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11/04/2013 | LUXEMBOURG | N°24/13

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 11 avril 2013, 24/13


N° 24 / 13.

du 11.4.2013.

Numéro 3151 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, onze avril deux mille treize.

Composition:

Georges SANTER, président de la Cour, Edmée CONZEMIUS, conseiller à la Cour de cassation, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Monique BETZ, conseiller à la Cour de cassation, Monique FELTZ, conseiller à la Cour d’appel, Marie-Jeanne KAPPWEILER, avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.

Entre:

X.), demeurant à L-(…),(…), (…),

demandeur en cassation, comparant par Maître Alain GROSS, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu...

N° 24 / 13.

du 11.4.2013.

Numéro 3151 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, onze avril deux mille treize.

Composition:

Georges SANTER, président de la Cour, Edmée CONZEMIUS, conseiller à la Cour de cassation, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Monique BETZ, conseiller à la Cour de cassation, Monique FELTZ, conseiller à la Cour d’appel, Marie-Jeanne KAPPWEILER, avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.

Entre:

X.), demeurant à L-(…),(…), (…), demandeur en cassation, comparant par Maître Alain GROSS, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1)la société anonyme SOC1.), société liquidée depuis le 26 mars 1999, ayant eu son dernier siège social à L-(…), (…),(…), représentée par son liquidateur, Monsieur (…), commerçant, demeurant à L-(…), (…), (…), inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B (…), défenderesse en cassation, 2)Y.), demeurant à L-(…), (…),(…), défendeur en cassation, comparant par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, 3)la société à responsabilité limitée SOC2.), établie et ayant son siège social à L-

(…), (…), (…), représentée par son gérant actuellement en fonction, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B (…), défenderesse en cassation, comparant par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, 4)Z.), demeurant à L-(…), (…), (…), défendeur en cassation, 5)la société à responsabilité limitée SOC3.), établie à L-(…), (…), (…), représentée par son gérant actuellement en fonction, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B (…), défenderesse en cassation, comparant par Maître Charles KAUFHOLD, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.

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LA COUR DE CASSATION :

Sur le rapport du conseiller Irène FOLSCHEID et sur les conclusions du premier avocat général Jeannot NIES ;

Vu l’arrêt attaqué rendu le 12 janvier 2012 sous les numéros 35306, 35354 et 35818 du rôle par la Cour d’appel, neuvième chambre, siégeant en matière civile ;

Vu le mémoire en cassation signifié les 22 et 23 mai 2012 par X.) à Y.), à la société à responsabilité limitée SOC2.), à Z.), à la société à responsabilité limitée SOC3.) et à la société anonyme SOC1.), déposé au greffe de la Cour le 14 juin 2012 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 16 juillet 2012 par la société à responsabilité limitée SOC2.) à X.), Y.), à Z.) et à la société à responsabilité limitée SOC3.), déposé au greffe de la Cour le 20 juillet 2012 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 18 juillet 2012 par Y.) à X.), à la société anonyme SOC1.), à la société à responsabilité limitée SOC2.), à Z.) et à la société à responsabilité limitée SOC3.), déposé au greffe de la Cour le 20 juillet 2012 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 18 juillet 2012 par la société à responsabilité limitée SOC3.) à X.), à la société à responsabilité limitée SOC2.), à Y.) et à Z.), déposé au greffe de la Cour le 20 juillet 2012 ;

Sur les faits:

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le tribunal d'arrondissement de Luxembourg, saisi par Y.) d'une demande en dommages et intérêts pour le préjudice par lui subi du fait de l'implantation erronée de son immeuble, ayant eu pour conséquence de rendre son garage inaccessible en raison d'une pente trop raide, avait condamné la société anonyme SOC1.), la société à responsabilité limitée SOC2.), la société à responsabilité limitée SOC3.) et X.) in solidum à payer à Y.) un certain montant; que sur appel de X.) et des sociétés SOC2.) et SOC1.), la Cour d'appel a dit irrecevable l'appel de la société SOC1.), a confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé une condamnation in solidum à l'égard de X.) et des sociétés SOC3.) et SOC2.) et a ordonné une expertise aux fins de chiffrer le préjudice accru à X.);

Sur les premier et deuxième moyens de cassation réunis:

tirés, le premier, « de la violation des articles 1134 et 1126 du Code civil en ce que la Cour d’appel a déclaré que l’architecte X.) est responsable du préjudice invoqué par le sieur Y.);

Attendu que les juges d’appel ont motivé cette responsabilité par le fait que le sieur X.) aurait dû prévoir, au moment de l’élaboration des plans d’architecte, que la commune de (…) allait, après achèvement de la construction, s’accaparer une partie du terrain du sieur Y.) pour y aménager un trottoir ;

Que l’article 1134 du Code civil prévoit que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et qu’elles doivent être exécutées de bonne foi alors que l’article 1126 du même Code précise que tout contrat a pour objet une chose qu’une partie s’oblige à faire ;

Que le sieur X.) a exécuté la convention entre parties, consistant dans la seule élaboration d’un plan d’architecte pour le sieur Y.) et l’obtention d’une autorisation de construire de la part de la commune de (…) ;

