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17/11/2005 | LUXEMBOURG | N°30/2005

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 17 novembre 2005, 30/2005


N° 30 / 2005 pénal. du 17.11.2005 Numéro 2223 du registre.
La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, formée conformément à la loi du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire, a rendu en son audience publique du jeudi, dix-sept novembre deux mille cinq,
l'arrêt qui suit :
E n t r e :
X.), employé de banque, né le (...) à (...) (Grande-Bretagne), demeurant à L-(...), (...),
demandeur en cassation,
comparant par Maître François CAUTAERTS, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu,
et :
le MINISTERE PUBLIC.
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LA COUR DE CASSATION :
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N° 30 / 2005 pénal. du 17.11.2005 Numéro 2223 du registre.
La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, formée conformément à la loi du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire, a rendu en son audience publique du jeudi, dix-sept novembre deux mille cinq,
l'arrêt qui suit :
E n t r e :
X.), employé de banque, né le (...) à (...) (Grande-Bretagne), demeurant à L-(...), (...),
demandeur en cassation,
comparant par Maître François CAUTAERTS, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu,
et :
le MINISTERE PUBLIC.
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LA COUR DE CASSATION :
Ouï Monsieur le président THILL en son rapport et sur les conclusions de Madame l’avocat général GUILLAUME ;
Vu le jugement attaqué rendu le 18 novembre 2004 sous le numéro 3222/2004 par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, treizième chambre, siégeant en instance d’appel en matière de police ;

