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08/10/2020 | LUXEMBOURG | N°119/20

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 08 octobre 2020, 119/20


N° 119 / 2020 du 08.10.2020 Numéro CAS-2019-00135 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, huit octobre deux mille vingt.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Roger LINDEN, conseiller à la Cour de cassation, Henri BECKER, conseiller à la Cour d’appel, Stéphane PISANI, conseiller à la Cour d’appel, Elisabeth EWERT, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

X, demeurant à (…), demandeur en cassation, comparant

par Maître Cathy ARENDT, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, et:

Y...

N° 119 / 2020 du 08.10.2020 Numéro CAS-2019-00135 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, huit octobre deux mille vingt.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Roger LINDEN, conseiller à la Cour de cassation, Henri BECKER, conseiller à la Cour d’appel, Stéphane PISANI, conseiller à la Cour d’appel, Elisabeth EWERT, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

X, demeurant à (…), demandeur en cassation, comparant par Maître Cathy ARENDT, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, et:

Y, demeurant à (…), défendeur en cassation, comparant par Maître Karim SOREL, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 70/18, rendu le 31 mai 2018 sous le numéro 42621 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, neuvième chambre, siégeant en matière civile ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 27 août 2019 par X à Y, déposé le 30 août 2019 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 27 septembre 2019 par Y à X, déposé le 3 octobre 2019 au greffe de la Cour ;

Sur le rapport du conseiller Roger LINDEN et les conclusions de l’avocat général Elisabeth EWERT ;

Sur les faits :

Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait fait droit à la demande de Y dirigée contre X à lui payer, sur base de l’article 2033 du Code civil, sa part relative à des dettes de sociétés dans lesquelles ils étaient associés, cautionnées par eux, et que Y avait réglées. La Cour d’appel a confirmé le jugement et a rejeté la demande reconventionnelle de X dirigée contre Y en paiement de sa part relative à d’autres dettes de ces sociétés, réglées par X.

Sur le premier moyen de cassation :

« Violation de la loi, en l’espèce, violation de l’article 2033 du Code Civil L’article 2033 du Code Civil dispose que : .

Sur base de l'article précité, doctrine et jurisprudence ont considéré que, pour pouvoir prospérer, le demandeur doit rapporter la preuve (Droit civil, les sûretés et la publicité foncière - précis Dalloz, page 147, numéro 158).

L'arrêt attaqué viole l'article 2033 du Code Civil en retenant simplement que les pièces versées par Monsieur Y établiraient les paiements par lui effectués, sans tenir compte des arguments exposés par Monsieur X, à savoir que :

- Concernant le prêt prétendument réglé à la SOC1) S.A. (pièces 1 à 6 de la farde de Me WATGEN), il n'est pas produit un paiement par virement d'un compte propre du sieur Y, mais tout au plus (pièce n°3) un paiement venant de l'Association Pour la Santé directement à la banque précitée, ou encore un virement de l'étude de Me WATGEN (pièce n°6).

- Concernant la dette SOC2), il appert que le recouvrement en a été assuré via une saisie sur salaire sur les émoluments du sieur Y. Là aussi, le solvens n'a pas été le sieur Y lui-même, mais son employeur (pièces n° 11 et 12 de la farde de pièces de Me WATGEN), à l'exception d'un montant de € 1.500.- directement versé par le compte du sieur Y (pièce n°13 de la farde de Me WATGEN).

En ne vérifiant donc pas que la caution Y, qui demande remboursement à Monsieur X, a acquitté les dettes de son propre patrimoine, la Cour a violé l'article 2033 du Code Civil.

L'arrêt doit être cassé et annulé de ce chef. ».

Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des éléments de preuve desquels ils ont déduit que le défendeur en cassation avait acquitté, par des fonds propres, des dettes des sociétés dans lesquelles il était associé avec le demandeur en cassation, cautionnées par eux, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur les deuxième et troisième moyens de cassation réunis :

tirés, le deuxième, de la « Violation de la loi, en l’occurrence, violation de l’article 89 de la Constitution et violation de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile, L’article 89 de la Constitution prévoit que , Et L'article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile prévoit que , Monsieur X reproche à l'arrêt du 31 mai 2018 d'être insuffisamment motivé sur plusieurs points.

