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26/11/2020 | LUXEMBOURG | N°160/20

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 26 novembre 2020, 160/20


N° 160 / 2020 du 26.11.2020 Numéro CAS-2019-00147 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-six novembre deux mille vingt.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Paul VOUEL, conseiller à la Cour d’appel, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, Isabelle JUNG, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

la société anonyme SOC1), établie et ayant

son siège social à (…), représentée par son conseil d’administration, inscrite au registre...

N° 160 / 2020 du 26.11.2020 Numéro CAS-2019-00147 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-six novembre deux mille vingt.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Paul VOUEL, conseiller à la Cour d’appel, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, Isabelle JUNG, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

la société anonyme SOC1), établie et ayant son siège social à (…), représentée par son conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro (…), demanderesse en cassation, comparant par Maître Nicolas THIELTGEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, assisté de Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation de Belgique, demeurant à B-4020 Liège, 11, rue Chaudfontaine, et de Maître Emmanuel Piwnica, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation de France, demeurant à F-75017 Paris, 70, boulevard de Courcelles, et :

1) la société en commandite par actions SOC2), établie et ayant son siège social à (…), inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro (…), représentée par son gérant commandité, la société anonyme soc5), ayant son siège social à (…), elle-même représentée par son conseil d’administration, défenderesse en cassation, comparant par Maître Patrick KINSCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, assisté de la société en commandite simple KLEYR GRASSO, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente instance par Maître Marc KLEYR, avocat à la Cour, 2) la société d’investissement à capital variable ayant adopté la forme d’une société en commandite par actions SOC3), établie et ayant son siège social à (…), inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro (…), représentée par son administrateur provisoire Maître X, avocat à la Cour, demeurant à (…), 3) la société anonyme SOC4), établie et ayant son siège social à (…), inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro (…), représentée par son administrateur provisoire Maître X, avocat à la Cour, demeurant à (…), défenderesses en cassation, comparant par Maître Moritz GSPANN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, assisté de Maître Patrick GEORTAY et de Maître Guy LOESCH, avocats à la Cour, les deux demeurant à Luxembourg.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 112/19, rendu le 10 juillet 2019 sous le numéro 43534 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 19 septembre 2019 par la société anonyme SOC1) (ci-après « la société SOC1) ») à la société en commandite par actions SOC2) (ci-après « la société SOC2) » ), à la société d’investissement à capital variable ayant adopté la forme d’une société en commandite par actions SOC3) (ci-

après « la société SOC3) », à la société anonyme SOC4) (ci-après « la société SOC4) » ), à Maître X, pris en sa qualité d’administrateur provisoire de la société SOC3) et de la société SOC4) (ci-après « l’administrateur provisoire »), et à Maître Patrick KINSCH, pris en sa qualité d’avocat de la société SOC2), déposé le 20 septembre 2019 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 18 novembre 2019 par la société SOC2) à la société SOC1), à la société SOC3) et à la société SOC4), déposé le 19 novembre 2019 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 18 novembre 2019 par la société SOC3) et la société SOC4) à la société SOC1) et à la société SOC2), déposé le 19 novembre 2019 au greffe de la Cour ;

Sur le rapport du conseiller Eliane EICHER et les conclusions du procureur général d’Etat adjoint John PETRY ;

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, la société SOC1), qui appartient à la famille A), et la société SOC2), qui appartient à la famille B), sont les associées commanditaires du fonds d’investissement spécialisé SOC3) (ci-après « le Fonds »), géré par son associée commanditée, la société SOC4) dont le capital social est détenu pour moitié par A) et pour moitié par B). A l’époque des faits, A) et B) étaient les administrateurs délégués de la société SOC4).

Les sociétés SOC1) et SOC2) avaient transféré au Fonds des actifs immobiliers qui étaient soit communs aux deux sociétés, soit appartenaient à titre privatif à une des deux sociétés.

Le Fonds est composé de six compartiments, les trois premiers destinés à recueillir définitivement les actifs communs aux sociétés SOC1) et SOC2), les compartiments 4 et 5 destinés à se voir allouer définitivement les actifs privatifs de chaque société et le compartiment 6, un compartiment commun mixte, destiné à recueillir, à titre transitoire, l’ensemble des actifs transférés au Fonds, communs ou privatifs, avant leur transfert définitif dans les compartiments de destination.

La société SOC1) avait saisi le tribunal d’arrondissement de Luxembourg d’une demande dirigée contre les sociétés SOC3), SOC4) et SOC2) tendant à voir mettre en application la cinquième résolution adoptée le 5 octobre 2012 par le conseil d’administration de la société SOC4) et à voir procéder à l’allocation définitive dans les compartiments 1 à 5 du Fonds des actifs recueillis à titre transitoire dans le compartiment 6, en application du contrat conclu entre parties, intitulé « Contrat-

cadre de restructuration et de transfert d’un patrimoine immobilier au fonds » (ci-

après « le contrat-cadre »).

Après avoir constaté que le conseil d’administration de l’associée commanditée SOC4), gérant du Fonds, avait lors d’une réunion du 16 novembre 2010 approuvé le contenu du contrat-cadre dont l’article 8 stipulait qu’il était à durée indéterminée, mais que le même contrat-cadre avait été, le 18 novembre 2010, signé par les parties SOC1), SOC2) et SOC3), dans une version où l’article 8, entre-temps modifié, prévoyait l’expiration du contrat au 31 décembre 2012, le tribunal avait retenu, contrairement à l’argumentation présentée par la société SOC2), que l’intention réelle commune des parties avait été de conclure un contrat à durée indéterminée, qui n’avait donc pas de plein droit expiré le 31 décembre 2012.

Le tribunal avait nommé un administrateur ad hoc au sein d’SOC3), avec la mission de se substituer à l’associée commanditée SOC4), gérant du Fonds, dans l’exécution du contrat-cadre du 18 novembre 2010 jusqu’à accomplissement de la réallocation définitive du patrimoine absorbé par le Fonds aux compartiments 1 à 5.

La Cour d’appel a, par réformation, retenu que les relations entre parties étaient régies par la version du contrat signée le 18 novembre 2010, à durée déterminée, ayant expiré le 31 décembre 2012, et non par la version du contrat à durée indéterminée du 16 novembre 2010 et elle a rejeté la demande de la société SOC1).

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l'article 1134 du Code civil, lequel dispose que :

, en ce que, pour rejeter les demandes de la société Soc1) tendant notamment à voir dire que le Contrat conclu entre les parties dans sa version du 16 novembre 2010 était toujours en vigueur, et à obtenir la nomination d'un administrateur ad hoc au sein d'Soc3) avec mission de se substituer à son associé gérant Soc4) dans l'exécution du Contrat du 16 novembre 2010, jusqu'à accomplissement de la réallocation définitive des patrimoines, la Cour d'appel a retenu, contrairement au Tribunal, que la version du Contrat applicable n'était pas celle du 16 novembre 2010, mais la version du 18 novembre 2010, si bien que le Contrat n'avait pas été conclu à durée indéterminée mais pour une durée déterminée expirant le 31 décembre 2012 ;

aux motifs que .

1°) alors que le juge qui constate l’ambiguïté d’une clause ne peut pas retenir que celle-ci est claire et précise et doit nécessairement rechercher la volonté réelle des parties ; qu’en affirmant péremptoirement, pour considérer que le Contrat avait finalement été conclu à durée déterminée, qu’il y a lieu de partir de la prémisse que c'est le contrat signé le 18 novembre 2010 qui lie les parties ou encore que , tout en constatant que les conditions d’adoption de cette version du texte étaient plus que controversées, sans que les circonstances exactes de cette adoption puissent être exactement déterminées, la Cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1134 du Code civil ; qu’ayant constaté que les circonstances dans lesquelles le Contrat, dans sa version du 18 novembre 2010 a été adopté, étaient floues, la Cour d’appel aurait dû relever l’ambiguïté de la clause, et rechercher la réelle intention des parties quant à la durée du Contrat, (première branche) ;

2°) alors qu’un contrat dont les clauses sont contradictoires est nécessairement ambigu ; qu’en décidant que la dernière version de l’article 8 du Contrat était claire et précise, tout en admettant par ailleurs que ce texte n’était pas conciliable avec d’autres clauses du Contrat que son rédacteur aurait omis de supprimer, la Cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1134 du Code civil ; qu’ayant constaté la contradiction entre l’article 8 du contrat-cadre dans sa version du 18 novembre 2010 avec d’autres clauses du Contrat, la Cour d’appel aurait dû relever l’ambiguïté de la clause, et rechercher la réelle intention des parties quant à la durée du Contrat (deuxième branche) ;

3°) alors qu’en affirmant, pour faire prévaloir la dernière version du Contrat du 18 novembre 2018, ne pas pouvoir ou encore que , quand elle était tenue de rechercher la volonté réelle des parties, la Cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil ; qu’en présence de contestations d’une partie au Contrat sur la durée de celui-ci et des circonstances relevées par la Cour dans ce contexte, la Cour d’appel aurait dû rechercher la réelle intention des parties sur la durée du Contrat (troisième branche) ;

4°) alors qu’en affirmant du conseil d’administration de la société Soc4) du 16 novembre 2010, après avoir constaté que selon la première résolution du conseil d'administration les termes de la convention-cadre et la signature sont expressément approuvés et qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le Contrat, ce dont il résulte que le conseil d’administration s’était prononcé sur un projet de contrat complet dont il a expressément approuvé les termes et la signature, la Cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l’article 1134 du Code civil ; qu’ayant constaté que le conseil d’administration d’Soc4) avait approuvé la version définitive du Contrat le 16 novembre 2010, la Cour aurait dû faire prévaloir cette version (quatrième branche) ;

5°) alors que selon la quatrième résolution adoptée le 16 novembre 2010, le conseil d’administration d’Soc4) a décidé ; qu’en déduisant de cette résolution, pour justifier la transformation entre le 16 et le 18 novembre 2010, du Contrat initialement prévu à durée indéterminée en un contrat-cadre à durée déterminée expirant le 31 décembre 2012, que quand le conseil d’administration avait expressément donné mission à ses délégués de mettre en œuvre les résolutions précédentes - et donc celle ayant adopté le Contrat dans sa version du 16 novembre 2010 et de signer ce contrat-

cadre, la Cour d’appel qui a dénaturé la délégation de pouvoirs, a violé l’article 1134 du Code civil ; qu’ayant constaté l’existence et le contenu de la délégation de pouvoirs octroyée le 16 novembre 2010 par le conseil d’administration d’Soc4) pour signer le Contrat approuvé le jour même, la Cour d’appel aurait dû tenir compte et respecter les termes de cette délégation et faire prévaloir la version du 16 novembre 2010 dudit Contrat (cinquième branche) ;

6°) alors qu’en justifiant la transformation entre le 16 et le 18 novembre 2010, du Contrat initialement prévu à durée indéterminée en un contrat-cadre à durée déterminée expirant le 31 décembre 2012, à partir de la délégation de pouvoir accordée le 16 novembre 2010 par le conseil d’administration de la société Soc4), après avoir admis que, contrairement à ce qui était soutenu par la société Soc2), il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le Contrat, la Cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1134 du Code civil ; qu’ayant retenu qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le Contrat, la Cour d’appel aurait dû faire prévaloir la version du Contrat du 16 novembre 2010 (sixième branche). ».

Réponse de la Cour Sur les première, deuxième et troisième branches réunies du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir recherché la réelle et commune intention des parties.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, sur base des éléments leur soumis, de la durée du contrat-cadre conclu entre parties, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en ses trois premières branches, ne saurait être accueilli.

Sur les quatrième et sixième branches réunies du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir fait prévaloir la version du contrat-cadre du 16 novembre 2010 après avoir constaté que selon la première résolution du conseil d’administration de la société SOC4) du 16 novembre 2010, les termes du contrat-cadre et la signature étaient expressément approuvés et qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le contrat.

Le moyen procède d’une lecture erronée et incomplète de l’arrêt attaqué.

Les juges d’appel n’ont pas constaté que selon la première résolution du conseil d’administration de la société SOC4) les termes du contrat-cadre et la signature étaient expressément approuvés et qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le contrat. Ayant retenu que l’affirmation de la société SOC2) selon laquelle l’associée commanditée n’aurait approuvé qu’une version substantiellement proche de la version définitive et qu’il aurait appartenu au comité de pilotage, délégué à ces fins, de finaliser le contrat-cadre, n’était pas confirmée par la teneur de la première résolution du conseil d’administration dont il découle que « la Convention-Cadre dont les termes et la signature sont expressément approuvés », les juges d’appel se sont uniquement prononcés sur le fait que la société SOC2) n’avait pas rapporté la preuve du bien-fondé de son affirmation et ils ont dit qu’il n’était pas établi avec certitude si l’associée commanditée avait approuvé la version définitive ou une version substantiellement proche de la version définitive du contrat-cadre.

Il en suit que le moyen, pris en ses quatrième et sixième branches, manque en fait.

Sur la cinquième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel d’avoir dénaturé la délégation de pouvoirs faite le 16 novembre 2010 par le conseil d’administration de la société SOC4) soit à deux administrateurs agissant conjointement, soit à un administrateur et deux autres personnes agissant conjointement, pour faire tout ce qui est nécessaire ou utile en vue de la mise en œuvre des résolutions précédentes, y compris la signature du contrat-cadre.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de la portée de ladite délégation de pouvoirs, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en sa cinquième branche, ne saurait être accueilli.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation des articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile qui disposent que Article 89 de la Constitution : , Article 249 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 587 du Nouveau Code de procédure civile : , en ce que pour considérer que la version du Contrat applicable n’était pas celle du 16 novembre 2010, mais la version du 18 novembre 2010, si bien que le Contrat n’avait pas été conclu à durée indéterminée mais pour une durée déterminée expirant le 31 décembre 2012, la Cour d’appel a refusé de faire prévaloir la première version du contrat-cadre validée par le conseil d’administration d’Soc4) le 16 novembre 2010, aux motifs que .

alors que le motif dubitatif ou hypothétique équivaut à un défaut de motif :

qu’en affirmant qu’il ressort de certains courriels échangés avant la réunion du conseil d’administration d’Soc4) à 14.30 heures, , la Cour d’appel qui a statué par un motif hypothétique, a violé les textes visés au moyen, à savoir les articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile ;

qu’elle ne pouvait justifier sa décision sur ce type de motif. ».

Réponse de la Cour Le moyen fait grief aux juges d’appel d’avoir, en affirmant qu’il n’est pas à exclure que certains points, dont la durée, n’étaient pas encore définitivement tranchés par l’associée commanditée à l’issue de la réunion du 16 novembre 2010, statué par un motif hypothétique.

Le motif critiqué d’hypothétique porte sur le doute exprimé par les juges d’appel au sujet de la preuve du bien-fondé, contesté par la société SOC2), de l’affirmation de la demanderesse en cassation aux termes de laquelle l’associée commanditée avait approuvé la version définitive du contrat le 16 novembre 2010, preuve dont la charge lui incombait, et non sur un point de fait sur lequel les juges du fond étaient tenus de procéder à une constatation certaine.

Il en suit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation des articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile qui disposent que Article 89 de la Constitution : ;

Article 249 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 587 du Nouveau Code de procédure civile : , en ce que pour considérer que la version du Contrat applicable n’était pas celle du 16 novembre 2010, mais la version du 18 novembre 2010 si bien que le Contrat n’avait pas été conclu à durée indéterminée mais pour une durée déterminée expirant le 31 décembre 2012, la Cour d’appel a décidé d’appliquer la version du contrat-cadre du 18 novembre 2010, malgré la contradiction avérée existant entre le nouvel article 8 et l’article 6.2.4 du Contrat, aux motifs que , alors que le motif dubitatif ou hypothétique équivaut à un défaut de motif :

qu’en affirmant pour refuser de tenir compte des contradictions réelles existant entre les clauses du Contrat du 18 novembre 2010 , la Cour d’appel qui a statué par un motif hypothétique, a violé les textes visés au moyen, à savoir les articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau code de procédure civile ; qu’elle ne pouvait justifier sa décision sur ce type de motif. ».

Réponse de la Cour Le moyen fait grief aux juges d’appel d’avoir, par un motif hypothétique, refusé de tenir compte de contradictions entre les clauses du contrat du 18 novembre 2010.

En retenant que la contradiction entre l’article 8 et l’article 6.2.4 du contrat-

cadre, invoquée par la demanderesse en cassation, qu’ils qualifient d’apparente, n’est pas concluante étant donné qu’il est établi qu’il y a eu modification de l’article 8 entre le 16 novembre 2010 et le 18 novembre 2010, les juges d’appel ont, en termes non équivoques, rejeté le moyen afférent.

L’ajout, par les juges d’appel, qu’une omission des parties de biffer le renvoi fait par l’article 6.2.4. à la faculté de résiliation et au préavis à respecter n’était pas à exclure, ne constitue pas un motif déterminant susceptible d’être sanctionné au titre d’un motif hypothétique.

Il en suit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le quatrième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l'article 1354 du Code civil qui dispose que , en ce que la Cour d'appel a refusé de considérer que la poursuite des relations contractuelles pour une durée indéterminée au-delà du terme du 31 décembre 2012 et le comportement des parties antérieur et postérieur au 31 décembre 2012, constituaient un aveu extrajudiciaire prévu par l'article 1354 du Code civil et d'en déduire les conséquences légales qui s'imposaient, aux motifs que, sur l'aveu en action :

alors que l'exécution par une partie d'une clause particulière d'un contrat constitue un aveu extrajudiciaire du fait que celui-ci comprenait dès sa formation ladite clause à moins qu'elle ne soit en mesure de démontrer que cette clause a été adoptée ultérieurement ; qu'en présence d'un doute sur la durée d'un contrat, la seule circonstance que les parties aient poursuivi son exécution au-delà de son terme supposé constitue un aveu extrajudiciaire du fait que les parties avaient dès l'origine convenu de conclure un contrat sans limitation de durée ; qu'en subordonnant l'existence d'un aveu extrajudiciaire sur la durée de la convention-cadre à la circonstance que sa prorogation au-delà du 31 décembre 2012 ou sa tacite reconduction ait eu lieu conforment aux dispositions des articles 9 et 12 du Contrat échu, la Cour d'appel a violé l'article 1354 du Code civil ; que la Cour d'appel qui a constaté l'exécution du Contrat au-delà du 31 décembre 2012 aurait dû relever l'aveu extrajudiciaire de l'intention des parties de conclure un contrat à durée indéterminée. ».

Réponse de la Cour Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir retenu l’aveu extrajudiciaire de l’intention des parties de conclure un contrat à durée indéterminée.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des faits invoqués par la demanderesse en cassation pour établir l’existence d’un aveu extrajudiciaire, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le cinquième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l'article 1134 du Code civil lequel dispose que :

, en ce que pour rejeter les demandes de la société Soc1), la Cour d'appel a retenu que le contrat à durée déterminée dont le terme avait été fixé au 31 décembre 2012 ne pouvait avoir fait l'objet ni d'une tacite reconduction, ni d'une prorogation, aux motifs que la société Soc1) , 1°) alors que la tacite reconduction n'entraîne pas prorogation du contrat primitif mais donne naissance à un nouveau contrat ; qu'en considérant que la tacite reconduction et la prorogation d'un contrat pouvaient être assimilées, et que ces deux situations produisaient les mêmes effets, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; qu'elle aurait dû distinguer ces deux notions et constater la tacite reconduction (première branche) ;

2°) alors que la tacite reconduction d'un contrat à durée déterminée venu à échéance donne naissance à un nouveau contrat à durée indéterminée, dont les autres éléments ne sont pas nécessairement identiques ; qu'il incombe au juge de rechercher le contenu de ce nouveau contrat ; qu'en décidant que la tacite reconduction ne pourrait s'opérer que dans des conditions identiques au Contrat échu, et spécialement en respectant les articles 9 et 12 de l'ancien contrat-cadre, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; qu'elle aurait dû constater la conclusion d'un nouveau contrat indépendant (deuxième branche) ;

3°) alors subsidiairement que l'article 9-1 du contrat-cadre prévoit expressément qu'en affirmant que permettant de proroger le Contrat, la Cour d'appel qui a dénaturé l'article 9-1 du contrat-cadre, a violé l'article 1134 du Code civil ; qu'elle aurait dû constater que ladite résolution constituait un écrit établi pour le compte des parties au Contrat et était suffisante (troisième branche). ».

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel d’avoir assimilé la reconduction tacite et la prorogation d’un contrat et de ne pas avoir constaté la reconduction tacite.

Le moyen procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué en ce que les juges d’appel n’ont pas procédé à une assimilation juridique des notions de reconduction tacite et de prorogation, mais les ont analysées séparément pour rejeter les prétentions tirées respectivement d’une reconduction tacite et d’une prorogation du contrat.

Il en suit que le moyen, pris en sa première branche, manque en fait.

Sur la deuxième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir constaté que la reconduction tacite d’un contrat à durée déterminée venu à échéance donne naissance à un nouveau contrat à durée indéterminée dont les autres éléments ne sont pas nécessairement identiques et de ne pas avoir recherché le contenu de ce nouveau contrat.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des preuves invoquées par la demanderesse en cassation pour établir l’existence d’un accord sur une reconduction tacite du contrat-cadre, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en sa deuxième branche, ne saurait être accueilli.

Sur la troisième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir constaté que la résolution adoptée le 5 octobre 2012 par le conseil d’administration de la société SOC4) constituait un écrit pour le compte des parties ayant permis de proroger le contrat.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de la question de savoir si ladite résolution équivalait à un écrit établi par les trois parties signataires au sens des articles 9 et 12 du contrat-cadre, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en sa troisième branche, ne saurait être accueilli.

Sur le sixième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation de des articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile d'une part, et d'autre part de la violation de l'article 1134 du Code civil, lesquels disposent que :

Article 89 de la Constitution : , Article 249 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 587 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 1134 du Code civil : , en ce que la Cour d'appel a dit non fondée et a rejeté la demande formulée à titre plus subsidiaire par Soc1), à voir dire que, quand bien même la clause de durée contenue à l'article 8 du contrat-cadre du 18 novembre 2010 serait valable, l'obligation d'allocation définitive des actifs dans les compartiments de destination 1 à 5 n'est pas affectée par l'existence d'un terme extinctif, aux motifs que , 1°) alors que la contradiction dans les motifs équivaut à un défaut de motifs :

qu'en retenant à la fois d'un côté que certaines dispositions contractuelles que qu'à propos du transfert des actifs vers le compartiment mixte commun et de l'allocation définitive, , et de l'autre côté que , la Cour d'appel, qui a statué sur base de motifs contradictoires, a violé les articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile ; qu'elle ne pouvait justifier sa décision sur ce type de motifs contradictoires (première branche) ;

2°) alors que la durée de la force obligatoire, (la validité et l'exigibilité) d'une obligation conventionnelle (quelle que soit sa nature) ne dépend pas nécessairement de la durée du contrat qui la stipule ; qu'en retenant que l'obligation d'allocation étant stipulée dans un contrat à terme, elle n'était plus exigible en raison de la survenance du terme du contrat, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

qu'au lieu de simplement constater que l'obligation d'allocation n'avait pas été exécutée, la Cour aurait dû retenir que l'obligation d'allocation avait conservé sa force obligatoire au-delà du terme, (deuxième branche) ;

3°) et alors de surcroît que, l'obligation à exécution instantanée, qualification qui doit être donnée à l'obligation d'allocation définitive, qui est conçue comme formant un tout définitif devant s'exécuter en une seule et unique fois, n'est pas affectée par le terme extinctif de sorte que sa force obligatoire survit au terme du contrat ; qu'en retenant que l'obligation d'allocation était affectée par le terme, sans qualifier l'allocation d'obligation à exécution instantanée, et sans tirer les conséquences de cette qualification relativement à l'absence d'effet du terme sur la force obligatoire de cette obligation, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; que la Cour d'appel aurait dû qualifier l'obligation d'allocation d'obligation instantanée et en tirer les conséquences qui s'imposaient quant à sa force obligatoire et aux effets du terme (troisième branche). ».

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de se contredire en retenant, d’une part, que l’obligation d’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds était éteinte avec l’arrivée du terme du contrat et, d’autre part, par un ensemble de trois motifs que l’obligation était susceptible de survivre au terme.

Les trois derniers motifs, en ce que le premier ne vise que les obligations contractuelles accessoires, que le deuxième vise la non-rétroactivité de l’échéance du terme et que le troisième vise la libération du débiteur par l’exécution intégrale des obligations de transfert puis de réallocation des patrimoines, ne sont pas en contradiction avec le motif relatif à l’extinction de l’obligation avec l’arrivée du terme.

Il en suit que le moyen, pris en sa première branche, n’est pas fondé.

Sur la deuxième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir retenu que l’obligation d’allocation des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds avait conservé sa force obligatoire au-delà du terme.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des conséquences du terme convenu entre parties en considération du contexte contractuel dans lequel ils ont placé ladite obligation et de ce que le Fonds n’avait fait état d’aucun événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel stipulé, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en sa deuxième branche, ne saurait être accueilli.

Sur la troisième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir qualifié l’obligation d’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds d’obligation à exécution instantanée et de ne pas en avoir tiré les conséquences relatives à sa force obligatoire et aux effets du terme.

La qualification de ladite obligation comme obligation à exécution instantanée aurait été sans incidence sur la force obligatoire de celle-ci et sur les effets du terme.

Il en suit que le moyen, pris en sa troisième branche, est inopérant.

Sur le septième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l'article 1134 du Code civil qui dispose que : et qui interdit la dénaturation des clauses d'une convention, en ce que pour rejeter les demandes de la société Soc1) en tant qu'elles étaient fondées sur l'existence d'un nouveau contrat établi par le comportement des parties, la Cour d'appel a retenu que ce nouveau contrat du Contrat, aux motifs que .

(…) .

Ni la validité, ni la portée de ces dispositions ne sont contestées par SOC1) et le Fonds, de sorte que la conclusion que SOC1) entend déduire de l'existence des actes des parties postérieurs à l'arrivée du terme, à savoir qu'ils établiraient la volonté implicite de celles-ci de (…) conclure un nouveau contrat à teneur identique, mais à durée indéterminée, est à écarter par application de l'article 9, voire des articles 9 et 12 pour ne pas constituer un écrit signé par les parties tendant à la modification d'une disposition du Contrat-Cadre. Il s'agit de tous les comportements énumérés ci-dessus sub IV.1.1., à l'exception de la résolution de l'associé commandité du 5 octobre 2012, qui mérite un examen séparé.

Il s’y ajoute que la prorogation du terme doit découler d'un accord implicite ou explicite des parties, antérieur à l'arrivée du terme (Cour de cassation, 29 juin 2000, p. 31, 440).