Vu le pourvoi en cassation déclaré le 14 décembre 2004 au greffe du tribunal d’arrondissement de Luxembourg par Maître François CAUTAERTS, assisté de Maître Julie MICHAELIS, pour et au nom de X.) et le mémoire y déposé le 13 janvier 2005 ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que le tribunal de police de Luxembourg avait condamné X.) du chef de contraventions à la législation sur la circulation routière à une peine d’amende ; que sur appel du ministère public, les juges du second degré, tout en augmentant le taux de l’amende, prononcèrent en outre à l’encontre de X.) une peine d’interdiction de conduire assortie du sursis avec un délai d’épreuve de cinq ans ;
Sur le deuxième moyen de cassation :
tiré « de la violation des articles 172 et 203 du code d’instruction criminelle, en ce que, première branche, aux termes de l’article 172 combiné avec l’article 203 du code d’instruction criminelle, l’appel contre un jugement d’un tribunal de police doit être interjeté par < déclaration >> ou << notification >> faite << au greffe >> du tribunal de police qui l’a rendue et le greffier en informera immédiatement les parties, alors que, en l’espèce, Maître Claudine Erpelding, mandataire de X.) pour la première et deuxième instance de cette affaire, a été informée par télécopie émanant du Parquet de Luxembourg du 20 juillet 2004 que l’appel paraîtra à l’audience du 3 novembre 2004 et par télécopie du 21 juillet 2004 émanant également du Parquet de Luxembourg que le procureur d’Etat aurait fait une déclaration d’appel le 18 juin 2003 contre le jugement rendu par le tribunal de police le 17 mai 2004 ; l’information donnée par la seule voie de cette télécopie ne rapporte pas la preuve qu’une déclaration ou notification d’appel a été faite dans les délais prescrits, alors que tout acte de procédure doit contenir en lui-même la preuve de sa régularité ; partant, l’appel du Ministère Public a été interjeté en violation des formalités protectrices prescrites par le code d’instruction criminelle ; en effet la déclaration d’appel au greffe est une << formalité substantielle >> pour laquelle la loi n’a admis aucun équivalent et qui ne peut être supplée ni remplacé par aucun acte de quelque nature que ce soit (Trib. Luxembourg, 15 avril 1905, P. 7.147. ; Roger THIRY, Précis d’Instruction Criminelle en Droit Luxembourgeois, Editions Lucien DE BOURCY, 1971, page 309) ; il est de jurisprudence constante que ces formalités de la déclaration d’appel sont <<prescrites à peine de nullité>> (Trib. Luxembourg, 30 avril 1958, P. 17.294 ; Cour 10 mars 1917, P. 10.284 ; Cour 19 décembre 1980, P. 25.57) ; et en ce que, deuxième branche, l’article 203 du code d’instruction criminelle prévoit que le greffier informera <<immédiatement>> les autres parties de la déclaration d’appel, alors que, en l’espèce, le prévenu ou son mandataire n’a pas été informé immédiatement, tout comme il n’a pas été informé par le greffe ; le but de cette garantie législative de l’information immédiate par le greffe est de ne pas laisser la partie intimée, une fois les délais de recours écoulés, dans la croyance légitime que le jugement de première instance est coulé en force de chose jugée » ;
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Mais attendu que l’information à donner par le greffe de l’appel du ministère public est une formalité extrinsèque dont l’inexécution ne saurait affecter la validité de l’appel en lui-même, celui étant consommé par la déclaration qui est faite dans le délai de la loi au greffe chargé de le recevoir ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
tiré « de la violation de l’article 174, alinéa 2, du Code d’instruction criminelle, ainsi que du principe de l’égalité des armes et du droit d’accès à un tribunal tels qu’ils résultent de l’exigence d’un procès équitable au sens de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, en ce que, première branche, selon l’article 174, alinéa 2, du code d’instruction criminelle, en cas d’appel d’une des parties pendant le délai d’appel, les parties intimées qui auraient eu le droit d’appel, auront un délai supplémentaire de cinq jours pour interjeter appel contre celles des parties qui ont formé appel principal ; alors que, en l’espèce, du fait de l’information tardive de l’appel interjeté par le Ministère Public, X.) a été privé de son droit d’interjeter appel incident ; la raison d’être de ce droit octroyé par le code d’instruction criminelle est <<de ne pas permettre à une partie de laisser croire aux autres qu’elle ne fera pas appel et, appelant en dernier moment, interdire aux autres parties de faire appel>> (Serge GUINCHARD et Jacques BUISSON, Procédure Pénale, Editions Litec, 2000, page 789) ; partant, le jugement attaqué ne saurait valablement soutenir que les droits de X.) n’ont aucunement été lésés suite à cette omission de la communication tardive, vu que le jugement par lui cité (TAL 21 janvier 1998, 106/98,LJUS 998183372) a été rendu dans une espèce où le prévenu avait été acquitté en première instance, contrairement à la présente espèce où le prévenu a été condamné, et en ce que, deuxième branche, le principe de l’égalité des armes tel qu’il résulte de l’exigence d’un procès équitable, au sens de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, exige que chaque partie puisse présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de désavantage par rapport à son adversaire (Cass. 14 mars 1996, P.30.52 ; Dominique ALLIX, Le Droit à un Procès Pénal Equitable – De l’Accusation en Matière Pénale à l’Egalité des Armes, in Revues Justices 1998 – 10, page 30) ; aucune inégalité de traitement doit exister entre les parties, spécialement, lorsqu’il s’agit de l’exercice des voies de recours ; alors que, en l’espèce, du fait d’avoir été informé tardivement de l’appel interjeté par le Ministère Public dans des formes contraires à celles prescrites par la loi, X.) a été privé de son droit d’interjeter appel incident, en violation du principe d’égalité des armes et de son droit d’accès à un tribunal ; la réglementation du code d’instruction criminelle quant aux formalités à respecter pour former un recours vise à assurer la bonne administration de la justice et le respect, en particulier, du principe de la sécurité juridique » ;
Mais attendu que l’appel non limité du ministère public produit une dévolution totale remettant en question tout ce qui a été soumis aux premiers
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juges, à charge et à décharge, de sorte que tous les droits du prévenu, en cas d’absence d’appel de sa part, demeurent saufs ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le premier moyen :
tiré « de la violation des articles 627, alinéa 1er, et 628, alinéa 5, du code d’instruction criminelle, en ce que le jugement attaqué a prononcé une interdiction judiciaire de conduire contre X.) avec sursis intégral, mais l’a condamné à une période d’épreuve de cinq ans, et non de deux ans, alors qu’il s’agit, en l’espèce, d’une peine de police, et non d’une peine correctionnelle, de sorte que la période d’épreuve ne peut dépasser deux ans ; le juge correctionnel comme juge d’appel ne peut connaître que des infractions dont le juge de police était régulièrement saisi en premier ressort (Cass. 29 juillet 1904, P. 6.658) » ;
Vu l’article 628 alinéa 5 du code d’instruction criminelle qui dispose que « Au cas où le condamné n’aurait pas, dans le délai … de deux ans si elle (l’interdiction de conduire) l’a été accessoirement à une peine de police, commis une nouvelle infraction ayant entraîné une condamnation à une interdiction de conduire un véhicule sur la voie publique ou à une peine privative de liberté pour crimes ou délits prévus par la législation sur la circulation sur les voies publiques ou sur la vente de substances médicamenteuses et la lutte contre la toxicomanie, l’interdiction sera réputée non avenue » ;
Attendu cependant, qu’en fixant la durée du délai d’épreuve à cinq ans, les juges d’appel ont violé cet article et que leur décision encourt la cassation sous ce rapport ;
P a r c e s m o t i f s :
rejette le pourvoi en ses deuxième et troisième moyens ;
Mais l’accueillant sur le chef critiqué par le premier moyen, casse et annule le jugement rendu le 18 novembre 2004 sous le numéro 3222/2004 par le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, treizième chambre, siégeant en instance d’appel en matière de police en ce qu’il a fixé à cinq ans le délai d’épreuve pour une condamnation conditionnelle à une interdiction de conduire prononcée du chef de contraventions à la législation sur la circulation sur les voies publiques ;
remet en conséquence, dans cette mesure, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et pour faire droit, les renvoie devant le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière d’appel de police, autrement composé ;
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laisse à charge de l’Etat les frais de l’instance en cassation et ceux de la décision cassée ;
ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt sera transcrit sur le registre du tribunal d’arrondissement de Luxembourg et qu’une mention renvoyant à cette transcription sera consignée en marge de la minute du jugement cassé.

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, dix-sept novembre deux mille cinq, au Palais de Justice à Luxembourg, 12, Côte d'Eich, composée de :
Marc THILL, président de la Cour, Marc SCHLUNGS, conseiller à la Cour de cassation, Jean JENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Joseph RAUS, président de chambre à la Cour d'appel, Jean-Claude WIWINIUS, premier conseiller à la Cour d'appel, Martine SOLOVIEFF, premier avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour,
qui, à l'exception du représentant du ministère public, ont signé le présent arrêt.
La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Marc THILL, en présence de Madame Martine SOLOVIEFF, premier avocat général et Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.
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Synthèse
Numéro d'arrêt : 30/2005
Date de la décision : 17/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2017
Fonds documentaire ?: Legilux
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2005-11-17;30.2005 ?

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