4, ainsi que l’ancienne carrière de chargé d’éduction classé au grade E3 ;

[…] Art. 73. […] Pour les chargés de cours de religion, les dispositions de l’article 23, paragraphe 1er, de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’État restent applicables.

[…] Annexe […] III. Tableau transitoire des carrières […] Section IV. Chargés de cours des différents ordres de l’enseignement public et des administrations et services de l’État Les chargés de cours sont classés, conformément aux dispositions ci-après et suivant la fonction à laquelle correspond la tâche qui leur est assignée, dans l’un ou l’autre des grades E1, E2, E3, E4, E5 et E6 qui sont considérés comme grades de début de carrière.

Les chargés de cours qui remplissent toutes les conditions d’études et d’examens prescrites pour la nomination à une des fonctions classées aux grades E2, E3, E4, E5, E6 et E7 ou pour l’admission au stage d’une de ces fonctions sont classés dans le grade immédiatement inférieur à celui où est classée la fonction correspondante, sous réserve des dispositions suivantes :

[…] c) les chargés de cours qui sont titulaires d’un diplôme luxembourgeois de fin d’études secondaires ou de fin d’études secondaires techniques ou d’un certificat reconnu équivalent par le ministre ayant l’Education nationale dans ses attributions ainsi que d’un certificat sanctionnant la réussite d’un cycle unique de trois années d’études supérieures au moins sont classés au grade E3 ;

[…] ».

La loi de 2017 dispose :

« Art. 1. La présente loi s’applique aux enseignants de religion et aux chargés de cours de religion en service au moment de l’entrée en vigueur de la présente loi, ayant signé un contrat d’engagement à durée indéterminée avant le 15 septembre 2017 avec l’Archevêché de Luxembourg et ayant bénéficié de subventions-salaires selon les dispositions de la loi modifiée du 10 juillet 1998 portant approbation de la Convention du 31 octobre 1997 entre le Gouvernement, d’une part, et l’Archevêché, d’autre part, concernant l’organisation de l’enseignement religieux dans l’enseignement primaire.

Les enseignants de religion et les chargés de cours de religion, dénommés ci-après « l’agent », peuvent bénéficier des offres de reprises détaillées ci-après pendant une durée de trois ans à compter de la date d’introduction du cours « vie et société » dans l’enseignement fondamental.

[…] ».

Sur le litige La demanderesse en cassation, titulaire d’un diplôme de Bachelor en pédagogie religieuse, a été engagée à partir de septembre 2013 par l’Archevêché de Luxembourg en qualité de chargée de cours de religion dans l’enseignement fondamental8, ce lien d’emploi ayant été résilié d’un commun accord avec effet au 15 septembre 2017, suite à l’entrée en vigueur de la loi de 2017 portant organisation de la reprise par l’État des enseignants de religion et des chargés de cours de religion9.

Le contrat stipulait que la rémunération de la demanderesse en cassation était fixée en exécution d’une décision individuelle de classement du Ministre des Cultes, sur proposition du Ministre de la Fonction publique, prise sur base de l’article 4 du règlement grand-ducal de 199810.

L’intéressée a été classée par décision ministérielle dans le grade 5 prévu par l’article 3, A, du règlement grand-ducal précité11, relatifs aux enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental titulaires du certificat luxembourgeois de fin d’études secondaires.

Le contrat précisait qu’il était régi par les dispositions du Code du travail ainsi que par celles de la loi de 199812.