Qu’en décidant que le sieur X.) est responsable contractuellement pour des faits dont l’exécution par le sieur X.) n’a jamais été convenue entre parties, respectivement pour des faits intervenus postérieurement et extérieurement à l’accomplissement de la mission telle que convenue conventionnellement entre parties, les juges d’appel ont violé les articles 1134 et 1126 du Code civil » ;

le deuxième, « de la violation des articles 1108 et 1142 du Code civil en ce que la Cour d’appel a déclaré le sieur X.) responsable du préjudice invoqué par le sieur Y.);

Attendu que les juges d’appel ont basé cette condamnation sur la responsabilité contractuelle alors que les faits reprochés à l’architecte par les magistrats de la Cour d’appel, à savoir l’implantation future du trottoir sur le terrain du sieur Y.), n’étaient pas compris dans la mission confiée au sieur X.), consistant dans l’élaboration des plans de construction et l’obtention de l’autorisation de bâtir ;

Que l’article 1108 du Code civil impose, pour la validité d’une convention, un consentement quant à l’objet du contrat qui forme la matière de l’engagement ;

Qu’en l’espèce le contrôle de l’implantation de l’immeuble du sieur Y.)sur le terrain ne faisait pas l’objet de la mission d’architecte dont était chargé le sieur X.) ;

Que tout consentement de l’architecte quant à l’exécution de cette mission fait dès lors défaut et c’est à tort que les juges d’appel l’ont condamné sur base de la responsabilité contractuelle ;

Que selon l’article 1142 du Code civil toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution de la part du débiteur ;

Qu’en l’espèce l’obligation de faire confiée au sieur X.) était celle d’élaborer les plans de la maison du sieur Y.) et d’obtenir l’autorisation de bâtir y afférente ;

Qu’alors que le contrôle de l’implantation de la maison du sieur Y.) sur son terrain ne faisait pas l’objet du contrat conclu entre parties, le sieur X.) n’avait aucune obligation d’exécuter ces travaux et ne peut être tenu à payer des dommages et intérêts en cas d’inexécution de cette obligation ;

Qu’en se basant sur la responsabilité contractuelle pour déclarer le sieur X.) responsable des obligations qu’il ne s’est jamais engagé à exécuter, la Cour d’appel a violé les articles 1108 et 1142 du Code civil » ;

Attendu que les juges du fond se sont déterminés comme suit :

« En raison de l'existence du trottoir à l'état provisoire en amont et en aval de la maison de Y.), il était évident lors de l'élaboration des plans de la maison, plans portant la date du 28 juillet 1995, qu'un trottoir sera construit devant la maison de Y.) et que ce trottoir aura un tracé et un niveau déterminés par le tracé et le niveau du trottoir provisoire en amont et en aval.

… Les architectes, même non informés par la Commune de (…) de l'installation d'un trottoir devant la maison de Y.), auraient facilement, en prenant inspection des lieux, pu se rendre compte, sur base du tracé et du niveau du trottoir provisoire en amont et en aval de la maison de Y.), que leur projet d'implantation, se basant sur des plans cadastraux théoriques et ne tenant pas compte de la spécificité des lieux, n'était pas conforme aux règles de l'art. » Que les juges du fond ont ainsi retenu la responsabilité de X.), non pas pour des faits intervenus postérieurement à l'accomplissement de sa mission et dont l'exécution n'a pas été convenue entre parties, respectivement n'était pas comprise dans sa mission, mais pour avoir dressé un projet d'implantation de l'immeuble qui n'était pas conforme aux règles de l'art ;

Qu'ils n'ont dès lors pas violé les dispositions légales invoquées aux deux moyens, qui ne sont pas fondés ;

Sur le troisième moyen de cassation:

tiré « de la violation des articles 249 du Nouveau code de procédure civile ainsi que de l’article 89 de la Constitution en ce que la Cour d’appel a déclaré :

d’une part que le fait de l’aménagement en 1997 du trottoir devant la maison de Y.), aménagement qui s’est fait sur initiative de la Commune de (…), n’est pas à l’origine de l’inaccessibilité ;

d’autre part que les architectes auraient dû élaborer des plans d’implantation tenant compte du tracé et du niveau du trottoir futur devant la maison du sieur Y.) ;

Attendu que la Cour d’appel s’est manifestement fondée sur des motifs contradictoires alors qu’en précisant qu’il aurait fallu tenir compte du tracé du niveau du trottoir futur, elle sous-entend que l’implantation du trottoir est bien à la base de l’inaccessibilité » ;

Mais attendu qu'en retenant, d'une part, que les architectes ne pouvaient raisonnablement s'attendre à ce qu'aucun trottoir ne soit aménagé devant la maison de Y.) et qu'ils auraient partant dû élaborer des plans d'implantation tenant compte du tracé et du niveau du trottoir futur devant la maison, d'autre part, que le fait de l'aménagement en 1997 du trottoir devant la maison de Y.), aménagement qui s'est fait sur l'initiative de la commune de (…), n'est pas à l'origine de l'inaccessibilité et que le fait de la commune ne saurait dès lors valoir exonération de la présomption de responsabilité pesant sur les architectes, la Cour d'appel ne s'est pas déterminée par des motifs contradictoires ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs :

rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation aux frais et dépens de l'instance en cassation, dont distraction au profit de Maître Steve HELMINGER et de François MOYSE, sur leurs affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Georges SANTER, en présence de Madame Marie-Jeanne KAPPWEILER, avocat général et de Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 24/13
Date de la décision : 11/04/2013

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2019
Fonds documentaire ?: Legilux
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2013-04-11;24.13 ?

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