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04/05/2006 | LUXEMBOURG | N°25/06

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 04 mai 2006, 25/06


La rencontre d'une offre avec l'acceptation suffit à former un contrat. Une clause destinée à réserver à un responsable du vendeur le droit de signature, inscrite dans le seul intérêt du vendeur, ne saurait être invoquée à titre d'absence de consentement valable de la part de l'acheteur. L'acheteur s'est engagé sauf à pouvoir rétracter son offre aussi longtemps qu'elle n'a pas été acceptée. Tant que l'offre n'a pas été acceptée, elle est, en effet, librement révocable. Le consensualisme veut qu'en principe, l'acceptation ne soit soumise à aucune forme.



Arrê

t de la Cour de Cassation du 04/05/2006 n° 25/06. Numéro du registre : 2281.


Au...

La rencontre d'une offre avec l'acceptation suffit à former un contrat. Une clause destinée à réserver à un responsable du vendeur le droit de signature, inscrite dans le seul intérêt du vendeur, ne saurait être invoquée à titre d'absence de consentement valable de la part de l'acheteur. L'acheteur s'est engagé sauf à pouvoir rétracter son offre aussi longtemps qu'elle n'a pas été acceptée. Tant que l'offre n'a pas été acceptée, elle est, en effet, librement révocable. Le consensualisme veut qu'en principe, l'acceptation ne soit soumise à aucune forme.

Arrêt de la Cour de Cassation du 04/05/2006 n° 25/06. Numéro du registre : 2281.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, quatre mai deux mille six.

Composition :

Marc THILL, président de la Cour,

Marc SCHLUNGS, conseiller à la Cour de cassation,

Jean JENTGEN, conseiller à la Cour de cassation,

Eliane EICHER, conseiller à la Cour d'appel,

Charles NEU, conseiller à la Cour d'appel,

Christiane BISENIUS, avocat général,

Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.

Entre :

XX, indépendant, demeurant à ..., demandeur en cassation, comparant par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu.

et :

la société en commandite simple GARAGE MARTIN LOSCH, établie et ayant son siège social à L-2610 Luxembourg, 88, route de Thionville, représentée par son ou ses associés commandités actuellement en fonctions, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 15733, défenderesse en cassation, comparant par Maître Alain LORANG, avocat à la Cour, en l'étude duquel domicile est élu.

LA COUR DE CASSATION :

Ouï Monsieur le président THILL en son rapport et sur les conclusions de Madame l'avocat général GUILLAUME;

Vu l'arrêt attaqué rendu le 27 avril 2005 par la Cour d'appel, première chambre, siégeant en matière civile;

Vu le mémoire en cassation signifié le 18 août 2005 par XX et déposé au greffe de la Cour le 30 août 2005;

Vu le mémoire en réponse signifié le 13 septembre 2005 par la société en commandité simple GARAGE MARTIN LOSCH (le GARAGE MARTIN LOSCH) et déposé au greffe de la Cour le 27 septembre 2005;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le tribunal d'arrondissement de Luxembourg siégeant en matière civile avait débouté le GARAGE MARTIN LOSCH d'une demande en paiement d'une indemnité forfaitaire pour non-exécution par l'acheteur XX des obligations contractuelles lui incombant dans le cadre d'un contrat de vente d'une voiture automobile au motif qu'un tel contrat ne se serait pas formé valablement entre parties; que sur appel, les juges du second degré ont, par réformation, dit qu'une convention liait valablement les parties et fait droit aux prétentions du demandeur originaire;

Sur le premier moyen :

tiré « de la violation de l'article 1583 du code civil en ce que la Cour d'appel a par réformation du jugement du 4 mars 2004 décidé qu'un contrat de vente s'était valablement formé entre le sieur XX et le GARAGE MARTIN LOSCH, suite à une offre d'achat émise en date du 25 juillet 2001 par le sieur XX qui aurait été acceptée par l'effet de la commande du véhicule effectuée par le GARAGE MARTIN LOSCH et l'information de la disponibilité du véhicule adressée par cette dernière au sieur XX, alors que pourtant le GARAGE MARTIN LOSCH qui expose des véhicules à la vente au public a soumis en date du 25 juillet 2001 un contrat d'adhésion au sieur XX portant sur la vente d'un véhicule qui a été signé en date du 25 juillet 2001 par le sieur XX, mais qui n'a pas été contre-signé ce jour là par un gérant ou fondé de pouvoir du GARAGE MARTIN LOSCH, de sorte que par application de l'article 1583 du code civil, aux termes duquel le contrat synallagmatique que constitue le contrat de vente, se forme par la rencontre simultanée du consentement des deux parties, la Cour d'appel aurait dû confirmer les premiers juges et décider qu'à défaut de rencontre simultanée des consentements à la vente en date du 25 juillet 2001 aucun contrat de vente ne s'était formé entre le sieur XX et le GARAGE MARTIN LOSCH et aurait ainsi dû déclarer l'appel non fondé »;