La loi de 2015 ayant dans son article 44, paragraphe 3, introduit pour les employés de l’État relevant de la catégorie de l’enseignement détenteur d’un diplôme de Bachelor la possibilité d’être classé dans la catégorie d’indemnité A, groupe A2, sinon, conformément à l’article 58 et à la Section IV du tableau transitoire des carrières annexé à la loi, dans le groupe E3, la demanderesse en cassation, titulaire d’un diplôme de Bachelor en pédagogie religieuse demanda à son employeur, donc à l’Archevêché de Luxembourg, de la faire bénéficier d’un classement correspondant13. Suite au refus de l’employeur de donner suite à cette demande, elle introduisit un recours devant le tribunal du travail aux fins de se voir dire qu’elle avait droit à un tel classement pour la période postérieure à l’entrée en vigueur de la loi de 2015 et antérieure à la résiliation de commun accord du contrat de travail suite à l’entrée en vigueur de la loi de 2017 et de voir condamner son employeur à lui payer le supplément de traitement redû sur base du traitement des employés de l’État détenteurs d’un diplôme de Bachelor et classés dans le sous-groupe de l’enseignement dans le groupe d’indemnité A2, respectivement E3 du régime transitoire14.

Le tribunal du travail déclara cette demande non fondée aux motifs que la demanderesse en cassation n’avait pas la qualité d’employée de l’État, donc n’était pas soumise à la loi de 2015 et de son article 44, paragraphe 3, et qu’il n’y avait aucune discrimination au sens de l’article 10bis de la Constitution, créée par l’application d’une loi15.

Sur appel de la demanderesse en cassation, la Cour d’appel confirma le jugement entrepris. Elle constata que l’intéressée avait été liée par un contrat de travail de droit privé régi par le Code du travail ainsi que par la loi de 1998 et que la loi de 2015 ne lui était pas applicable puisqu’elle 8 Arrêt attaqué, page 2, premier alinéa.

9 Idem et loc.cit.

10 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

11 Idem, même page, dernier alinéa.

12 Idem, page 11, dernier alinéa.

13 Idem, page 3, premier et deuxième alinéas.

14 Idem, même page, troisième alinéa.

15 Idem, même page, dernier alinéa.

n’avait pas le statut d’employé de l’État et que l’article 73, alinéa 3, de la loi de 2015 exclut formellement les chargés de cours de religion de son domaine d’application16.

Elle rejeta le moyen tiré de ce que le contrat de travail de la demanderesse en cassation violerait l’article 10bis de la Constitution dès lors qu’une telle violation ne se concevrait pas par rapport à un contrat, qu’il ne serait pas allégué que la loi de 2015 serait discriminatoire et que cette loi ne lui serait pas applicable17.

Sur le premier moyen de cassation Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 73, alinéa 3, de la loi de 2015, en ce que la Cour d’appel rejeta la prétention de la demanderesse en cassation de se voir appliquer le classement dans la catégorie réservée par l’article 44, paragraphe 3, de la loi de 2015 aux enseignants titulaires d’un diplôme de Bachelor aux motifs que les dispositions du contrat de travail ayant lié la demanderesse en cassation à l’Archevêché de Luxembourg, « combinées à l’article 3 de la Convention aux termes desquels « L’enseignant de religion est engagé par l’Archevêché conformément aux dispositions de la législation sur le contrat de travail des employés privés…. », amènent à la conclusion que [la demanderesse en cassation] avait, non pas le statut d’employée de l’ÉTAT ou de fonctionnaire d’ÉTAT, mais le statut d’employée privée, qui n’est pas visé par la loi du 25 mars 2015 qui concerne les employés de l’ÉTAT [ce à quoi s’ajoute que] il résulte des termes de l’article 73 alinéa 3 de la loi du 25 mars 2015 que les chargés de cours de religion sont expressément exclus du bénéfice des dispositions de cette loi »18, alors que, ainsi qu’il n’est exposé que dans la discussion du moyen, l’Archevêché de Luxembourg est, au regard de la loi du 30 avril 1981 lui conférant la personnalité juridique, une personne morale de droit public, de sorte qu’il est un « démembrement autonome de l’État »19, une « entité parapublique (ou transparente), derrière laquelle l’État employeur agit en réalité dans le seul but de s’affranchir des règles du droit public »20, de sorte que la loi de 2015 lui est applicable, l’applicabilité des dispositions régissant les conditions de rémunération des employés de l’État, dont la loi de 2015, étant par ailleurs confirmée par le fait que l’article 3 de la loi de 1998 dispose que les subventions-salaires des enseignants et chargés de religion sont prises en charge par l’État, calculées par l’administration du personnel de l’État et versées directement par celle-ci aux enseignants et chargés de cours de religion, que l’article 1er du règlement grand-ducal de 1998 dispose que les subventions-salaires des enseignants et des chargés de cours de religion sont fixées par référence aux principes généraux déterminés au chapitre premier du règlement du Gouvernement en conseil modifié du 1er mars 1974 fixant le régime des indemnités des employés occupés dans les administrations et services de l’État et que l’article 4 du règlement grand-ducal de 1998 dispose que les décisions individuelles de classement sont prises par le Ministre des Cultes, sur proposition du Ministre de la Fonction publique.