Comme la Cour l'a constaté, la demande reconventionnelle de Monsieur X comprenait 14 (quatorze) chefs.

Le grief de la motivation insuffisante s'applique à plusieurs de ces chefs, constituant chacun une branche distincte du moyen de cassation.

Pour ces différents chefs de la demande, la Cour d'Appel s'est bornée, sans une analyse approfondie, à déclarer la demande reconventionnelle de Monsieur X non fondée.

Première branche du moyen relatif à SOC3) :

La Cour d'Appel retient à ce sujet :

En admettant elle-même ne pas analyser autrement cette demande, la Cour la rejette tout simplement.

En ce faisant, elle motive insuffisamment sa décision.

Les articles 89 de la Constitution et 249 du Nouveau Code de Procédure Civile l'auraient obligé, pour respecter son devoir, à motiver sa décision d'analyser sur base des nombreux éléments du dossier si oui ou non la banque a concrètement commis un abandon de portefeuille ou non.

L'article 89 de la Constitution et l'article 249, alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civil disposent que les jugements doivent être motivés.

Lesdits articles font obligation aux jugements d'être motivés sous peine de nullité.

La justification de l'obligation de motiver est évidente alors que (Jurisclasseur Procédure Fascicule 208 n°3, citation du conseiller Faye 1903, pièce 25a).

Pour satisfaire à cette obligation, il ne suffit pas que le jugement comporte pour chaque chef de dispositif des motifs qui lui sont propres, il faut aussi que les motifs énoncés puissent être considérés comme justifiant la décision.

Pour justifier la décision, la motivation doit notamment être précise.

Il est entendu par motivation précise une motivation circonstanciée, propre à l'espèce, dans laquelle le juge s'explique sur les éléments de preuve sur lesquels il s'est fondé et qui ne laisse aucun doute sur le fondement juridique de la décision (Jurisclasseur Procédure Fascicule 508 n°33, pièce 25b).

L'exigence d'une motivation précise a pour conséquence de refuser le caractère d'une motivation véritable à l'énoncé d'une simple affirmation ou à des motifs d'ordre général.

En effet en se fondant sur une simple affirmation, les Juges de la Cour d'Appel ne permettent pas de vérifier sur quels éléments de fait ils se sont basés pour en tirer cette conclusion.

Le principe de motivation doit être strictement respecté alors que ce principe est celui selon lequel les juges doivent s'expliquer sur les documents de la cause et notamment préciser les éléments de preuve dont ils ont fait usage pour déduire l'existence du fait contesté (Cassation française 2ème civile 14.02.1974, Bulletin civil II, n°63, Cassation civile 1ère,15.12.1976, Bulletin civile V, n°459).

La motivation adoptée par la Cour d'Appel ne permet pas à la Cour de Cassation de vérifier les éléments de fait dont dépend l'application de la règle de droit.

Les juges du fond ont répondu aux conclusions par une simple affirmation qui constitue une motivation imprécise et en l'espèce faussée.

Le contrôle de l’application de la loi s’effectue d’après les constatations de fait souveraines de l'arrêt, l'imprécision de ces constations met la Cour régulatrice dans l'impossibilité de remplir sa fonction.

La Cour de Cassation exerce un contrôle de motivation par lequel elle s'attache à imposer au juge du fond une motivation suffisante et cohérente.

En l'espèce, la Cour d'Appel a retenu une motivation imprécise, incomplète et fausse.

Elle a déduit la solution du litige des prétentions de l'une des parties sans fournir aucune motivation propre, ce qui équivaut à une absence de motifs (Dalloz, Procédure civile, Verbo : Pourvoi en cassation, N° 478 page 69, pièce 26 a).

Deuxième branche du moyen de cassation relatif à SOC4) :

La Cour d'Appel retient, au sujet des paiements de Monsieur X à SOC4), ce qui suit :

En ce faisant, la Cour d'Appel a insuffisamment motivé sa décision.

Monsieur X se réfère, pour les développements en droit concernant le moyen en cassation, à ses explications relatives à la première branche du moyen, qui est censé reproduit ici.

