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08/03/2018 | LUXEMBOURG | N°19/18

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 08 mars 2018, 19/18


N° 19 / 2018 du 08.03.2018.

Numéro 3918 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, huit mars deux mille dix-huit.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Romain LUDOVICY, conseiller à la Cour de cassation, Nico EDON, conseiller à la Cour de cassation, Carlo HEYARD, conseiller à la Cour de cassation, Yola SCHMIT, conseiller à la Cour d’appel, Elisabeth EWERT, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

A), demeurant à (…), demandeur en cassation, comparant

par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1) Maître ...

N° 19 / 2018 du 08.03.2018.

Numéro 3918 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, huit mars deux mille dix-huit.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Romain LUDOVICY, conseiller à la Cour de cassation, Nico EDON, conseiller à la Cour de cassation, Carlo HEYARD, conseiller à la Cour de cassation, Yola SCHMIT, conseiller à la Cour d’appel, Elisabeth EWERT, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

A), demeurant à (…), demandeur en cassation, comparant par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1) Maître B), avocat à la Cour, demeurant à (…), agissant en sa qualité de curateur de la faillite de la société à responsabilité limitée SOC1), établie et ayant son siège social à (…), déclarée en faillite par jugement du tribunal d’arrondissement de Luxembourg du (…), 2) C), demeurant à (…), pris en sa qualité de gérant administratif de la société à responsabilité limitée SOC1), défendeurs en cassation.

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LA COUR DE CASSATION :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 18 février 2015 sous le numéro 39913 du rôle par la Cour d’appel, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 27 avril 2017 par A) à Maître B) et à C), déposé au greffe de la Cour le 28 avril 2017 ;

Sur le rapport du conseiller Carlo HEYARD et sur les conclusions de l’avocat général Elisabeth EWERT ;

Sur les faits :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière commerciale, avait déclaré fondée, pour un certain montant, la demande en comblement du passif dirigée par Maître B), agissant en sa qualité de curateur de la faillite de la société à responsabilité limitée SOC1), contre C) et A) ; que la Cour d’appel a confirmé le jugement entrepris ;

Sur les premier et deuxième moyens de cassation réunis :

tirés, le premier, « de la dénaturation de la portée d'une clause claire A. Partie critiquée de la décision :

Attendu que la Cour d'appel retient dans son arrêt, pages 3-4 :

rapportait pas la preuve de l'existence d'une procédure pénale toujours pendante, autre que celle relative à la banqueroute simple d'ores et déjà tranchée par le tribunal correctionnel.

En instance d'appel, A) a soutenu rapporter la preuve de l'existence d'une procédure pénale, autre que celle relative à l'affaire de banqueroute simple, portant le numéro de notice 26772/11/CD.

La Cour constate qu'à l'appui de ce moyen, A) a versé un jugement du tribunal d'arrondissement, siégeant en matière commerciale, daté du 12 juillet 2013, faisant référence à la notice 26772/11/CD, par lequel le tribunal l'a condamné du chef de destruction volontaire de biens mobiliers ayant appartenu à C). » B. Ce en quoi la décision encourt le reproche allégué. :

Mais attendu que la décision versée en instance d'appel à l'appui de sa demande en surséance à statuer n'est pas un jugement du tribunal d'arrondissement siégeant en matière commerciale, mais un jugement du tribunal d'arrondissement siégeant en matière correctionnelle.

Qu’en qualifiant de commercial un jugement correctionnel, la Cour d’appel n’a pas interprété le sens de la décision versée, mais en a dénaturé la teneur, le sens et la portée.

Que l’arrêt entrepris encourt dès lors la cassation. » ;

et le deuxième, « de la dénaturation de la portée d'une clause claire A. Partie critiquée de la décision :

Attendu que la Cour d'appel retient dans son arrêt, pages 4 :

sont de nature à influencer sur la situation de l'affaire introduite par le curateur contre les deux gérants de la société SOC1) en comblement du passif de la société mise en faillite.

Il se déduit de ces développements que c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas prononcé le sursis à statuer. » Que la Cour d'appel retient encore dans son arrêt, pages 4-5 :

de ce qu'il n'a pas participé à la gestion de la société, alors que la passivité, la complaisance, l'absence de contrôle et de surveillance, le fait de s'abstenir de toute vérification et de se décharger sur un autre dirigeant, non seulement ne constituent pas des excuses, mais constituent des fautes graves de gestion. » B. Ce en quoi la décision encourt le reproche allégué. :

Mais attendu qu'il résulte de l'ensemble de la farde de pièces versée par A) à la Cour d'appel (Farde numéro 2 de 6 pièces), et notamment de la pièce numéro 6 :

Jugement correctionnel numéro 2171/2013, du 12 juillet 2013, qu'il existait un conflit majeur et une opposition farouche de la part de A) vis-à-vis de C).

Qu'il en résulte qu’A) a été utilisé et dupé par C), qui s'est servi de lui et de l'autorisation de faire le commerce qu'il avait lui-même obtenu pour le compte de A).

Qu'il est établi qu’A) s'est opposé et a même mis la pression sur C) pour inciter ce dernier à respecter ses obligations en tant que gérant de société et employeur.

Que cette pression exercée par A) était telle que celui-ci s'est retrouvé inculpé du chef de tentative d'extorsion et de menaces, faits pour lesquels il a finalement été acquitté.