Dans son premier moyen, la demanderesse en cassation expose que la Cour d’appel par sa décision a violé la disposition visée, sans toutefois préciser en quoi cette violation aurait consisté. Cette explication n’est apportée que dans la discussion du moyen.

16 Idem, page 12, deuxième au dernier alinéas.

17 Idem, page 13, deuxième au cinquième alinéas.

18 Idem, page 12, antépénultième et avant-dernier alinéas.

19 Mémoire en cassation, page 5, sous « Discussion du moyen », dernier alinéa, premier tiret.

20 Idem, même page, sous « Discussion du moyen », troisième alinéa.

Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou chaque branche de moyen doit préciser, sous peine d’irrecevabilité, la partie critiquée de la décision et ce en quoi celle-ci encourt le reproche allégué.

Le moyen ne précise pas en quoi l’article 73, alinéa 3, de la loi de 2015 a été violé.

Les développements en droit qui, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 10 précité peuvent compléter l’énoncé du moyen, ne peuvent suppléer la carence de celui-ci au regard des éléments dont la précision est requise sous peine d’irrecevabilité.

Il en suit que le moyen est irrecevable21.

A titre subsidiaire, il est relevé que la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’avoir violé l’article 73, alinéa 3, de la loi de 2015.

Celle-ci dispose, comme rappelé ci-avant, que « Pour les chargés de cours de religion, les dispositions de l’article 23, paragraphe 1er, de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’État restent applicables ».

Cet article 23 de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’État (ci-après « la loi de 1963 ») dispose que :

« Art. 23. (1). Les indemnités revenant aux stagiaires, employés temporaires et autres agents au service de l’Etat non visés par la présente loi sont fixées par règlement grand-

ducal par référence aux règles et dans les limites prévues par celles-ci. Ce règlement peut avoir un effet rétroactif en tant qu’il a pour objet de prendre des dispositions correspondant à celles applicables aux fonctionnaires de l’Etat.

[…] »22.

L’article 4 de la loi de 1998 disposait, ainsi qu’il a été rappelé ci-avant, que « Le régime des rémunérations des enseignants et des chargés de cours est fixé par règlement grand-ducal [et que, s’agissant de ce qui est pertinent pour le cas d’espèce] Pour les enseignants et chargés de cours de religion titulaires du certificat luxembourgeois de fin d’études secondaires ou d’un certificat reconnu équivalant par le Ministère de l’Éducation nationale, la rémunération maximale ne peut dépasser celle prévue au grade C2 tel que fixé à la rubrique V « Cultes » de l’annexe C de la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l’État ». Ce régime des rémunérations a été défini par le règlement grand-ducal de 1998, qui trace un cadre qui s’inspire, par analogie, de celui applicable aux agents de l’État.

Le régime des rémunérations de ces catégories de personnes ayant étant défini par le règlement grand-ducal de 1998, la loi de 2015 leur était inapplicable, ainsi que le précise formellement l’article 73, alinéa 3, de celle-ci.

21 Voir, à titre d’illustration : Cour de cassation, 21 janvier 2021, n° 07/2021, numéro CAS-2019-00117 du registre (réponse au premier moyen).

