N° 32 / 2009 pénal. du 14.7.2009 Numéro 2667 du registre.
La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, formée conformément à la loi du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire, a rendu en son audience publique extraordinaire du mardi, quatorze juillet deux mille neuf,
dans la poursuite pénale dirigée contre :
X.) , né à (…) (Nigéria), demeurant à L-(…), (…), actuellement détenu au Centre pénitentiaire de Luxembourg,
demandeur en cassation,
comparant par Maître Patrice MBONYUMUTWA, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu,
en présence du Ministère Public
l’arrêt qui suit :
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LA COUR DE CASSATION :
Ouï la présidente Marie-Paule ENGEL en son rapport et sur les conclusions de l’avocat général Christiane BISENIUS ;
Vu l’arrêt attaqué rendu le 15 octobre 2008 sous le numéro 412/08 X par la Cour d’appel, dixième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;
Vu la déclaration du recours en cassation au pénal faite le 14 novembre 2008 par Maître Patrice MBONYUMUTWA au nom et pour compte de X.) , suivie d’un mémoire en cassation déposé le 15 décembre 2008 au greffe de la Cour supérieure de justice ;
Sur les faits :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait condamné X.) du chef d’infractions aux articles 8.1.a et 8.1.b de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie à une peine d’emprisonnement avec sursis partiel et à une amende ; que sur appel du prévenu la Cour d’appel, siégeant en matière correctionnelle, modifia le libellé de l’infraction à l’article 8.1.a de la loi modifiée du 19 février 1973, retenue par les juges de première instance et confirma pour le surplus le jugement entrepris.
Sur le premier moyen de cassation :
tiré « de la violation de l'article 6 paragraphes 3.a. et 3.b. de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH),
En ce que la Cour d'appel a modifié de manière obscure et a posteriori le libellé de l'infraction retenue par les juges de première instance alors que, d'une part, l'article 6.3.a. de la CEDH dispose que << Tout accusé a droit notamment à être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui >> et que, d'autre part, l'article 6.3.b. de la même convention ajoute que << Tout accusé a droit notamment à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense >> » ;
Mais attendu qu’il résulte de l’exposé des faits ainsi que du libellé du moyen que celui-ci ne porte que sur la prévention dont le libellé a été modifié par la Cour d’appel ; que le moyen procède d’une lecture incorrecte de l’arrêt attaqué ; que celui-ci n’a pas déclaré le prévenu convaincu « d’avoir de manière illicite, vendu, offert en vente et mis en circulation plusieurs centaines de grammes de marihuana » comme affirmé par le demandeur en cassation dans son exposé des faits, mais a déclaré X.) convaincu d’avoir, comme auteur ayant lui-même commis les infractions, depuis le 24 juillet 2006 au 29 septembre 2006, dans l’arrondissement judiciaire de Luxembourg, notamment à Luxembourg-Gare et Esch, en infraction … en l’espèce, de manière illicite, mis en circulation plusieurs centaines de grammes de cocaïne et plusieurs centaines de grammes de marihuana ; que tant l’ordonnance de renvoi du 5 juillet 2007 que la citation devant le tribunal correctionnel du 7 décembre 2007 visaient les faits d’importation, de vente, d’offre en vente et de mise en circulation, de quelque façon que ce soit depuis début 2005 jusqu’au 29 septembre 2006, de manière illicite, d’une grande quantité de cocaïne de l’ordre de plusieurs centaines de grammes ainsi que de plusieurs centaines de grammes de marihuana et qu’elles indiquaient encore des ventes de cocaïne et de marihuana à plusieurs personnes nommément désignées ; que l’incrimination ne portait pas seulement sur des ventes de stupéfiants aux personnes désignées mais visait également la mise en circulation de cocaïne et de marihuana ; que le
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demandeur en cassation était donc informé d’une manière suffisante de la nature et de la cause de l’accusation portant sur la mise en circulation de substances prohibées déterminées avec indication de leurs quantités par le libellé afférent de l’ordonnance de renvoi et de la citation devant le tribunal pour lui permettre de préparer sa défense ;
d’où il suit que la Cour d’appel qui a retenu à charge du prévenu la mise en circulation pendant une période restreinte des stupéfiants précisés au libellé du ministère public n’a pas violé les textes normatifs visés au moyen ;
Sur le deuxième moyen de cassation :
tiré « de la violation de l'article 89 de la Constitution,
En ce que la Cour d'appel a condamné Monsieur X.) pour des infractions à la loi du 19 février 1973 sur la lutte contre la toxicomanie en motivant sa condamnation de manière générale et vague sans indiquer avec précision les faits pour lesquels elle a condamné le demandeur en cassation,
En l'espèce, la Cour d'appel a condamné Monsieur X.) pour des infractions à la loi du 19 février 1973 sur la lutte contre la toxicomanie dans les termes suivants : << en l'espèce d'avoir, de manière illicite vendu, offert en vente et mis en circulation plusieurs centaines de grammes de marihuana >> sans indiquer ni les lieux précis de ces ventes ou mises en circulation, hormis l'indication générale et vague de l'arrondissement judiciaire de Luxembourg, ni les moments exacts de ces ventes, hormis l'indication d'une période générale et vague allant de juillet 2006 au 29 septembre 2006, ni l'identité des acquéreurs, ni les quantités mises en vente ou en circulation, de sorte que la motivation de l'arrêt attaqué est contraire article 89 de la Constitution qui dispose que tout jugement doit être motivé » ;
Mais attendu que le prévenu qui n’attaque que la disposition de l’arrêt ayant retenu l’infraction à l’article 8.1.a de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie, n’a pas été condamné du chef de vente ou d’offre en vente de substances prohibées mais uniquement du chef de mise en circulation de cocaïne et de marihuana ;
que le moyen, pour autant qu’il vise la vente et l’offre en vente de stupéfiants, manque en fait ;
que, pour autant que tiré de l’article 89 de la Constitution qui sanctionne l’absence de motifs, il manque encore en fait, l’arrêt attaqué étant motivé en ce qui concerne la prévention retenue ;
que, finalement, pour autant qu’il reproche une insuffisance de motifs aux juges du fond et vise donc un défaut de base légale, il y a lieu de relever que la Cour s’est référée à la motivation détaillée des juges de première instance qui se sont basés non seulement sur les faits indiqués dans les procès-verbaux et rapports de la police grand-ducale, service de police judiciaire, mais qui ont analysé les communications téléphoniques enregistrées du demandeur en cassation pour le
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retenir dans les liens des préventions d’infractions aux articles 8.1.a et 8.1.b de la loi modifiée du 19 février 1973 concernant la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie ; que la Cour d’appel précise la période et les lieux des faits, les substances médicamenteuses prohibées mises en circulation ainsi que leurs quantités ;
que les juges du fond ont, par des motifs suffisants, justifié légalement leur décision ;
d’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Par ces motifs :
rejette le pourvoi ;
condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le ministère public étant liquidés à 6,50 euros.
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique extraordinaire du mardi, quatorze juillet deux mille neuf, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :
Marie-Paule ENGEL, présidente de la Cour, Léa MOUSEL, conseillère à la Cour de cassation, Andrée WANTZ, conseillère à la Cour de cassation, Marianne PUTZ, conseillère à la Cour d’appel, Roger LINDEN, conseiller à la Cour d’appel, Marie-Paule KURT, greffière à la Cour,
qui ont signé le présent arrêt.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique extraordinaire par Madame la présidente Marie-Paule ENGEL, en présence de Monsieur John PETRY, avocat général et de Madame Marie-Paule KURT, greffière à la Cour.
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