Troisième branche du moyen de cassation relatif au point LOYERS B) :

A la page 6 de son arrêt, la Cour d'Appel retient, au sujet des loyers B) :

En ce faisant, la Cour d'Appel a insuffisamment motivé sa décision.

Monsieur X se réfère, pour les développements en droit concernant le moyen en cassation, à ses explications relatives à la première branche du moyen, qui est censé reproduit ici.

Quatrième branche du moyen de cassation relatif à SOC6) :

La Cour d'Appel retient, au sujet de SOC6) :

En ce faisant, la Cour d'Appel a insuffisamment motivé sa décision.

Monsieur X se réfère, pour les développements en droit concernant le moyen en cassation, à ses explications relatives à la première branche du moyen, qui est censé reproduit ici.

Cinquième branche du moyen relatif à SOC7) :

La Cour d'Appel retient, au sujet de SOC7) :

En ce faisant, la Cour d'Appel a insuffisamment motivé sa décision.

Monsieur X se réfère, pour les développements en droit concernant le moyen en cassation, à ses explications relatives à la première branche du moyen, qui est censé reproduit ici.

Sixième branche du moyen relatif à S-L :

La Cour d'Appel retient, au sujet de S-L :

En ce faisant, la Cour d'Appel a insuffisamment motivé sa décision.

Monsieur X se réfère, pour les développements en droit concernant le moyen en cassation, à ses explications relatives à la première branche du moyen, qui est censé reproduit ici.

Septième branche du moyen relatif à P) :

La Cour d'Appel retient, au sujet de P) :

En ce faisant, la Cour d'Appel a insuffisamment motivé sa décision.

Monsieur X se réfère, pour les développements en droit concernant le moyen en cassation, à ses explications relatives à la première branche du moyen, qui est censé reproduit ici.

L'arrêt doit encourir cassation de ce chef. ».

et le troisième, de la « violation de l’article 249 du NCPC L’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile prévoit que .

Est sanctionné sous le visa de cet article le défaut de motivation en fait d’une décision.

Monsieur X subdivise ce moyen en deux branches :

Première branche du moyen :

Concernant la demande de Monsieur X en rapport avec la dette SOC10), la Cour d'Appel retient, sur ce point (point 5 page 8 de l'arrêt), ce qui suit :

En déboutant Monsieur X de ce point de sa demande au motif que Monsieur X n'établirait pas son paiement, la Cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision en fait et a négligé certaines constatations de fait qui étaient nécessaires pour statuer sur le droit.

Elle a ainsi fait abstraction - De l'absence de contestation de Monsieur Y de la convention conclue entre X, Y et SOC10) - De l'absence de preuve quelconque de Monsieur Y d'avoir payé tout ou partie de la dette de SOC10), - De l'annotation sur la convention d'un paiement, la preuve du paiement par X était à suffisance établie.

Il est de doctrine et de jurisprudence que l'insuffisance de motifs constitue un défaut de base légale.

Les décisions de la Cour de cassation française considèrent le défaut de base légale comme un cas d'ouverture à cassation distinct du défaut de motivation.

En l'occurrence le Juge a omis de procéder à une appréciation d'ensemble des éléments de preuve ou des faits constatés.

Ainsi, la doctrine et la jurisprudence retiennent que (La Cour de Cassation en matière civile, Dalloz, n°78.113 et jurisprudences y citées, pièce 24 d).

En l'occurrence les premiers juges ont pris en compte seulement une partie des éléments de preuve et les faits leur soumis en négligeant totalement les autres éléments, Qu'est sanctionné comme défaut de base légale .

La cassation prononcée sur ce fondement s'analyse en quelques sortes en (Encyclopédie DALLOZ, Procédure, Verbo :

Pourvoi en cassation n° 526 et suivants et plus particulièrement au n° 530 qui cite un arrêt de la Cour de cassation du 22 décembre 1922, Cassation Civile 22 décembre 1922, S.1924.1.235, pièce 26b).