22 Un texte actualité est publié sur le site internet Legilux.public.lu sous l’adresse suivante : Code de la fonction publique - Legilux (public.lu) (consulté le 19 mars 2021), page 255.

La Cour d’appel, en constatant le défaut d’applicabilité de cette loi à la demanderesse en cassation, formellement prévu par l’article 73, alinéa 3, de celle-ci, a donc correctement appliqué cette dernière.

Il en suit, à titre subsidiaire, que le moyen n’est pas fondé.

Dans un ordre encore plus subsidiaire, il est observé que le moyen repose sur la prémisse que les enseignants et chargés de cours de religion engagés par l’Archevêché sur base de la Convention de 1997 et de la loi ainsi que du règlement grand-ducal de 1998 sont à considérer comme des employés de l’État parce que l’Archevêché, en tant que personne morale de droit public, serait un démembrement de l’État.

Cette prémisse repose sur une mauvaise compréhension des textes.

L’Archevêché a été reconnu par une loi du 30 avril 1981 comme « une personne juridique de droit public »23.

Cette attribution du statut de personne morale de droit public a été motivée comme suit :

« Il doit s’agir de la personnalité de droit public (« Persönlichkeit des öffentlichen Rechts ») et non de droit privé, étant donné que les cultes présentent un intérêt public certain.

L’art. 19 de la Constitution garantit, en effet, non seulement la liberté des cultes, mais encore celle de leur exercice public. Par cette disposition la Constitution se refuse à enfermer les cultes dans la seule sphère privée et les reconnaît implicitement comme éléments de l’ordre public dignes d’être protégés par la loi. »24.

Le Conseil d’Etat partagea cette analyse en relevant que :

« L’Église est appelée à assurer un service qui tend à la satisfaction d’un besoin collectif et d’utilité générale et l’évêché est chargé de la gestion, de l’entretien et de la conservation des biens consacrés du culte. Il paraît en conséquence justifié que l’évêché revête la forme d’un établissement public. »25.

La reconnaissance de cette qualité de personne de droit public s’explique dans le contexte des articles 19, 22 et 106 de la Constitution. L’article 19 garantit la liberté des cultes, y compris leur exercice public. L’article 22 dispose que « les rapports de l’Église avec l’État font l’objet de conventions à soumettre à la Chambre des Députés pour les dispositions qui nécessitent son intervention ». L’article 106 dispose que « les traitements et pensions des ministres des cultes sont à charge de l’État et réglés par la loi ».

La Convention de 1997 constitue à ce titre une Convention visée par l’article 22 de la Constitution. C’est donc en application de ces obligations constitutionnelles que l’État a, dans 23 Loi, citée ci-avant dans la note n° 4, du 30 avril 1981 conférant la personnalité juridique à l’Évêché de Luxembourg, article 1er.

24 Exposé des motifs du projet de loi n° 2468 ayant donné lieu à la loi du 30 avril 1981 (Document parlementaire n° 2468, page 2, sous « Exposé des motifs », quatrième et cinquième alinéas).

25 Avis du Conseil d’Etat sur le projet de loi n° 2468 ayant donné lieu à la loi du 30 avril 1981 (Document parlementaire n° 2468, page 3, sous « Article 1er »).

cette Convention, « garanti[…], en tant que tiers-payant, la rémunération sous forme de subvention-salaire payable directement à l’enseignant de religion »26, qui « est engagé par l’Archevêché conformément aux dispositions de la législation sur le contrat de travail des employés privés »27.

L’attribution à l’Archevêché de la personnalité morale de droit public est « un emprunt du droit allemand »28. L’article 140 de la loi fondamentale allemande (« Grundgesetz für die Bundesrepublik Deutschland ») déclare applicable certaines dispositions de la Constitution allemande du 11 août 1919, dite Constitution de Weimar, parmi lesquelles figure l’article 137 de cette Constitution, qui dispose dans son paragraphe 5 que les églises ou cultes demeurent des organismes de droit public29.