Mais attendu qu'en constatant souverainement, sur le fondement des éléments de fait à eux soumis, la réalisation de l'accord de volontés, les juges d'appel n'ont pu violer l'article 1583 du code civil qui, contrairement à l'allégation du moyen, n'impose pas de condition de simultanéité à cet accord;

Sur le deuxième moyen :

tiré « de la violation de l'article 1174

du code civil en ce que la Cour d'appel a estimé que la demande en annulation du contrat formulée par le sieur XX basée sur l'article 1174 du code civil était à rejeter, alors qu'un contrat de vente s'était valablement formé par la rencontre de l'offre d'acheter qui aurait été émise par le sieur XX et l'acceptation ultérieure par le GARAGE MARTIN LOSCH, alors que pourtant le GARAGE MARTIN LOSCH qui offre des véhicules à la vente au public dans des locaux prévus à cet effet a fait signer en date du 25 juillet 2001 un contrat de vente préimprimé par elle au sieur XX, contrat pour lequel elle s'est réservée le droit de ne pas honorer son obligation de livrer le véhicule à défaut de contre-signature du contrat par son gérant ou son fondé de pouvoir, ce qui constitue une obligation qui est laissée au bon vouloir du GARAGE MARTIN LOSCH d'exécuter, équivalent à une question potestative aux termes de l'article 1174 du code civil entraînant la nullité du contrat, de sorte que la Cour d'appel aurait dû déclarer le contrat nul et par voie de conséquence l'appel du GARAGE MARTIN LOSCH non fondé »;

Mais attendu qu'en considérant, sur le fondement des constatations par eux faites que « l'article 10 des conditions générales de vente est conçu comme suit: Le présent contrat n'engage le Garage qu'après contresignature par le gérant ou un fondé de pouvoir. La clause telle que libellée est à interpréter en ce sens que les vendeurs engagés par le garage n'ont que le droit de négocier le contrat de vente sans néanmoins avoir pouvoir de le signer, la signature du contrat étant réservée aux gérants et fondés de pouvoir. La clause ne constitue donc pas une condition potestative qu'il est au pouvoir de l'une ou de l'autre des parties de faire arriver ou d'empêcher, mais une clause juridiquement correcte destinée à réserver à un responsable du garage le droit de signature. Avant la signature par ce responsable, le contrat ne constitue qu'une offre d'achat ne créant d'obligations qu'à la charge d'une des parties, en l'occurrence l'acheteur. En signant le contrat, l'acheteur a donné son engagement d'acquérir la voiture, objet de la négociation. La rencontre de cette offre avec l'acceptation du garage suffira à former le contrat. La clause, inscrite dans le seul intérêt du garage, ne saurait donc être invoquée à titre d'absence de consentement valable de la part de l'acheteur. L'acheteur s'est engagé sauf à pouvoir rétracter son offre aussi longtemps qu'elle n'a pas été acceptée. Tant que l'offre n'a pas été acceptée, elle est, en effet, librement révocable. Le consensualisme veut qu'en principe, l'acceptation ne soit soumise à aucune forme. En l'espèce, il n'y a pas eu rétractation de l'offre d'achat, mais ratification du contrat par la commande de la voiture auprès du fabricant et par l'information du cocontractant de sa disponibilité (Cass. Com. 6 mars 1990, Juriscl. 1990, 21583) », les juges d'appel ont décidé exactement;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé;

Sur le troisième moyen :

tiré « du fait que c'est à tort que la Cour d'appel a déclaré par réformation fondée la demande de l'appelant telle qu'augmentée en cours d'appel, augmentation en cours d'appel qui n'a pourtant jamais été expressément acceptée par l'intimé, alors qu'en vertu de l'article 571 du nouveau code de procédure civile c'est l'acte d'appel qui fixe l'étendue de la dévolution, de sorte que la Cour d'appel pouvait tout au plus déclarer fondée la demande de l'appelant tel que renseignée dans son acte d'appel et aurait dû déclarer irrecevable l'augmentation en cours d'appel »;

Mais attendu que ne constitue pas une demande nouvelle une demande additionnelle de majoration de la demande initiale principale, connexe à celle-ci, ayant identité de cause et d'origine et tendant au même but, comme il en est en l'espèce de la demande en majoration;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé;

Par ces motifs,

rejette le pourvoi;

condamne XX aux dépens de l'instance en cassation, dont distraction au profit de Maître Alain LORANG, avocat à la Cour, sur ses affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Marc THILL, en présence de Madame Christiane BISENIUS, avocat général et Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25/06
Date de la décision : 04/05/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2013
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2006-05-04;25.06 ?
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