Cette conclusion vaut également pour le cas où, tel que le fait valoir SOC1) (…), il y aurait eu conclusion implicite par les parties d'un nouveau contrat après le 31 décembre 2012, conclusion qui s'induirait des actions postérieures qui l'attesteraient, étant donné que si l'aveu en action est susceptible d'établir la volonté des parties d'exécuter un contrat dont l'existence est contestée, ce ″ nouveau ″ contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12.» 1°) alors que les clauses d'une convention indiquant expressément être applicables ne peuvent être appliquées à d'autres contrats entre les parties ; qu'en décidant, après avoir exactement rappelé les termes des articles 9 et 12 du Contrat qui mentionnent s'appliquer , que ces clauses s'appliquent à un contrat, la Cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du Code civil ; que sur base de ses propres constats, la Cour d'appel aurait dû retenir que les articles 9 et 12 du Contrat expiré ne s'appliquaient pas à l'éventuel nouveau contrat, et aurait dû vérifier l'existence d'un nouveau contrat indépendamment de ces articles (première branche) ;

2°) et alors que, si l'interprétation d'une convention relève du pouvoir d'appréciation souveraine des juges du fond, ils ne peuvent dénaturer les clauses de celle-ci en y ajoutant un élément ou une condition qu'elles ne contiennent pas ; qu'en retenant qu'un du Contrat qui précisent s'appliquer , la Cour d'appel en a dénaturé les termes, et a violé l'article 1134 du Code civil ; que sur base de ses propres constats, la Cour d'appel ne pouvait pas soumettre la validité d'un éventuel nouveau contrat aux conditions prévues aux articles 9 et 12 du contrat-cadre expiré, mais aurait dû analyser la validité d'un nouveau contrat indépendamment de ces articles (seconde branche, subsidiaire à la première) ».

Réponse de la Cour Sur les deux branches réunies du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel d’avoir retenu qu’un nouveau contrat resterait soumis aux articles 9 et 12 du contrat-cadre.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des stipulations contractuelles relatives à une modification du contrat-cadre entre parties, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, ne saurait être accueilli.

Sur le huitième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l'article 1134 du Code civil, lequel dispose que :

, en ce que la Cour d'appel a retenu que les conditions requises à la mise en œuvre de la clause de sauvegarde prévue à l'article 5.1.1 du Contrat n'étaient pas réunies, aux motifs que (…) .

alors que, ayant retenu que l'article 5.1. édicte les , qu'il est stipulé à l'article 5.1.2. que les parties s'engagent à définir et appliquer un mécanisme de régularisation assurant la réalisation des objectifs énoncés si ceux-ci ne peuvent être atteints au niveau du Fonds, et notamment à transférer entre eux des actions des différents compartiments dans la mesure où ceci est requis pour assurer le respect desdits principes, et que selon l'article 5.1.2., 2ème alinéa, aucun Promoteur ne peut tirer ou subir un désavantage du fait que le patrimoine destiné aux compartiments privatifs sera, pendant une phase transitoire, mélangé et destiné au compartiment commun, la Cour d'appel qui a rejeté ensuite la demande de Soc1) visant à la mise en œuvre du mécanisme de régularisation prévu à ces dispositions, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations quant au caractère transitoire du mélange des patrimoines privatifs avec le patrimoine commun, et a violé l'article 1134 du Code civil ; qu'ayant expressément constaté que la réunion des patrimoines privatifs et communs dans le compartiment 6 devait être transitoire, la Cour d'appel aurait dû faire droit à la demande de Soc1) visant à l'application de la clause de sauvegarde. ».

Réponse de la Cour Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir appliqué la clause de sauvegarde prévue au contrat-cadre.

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des conditions de la mise en œuvre de ladite clause convenue entre parties, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le neuvième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation des articles 89 de la Constitution, des articles 1142, 1146 alinéa 2, et 1147 du Code civil, des articles 53, 61, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile, lesquels disposent que :

Article 89 de la Constitution : , Article 1142 du Code civil : , Article 1146, alinéa 2 du Code civil : , Article 1147 du Code civil : , Article 53 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 61 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 249 du Nouveau Code de procédure civile : , Article 587 du Nouveau Code de procédure civile : , en ce que la Cour d'appel a dit non fondée et a rejeté la demande de Soc1) visant à la condamnation d' soc3), sinon d'so3) et d'soc4), sinon pour autant que de besoin, leur(s) administrateur(s) provisoire(s), à procéder à l'allocation définitive des actifs contenus dans le compartiment 6 du Fonds entre les compartiments 1 à 5 de ce Fonds, aux motifs que .

(…) .

(…) .

(…) , que , qu'elle était une , que et enfin que pour ensuite rejeter la demande de réparation , sans constater que la réparation en nature est impossible au motif que la , la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 1142, 1146 alinéa 2, et 1147 du Code civil ; que la Cour d'appel aurait dû octroyer la réparation en nature et, au vu des circonstances relevées ci-avant, ordonner l'exécution de l'obligation d'allocation qui pèse sur Soc3) (première branche) ;

2°) alors qu'en vertu de l'article 53 du Nouveau Code de procédure civile, . Dès lors qu'elle constate que dudit Fonds, la Cour d'appel qui a rejeté la demande de condamnation du Fonds à y procéder, a violé l'article 53 du Nouveau Code de procédure civile ; qu'ayant constaté que le Fonds ne s'opposait pas à la demande en exécution de l'allocation, la Cour d'appel aurait dû faire droit à cette demande (deuxième branche) ;

3°) alors que la contradiction dans les motifs équivaut à une absence de motif ; qu'en retenant, d'une part, que et, d'autre part, que cette obligation d'allocation définitive , la Cour d'appel a statué sur des motifs contradictoires et a violé les articles 89 de la Constitution, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile ; qu'elle ne pouvait justifier sa décision sur ce type de motifs contradictoires (troisième branche) ;

4°) et alors que, le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et de restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux. En statuant, sur la seule base de l'exécution de l'obligation de réallocation dans le cadre d'un contrat encore en cours, sans rechercher, en respectant les droits de la défense, si la demande de condamnation du Fonds à procéder à l'allocation définitive n'était pas fondée sur la base des dispositions relatives à sa responsabilité contractuelle, soit les articles 1142, 1146 alinéa 2, et 1147 du Code civil, la Cour d'appel a violé l'article 61 du Nouveau Code de procédure civile ; que la Cour d'appel aurait dû rechercher si la demande formulée à l'encontre du Fonds n'était pas fondée sur les dispositions relatives à la responsabilité contractuelle (quatrième branche) ».

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir octroyé la réparation en nature en ordonnant l’exécution de l’obligation d’allocation des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds sur base des règles de la responsabilité contractuelle.

Il ne ressort pas des actes de procédure auxquels la Cour peut avoir égard que la demanderesse en cassation ait demandé aux juges d’appel de condamner le Fonds à une réparation en nature sur base de la responsabilité contractuelle.

Le moyen est, dès lors, nouveau et, en ce qu’il comporterait un examen par la Cour de la faute, du préjudice et de la relation causale entre la faute et le préjudice, mélangé de fait et de droit.

Il en suit que le moyen, pris en sa première branche, est irrecevable.

Sur la deuxième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir, eu égard au constat que le Fonds rejoint la société SOC1) dans sa demande en allocation définitive des actifs se trouvant toujours dans le compartiment commun mixte, fait droit à la demande de la demanderesse en cassation en exécution de l’allocation des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds.

Il ne ressort pas des actes de procédure auxquels la Cour peut avoir égard que la demanderesse en cassation ait fait valoir, devant les juges d’appel, que ladite prise de position du Fonds impliquait l’adjudication de cette demande.

Le moyen est, dès lors, nouveau et, en ce qu’il comporterait l’appréciation par la Cour de la portée des prétentions respectives des parties délimitant l’objet du litige, mélangé de fait et de droit.

Il en suit que le moyen, pris en sa deuxième branche, est irrecevable.

Sur la troisième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de s’être contredits en retenant, d’une part, que l’obligation d’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds ne devenait pas exigible du seul fait de l’échéance atteinte et, d’autre part, que cette obligation, affectée nécessairement d’un terme extinctif, était immédiatement exigible.

Le moyen procède d’une lecture incorrecte et incomplète de l’arrêt attaqué en ce que les juges d’appel, après avoir dit que le terme une fois atteint, les obligations pour autant qu’elles n’avaient jusque-là pas encore été exécutées ne devenaient pas exigibles du seul fait de l’échéance atteinte, ont précisé en ajoutant « Bien au contraire auraient-elles dû déjà avoir été exécutées en cours de contrat ». En retenant ainsi que l’obligation d’allocation des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds devait avoir été exécutée en cours de contrat et que l’obligation, affectée d’un terme extinctif, n’était exigible que jusqu’au moment du terme, les juges d’appel ont, sans se contredire, dit que l’obligation devait avoir été exécutée en cours de contrat, donc avant le terme.

Il en suit que le moyen, pris en sa troisième branche, n’est pas fondé.

Sur la quatrième branche du moyen Le moyen fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir recherché si la demande de condamnation du Fonds à procéder à l’allocation des actifs immobiliers vers les compartiments de destination du Fonds n’était pas fondée sur base des dispositions relatives à la responsabilité contractuelle.

Les règles de droit applicables sont celles qui concernent l’objet du litige qui est, au vœu des dispositions de l’article 53 du Nouveau code de procédure civile, déterminé par les prétentions respectives des parties.

L’objet du litige étant l’exécution forcée du contrat conclu entre parties et non la réparation d’un préjudice subi en raison de son inexécution fautive, les juges d’appel ont statué dans le cadre de leur saisine et ont tranché le litige conformément aux règles de droit applicables afférentes et les dispositions régissant la responsabilité contractuelle ne sont pas d’ordre public.

Ils n’ont partant pas violé la disposition visée au moyen.

Il en suit que le moyen, pris en sa quatrième branche, n’est pas fondé.

Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure Il serait inéquitable de laisser à charge de la société SOC2) l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer une indemnité de procédure de 2.500 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

rejette le pourvoi ;

condamne la demanderesse en cassation à payer à la société en commandite par actions SOC2) une indemnité de procédure de 2.500 euros ;

condamne la demanderesse aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Patrick KINSCH, sur ses affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Jean-Claude WIWINIUS en présence de l’avocat général Isabelle JUNG et du greffier Viviane PROBST.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation société anonyme SOC1)-SPF c/ 1) société en commandite par actions SOC2), 2) société en commandite par actions SOC3), SICAV-FIS 3) société anonyme SOC4), (affaire n° CAS 2019-00147 du registre) Sur la recevabilité du pourvoi …………………………………………………………………………………. 48 Sur les faits …………………………………………………………………………………………………………….. 48 Sur le premier moyen de cassation ………………………………………………………………………….. 48 Sur la première branche du moyen ………………………………………………………………………….. 52 Sur la deuxième branche du moyen ………………………………………………………………………… 55 Sur la troisième branche du moyen …………………………………………………………………………. 56 Sur la quatrième branche du moyen ………………………………………………………………………… 57 Sur la cinquième branche du moyen ……………………………………………………………………….. 60 Sur la sixième branche du moyen …………………………………………………………………………… 62 Sur le deuxième moyen de cassation ………………………………………………………………………… 63 Sur le troisième moyen de cassation ………………………………………………………………………… 65 Sur le quatrième moyen de cassation ………………………………………………………………………. 67 Sur le cinquième moyen de cassation ………………………………………………………………………. 71 Sur la première branche du moyen ………………………………………………………………………….. 73 Sur la deuxième branche du moyen ………………………………………………………………………… 74 Sur la troisième branche du moyen …………………………………………………………………………. 74 Sur le sixième moyen de cassation …………………………………………………………………………… 76 Sur la première branche du moyen ………………………………………………………………………….. 82 Sur la deuxième branche du moyen ………………………………………………………………………… 84 Sur la troisième branche du moyen …………………………………………………………………………. 85 Sur le septième moyen de cassation …………………………………………………………………………. 87 Sur la première branche du moyen ………………………………………………………………………….. 88 Sur la seconde branche du moyen …………………………………………………………………………… 89 Sur le huitième moyen de cassation …………………………………………………………………………. 90 Sur le neuvième moyen de cassation ………………………………………………………………………… 94 Sur la deuxième branche du moyen ………………………………………………………………………… 97 Sur la troisième branche du moyen …………………………………………………………………………. 97 Sur la première et la quatrième branche du moyen ……………………………………………………. 98 Sur la première branche du moyen ………………………………………………………………………. 99 Sur la quatrième branche du moyen …………………………………………………………………… 101 Conclusion …………………………………………………………………………………………………………… 103 Le pourvoi de la demanderesse en cassation, par dépôt au greffe de la Cour en date du 20 septembre 2019, d’un mémoire en cassation, est dirigé contre un arrêt rendu en date du 10 juillet 2019 sous le numéro 43534 du rôle par la Cour d’appel, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale, signifié à la demanderesse en cassation en date du 24 juillet 20191.

Sur la recevabilité du pourvoi Le pourvoi est recevable en ce qui concerne le délai2 et la forme3.

Le pourvoi est dirigé contre une décision contradictoire, donc non susceptible d’opposition, rendue en dernier ressort qui tranche tout le principal, de sorte qu’il est également recevable au regard des articles 1er et 3 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.

Le pourvoi est, partant, recevable.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, saisi par la société anonyme SOC1)-SPF (ci-après « SOC1) ») d’une demande dirigée contre la société en commandite par actions SOC3), SICAV-FIS (ci-après « SOC3) »), la société anonyme SOC4) (ci-après « SOC4) ») et la société en commandite par actions SOC2) (ci-après « SOC2) ») à voir SOC3) et SOC4) ordonner de procéder à l’allocation d’actifs au profit d’SOC3) en application d’un contrat-cadre conclu entre parties, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, constatant que, contrairement à la thèse de soc2), le contrat-

cadre n’avait pas expiré le 31 décembre 2012, mais qu’il avait été conclu à durée indéterminée et était toujours en vigueur, a fait droit à la demande en nommant un administrateur ad hoc chargé de se substituer à l’associé commanditaire gérant de SOC3) dans l’exécution du contrat-

cadre. Sur appel d’SOC2) rejeta par réformation la demande de SOC1).

Sur le premier moyen de cassation 1 Pièce n° 3 annexée à la Farde contenant des antécédents de procédure de la demanderesse en cassation.

Voir également le mémoire en réponse de la société SOC2), page 2, deuxième alinéa.

2 L’arrêt attaqué a été signifié en date du 24 juillet 2019 par la société SOC2) à la demanderesse en cassation.

Le pourvoi ayant été formé le 20 septembre 2019, le délai de deux mois prévu par l’article 7 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation applicable en cause, la demanderesse en cassation demeurant au Grand-Duché, a été respecté.

3 La demanderesse en cassation a déposé un mémoire signé par un avocat à la Cour signifié aux défenderesses en cassation antérieurement au dépôt du pourvoi, de sorte que ces formalités imposées par l’article 10 de la loi précitée de 1885 ont été respectées.

Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 1134 du Code civil, en ce que la Cour d’appel pour rejeter la demande de SOC1) a constaté que le contrat-cadre conclu entre parties était applicable dans sa version du 18 novembre 2010, et non dans celle du 16 novembre 2010, de sorte que le contrat-cadre n’a pas été conclu à durée indéterminée, mais à durée déterminée, expirant le 31 décembre 2012, aux motifs développés dans la partie III de l’arrêt attaqué4, alors que, première branche, le juge qui constate l’ambiguïté d’une clause ne peut pas retenir que celle-ci est claire et précise et doit nécessairement rechercher la volonté réelle des parties, de sorte que en retenant que le contrat-cadre a été conclu à durée déterminée et que « l’article 8 du Contrat-Cadre dans sa version signée le 18 novembre 2010 [qui dispose que le contrat-cadre « expirera le 31 décembre 2012, sauf convention contraire des Parties »5] est clair et précis [et] ne donne en principe pas lieu à interprétation »6 tout en constatant que les conditions d’adoption de cette version sont controversées et ne peuvent plus être déterminées avec exactitude, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses constations qui auraient consisté à constater l’ambiguïté de la clause et de rechercher la réelle intention des parties quant à la durée du contrat-cadre ; que, deuxième branche, un contrat dont les clauses sont contradictoires est nécessairement ambigu, de sorte que, en décidant que l’article 8 du contrat-cadre dans sa version du 18 novembre 2010 était clair et précis, tout en admettant qu’il était inconciliable avec d’autres articles du contrat-cadre que son rédacteur aurait omis de supprimer, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses constatations, qui auraient consisté à constater l’ambiguïté de la clause et de rechercher la réelle intention des parties quant à la durée du contrat-cadre ; que, troisième branche, la Cour d’appel aurait, eu égard à l’existence de contestations de l’une des parties au contrat-cadre sur la durée de celui-ci, dû rechercher l’intention réelle des parties sur cette question, de sorte que, pour faire prévaloir la version du contrat-cadre du 18 novembre 2010 sur celle du 16 novembre 2010, elle n’a pas pu retenir qu’elle « voit mal comment elle pourrait accorder sa préférence à la version adoptée le 16 novembre 2010 par le seul associé commandité du Fonds au déterminent de celle signée deux jours plus tard par les trois parties, même pour le cas où il était avéré qu’il y aurait eu manipulation informatique »7 et que « l’intention des parties de conclure un contrat à durée indéterminée ne découle dès lors pas à suffisance de droit des éléments factuels antérieurs à la signature du Contrat-Cadre »8 ; que, quatrième branche, en retenant que « il n’est pas à exclure, en l’absence d’une indication quelconque que ces points [dont la question de la durée du contrat-cadre] aient été discutés et solutionnés durant la réunion, que ceux-ci n’étaient pas encore définitivement tranchés par [SOC4)] à l’issue de la réunion »9 du conseil d’administration d’SOC4) après avoir constaté que selon la première résolution du conseil d’administration les termes du contrat-cadre et la signature ont été expressément approuvés et qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le contrat-cadre, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ; que, cinquième branche, la Cour d’appel a dénaturé une délégation de pouvoirs accordée par la quatrième résolution adoptée le 16 novembre 2010 par le conseil d’administration d’SOC4) en vue de signer le contrat-cadre dans sa version du 16 novembre 2010, constituant un contrat à durée indéterminée, et non dans celle du 18 novembre 2010, constituant un contrat à durée déterminée, en constatant que « l’objet et la portée de la délégation de pouvoirs accordée […] de faire tout ce qui est « utile et nécessaire pour la signature du Contrat-cadre » sont, au regard de sa formulation vague et 4 Arrêt attaqué, page 11, troisième alinéa, à page 19, avant-dernier alinéa.

5 Idem, page 12, dernier alinéa.

6 Idem, page 13, dernier alinéa.

7 Idem, page 15, dernier alinéa.

8 Idem, page 16, deuxième alinéa.

9 Idem, page 14, dernier alinéa.

de l’absence d’indications fiables quant aux discussions menées, impossibles à retracer »10 ; et que, sixième branche, en admettant qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le contrat-cadre, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en justifiant la transformation du contrat-cadre, initialement prévu dans sa version du 16 novembre 2010 comme contrat à durée indéterminée, en contrat à durée déterminée dans sa version du 18 novembre 2010, à partir de la délégation de pouvoir accordée le 16 novembre 2010 par le conseil d’administration d’SOC4).

Suivant les constatations souveraines de la Cour d’appel les parties ont signé en date du 18 novembre 2010 un contrat-cadre qui stipule qu’il « prendra effet à la date de signature de la présente convention et expirera le 31 décembre 2012, sauf convention contraire des Parties »11.

Les parties ne remettent pas en cause la validité de ce contrat-cadre12, ne concluent pas à sa nullité pour vice de consentement13 ou à son inexistence pour absence de rencontre de volonté14, ni n’ont dénoncé par le dépôt d’une plainte pénale qu’elles auraient été frauduleusement amenées à apposer leur signature sous un texte non convenu15.

La demanderesse en cassation, SOC1), soutenue par SOC3) et SOC4), fait cependant valoir que le contrat-cadre tel qu’il a été signé par les parties ne reflète pas le véritable accord de celles-

ci. Cet accord aurait en réalité porté sur un texte différent, qui a été approuvé par SOC4) en date du 16 novembre 2010 et qui stipulait qu’il « continuera de rester en vigueur et sortira ses effets pour une durée illimitée, à moins qu’il n’y soit mis fin par une des Parties moyennant un préavis écrit d’au moins trois mois, donné aux autres Parties (ou tel autre préavis que les Parties aux présentes pourront convenir), étant entendu qu’un tel préavis ne pourra pas être donné avant le 31 décembre 2012 »16.

Saisie de cette contestation, la Cour d’appel retient :

- que « étant donné que l’existence, voire la validité du Contrat-Cadre signé le 18 novembre 2010 ne sont pas remises en cause, [elle] part de la prémisse que c’est ce contrat signé qui lie les parties [ce qui constitue] une application pure et simple de l’article 1134 du Code civil […] [ce à quoi s’ajoute] que le Contrat-Cadre a été signé par les trois parties au contrat, tandis que la résolution du 16 novembre 2010 émane du seul associé commandité »17, - que l’article précité « du Contrat-Cadre dans sa version signée le 18 novembre 2010 est clair et précis [et] ne donne en principe pas lieu à interprétation »18, - que « les développements des parties relatifs à la portée de l’accord de l’associé commandité [donc SOC4)] et aux circonstances qui ont mené à la modification de 10 Idem, page 15, deuxième alinéa.

11 Idem, page 12, dernier alinéa.

12 Idem, page 13, troisième alinéa.

13 Idem, page 13, quatrième alinéa.

14 Idem, page 13, sixième alinéa.

15 Idem, page 15, dernier alinéa.

16 Idem, page 12, antépénultième alinéa.

17 Idem, page 13, avant-dernier alinéa.

18 Idem, même page, dernier alinéa.

l’article […] du Contrat-Cadre sont, d’une part, non concluants, et d’autre part, non pertinents »19 ;

- qu’ils sont « non concluants en ce qu’il n’est pas établi avec certitude si l’associé commandité a approuvé la version définitive ou une « version substantiellement proche de la version définitive » du Contrat-Cadre »20, qu’il n’est « pas non plus établi si et dans quelle mesure des discussions ont porté lors de la réunion du conseil d’administration d’SOC4) sur des clauses particulières du contrat et notamment sur l’article [considéré] »21 et qu’il n’est pas établi quelles étaient les « circonstances qui ont mené à la rédaction nouvelle de l’article […] tel que signé par les trois parties au Contrat-Cadre »22 ;

- que « les développements des parties ne sont en outre pas pertinents »23, dès lors que « la Cour voit mal comment elle pourrait accorder sa préférence à la version adoptée le 16 novembre 2010 par le seul associé commandité du Fonds au détriment de celle signée deux jours plus tard par les trois parties, même pour le cas où il était avéré qu’il y aurait eu manipulation informatique qui, en l’espèce, serait constitutive d’une infraction pénale, alors pourtant que la validité du contrat signé le 18 novembre 2010 et partant de son article [en cause] n’est pas remise en cause par les intimées qui n’ont d’ailleurs pas déposé de plainte pénale et n’ont produit aucune attestation testimoniale ni expertise technique étayant leurs affirmations [de sorte que] l’intention des parties de conclure un contrat à durée indéterminée ne découle […] pas à suffisance de droit des éléments factuels antérieurs à la signature du Contrat-Cadre »24 ;

- qu’il y a enfin lieu de rejeter comme non fondés les arguments de la demanderesse en cassation de déduire « la volonté des parties de conclure un contrat à durée indéterminée […] de clauses du Contrat-Cadre inconciliables avec l’article [en cause] signé par les parties »25, - que cette conclusion vaut tant pour un argument tiré de l’article 6.2.4 du contrat-cadre que de celui tiré de l’article 5.1.2 de ce dernier, prévoyant un principe de neutralité patrimoniale26.

La Cour d’appel constate donc que le contrat signé par les parties, par lequel celles-ci se sont données leur « loi » au sens de l’article 1134 du Code civil et dont ni l’existence, ni la validité ne sont mises en cause, dispose qu’il a été conclu à durée déterminée, que la demanderesse en cassation, SOC1), soutenue par les parties SOC3) et SOC4), allègue que ce contrat ne reflète pas la volonté de ces parties alors que leur accord n’aurait porté que sur un contrat à durée indéterminée, mais que les preuves invoquées à l’appui de cette allégation ne sont ni concluantes, donc de nature à emporter la conviction, ni même pertinentes.

19 Idem, page 14, troisième alinéa.

20 Idem, même page, quatrième alinéa.

21 Idem, même page, dernier alinéa.

22 Idem, page 15, troisième alinéa.

23 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

24 Idem, même page, dernier alinéa, et page 16, deuxième alinéa.

25 Idem, même page, troisième alinéa.

26 Idem, page 16, quatrième alinéa, à page 19, avant-dernier alinéa.

Dans son premier moyen, la demanderesse en cassation critique ce raisonnement en dénonçant une violation de l’article 1134 du Code civil. Le moyen est subdivisé en six branches.

S u r l a p r e m i è r e b r a n c h e d u m o y e n Dans la première branche du moyen, la demanderesse en cassation critique la Cour d’appel d’avoir constaté, d’une part, que l’article du Contrat-Cadre dans sa version signée le 18 novembre 2010 [disposant que le contrat est conclu à durée déterminée] est clair et précis [et] ne donne en principe pas lieu à interprétation »27 et, d’autre part, que les conditions d’adoption de cette version sont controversées. De cette dernière constatation résulterait celle de l’ambiguïté de l’article en question. Celle-ci serait en contradiction avec la première constatation et aurait obligé la Cour d’appel de rechercher la réelle intention des parties.

La Cour d’appel, loin de constater l’ambigüité de l’article du contrat-cadre, contenu dans la version signée par les parties en date du 18 novembre 2010 et disposant que le contrat-cadre est conclu à durée déterminée, a, tout au contraire, constaté que cet article est clair et précis et que figurant dans le contrat signé par les parties, dont ni l’existence, ni la validité n’ont été mises en cause, constitue la « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil, donc reflète leur réelle intention. Ce constat ne se trouve, dans la logique du raisonnement attaqué, pas en contradiction avec celui tiré de ce que la demanderesse en cassation, SOC1), soutenue par SOC3) et SOC4), a allégué que, nonobstant la signature de ce contrat par les parties et l’absence de mise en cause de son existence ou de sa validité, l’accord n’aurait pas porté sur cet article.

La Cour d’appel a pris en compte cette allégation, mais a conclu, après avoir examiné les preuves invoquées à son appui, qu’elle n’est pas établie.

Elle n’a donc ni constaté l’ambiguïté de l’article visé, ni invoqué des motifs en contradiction avec le constat que l’article est clair et précis, ni omis de rechercher la réelle intention des parties.

Il en suit que la première branche du moyen manque en fait.

A titre subsidiaire, elle ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de l’interprétation de la convention28, plus particulièrement, du contenu et de la portée des obligations y stipulées29, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe à votre contrôle.

La demanderesse en cassation aurait pu contourner cette difficulté en tirant son moyen d’un défaut de base légale, donc d’une insuffisance des motifs de fait, qui, constituant un cas d’ouverture dont l’objet est de vérifier si le juge du fond a exercé son pouvoir souverain, ne se heurte pas à ce dernier30. Le moyen ne se fonde cependant pas sur ce cas d’ouverture.

La demanderesse en cassation entend éviter la difficulté par un autre biais, à savoir par la référence faite à la théorie jurisprudentielle française de la dénaturation des écrits clairs. La 27 Idem, même page, dernier alinéa.

28 Voir, à titre d’illustration d’une jurisprudence constante : Cour de cassation, 23 avril 2020, n° 55/2020, numéro CAS-2019-00060 du registre (réponse au premier moyen).

