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10/03/2016 | LUXEMBOURG | N°28/16

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 10 mars 2016, 28/16


N° 28 / 16.

du 10.3.2016.

Numéro 3594 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, dix mars deux mille seize.

Composition:

Georges SANTER, président de la Cour, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Jean-Claude WIWINIUS, conseiller à la Cour de cassation, Valérie HOFFMANN, conseiller à la Cour d’appel, Carole KERSCHEN, conseiller à la Cour d’appel, Serge WAGNER, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

1) A), (…), demeurant à (…), 2) B), (…),

demeurant à (…), demandeurs en cassation, comparant par Maître Luc SCHANEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel ...

N° 28 / 16.

du 10.3.2016.

Numéro 3594 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, dix mars deux mille seize.

Composition:

Georges SANTER, président de la Cour, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Jean-Claude WIWINIUS, conseiller à la Cour de cassation, Valérie HOFFMANN, conseiller à la Cour d’appel, Carole KERSCHEN, conseiller à la Cour d’appel, Serge WAGNER, avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

1) A), (…), demeurant à (…), 2) B), (…), demeurant à (…), demandeurs en cassation, comparant par Maître Luc SCHANEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1) la société anonyme SOC1), en liquidation judiciaire, établie et ayant son siège social à (…), inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro (…), déclarée en état de liquidation en date du 12 décembre 2008, représentée par son liquidateur, Maître Yvette Hamilius, avocat à la Cour, demeurant à L-2229 Luxembourg, 2, rue du Nord, 2) Maître Yvette HAMILIUS, avocat à la Cour, demeurant à L-2229 Luxembourg, 2, rue du Nord, en sa qualité de liquidateur de la société anonyme SOC1), en liquidation, défenderesses en cassation, comparant par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH, inscrite au Barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1468 Luxembourg, 14, rue Erasme, immatriculée au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B 186371, représentée aux fins de la présente instance par Maître Philippe DUPONT, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu.

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LA COUR DE CASSATION :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 1er avril 2015 sous le numéro 39944 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 10 juin 2015 par A) et par B) à la société anonyme SOC1) en liquidation judiciaire et à Maître Yvette HAMILIUS, déposé au greffe de la Cour le 12 juin 2015 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 4 août 2015 par la société anonyme SOC1) en liquidation judiciaire et par Maître Yvette HAMILIUS à A) et à B), déposé au greffe de la Cour le 6 août 2015 ;

Sur le rapport du conseiller Irène FOLSCHEID et sur les conclusions de l’avocat général Mylène REGENWETTER ;

Sur les faits :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le tribunal d'arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière commerciale, avait rejeté la déclaration de créance déposée par A) et B) dans le cadre de la procédure de liquidation de la société anonyme SOC1) et avait dit fondée la demande reconventionnelle du liquidateur de la société SOC1) en paiement du solde de la dette des consorts BOSSON envers la banque ; que la Cour d'appel a confirmé le jugement ;

Sur le premier moyen de cassation :

tiré « de la violation de l'article 89 de la Constitution et de l'article 249, alinéa 1er du Nouveau code de procédure civile ;

En ce que la Cour d'appel conclut page 9 de l'arrêt dont cassation à l'absence d'impartialité des juges de première instance au motif que commissaire ne joue qu'un rôle de surveillant (voir pour un cas analogue d'un juge commissaire CEDH du 6 juin 2000, MOREL/France) » ;

Alors que le constat qu'un juge commissaire ne jouerait qu'un rôle de surveillant n'est pas une motivation qui démontre l'absence d'une possibilité d'impartialité, ceci appuyé par un renvoi fait par la Cour à une jurisprudence MOREL / France, annoncée comme étant le cas analogue, ce qui n'en est rien, car si la jurisprudence MOREL/France traite de l'absence d'impartialité d'un juge commissaire dans une affaire de liquidation, le juge commissaire n'avait, dans la phase préparatoire propre à la procédure française, posé que des actes d'enquête administrative sans jugement en droit ;