L’attribution de la personnalité morale de droit public est donc dans ce contexte à comprendre comme la reconnaissance de l’intérêt public des activités de l’Eglise catholique. Elle a pu être décrite en Allemagne comme « le « statut du symbole » »30. Elle s’explique par ailleurs dans le contexte allemand par le pouvoir exorbitant de droit commun reconnu, par l’article 137, paragraphe 6, de la Constitution de Weimar, auquel renvoie l’article 140 de la loi fondamentale allemande, aux cultes constitués comme personnes morales de droit public de prélever des impôts. Ces cultes jouissent par ailleurs, sur base de l’article 137, paragraphe 3, de la Constitution de Weimar, d’une indépendance dans la gestion de leurs affaires sous réserve du respect des lois.

L’attribution de la personnalité morale de droit public n’est donc pas à comprendre comme un assujettissement de l’Église, en l’occurrence de l’Archevêché, à l’État ou sa transformation en branche du gouvernement ou service de l’État. Il ne saurait donc être déduit de la reconnaissance à l’Archevêché de la personnalité morale de droit public que ce dernier est à considérer comme un démembrement de l’État.

Il n’est, partant, pas pertinent de déduire de ce statut que les enseignants et chargés de cours de religion, qui sont par ailleurs, sur base de l’article 3 de la Convention de 1997 liés à 26 Article 3 de la Convention de 1997.

27 Idem et loc.cit.

28 Alexis PAULY, Eglises et Etat au Luxembourg, Thèse de doctorat, Strasbourg, 1988, page 83, premier alinéa.

29 Idem, et loc.cit. L’article 140 de la loi fondamentale allemande dispose que: « Die Bestimmungen der Artikel 136, 137, 138, 139 und 141 der deutschen Verfassung vom 11.August 1919 sind Bestandteil dieses Grundgesetzes ». L’article 137 de la Constitution allemande du 11 août 1919 dispose que : « Art. 137. (1) Es besteht keine Staatskirche. (2) Die Freiheit der Vereinigung zu Religionsgemeinschaften wird gewährleistet. Der Zusammenschluss von Religionsgesellschaften innerhalb des Rechtsgebiets unterliegt keinen Beschränkungen. (3) Jede Religionsgesellschaft ordnet und verwaltet ihre Angelegenheiten selbständig innerhalb der Schranken des für alle geltenden Gesetzes. Sie verleiht ihre Ämter ohne Mitwirkung des Staates oder der bürgerlichen Gemeinde.

(4) Religionsgesellschaften erwerben die Rechtsfähigkeit nach den allgemeinen Vorschriften des bürgerlichen Rechtes. (5) Die Religionsgesellschaften bleiben Körperschaften des öffentlichen Rechts, soweit sie solche bisher waren. Anderen Religionsgesellschaften sind auf ihren Antrag gleiche Rechte zu gewähren, wenn sie durch ihre Verfassung und die Zahl ihrer Mitglieder die Gewähr der Dauer bieten. Schließen sich mehrere derartige öffentlich-rechtliche Religionsgesellschaften zu einem Verbande zusammen, so ist auch dieser Verband eine öffentlich-rechtliche Körperschaft. (6) Die Religionsgesellschaften welche Körperschaften des öffentlichen Rechtes sind, sind berechtigt, auf Grund der bürgerlichen Steuerlisten nach Maßgabe des landesrechtlichen Bestimmungen Steuern zu erheben. (7) Den Religionsgesellschaften werden die Vereinigungen gleichgestellt, die sich die gemeinschaftliche Pflege einer Weltanschauung zur Aufgabe machen. (8) Soweit die Durchführung dieser Bestimmungen eine weitere Regelung erfordert, liegt diese der Landesgesetzgebung ob. » (c’est nous qui soulignons).

30 Alexis PAULY, précité, page 83, deuxième alinéa, citant l’auteur allemand A. HOLLERBACH.

l’Archevêché par un contrat de travail conclu « conformément aux dispositions de la législation sur le contrat de travail des employés privés », sont à assimiler à des employés de l’État.