29 Idem, 2 mai 2019, n° 76/2019, numéro CAS-2018-00030 du registre (réponse au quatrième moyen).

30 Jacques et Louis BORE, La cassation en matière civile, Paris, Dalloz, 5e édition, 2015, n° 78.04, page 427.

Cour de cassation française a consacré ce cas d’ouverture prétorien en 187231. L’objet de ce dernier est de sanctionner le fait pour le juge du fond, sous prétexte d’interprétation souveraine de la volonté des parties, de modifier les stipulations claires et précises des contrats32. Il sanctionne un refus déguisé d’application de l’article 1134 du Code civil33. La dénaturation consiste donc dans la méconnaissance par le juge du fond du sens d’un écrit clair et précis34. Ce cas d’ouverture est appliqué par la jurisprudence française à la dénaturation, outre des contrats, de tous les actes ayant force obligatoire35 et des documents de preuve soumis à la libre appréciation du juge36. Il suppose, à titre de conditions de recevabilité, qu’il soit invoqué par le demandeur au pourvoi37 et qu’il soit formulé avec précision, donc que le moyen précise sans ambiguïté la portée du grief et désigne la pièce dont la dénaturation est invoquée38. Il suppose, à titre de conditions de fond, qu’il porte sur un écrit, à l’exclusion de simples faits, que cet écrit soit valable, qu’il soit clair, donc susceptible d’un seul sens, que l’interprétation des juges du fond soit incompatible avec cet écrit, que l’arrêt rattache son appréciation des faits à l’acte clair et que la dénaturation n’affecte pas un motif surabondant39.

Dans le souci d’éviter de se voir transformer en juridiction de troisième degré, la Cour de cassation française, n’accepte d’appliquer ce cas d’ouverture qu’avec réserve et parcimonie40.

Vous avez, jusqu’à présent, été constant de refuser d’accueillir cette théorie41.

31 Idem, n° 79.09, page 441.

32 Idem et loc.cit.

33 Idem et loc.cit.

34 Idem, n° 79.10, page 441.

35 Idem, n° 79.50 et suivants, pages 444 et suivantes.

36 Idem, n° 79.101 et suivants, pages 449 et suivantes.

37 Idem, n° 79.131, page 452.

38 Idem, n° 79.132, page 452.

39 Idem, n° 79.131 et suivants, pages 452 et suivantes.

40 Idem, n° 79.10, page 441.

41 Voir, à titre d’illustration : Cour de cassation, 8 mai 2003, n° 29/03, numéro 1973 du registre (réponse aux trois moyens réunis), idem, 15 décembre 2005, n° 67/05, numéro 2234 du registre (réponse au second moyen), 28 juin 2007, n° 39/07, numéro 2423 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 5 mars 2009, n° 13/09, numéro 2602 du registre (réponse au premier moyen), idem, 14 juillet 2009, n° 50/09, numéro 2664 du registre (réponse au troisième moyen), idem, 17 décembre 2009, n° 63/09, numéro 2690 du registre (réponse à la deuxième branche de l’unique moyen), idem, 18 mars 2010, n° 17/10, numéro 2729 du registre (réponse aux deux moyens réunis), idem, 25 mars 2010, n° 19/10, numéro 2736 du registre (réponse aux premier et deuxième moyens réunis), idem, 24 juin 2010, n° 45/10, numéro 2763 du registre (réponse au sixième moyen), idem, 8 juillet 2010, n° 46/10, numéro 2771 du registre (réponse au premier moyen), idem, 8 juillet 2010, n° 47/10, numéro 2773 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 8 juillet 2010, n° 49/10, numéro 2777 du registre (réponse à la première branche du huitième moyen), idem, 9 décembre 2010, n° 62/10, numéro 2803 du registre (réponse aux premier et deuxième moyens réunis), idem, 13 janvier 2011, n° 4/11, numéro 2786 du registre (réponse au quatrième moyen), idem, 30 juin 2011, n° 47/11, numéro 2857 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 14 juillet 2011, n° 56/11, numéro 2877 du registre (réponse à la troisième branche du deuxième moyen), idem, 15 décembre 2011, n° 70/11, numéro 2880 du registre (réponse au premier moyen), idem, 28 février 2013, n° 16/13, numéro 3102 du registre (réponse à la deuxième branche du dixième moyen), idem, 2 mai 2013, n° 35/13, numéro 3177 du registre (réponse à l’unique moyen), idem, 8 mai 2013, n° 50/13, numéro 3339 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 12 décembre 2013, n° 75/13, numéro 3257 du registre (réponse à la première branche du deuxième moyen), idem, 19 décembre 2013, n° 80/13, numéro 3265 du registre (réponse au premier moyen), idem, 27 février 2014, n° 21/13, numéro 3290 du registre (réponse au troisième moyen), idem, 13 mars 2014, n° 28/14, numéro 3306 du registre (réponse à la deuxième branche de l’unique moyen), idem, 12 février 2015, n° 12/15, numéro 3401 (réponse aux premier et deuxième moyens réunis), idem, 12 décembre 2015, n° 19/15, numéro 3425 du registre (réponse aux troisième, quatrième et cinquième moyens réunis), idem, 25 juin 2015, n° 54/15, numéro 3499 du registre (réponse aux deuxième et troisième moyens réunis), idem, 25 juin 2015, n° 56/15, numéro 3486 du registre (réponse au septième Ce n’est que dans un arrêt isolé, il est vrai récent, que vous avez accueilli et déclaré fondé le grief de dénaturation, tiré de la violation de l’article 1134 du Code civil, en retenant que, par son interprétation d’une convention, la Cour d’appel avait violé cet article « en méconnaissant la convention des parties [qui comportait] des termes non équivoques »42. Si, dans les motifs de votre arrêt, vous ne faites aucune référence à la notion de dénaturation, le moyen se fondait cependant sur ce cas d’ouverture, que votre arrêt, contrairement à votre jurisprudence jusqu’alors constante, accueille et sanctionne. Il y a donc sans doute lieu d’en déduire que vous acceptez dorénavant de sanctionner la méconnaissance des termes non équivoques d’une convention, la portée de cette ouverture devant toutefois encore être précisée par votre jurisprudence future.

Exception faite de la cinquième branche du moyen, la demanderesse en cassation ne tire pas, dans l’exposé du moyen, grief d’une dénaturation. Ce grief n’est, sous la réserve faite ci-avant, soulevé que dans la discussion du moyen43. La référence à ce grief y est faite dans des termes moyen), idem, 25 juin 2015, n° 57/15, numéro 3487 du registre (réponse au sixième moyen), idem, 19 novembre 2015, n° 82/15, numéro 3551 du registre (réponse à l’unique moyen), idem, 24 janvier 2016, n° 5/16, numéro 3570 du registre (réponse à la première branche de l’unique moyen), idem, 28 avril 2016, n° 44/16, numéro 3630 du registre (réponse au premier moyen), idem, 2 juin 2016, n° 55/16, numéro 3660 du registre (réponse au cinquième moyen), idem, 2 juin 2016, n° 58/16, numéro 3641 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 17 mars 2016, n° 31/16, numéro 3623 du registre (réponse à l’unique moyen), idem, 30 juin 2016, n° 69/16, numéro 3656 du registre (réponse au premier moyen), idem, 7 juillet 2016, n° 76/16, numéro 3626 du registre (réponse au cinquième moyen), idem, 13 octobre 2016, n° 80/16, numéro 3691 du registre (réponse au troisième moyen), idem, 9 février 2017, n° 11/2017, numéro 3737 du registre (réponse aux deuxième et troisième moyens réunis), idem, 30 mars 2017, n° 32/2017, numéro 3784 du registre (réponse au troisième moyen), idem, 27 avril 2017, n° 37/2017, numéro 3783 du registre (réponse au cinquième moyen), idem, 4 mai 2017, n° 40/2017, numéro 3796 du registre (réponse à l’unique moyen), idem, 18 mai 2017, n° 50/2017, numéro 3803 du registre (réponse aux sixième et onzième moyens réunis), idem, 1er juin 2017, n° 54/2017, numéro 3800 du registre (réponse au premier moyen), idem, 23 novembre 2017, n° 79/2017, numéro 3867 du registre (réponse au premier moyen), idem, 22 février 2018, n° 16/2018, numéro 3863 du registre (réponse au sixième moyen), idem, 7 juin 2018, n° 57/2018, numéro 3977 du registre (réponse au troisième moyen), idem, 18 octobre 2018, n° 88/2018, numéro 4004 du registre (réponse à la première branche du second moyen), idem, 22 novembre 2018, n° 113/2018, numéro 4023 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 31 janvier 2019, n° 23/2019, numéro 4085 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 28 mars 2019, n° 51/2019 pénal, numéro CAS-2018-00039 du registre (réponse au deuxième moyen), idem, 28 mars 2019, n° 52/2019 pénal, numéro CAS-2018-00012 du registre (réponse au cinquième moyen), idem, 4 avril 2019, n° 62/2019, numéro CAS-2018-00024 du registre (réponse à l’unique moyen), idem, 6 juin 2019, n° 99/2019, numéro CAS-2018-00069 du registre (réponse à la première branche du premier moyen), idem, 19 décembre 2019, n° 173/2019, numéro CAS-

2019-00013 du registre (réponse aux premier, deuxième et quatrième moyens réunis).

42 Idem, 31 octobre 2019, n° 138/2019, numéro CAS-2018-00097 du registre (réponse au premier moyen).

43 Mémoire en cassation, page 20. La demanderesse en cassation y expose que vous avez accueilli la théorie de la dénaturation dans un arrêt n° 33/09, numéro 2631 du registre, du 28 mai 2009 (réponse au second moyen) (arrêt reproduit comme pièce n° 1 de la Farde de documentation). Dans cet arrêt, vous avez, sous le visa de l’article 1134 du Code civil, cassé un arrêt de la Cour d’appel dans lequel celle-ci avait annulé la clause d’un contrat de travail ayant fixé un délai de préavis conventionnel de 4 ans en cas de licenciement pour être contraire au principe d’ordre public selon lequel tout contrat de travail à durée indéterminée doit pouvoir cesser par la volonté de l’un ou de l’autre des contractants. Cette cassation était fondée sur le double motif que le droit du travail (en l’occurrence l’article L. 121-3 du Code du travail) autorise les parties à un contrat de travail à déroger aux dispositions légales dans un sens plus favorable au salarié et que la stipulation conventionnelle en cause n’avait pas enlevé à l’employeur la faculté de résilier le contrat de travail, de sorte que c’était pour des motifs non pertinents que la clause avait été annulée et que ainsi la « loi des parties » prévue par l’article 1134 du Code civil n’avait pas été appliquée. Cette cassation n’était donc pas motivée par le constat que les juges du fond avaient mal interprété le contrat, et à plus forte raison, qu’ils l’avaient dénaturé.

très généraux, sans précision sur la disposition qui aurait été dénaturée et sur ce en quoi celle-

ci aurait été dénaturée. Il a été vu ci-avant que la jurisprudence de la Cour de cassation française exige, à titre de conditions de recevabilité, que le grief de la dénaturation d’un acte clair soit invoqué par le demandeur au pourvoi44 et qu’il soit formulé avec précision, donc que le moyen précise sans ambiguïté la portée du grief et désigne la pièce dont la dénaturation est invoquée45.

Ces conditions n’étant pas respectées, le grief, à supposer que vous acceptez de l’accueillir, est irrecevable.

Il s’ajoute que, ainsi qu’il a été exposé ci-avant, le grief suppose à titre de condition de fond qu’il porte sur la dénaturation d’un écrit, et non sur celle d’un fait46. Le premier moyen critique le raisonnement de la Cour d’appel de ne pas considérer comme établie la thèse de la demanderesse en cassation tirée de ce que le contrat-cadre signé entre parties ne correspond pas à l’accord de celles-ci. Cette conclusion n’est pas déduite d’un écrit, et notamment pas de l’article du contrat-cadre disposant que ce dernier est conclu à durée déterminée, mais d’une appréciation de faits, en l’occurrence de ceux ayant entouré la conclusion du contrat-cadre.

Le grief, à supposer qu’il puisse être accueilli et qu’il soit recevable, n’est donc pas fondé.

Il en suit, à titre subsidiaire, que la première branche du moyen ne saurait être accueillie, cette conclusion n’étant pas susceptible d’être remise en cause par un grief tiré de la dénaturation qui, à supposer qu’il puisse être accueilli, serait irrecevable, sinon non fondé.

S u r l a d e u x i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans sa deuxième branche du moyen, la demanderesse en cassation critique la Cour d’appel de ne pas avoir, devant le constat que les clauses du contrat-cadre sont contradictoires, donc nécessairement ambigües, interprété celles-ci en recherchant la volonté réelle des parties au regard des circonstances. Cette contradiction procèderait de ce que le contrat-cadre dispose dans son article 8 qu’il est conclu à durée déterminée, de sorte que son terme n’est pas subordonné à un préavis, ni, par voie de conséquence, à un délai de préavis, tout en disposant, dans son article 6.2.4 que dans certaines circonstances y précisées les parties peuvent y mettre fin avant la survenance de ce terme « sans respecter le délai prévu » par l’article 8, qui n’en comporte toutefois pas47.

Sur cette question la Cour d’appel a pris position comme suit :

« Cette apparente contradiction n’est pas concluante, étant donné qu’il est établi qu’il y a eu modification de l’article 8 entre les 16 et 18 novembre 2010 et qu’il n’est pas à exclure que le renvoi fait pas l’article 6.2.4 du contrat à la faculté de résiliation et au préavis à respecter dans la version signée le 18 novembre 2010 par les parties procède d’une omission de le biffer »48.

44 BORE, précité, n° 79.131, page 452.

45 Idem, n° 79.132, page 452.

46 Idem, n° 79.141, pages 453 à 454.

47 Ces précisions ne découlent que de la discussion de la branche du moyen, à l’exclusion de son énoncé (Mémoire en cassation, page 25).

48 Arrêt attaqué, page 16, avant-dernier alinéa.

La critique méconnaît que la Cour d’appel constate que le contrat-cadre dans sa version signée par les parties et dont ni l’existence, ni la validité n’ont été remises en cause, a été, au regard de son article 8, qui est clair et précis, conclu à durée déterminée, de sorte que c’est ce contrat-

cadre et cet article 8 qui constituent la « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil.

Ils reflètent la volonté réelle des parties au regard des circonstances. Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’apparente contradiction existant entre l’article 8 du contrat-cadre signé et l’article 6.2.4 de ce dernier, qui n’est pas concluante parce qu’elle n’est pas de nature à remettre en cause le fait que l’accord des parties a porté sur l’article 8 du contrat-cadre tel qu’il a été signé par celles-ci le 18 novembre 2010 et non sur une proposition de texte différente du 16 novembre 2010, qui n’a pas été reprise dans le contrat signé.

La branche du moyen reproche donc à la Cour d’appel d’avoir omis de rechercher la réelle intention des parties au sujet de la portée de l’article 8 du contrat-cadre, alors qu’elle a procédé à cette recherche et qu’elle a dans le cadre de cette recherche écarté pour les motifs précités l’argument tiré de l’article 6.2.4 comme étant non concluant.

Il en suit que la deuxième branche du moyen manque en fait.

A titre subsidiaire elle ne saurait être accueillie pour les motifs exposés dans le cadre de la discussion de la première branche du moyen.

Cette conclusion n’est pas susceptible d’être remise en cause par un grief tiré de la dénaturation qui, à supposer qu’il puisse être accueilli, serait irrecevable, faute d’avoir été soulevé avec précision, sinon non fondé, la dénaturation supposant un écrit clair, donc susceptible d’un seul sens49, mais la demanderesse en cassation mettant elle-même en exergue l’ambiguïté de la combinaison des deux dispositions confrontées, donc des articles 8 et 6.2.4 du contrat-cadre.

S u r l a t r o i s i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la troisième branche du moyen, la demanderesse en cassation critique à nouveau la Cour d’appel d’avoir, pour retenir comme applicable le contrat-cadre dans sa version signée par les parties, omis de rechercher la volonté réelle de celles-ci eu égard aux contestations élevées par certaines d’entre elles et d’avoir constaté qu’elle « voit mal comment elle pourrait accorder sa préférence à la version adoptée le 16 novembre 2010 par le seul associé commandité du Fonds au déterminent de celle signée deux jours plus tard par les trois parties, même pour le cas où il était avéré qu’il y aurait eu manipulation informatique »50 et de ce que « l’intention des parties de conclure un contrat à durée indéterminée ne découle dès lors pas à suffisance de droit des éléments factuels antérieurs à la signature du Contrat-Cadre »51.

Cette critique méconnaît la portée du raisonnement de la Cour d’appel, qui, après avoir constaté que l’accord des parties a porté sur le contrat-cadre qui a été signé par elles et dont elles n’ont remis en cause ni l’existence, ni la validité, a rejeté comme non concluants, voire comme non pertinents, les moyens de la demanderesse en cassation tirés de ce que l’accord a en réalité porté 49 BORE, précité, n° 79.151, page 454.

50 Arrêt attaqué, page 15, dernier alinéa.

51 Idem, page 16, deuxième alinéa.

sur un autre texte. Ce raisonnement a ainsi eu pour objet la recherche de la volonté réelle des parties eu égard aux contestations élevées.

Il en suit que la branche du moyen, reprochant à la Cour d’appel d’avoir omis de procéder à une recherche à laquelle elle s’est pourtant livrée, manque en fait.

A titre subsidiaire elle ne saurait être accueillie pour les motifs exposés dans le cadre de la discussion de la première branche du moyen.

Cette conclusion n’est pas susceptible d’être remise en cause par un grief tiré de la dénaturation qui, à supposer qu’il puisse être accueilli, serait irrecevable, faute d’avoir été soulevé avec précision, sinon non fondé, le grief devant porter sur la dénaturation d’un écrit, et non sur celle d’un fait52, la demanderesse en cassation reprochant dans la troisième branche à la Cour d’appel d’avoir mal interprété les faits invoqués par elle à l’appui de sa thèse tirée de ce que l’accord des parties a porté sur un texte différent de celui qui a été signé par elles.

S u r l a q u a t r i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la quatrième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir tiré les conséquences légales de ses constatations en retenant que « il n’est pas à exclure, en l’absence d’une indication quelconque que ces points [dont la question de la durée du contrat-cadre] aient été discutés et solutionnés durant la réunion, que ceux-ci n’étaient pas encore définitivement tranchés par [SOC4)] à l’issue de la réunion »53 du conseil d’administration d’SOC4) après qu’elle aurait constaté que, au regard de la première résolution du conseil d’administration, les termes du contrat-cadre et la signature sont expressément approuvés et qu’il n’appartenait pas au comité de pilotage de finaliser le contrat-cadre.

Aux fins de saisir la portée de la critique, il importe de citer le raisonnement critiqué dans son ensemble :

« 6. Deux points sont litigieux entre parties. D’une part, celui de la portée de l’accord de l’associé commandité qui a approuvé une version soit définitive, soit « substantiellement proche de la version définitive » et, d’autre part, tel que le tribunal l’a retenu, l’éventuelle contrariété de l’article 8 dans sa version définitive avec d’autres clauses du contrat.

Les développements des parties relatifs à la portée de l’accord de l’associé commandité et aux circonstances qui ont mené à la modification de l’article 8 du Contrat-Cadre sont, d’une part, non concluants, et, d’autre part, non pertinents.

6.1. Ils sont tout d’abord non concluants en ce qu’il n’est pas établi avec certitude si l’associé commandité a approuvé la version définitive ou une « version substantiellement proche de la version définitive » du Contrat-Cadre.

Il est mentionné sous le point 1 intitulé « Documentation » du procès-verbal de la réunion du 16 novembre 2010 que chaque administrateur s’est vu soumettre seize documents, dont le projet de Contrat-Cadre, dans une version soit définitive, soit 52 BORE, précité, n° 79.141, pages 453 à 454.

53 Arrêt attaqué, page 14, dernier alinéa.

substantiellement proche de la version définitive, sans que cependant il n’y ait été fait état du caractère définitif ou non des différents documents soumis aux administrateurs.

La version du Contrat-Cadre soumise au conseil d’administration était celle envoyée par l’avocat E) aux parties le 16 novembre 2010 à 14.02 heures, imprimée par F) sur son ordinateur à 14.20 heures.

SOC2) prétend péremptoirement que l’associé commandité n’aurait approuvé qu’une version substantiellement proche de la version définitive et qu’il aurait appartenu au comité de pilotage, délégué à ces fins, de finaliser le Contrat-Cadre. Cette affirmation n’est pas confirmée par la teneur de la première résolution du conseil d’administration dont il découle que « la Convention-Cadre dont les termes et la signature sont expressément approuvés ».

Il n’est d’autre part pas non plus établi si et dans quelle mesure des discussions ont porté lors de la réunion du conseil d’administration d’SOC4) sur des clauses particulières du contrat et notamment sur l’article 8. Cependant, et au regard des courriels échangés le 16 novembre 2010 par D) et l’avocat E) qui était en charge de la rédaction du Contrat-Cadre dans la demi-heure ayant précédé la réunion du conseil d’administration d’SOC4), desquels il ressort que certains points relatifs notamment à la durée du contrat, à la faculté ou non de le résilier et à l’éventuelle survivance de l’obligation d’allocation définitive des actifs au-delà de la fin du contrat étaient encore en discussion, il n’est pas à exclure, en l’absence d’une indication quelconque que ces points aient été discutés et solutionnés durant la réunion, que ceux-ci n’étaient pas encore définitivement tranchés par l’associé commandité à l’issue de la réunion.

Il en découle que l’objet et la portée de la délégation de pouvoirs accordée par le conseil d’administration de l’associé commandité à l’administrateur D) et à F) et G) de faire tout ce qui est « utile et nécessaire pour la signature du Contrat-cadre » sont, au regard de sa formulation vague et de l’absence d’indications fiables quant aux discussions menées, impossibles à retracer.

Il en est encore ainsi des circonstances qui ont mené à la rédaction nouvelle de l’article 8 tel que signé le 18 novembre 2010 par les trois parties au Contrat-Cadre.

Les sociétés intimées contestent la version de l’appelante qui soutient que cette modification a été opérée à partir de l’ordinateur de F), secrétaire général du Fonds, de l’accord des trois personnes mandatées par le conseil d’administration. Elles soutiennent au contraire que cette modification s’est faite à l’insu de F) et de G) et font valoir que si la version a été modifiée à partir de l’ordinateur du secrétaire général, il a dû y avoir intrusion non autorisée d’un tiers dans cet ordinateur.

Les parties se perdent en hypothèses et conjectures et si même certaines déclarations sont soit avérées (la Cour admet au regard des expertises techniques versées que la version définitive du Contrat-Cadre a été établie à partir de l’ordinateur portable de F)), soit difficilement crédibles (la manipulation de l’ordinateur par un tiers et le fait que cette modification se serait faite dans un laps de temps restreint à la fin de la réunion du conseil d’administration de l’associé commandité dans le bureau du secrétaire général du Fonds), la Cour ne saurait en tirer des conclusions certaines. »54.

La demanderesse en cassation soutient que l’accord des parties a porté non sur le contrat-cadre tel qu’il a été signé entre parties le 18 novembre 2010, stipulé à durée déterminée au regard de son article 8, mais sur un contrat-cadre stipulé, au regard d’un article 8 autrement libellé, à durée indéterminée. Au soutien de cette allégation elle fit valoir à titre d’indice que le conseil d’administration d’SOC4) aurait approuvé ce second texte à titre de texte définitif en date du 16 novembre 2010. La Cour d’appel rejeta cet indice comme non concluant, parce qu’il n’était pas établi avec certitude si cette approbation portait, dans l’esprit du conseil d’administration, sur un texte définitif ou sur un texte qui était encore susceptible de modification.

Tout en rejetant cet indice comme étant non concluant, elle rejeta également un argument de la défenderesse en cassation, SOC2), tiré de ce que le conseil d’administration d’SOC4) était bien conscient, en approuvant le contrat-cadre comportant un article 8 différent de celui qui sera signé par les parties le 18 novembre 2010, de ne pas encore approuver la version définitive du contrat, mais seulement une version substantiellement proche de celle-ci et qu’il avait délégué la finalisation du texte définitif à un comité de pilotage. Cet argument a été rejeté au motif qu’il n’était pas établi « par la teneur de la première résolution du conseil d’administration dont il découle que « la Convention-Cadre dont les termes et la signature sont expressément approuvés » »55.

La demanderesse en cassation considère que ce motif, de rejet de l’argument de la défenderesse en cassation SOC2), aurait obligé la Cour d’appel de tenir comme établi l’indice invoqué par elle, tiré de ce que le conseil d’administration d’SOC4) avait approuvé un texte qu’il considérait être le texte définitif.

Cette critique méconnaît que la Cour d’appel, si elle retient qu’il n’est pas établi, au regard de la teneur de la première résolution du conseil d’administration d’SOC4), que ce dernier avait l’intention d’approuver la version lui soumise à titre de texte totalement provisoire, susceptible de modifications ultérieures, elle constate également, par les motifs précités, qu’il n’est, à l’inverse, pas non plus établi que le conseil d’administration avait l’intention d’approuver la version lui soumise à titre de texte définitif. Si elle invoque à titre d’argument à l’appui de la première thèse la teneur de la résolution du conseil d’administration, elle fait valoir à titre d’arguments en faveur de la seconde thèse le fait que la durée du contrat a été l’objet de discussions au cours de la réunion du conseil d’administration, la circonstance qu’il n’est pas à exclure que cette question n’avait pas encore été tranchée à l’issue de la réunion, de sorte que la délégation de pouvoirs accordée par le conseil d’administration est susceptible d’être comprise comme mandat de finaliser ces points, ensemble avec la circonstance que la version définitive du contrat émane de l’ordinateur portable de l’un des bénéficiaires de cette délégation de pouvoirs. Elle conclut qu’elle n’est pas en mesure de tirer des conclusions certaines, de sorte que la demanderesse en cassation n’a pas réussi à établir l’indice allégué par elle.

La branche du moyen procédant ainsi d’une lecture incorrecte de l’arrêt, manque en fait.

A titre subsidiaire, elle critique un raisonnement de la Cour d’appel prenant position sur un indice allégué par la demanderesse en cassation qui, même à le supposer fondé, n’aurait pas eu d’incidence sur la solution du litige. L’allégation litigieuse est tirée de ce que le conseil 54 Idem, page 14, deuxième alinéa, à page 15, antépénultième alinéa.

55 Idem, page 14, avant-dernier alinéa.

d’administration d’SOC4) a, par sa résolution, approuvé la version non signée du contrat-cadre dans l’intention d’approuver celle-ci à titre de texte définitif. Elle a pour but d’établir un indice que la version signée du contrat-cadre ne reflète pas l’accord des parties.

Cet indice, quel que soit son bien-fondé, n’est cependant pas pertinent pour remettre en cause le motif de la Cour d’appel tiré de ce que seul le contrat-cadre du 18 novembre 2010 forme la « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil, parce qu’il a été signé par celle-ci, y compris par SOC4), la résolution du conseil d’administration de cette dernière n’étant de toute façon pas de nature à suppléer à l’absence de preuve d’approbation des autres parties contractantes :

« 4. Etant donné que l’existence, voire la validité du Contrat-Cadre signé le 18 novembre 2010 ne sont pas remises en cause, la Cour part de la prémisse que c’est ce contrat signé qui lie les parties. Il s’agit d’une application pure et simple de l’article 1134 du Code civil qui dispose que les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Il s’y ajoute que le Contrat-Cadre a été signé par les trois parties au contrat, tandis que la résolution du 16 novembre 2010 émane du seul associé commandité. »56.

