N° 07 / 07.
du 11.1.2007.
Numéro 2329 du registre.
Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, onze janvier deux mille sept.
Composition:
Marc THILL, président de la Cour, Marc SCHLUNGS, conseiller à la Cour de cassation, Jean JENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Françoise MANGEOT, conseiller à la Cour d’appel, Aloyse WEIRICH, conseiller à la Cour d’appel, Jérôme WALLENDORF, premier avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.
E n t r e :
X.), veuve de (…), née le (…), demeurant à L-(…), (…), demanderesse en cassation, comparant par Maître Gaston VOGEL, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu, e t :
la CAISSE DE PENSION DES EMPLOYES PRIVES, établie et ayant son siège social à L-1724 Luxembourg, 1A, boulevard Prince Henri, représentée par le président de son comité-directeur actuellement en fonction, Monsieur (…), demeurant à (…), défenderesse en cassation, comparant par Maître Pierre SCHLEIMER, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu.
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2 LA COUR DE CASSATION :
Ouï Monsieur le conseiller SCHLUNGS en son rapport et sur les conclusions de Monsieur le premier avocat général WIVENES ;
Vu l’arrêt attaqué rendu le 7 décembre 2005 par le Conseil supérieur des assurances sociales et notifié par voie postale le 12 décembre 2005 ;
Vu le mémoire en cassation signifié le 8 février 2006 par X.) et déposé le 10 février 2006 au greffe de la Cour ;
Vu le mémoire en réponse signifié le 5 avril 2006 par la CAISSE DE PENSION DES EMPLOYES PRIVES (CPEP) et déposé le 7 avril 2006 au greffe de la Cour ;
Sur la recevabilité du pourvoi qui est contestée :
Attendu que la CPEP conclut à l’irrecevabilité du pourvoi en raison de la nouveauté du moyen formulé dans le mémoire ;
Mais attendu que les vices susceptibles d’affecter le moyen n’entravent pas la recevabilité du pourvoi en lui-même, qui dès lors est recevable ;
Sur les faits :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le Conseil arbitral des assurances sociales avait rejeté le recours exercé par X.) contre une décision du comité-
directeur de la CPEP ayant refusé à la requérante l’obtention d’une pension de survie au motif que les conditions de l’article 196 du code des assurances sociales n’étaient pas réunies en l’espèce ; que sur appel de X.) le Conseil supérieur des assurances sociales confirma le jugement entrepris ;
Sur le moyen de cassation :
tiré « de la violation des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme ainsi que de l’article 10 bis de la Constitution en ce que la décision attaquée a confirmé le jugement du Conseil arbitral des assurances sociales du 7 avril 2005 ayant débouté X.) de sa demande en octroi de la pension de survie, aux motifs qu’il serait juridiquement incorrect de parler de violation de l’article 368 du code civil 3 et d’inconstitutionnalité de l’article 199 du code des assurances sociales ;
qu’il n’y aurait en l’occurrence ni violation du respect de la vie privée et familiale, ni entorse au principe de non-discrimination de sorte que le renvoi aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme serait dépourvu de tout fondement ; que l’article 196 du code des assurances ne traite pas des droits des enfants survivants, mais de ceux du conjoint survivant ; que cet article n’est pas susceptible de restreindre les droits d’un enfant adopté dès lors que cet enfant tire son droit propre au bénéfice d’une pension d’orphelin de l’article 199 du code des assurances sociales ; qu’il est donc invoqué mal à propos par rapport à une discrimination de l’enfant adopté et en conséquence, dans ce même contexte, à une violation des droits de l’enfant adopté que ce soit par rapport à la Convention européenne des droits de l’homme, à l’article 368 du code civil et à l’article 10 bis de la Constitution ; alors qu’aux termes des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, toute personne a droit au respect de sa vie familiale et toute discrimination fondée notamment sur l’origine ou la naissance est prohibée et qu’aux termes de l’article 10 bis de la Constitution, les Luxembourgeois sont égaux devant la loi et que partant la famille adoptive – bénéficiant de la protection de l’article 8 susvisé – est nécessairement à placer sur un pied d’égalité avec la famille légitime ou biologique, de telle sorte qu’en refusant de traiter X.), mère d’un enfant adopté, sur le plan de l’article 196 § 2 du code des assurances sociales de la même façon que le conjoint survivant, partant d’un enfant légitime ou légitimé et en refusant d’octroyer à X.) le bénéfice de la pension de survie contrairement au conjoint survivant, partant d’un enfant légitime ou légitimé, le Conseil supérieur a nécessairement violé les textes susvisés » ;
Mais attendu qu’en instance d’appel X.) avait sur question spéciale précisé fonder ses prétentions sur le principe de l’égalité entre enfants et que le Conseil supérieur des assurances sociales avait retenu que la loi ne fait pas de distinction entre enfants légitimes ou légitimés et adoptés, les droits de ceux-ci étant absolument les mêmes au vœu de l’article 368 du code civil et de l’article 199 du code des assurances sociales ; qu’il ne saurait dès lors être valablement reproché à la susdite juridiction d’avoir violé les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 10 bis de la Constitution luxembourgeoise sur le fondement de l’article 196,2,b, du même code, actuellement invoqué ;
D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli sur les textes normatifs visés ;
4 P a r c e s m o t i f s , r e j e t t e le pourvoi ;
condamne X.) aux frais de l’instance en cassation dont distraction au profit de Maître Pierre SCHLEIMER, avocat à la Cour, sur ses affirmations de droit.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Marc THILL, en présence de Monsieur Jérôme WALLENDORF, premier avocat général et Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.