Le demandeur en cassation se réfère encore à un arrêt de la Cour de Cassation luxembourgeoise (n° 18/2019 du 24.01.2019, n° 3992 du registre) lequel retient que Ainsi, le fait pour la Cour d'appel de ne pas tenir compte d'une pièce - dans le cas précité d'un document contractuel -

l'arrêt d'appel ne permettait pas à la Cour de Cassation de contrôler le bien-fondé de la décision au regard de la pièce invoquée.

Le même raisonnement doit être appliqué en l'espèce et l'arrêt doit encourir cassation.

Deuxième branche du moyen :

La Cour d'appel retient à la page 11 de son arrêt concernant la dette SOC7) que En déboutant Monsieur X de ce point de sa demande au motif que Monsieur X ne verserait aucune pièce sur ce chef de sa demande la Cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision en fait et a négligé certaines constatations de fait qui étaient nécessaires pour statuer sur le droit.

Elle a ainsi fait abstraction - du fait que Monsieur Y ne contestait à aucun endroit de ses conclusions le paiement par Monsieur X de la dette SOC7) - du fait que Monsieur X avait versé, contrairement à l'affirmation de la Cour à titre de pièce 5c de sa première farde de pièces (repris comme pièce XV, 5 c à l'appui du pourvoi) un relevé détaillé des dettes payés par lui, par voie de saisie-

arrêt, avec les pièces à l'appui émanant de la Trésorerie de l'Etat versant la pension de Monsieur X et détaillant les retenues faites. Parmi ces dettes se trouvait clairement les pièces relatives au paiement de la dette SOC7) - du fait qu'un jugement du 5 avril 2017 versé à titre de pièce qui concernait un autre volet du dossier (opposant Monsieur X et Monsieur C)) et dans lequel il était expressément fait référence à la dette SOC7) et au montant de celle-ci.

Par cette prise en compte incomplète des faits, la Cour a appréciée de manière incorrecte de la demande.

Le demandeur en cassation se réfère aux développement en droit et aux références à la jurisprudence exposés ci-dessus sous la première branche du 3ème moyen de cassation, qui sont censés être repris à ce endroit. ».

Les deux moyens articulent, dans chacune de leurs branches, un défaut de base légale, qui est un vice de fond, en faisant grief aux juges d’appel d’avoir insuffisamment motivé leur décision.

En tant que basés sur la violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 249 du Nouveau code de procédure civile, les moyens visent le défaut de motifs, qui est un vice de forme.

Il en suit que les deuxième et troisième moyens sont irrecevables.

Sur le quatrième moyen de cassation :

« Tiré de la violation de la loi, en l’occurrence, violation de l’article 1134 du Code Civil.

L’article 1134 du Code Civil dispose que et prohibe toute dénaturation d'une convention ou d'une pièce versée au procès, La Cour d'appel a violé cet article en retenant, pour certains des chefs de la demande, que les demandes de Monsieur X ne seraient pas prouvées, alors que toutes les pièces, pour justifier les demandes, avaient été remises à la Cour d'Appel.

Monsieur X subdivise ce moyen en plusieurs branches, la dénaturation des pièces du procès n'étant pas identiques pour chaque point.

Première branche du moyen :

Concernant la demande de Monsieur X en rapport avec la dette SOC10), la Cour d'Appel retient, sur ce point (point 5 page 8 de l'arrêt), ce qui suit :

« 5) SOC10) Y reconnaît l'existence d'un accord conclu avec SOC10) par lequel lui-même et X se sont engagés solidairement à rembourser 23.861,03.- en trois mensualités à SOC10).

Il fait cependant valoir que X reste en défaut de prouver qu’il a opéré un paiement au profit de SOC10) en exécution de cette convention.

Sur la pièce 5 à laquelle renvoie X dans l'inventaire de ses pièces avec la mention ’’5. Preuve de paiement des différentes dettes des sociétés avec relevés a.