Il en suit, à titre subsidiaire, que la branche du moyen, critiquant des motifs qui ne sont pas susceptibles d’avoir une influence sur la solution retenue57, est inopérante.

A titre encore plus subsidiaire elle ne saurait être accueillie pour les motifs exposés dans le cadre de la discussion de la première branche du moyen.

Cette conclusion n’est pas susceptible d’être remise en cause par un grief tiré de la dénaturation qui, à supposer qu’il puisse être accueilli, serait irrecevable, faute d’avoir été soulevé avec précision, sinon non fondé, le grief devant porter sur la dénaturation d’un écrit, et non sur celle d’un fait58, la demanderesse en cassation reprochant dans la quatrième branche à la Cour d’appel d’avoir mal apprécié les éléments de preuve invoqués par les parties aux fins de trancher si le conseil d’administration d’SOC4) a approuvé la version lui soumise du contrat-cadre comme version définitive, non susceptible de modification ultérieure ou comme version qui était encore susceptible de faire l’objet de modifications.

S u r l a c i n q u i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la cinquième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir dénaturé une délégation de pouvoirs accordée en date du 16 novembre 2010 par le conseil d’administration d’SOC4).

Cette délégation de pouvoirs, qui résulte de la quatrième résolution du procès-verbal de la réunion de ce conseil d’administration, est libellée comme suit :

« QUATRIÊME RÉSOLUTION 56 Idem, page 13, avant-dernier alinéa.

57 BORE, précité, n° 83.52, page 510.

58 Idem, n° 79.141, pages 453 à 454.

Le Conseil d’Administration DÉCIDE de déléguer tous pouvoirs soit à deux Administrateurs agissant conjointement, soit à un Administrateur et Monsieur F) ou Monsieur G), agissant conjointement, Pour faire tout ce qui est nécessaire ou utile en vue de la mise en œuvre des résolutions précédentes, y compris la signature de la Convention de Cession, la signature de la Convention Cadre, la signature des Lettres de Protection Mutuelle (pour acceptation), la signature des projets de fusion, la fixation de l’agenda des assemblées, ainsi que des dates auxquelles elles auront lieu »59.

Parmi les motifs cités ci-avant dans le cadre de la discussion de la quatrième branche du moyen, la Cour d’appel s’est prononcée comme suit au sujet de cette délégation de pouvoirs :

« Il n’est d’autre part pas non plus établi si et dans quelle mesure des discussions ont porté lors de la réunion du conseil d’administration d’SOC4) sur des clauses particulières du contrat et notamment sur l’article 8. Cependant, et au regard des courriels échangés le 16 novembre 2010 par D) et l’avocat E) qui était en charge de la rédaction du Contrat-Cadre dans la demi-heure ayant précédé la réunion du conseil d’administration d’SOC4), desquels il ressort que certains points relatifs notamment à la durée du contrat, à la faculté ou non de le résilier et à l’éventuelle survivance de l’obligation d’allocation définitive des actifs au-delà de la fin du contrat étaient encore en discussion, il n’est pas à exclure, en l’absence d’une indication quelconque que ces points aient été discutés et solutionnés durant la réunion, que ceux-ci n’étaient pas encore définitivement tranchés par l’associé commandité à l’issue de la réunion.

Il en découle que l’objet et la portée de la délégation de pouvoirs accordée par le conseil d’administration de l’associé commandité à l’administrateur D) et à F) et G) de faire tout ce qui est « utile et nécessaire pour la signature du Contrat-cadre » sont, au regard de sa formulation vague et de l’absence d’indications fiables quant aux discussions menées, impossibles à retracer. »60.

Ces motifs s’insèrent dans le cadre l’examen fait par la Cour d’appel d’un indice invoqué par la demanderesse en cassation à l’appui de son allégation tirée de ce que le contrat-cadre signé par les parties en date du 18 novembre 2010, stipulé par l’effet de son article 8 à durée déterminée, ne refléterait pas l’accord des parties, qui aurait en réalité porté sur une autre version de ce contrat-cadre, stipulé par l’effet d’un article 8 autrement libellé à durée indéterminée. L’indice invoqué à l’appui de cette allégation est tiré de ce que le conseil d’administration d’SOC4) a approuvé cette seconde version lors de sa réunion du 16 novembre 2010 et que cette approbation serait à comprendre comme ayant porté, dans l’esprit du conseil d’administration, sur un texte définitif, qui ne serait plus susceptible de modification.

La Cour d’appel a considéré que cet indice n’était pas concluant parce qu’il ne pouvait être établi avec certitude si le conseil d’administration avait approuvé la version finalement non signée du contrat-cadre à titre de texte définitif ou seulement à titre de texte qui était encore susceptible de faire l’objet de modifications.

La cinquième branche du moyen critique, comme la quatrième, un raisonnement de la Cour d’appel prenant position sur un indice de la demanderesse en cassation qui, même à le supposer 59 Pièce n° 2 de la Farde 1 de la demanderesse en cassation, page 5.

60 Arrêt attaqué, page 14, dernier alinéa, à page 15, deuxième alinéa.

fondé, n’aurait pas eu d’incidence sur la solution du litige. En effet, l’indice, quel que soit son bien-fondé, n’est pas pertinent pour remettre en cause le motif de la Cour d’appel tiré de ce que seul le contrat-cadre du 18 novembre 2010 forme la « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil, parce qu’il a été signé par les celle-ci, y compris par SOC4), la résolution du conseil d’administration de cette dernière n’étant de toute façon pas de nature à suppléer à l’absence de preuve d’approbation des autres parties contractantes.

Il en suit que la branche, critiquant des motifs qui ne sont pas susceptibles d’avoir une influence sur la solution retenue, est inopérante.

A titre subsidiaire elle ne saurait être accueillie pour les motifs exposés dans le cadre de la discussion de la première branche du moyen.

Cette conclusion n’est pas susceptible d’être remise en cause par le fait que le grief est tiré de la dénaturation, à supposer qu’un tel grief puisse être accueilli en soi et en particulier lorsqu’il vise, comme en l’espèce, non une convention, mais une pièce invoquée à titre de preuve, en l’occurrence le procès-verbal de la réunion du conseil d’administration d’une société commerciale. Ce grief suppose l’existence d’un écrit susceptible d’un seul sens, cette clarté s’appréciant par rapport aux données du litige et à la volonté des parties61. L’écrit de l’espèce est d’une formulation vague, ainsi que le relève à juste titre la Cour d’appel, et il est incertain quelle portée ses auteurs ont voulu lui attribuer, alors qu’il n’est, au regard des constatations souveraines de la Cour d’appel, pas exclu qu’il ait eu pour but de permettre aux mandataires désignés de discuter et de résoudre avec les représentants des autres parties des questions restées en suspens, se rapportant notamment à la durée du contrat. L’écrit ne réunit donc pas les critères d’un acte clair et précis, susceptible de donner lieu à application de la théorie de la dénaturation.

S u r l a s i x i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la sixième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir tiré les conséquences de ses propres constatations. Cette contradiction existerait en ce que la Cour d’appel a réfuté la thèse de la défenderesse en cassation, SOC2), tirée de ce que le conseil d’administration d’SOC4), en approuvant le contrat-cadre dans une version stipulée à durée indéterminée, avait l’intention de n’approuver qu’une version provisoire, donc non encore définitive, mais seulement substantiellement proche de la version définitive, la négociation de celle-ci ayant été déléguée à un comité de pilotage :

« SOC2) prétend péremptoirement que l’associé commandité n’aurait approuvé qu’une version substantiellement proche de la version définitive et qu’il aurait appartenu au comité de pilotage, délégué à ces fins, de finaliser le Contrat-Cadre. Cette affirmation n’est pas confirmée par la teneur de la première résolution du conseil d’administration dont il découle que « la Convention-Cadre dont les termes et la signature sont expressément approuvés ». »62.

La réfutation par la Cour d’appel de cette thèse d’SOC2) serait en contradiction avec sa décision de conclure que le contrat-cadre à durée indéterminée, approuvé le 16 novembre 2010 par le conseil d’administration d’SOC4), s’est transformé en un contrat à durée déterminée en date du 18 novembre 2010.

61 BORE, précité, n° 79.151, page 454.

62 Arrêt attaqué, page 14, avant-dernier alinéa.

Cette critique méconnaît que la Cour d’appel n’a pas constaté une transformation d’un contrat à durée indéterminée en un contrat à durée déterminée. Elle a constaté que les parties, y compris SOC4), se sont mis d’accord le 18 novembre 2010 par leur signature à conclure un contrat à durée déterminée, qui forme la « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil, et que la demanderesse en cassation n’a pas réussi à établir, les moyens de preuve invoqués par elle ayant été jugés non concluants, voire non pertinents, que l’accord a en réalité porté sur un contrat à durée indéterminée, antérieur, non signé, mais approuvé par le conseil d’administration d’SOC4).

Il en suit que la branche du moyen, qui procède d’une mauvaise lecture de l’arrêt, manque en fait.

A titre subsidiaire, la Cour d’appel a retenu qu’il n’y avait pas lieu de tenir pour établie au regard de première résolution du conseil d’administration d’SOC4), l’affirmation d’SOC2) que l’approbation du contrat-cadre à durée indéterminée par cette résolution n’aurait eu lieu que sous réserve d’une négociation finale à effectuer par un comité de pilotage. Cette constatation est à mettre en corrélation avec une seconde constatation tirée de ce qu’il n’est pas non plus établi que cette approbation a eu lieu dans l’intention inverse d’approuver un texte définitif et avec une troisième constatation tirée de ce que les parties se sont le 18 novembre 2010 mis par leur signature d’accord sur un contrat-cadre à durée déterminée, qui forme la « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil. Au regard de cette troisième constatation, la première, dont la portée est de surcroît mise en cause par la deuxième, est dépourvue de pertinence. En effet, même à supposer établi que le conseil d’administration d’SOC4) a voulu approuver en date du 16 novembre 2010 le contrat-cadre dans sa version initiale, à durée indéterminée, ce fait n’est pas de nature à mettre en échec le fait que deux jours plus tard, le 18 novembre 2010, cette partie a, ensemble avec les autres parties, signé le contrat dans sa version amendée, à durée déterminée.

Il en suit que la branche, se fondant sur un motif qui n’est pas susceptibles d’avoir une influence sur la solution retenue, est inopérante.

A titre encore plus subsidiaire elle ne saurait être accueillie pour les motifs exposés dans le cadre de la discussion de la première branche du moyen.

Cette conclusion n’est pas susceptible d’être remise en cause par un grief tiré de la dénaturation qui, à supposer qu’il puisse être accueilli, serait irrecevable, faute d’avoir été soulevé avec précision, sinon non fondé, le grief devant porter sur la dénaturation d’un écrit, et non sur celle d’un fait63, la demanderesse en cassation reprochant dans la sixième branche à la Cour d’appel d’avoir par une mauvaise appréciation des faits, omis de déduire les conséquences de sa constatation tirée de ce qu’il n’est pas établi que le conseil d’administration d’SOC4) a eu l’intention, en approuvant le contrat-cadre dans sa version initiale, d’approuver un texte provisoire qui devait encore être finalisé par un comité de pilotage.

Sur le deuxième moyen de cassation 63 Idem, n° 79.141, pages 453 à 454.

Le deuxième moyen est tiré de la violation des articles 89 de la Constitution et 240, ainsi que 587 du Nouveau Code de procédure civile, en ce que la Cour d’appel a constaté que la version applicable du contrat-cadre est celle du 18 novembre 2010, qui est un contrat à durée déterminée, à l’exclusion de celle du 16 novembre 2010, qui est un contrat à durée indéterminée, aux motifs que « cependant, et au regard des courriels échangés le 16 novembre 2010 par D) et l’avocat E) qui était en charge de la rédaction du Contrat-Cadre dans la demi-heure ayant précédé la réunion du conseil d’administration d’SOC4), desquels il ressort que certains points relatifs notamment à la durée du contrat, à la faculté ou non de le résilier et à l’éventuelle survivance de l’obligation d’allocation définitive des actifs au-delà de la fin du contrat étaient encore en discussion, il n’est pas à exclure, en l’absence d’une indication quelconque que ces points aient été discutés et solutionnés durant la réunion, que ceux-ci n’étaient pas encore définitivement tranchés par l’associé commandité à l’issue de la réunion »64, alors que la Cour d’appel a ainsi statué par un motif dubitatif ou hypothétique, qui équivaut à un défaut de motif.

Dans son deuxième moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir, par le motif précité, statué par un motif dubitatif ou hypothétique. Ce motif fait partie du raisonnement reproduit ci-avant dans la discussion de la quatrième branche du premier moyen.

Ce raisonnement a pour objet de permettre à la Cour d’appel de prendre position par rapport à l’allégation de la demanderesse en cassation tirée de ce que le conseil d’administration d’SOC4) a en date du 16 novembre 2010 approuvé le contrat-cadre dans une version stipulant une durée indéterminée en ayant eu l’intention d’approuver ainsi la version définitive du contrat-cadre.

Cette allégation constitue un indice par lequel la demanderesse en cassation entend prouver que l’accord des parties ne s’est pas porté sur le contrat-cadre, à durée déterminée, signé par toutes les parties, dont SOC4), en date du 18 novembre 2010 et considéré par la Cour d’appel comme valant « loi » des parties au sens de l’article 1134 du Code civil, mais sur la version, à durée indéterminée, du 16 novembre 2010. La Cour d’appel a retenu que cette allégation n’était pas concluante parce qu’il ne peut être établi avec certitude si le conseil d’administration d’SOC4) avait, en approuvant la version du 16 novembre 2010, l’intention d’approuver la version définitive du contrat-cadre ou seulement celle d’approuver une version certes substantiellement proche de la version définitive, mais non encore totalement finalisée.

Dans le cadre de l’appréciation du bien-fondé de cette allégation, la Cour d’appel constate :

- qu’il n’est pas « établi si et dans quelle mesure des discussions ont porté lors de la réunion du conseil d’administration d’SOC4) sur des clauses particulières du contrat et notamment sur l’article 8 »65, - qu’« au regard des courriels échangés le 16 novembre 2010 par D) et l’avocat E) qui était en charge de la rédaction du Contrat-Cadre dans la demi-heure ayant précédé la réunion du conseil d’administration d’SOC4) […] certains points relatifs notamment à la durée du contrat, à la faculté ou non de le résilier et à l’éventuelle survivance de l’obligation d’allocation définitive des actifs au-delà de la fin du contrat étaient encore en discussion » 66 et - qu’il n’existe aucune « indication quelconque que ces points aient été discutés et solutionnés durant la réunion » 67, 64 Arrêt attaqué, page 14, dernier alinéa.

65 Idem et loc.cit.

66 Idem et loc.cit.

67 Idem et loc.cit.

- de sorte que « il n’est pas à exclure […] que [ces points] n’étaient pas encore définitivement tranchés par l’associé commandité [donc SOC4)] à l’issue de la réunion » 68.

L’objet de ces motifs est donc de permettre à la Cour d’appel de constater que la demanderesse en cassation a échoué à établir que le conseil d’administration d’SOC4) avait, en approuvant le contrat-cadre dans sa version stipulée à durée indéterminée du 16 novembre 2010, l’intention d’approuver la version définitive de ce contrat.

Le recours par les juges du fond à des motifs dubitatifs ou hypothétiques est susceptible de constituer un défaut de motifs69. Ce défaut n’existe cependant que si le motif critiqué porte sur un point de fait sur lequel le juge du fond était tenu de procéder à une constatation certaine70.

Cette situation ne se présente notamment pas lorsque le juge statue sur un fait dont la charge de la preuve incombe à l’une des parties et qu’il exprime par un tel motif son doute au sujet de la preuve de ce fait71. Dès lors en effet qu’un demandeur, à qui incombe la charge de la preuve, n’a pas établi le bien-fondé de ses prétentions, le doute subsistant sur l’existence de ses droits doit nécessairement lui préjudicier72.

Le motif critiqué en l’espèce a eu pour objet de se prononcer sur le bien-fondé de la prétention de la demanderesse en cassation d’établir que l’accord des parties a porté non sur le contrat-

cadre signé par elles en date du 18 novembre 2010, mais sur une version antérieure et, dans cet ordre d’idées, sur l’existence d’un indice tiré de ce que le conseil d’administration d’SOC4), qui avait approuvé cette version antérieure à l’occasion d’une réunion du 16 novembre 2010, l’a approuvé dans la conscience qu’il s’agissait du texte définitif. Il exprime un doute au sujet du bien-fondé de cet indice. Conformément aux principes énoncés ci-avant, l’expression de ce doute ne vicie pas la décision, le juge n’ayant pas été tenu de procéder à une constatation certaine au sujet des faits allégués, mais seulement de déterminer si le débiteur de la preuve avait réussi ou échoué à établir les faits par lui allégués sans que ne subsiste de doute.

Il en suit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le troisième moyen de cassation Le troisième moyen est tiré de la violation des articles 89 de la Constitution et 240, ainsi que 587 du Nouveau Code de procédure civile, en ce que la Cour d’appel a constaté que la version applicable du contrat-cadre est celle du 18 novembre 2010, qui est un contrat à durée déterminée, à l’exclusion de celle du 16 novembre 2010, qui est un contrat à durée indéterminée, tant bien même que cette conclusion implique une contradiction entre le nouvel article 8 et l’article 6.2.4 du contrat-cadre, aux motifs que « cette apparente contradiction n’est pas concluante, étant donné qu’il est établi qu’il y a eu modification de l’article 8 entre les 16 et 68 Idem et loc.cit.

69 Voir, à titre d’illustration : Cour de cassation, 8 février 2018, n° 12/2018, numéro 3917 du registre (réponse au quatrième moyen) ; idem, 7 mai 2020, n° 66/2020, numéro CAS-2019-00070 du registre (réponse au quatrième moyen).

70 BORE, précité, n° 77.144, pages 414 à 415.

71 Voir, à titre d’illustration : Cour de cassation française, deuxième chambre civile, 4 juillet 2007, Bull. civ. II, n° 197.

72 BORE, précité, n° 77.144, page 415.

18 novembre 2010 et qu’il n’est pas à exclure que le renvoi fait par l’article 6.2.4. du contrat à la faculté de résiliation et au préavis à respecter dans la version signée le 18 novembre 2010 par les parties procède d’une omission de le biffer »73, alors que la Cour d’appel a ainsi statué par un motif dubitatif ou hypothétique, qui équivaut à un défaut de motif.

Dans son troisième moyen, la demanderesse en cassation critique la Cour d’appel d’avoir eu recours à un second motif dubitatif ou hypothétique. Le motif critiqué s’inscrit également dans le cadre de l’examen de la prétention de la demanderesse en cassation de voir décider que l’accord des parties a porté sur la version du contrat-cadre approuvée par le conseil d’administration d’SOC4) en date du 16 novembre 2010 et non sur celle signée par les parties en date du 18 novembre 2010. A l’appui de cette prétention, la demanderesse en cassation avait invoqué, outre l’indice tiré de ce que le conseil d’administration d’SOC4) en approuvant la version du contrat du 16 novembre 2010 avait l’intention d’approuver une version définitive du contrat, que la version signée par les parties en date du 18 novembre 2010 comporte des contrariétés entre l’article 8, nouveau, disposant que le contrat est conclu à durée déterminée, et d’autres articles, dont l’article 6.2.4.

La Cour d’appel a conclu que la demanderesse n’avait pas réussi à établir l’indice tiré de la contrariété entre les articles 8 et 6.2.4 du contrat-cadre dans sa version signée, du 18 novembre 2010 aux motifs suivants :

« 7. La volonté des parties de conclure un contrat à durée indéterminée découlerait encore, selon SOC1), de clauses du Contrat-Cadre inconciliables avec l’article 8 signé par les parties. Elle renvoie à la motivation du tribunal qui a notamment retenu que « l’instauration d’un terme qui mettrait fin à l’obligation de réallocation est en contradiction complète avec l’intention des parties visant à exclure tout appauvrissement en relation avec l’affectation transitoire des biens privatifs dans le compartiment commun. Elle aboutirait à vider de toute substance le principe exprimé à l’article 5.1.2.

7.1. SOC1) renvoie à l’article 6.2.4. du contrat signé selon lequel « à défaut de réalisation des Conditions Suspensives au moins un Jour Ouvré avant le 23 décembre 2010, celles-ci seront irrévocablement considérées comme n’étant pas remplies et chaque Partie pourra librement décider de mettre fin immédiatement à la Convention par notification aux autres Parties sans respecter le délai prévu à la section 8 ». Elle approuve le tribunal qui a, entre autres, fait état de cet article pour en déduire que les parties avaient eu l’intention de conclure un contrat à durée indéterminée qui prévoyait dans la version initiale de l’article 8 la faculté pour les parties de résilier le contrat moyennant un délai de préavis à respecter, contrairement à la version signée le 18 novembre 2010 qui, pour être à durée déterminée, ne contient pas un tel délai de préavis à respecter.

Cette apparente contradiction n’est pas concluante, étant donné qu’il est établi qu’il y a eu modification de l’article 8 entre les 16 et 18 novembre 2010 et qu’il n’est pas à exclure que le renvoi fait par l’article 6.2.4. du contrat à la faculté de résiliation et au préavis à respecter dans la version signée le 18 novembre 2010 par les parties procède d’une omission de le biffer. » 74.

73 Arrêt attaqué, page 16, avant-dernier alinéa.

74 Idem, même page, troisième à cinquième alinéas.

Selon le moyen, la Cour d’appel aurait opéré par motif dubitatif en constatant « qu’il n’est pas à exclure que le renvoi fait par l’article 6.2.4. du contrat à la faculté de résiliation et au préavis à respecter dans la version signée le 18 novembre 2010 par les parties procède d’une omission de le biffer »75.

Cette partie de phrase est à mettre dans son contexte. La Cour d’appel constate que l’allégation de la demanderesse en cassation tirée d’une contradiction entre les articles 8, nouveau, et 6.2.4 n’est pas concluante, donc n’est pas fondée, la contradiction invoquée n’étant qu’apparente. En effet, il est établi que l’article 8, relatif à la durée du contrat-cadre, a été modifié entre le 16 et le 18 novembre 2010. Ce fait étant établi et n’étant pas susceptible d’être remis en cause par l’existence d’une éventuelle contrariété entre l’article 8, nouveau, et l’article 6.2.4, il est sans pertinence de s’interroger sur les motifs de cette contrariété. L’hypothèse invoquée par la Cour d’appel, d’un maintien par inadvertance du dernier de ces articles, constitue ainsi, dans la logique du raisonnement, un motif surabondant. Or, un tel motif n’est pas susceptible d’être sanctionné au titre d’un motif dubitatif ou hypothétique76.

Il s’ajoute, conformément à ce qui a été exposé ci-avant dans le cadre de la discussion du deuxième moyen, que si le motif critiqué exprime un doute, ce dernier ne vicie pas la décision, le motif s’inscrivant dans l’examen d’une prétention de la demanderesse en cassation, dont celle-ci a la charge de la preuve et supporte le risque de la preuve, de sorte que le juge n’a pas été tenu de constater l’existence des faits allégués, mais seulement de déterminer si le débiteur de la preuve a réussi ou échoué à établir les faits par lui allégués sans que ne subsiste de doute.

En l’espèce, la Cour d’appel a, par le motif critiqué, constaté que la preuve des faits allégués n’a pas été rapporté avec certitude.

Il en suit que le troisième moyen n’est pas fondé.

Sur le quatrième moyen de cassation Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 1354 du Code civil, en ce que la Cour d’appel a constaté que la version applicable du contrat-cadre est celle du 18 novembre 2010, qui est un contrat à durée déterminée, à l’exclusion de celle du 16 novembre 2010, qui est un contrat à durée indéterminée, sans prendre en considération la poursuite des relations contractuelles après l’écoulement du terme retenu ainsi que le comportement des parties avant et après ce terme, qui constituent un aveu extrajudiciaire, aux motifs développés dans la partie IV de l’arrêt attaqué77, alors que « l’exécution par une partie d’une clause particulière d’un contrat constitue un aveu extrajudiciaire du fait que celui-ci comprenait dès sa formation ladite clause à moins qu’elle ne soit en mesure de démontrer que cette clause a été adoptée ultérieurement ; qu’en présence d’un doute sur la durée d’un contrat, la seule circonstance que les parties aient poursuivi son exécution au-delà de son terme supposé constitue un aveu extrajudiciaire du fait que les parties avaient dès l’origine convenu de conclure un contrat sans limitation de durée ; qu’en subordonnant l’existence d’un aveu extrajudiciaire sur la durée de la convention-cadre à la circonstance que sa prorogation au-delà du 31 décembre 2012 ou sa tacite reconduction ait eu lieu conformément aux dispositions des articles 9 et 12 du Contrat échu, la Cour d’appel a violé l’article 1354 du Code civil ; que la Cour d’appel qui a constaté 75 Idem, même page, cinquième (donc avant-dernier) alinéa.

76 BORE, précité, n° 77.145 et n° 77.152, page 415.

77 Arrêt attaqué, page 19, dernier alinéa, à page 24, dernier alinéa.

l’exécution du Contrat au-delà du 31 décembre 2012 aurait dû relever l’aveu extrajudiciaire de l’intention des parties de conclure un contrat durée indéterminée »78.

La demanderesse en cassation soutenait en instance d’appel que si la Cour d’appel devait considérer que le contrat-cadre a été conclu à durée déterminée, il y aurait lieu, à titre subsidiaire, de retenir que le contrat a été prorogé par la volonté des parties. Cette prorogation serait établie par le comportement des parties tant avant qu’après le terme du contrat, intervenu le 31 décembre 2012, ce comportement constituant un aveu extrajudiciaire au sens de l’article 1354 du Code civil79. Elle invoquait à l’appui de cette thèse un ensemble de faits80.

Son adversaire, SOC2), répliquait en invoquant les articles 9 et 12 du contrat-cadre, dont découle que toute modification du contrat suppose la conclusion d’un écrit signé par les parties81. La demanderesse en cassation considérait que ces dispositions n’étaient pas applicables82.

La Cour d’appel rejeta cette prétention aux motifs suivants :

« 1.4 Les comportements des parties dont SOC1) entend déduire leur volonté implicite de proroger, voire prolonger, voire conclure un nouveau Contrat-Cadre se sont situés avant et après la date butoir du 31 décembre 2012.

L’argument de l’intimée de la tacite reconduction du Contrat-Cadre au-delà du terme est à écarter, étant donné que la formulation des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre est générale et vise notamment tous les cas où le contrat se trouve modifié, partant également en cas de modification de la durée du contrat issue d’une tacite reconduction.

Si la durée déterminée du contrat pouvait être changée de l’accord des parties, cette modification devait résulter au vœu de l’article 9 d’« un document signé par ou pour le compte des Parties à la présente convention », voire selon l’article 12 d’«un écrit signé par les Parties ».