Il en suit, à titre encore plus subsidiaire, que le moyen n’est pas fondé pour ce motif supplémentaire.

Sur le deuxième moyen de cassation Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 10bis de la Constitution, en ce que la Cour d’appel a rejeté le moyen de la demanderesse en cassation tiré de ce que le contrat de travail de celle-ci violerait l’article 10bis de la Constitution aux motifs qu’une telle violation ne se conçoit pas par rapport à un contrat, qu’il n’est pas allégué que la loi de 2015 est discriminatoire et qu’en tout état de cause cette loi n’est pas applicable à la demanderesse en cassation, qui n’est pas employée ou fonctionnaire de l’État31, alors que, première branche, la disposition visée doit faire l’objet d’un contrôle du juge dans le cadre spécifique des relations entre l’État et ses administrés, l’Archevêché étant un établissement public, « démembrement, même relativement autonome, de l’État lui-même »32, « derrière [lequel] c’est l’État qui agit »33 puisqu’il constitue « en réalité un montage juridique dont le seul objectif est de se soustraire de l’application de ses propres règles »34 et que, seconde branche, la demanderesse en cassation, prise en sa qualité de chargée de cours de religion soumise à la Convention de 1997 et à la loi ainsi qu’au règlement grand-ducal de 1998, se trouve du point de vue de son classement et de sa rémunération dans une situation similaire à celle des enseignants relevant de la loi de 2015.

Devant les juges du fond, la demanderesse en cassation avait soutenu que le contrat de travail qui la liait à l’Archevêché aurait méconnu l’article 10bis de la Constitution en ce que les enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental qui, comme la demanderesse en cassation, étaient titulaires d’un diplôme de Bachelor en pédagogie religieuse, étaient classés et rémunérés, sur base de l’article 3, A, du règlement grand-ducal de 1998, comme s’ils n'étaient que titulaires d’un certificat de fin d’études secondaires, tandis que les enseignants de l’enseignement fondamental engagés comme employés de l’État qui sont titulaires d’un diplôme de Bachelor sont classés et rémunérés, sur base de l’article 44, paragraphe 3, de la loi de 2015, d’une façon plus favorable que les titulaires d’un certificat de fin d’études secondaires35.

La Cour d’appel rejeta ce moyen aux motifs « qu’une question de conformité à la Constitution ne se conçoit pas par rapport à un contrat mais seulement par rapport à une disposition légale »36, que « si [la demanderesse en cassation] précise dans ses conclusions […] que sa demande est fondée sur la loi de 2015, elle ne fait pas plaider que cette loi serait inconstitutionnelle »37 et que « en tout état de cause, cette loi ne lui est pas applicable, puisqu’elle n’est pas employée ou fonctionnaire de l’État »38.

31 Arrêt attaqué, page 13, deuxième au cinquième alinéa.

32 Mémoire en cassation, page 7, dernier alinéa.

33 Idem, page 8, cinquième alinéa.

34 Idem et loc.cit.

35 Arrêt attaqué, page 4, septième alinéa.

36 Idem, page 13, troisième alinéa.

37 Idem, même page, quatrième alinéa.

38 Idem et loc.cit.

La demanderesse en cassation critique ces motifs en soutenant, dans le cadre d’une première branche du moyen, que le contrat qui l’a liée à l’Archevêché est à assimiler à un contrat liant un employé de l’État à ce dernier puisque l’Archevêché, qui constitue une personne morale de droit public, est un démembrement de l’État, de sorte que la discrimination alléguée avait pour objet les relations entre l’État et ses employés. Dans le cadre d’une seconde branche, elle soutient que les enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental se trouvent, du point de vue de leur classement et de leur rémunération, dans une situation comparable à celle des enseignants de l’enseignement fondamental ayant le statut d’employés de l’État.

Sur les deux branches du moyen réunies La discrimination alléguée consiste dans le refus par l’Archevêché, pris en sa qualité d’employeur de la demanderesse en cassation, de faire bénéficier celle-ci des avantages découlant de l’article 44, paragraphe 3, de la loi de 2015. Elle trouve donc sa source dans un contrat.