Paiement à SOC10)’’, figure la convention avec une seule annotation manuscrite ’’Soc10) S.A. CCP 39210-22 € 13.9.4000.’’ Cette pièce n'établissant pas de paiement de la part de X, la demande est encore à rejeter sur ce point. » Il est de jurisprudence constante que (Répertoire Procédure Civile Dalloz, Verbo preuve, n°253), (pièce 31), La position de principe de la Cour de cassation belge en la matière est identique et La Cour d'appel a débouté Monsieur X de ce point de sa demande en ignorant entièrement les pièces versés sous le libellé pièce 5c de sa première farde de pièces de l'instance d'appel (repris comme pièce XV, 5 c à l'appui du pourvoi) à savoir un relevé détaillé des dettes payés par lui, par voie de saisie-arrêt avec les pièces à l'appui émanant de la Trésorerie de l'Etat versant la pension de Monsieur X et les retenues faites. La Parmi ces dettes se trouvait clairement les pièces relatives au paiement de la dette SOC7).

La Cour d'appel a encore complètement ignoré une autre pièce à savoir un jugement du 5 avril 2017 versé à titre de pièce 15 à l'appui de l'appel et de pièce XV, 16 à l'appui du présent pourvoi). Ce jugement concernait un autre volet du dossier (opposant Monsieur X et Monsieur C)) et dans lequel il était expressément fait référence à la dette SOC7).

En décidant ainsi la Cour d'appel a déformé le sens clair et précis de plusieurs pièces de la procédure.

L'arrêt doit censuré sur le fondement de la dénaturation.

Le demandeur en cassation se réfère aux développement en droit et aux références à la jurisprudence exposés ci-dessus sous la première branche du 3ème moyen de cassation, qui sont censés être repris à ce endroit. ».

Sur les deux branches réunies du moyen :

Sous le couvert du grief tiré de la dénaturation d’écrits versés à titre d’éléments de preuve, le moyen, pris en ses deux branches, ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, desdits éléments de preuve, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, ne saurait être accueilli.

Sur le cinquième moyen de cassation :

« Violation de la loi, en l’occurrence violation des articles 348 et 349 du Nouveau Code de Procédure Civile L’article 348 du NCPC prévoit que .

L'article 349 du NCPC prévoit que Monsieur X avait, tant en première instance qu'en instance d'appel, demandé, au vu des nombreuses dettes en cause, et invoquées de part et d'autre, la nomination d'un expert pour déterminer le montant effectivement redû entre parties.

En retenant, à la page 11 de l'arrêt que , la Cour d'Appel a violé les articles 348 et 349 du Nouveau Code de Procédure Civile, alors qu'il résulte de l'article 348 que le Juge peut même d'office instaurer toute mesure d'instruction et de l'article 349 que les mesures d'instructions peuvent être ordonnées en tout état de cause, La complexité des faits à la base de cette affaire et le nombre de pièces dont une partie n’était même pas à la disposition de l’appelant pour ne pas avoir été fournie par la banque rendait incontestablement nécessaire l’instauration d’une mesure d’instruction par un technicien.

La Cour d’Appel a méconnu alors que la solution du litige dépendait incontestablement d’une étude approfondie de l’ensemble des éléments de la cause par un spécialiste en la matière.

La mesure d’instruction aurait été un moyen légalement admissible pour les prouver. ».

Sous le couvert du grief tiré de la violation des articles 348 et 349 du Nouveau code de procédure civile, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de la pertinence de la mesure d’instruction sollicitée, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur les demandes en allocation d’une indemnité de procédure :

Le demandeur en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, sa demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.

Il serait inéquitable de laisser à charge du défendeur en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer une indemnité de procédure de 2.500 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

rejette le pourvoi ;

rejette la demande du demandeur en cassation en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne le demandeur en cassation à payer au défendeur en cassation une indemnité de procédure de 2.500 euros ;

le condamne aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Karim SOREL, sur ses affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Jean-Claude WIWINIUS en présence de l’avocat général Elisabeth EWERT et du greffier Viviane PROBST.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation X c/ Y (affaire n° CAS-2019-00135 du registre)

______________________

Par mémoire signifié le 27 août 2019 et déposé au greffe de la Cour le 30 août 2019, X a introduit un pourvoi en cassation contre un arrêt n°70/18 rendu contradictoirement le 31 mai 2018 par la neuvième chambre de la Cour d’appel, siégeant en matière civile, dans la cause entre les parties citées ci-dessus et inscrite sous le numéro 42621 du rôle, arrêt signifié à X le 2 juillet 2019.