Ni la validité, ni la portée de ces dispositions ne sont contestées par SOC1) et le Fonds, de sorte que la conclusion que SOC1) entend déduire de l’existence des actes des parties postérieurs à l’arrivée du terme, à savoir qu’ils établiraient la volonté implicite de celles-ci de prolonger le Contrat-Cadre au-delà du terme, voire de conclure un nouveau contrat à teneur identique, mais à durée indéterminée, est à écarter par application de l’article 9, voire des articles 9 et 12 pour ne pas constituer un écrit signé par les parties tendant à la modification d’une disposition du Contrat-Cadre. Il s’agit de tous les comportements énumérés ci-dessus sub IV.1.1., à l’exception de la résolution de l’associé commandité du 5 octobre 2012, qui mérite un examen séparé.

Il s’y ajoute que la prorogation du terme doit découler d’un accord implicite ou explicite des parties, antérieur à l’arrivée du terme (Cour de Cassation, 29 juin 2000, P.31, 440).

78 Enoncé du moyen (Mémoire en cassation, page 41, passage débutant par « alors que ».

79 Arrêt attaqué, page 19, dernier alinéa.

80 Idem, page 20, premier alinéa.

81 Idem, même page, dernier alinéa.

82 Idem, même page, troisième au cinquième alinéa.

Cette conclusion vaut également pour le cas où, tel que le fait valoir SOC1) (qui cite pêle-mêle la prolongation, le renouvellement tacite et la conclusion d’un contrat nouveau et, ce, abstraction faite de la question de savoir si la prorogation fait continuer l’ancien contrat ou s’il y a conclusion d’un nouveau contrat dont les modalités sont à déterminer par le juge), il y aurait eu conclusion implicite par les parties d’un nouveau contrat après le 31 décembre 2012, conclusion qui s’induirait des actions postérieures qui l’attesteraient, étant donné que si l’aveu en action est susceptible d’établir la volonté des parties d’exécuter un contrat dont l’existence est contestée, ce « nouveau » contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12. »83.

La demanderesse entendait encore déduire la volonté des parties de proroger le contrat-cadre au-delà du terme d’une résolution du conseil d’administration d’SOC4) du 5 octobre 201284.

La Cour d’appel rejeta cette prétention aux motifs suivants :

« Cette résolution du 5 octobre 2012 adoptée à l’unanimité par le conseil d’administration de l’associé commandité dispose que « l’affectation des actifs immobiliers aux différents compartiments de la Société devra se faire le plus rapidement possible « sur la base (i) des comptes arrêtés au 31 décembre 2012 et (ii) de l’évaluation de l’Expert indépendant arrêtée à la même date ». SOC1) en déduit, dans la partie consacrée au Contrat-Cadre, que les comptes arrêtés au 31 décembre 2012 ne pouvant forcément être établis qu’en 2013, l’allocation des actifs ne pouvait se faire qu’après le 31 décembre 2012, et en conclut que les parties ont nécessairement entendu proroger l’exécution du Contrat-Cadre au-delà du 31 décembre 2012.

SOC2) soutient ici encore que la résolution du 5 octobre 2012 ne remplit pas les conditions de forme prévues aux articles 9 et 12 du Contrat-Cadre et que faute d’un écrit émanant des parties, elle ne saurait être considérée comme élément venant établir les développements de l’intimée.

L’argumentation que SOC1) a développée dans l’arrêt sous IV.1.3. pour faire échec audit moyen de défense d’SOC2) vaut pour tous les éléments avancés comme support à la théorie de l’aveu en action, dont la résolution. Cette argumentation a été déclarée non pertinente par la Cour.

La résolution du 5 octobre 2012 se distingue cependant des éléments dont l’intimée a déduit la volonté implicite des parties de proroger le Contrat-Cadre, éléments d’ores et déjà rejetés par la Cour, en ce qu’elle fait état dans le chef de l’associé commandité de sa volonté exprimée antérieurement à l’arrivée du terme, de procéder à l’allocation définitive des actifs immobiliers au profit des compartiments de destination du Fonds.

Etant donné que cette allocation était supposée se faire sur base de la valeur desdits actifs à déterminer au 31 décembre 2012, cette réallocation était à réaliser au plus tôt en 2013, donc après l’arrivée du terme.

La question de savoir si cette résolution est équivalente à l’écrit dont question aux articles 9 et 12 du Contrat-Cadre n’est pas analysée par SOC1), ni celle ayant trait au fait que l’écrit devrait émaner des trois signataires du contrat, ni celle connexe de savoir 83 Idem, page 21, dernier alinéa, à page 22, avant-dernier alinéa.

84 Idem, page 22, dernier alinéa.

si la résolution prise par SOC4) peut être considérée comme l’avoir été par les trois parties signataires, vu qu’elle a été prise à l’unanimité des membres du conseil d’administration composé à parité égale d’administrateurs nommés par chaque associé commanditaire.

La Cour rejoint la position d’SOC2) quant à la raison qui a poussé les parties à insérer les articles 9 et 12 dans le Contrat-Cadre85, de sorte qu’il y a lieu d’en conclure que les questions exposées à l’alinéa précédent requièrent une réponse négative et que la résolution du 5 octobre 2012 n’équivaut pas à un écrit établi par les trois parties signataires au sens des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre.

La question de la portée de la résolution devient donc sans objet. »86.

La demanderesse en cassation critique que la Cour d’appel, après avoir constaté que le contrat-

cadre a été exécuté après la date du terme aurait dû en déduire l’existence d’un aveu extrajudiciaire du fait que les parties avaient dès l’origine l’intention de conclure un contrat à durée indéterminée et n’aurait pas dû écarter cet aveu du seul fait que les articles 9 et 12 du contrat-cadre subordonnent toute modification de ce dernier à la rédaction d’un écrit signé par les parties.

Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour apprécier l’existence d’un aveu extrajudiciaire87. En l’espèce, la Cour d’appel a constaté que les faits invoqués par la demanderesse en cassation ne sont pas pertinents pour établir l’existence d’un aveu extrajudiciaire de leur volonté de conclure en réalité un contrat d’une durée différente de celle stipulée dans le contrat signé. Ce défaut de pertinence découle, selon son appréciation, de ce que ce contrat signé définit lui-même la procédure selon laquelle une dérogation aux dispositions stipulées est à convenir, de sorte que les faits invoqués ne sont, en l’absence du respect de cette procédure, pas de nature à établir ce que la demanderesse en cassation entend en déduire.

Le moyen ne tend qu’à remettre en discussion cette appréciation souveraine, de sorte qu’il ne saurait être accueilli.

A titre subsidiaire, le droit de la preuve ne présente, sous réserve de certaines règles d’ordre public ou impératives, telle la foi attachée à l’acte authentique, qu’un caractère supplétif, de sorte qu’il est susceptible de faire l’objet de conventions dérogatoires88. En l’espèce, les parties 85 La Cour d’appel se réfère en cet endroit au passage suivant de son arrêt « Elle [SOC2)] fait valoir qu’une prolongation du Contrat-Cadre décidée implicitement par les parties se heurterait auxdits articles au motif que « cette stipulation sert précisément à éviter que l’on débatte devant les tribunaux, comme Soc1) essaie de le faire, du sens d’événements quelconques, et même de manifestations de volonté des parties, qui ne prennent pas la forme d’un document signé par ou pour le compte des parties, ou que l’on essaie de tirer argument de leurs retards ou omissions » (idem, page 21, deuxième alinéa).

86 Idem, page 23, dernier alinéa, à page 24, avant-dernier alinéa.

87 BORE, précité, n° 64.72, page 291 ; Jurisclasseur Civil, Art. 1383 à 1383-2, Fasc. 10, par Philppe CASSON, juillet 2017, n° 13 ; Répertoire Dalloz Droit civil, V° Preuve : modes de preuve, par Gwendoline LARDEUX, octobre 2019, n° 281.

88 En France : Jurisclasseur Civil, Art. 1358 à 1362, Fasc. 10, par Laurent SIGOUIRT, mai 2018, n° 127 ;

Répertoire Dalloz Droit civil, V° Preuve : Règles de preuve, par Gwendoline LARDEUX, octobre 2018, n° 246 et suivants ; en Belgique : DE PAGE, Traité de droit civil belge, Tome II – Les obligations, par P. VAN OMMESLAGHE, Bruxelles, Bruylant, 2013, n° 1628, pages 2320 à 2321 (l’auteur considère qu’une convention de preuve ne pourrait avoir pour objet de modifier l’objet de la preuve par aveu, qui ne peut porter que sur des droits dont on peut disposer). Cette solution traditionnelle est demeurée inchangée à la ont, suivant les constatations souveraines de la Cour d’appel, convenu que la portée de leurs engagements ainsi que les modifications de ces derniers ne pouvaient être établies que par les stipulations du contrat-cadre ou par des avenants signés.

En l’état de ces constatations le moyen n’est, à titre subsidiaire, pas fondé.

Sur le cinquième moyen de cassation Le cinquième moyen est tiré de la violation de l’article 1134 du Code civil, en ce que la Cour d’appel a rejeté la conclusion de la demanderesse en cassation tirée de ce que le contrat-cadre, dont la durée déterminée avait été constatée, a fait l’objet d’une tacite reconduction, sinon a été remplacé après son terme par un nouveau contrat, conclu de façon implicite, cette conclusion s’induisant des actions postérieures des parties, aux motifs développés dans la partie IV de l’arrêt attaqué89, notamment ceux tirés de ce que le contrat-cadre comporte des articles 9 et 12, disposant que toute modification contractuelle doit résulter d’un écrit signé par les parties90, que « la formulation des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre est générale et vise notamment tous les cas où le contrat se trouvé modifié, partant également en cas de modification de la durée du contrat issue d’une tacite reconduction »91 et que « cette conclusion vaut également pour le cas où, tel que le fait valoir SOC1) […], il y aurait eu conclusion implicite par les parties d’un nouveau contrat après le 31 décembre 2012 [qui était le terme du contrat] […], étant donné que […] ce « nouveau » contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12 »92 et que « la résolution du 5 octobre 2012, par laquelle les parties ont [selon la demanderesse en cassation] entendu prolonger, pour une durée indéterminée, l’exécution du Contrat, en ce que cette résolution […] prévoit une allocation des patrimoines « sur la base (i) des comptes arrêtés au 31 décembre 2012 [….] » […] [donc] ne pouvant être approuvés qu’en suite des modifications récentes apportées au droit de la preuve en France et en Belgique. En France, la matière a été réformée par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations. La solution est cependant restée inchangée (Jurisclasseur Civil, Art. 1358 à 1362, Fasc. 10, précité, n° 127 ; Répertoire Dalloz Droit civil, V° Preuve, Règles de preuve, précité, n° 249 et n° 253), sauf à préciser que l’article 1356, nouveau, du Code civil français, s’il dispose dans son alinéa 1 que « les contrats sur la preuve sont valables lorsqu’ils portent sur des droits dont les parties ont la libre disposition », ajoute dans son alinéa 2 que « néanmoins, ils ne peuvent contredire les présomptions irréfragables établies par la loi, ni modifier la foi attachée à l’aveu ou au serment ». L’article 1383-1, nouveau, du Code civil français dispose à ce sujet que la « valeur probante [de l’aveu extrajudiciaire] est laissée à l’appréciation du juge ». L’aveu extrajudiciaire se distingue ainsi de l’aveu judiciaire, qui, au regard de l’article 1383-2, alinéa 2, nouveau, du Code précité, « fait foi contre celui qui l’a fait ». En Belgique, une loi du 13 avril 2019 portant création d’un Code civil et y insérant un livre 8 « La preuve » a introduit de nouvelles dispositions en matière de preuve. L’article 8.2 de ce Code civil nouveau dispose que « sauf les définitions prévues dans le présent livre et hormis les cas où la loi en dispose autrement, toutes les règles du présent livre sont supplétives ». Les articles 8.30 à 8.32 sont consacrés à l’aveu, l’article 8.31 définissant l’aveu extrajudiciaire, qui « a la même force probante que l’aveu judiciaire » comme étant susceptible de « résulter du comportement de l’une des parties, tel que l’exécution d’un contrat », ce qui consacre la notion doctrinale belge de l’aveu en action, dont se prévaut la demanderesse en cassation (VAN OMMESLAGHE, précité, n° 1798, pages 2537 à 2538) (voir sur cette réforme : Florence GEORGE, Le nouveau droit de la preuve – Quand le huitième wagon devient locomotive !, Journal des tribunaux, 2019, page 637, notamment n° 12 et 84 à 86).

89 Arrêt attaqué, page 19, dernier alinéa, à page 24, dernier alinéa.

90 Idem, page 22, troisième alinéa.

91 Idem, même page, deuxième alinéa.

92 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

milieu d’année 2013 »93, « donc après l’arrivée du terme »94, « n’équivaut pas à un écrit établi par les trois parties signataires au sens des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre »95, alors que, première branche, la tacite reconduction n’entraîne pas la prorogation du contrat primitif, mais donne naissance à un nouveau contrat, de sorte que la Cour d’appel, en retenant que ces deux situations produisent les mêmes effets, a violé la disposition visée ; que, deuxième branche, la tacite reconduction d’un contrat à durée déterminée venu à échéance donne naissance à un nouveau contrat à durée indéterminée, dont les autres éléments ne sont pas nécessairement identiques, de sorte que la Cour d’appel, en décidant que la tacite reconduction ne peut s’opérer que dans des conditions identiques au contrat échu, plus particulièrement en respectant les articles 9 et 12 du contrat-cadre, a violé la disposition visée ; et que, troisième branche, qui est subsidiaire aux deux précédentes, la Cour d’appel a dénaturé l’article 9.1 du contrat-cadre en retenant que la résolution du 5 octobre 2012 n’équivaut pas à un écrit établi par les trois parties signataires au sens de l’article 9 précité.

Dans son cinquième moyen, la demanderesse en cassation critique à nouveau le rejet, par la Cour d’appel, de son moyen subsidiaire, tiré de ce que le contrat-cadre, à supposer qu’il ne puisse être qualifié ab initio de contrat à durée indéterminée, a cependant acquis cette qualité en cours d’exécution au regard d’un aveu extrajudiciaire des parties découlant de cette exécution. Elle avait invoqué à ce titre que le contrat-cadre avait fait l’objet d’une prorogation, sinon d’une tacite reconduction.

La prorogation du contrat est un accord de volonté des parties repoussant le terme extinctif du contrat, qui reste par ailleurs le même quant à son contenu96, donc qui est maintenu dans toutes ses dispositions, exception de celle définissant le terme97. La reconduction du contrat, qui peut être expresse ou tacite, est la substitution d’un nouveau contrat au contrat échu98.

La Cour d’appel a rejeté cette double prétention aux motifs suivants :

« L’argument de l’intimée de la tacite reconduction du Contrat-Cadre au-delà du terme est à écarter, étant donné que la formulation des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre est générale et vise notamment tous les cas où le contrat se trouve modifié, partant également en cas de modification de la durée du contrat issue d’une tacite reconduction.

«Si la durée déterminée du contrat pouvait être changée de l’accord des parties, cette modification devait résulter au vœu de l’article 9 d’« un document signé par ou pour le compte des Parties à la présente convention », voire selon l’article 12 d’«un écrit signé par les Parties ».

Ni la validité, ni la portée de ces dispositions ne sont contestées par SOC1) et le Fonds, de sorte que la conclusion que SOC1) entend déduire de l’existence des actes des parties postérieurs à l’arrivée du terme, à savoir qu’ils établiraient la volonté implicite de celles-ci de prolonger le Contrat-Cadre au-delà du terme, voire de conclure un nouveau contrat à teneur identique, mais à durée indéterminée, est à écarter par application de l’article 9, voire des articles 9 et 12 pour ne pas constituer un écrit signé par les parties 93 Idem, page 20, premier alinéa, premier tiret.

94 Idem, page 24, troisième alinéa.

95 Idem, page 24, antépénultième alinéa.

96 Jurisclasseur Civil, Art. 1210 à 1215, Fasc. unique, par François-Xavier LICARI, février 2017, n° 60.

97 Idem, n° 61.

98 Idem, n° 62.

tendant à la modification d’une disposition du Contrat-Cadre. Il s’agit de tous les comportements énumérés ci-dessus sub IV.1.1., à l’exception de la résolution de l’associé commandité du 5 octobre 2012, qui mérite un examen séparé.

Il s’y ajoute que la prorogation du terme doit découler d’un accord implicite ou explicite des parties, antérieur à l’arrivée du terme (Cour de Cassation, 29 juin 2000, P.31, 440).

Cette conclusion vaut également pour le cas où, tel que le fait valoir SOC1) (qui cite pêle-mêle la prolongation, le renouvellement tacite et la conclusion d’un contrat nouveau et, ce, abstraction faite de la question de savoir si la prorogation fait continuer l’ancien contrat ou s’il y a conclusion d’un nouveau contrat dont les modalités sont à déterminer par le juge), il y aurait eu conclusion implicite par les parties d’un nouveau contrat après le 31 décembre 2012, conclusion qui s’induirait des actions postérieures qui l’attesteraient, étant donné que si l’aveu en action est susceptible d’établir la volonté des parties d’exécuter un contrat dont l’existence est contestée, ce « nouveau » contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12. »99.

Le moyen est subdivisé en trois branches.

S u r l a p r e m i è r e b r a n c h e d u m o y e n Dans la première branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir violé l’article 1134 du Code civil en ayant considéré que la tacite reconduction et la prorogation d’un contrat pouvaient être assimilées.

Il résulte des motifs précités que la Cour d’appel a envisagé séparément les deux cas de figure, à savoir la prorogation, qui suppose un accord antérieur à l’arrivée du terme, et la tacite reconduction, impliquant la conclusion d’un nouveau contrat.

Elle a rejeté la prétention tirée d’une prorogation, au motif que celle-ci suppose un accord des parties antérieur à l’arrivée du terme100, mais qu’un tel accord doit, au regard des articles 9 et 12 du contrat-cadre, résulter d’un écrit signé par les parties101, qui fait défaut102.

Elle a rejeté la prétention tirée d’une reconduction tacite, impliquant la conclusion d’un contrat nouveau, au motif que les articles 9 et 12 du contrat-cadre subordonnent toute modification du contrat, y compris « en cas de modification de la durée du contrat issue d’une tacite reconduction »103, qui fait défaut104, « de sorte que la conclusion que [la demanderesse en cassation] entend déduire de l’existence des actes des parties postérieurs à l’arrivée du terme, à savoir qu’ils établiraient la volonté implicite de celles-ci […] de conclure un nouveau contrat à teneur identique, mais à durée indéterminée, est à écarter par application de l’article 9, voire des articles 9 et 12 pour ne pas constituer un écrit signé par les parties tendant à la modification 99 Idem, page 22, deuxième alinéa à avant-dernier alinéa.

100 Idem, même page, cinquième alinéa.

101 Idem, même page, troisième alinéa.

102 Idem, même page, quatrième alinéa.

103 Idem, même page, deuxième alinéa.

104 Idem, même page, quatrième alinéa.

d’une disposition du Contrat-Cadre »105 et que « si l’aveu en action est susceptible d’établir la volonté des parties d’exécuter un contrat dont l’existence est contestée, ce « nouveau » contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12 »106.

Il en suit que la première branche du moyen, qui critique la Cour d’appel d’avoir procédé à l’assimilation de deux notions juridiques à laquelle elle n’a, en réalité, pas eu recours, repose sur une mauvaise lecture de l’arrêt, partant, manque en fait.

A titre subsidiaire, la branche du moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation souveraine faite par les juges du fond des preuves invoquées aux fins d’établir l’existence d’un accord des parties sur une prorogation ou une tacite reconduction du contrat-cadre, de sorte qu’elle ne saurait être accueillie.

S u r l a d e u x i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la seconde branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir considéré que le renouvellement du contrat-cadre découlant de la tacite reconduction du contrat échu ne pourrait s’opérer que dans des conditions identiques à celles de ce dernier, notamment dans le respect des articles 9 et 12, et d’avoir ainsi omis de rechercher le contenu du nouveau contrat consécutif à la tacite reconduction alléguée du contrat échu.

La Cour d’appel constate que la demanderesse en cassation a soutenu devant elle un moyen tiré « de la prolongation, sinon du renouvellement tacite, suivant la volonté exprimée par les parties au contrat, sinon de la création d’un nouveau contrat identique au Contrat-Cadre, mais à durée indéterminée »107.

La demanderesse en cassation n’a donc pas soutenu en instance d’appel que, exception faite de sa durée, le nouveau contrat qui aurait remplacé le contrat initial par suite de la tacite reconduction alléguée de ce dernier s’en distinguerait, y compris en ce qui concerne les articles 9 et 12 de ce dernier.

Au regard de cette constatation, la branche du moyen, qui reproche à la Cour d’appel d’avoir omis de procéder à une recherche de laquelle la demanderesse en cassation l’avait dispensée, manque en fait.

A titre subsidiaire, la deuxième branche du moyen ne tend, comme la première, qu’à remettre en discussion l’appréciation souveraine faite par les juges du fond des preuves invoquées aux fins d’établir l’existence d’un accord des parties sur une prorogation ou une tacite reconduction du contrat-cadre, de sorte qu’elle ne saurait être accueillie.

S u r l a t r o i s i è m e b r a n c h e d u m o y e n 105 Idem, même page, même alinéa.

106 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

107 Idem, page 21, avant-dernier alinéa (c’est nous qui soulignons).

Il a été vu ci-avant, dans le cadre de la discussion du quatrième moyen, que la demanderesse entendait encore déduire la volonté des parties de proroger le contrat-cadre au-delà du terme d’une résolution du conseil d’administration d’SOC4) du 5 octobre 2012108.

La Cour d’appel a rejeté ce moyen aux motifs suivants :

« Cette résolution du 5 octobre 2012 adoptée à l’unanimité par le conseil d’administration de l’associé commandité dispose que « l’affectation des actifs immobiliers aux différents compartiments de la Société devra se faire le plus rapidement possible « sur la base (i) des comptes arrêtés au 31 décembre 2012 et (ii) de l’évaluation de l’Expert indépendant arrêtée à la même date ». SOC1) en déduit, dans la partie consacrée au Contrat-Cadre, que les comptes arrêtés au 31 décembre 2012 ne pouvant forcément être établis qu’en 2013, l’allocation des actifs ne pouvait se faire qu’après le 31 décembre 2012, et en conclut que les parties ont nécessairement entendu proroger l’exécution du Contrat-Cadre au-delà du 31 décembre 2012.

[…] La question de savoir si cette résolution est équivalente à l’écrit dont question aux articles 9 et 12 du Contrat-Cadre n’est pas analysée par SOC1), ni celle ayant trait au fait que l’écrit devrait émaner des trois signataires du contrat, ni celle connexe de savoir si la résolution prise par SOC4) peut être considérée comme l’avoir été par les trois parties signataires, vu qu’elle a été prise à l’unanimité des membres du conseil d’administration composé à parité égale d’administrateurs nommés par chaque associé commanditaire.

La Cour rejoint la position d’SOC2) quant à la raison qui a poussé les parties à insérer les articles 9 et 12 dans le Contrat-Cadre109, de sorte qu’il y a lieu d’en conclure que les questions exposées à l’alinéa précédent requièrent une réponse négative et que la résolution du 5 octobre 2012 n’équivaut pas à un écrit établi par les trois parties signataires au sens des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre.

La question de la portée de la résolution devient donc sans objet. »110.

Dans la troisième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir dénaturé l’article 9.1 du contrat-cadre en refusant de considérer que la résolution constituait un écrit établi au sens de cet article pour le compte de toutes les parties au contrat et qu’elle était suffisante pour stipuler une prorogation du terme.

L’article 9.1 du contrat-cadre, inséré dans un article 9 intitulé « Renonciation, désistement et interdiction de cession », dispose :

108 Idem, page 22, dernier alinéa.

109 La Cour d’appel se réfère en cet endroit au passage suivant de son arrêt « Elle [SOC2)] fait valoir qu’une prolongation du Contrat-Cadre décidée implicitement par les parties se heurterait auxdits articles au motif que « cette stipulation sert précisément à éviter que l’on débatte devant les tribunaux, comme Soc1) essaie de le faire, du sens d’événements quelconques, et même de manifestations de volonté des parties, qui ne prennent pas la forme d’un document signé par ou pour le compte des parties, ou que l’on essaie de tirer argument de leurs retards ou omissions » (idem, page 21, deuxième alinéa).

110 Idem, page 23, dernier alinéa, et page 24, quatrième et cinquième alinéas.

« Aucune disposition de la présente convention ne pourra être modifiée, renoncée, dispensée ou venir à cesser, si ce n’est en vertu d’un document signé par ou pour le compte des Parties à la présente convention »111.

Dans le cadre de la discussion du premier moyen votre position sur la théorie française de la dénaturation a été évoquée.

A supposer que vous acceptiez dorénavant de sanctionner, à titre de violation de l’article 1134 du Code civil, la méconnaissance des termes non équivoques d’une convention, ce grief suppose l’énoncé de ce en quoi les termes d’une convention ont été méconnus par les juges du fond. Le respect de cette condition, exigé par la jurisprudence française dans le cadre du cas d’ouverture de la dénaturation112, l’est également par l’article 10, alinéa 2, seconde phrase, de la loi de 1885, qui dispose que « chaque moyen ou chaque branche doit préciser, sous la […] sanction [de l’irrecevabilité] : […] ce en quoi [la partie critiquée de la décision] encourt le reproche allégué ».

La demanderesse en cassation, si elle reproche à la Cour d’appel d’avoir dénaturé l’article 9.1 du contrat-cadre et allègue que cette dénaturation se manifeste par le refus de considérer que la résolution précitée est à considérer comme document signé pour le compte des parties, ne précise pas en quoi l’article aurait été dénaturé par cette conclusion.

Il en suit que la branche du moyen est irrecevable.

A titre subsidiaire, en critiquant que la résolution précitée aurait dû être interprétée comme un document signé par les parties au sens de l’article 9.1 du contrat-cadre, la demanderesse en cassation critique en réalité la dénaturation de la résolution, de sorte que le grief est étranger au cas d’ouverture, d’une dénaturation du contrat-cadre.

Il en suit, à titre subsidiaire, que la branche du moyen est encore pour ce motif irrecevable.

A titre encore plus subsidiaire, la branche du moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation faite par les juges du fond de la portée de la résolution précitée, de sorte qu’elle ne saurait être accueillie.

Sur le sixième moyen de cassation Le sixième moyen est tiré de la violation des articles 89 de la Constitution, 249, ainsi que 587 du Nouveau Code de procédure civile et 1134 du Code civil, en ce que la Cour d’appel a rejeté le moyen subsidiaire de la demanderesse en cassation tiré de ce que, à admettre la validité de la clause de durée contenue à l’article 8 du contrat-cadre, l’obligation d’allocation définitive des actes prévue par le contrat-cadre ne serait pas affectée par l’existence d’un terme extinctif, aux motifs développés dans la partie V de l’arrêt attaqué113, notamment ceux tirés de ce que « la survivance de certaines dispositions du Contrat-Cadre, telle que prévue dans la version adoptée le 16 novembre 2010 par l’associé commandité, concernait les articles 10-18 du Contrat-Cadre, dispositions qui, même en l’absence d’une stipulation expresse, auraient de 111 Pièce n° 3 de la Farde de pièces I de la demanderesse en cassation, page 17.