Suivant votre jurisprudence constante, l’article 10bis de la Constitution est dépourvu de pertinence pour sanctionner une discrimination alléguée résultant des stipulations d’un contrat39.

Il en suit que le moyen est inopérant.

A titre subsidiaire, donc à supposer que la discrimination alléguée trouve sa source dans la loi, plus particulièrement dans la non-applicabilité de l’article 44, paragraphe 3, de la loi de 2015 aux enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental titulaires d’un diplôme de Bachelor en pédagogie religieuse, il y a lieu de déterminer si les deux catégories de personnes, à savoir, d’une part, les enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental titulaires d’un diplôme de Bachelor en pédagogie religieuse et, d’autre part, les enseignants de l’enseignement fondamental titulaires d’un diplôme de Bachelor se trouvent dans une situation comparable.

La première catégorie de personnes est liée à l’Archevêché par un contrat de travail de droit privé. Cette qualification est prévue par l’article 3 de la Convention de 1997. Elle résulte par ailleurs, en l’espèce, suivant les constatations de la Cour d’appel, des stipulations du contrat de travail de la demanderesse en cassation40. Elle explique pourquoi la demanderesse en cassation a saisi en l’espèce la juridiction de travail et non le tribunal administratif et pourquoi les juridictions de travail se sont déclarées compétentes pour connaître du litige41. Sa remise en cause par la demanderesse en cassation impliquerait l’incompétence de ces juridictions.

La seconde catégorie de personnes est liée par un contrat d’emploi avec l’État, donc par un contrat de travail de droit public.

39 Cour de cassation, 22 mars 2012, n° 17/12, numéro 2954 du registre (réponse au troisième moyen) ; idem, 11 avril 2013, n° 23/13, numéro 3161 du registre (réponse au deuxième moyen).

40 Arrêt attaqué, 12, cinquième alinéa.

41 Idem, page 3, avant-dernier alinéa, et page 9, avant-dernier alinéa, à page 10, deuxième alinéa. L’Archevêché avait soutenu l’incompétence des juridictions du travail (idem, page 5, huitième alinéa).

La demanderesse en cassation fait soutenir que les enseignants et chargés de cours de religion sont en réalité également liés par un contrat d’emploi avec l’État, donc par un contrat qui est susceptible de relever de la loi de 2015. A l’appui de cette thèse elle fait exposer que l’Archevêché, qui est une personne morale de droit public, constitue un démembrement de l’État. Il a été vu ci-avant, dans le cadre de la discussion du premier moyen que cette analyse procède d’une mauvaise compréhension de la loi du 30 avril 1981 conférant la personnalité juridique à l’Évêché de Luxembourg, devenu Archevêché. L’attribution par cette loi de la personnalité morale de droit public à l’Archevêché n’a pas visé à transformer l’Église en un démembrement de l’État, ce qui aurait été une monstruosité constitutionnelle, mais, tout au contraire, à reconnaître, sur le modèle du droit public allemand, l’intérêt public des activités de l’Eglise, dont le libre exercice, protégé de toute ingérence indue par l’État, est garanti par l’article 19 de la Constitution. Il n’est donc pas pertinent de vouloir déduire de cette loi que les salariés de l’Archevêché seraient à assimiler à des employés de l’État.

En faveur de la comparabilité des situations, il ne saurait non plus être tiré argument du fait que l’État est le débiteur de la rémunération des enseignants et chargés de cours de religion et du régime de leurs rémunérations. S’il est vrai que, sur base de l’article 3 de la Convention de 1997, ces rémunérations ont été directement payées par l’État sous forme de subventions-

salaires et que, sur base de l’article 1 du règlement grand-ducal de 1998, le régime de ces rémunérations s’est inspiré de celui applicable aux employés de l’État, il reste que ce régime ne s’est appliqué que par analogie, à titre de référence en ce qui concerne ses principes généraux.