Le pourvoi en cassation formé par X a été interjeté dans les délais et formes prévus par la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.

Il est partant recevable.

Le mémoire en réponse de Y, signifié le 27 septembre 2019 et déposé au greffe de la Cour en date du 3 octobre 2019, peut être pris en considération pour être conforme aux articles 15 et 16 de la loi du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.

Faits et rétroactes Par jugement n°90/2015 rendu le 27 mars 2015 par le Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, X a été condamné sur base de l’article 2033 du Code civil à payer à YF la somme de 199.841,88 euros avec les intérêts légaux à partir de la demande en justice, le 12 juin 2013, jusqu’à solde.

Y ensemble avec X avaient, en tant qu’associés de plusieurs sociétés, contracté des engagements financiers auprès de leurs fournisseurs, ces engagements étant cautionnés par les deux associés en nom personnel.

Le Tribunal a retenu qu’il résulte des pièces du dossier que Y, tenu solidairement avec X en qualité de caution envers les créanciers SOC2) S.A., SOC1) et C), a seul payé l’intégralité des dettes pour un montant total de 399.683,76 euros et qu’il peut valablement se retourner contre le cofidéjusseur X pour la part excédant celle à laquelle il était tenu, soit pour la moitié.

Le Tribunal a partant déclaré la demande de Y fondée pour le montant de 199.841,88 euros.

X a relevé appel de ce jugement et a demandé à voir débouter Y de sa demande. X a formulé en instance d’appel une demande reconventionnelle et réclame le montant de 243.330,70 euros contre Y sur base de l’article 2033 du Code civil, sinon sur base de l’article 1251, 3°, du Code civil au motif qu’il a réglé de ses propres fonds des dettes des différentes sociétés, au paiement desquelles Y aurait été tenu au même titre que lui.

Les juges d’appel confirment le jugement de première instance en ce qu’ils retiennent que la demande de Y est justifiée sur base de l’article 2033 du Code civil et prouvée par les pièces au dossier. Les juges d’appel l’ont partant déclarée fondée pour le montant réclamé de 199.841,88 euros.

Quant à la demande reconventionnelle de X, la Cour d’appel retient en premier lieu que la demande de X n’est pas fondée sur base de l’article 2033 du Code civil étant donné que X reste en défaut de préciser les cautionnements visés et ne verse aucune pièce afférente.

Concernant les bases légales invoquées à titre subsidiaire, la Cour d’appel a analysé les quatorze postes de la demande de X.

Concernant les demandes relatives aux dettes des sociétés SOC3), SOC4), de B), SOC6), SOC10), SOC7), des époux S-L, SOC12), SOC13), de P), SOC5), de la dette relative à un rachat de matériel de crèche, SOC11) et de la dette relative à SOC7), les juges d’appel constatent que X ne rapporte pas la preuve en quoi Y serait tenu de supporter la moitié de ces dettes et ne verse par ailleurs pas de preuve de paiement de ces dettes respectivement de preuve qu’il a remboursé les dettes de ses propres fonds.

Au vu des contestations de Y, et notamment au vu du fait que si bien même il serait prouvé que X a payé les dettes au moyen de deniers propres, il ne serait toujours pas prouvé que X ait payé au-delà de sa part virile et qu’il pourrait prétendre à un quelconque remboursement de la part de Y, les juges d’appel retiennent que la demande de X est non fondée et qu’il n’y a pas lieu d’instaurer une expertise.

Le pourvoi en cassation est dirigé par X contre cet arrêt.

Quant au premier moyen de cassation :

Le premier moyen est tiré de la « violation de la loi, en l’espèce, violation de l’article 2033 du Code civil » en ce que les juges d’appel ont retenu « simplement que les pièces versées par Monsieur Y établiraient les paiements par lui effectués sans tenir compte des arguments exposés par X » à savoir que Y n’a pas payé les dettes de ses fonds propres.

Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir vérifié « que la caution Y, qui demande remboursement à Monsieur X, a acquitté les dettes de son propre patrimoine ».

Sous le couvert du grief de la violation de l’article 2033 du Code civil, le demandeur en cassation met en cause l’appréciation par les juges d’appel des éléments de preuve versés au dossier. Cette appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le premier moyen de cassation est irrecevable.