112 BORE, précité, n° 79.132, page 452.

113 Arrêt attaqué, page 25, premier alinéa, à page 33, troisième alinéa.

toute façon continué à s’appliquer au-delà de l’expiration du contrat, que ce soit par l’arrivée du terme ou suite à sa résiliation »114, que « l’obligation affectée d’un terme extinctif existe et est immédiatement exigible, mais sa durée est limitée dans le temps jusqu’au moment où se produire l’événement futur et certain que constitue le terme »115, que « l’échéance du terme ne fait disparaître l’obligation que pour l’avenir »116, que « l’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination était à réaliser, une fois opéré le transfert de ces actifs vers le compartiment mixte commun »117 et que « ces deux obligations (de transfert, puis de relocation) peuvent être regroupées sous la qualification d’obligation cumulative qui a pour objet plusieurs prestations dont le débiteur n’est libéré que par une exécution intégrale »118, ainsi que ceux tirés de ce que « l’obligation d’allocation définitive est à replacer dans son contexte contractuel »119 et que la circonstance « que l’allocation définitive n’ait pas été soumise à condition, tel que le fait le Fonds pour en déduire qu’elle continuerait à devoir être exécutée, même le terme une fois atteint, ne signifie pas qu’elle survivait à l’arrivée du terme du contrat [étant donné que] l’obligation dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme »120, alors que, première branche, la Cour d’appel a statué par motifs contradictoires, violant les articles 89 de la Constitution et 249, ainsi que 587 du Nouveau Code de procédure civile, en retenant, d’une part, que « les articles 10-18 du Contrat-Cadre […] même en l’absence d’une stipulation expresse, auraient de toute façon continué à s’appliquer au-delà de l’expiration du contrat, que ce soit par l’arrivée du terme ou suite à sa résiliation »121, que « l’échéance du terme ne fait disparaître l’obligation que pour l’avenir »122 et que s’agissant du transfert des actifs vers le compartiment mixte commun et de l’allocation définitive, « ces deux obligations (de transfert, puis de relocation) peuvent être regroupées sous la qualification d’obligation cumulative qui a pour objet plusieurs prestations dont le débiteur n’est libéré que par une exécution intégrale »123 et, d’autre part, que « l’obligation dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme »124 ; que, deuxième branche, la durée de la force obligatoire, de la validité et de l’exigibilité d’une obligation conventionnelle ne dépend pas nécessairement de la durée du contrat qui la stipule, de sorte que c’est en violation de l’article 1134 du Code civil que la Cour d’appel a retenu que l’obligation d’allocation n’était plus exigible à la survenance du terme du contrat qui la stipulait parce que ce contrat comportait un terme ; que, troisième branche, l’obligation d’allocation stipulée en l’espèce, qui forme un tout définitif devant s’exécuter en une seule et unique fois, est à qualifier d’obligation à exécution instantanée, ce dont il découle qu’elle n’est pas affectée par le terme extinctif du contrat qui la stipule, donc que sa force obligatoire survit au terme du contrat, de 114 Idem, page 27, quatrième alinéa.

115 Idem, page 28, quatrième alinéa.

116 Idem et loc.cit.

117 Idem, même page, antépénultième alinéa.

118 Idem et loc.cit.

119 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

120 Idem, même page, dernier alinéa.

121 Idem, page 27, quatrième alinéa.

122 Idem, page 28, quatrième alinéa.

123 Idem, même page, cinquième alinéa.

124 Idem, page 29, dernier alinéa.

sorte que la Cour d’appel a violé l’article 1134 du Code civil en retenant que l’obligation était affectée par le terme, sans vérifier si elle était à qualifier d’obligation à exécution instantanée et sans tirer les conséquences de cette qualification sur la portée de l’effet obligatoire de l’obligation.

La Cour d’appel a constaté que :

« La société en commandite par actions à capital variable SOC3) S.C.A., SICAV - FIS (ci-après SOC3) ou le Fonds) est un fonds d’investissement spécialisé soumis à la loi du 13 février 2007, constitué le 16 décembre 2009 […].

Les sociétés anonymes SOC1) et SOC2) (ci-après SOC1) et SOC2)) sont les associés commanditaires du Fonds. SOC3) est géré par son associé commandité, la société anonyme SOC4). »125.

Le litige entre parties concerne la mise en application d’une résolution adoptée par le conseil d’administration d’SOC4) en date du 5 octobre 2012 et visant « à l’allocation définitive des actifs dans les compartiments 1 à 5 d’SOC3) en application de l’article 5.3.1. du Contrat – Cadre »126.

La demanderesse en cassation soutenait « que quand bien même la clause de durée contenue à l’article 8 du Contrat-Cadre serait valable, l’obligation d’allocation définitive des actifs dans les compartiments de destination 1-5 ne serait pas affectée par l’existence d’un terme extinctif »127.

A l’appui de ce moyen, elle invoquait les arguments suivants :

« Elle conteste d’abord l’affirmation d’SOC2) selon laquelle la fin du contrat ne mettrait fin qu’à la deuxième partie du contrat pour être contraire au principe essentiel fixé par les parties de non - enrichissement / non - appauvrissement des promoteurs, l’un par rapport à l’autre, principe qui devrait survivre à la fin du contrat. Elle soutient que l’obligation d’allocation définitive des actifs du compartiment transitoire mixte commun en faveur des divers compartiments en fonction de l’origine patrimoniale telle qu’elle ressort des articles 4 et 5 du contrat, et plus particulièrement de l’article 5.3.1.

du Contrat-Cadre, est une obligation à exécution instantanée, donc une obligation susceptible d’être exécutée en une seule fois. Elle soutient qu’un terme extinctif, qui est, par nature, toujours lié à la durée, ne peut trouver à s’appliquer qu’à des obligations à exécution successive, à l’exclusion des obligations à exécution instantanée, de sorte que le terme extinctif du 31 décembre 2012 prévu à l’article 8 du Contrat-Cadre ne s’appliquerait pas à l’obligation d’allocation définitive. Bien plus, le terme extinctif d’une obligation ne jouerait que pour l’avenir, de sorte que les obligations contractuelles non exécutées avant l’échéance de ce terme survivraient et devraient être exécutées après l’expiration du terme, si elles n’ont pu être exécutées en totalité avant son expiration. En outre, l’échéance du 31 décembre 2012 aurait rendu exigible l’obligation d’allocation définitive.

125 Idem, page 2, avant-dernier et dernier alinéas.

126 Idem, page 3, antépénultième alinéa.

127 Idem, page 25, premier alinéa.

Il serait dès lors conforme au principe de la liberté contractuelle que le contrat prévoie qu’il sera affecté d’un terme extinctif pour certaines de ses obligations, et d’un terme suspensif pour d’autres. La nature même de cette clause suspensive la rendrait imperméable à tout terme extinctif et que cela ne soit pas expressément exprimé dans le contrat n’aurait aucune incidence. Il n’y aurait dès lors eu aucune obligation pour les parties de « stipuler que l’obligation de réallocation survivrait à l’extinction du contrat », puisque cette survie serait de droit.

L’article 8 définirait un terme extinctif. Or, le terme aurait trait uniquement à la durée d’exécution d’un contrat, mais ne modifierait pas la nature et les obligations de celui-

ci. Ainsi, pour les obligations à exécution successive, le terme extinctif mettrait fin à l’exécution de ces obligations à son arrivée. Mais pour ce qui est des obligations qui s’exécutent de manière instantanée, elles ne pourraient être affectées par un terme extinctif comme celui de l’article 8.

La question ne serait pas celle de savoir si les parties avaient envisagé ou non la survie de certaines dispositions du contrat, étant donné que la survie des obligations nées d’un contrat ne dépendrait pas uniquement de la volonté des parties, mais de la nature de l’obligation à exécuter. »128.

La Cour d’appel constate que la survivance au-delà de la fin du contrat de l’obligation d’allocation définitive n’a pas été stipulée par les parties :

« 4.1. Les parties au Contrat-Cadre n’ont pas prévu la survivance de l’obligation d’allocation définitive au-delà de la fin du contrat. […] »129.

Il y avait certes discussions entre parties au sujet de l’insertion d’une clause de survivance, qui concernait toutefois d’autres dispositions que celle relative à l’obligation d’allocation définitive. Si une telle clause n’a finalement pas été adoptée, les dispositions auxquelles elle devait s’appliquer relèvent de toute façon de celles qui, par leur nature, ont vocation à continuer à s’appliquer au-delà de l’expiration du contrat :

« Il convient ensuite et surtout de dire que la survivance de certaines dispositions du Contrat-Cadre, telle que prévue dans la version adoptée le 16 novembre 2010 par l’associé commandité, concernait les articles 10-18 du Contrat-Cadre, dispositions qui, même en l’absence d’une stipulation expresse, auraient de toute façon continué à s’appliquer au-delà de l’expiration du contrat, que ce soit par l’arrivée du terme ou suite à sa résiliation.

C’est ainsi que ces articles traitent de la confidentialité, des frais, des modifications, de l’ambiguïté, des originaux, des notifications, de la divisibilité, du droit applicable et de la compétence judiciaire.

La survivance de ces articles ne se retrouve plus stipulée dans la version applicable aux parties, à savoir celle signée le 18 novembre 2010. Il n’en reste pas moins que ces dispositions (sauf éventuellement l’article 12 qui a trait aux modifications à apporter au contrat, ce qui suppose qu’il soit encore en vigueur) qui concernent soit la confidentialité à respecter par les parties et la prééminence du Contrat-Cadre par 128 Idem, même page, deuxième alinéa, à page 26, premier alinéa.

129 Idem, page 26, dernier alinéa.

rapport à une loi non d’ordre public sont en tous les cas à respecter, même après la fin du contrat. Il en est de même du droit applicable et de la compétence judiciaire. »130.

La Cour d’appel désigne ensuite les débiteurs de l’obligation d’allocation définitive :

« 4.2. L’obligation d’allocation définitive était à la charge du Fonds, qui par le biais de son associé-commandité qui le gère a décidé de procéder à l’allocation définitive des actifs aux compartiments de destination moyennant la résolution du 5 octobre 2012. Les associés commanditaires étaient contractuellement tenus d’y participer de bonne foi. »131.

Elle s’exprime finalement sur la question de savoir si et dans quelle mesure ces débiteurs restaient tenus de cette obligation après l’écoulement du terme du contrat-cadre, le 31 décembre 2012 :

« 4.4. C’est parce que l’obligation d’allocation définitive relève du Contrat-Cadre qui a expiré le 31 décembre 2012 que se pose la question de savoir si l’expiration du Contrat-Cadre a libéré le Fonds, (et par voie de conséquence accessoirement les parties commanditaires) débiteur de l’obligation de procéder à ladite allocation, tel que le soutient SOC2), ou si, tel qu’allégué par les intimées, cette arrivée du terme a rendu l’obligation exigible, au motif que le mode normal d’extinction du terme est l’arrivée du jour fixé pour son échéance et que l’obligation est alors exigible.

4.5. Le contrat à durée déterminée est celui que les parties ont affecté d’un terme extinctif: ses effets prennent fin à l’échéance.

L’obligation affectée d’un terme extinctif existe et est immédiatement exigible, mais sa durée est limitée dans le temps jusqu’au moment où se produit l’événement futur et certain que constitue le terme. L’échéance du terme ne fait disparaître l’obligation que pour l’avenir.

L’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination était à réaliser, une fois opéré le transfert de ces actifs vers le compartiment mixte commun.

Ce transfert s’est fait le 31 mars 2011. Ces deux obligations (de transfert, puis de réallocation) peuvent être regroupées sous la qualification d’obligation cumulative qui a pour objet plusieurs prestations dont le débiteur n'est libéré que par une exécution intégrale. (cf par analogie l’article 1306 nouveau du code civil français).

L’obligation d’allocation définitive est à replacer dans son contexte contractuel. Il en ressort que les parties avaient prévu une série d’étapes à effectuer en vue du transfert des actifs vers le compartiment mixte du Fonds qui devait les accueillir à titre transitoire, avant d’être dirigés définitivement vers les compartiments communs ou privatifs. Le passage transitoire dans le compartiment commun mixte ne devait, selon la volonté expresse des parties exprimée à l’article 5.1.2. du Contrat-Cadre, ni nuire, ni profiter à aucun des associés commanditaires.

La procédure de transfert des actifs au bénéfice du Fonds et d’allocation définitive de ceux-ci vers les différents compartiments était à parfaire endéans un laps de temps 130 Idem, page 27, troisième au cinquième alinéas.

131 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

déterminé d’avance. Le terme une fois atteint, les obligations pour autant qu’elles n’avaient jusque-là pas encore été exécutées ne devenaient pas, tel que le soutient SOC1), exigibles du seul fait de l’échéance atteinte. Bien au contraire auraient-elles dû déjà avoir été exécutées en cours de contrat.

Par sa résolution du 5 octobre 2012, le Fonds a initié le processus devant conduire à l’allocation définitive des actifs au profit des compartiments de destination prévue au Contrat-Cadre. Elle ne vaut cependant pas exécution de l’obligation. Elle ne fait que refléter la volonté du Fonds d’y procéder « le plus rapidement possible ».

Même abstraction faite des développements d’SOC2) relatifs au caractère exécutoire ou non de ladite résolution [voir le point relatif à l’intérêt à agir de SOC1) (pages 8 et 9 de l’arrêt)], cette résolution n’a pas été suivie d’actes d’exécution subséquents, ni avant, ni après la date butoir du 31 décembre 2012. Il est faux de prétendre, tel que le fait SOC1), en renvoyant à un avis juridique, que la résolution aurait déjà très largement amorcé le processus d’exécution de cette obligation.

4.6. L’obligation d’allocation définitive ayant pesé sur le Fonds est à qualifier d’obligation de résultat atténuée. L’obligation était de résultat, mais le Fonds était, au regard des stipulations du Contrat-Cadre, tributaire des décisions des sociétés commanditaires qui s’étaient engagées à agir de bonne foi notamment en vue d’atteindre ce but.

4.7. Le Fonds qui rejoint SOC1) dans sa demande en allocation définitive des actifs se trouvant actuellement toujours dans le compartiment commun mixte ne fait état d’aucun événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel stipulé. Si le Fonds et surtout SOC1) font, certes, état d’événements qui, selon eux, ont bloqué, voire retardé le processus d’allocation définitive - SOC1) soutient notamment avoir à plusieurs reprises voulu mettre à l’ordre du jour de la réunion du conseil d’administration d’SOC4) la question de l’allocation définitive des actifs immobiliers, mais ces tentatives auraient buté sur SOC2) qui aurait fait état de sujets plus urgents à évacuer, ou argue encore de l’impossibilité de procéder à cette allocation définitive dans un délai à peine supérieur à deux ans (octobre 2010 à décembre 2012) -, ils n’en tirent cependant aucune conclusion, voire aucun moyen juridiques.

4.8. Que l’allocation définitive n’ait pas été soumise à condition, tel que le fait valoir le Fonds pour en déduire qu’elle continuerait à devoir être exécutée, même le terme une fois atteint, ne signifie pas qu’elle survivait à l’arrivée du terme du contrat. L’obligation dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme. »132.

Ces motifs répondent au moyen d’appel de la demanderesse en cassation tiré de ce que l’obligation d’allocation définitive constituerait une obligation à exécution instantanée affectée d’un terme suspensif, constitué par le moment à partir duquel cette allocation définitive devient réalisable, et ne serait pas affectée par le terme extinctif du contrat :

132 Idem, page 28, deuxième alinéa, à page 29, dernier alinéa.

« 4.3. SOC1) qualifie l’obligation d’allocation définitive d’obligation à exécution instantanée affectée d’un terme suspensif, en ce qu’elle serait exécutoire à partir du moment où le transfert des actifs immobiliers compris dans le compartiment 6 vers les autres compartiments du Fonds serait réalisable, dans des conditions qui assurent que tous les compartiments respectent les obligations découlant de la loi, des statuts et du mémorandum privé du Fonds. Elle fait valoir qu’en tant qu’elle s’exécute en une seule fois, cette obligation n’est pas affectée par un terme extinctif. »133.

Le sixième moyen, qui critique ce raisonnement, est subdivisé en trois branches.

S u r l a p r e m i è r e b r a n c h e d u m o y e n Dans la première branche du moyen, la demanderesse en cassation critique une contradiction de motifs.

Cette contradiction existerait entre les motifs tirés de ce que :

- « [les articles 10 à 18 du contrat-cadre] même en l’absence d’une stipulation expresse, auraient de toute façon continué à s’appliquer au-delà de l’expiration du contrat, que ce soit par l’arrivée du terme ou suite à sa résiliation »134, - « l’échéance du terme ne fait disparaître l’obligation que pour l’avenir »135, - « [les] deux obligations (de transfert, puis de relocation) peuvent être regroupées sous la qualification d’obligation cumulative qui a pour objet plusieurs prestations dont le débiteur n’est libéré que par une exécution intégrale »136, et le motif tiré de ce que - « l’obligation dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme »137.

Cette contradiction existerait en ce que le premier groupe de motifs exprimerait l’idée que l’obligation est susceptible de survivre au terme, qui ne la fait de toute façon disparaître que pour l’avenir, tandis que le second motif exprimerait l’idée inverse que l’obligation ne survit pas à l’arrivée du terme.

La partie défenderesse en cassation SOC2) conteste, en se rapportant à sagesse, la recevabilité de la branche du moyen au regard des exigences de l’article 10 de la loi de 1885, qui dispose qu’un moyen ou un élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre 133 Idem, page 27, dernier alinéa.

134 Idem, page 27, quatrième alinéa.

135 Idem, page 28, quatrième alinéa.

136 Idem, même page, cinquième alinéa.

137 Idem, page 29, dernier alinéa.

qu’un seul cas d’ouverture138. La branche critiquée met en œuvre un seul cas d’ouverture, à savoir le défaut de motifs par suite de leur contradiction. Cette contradiction alléguée concerne un motif qui est opposé à un groupe de trois motifs, qui, au regard de la lecture que la demanderesse en cassation en fait, ont un objet commun, à savoir d’affirmer que l’obligation en cause ne survit pas à l’arrivée du terme. La branche concerne donc à la fois un même cas d’ouverture et un même grief. Il en suit qu’elle est recevable au regard des exigences de l’article précité.

Le premier motif du premier groupe, tiré de ce que « [les articles 10 à 18 du contrat-cadre] même en l’absence d’une stipulation expresse, auraient de toute façon continué à s’appliquer au-delà de l’expiration du contrat, que ce soit par l’arrivée du terme ou suite à sa résiliation »139, ne se réfère pas à l’obligation litigieuse, d’allocation définitive, mais aux obligations stipulées aux articles 10 à 18, à l’exception de l’article 12, qui « traitent de la confidentialité, des frais, des modifications, de l’ambiguïté, des originaux, des notifications, de la divisibilité, du droit applicable et de la compétence judiciaire », donc se rapportent à des obligations accessoires qui, au regard de leur objet, sont de nature à survivre à l’expiration du contrat. Le motif étant étranger à l’obligation litigieuse, il ne saurait être en contradiction avec le motif du second groupe, qui s’exprime sur l’incidence de l’échéance du terme sur cette obligation.

Le deuxième motif du premier groupe, tiré de ce que « l’échéance du terme ne fait disparaître l’obligation que pour l’avenir »140, précise que cette échéance ne peut avoir d’effet rétroactif, donc mettre en cause les actes d’exécution accomplis avant la survenance du terme. Il n’est pas en contradiction avec le motif du second groupe, qui ne comporte aucune affirmation au sujet d’un effet rétroactif de cette survenance, mais s’exprime sur le sort de l’obligation après celle-

ci.

Le troisième motif du premier groupe, tiré de ce que « [les] deux obligations (de transfert, puis de relocation) peuvent être regroupées sous la qualification d’obligation cumulative qui a pour objet plusieurs prestations dont le débiteur n’est libéré que par une exécution intégrale »141, a pour objet de rappeler que le contrat-cadre comportait une double obligation consistant, d’une part, à transférer les actifs vers un compartiment mixte commun de SOC3) et ensuite de celui-

ci vers les compartiments de destination, dans le cadre de l’obligation d’allocation définitive142, le débiteur n’étant libéré que par l’exécution cumulative de ces deux obligations143. Ce constat ne se trouve pas en contradiction avec le motif du second groupe, tiré de ce que « l’obligation [d’allocation définitive] [était] affectée nécessairement d’un terme extinctif [qui définit la] durée [jusqu’à fin de laquelle son exécution] était limitée dans le temps »144. Toute obligation, qu’elle soit cumulative, alternative ou facultative145, peut être assortie d’un terme.

Il en suite que, à défaut de contradiction entre les motifs du premier groupe et celui du second groupe de motifs, la première branche du moyen n’est pas fondée.

138 Mémoire en réponse d’SOC2), page 27, deuxième alinéa.

139 Idem, page 27, quatrième alinéa.

140 Idem, page 28, quatrième alinéa.

141 Idem, même page, cinquième alinéa.

142 Idem, même page, cinquième et sixième alinéas.

143 Idem, même page, cinquième alinéa.

144 Idem, page 29, dernier alinéa.

145 Voir sur ces distinctions : Mémoire en réponse d’SOC2), page 28, point 3.

S u r l a d e u x i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la deuxième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir violé l’article 1134 du Code civil en retenant que la durée de la force obligatoire, de la validité et de l’exigibilité de l’obligation d’allocation définitive dépend nécessairement de la durée du contrat qui l’a stipulée.

La Cour d’appel s’interroge en l’espèce sur le point de savoir quel a été l’effet de la fin du contrat sur l’obligation litigieuse, d’allocation définitive :

« 4.4. C’est parce que l’obligation d’allocation définitive relève du Contrat-Cadre qui a expiré le 31 décembre 2012 que se pose la question de savoir si l’expiration du Contrat-Cadre a libéré le Fonds, (et par voie de conséquence accessoirement les parties commanditaires) débiteur de l’obligation de procéder à ladite allocation, tel que le soutient SOC2), ou si, tel qu’allégué par les intimées, cette arrivée du terme a rendu l’obligation exigible, au motif que le mode normal d’extinction du terme est l’arrivée du jour fixé pour son échéance et que l’obligation est alors exigible. »146.

Aux fins d’analyser cette question, de savoir si la date de fin du contrat est à considérer comme terme suspensif ou comme terme extinctif, elle examine la portée de l’obligation en cause.

Elle constate que l’exécution de celle-ci est à considérer ensemble avec celle d’une autre obligation, relative au transfert des actifs vers un compartiment mixte commun d’SOC3), ces deux obligations constituant ensemble une obligation cumulative :

« L’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination était à réaliser, une fois opéré le transfert de ces actifs vers le compartiment mixte commun. Ce transfert s’est fait le 31 mars 2011. Ces deux obligations (de transfert, puis de réallocation) peuvent être regroupées sous la qualification d’obligation cumulative qui a pour objet plusieurs prestations dont le débiteur n'est libéré que par une exécution intégrale. (cf par analogie l’article 1306 nouveau du code civil français). »147.

Elle relève que « l’obligation d’allocation définitive est à replacer dans son contexte contractuel »148 et en déduit « que les parties avaient prévu une série d’étapes à effectuer en vue du transfert des actifs vers le compartiment mixte du Fonds qui devait les accueillir à titre transitoire, avant d’être dirigés définitivement vers les compartiments communs ou privatifs »149.

Ces deux opérations, dont l’obligation d’allocation définitive constitue un élément, « étaient à parfaire endéans un laps de temps déterminé d’avance »150.

La Cour d’appel conclut, après examen de la portée de l’obligation d’allocation définitive, que celle-ci constitue une « obligation de résultat atténuée [ce qui signifie que] l’obligation était de résultat, mais [que SOC3)] était, au regard des stipulations du Contrat-Cadre, tributaire des 146 Arrêt attaqué, page 28, deuxième alinéa.

147 Idem, même page, antépénultième alinéa.

148 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

149 Idem et loc.cit.

150 Idem, même page, dernier alinéa.

décisions des sociétés commanditaires [SOC1) et SOC2)] qui s’étaient engagées à agir de bonne foi notamment en vue d’atteindre ce but »151.

Elle constate finalement que SOC3), qui était donc le débiteur de l’obligation litigieuse, ne fait état d’aucun « événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel stipulé »152.

Ce n’est que sur base de ces constatations spécifiques faites au sujet de l’obligation litigieuse que la Cour d’appel conclut que « l’obligation dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme »153.

La conclusion de la Cour d’appel, de qualifier la fin stipulée du contrat comme terme extinctif jusqu’à l’écoulement duquel l’obligation litigieuse aurait dû être exécutée, et non comme terme suspensif, rendant l’obligation exigible à partir de ce moment seulement, repose donc sur une analyse circonstanciée de l’obligation et du contrat dans lequel elle s’insère. Cette analyse tient compte des spécificités de l’obligation, des prévisions des parties et des circonstances concrètes d’exécution. Elle tient plus particulièrement compte de ce que l’obligation, en tant qu’obligation de résultat atténuée, suppose certes la participation de bonne foi de tiers, à savoir de SOC1) et d’SOC2), qui pourrait constituer un obstacle à une exécution antérieure à la fin du contrat, mais que SOC3) ne fait état d’aucun « événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel stipulé »154. Elle examine donc si SOC3) était en fait en mesure d’exécuter l’obligation avant la fin du contrat. Elle réserve ainsi la possibilité que la durée d’exigibilité de l’obligation litigieuse aurait ne pas pu coïncider avec la durée du contrat.

Sa conclusion, tirée de ce que l’obligation litigieuse devait être exécutée jusqu’à la fin du contrat, qui en constitue le terme extinctif, repose donc sur une analyse circonstanciée de l’obligation, du contrat dans lequel celle-ci s’insère, de l’intention des parties et de la possibilité matérielle du débiteur d’exécuter l’obligation avant ce terme.

Elle n’a donc pas constaté que la durée de la force obligatoire, de la validité et de l’exigibilité de l’obligation d’allocation définitive dépend nécessairement de la durée du contrat qui l’a stipulée.

Il en suit que la deuxième branche du moyen manque en fait.

A titre subsidiaire, la branche du moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation par la Cour d’appel de la portée de l’obligation stipulée, de sorte qu’elle ne saurait être accueillie.

S u r l a t r o i s i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la troisième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir violé l’article 1134 du Code civil en omettant de déduire les conséquences légales de 151 Idem, page 29, quatrième alinéa.

152 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

153 Idem, même page, dernier alinéa.

154 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

sa constatation, tirée de ce que « l’obligation [d’allocation définitive] dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme, s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-

Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produire l’événement futur et certain que constitue le terme »155. Les conséquences légales que la Cour d’appel aurait, selon la demanderesse en cassation, dû déduire de cette constatation sont doubles. D’une part, elle aurait dû en déduire que l’obligation était à qualifier d’obligation à exécution instantanée, qui s’oppose à la notion d’obligation à exécution successive. D’autre part, elle aurait dû tirer de cette première déduction la seconde déduction que l’obligation en cause, en tant qu’elle constitue une obligation à exécution instantanée, garde sa force obligatoire nonobstant l’expiration du terme156.