La Convention, conclue par l’Église et l’État sur base de l’article 22 de la Constitution, et ses dispositions de mise en œuvre ne prévoient pas une assimilation des enseignants et chargés de cours de religion aux enseignants ordinaires. Ainsi l’article 4 de la loi de 1998 se limite à préciser que le régime des rémunérations des premiers est fixé par règlement grand-ducal et à définir, à titre d’illustration, comme seule limite du pouvoir réglementaire de ne pas prévoir, pour les enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental titulaires d’un certificat de fin d’études secondaires, une rémunération maximale qui dépasse celle prévue au grade C2 à la rubrique V « Cultes » de l’annexe de la loi de 1963. Le règlement grand-ducal de 1998 définit, sur base de cette prémisse, dans son article 3, A, pour ces enseignants une carrière ad hoc. Le régime des rémunérations des employés de l’État ne constitue à cet égard qu’une source d’inspiration, applicable par analogie, ainsi que le prévoit l’article 1 de ce règlement grand-ducal. Ce défaut de complète assimilation des enseignants et chargés de cours de religion aux enseignants ordinaires s’explique parce que les premiers sont des salariés de droit privé, ainsi qu’il est prévu par l’article 3 de la Convention, et que l’obligation de l’État de payer leurs rémunérations ne découle pas de leur assimilation à des employés de l’État, mais d’un engagement de l’État pris à l’égard de l’Église dans le cadre d’une Convention conclue sur base de l’article 22 de la Constitution. Cet engagement ne s’étend que à ce qui y est prévu.

Or, il ne résulte ni de la Convention de 1997, ni de la loi et du règlement grand-ducal de 1998 que les enseignants et chargés de cours de religion, qui sont des salariés de droit privé engagés par l’Archevêché, sont à assimiler du point de vue de leur carrière et de leurs conditions de rémunération en tous points aux employés de l’État. Le recours au régime des rémunérations de ces derniers ne constitue, au regard de l’article 1 du règlement grand-ducal de 1998, qu’un critère de référence, permettant de mettre en œuvre le régime ad hoc de ces enseignants, prévu par la Convention et les instruments qui l’ont exécutée.

Relevant d’un statut juridique différent, les deux catégories de personnes ne se trouvent pas dans une situation comparable.

Il s’ajoute qu’il n’est même pas établi qu’elles se trouvent dans une situation factuelle comparable. L’État avait invoqué en instance d’appel et a rappelé dans son mémoire en réponse que le diplôme de Bachelor dont est titulaire la demanderesse en cassation ainsi que les autres enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental, à savoir un Bachelor en pédagogie religieuse, ne serait pas de nature à ouvrir droit aux conditions de rémunération plus favorables prévues par l’article 44, paragraphe 3, de la loi de 2015, qui supposeraient la détention d’un diplôme de Bachelor en sciences de l’éducation tandis que le Bachelor en pédagogie religieuse ne serait pas reconnu par l’État42.

Comme la situation des deux catégories de personnes n’est, pour les motifs précités, pas comparable, l’article 44, paragraphe 3, de la loi de 2015, en ce qu’il ne s’applique pas aux enseignants et chargés de cours de religion de l’enseignement fondamental titulaires d’un Bachelor en pédagogie religieuse ne saurait méconnaître l’article 10bis de la Constitution. Cette question de constitutionnalité est par ailleurs dénuée de tout fondement au sens de l’article 6, alinéa 2, sous b), de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour constitutionnelle.

Il en suit, à titre subsidiaire, que le moyen n’est pas fondé.

Conclusion :

Le pourvoi est recevable, mais il est à rejeter.

Pour le Procureur général d’Etat Le Procureur général d’Etat adjoint John PETRY 42 Idem, page 7, quatrième alinéa, et Mémoire en réponse, page 6, quatrième alinéa.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20211202-CAS-2020-00134-141a
Date de la décision : 02/12/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;Cour de cassation;arret;2021-12-02;20211202.cas.2020.00134.141a ?

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