Quant au deuxième moyen de cassation :

Le deuxième moyen de cassation est tiré « de la violation de la loi, en l’occurrence, violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de procédure civile » en ce que l’arrêt 70/18 du 31 mai 2018 est insuffisamment motivé sur plusieurs points de la demande reconventionnelle de X.

Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel, sous la première à la septième branche de son moyen, d’avoir, par une motivation insuffisante, rejeté sa demande relative à SOC3), SOC4), à B), SOC6), SOC7), aux époux S-L, et à P).

Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de s’être fondés sur une simple affirmation sans donner de motivation précise pour rejeter la demande reconventionnelle de X.

Les juges d’appel auraient déduit la solution du litige des prétentions de l’une des parties sans fournir aucune motivation propre, ce qui équivaudrait à une absence de motifs.

Le demandeur en cassation argumente que « la motivation adoptée par la Cour d’Appel ne permet pas à la Cour de Cassation de vérifier les éléments de fait dont dépend l’application de la règle de droit.

Les juges du fond ont répondu aux conclusions par une simple affirmation qui constitue une motivation imprécise et en l’espèce faussée. Le contrôle de l’application de la loi s’effectue d’après les constatations de fait souveraines de l’arrêt, l’imprécision de ces constatations met la Cour régulatrice dans l’impossibilité de remplir sa fonction. La Cour de Cassation exerce un contrôle de motivation par lequel elle s’attache à imposer au juge du fond une motivation suffisante et cohérente. En l’espèce, la Cour d’appel a retenu une motivation imprécise, incomplète et fausse. ».

Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou un élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.

Le deuxième moyen, subdivisé en sept branches, vise, d’une part, en tant que tiré de la violation des articles 89 de la Constitution et 249, alinéa 1, du Nouveau code de procédure civile, le défaut de motifs, qui constitue un vice de forme et, d’autre part, en ce qu’il articule le grief d’une motivation incomplète ainsi que d’une imprécision des constatations de fait mettant la Cour régulatrice dans l’impossibilité de remplir sa fonction, le défaut de base légale constitutif d’un vice de fond, partant deux cas d’ouverture distincts1.

Le moyen est partant irrecevable.

A titre subsidiaire, et pour autant que Votre Cour arrive à la conclusion que le moyen en ce qu’il est fondé sur l’article 89 de la Constitution et l’article 249 alinéa 1er du Nouveau code de procédure civile ne vise que le seul cas d’ouverture du défaut de motifs et partant qu’il est recevable, la soussignée relève que Votre Cour retient de manière constante que l’arrêt est régulier en la forme dès qu’il comporte un motif exprès ou implicite, si incomplet et si vicieux soit-il sur le point considéré.

La Cour d’appel a, en l’espèce, pour chaque poste de la demande reconventionnelle, analysé les prétentions de X et a retenu, à la lumière des pièces versées par le demandeur à l’appui de sa demande reconventionnelle qu’il restait non seulement en défaut de prouver la raison pour laquelle Y serait tenu à la moitié des dettes dont X faisait état mais qu’il restait également en défaut de prouver la réalité des paiements effectués et réclamés.

Les juges du fond ont partant motivé à suffisance leur décision de rejeter la demande de X en se basant sur les éléments de preuve contradictoirement débattus et souverainement appréciés.

Le deuxième moyen de cassation, comprenant sept branches, pour autant qu’il se base sur la violation des articles 89 de la Constitution et 249 du Nouveau Code de procédure civile, est partant à rejeter comme non fondé.

Quant au troisième moyen de cassation :

1 Cass., arrêt du 4 avril 2019, n° 66/2019, numéro CAS-2018-00027 du registre Le troisième moyen de cassation est tiré « de la violation de l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de procédure civile » et vise le défaut de motivation en fait en ce que la Cour d’appel a insuffisamment motivé en fait sa décision relative à deux points de la demande reconventionnelle de X.

Le troisième moyen de cassation est divisé en deux branches visant les deux points de la demande reconventionnelle concernée à savoir la demande relative à la dette SOC10) et celle relative à la dette SOC7).