Qu'en ne démontrant pas en quoi il n'y aurait pas risque d'impartialité dans le fait de refuser une créance et de siéger ensuite comme juge dans le cadre du débat sur les contestations, la Cour ne motive pas sa décision alors qu'elle n'aborde même pas le sujet » ;

Attendu que le défaut de motifs constitue un vice de forme ; qu'une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu'elle comporte un motif exprès ou implicite, fût-il incomplet ou vicié, sur le point considéré ;

Attendu qu'il ressort de l'énoncé du moyen que l'arrêt attaqué est motivé sur le point critiqué ;

Que le moyen n'est dès lors pas fondé ;

Sur le deuxième moyen de cassation :

tiré « de la violation de l'article 6, paragraphe 1 de la CEDH (Cour Européenne des Droits de l'Homme) » ;

tiré « de la violation de l'article 521 du Nouveau code de procédure civile et de l'article 64 de la loi modifiée du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire ;

En ce que les juges d'appel ont confirmé une décision de première instance et concluent que ;

Au motif que de la liquidation appartient au liquidateur et le juge commissaire ne joue qu'un rôle de surveillant », tout en se référant à une décision de la Cour Européenne des Droits de l'Homme du 6 juin 2000 MOREL c/ FRANCE concluant au rejet du moyen, sur ce seul constat, entraînant la conclusion qu'il ne pourrait y avoir impartialité puisque le juge commissaire n'avait pas de rôle ;

Alors que la définition de surveiller (terme utilisée par la Cour d'appel dans son arrêt) renvoie à la notion de contrôler et n'est pas sans effet ;

Le juge commissaire donne son visa lors de la vérification de créance, se livre à un débat et à une discussion avec le liquidateur qui lui fait jouer un rôle d'analyse de fond quant à l'issue du sort de la créance, qui implique au moment du débat sur les contestations une connaissance du dossier qui peut soulever un doute sur l'impartialité objective du juge, Et alors que la Cour fait référence à un arrêt du 06/06/2000 MOREL c/ FRANCE pour appuyer son argumentation alors que pour conclure à l'absence de violation de l'article 6 de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, la CJDH se basait sur de tous autres faits dans cet arrêt, faits relatifs à l'existence de rapports écrits du juge commissaire, faits sans aucun lien avec le rôle du juge commissaire dans la procédure luxembourgeoise lors de la vérification de créance » ;

Attendu que la connaissance approfondie du dossier par le juge n'implique pas un préjugé empêchant de le considérer comme impartial au moment du jugement ;

Attendu que l'affirmation contenue dans le dernier alinéa du moyen procède d'une lecture incomplète de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, qui retient également le rôle de surveillant du juge commissaire ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen de cassation :

tiré « de la violation des articles 6-1, 28 et 34 du Règlement CE n°44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 relatifs à la surséance nécessaire pour assurer une bonne administration de la justice et plus particulièrement préserver les intérêts de la défense lorsqu'une plainte pénale a été déposée ;

En ce que la Cour a conclu que contesté toute influence de l'affaire pénale pendante en France sur le sort de l'affaire dont la Cour est saisie, puisque la demande de surséance est motivée essentiellement par rapport à la demande en nullité des contrats » ;

En ce que cette question a été tranchée définitivement par le jugement du 17 novembre 2000 et ne peut plus être revue par la Cour, quel que soit la décision des juges français ;

En ce que confiance soient établies en France à charge de la société SOC1), celle-ci est sans influence sur la question de la régularité de la dénonciation du prêt dont la Cour est saisie » ;

En ce que les victimes pourraient réclamer des dommages et intérêts du fait de leur préjudice devant les juridictions françaises ;

