N° 44 / 10.
du 17.6.2010.
Numéro 2769 du registre.
Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, dix-sept juin deux mille dix.
Composition:
Marie-Paule ENGEL, présidente de la Cour, Léa MOUSEL, conseillère à la Cour de cassation, Marie-Jeanne HAVÉ, conseillère à la Cour de cassation, Etienne SCHMIT, premier conseiller à la Cour d’appel, Eliane EICHER, première conseillère à la Cour d’appel, Eliane ZIMMER, premier avocat général, Marie-Paule KURT, greffière à la Cour.
E n t r e :
X.), demeurant à B-(…), (…), demandeur en cassation, comparant par Maître Philippe-Fitzpatrick ONIMUS, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, e t :
la société anonyme SOC1.), établie et ayant son siège social à L-(…), (…), représentée par son conseil d’administration actuellement en fonction, immatriculée au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro B (…) défenderesse en cassation, comparant par Maître Myriam PIERRAT, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu.
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LA COUR DE CASSATION :
2 Sur le rapport de la présidente Marie-Paule ENGEL et sur les conclusions de l’avocat général John PETRY ;
Vu l’arrêt attaqué rendu le 11 mars 2009 par la Cour d’appel, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale, signifié le 5 août 2009 à X.) domicilié à Bruxelles ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 15 octobre 2009 par X.) à la société anonyme SOC1.) et déposé le 19 octobre 2009 au greffe de la Cour supérieure de justice ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 9 décembre 2009 par la société anonyme SOC1.) à X.) et déposé le 11 décembre 2009 au greffe de la Cour ;
Sur les faits :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que X.) avait assigné la société anonyme SOC1.) en dommages et intérêts pour gestion fautive d’un mandat discrétionnaire devant le tribunal d’arrondissement de Luxembourg ; que le tribunal a, par décision du 9 mai 2007, déclaré la demande partiellement fondée et condamné la banque à payer à X.) des dommages et intérêts, une indemnité de procédure ainsi que les frais et dépens de l’instance ; que sur appel de la banque, la Cour, réformant le jugement entrepris, débouta X.) de sa demande.
Sur le premier moyen de cassation :
« tiré de la violation de la loi par une fausse interprétation sinon .fausse application de celle-ci, et plus particulièrement de l'article 1134 alinéa 3 et 1134-1 du Code civil, en ce que la Cour Supérieure de Justice a énoncé que , en ce que la Cour Supérieure de Justice en a tiré la conclusion que alors que suivant la jurisprudence applicable en la matière, 3 d'établir l'existence des opérations effectuées par la banque et ne privait en aucun cas le client de la possibilité d'en contester l'opportunité en exerçant une action en responsabilité contre la banque (çf C.A.W./BIL, 19 juin 1991, n° 11490 du rôle) », tirée du tribunal d'arrondissement de Luxembourg, 14 juillet 2004, XVème Chambre, n° 691A/2004 n° 82946 du rôle publiée au bulletin Jeune Barreau, édition 2004, n° 124 ».
Mais attendu que les juges d’appel ont constaté que les conditions générales acceptées par X.) stipulent que la réception sans contestation des relevés de compte emporte approbation de ceux-ci et entraîne décharge de responsabilité en ce qui concerne la composition de son portefeuille, que les relevés bancaires indiquent clairement la répartition entre les différents types d’investissements et que le client ne s’est pas limité à recevoir les relevés mais qu’il les a signés ;
qu’ils n’ont donc pas déduit la décharge de responsabilité de la banque quant à l’inobservation de la répartition des investissements convenue par les parties du silence observé par le client, mais de son approbation formelle documentée par sa signature ;
que le moyen manque en fait et ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation :
« tiré de la violation de la loi par une fausse interprétation sinon fausse application de celle-ci et plus particulièrement de l'article 1135-1 alinéa 2 du Code civil, en ce que la Cour Supérieure de Justice a énoncé que ; en ce que la Cour Supérieure de Justice a également énoncé que : en ce que la Cour Supérieure de Justice a également énoncé que , alors qu'aux termes de l'article 1135-1 du Code civil :
4 (…)» alors qu'il ne ressort nullement de l'arrêt entrepris que la clause d'exonération de responsabilité de la banque stipulée dans les conditions générales ait fait l'objet d'une acceptation expresse ; par conséquent la Cour n'avait pas à imposer la démonstration et la preuve d'une telle faute lourde pour permettre à la demande en responsabilité de prospérer ».