Le demandeur en cassation reproche, sous les deux branches, à la Cour d’appel d’avoir « insuffisamment motivé sa décision en fait » et d’avoir « négligé certaines constations de fait qui étaient nécessaires pour statuer sur le droit ». Il développe que l’insuffisance de motifs constitue un défaut de base légale.

L’article 249 du Nouveau code de procédure civile cité au moyen ne vise uniquement le défaut de motivation au sens de l’absence totale de motivation.

Tout comme pour le deuxième moyen de cassation, le demandeur en cassation fait un amalgame entre le défaut de motif prévu à l’article 249 du Nouveau code de procédure civile et le défaut de base légale.

Le défaut de base légale qui est un moyen de fond ne peut être invoqué sous le visa de l’article 249 du Nouveau code de procédure civile qui sanctionne le vice de forme de l’absence de motifs alors que le défaut de base légale est un vice de fond non concerné par le texte de loi énoncé2.

Le troisième moyen de cassation est partant également à déclarer irrecevable.

Quant au quatrième moyen de cassation :

Le quatrième moyen de cassation est tiré « de la violation de la loi, en l’occurrence, violation de l’article 1134 du Code civil » en ce que les juges d’appel auraient pour certains chefs de la demande reconventionnelle de X dénaturé les pièces versées au procès.

Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel d’avoir violé l’article 1134 du Code civil en retenant que les demandes de X ne seraient pas prouvées alors que toutes les pièces pour justifier les demandes avaient été remises à la Cour d’appel.

2 Cass., 19 mai 2011, n° 33 / 11, numéro 2867 du registre Le demandeur en cassation divise son moyen en deux branches étant donné que la dénaturation de pièces différentes est invoquée pour la demande se rapportant à la dette SOC10) et celle relative à la dette SOC7).

Le moyen de cassation pris en ses deux branches vise cependant un seul et même cas d’ouverture à savoir la dénaturation des pièces versées au dossier.

Or, la lecture et l'interprétation des documents versés par les parties à l'appui de leurs prétentions ou contestations relèvent du pouvoir souverain du juge du fond et échappent au contrôle de la Cour de Cassation3.

Sous le couvert du grief de la dénaturation des pièces versées à titre d’éléments de preuve, le moyen, pris en ses deux branches, ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, desdits éléments de preuve, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation4.

Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, ne saurait être accueilli.

Quant au cinquième moyen de cassation :

Le cinquième moyen de cassation est tiré de la « violation de la loi, en l’occurrence violation des articles 348 et 349 du Nouveau Code de procédure civile » en ce que la Cour d’appel n’a pas fait droit à la demande de X à voir instituer une expertise pour déterminer le montant effectivement redû entre parties.

Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel de ne pas avoir instauré d’expertise alors que « la complexité des faits à la base de cette affaire et le nombre de pièces dont une partie n’était même pas à la disposition de l’appelant pour ne pas avoir été fournie par la banque rendait incontestablement nécessaire l’instauration d’une mesure d’instruction par un technicien. ».

Le moyen manque en fait étant donné que les articles 348 et 349 du Nouveau code de procédure civile prévoient pour le juge une faculté d’ordonner une mesure d’instruction, même d’office, et non pas une obligation telle que le demandeur en cassation semble l’affirmer.

A cela s’ajoute que sous le couvert du grief tiré de la violation des articles 348 et 349 du Nouveau code de procédure civile, le demandeur en cassation ne tend qu’à remettre en cause la libre appréciation, par les juges du fond, de la pertinence d’une mesure d’instruction ainsi que de la valeur des éléments de preuve déjà collectés, qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

3 Cass., 2 juin 2016, n° 55 / 16, numéro 3660 du registre 4 Cass., 31 janvier 2019, n° 23 / 2019, numéro 4085 du registre Le cinquième moyen de cassation est partant à rejeter.

Conclusion - Le pourvoi est recevable, mais il est à rejeter.

Pour le Procureur général d’Etat, l’avocat général, Elisabeth EWERT 21



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 08/10/2020
Date de l'import : 13/10/2020

Numérotation
Numéro d'arrêt : 119/20
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2020-10-08;119.20 ?

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