Ainsi que le relève la défenderesse en cassation SOC2)157, les notions d’obligation à exécution instantanée et d’obligation à exécution successive, d’origine doctrinale, sont dépourvues de valeur légale. Le droit luxembourgeois se distingue de ce point de vue du droit français, qui, depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, comporte dans son Code civil un article 1111-1 qui énonce la notion de « contrat à exécution instantanée », défini comme « celui dont les obligations peuvent s’exécuter en une prestation unique », opposée à celle de « contrat à exécution successive », défini comme « celui dont les obligations d’au moins une partie s’exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps ».

Il ne saurait dès lors être reproché à la Cour d’appel d’avoir violé l’article 1134 du Code civil en omettant de procéder à une qualification non prévue par la loi.

Il en suit que, le grief soulevé étant étranger à la disposition légale dont la violation est alléguée, la branche du moyen est irrecevable.

A titre subsidiaire, la branche du moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation par la Cour d’appel de la portée de l’obligation stipulée, de sorte qu’elle ne saurait être accueillie.

A titre encore plus subsidiaire, le branche du moyen critique la Cour d’appel de ne pas avoir qualifié l’obligation litigieuse comme obligation à exécution instantanée et d’en avoir déduit que sa force obligatoire n’est pas remise en cause par l’arrivée du terme.

L’obligation visée, d’allocation définitive des actifs immobiliers vers les compartiments de destination d’SOC3), s’inscrit, selon les constatations souveraines de la Cour d’appel, dans le cadre du contrat-cadre158 et elle constitue, ensemble avec l’obligation préalable de transfert des actifs immobiliers précités vers le compartiment mixte commun du fonds une obligation cumulative159. Ces deux obligations, qui, suivant les constatations souveraines évoquées, sont à considérer ensemble, sont susceptibles d’être qualifiées d’« obligations [qui] s’exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps »160, partant, comme relevant de ce qui est 155 Idem et loc.cit.

156 Mémoire en cassation, page 60, quatrième alinéa (dans le développement de la troisième branche du sixième moyen).

157 Mémoire en réponse d’SOC2), page 32, premier alinéa.

158 Arrêt attaqué, page 29, dernier alinéa.

159 Idem, page 28, quatrième alinéa.

160 Article 1111-1, alinéa 2, du Code civil français.

désigné par le droit français comme « contrat à exécution successive »161. Or, de tels contrats constituent des contrats de durée qui peuvent s’éteindre par l’expiration du terme162.

La qualification de l’obligation visée comme obligation à exécution instantanée n’ayant pas un caractère nécessaire, la branche du moyen n’est pas fondée.

Sur le septième moyen de cassation Le septième moyen est tiré de la violation de l’article 1134 du Code civil, en ce que pour rejeter les demandes de la demanderesse en cassation fondées sur l’existence d’un nouveau contrat établi par le comportement des parties, la Cour d’appel a retenu que ce nouveau contrat « resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12 »163 du contrat-cadre, aux motifs développés dans la partie IV., sous 1, de l’arrêt attaqué164, notamment aux motifs tirés de ce que « si la durée déterminée du contrat pouvait être changée de l’accord des parties, cette modification devait résulter au vœu de l’article 9 d’« un document signé par ou pour le compte des Parties à la présente convention », voire selon l’article 12 d’«un écrit signé par les Parties » »165 et de ce que « cette conclusion vaut également pour le cas où, tel que le fait valoir SOC1) (qui cite pêle-mêle la prolongation, le renouvellement tacite et la conclusion d’un contrat nouveau et, ce, abstraction faite de la question de savoir si la prorogation fait continuer l’ancien contrat ou s’il y a conclusion d’un nouveau contrat dont les modalités sont à déterminer par le juge), il y aurait eu conclusion implicite par les parties d’un nouveau contrat après le 31 décembre 2012, conclusion qui s’induirait des actions postérieures qui l’attesteraient, étant donné que si l’aveu en action est susceptible d’établir la volonté des parties d’exécuter un contrat dont l’existence est contestée, ce « nouveau » contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12 »166, alors que, première branche, les clauses d’une convention stipulant qu’elles sont applicables « à la présente convention »167 ne peuvent être appliquées à d’autres conventions, de sorte que la Cour d’appel, en retenant que les articles 9 et 12 du contrat-cadre, pourtant uniquement applicables « à la présente convention », s’appliquent également à un « « nouveau » contrat »168 conclu entre parties, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ; et que, seconde branche, à titre subsidiaire, en retenant que les articles 9 et 12 du contrat-cadre s’appliquent également à un « « nouveau » contrat »169 conclu entre parties, la Cour d’appel a dénaturé les clauses du contrat-cadre, qui stipule que celles-ci sont applicables « à la présente convention »170.

Le septième moyen de cassation se rattache aux quatrième et cinquième, en ce qu’il critique la réponse donnée par la Cour d’appel au moyen subsidiaire de la demanderesse en cassation, tiré de ce que le contrat-cadre, à supposer qu’il ne puisse être qualifié ab initio de contrat à durée 161 Idem.

162 Jurisclasseur Contrats-Distribution, Fasc. 175 : Extinction du contrat – Les causes, par Anne ETIENNEY-

DE SAINTE MARIE, février 2019, n° 73, se référant aux articles 1210 à 1215 du Code civil français, introduits par l’ordonnance précitée n° 2016-131.

163 Arrêt attaqué, page 22, avant-dernier alinéa.

164 Idem, page 19, dernier alinéa, à page 22, avant- dernier alinéa.

165 Idem, page 22, troisième alinéa.

166 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

167 Idem, même page, troisième alinéa.

168 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

169 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

170 Idem, même page, troisième alinéa.

indéterminée, a cependant acquis cette qualité en cours d’exécution au regard d’un aveu extrajudiciaire des parties découlant de cette exécution.

La demanderesse en cassation avait soutenu à ce titre que le contrat-cadre avait fait l’objet d’une prorogation, sinon d’une tacite reconduction.

Cette prétention a été rejetée par la Cour d’appel au motif notamment que ce nouveau contrat « resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12 »171 du contrat-cadre, étant donné que « si la durée déterminée du contrat pouvait être changée de l’accord des parties, cette modification devait résulter au vœu de l’article 9 d’« un document signé par ou pour le compte des Parties à la présente convention », voire selon l’article 12 d’«un écrit signé par les Parties » »172 et que « cette conclusion vaut également pour le cas où, tel que le fait valoir SOC1) (qui cite pêle-mêle la prolongation, le renouvellement tacite et la conclusion d’un contrat nouveau et, ce, abstraction faite de la question de savoir si la prorogation fait continuer l’ancien contrat ou s’il y a conclusion d’un nouveau contrat dont les modalités sont à déterminer par le juge), il y aurait eu conclusion implicite par les parties d’un nouveau contrat après le 31 décembre 2012, conclusion qui s’induirait des actions postérieures qui l’attesteraient […] » 173.

Dans son moyen, la demanderesse en cassation se fonde sur le fait, constaté par la Cour d’appel, que l’article 9 du contrat-cadre dispose que les modifications de ce dernier doivent résulter d’« un document signé par ou pour le compte des Parties à la présente convention »174. Elle reproche à la Cour d’appel d’avoir appliqué les règles de modification applicables « à la présente convention » au « « nouveau » contrat de contenu identique au contrat expiré [sous réserve du terme stipulé] »175 qu’elle entend établir au moyen « des actions postérieures [des parties] qui l’attesteraient »176, donc d’un « aveu en action »177. Elle reproche, partant, que le nouveau contrat issu d’une prorogation ou d’une tacite reconduction de l’ancien contrat continue à relever, du point de vue de sa forme et de sa preuve, de l’ancien contrat.

Cette critique est subdivisée en deux branches.

S u r l a p r e m i è r e b r a n c h e d u m o y e n Dans la première branche du moyen la demanderesse en cassation critique la Cour d’appel d’avoir violé l’article 1134 du Code civil en ayant omis de tirer les conséquences de ses propres constatations. Celles-ci consisteraient en ce que l’arrêt relève que la modification du contrat-

cadre doit s’effectuer selon les règles définies « par la présente convention »178, ce dont il est déduit que ces règles ne sauraient s’appliquer à d’autres conventions, dont celle résultant de la prorogation ou reconduction tacite de la convention.

171 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

172 Idem, même page, troisième alinéa.

173 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

174 Idem, même page, troisième alinéa.

175 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

176 Idem et loc.cit.

177 Idem et loc.cit.

178 Idem, même page, troisième alinéa.

La conclusion de la Cour d’appel tirée de ce que les règles de modification du contrat-cadre s’appliquent également aux nouveaux contrats susceptibles de résulter de sa prorogation ou de sa reconduction tacite découle des constatations tirées de ce que :

« […] la formulation des articles 9 et 12 du Contrat-Cadre est générale et vise notamment tous les cas où le contrat se trouve modifié, partant également en cas de modification de la durée du contrat issue d’une tacite reconduction »179 et de ce que « si l’aveu en action est susceptible d’établir la volonté des parties d’exécuter un contrat dont l’existence est contestée, ce « nouveau » contrat, de contenu identique au contrat expiré, ne serait en fait que la prolongation du contrat expiré et resterait soumis quant à sa validité aux dispositions des articles 9 et 12 »180.

La Cour d’appel constate donc, dans le cadre de son appréciation de la portée des stipulations contractuelles en cause, que les parties ont convenu en l’espèce que les articles 9 et 12 du contrat-cadre, imposant l’exigence d’un écrit signé, s’appliquent à tous les cas de modification du contrat, y compris en cas de modification de sa durée au moyen d’une tacite reconduction ou d’une prorogation après expiration du terme. Il en suit que les parties ont d’ores et déjà convenu que toute modification du contrat-cadre, serait-ce, en cas de tacite reconduction ou de prorogation du contrat-cadre, par la conclusion d’un nouveau contrat ayant pour objet de reconduire ou de proroger le contrat, devra respecter ces conditions de forme.

Cette interprétation de la portée des dispositions contractuelles, convenues dans le cadre de la liberté contractuelle des parties, relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

La première branche du moyen, qui ne tend qu’à remettre en discussion cette appréciation souveraine, ne saurait être accueillie.

S u r l a s e c o n d e b r a n c h e d u m o y e n Dans la seconde branche du moyen, la demanderesse en cassation critique que le raisonnement précité constituerait une dénaturation du contrat.

A admettre que ce cas d’ouverture soit au regard de votre jurisprudence récente, citée ci-avant dans le cadre de la discussion de la première branche du premier moyen, recevable, il suppose que l’interprétation critiquée soit incompatible avec l’acte181. Or, l’application des règles de forme du contrat-cadre aux modifications de ce dernier, serait-ce par tacite reconduction ou prorogation, n’est pas incompatible avec les articles 9 et 12 de ce contrat-cadre, qui, au regard de « la formulation [qui] est générale »182 visent « tous les cas où le contrat se trouve modifié »183, serait-ce par un contrat formellement nouveau consécutif à une reconduction tacite ou à une prorogation du contrat-cadre.

Il en suit que la seconde branche, à supposer qu’elle puisse être accueillie, n’est pas fondée.

179 Idem, même page, deuxième alinéa.

180 Idem, même page, avant-dernier alinéa.

181 BORE, précité, n° 79.170 et suivants, pages 457 et suivantes.

182 Arrêt attaqué, page 22, troisième alinéa.

183 Idem et loc.cit.

Sur le huitième moyen de cassation Le huitième moyen est tiré de la violation de l’article 1134 du Code civil, en ce que la Cour d’appel a retenu que les conditions requises à la mise en œuvre de la clause de sauvegarde prévue à l’article 5.1.1 du contrat-cadre ne sont pas réunies, aux motifs développés dans la partie V, sous 4.11.2 de l’arrêt attaqué184, et dans la partie VI de ce dernier185, alors que, ainsi qu’il résulte de l’arrêt dans lequel ces dispositions sont citées, l’article 5.1. du contrat-cadre édicte les « Principes de conservation et séparation du patrimoine des Promoteurs »186, que « l’article 5.1.2., premier alinéa, édicte, d’abord, le principe général selon lequel « Par rapport à la situation patrimoniale ayant prévalu immédiatement avant les opérations de transfert de ce patrimoine au Fonds (patrimoine de départ), ces opérations ne devront ni enrichir, ni appauvrir l’un des Promoteurs au détriment, respectivement au profit, de l’autre Promoteur », puis, énumère l’ensemble des étapes qui devront conduire au transfert du patrimoine au cessionnaire et celles subséquentes aux compartiments 1 à 5, à savoir « les cessions d’actions et de parts décrites à la section 3.1. ; l’abandon de créance éventuellement accordé au Fonds par les promoteurs dans le cadre de la convention de cession des actions au Fonds ; les fusions décrites aux sections 4.1. et 4.2.1. et les allocations du patrimoine aux compartiments :

Compartiment de Fusion, Compartiment Commun et Compartiments 1 à 5 » »187 et que « l’article 5.1.2, deuxième alinéa, est une application du principe général édicté à l’article 5.1.2, premier alinéa [qui] vise en particulier la situation des biens privatifs mélangés aux biens communs » [et qui] est de la teneur suivante : « Aucun Promoteur ne doit donc en particulier tirer un avantage ou subir un désavantage par rapport à l’autre Promoteur du fait que le patrimoine destiné aux compartiments privatifs sera, pendant une phase transitoire mélangé avec le patrimoine destiné aux compartiments communs 1 à 3.Chaque Promoteur s’engage à placer l’autre Promoteur dans la situation qui aurait prévalu si le patrimoine des sociétés concernées avait été directement transféré aux compartiments privatifs au moment de l’absorption par le Fonds, sous réserve d’une régularisation des avantages fiscaux générés par les opérations de fusion conformément à la présente convention. »188, ce dont il découle qu’aucun Promoteur ne peut tirer un avantage ou subir un désavantage du fait que le patrimoine destiné aux compartiments privatifs est, pendant une phase transitoire, mélangé et destiné au compartiment commun, de sorte que la Cour d’appel en rejetant la demande n’a pas tiré les conséquences légales de sa constatation du caractère transitoire du mélange des patrimoines privatifs avec le patrimoine commun.

La Cour d’appel a décrit les termes du litige découlant du contrat-cadre, qui lie SOC3) à ses deux associés commanditaires SOC1) et SOC2), comme suit :

« Le Contrat-Cadre lie le Fonds à ses deux associés commanditaires SOC1) et SOC2).

Selon le point B du Contrat-Cadre, l’allocation définitive des actifs détenus par les promoteurs (note de la Cour : cette dénomination utilisée par les auteurs du Contrat-

Cadre doit être prise dans son acception de initiateurs du Fonds et non pas dans celle relative à l’activité commerciale des sociétés à la base de sa création) devait se réaliser 184 Arrêt attaqué, page 31, antépénultième alinéa, à page 33, troisième alinéa.

185 Idem, page 33, quatrième alinéa, à page 35, antépénultième alinéa.

186 Idem, page 31, antépénultième alinéa.

187 Idem, même page, dernier alinéa.

188 Idem, page 32, deuxième et troisième alinéa.

par étapes, d’abord, par le transfert des actifs immobiliers dans le compartiment de fusion 7 du Fonds moyennant la mise en œuvre de fusions-absorptions directes ou en cascade, puis, par leur passage dans le compartiment commun mixte 6 et, enfin, par l’allocation définitive dans les compartiments de destination 1-5.

Le Fonds est composé de six compartiments dont les trois premiers sont destinés à recueillir définitivement les actifs communs aux sociétés SOC1) et SOC2). Les compartiments 4 et 5 sont destinés à se voir allouer définitivement les actifs privatifs de chaque société. Le compartiment 6 est un compartiment commun mixte qui était destiné à recueillir, à titre transitoire, pour des raisons d’ordre réglementaire, l’ensemble des actifs transférés au Fonds, communs ou privatifs, avant leur transfert définitif dans les compartiments de destination.

La Cour renvoie pour la liste des actifs privatifs ou communs à transférer au Fonds à l’article 3 du Contrat-Cadre de même qu’à l’annexe 1 et à l’article 4 pour ce qui concerne les opérations de fusion. Les transferts vers le compartiment de fusion 7 ont été opérés le 16 novembre 2010 et ceux vers le compartiment commun mixte le 31 mars 2011.

Les actifs immobiliers transférés au Fonds étaient soit communs aux deux sociétés, en ce que chacune d’elles détenait 50% des parts du capital social des entités juridiques propriétaires des immeubles, soit privatifs, en ce que le capital social des entités était détenu dans son intégralité par l’une ou l’autre des deux sociétés commanditaires.

Le transfert des actifs, qu’ils aient été communs ou privatifs, vers le compartiment commun mixte n° 6 n’est pas contentieux entre parties. C’est la demande de SOC1) qui tend au transfert des actifs privatifs et communs qui se trouvent depuis 2011 dans le compartiment commun mixte 6 vers les compartiments de destination 1-5 qui est litigieuse. »189.

Le contrat-cadre avait donc pour objet de permettre une allocation définitive des actifs aux compartiments 1 à 5, dont les compartiments 1 à 3 regroupent des actifs communs à SOC1) et SOC2) et les compartiments 4 et 5 des actifs propres de chacune d’elle. Cette allocation définitive devait être précédée d’un transfert des actifs vers le compartiment 7, dit compartiment de fusion, et ensuite vers le compartiment 6, qui est un compartiment commun mixte.

Les transferts vers le compartiment 7, puis vers le compartiment 6, ont été exécutés. Celui vers les compartiments 1 à 5 n’a pas été exécuté. Les actifs se trouvent toujours actuellement dans le compartiment commun mixte 6.

La Cour d’appel constate que le passage des actifs dans le compartiment 6 est régi par un « principe de neutralité patrimoniale »190 décrit comme suit :

« Le passage transitoire dans le compartiment commun mixte ne devait, selon la volonté expresse des parties exprimée à l’article 5.1.2. du Contrat-Cadre, ni nuire, ni profiter à aucun des associés commanditaires. »191.

189 Idem, page 9, antépénultième alinéa, à page 10, quatrième alinéa.

190 Idem, page 18, deuxième alinéa.

191 Idem, page 28, avant-dernier alinéa, dernière phrase.

Ce principe figure dans un article 5.1., qui « édicte les « Principes de conservation et séparation du patrimoine des Promoteurs ». »192.

Cet article comporte des sous-articles, notamment les articles 5.1.2., qui définit le principe en question, et 5.1.3. :

« L’article 5.1.2., premier alinéa, édicte, d’abord, le principe général selon lequel « Par rapport à la situation patrimoniale ayant prévalu immédiatement avant les opérations de transfert de ce patrimoine au Fonds (patrimoine de départ), ces opérations ne devront ni enrichir, ni appauvrir l’un des Promoteurs au détriment, respectivement au profit, de l’autre Promoteur », puis, énumère l’ensemble des étapes qui devront conduire au transfert du patrimoine au cessionnaire et celles subséquentes aux compartiments 1 à 5, à savoir « les cessions d’actions et de parts décrites à la section 3.1. ; l’abandon de créance éventuellement accordé au Fonds par les promoteurs dans le cadre de la convention de cession des actions au Fonds ; les fusions décrites aux sections 4.1. et 4.2.1. et les allocations du patrimoine aux compartiments :

Compartiment de Fusion, Compartiment Commun et Compartiments 1 à 5 ».

L’article 5.1.2, deuxième alinéa, est une application du principe général édicté à l’article 5.1.2, premier alinéa. Il vise en particulier la situation des biens privatifs mélangés aux biens communs. Il est de la teneur suivante :

« Aucun Promoteur ne doit donc en particulier tirer un avantage ou subir un désavantage par rapport à l’autre Promoteur du fait que le patrimoine destiné aux compartiments privatifs sera, pendant une phase transitoire mélangé avec le patrimoine destiné aux compartiments communs 1 à 3.Chaque Promoteur s’engage à placer l’autre Promoteur dans la situation qui aurait prévalu si le patrimoine des sociétés concernées avait été directement transféré aux compartiments privatifs au moment de l’absorption par le Fonds, sous réserve d’une régularisation des avantages fiscaux générés par les opérations de fusion conformément à la présente convention. » L’article 5.1.3. est plus large en ce qu’il vise l’ensemble des opérations de transfert (donc absorption des sociétés propriétaires des actifs immobiliers par le Fonds et situation transitoire dans le compartiment mixte) en ce qu’il y est stipulé que pendant les opérations de transfert, chaque promoteur devra bénéficier exclusivement des fruits et assumer exclusivement les risques en rapport avec son patrimoine de départ. »193.

L’article 5.1. comporte encore un article 5.1.1., qui définit une « clause de sauvegarde »194, consistant dans un « mécanisme de régularisation »195 :

« Les Promoteurs s’engagent l’un envers l’autre qu’ils définiront et appliqueront dès que possible un mécanisme de régularisation assurant la réalisation des objectifs énoncés si ceux-ci ne peuvent pas être atteints au niveau du Fonds. Les Promoteurs s’engagent notamment à transférer entre eux des actions des différents compartiments à un prix non basé sur la VNI dans la mesure où ceci est requis pour assurer le respect 192 Idem, page 31, antépénultième alinéa.

193 Idem, page 31, dernier alinéa, à page 32, quatrième alinéa.

194 Idem, page 25, deuxième et troisième alinéas.

195 Idem, page 33, antépénultième alinéa.

des principes énoncés à la présente section. Une illustration chiffrée de ce principe se trouve en annexe 4 »196.

La Cour d’appel constate que, eu égard au libellé de la clause, celle-ci ne s’applique qu’en cas d’impossibilité légale, réglementaire ou statutaire de procéder à l’exécution en nature de l’allocation définitive des actifs :

« Le recours à la clause de sauvegarde est conditionné, tel que le fait valoir à bon droit SOC2), par l’impossibilité légale, réglementaire ou statutaire, de procéder à l’exécution en nature de l’allocation définitive des actifs, puisque l’article 5.1.1. dispose qu’elle doit être incompatible « avec les contraintes légales et réglementaires, les statuts et les Mémorandums de Placement Privé ». Cette disposition est à interpréter en ce sens que la liberté contractuelle des parties de procéder à cette allocation doit se heurter soit aux contraintes légales et réglementaires, soit aux statuts, soit encore au Memorandum de Placement Privé. »197.

En l’absence d’une allégation tirée de ce que le défaut d’allocation définitive des actifs est dû à un tel motif, la Cour conclut que la condition de mise en œuvre de la clause de sauvegarde n’est pas respectée, de sorte que la demande y relative est rejetée par elle :

« Les intimées ne soutiennent pas que le Fonds ait été empêché de procéder à l’allocation prévue au Contrat-Cadre en raison d’un des trois motifs énoncés ci-dessus.

C’est bien au contraire en vertu du terme extinctif de l’article 8 du contrat que l’allocation n’est plus possible.

La condition préalable à la mise en œuvre de la clause de sauvegarde prévue à l’article 5.1.1. du contrat n’est pas remplie, de sorte que la demande de SOC1) n’est pas fondée. »198.

La huitième moyen critique la Cour d’appel d’avoir refusé d’appliquer la clause de sauvegarde.

Or, selon la demanderesse en cassation, cette application se serait imposée au regard de la constatation tirée de ce que l’article 5.1.2., second alinéa, du contrat-cadre dispose que « aucun Promoteur ne doit […] en particulier tirer un avantage ou subir un désavantage par rapport à l’autre Promoteur du fait que le patrimoine destiné aux compartiments privatifs sera, pendant une phase transitoire [qui continue actuellement à se poursuivre] mélangé avec le patrimoine destiné aux compartiments communs 1 à 3 »199. En refusant d’admettre la clause, la Cour d’appel aurait omis de tirer les conséquences de ses propres constatations.

Le moyen méconnaît que la Cour d’appel a constaté que la mise en œuvre de la clause de sauvegarde suppose que l’allocation définitive se heurte à une impossibilité légale, réglementaire ou statutaire d’y procéder, que l’existence d’un tel obstacle n’a pas été soutenu et que l’exécution de l’allocation s’est heurtée à une autre cause, étrangère aux cas d’ouverture de la clause, à savoir à la survenance du terme du contrat, de sorte que les conditions de sa mise en œuvre ne sont pas réunies.

Il procède, partant, d’une mauvaise lecture de l’arrêt, de sorte qu’il manque en fait.

196 Idem et loc.cit.

197 Idem, page 35, troisième alinéa.

198 Idem, page 35, quatrième et cinquième alinéas.

199 Idem, page 32, troisième alinéa.

A titre subsidiaire, il ne tend qu’à remettre en discussion l’interprétation par la Cour d’appel de la portée et des conditions de mise en œuvre de l’article 5.1.1., définissant la clause de sauvegarde, qui relève de son appréciation souveraine.

Il en suit, à titre subsidiaire, que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le neuvième moyen de cassation Le neuvième moyen est tiré de la violation des articles 89 de la Constitution, 1142, 1146, alinéa 2, et 1147 du Code civil et 53, 61, 249 et 587 du Nouveau Code de procédure civile, en ce que la Cour d’appel a rejeté la demande du demandeur en cassation visant à la condamnation de ses adversaires à procéder à l’allocation définitive des actifs contenus dans le compartiment 6 de SOC3) entre les compartiments 1 à 5 de ce dernier, aux motifs développés dans la partie V, sous 4.2 à 4.8 et 4.11.2200, ainsi que VI, premier et deuxième alinéas201, notamment aux motifs tirés de ce que « l’obligation d’allocation définitive était à la charge du Fonds, qui, par le biais de son associé commandité qui le gère a décidé de procéder à l’allocation définitive des actifs aux compartiments de destination moyennant la résolution du 5 octobre 2012 [étant précisé que] les associés commanditaires étaient contractuellement tenus d’y participer de bonne foi »202, que « l’obligation d’allocation définitive est à replacer dans son contexte contractuel [d’où] il […] ressort que les parties avaient prévu une série d’étapes à effectuer en vue du transfert des actifs vers le compartiment mixte du Fonds qui devait les accueillir à titre transitoire, avant d’être dirigés définitivement vers les compartiments communs ou privatifs [,] le passage transitoire dans le compartiment commun mixte ne [devant], selon la volonté expresse des parties exprimée à l’article 5.1.2 du Contrat-Cadre, ni nuire, ni profiter à aucun des associés commanditaires »203, que « l’obligation d’allocation définitive ayant pesé sur le Fonds est à qualifier d’obligation de résultat atténuée [étant précisé que] l’obligation était de résultat, mais [que] le Fonds était, au regard des stipulations du Contrat-Cadre, tributaire des décisions des sociétés commanditaires qui s’étaient engagées à agir de bonne foi notamment en vue d’atteindre ce but »204 et que « le Fonds qui rejoint SOC1) dans sa demande en allocation définitive des actifs se trouvant actuellement toujours dans le compartiment commun mixte ne fait état d’aucun événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel stipulé [étant précisé que] si le Fonds et surtout SOC1) font, certes, état d’événements qui, selon eux, ont bloqué, voire retardé le processus d’allocation définitive -

SOC1) soutient notamment avoir à plusieurs reprises voulu mettre à l’ordre du jour de la réunion du conseil d’administration d’SOC4) la question de l’allocation définitive des actifs immobiliers, mais ces tentatives auraient buté sur SOC2) qui aurait fait état de sujets plus urgents à évacuer, ou argue encore de l’impossibilité de procéder à cette allocation définitive dans un délai à peine supérieur à deux ans (octobre 2010 à décembre 2012) -, ils n’en tirent cependant aucune conclusion, voire aucun moyen juridiques »205, alors que, première branche, en retenant, pour répondre à la question de savoir « si l’expiration du Contrat-Cadre a libéré le 200 Arrêt attaqué, page 27, avant- dernier alinéa, à page 29, dernier alinéa, et page 31, antépénultième alinéa, à page 33, troisième alinéa.