Que le jugement correctionnel, coulé en force de chose jugée, retient ainsi notamment, page 5 :

autorisation de faire le commerce à C) pour que celui-ci puisse exploiter la société SOC1) Dans la mesure où il lui avait mis à disposition son autorisation de commerce, il figurait comme gérant technique dans les statuts de la société alors qu'en réalité il n'était que salarié dans la prédite société. (…) » Que le jugement correctionnel retient encore, page 9 :

remette le montant de 18.000 euros, argent auquel il aurait droit suite dans la mesure (sic !) où il aurait été salarié au sein de cette société (SOC1)) et suite au non-

paiement par C) des cotisations sociales. » Que c'est donc à tort et par dénaturation du sens et de la portée du jugement correctionnel numéro 2171/2013, du 12 juillet 2013, versé en pièce à la Cour d'appel, ainsi que des autres pièces versées et notamment le procès-verbal d'audition de C) par la Police grand-ducale, en date du 7 septembre 2010 (pièce numéro 5 de la farde versée en appel), que la Cour d'appel a pu retenir d'une part que, page 4 :

sont de nature à influencer sur la situation de l'affaire introduite par le curateur contre les deux gérants de la société SOC1) en comblement du passif de la société mise en faillite.

Il se déduit de ces développements que c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas prononcé le sursis à statuer. » Et d'autre part que, pages 4-5 :

de ce qu'il n'a pas participé à la gestion de la société, alors que la passivité, la complaisance, l'absence de contrôle et de surveillance, le fait de s'abstenir de toute vérification et de se décharger sur un autre dirigeant, non seulement ne constituent pas des excuses, mais constituent des fautes graves de gestion. » Qu'en effet, la question centrale de l'affaire soumise à l'examen de la Cour d'appel était précisément de savoir si A), qui a été utilisé et dupé par C), était resté passif et avait fait preuve de complaisance lorsqu'il a pris conscience de la mauvaise gestion de la société SOC1) par ce dernier, ou si au contraire il s'est opposé et s'est manifesté, démontrant ainsi son absence de passivité.

Qu'il résulte clairement des pièces versées, au premier rang desquelles un jugement correctionnel, et non pas commercial comme retenu à tort par la Cour d'appel, que A) s'est effectivement opposé vigoureusement à C) concernant la gestion de la société SOC1) Que si les moyens mis en œuvre par A) pour manifester et exercer son opposition vis à vis de C) n'étaient certes pas les moyens les plus adéquats, il ne saurait en revanche, sauf à dénaturer la portée du jugement correctionnel ainsi que des autres pièces versées en cause d'appel, être reproché à A) d'avoir fait preuve de passivité et de complaisance.

Que dès lors, la procédure pénale avait un lien évident et étroit avec les faits de l'espèce soumis à l'examen de la Cour d'appel, qui pour refuser de les prendre en considération, a dénaturé le sens et la portée des pièces qui lui ont été versées et notamment le jugement correctionnel numéro 2171/2013, du 12 juillet 2013.

Que l'arrêt entrepris encourt dès lors la cassation. » ;

Attendu que le demandeur en cassation reproche à la Cour d’appel dans les deux moyens de cassation une dénaturation de la portée d’une clause claire ;

Attendu qu’aucun des deux moyens ne précise le texte de la loi qui aurait été violé ;

Qu’il en suit que les moyens sont irrecevables ;

Sur le troisième moyen de cassation :

tiré « de la violation de la Convention Européenne des Droits de l'Homme -

Dispositions visées de la Convention : Article 6§1- Droit à un procès équitable Attendu que la Convention Européenne des Droits de l'Homme dispose en son article 6 :

1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

Attendu que le caractère équitable de la procédure doit s'apprécier de manière globale, en prenant en compte l'ensemble de la procédure.

Attendu que dans le cadre des faits en lien avec la faillite de la société SOC1), A) a fait l'objet d'une part de poursuites pénales tel que cela ressort notamment du jugement correctionnel numéro (…), du (…), et d'autre part de poursuites commerciales tel que cela résulte de la décision ici entreprise.

Qu'il est dès lors inéquitable, et par ailleurs contraire à l'autorité de la chose jugée, qu’A) fasse d'un côté l'objet d'une condamnation pénale en raison de son opposition violente vis-à-vis de C) concernant l'activité de gérant de la société SOC1) en faillite exercée par ce dernier, et qu'il fasse l'objet d'un autre côté d'une condamnation commerciale en raison de sa supposée complaisance et passivité à l'égard du même C) concernant sa même activité de gérant de la société SOC1) en faillite.

Que dans ces circonstances, il doit être constaté qu’A) n'a pas bénéficié d'un procès équitable au sens de l'article 6§1 de la Convention.

Que l'arrêt entrepris encourt dès lors la cassation. » ;

Attendu que sous le couvert du grief de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause relatifs aux agissements de l’actuel demandeur en cassation, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation ;

Qu’il en suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation aux dépens de l’instance en cassation.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Jean-Claude WIWINIUS, en présence de Madame Elisabeth EWERT, avocat général, et de Madame Viviane PROBST, greffier à la Cour.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19/18
Date de la décision : 08/03/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2019
Fonds documentaire ?: Legilux
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2018-03-08;19.18 ?

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