N° 63 / 12.
du 13.12.2012.
Numéro 3074 du registre.
Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, treize décembre deux mille douze.
Composition:
Georges SANTER, président de la Cour, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Odette PAULY, premier conseiller à la Cour d’appel, Pierre CALMES, conseiller à la Cour d’appel, Mireille HARTMANN, conseiller à la Cour d’appel, Serge WAGNER, avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.
Entre:
X.), demeurant à L-(…), (…), (…), demandeur en cassation, comparant par Maître Joëlle CHRISTEN, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, et:
Y.), demeurant à D-(…), (…),(…), défenderesse en cassation, comparant par Maître Marie-Laure Van KAUVENBERGH, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu.
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LA COUR DE CASSATION :
Sur le rapport du président Georges SANTER et sur les conclusions de l’avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER ;
Vu l’arrêt attaqué rendu le 25 mai 2011 sous le numéro 36615 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, première chambre, siégeant en matière civile ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 25 octobre 2011 par X.) à Y.), déposé au greffe de la Cour le 28 octobre 2011 ;
Ecartant du débat le mémoire en réponse signifié le 15 décembre 2011 à la partie demanderesse en cassation à son domicile, mais déposé seulement au greffe de la Cour le 20 janvier 2012, le dépôt du mémoire n’ayant pas été fait conformément aux dispositions de l’article 16 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation ;
Ecartant en conséquence le nouveau mémoire qualifié de « mémoire en réplique » signifié le 8 mars 2012 à la partie défenderesse ;
Sur les faits :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière civile, avait prononcé le divorce aux torts réciproques de X.) et de Y.), et avait dit irrecevable la demande en dommages-
intérêts de cette dernière sur base de l’article 301 du Code civil, et non fondée sur base des articles 1389 et 1383 du Code civil ; que la Cour d’appel, par arrêt du 25 mai 2011, par réformation, a dit que le divorce est prononcé aux torts exclusifs de X.), et a condamné ce dernier à payer à Y.) un certain montant à titre de dommages-
intérêts ;
Sur le premier moyen de cassation :
tiré « de la violation des articles 53, 54, 55, 56 et 586 du Nouveau code de procédure civile en ce que l’arrêt attaqué du 25 mai 2011 a condamné X.) à payer à Y.) le montant de 2.000.- € avec les intérêts légaux du jour de la demande en justice jusqu’à solde à titre de dommages et intérêts, aux motifs notamment qu’ instance que l’appelante était enceinte lorsque l’intimé l’avait quittée et que sa grossesse avait été interrompue par une fausse couche au mois de mai », alors que les prétendues grossesse et fausse-couche n’avaient jamais été alléguées par la dame Y.) à l’appui de sa demande en obtention de dommages et intérêts sur base des articles 301, 1382 et 1383 du Code civil et que ces faits, en toute hypothèse, avaient été formellement et énergiquement contestés en première instance par conclusions du sieur X.) des 4 mars 2010 p.3 et 10 mars 2010 p. 2 et avaient été abandonnées en instance d’appel pour ne jamais y avoir été réitérés par la dame Y.), et que partant, ces faits n’étaient pas dans le débat, de telle sorte que la Cour d’appel, en fondant sa décision sur lesdits faits, a dénaturé les termes du litige en déformant les conclusions des parties et partant a violé les textes susvisés » ;
Vu l’article 56 du Nouveau code de procédure civile ;
Attendu que le juge, saisi d’une demande en dommages et intérêts, ne peut fonder sa décision sur des faits qui n’ont pas été invoqués dans les conclusions ;
Attendu que pour allouer à l’épouse le montant de 2.000.- € réclamé par elle en réparation du préjudice subi, les juges d’appel ont retenu les « circonstances de la rupture entre les parties, exposées supra », après avoir auparavant dit que « même si le mari avait pu se sentir harcelé par ces appels téléphoniques inopportuns, il faut également considérer que la séparation imposée par le mari avait été abrupte ; qu’il avait mis son épouse devant le fait accompli, l’abandonnant désemparée, prise au dépourvu et sans perspective d’un avenir professionnel au Luxembourg. Il se dégage encore des conclusions de première instance que l’appelante était enceinte lorsque l’intimé l’avait quittée et que sa grossesse avait été interrompue par une fausse couche au mois de mai » ;
Attendu que ni une grossesse ni une interruption de cette dernière par une fausse couche n’avaient été invoquées dans les conclusions d’appel à l’appui de la demande en réparation du préjudice subi ;
Que la Cour d’appel, en prenant en considération ces faits pour décider d’allouer à la défenderesse en cassation des dommages et intérêts, a violé l’article susvisé ;
D’où il suit que l’arrêt attaqué encourt la cassation ;
Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen, casse et annule l’arrêt rendu le 25 mai 2011 par la Cour d’appel, première chambre, siégeant en matière civile, sous le numéro 36615 du rôle ;
déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s’en sont suivis et remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel, autrement composée ;
condamne la défenderesse en cassation aux frais de l’instance en cassation ;
ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt sera transcrit sur le registre de la Cour d’appel et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt sera consignée en marge de la minute de l’arrêt annulé.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Georges SANTER, en présence de Monsieur Serge WAGNER, avocat général et de Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.