201 Idem, page 33, quatrième et cinquième alinéa.

202 Idem, page 27, avant-dernier alinéa.

203 Idem, page 28, avant-dernier alinéa.

204 Idem, page 29, antépénultième alinéa.

205 Idem, page 29, avant-dernier alinéa.

Fonds »206, que « l’obligation d’allocation définitive était à charge du Fonds »207, qu’elle était une « obligation de résultat atténuée »208, que SOC3) « ne fait état d’aucun événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel »209 et que SOC3) « rejoint SOC1) dans sa demande en allocation définitive des actifs se trouvant actuellement toujours dans le compartiment mixte »210 pour rejeter la demande de réparation « en nature de l’obligation de réallocation »211, sans constater que la réparation en nature est impossible au motif que la « qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, [l’obligation d’allocation définitive] était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme »212, la Cour d’appel, qui a méconnu que le juge qui constate que, le contrat expiré, la partie qui n’a pas exécuté l’obligation qui était à sa charge, sans pouvoir justifier que cette inexécution provient d’une cause étrangère, doit condamner cette partie à la réparation du dommage et doit octroyer cette réparation en nature si cette modalité de réparation est demandée et que le débiteur s’accorde sur cette modalité, sauf si cette réparation est impossible, et qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, aurait dû octroyer la réparation en nature et ordonner l’exécution de l’obligation, de sorte qu’elle a violé les articles 1142, 1146, alinéa 2, et 1147 du Code civil ; que, deuxième branche, la Cour d’appel, après avoir constaté que le Fonds « rejoint SOC1) dans sa demande en allocation définitive des actifs se trouvant actuellement toujours dans le compartiment mixte »213, a rejeté la demande de condamnation de SOC3) à y procéder, de sorte qu’elle a violé l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile, qui dispose que « l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties » ; que, troisième branche, la Cour d’appel, en retenant, d’une part, que « le terme une fois atteint, les obligations pour autant qu’elles n’avaient jusque-là pas encore été exécutées ne devenaient pas, tel que le soutient SOC1), exigibles du seul fait de l’échéance atteinte [mais que] bien au contraire auraient-elles dû déjà avoir été exécutées en cours de contrat »214 et, d’autre part, que l’obligation d’allocation définitive qui « il est vrai […] n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible »215, a statué par des motifs contradictoires, de sorte qu’elle a violé les articles 89 de la Constitution et 249, ainsi que 587 du Nouveau Code de procédure civile ; et que, quatrième branche, le juge aurait dû d’office rechercher si la demande dirigée contre SOC3) aux fins de procéder à l’allocation définitive n'était pas fondée sur base des dispositions relatives à la responsabilité contractuelle, de sorte qu’en omettant de procéder d’office à cette recherche et de se limiter à statuer sur la seule base de l’exécution de l’obligation dans le cadre du contrat elle a violé l’article 61 du Nouveau Code de procédure civile, qui l’oblige à trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

Dans son neuvième moyen, la demanderesse en cassation critique au regard d’un large éventail de cas d’ouverture la quasi-totalité des motifs décisoires de l’arrêt. Le moyen n’a pour objet ni un motif spécifique qui serait attaqué sous l’angle de griefs distincts, ni un grief spécifique sur base duquel des motifs distincts seraient critiqués.

206 Idem, page 28, deuxième alinéa (point 4.4).

207 Idem, page 27, avant-dernier alinéa (point 4.2).

208 Idem, page29, quatrième alinéa (point 4.6).

209 Idem, page 29, avant-dernier alinéa (point 4.7).

210 Idem et loc.cit.

211 Idem, page 33, cinquième alinéa (sous VI).

212 Idem, page 29, dernier alinéa (point 4.8).

213 Idem, page 29, avant-dernier alinéa (point 4.7).

214 Idem, page 28, dernier alinéa.

215 Idem, page 29, dernier alinéa (point 4.8).

Ainsi que la défenderesse en cassation SOC2) le souligne à juste titre dans son mémoire en réponse216, le moyen soulève trois griefs différents, sans lien logique entre eux et sans être susceptibles d’être rattachés à des motifs identiques:

- La troisième branche critique que l’arrêt comporterait une contradiction de motifs. Ce grief est relatif à la réponse de la Cour d’appel au sujet du moyen de la demanderesse en cassation présenté à titre plus subsidiaire, tiré de ce que, à admettre que le contrat-

cadre n’ait pas été conclu à durée indéterminée (moyen principal) et qu’il n’ait pas fait l’objet d’une prorogation ou d’une tacite reconduction (moyen subsidiaire), l’obligation d’allocation définitive aurait survécu217. Ce moyen plus subsidiaire a été analysé par la Cour d’appel dans la partie V de son arrêt218. Cette partie de l’arrêt fait l’objet du sixième et du huitième moyen. La troisième branche du neuvième moyen se rattache à ces deux moyens.

- La deuxième branche critique la Cour d’appel d’avoir refusé de condamner SOC3) à procéder à l’allocation définitive tant bien même que ce dernier aurait été d’accord avec cette demande. Ce grief est du point de vue logique celui qui aurait dû être soulevé en tout premier lieu, avant toute critique sur les réponses données par la Cour d’appel au sujet des moyens d’appel de la demanderesse en cassation. Il aurait donc dû trouver sa place avant même le premier moyen de cassation.

- La première et la quatrième branche critiquent que la Cour d’appel, après avoir rejeté les moyens d’appel de la demanderesse en cassation, aurait dû ordonner d’office l’exécution de l’obligation d’allocation sur base des principes de la responsabilité contractuelle. Ce grief est subsidiaire tant à la deuxième branche du neuvième moyen, qu’aux premier jusqu’au huitième moyens.

Le neuvième moyen apparaît ainsi comme un fourre-tout de griefs qui ne sont ni reliés par un lien logique, ni à tout le moins déduits des mêmes motifs de l’arrêt.

L’article 10, alinéa 2, première phrase, de la loi de 1885 dispose que « sous peine d’irrecevabilité, un moyen ou un élément de moyen ne doit mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture ». Il en suit que l’exigence d’identité du cas d’ouverture se rapporte, en présence de moyens subdivisés en branches, donc en « éléments de moyen », aux branches. Or, chacune des quatre branches respecte cette exigence de forme. Par ailleurs les griefs respectifs exposés dans le cadre des branches, s’ils ne présentent pas de lien logique entre eux et ne se rapportent pas aux mêmes motifs, sont compréhensibles. Si la présentation du moyen ne facilite pas sa compréhension et n’est pas irréprochable du point de vue de sa cohérence et de sa logique, elle respecte les exigences de la loi.

Le moyen est, partant, à considérer comme recevable au regard de sa forme.

Aux fins de respecter la logique des griefs soulevés, il y a lieu d’analyser d’abord la deuxième, puis la troisième branche et enfin la première branche ensemble avec la quatrième.

216 Mémoire en réponse d’SOC2), page 33, dernier alinéa, à page 34, quatrième alinéa.

217 La contradiction alléguée concerne les motifs exposés dans l’arrêt attaqué à la page 28, dernier alinéa, et page 29, dernier alinéa.

218 Arrêt attaqué, page 25, premier alinéa, à page 33, troisième alinéa.

S u r l a d e u x i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans sa deuxième branche du moyen, la demanderesse en cassation tire argument d’un motif incident de l’arrêt, à savoir de celui tiré de ce que « le Fonds [donc SOC3)] […] rejoint SOC1) dans sa demande en allocation définitive des actifs se trouvant actuellement toujours dans le compartiment mixte »219, pour soutenir que la Cour d’appel, au lieu de discuter du bien-fondé de l’appel d’SOC2), aurait dû se limiter à constater que les parties étaient d’accord avec la demande de condamnation d’SOC3) à exécuter l’obligation d’allocation définitive et confirmer le jugement entrepris.

Ce moyen est nouveau et comme il implique l’appréciation par votre Cour de la portée des prétentions respectives des parties délimitant l’objet du litige, il est mélangé de fait et de droit et, partant, irrecevable.

A titre subsidiaire, la défenderesse en cassation SOC2) soulève à juste titre que, au regard des pièces de la procédure d’appel, auxquelles vous pouvez avoir égard, SOC3) n’était pas d’accord avec la demande en allocation220, de sorte que le motif de l’arrêt attaqué dont la demanderesse en cassation entend déduire un tel accord est erroné en fait, sinon à tout le moins incomplet.

Un tel accord, à le supposer établi, aurait par ailleurs été insuffisant pour empêcher la Cour d’appel d’examiner les moyens d’appel de la partie appelante SOC2), qui s’opposait à la demande en allocation définitive de SOC1), avait à cette fin formé appel contre le jugement de première instance qui y avait fait droit et s’était vu reconnaître par les juges du second degré intérêt et qualité pour former appel.

Il en suit, à titre subsidiaire, que la deuxième branche du moyen n’est pas fondée.

S u r l a t r o i s i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la troisième branche du moyen, la demanderesse en cassation critique l’existence d’une contradiction entre deux motifs de l’arrêt :

- « La procédure de transfert des actifs au bénéfice du Fonds et d’allocation définitive de ceux-ci vers les différents compartiments était à parfaire endéans un laps de temps déterminé d’avance. Le terme une fois atteint, les obligations pour autant qu’elles n’avaient jusque-là pas encore été exécutées ne devenaient pas, tel que le soutient SOC1), exigibles du seul fait de l’échéance atteinte. Bien au contraire auraient-elles dû déjà avoir été exécutées en cours de contrat. »221 ;

- « Que l’allocation définitive n’ait pas été soumise à condition, tel que le fait valoir le Fonds pour en déduire qu’elle continuerait à devoir être exécutée, même le terme une fois atteint, ne signifie pas qu’elle survivait à l’arrivée du terme du contrat. L’obligation dont il est vrai qu’elle n’était pas spécifiquement affectée d’un terme s’inscrivait 219 Idem, page 29, avant- dernier alinéa.

220 Mémoire en réponse d’SOC2), pages 36-37, point 2.

221 Arrêt attaqué, page 28, dernier alinéa (les passages soulignés sont ceux qui sont cités par la demanderesse en cassation aux fins d’établir l’existence d’une contradiction de motifs (Mémoire en cassation, page 75, troisième branche du moyen)).

cependant dans le cadre du Contrat-Cadre qui venait à terme le 31 décembre 2012, de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif, elle était immédiatement exigible, mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme. »222 .

La demanderesse en cassation critique ces motifs d’être contradictoires parce que la Cour d’appel y aurait retenu « que l’obligation d’allocation définitive qui devait être exécutée en cours du Contrat était « immédiatement exigible » et qu’elle « n’était pas exigible du seul fait de l’échéance atteinte » »223.

En réalité, ainsi qu’il résulte de la citation complète faite ci-avant des deux motifs, le constat tiré, dans le cadre du premier motif, de ce que « Le terme une fois atteint, les obligations […] ne devenaient pas […] exigibles du seul fait de l’échéance atteinte »224, a pour objet d’exposer une thèse de la demanderesse en cassation (« tel que le soutient SOC1) »225), qui a été rejetée par la Cour d’appel, qui ne qualifia pas, comme soutenu par la demanderesse en cassation, le terme convenu comme terme suspensif, dont l’échéance rend l’obligation exigible, mais comme terme extinctif226, par l’effet duquel l’obligation « était immédiatement exigible [à partir de l’entrée en vigueur du contrat-cadre], mais sa durée était limitée dans le temps jusqu’au moment où s’est produit l’événement futur et certain que constitue le terme [extinctif du contrat-

cadre] »227.

Il en suit que la branche du moyen, qui repose sur une mauvaise lecture de l’arrêt, manque en fait.

S u r l a p r e m i è r e e t l a q u a t r i è m e b r a n c h e d u m o y e n Dans la première et la quatrième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel d’avoir omis de condamner d’office, sur base de la responsabilité contractuelle, SOC3) à exécuter en nature l’obligation d’allocation définitive. Ce reproche est fondé, dans la première branche, sur des dispositions relatives à la responsabilité contractuelle, à savoir les articles 1142, 1146 et 1147 du Code civil, et dans la quatrième branche sur l’article 61 du Nouveau Code de procédure civile.

Le grief est nouveau, la demanderesse en cassation n’ayant pas demandé devant les juges du fond la condamnation d’SOC3) sur base de la responsabilité contractuelle à réparer le préjudice découlant de l’inexécution de l’obligation litigieuse par une réparation en nature. Elle avait, au contraire, demandé l’exécution forcée en nature de l’obligation sur base du contrat.

Or, l’exécution forcée d’une obligation contractuelle sur base de l’article 1134 du Code civil ne se confond pas avec la réparation en nature du préjudice découlant de l’inexécution de cette obligation sur base de la responsabilité civile. En effet, d’une part, « l’exécution forcée de 222 Arrêt attaqué, page 29, dernier alinéa (les passages soulignés sont ceux qui sont cités par la demanderesse en cassation aux fins d’établir l’existence d’une contradiction de motifs (Mémoire en cassation, page 75, troisième branche du moyen)).

223 Mémoire en cassation, page 76, dernier alinéa (Discussion de la troisième branche du moyen).

224 Arrêt attaqué, page 28, dernier alinéa.

225 Idem et loc.cit.

226 Idem, page 29, dernier alinéa : « de sorte qu’affectée nécessairement d’un terme extinctif ».

227 Idem et loc.cit.

l’obligation peut être poursuivie par le créancier sans que celui-ci ait à justifier d’un dommage […], tandis que la preuve du dommage certain est une condition sine qua non de la réparation »228 et, d’autre part, « alors que le prononcé d’une mesure de réparation en nature est toujours facultatif pour le juge […], l’exécution forcée en nature est, quant à elle, dotée d’un caractère obligatoire »229.

La condamnation à une réparation en nature suppose donc la preuve d’un préjudice et elle est abandonnée au pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond230, de sorte que ceux-ci ne sauraient se voir reprocher devant votre Cour de ne pas avoir prononcé une telle condamnation, et ce de surcroît d’office.

Comme elle constitue une modalité de réparation du préjudice au titre de la responsabilité contractuelle, elle suppose en outre le respect de toutes les autres conditions caractérisant cette responsabilité, dont notamment la preuve que l’inexécution contractuelle est imputable au débiteur231 ou que ce dernier ait été mis en demeure d’exécuter son obligation232.

Sur la première branche du moyen Dans la première branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir prononcé d’office une condamnation d’SOC3) à une réparation en nature du préjudice découlant de l’inexécution de l’obligation litigieuse sur base de la responsabilité contractuelle.

Le moyen est, comme rappelé ci-avant, nouveau.

Il suppose l’appréciation de faits, notamment du préjudice subi par la demanderesse en cassation SOC1) en raison de l’inexécution par SOC3) de son obligation d’allocation définitive et de ce que l’inexécution contractuelle est imputable à SOC3).

Les juges du fond n’ont pas procédé à ces appréciations, alors qu’ils n’y ont pas été invités.

L’arrêt attaqué ne comporte notamment pas d’appréciation de l’existence, de la nature et de l’étendue du préjudice que la demanderesse en cassation a, le cas échéant, subi par suite de l’inexécution.

Il ne constate pas non plus si cette inexécution est imputable à son débiteur, donc à SOC3).

228 Jurisclasseur Responsabilité civile et Assurances, Fasc. 201 : Régime de la réparation – Modalités de la réparation – Règles communes aux responsabilités délictuelle et contractuelle – Principes fondamentaux, par Fabrice LEDUC, avril 2016, n° 30.

229 Idem et loc.cit.

230 Sur ce dernier point: Idem, n° 40; Georges RAVARANI, La responsabilité civile, Pasicrisie luxembourgeoise, 3e édition, 2014, n° 726, page 748, note de bas de page n° 4.

231 Jurisclasseur Raponsabilité civile et Assurances, Fasc. 171-20 : Droit à réparation – Conditions de la responsabilité contractuelle – Fait générateur – Inexécution imputable au débiteur, par Jean-Christophe SAINT-PAU, novembre 2013, n° 1.

232 Articles 1146 et 1146-1 du Code civil (voir sur ce point les développements de la défenderesse en cassation SOC2) (mémoire en réponse de celle-ci, pages 41 à 42, point 2) ; cette obligation cesse toutefois si l’exécution de l’obligation est devenue impossible par suite de la cessation des relations contractuelles (Cour de cassation française, chambre commerciale, 17 février 2009, n° 08-13.896)).

La demanderesse en cassation se réfère à ce titre à la constatation de la Cour, faite dans le cadre de l’examen de la portée de l’obligation, tirée de ce que l’obligation litigieuse est une obligation de résultat atténuée233 :

« L’obligation d’allocation définitive ayant pesé sur le Fonds est à qualifier d’obligation de résultat atténuée. L’obligation était de résultat, mais le Fonds était, au regard des stipulations du Contrat-Cadre, tributaire des décisions des sociétés commanditaires qui s’étaient engagées à agir de bonne foi notamment en vue d’atteindre ce but. »234.

L’obligation de résultat atténuée, qui est encore désignée comme obligation de moyen renforcée235, implique que l’inexécution de l’obligation est présumée imputable au débiteur, qui peut cependant renverser cette présomption en justifiant que l’inexécution n’est pas due à sa faute236.

La Cour d’appel constate certes que « le Fonds […] ne fait état d’aucun événement qui l’eût empêché de remplir son obligation dans le délai conventionnel stipulé »237. Cette constatation est toutefois insuffisante pour déterminer si l’inexécution était imputable à SOC3). Les débats n’ont pas porté sur une demande de mise en œuvre de la responsabilité contractuelle d’SOC3) et, dans cet ordre d’idées, sur la question de savoir si l’inexécution est imputable à ce dernier ou s’il est en mesure de s’exonérer par la preuve de la faute d’un tiers, en particulier des sociétés commanditaires SOC1) et SOC2). SOC3). N’ayant pas été invité à prendre position sur cette question, son silence au sujet d’éventuels empêchements de remplir son obligation dans le délai conventionnel ne constitue pas une constatation de fait suffisante pour trancher la question de l’imputabilité de l’inexécution.

Sans même évoquer les autres questions de fait préalables à une décision sur la responsabilité contractuelle d’SOC3) non tranchées en cause, auxquelles renvoie la défenderesse en cassation SOC2)238, le moyen suppose donc des appréciations de fait.

Un moyen nouveau qui suppose des appréciations de fait est, en principe, irrecevable239.

Il est fait exception à ce principe dans certains cas de figure240, qui ne sont cependant pas pertinents en cause.

Il ne peut notamment être soutenu que le moyen ait été révélé par l’arrêt attaqué, qu’il soit d’ordre public ou de pur droit. Le moyen, qui se rapporte à un vice allégué de fond de l’arrêt, ne fait pas partie de ceux qui sont susceptibles d’être présenté pour la première fois devant votre Cour au titre de moyens révélés par la décision attaquée241. En raison de son objet, il ne constitue pas non plus un moyen d’ordre public. Le moyen de pur droit est un moyen certes nouveau, 233 Mémoire en cassation, page 74, exposé de la première branche du neuvième moyen.

234 Arrêt attaqué, page 29, quatrième alinéa.

235 Jurisclasseur Raponsabilité civile et Assurances, Fasc. 171-20 : Droit à réparation – Conditions de la responsabilité contractuelle – Fait générateur – Inexécution imputable au débiteur, par Jean-Christophe SAINT-PAU, novembre 2013, n° 41.

236 Idem et loc.cit.

237 Arrêt attaqué, page 29, avant-dernier alinéa.

238 Mémoire en réponse d’SOC2), pages 40 à 43.

239 BORE, précité, n° 82.04, page 479.

240 Idem, n° 82.111, page 487.

241 Idem, n° 82.171, page 489.

mais qui ne suppose aucune appréciation de fait, donc se réfère « exclusivement à des faits ou documents qui figurent dans la décision attaquée et que les juges du fond ont tenus pour établis »242. Cette condition n’est pas respectée au regard des questions de fait précitées non tranchées que soulève la prétention nouvelle d’une condamnation de SOC3) à une réparation en nature sur base de la responsabilité contractuelle.

Il en suit que la première branche du moyen, qui est nouvelle et suppose une appréciation de faits, est mélangée de fait et de droit et, partant, irrecevable.

A titre subsidiaire, l’octroi dans le cadre de la responsabilité contractuelle de la réparation en nature relève, comme rappelé ci-avant, de l’appréciation souveraine des juges du fond, de sorte que la branche du moyen, qui vous invite à procéder en lieu et place des juges du fond à cette appréciation, ne saurait être accueillie.

Sur la quatrième branche du moyen Dans la quatrième branche du moyen, la demanderesse en cassation reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir d’office tranché le litige sur base de la responsabilité contractuelle.

Ce reproche, tiré de ce que la Cour d’appel n’aurait à tort pas fait usage de ses pouvoirs d’office, a été révélé par l’arrêt attaqué. S’il est forcément nouveau, il échappe à la prohibition des moyens nouveaux, qui trouve exception en cas de moyens révélés par la décision attaquée tirés du non-usage des pouvoirs d’office du juge243.

Le reproche vise l’omission par la Cour d’appel, par suite de son refus d’appliquer d’office les règles de la responsabilité contractuelle, de condamner SOC3) à la réparation en nature du préjudice résultant de l’inexécution de l’obligation d’allocation définitive. Il a été vu ci-avant que l’octroi, dans le cadre de la responsabilité contractuelle, d’une réparation en nature relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.

Il en suit que la branche du moyen, qui critique l’omission par la Cour d’appel de faire d’office usage d’une faculté qui relève de son pouvoir souverain d’appréciation, ne saurait être accueillie.

A titre subsidiaire, ainsi que le rappelle à juste titre la défenderesse en cassation SOC2)244, la jurisprudence de la Cour de cassation française, appliquant l’article 12 du Code de procédure civile français, qui a été repris par l’article 61 du Nouveau Code de procédure civile luxembourgeois, ne fait pas obligation au juge, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique des demandes des parties245. En revanche, la 242 Idem, n° 82.211, page 491, citant VOULET, L’irrecevabilité des moyens nouveaux devant la Cour de cassation, JCP 1973, II, 2544, n° 20.

243 BORE, précité, n° 82.141 à n° 82.181, pages 488 à 490. Voir, à titre d’illustration : Cour de cassation française, première chambre civile, 14 mai 2009, Bull. Civ. I, n° 94 (arrêt accueillant un moyen de cassation reprochant l’omission par le juge du fond de relever d’office une règle de droit).

244 Mémoire en réponse d’SOC2), pages 43 à 46, sous 4.

245 Cour de cassation française, Assemblée plénière, 21 décembre 2007, arrêt Dauvin, Bull. Ass. Plén., n° 10 ;

Jurisclasseur Procédure civile, Fasc. 500-35 : Principes directeurs du procès – Office du juge – Fondement des prétentions litigieuses, par Corinne BLERY et Noëmie REICHLING, janvier 2020, n° 54 et la jurisprudence y citée.

jurisprudence de la Cour de cassation de Belgique oblige le juge de relever d’office, en respectant les droits de la défense, les moyens de droit dont l’application est commandée par les faits spécialement invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions246. Cette solution a inspiré votre arrêt n° 18/11, numéro 2815 du registre, du 10 mars 2011, dans lequel vous avez cassé, pour violation de l’article 61, alinéas 1 et 2, du Nouveau Code de procédure civile, un arrêt statuant sur une demande en responsabilité contractuelle au motif que les juges d’appel avaient omis de rechercher, en respectant les droits de la défense, si sur la base des faits spécialement invoqués par le demandeur à l’appui de ses prétentions, la responsabilité délictuelle n’était pas engagée.

En l’espèce, la demanderesse en cassation a recherché l’exécution forcée du contrat-cadre, ce qui suppose que ce dernier soit toujours en vigueur ou que, à tout le moins, l’exécution de l’obligation litigieuse puisse à ce stade toujours être imposée sur base du contrat. Suivant les éléments auxquels vous pouvez avoir égard, elle n’a pas prétendu vouloir se faire indemniser un préjudice qu’elle aurait subi par suite de l’inexécution du contrat. Une prétention à la réparation d’un préjudice n’a donc pas été dans les débats. Par voie de conséquence, les éléments de fait sur lesquels une demande en responsabilité civile doit se fonder, notamment l’existence d’un préjudice et l’imputation de ce préjudice au responsable, n’ont pas non plus été discutés, ni, à plus forte raison, spécialement invoqués.

Il ne saurait donc être reproché à la Cour d’appel d’avoir omis de rechercher d’office si la demanderesse en cassation aurait, le cas échéant, pu mieux réussir dans sa stratégie judiciaire en fondant sa demande, non sur l’exécution forcée du contrat, mais sur l’indemnisation du préjudice découlant de l’inexécution du contrat.

Il s’ajoute que si la Cour d’appel avait agi comme la demanderesse en cassation le préconise à l’appui de la branche du moyen, elle aurait méconnu l’objet du litige, partant, violé l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile. Ce dernier dispose que « l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties », que le juge doit respecter247. L’objet du litige, déterminé par les prétentions des parties, « c’est ce que réclame l’une des parties et que l’autre lui conteste, ou à quoi, du moins elle n’accède pas [donc] la réparation du préjudice, l’annulation d’un acte, la restitution ou l’exécution forcée »248.

En l’espèce, l’objet du litige a été l’exécution forcée du contrat. La prétention qui est actuellement soutenue à l’appui de la branche du moyen est d’obtenir réparation du préjudice de l’inexécution du contrat par une réparation en nature. Cette prétention est étrangère à l’objet du litige. Si la Cour d’appel avait agi comme la demanderesse en cassation lui fait actuellement reproche de ne pas avoir agi, en relevant d’office la prétention (non élevée) à une réparation en nature d’un préjudice (non allégué), elle aurait violé le principe de l’indisponibilité de l’objet du litige et, partant, l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile.

Il en suit, à titre subsidiaire, que la quatrième branche du moyen n’est pas fondée.

246 Cour de cassation de Belgique, 14 avril 2005, Journal des tribunaux, 2005, page 659. Voir sur cette jurisprudence, qui est constante depuis cet arrêt : Jean-François VAN DROOGHENBROECK, L’office juridictionnel du juge belge, in : L’office du juge, Bruxelles, Bruylant, 2017, pages 43 à 70, voir notamment les points 1 à 6.

247 Jurisclasseur Procédure civile, Fasc. 500-30: Principes directeurs du procès – Office du juge – Détermination des éléments de l’instance – Parties – Objet du litige, par Corinne BLERY et Noëmie REICHLING, janvier 2020, n° 24.

248 Idem, n° 23.

Conclusion Le pourvoi est recevable, mais il est à rejeter.

Pour le Procureur général d’État Le Procureur général d’État adjoint John PETRY 103


Synthèse
Numéro d'arrêt : 160/20
Date de la décision : 26/11/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2020-11-26;160.20 ?

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