Attendu qu’il y a lieu de redresser l’erreur matérielle du libellé du moyen ; que la Cour d’appel a dit dans l’arrêt attaqué : « faute lourde qu’on peut définir comme le comportement d’une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du débiteur à l'accomplissement de la mission contractuelle qu'il a acceptée » Attendu qu’il résulte des constatations de la Cour d’appel que X.) qui avait conclu, en première instance, à la responsabilité de la banque suite à ses agissements fautifs « ne conteste pas que la responsabilité de la banque ne saurait être engagée qu’en cas de faute lourde » ;
que le demandeur en cassation n’est pas recevable à soutenir dans l’instance en cassation un moyen, fût-il de pur droit et d’ordre public, qui est incompatible avec la position qu’il avait adoptée devant la Cour d’appel ;
que le moyen est dès lors irrecevable ;
Sur le troisième et le quatrième moyen de cassation :
le troisième moyen « tiré de la violation de la loi par une fausse interprétation sinon fausse application de celle-ci, notamment de l'article 1150 du Code civil, et plus particulièrement de la notion jurisprudentielle de faute lourde, en ce que la Cour Supérieure de Justice a énoncé que en ce que la Cour Supérieure de Justice a retenu comme définition de la faute lourde celle de l'équipollence au dol, alors que des jurisprudences récentes, certes de la Cour de cassation française, retiennent désormais des définitions plus nuancées ».
le quatrième moyen « tiré de la violation de la loi par une fausse interprétation sinon fausse application de celle-ci, notamment de l'article 1992 du Code civil, en ce que la Cour Supérieure de Justice a énoncé que 5 de X.) un investisseur averti, et le caractère accessoire de l'obligation d'information à charge de la banque, confrontée à des instructions du client dans le cadre d'un mandat de gestion discrétionnaire, empêchent cependant de considérer la non-exécution de l'obligation d'information comme faute lourde, faute lourde qu'on ne peut définir comme le comportement d'une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du débiteur à l'accomplissement de la mission contractuelle qu'il a acceptée (cf. Cass com. 28 mai 1991 : Bull. Civ. 1991, IV, n° 193) » ; en ce que la Cour Supérieure de Justice n'a pas voulu retenir la notion de faute dans le chef de la banque pour défaut d'exécution de son obligation d'information ; alors qu'un défaut d'information à l'occasion d'un changement de politique d'investissement équilibré à un investissement spéculatif, pour un client qui n'est pas un investisseur averti, est à qualifier de faute de nature à engager en tout état de cause la responsabilité de la banque ».
Attendu qu’il y a lieu de redresser dans le libellé des troisième et quatrième moyens les mêmes erreurs matérielles que celles contenues dans le deuxième moyen :
Mais attendu que les juges du fond ont souverainement apprécié que, compte tenu des circonstances de fait constatées, la non-exécution de l’obligation d’information ne constituait pas une faute lourde engageant la responsabilité de la banque ;
que leur appréciation échappe au contrôle de la Cour de cassation ;
que les moyens ne sauraient dès lors être accueillis ;
Par ces motifs :
rejette le pourvoi ;
condamne X.) aux dépens de l’instance en cassation et en ordonne la distraction au profit de Maître Myriam PIERRAT, sur ses affirmations de droit.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Madame la présidente Marie-Paule ENGEL, en présence de Madame Eliane ZIMMER, premier avocat général et de Madame Marie-
Paule KURT, greffière à la Cour.