Alors qu'il est faux de prétendre que le sursis est motivé essentiellement par rapport à la demande en nullité, au motif que la question de la nullité du contrat n'a pas été tranchée par le jugement du 17 novembre 2000, puisque ce même jugement a refusé d'examiner le moyen, donc par conséquent, a refusé de trancher cette question ;

Alors que une décision au pénal à intervenir en France aura des conséquences inévitables sur la procédure en cours devant le tribunal à Luxembourg et sur le contrat dont le remboursement est réclamé ;

Alors que si un prêt est conclu sur base d'une infraction d'escroquerie ou d'abus de confiance, sa régularité est bien évidemment remise en cause, sa dénonciation et son remboursement aussi ;

Et alors que même si les demandeurs en cassation auront la possibilité en cas de nullité du contrat de prêt du fait d'un abus de confiance et d'une escroquerie de demander des dommages et intérêts, il est de toute évidence contradictoire que sur base de ce même prêt, qui risque d'être remis en cause, leur droit soit violé et un préjudice leur soit causé, en cas de nullité des contrats de prêt et de gage » ;

Attendu que le règlement CE n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, en ce qu’il concerne la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale et en ce qu’il exclut expressément de son champ d’application les faillites, concordats et autres procédures analogues, est étranger au litige;

Que le moyen est dès lors irrecevable ;

Sur le quatrième moyen de cassation :

tiré « de la violation de la loi in specie de l’article 1351 du Code civil et de l’article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ;

En ce que pour refuser de retenir l'argument de surséance, la Cour a estimé que le jugement du 17 novembre 2010 avait statué définitivement sur la nullité du contrat de prêt ;

Alors que le jugement de première instance refuse de débattre du moyen et de ce fait, une question non débattue ne peut être considérée comme tranchée, il en aurait été tout autre si le tribunal avait accepté le moyen de défense au fond qui consistait à dire que le contrat était nul, avait expliqué pourquoi elle refusait ce moyen et pourquoi il écartait cette défense au fond ;

Et alors que l'article 1351 du Code civil obligeait la Cour d'appel de n'accorder l'autorité de la chose jugée qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement » ;

Attendu que la Cour d'appel n'a pas dit que le jugement du 17 novembre 2010 a autorité de chose jugée sur la question de la nullité du contrat de prêt, retenant au contraire que le jugement n'a pas tranché cette demande dans son dispositif et qu'il n'a donc pas sur ce point autorité de chose jugée ; que la Cour d’appel a toutefois constaté que dans la motivation du jugement les juges de première instance ont retenu que cette demande tend à voir prononcer une condamnation au paiement d'une somme d'argent contre la banque, ce qui est interdit par l'article 452 du Code de commerce, qu'ils ont ajouté qu'une telle demande n'a pas été formulée dans la déclaration de créance déposée par les consorts A)-B), qui sont forclos à présenter une déclaration de créance additionnelle;

Attendu que la Cour d'appel a dit que, par rapport à cette demande, les motifs du jugement du 17 novembre 2010 renferment une appréciation définitive et que, faute par les appelants d'avoir dirigé leur appel également contre ce jugement, la décision des juges de première instance sur ce point ne peut plus être remise en cause ;

Que le moyen manque dès lors en fait ;

Sur la demande en allocation d'une indemnité de procédure :

Attendu que la demande des parties défenderesses en cassation en obtention d’une indemnité de procédure est à rejeter, la condition d’iniquité requise par l’article 240 du Nouveau code de procédure civile n’étant pas remplie en l’espèce ;

Par ces motifs :

rejette le pourvoi ;

rejette la demande en obtention d’une indemnité de procédure ;

condamne les demandeurs en cassation aux dépens de l'instance en cassation.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Georges SANTER, en présence de Monsieur Serge WAGNER, avocat général, et de Madame Viviane PROBST, greffier à la Cour.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 28/16
Date de la décision : 10/03/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2019
Fonds documentaire ?: Legilux
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2016-03-10;28.16 ?

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