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25/03/2004 | LUXEMBOURG | N°09/04

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 25 mars 2004, 09/04


N° 09 / 2004 pénal.

du 25.03.2004 Numéro 2062 du registre.

La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, formée conformément à la loi du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire, a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-cinq mars deux mille quatre, l'arrêt qui suit :

E n t r e :

X.), agent immobilier, née le (…) à (…), demeurant à L-(…), (…), demanderesse en cassation, comparant par Maître Jean-Paul NOESEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, e t :

le MINISTERE PUBLIC, en présence de la partie civile :



Y.), demeurant à L-(…), (…), défendeur en cassation, comparant par Maître Gaston VOGEL, avocat à la C...

N° 09 / 2004 pénal.

du 25.03.2004 Numéro 2062 du registre.

La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg, formée conformément à la loi du 7 mars 1980 sur l'organisation judiciaire, a rendu en son audience publique du jeudi, vingt-cinq mars deux mille quatre, l'arrêt qui suit :

E n t r e :

X.), agent immobilier, née le (…) à (…), demeurant à L-(…), (…), demanderesse en cassation, comparant par Maître Jean-Paul NOESEN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, e t :

le MINISTERE PUBLIC, en présence de la partie civile :

Y.), demeurant à L-(…), (…), défendeur en cassation, comparant par Maître Gaston VOGEL, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.

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LA COUR DE CASSATION :

Ouï Monsieur le président THILL en son rapport et sur les conclusions de Monsieur l’avocat général NIES ;

Vu l'arrêt attaqué, rendu le 13 octobre 2003 sous le numéro 262/03-VI.

par la Cour d'appel, sixième chambre, siégeant en matière correctionnelle ;

Vu le pourvoi en cassation au pénal et au civil déclaré le 12 novembre 2003 au greffe de la Cour par Maître Jean-Paul NOESEN pour et au nom de X.) ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 8 décembre 2003 par la demanderesse et déposé le 11 décembre 2003 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 17 décembre 2003 par le défendeur au civil Y.) et déposé le 23 décembre 2003 au greffe de la Cour ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière correctionnelle, avait condamné X.) du chef de violation de domicile et de vol simple à des peines d’emprisonnement et d’amende et fait droit à la demande civile de Y.) ; que sur recours, les juges d’appel se déclarèrent incompétents pour connaître de la prévention de vol, constituant, selon eux, un vol qualifié qui n’avait pas fait l’objet d’un renvoi devant la juridiction correctionnelle pour ne retenir que l’infraction de violation de domicile, réduisirent par réformation le taux de la peine d’emprisonnement prononcée en première instance et confirmèrent pour le surplus la décision entreprise ;

Sur le premier moyen de cassation, tiré « de la violation, sinon de la fausse application de la loi, en l’espèce, de l’article 439 du Code pénal qui dispose que sera puni d’un emprisonnement de quinze jours à deux ans et d’une amende de 251 à 3000 €, celui qui, sans l’ordre de l’autorité et hors le cas où la loi permet d’entrer dans le domicile des particuliers contre leur volonté, se sera introduit dans une maison, un appartement, une chambre ou un logement habités par autrui, ou leurs dépendances, soit à l’aide de menaces ou de violences contre les personnes, soit au moyen d’effraction, d’escalade ou de fausse clé, en ce que l’arrêt a estimé par adoption expresse des motifs des premiers juges que, certes, s’agissant d’un délit, l’élément intentionnel, le dol spécial requis devait être établi à titre d’élément constitutif du délit, et que la violation de domicile n’était pas une infraction non intentionnelle, mais a déduit cet élément intentionnel du fait que la prévenue aurait dû remarquer, après avoir fait ouvrir la porte, que le logement était encore occupé, donc d’un élément factuel postérieur à la réalisation des éléments matériels de l’infraction, alors que pour parvenir à une condamnation de la prévenue, la décision aurait dû retenir l’existence d’un élément intentionnel dans le chef de la prévenue avant la commission des éléments factuels ou, tout au plus, de manière concomitante avec la commission des éléments matériels de l’infraction, mais ne pouvait pas la déduire d’éléments qui se situent postérieurement à la commission des éléments matériels » ;

2 Mais attendu que le moyen procède d’une lecture incorrecte de l’arrêt entrepris dès lors que la Cour d’appel a fondé sa décision quant à l’élément moral de la prévention de violation de domicile sur les motifs adoptés des premiers juges aux termes desquels « l’article 439 du Code pénal ayant uniquement pour but de protéger un intérêt légalement existant, il est avant tout nécessaire, pour la constitution du délit y prévu, que celui dont le domicile a été prétendument violé, ait sur l’appartement par lui habité un droit d’habitation ou tout autre droit plus fort que le droit de celui qui s’y introduit (Cour 6 juin 1908, P. 7, 498) ; Y.) ayant pris en location l’appartement litigieux suivant contrat de bail conclu entre parties le (…), sans qu’une résiliation d’un commun accord respectivement judiciaire ne soit intervenue, il disposait d’un droit d’habitation sur ces lieux interdisant à X.) d’y pénétrer ; la prévenue ne contestant pour le surplus pas que son acte d’intrusion ait été commis à l’insu de Y.), le tribunal retient que les conditions d’application de l’article 439 sont remplies en l’espèce » et non pas sur la motivation critiquée qui se rapporte à l’examen de la cause d’irresponsabilité pénale fondée sur une erreur invincible invoquée par X.) ;

D’où il suit que le moyen manque en fait et ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, tiré « de la violation, sinon de la fausse application de la loi, en l’espèce, de l’article 71 du Code pénal auquel la doctrine et la jurisprudence rattachent la notion d’erreur invincible sans que le texte de l’article ne le mentionne expressément, en ce que l’arrêt a estimé par estimation expresse des motifs des premiers juges que la demanderesse ne saurait se retrancher derrière les conseils erronés de son mandataire, ni derrière les indications erronées figurant sur le pli envoyé par la Justice de Paix pour faire valoir une cause de justification constitutive d’une erreur invincible, alors que les renseignements concordants donnés d’un côté dans le cadre d’une recommandation expresse et écrite donnée à titre d’avis juridique par un avocat à la Cour, corroborés par ailleurs par les mentions figurant sur un document établi par un fonctionnaire assermenté, en l’espèce le facteur des postes chargé de notifier un pli judiciaire, et ne paraissant pas de toute évidence démunis de sens, incitant la prévenue à poser les actes pour lesquelles elle a été poursuivie, constituent une source d’erreur invincible éliminant toute responsabilité pénale » ;

Mais attendu qu’en adoptant les motifs de la juridiction du premier degré, suivant lesquels « le tribunal rappelle par ailleurs qu’il est de principe que nul n’est censé ignorer la loi, la présomption de la connaissance de la loi pénale s’expliquant par la nécessité de sauvegarder le bon fonctionnement de l’ordre juridique (Merle et Vitu, Traité de droit criminel, éd 1967, no 437) ; l’erreur de droit constitue cependant une cause de justification en matière répressive, lorsqu’en raison de circonstances spéciales à l’espèce, elle paraît comme invincible (Cour 23 octobre 1984, no 247/84) ; l’erreur invincible est celle qui résulte d’une cause étrangère qui ne peut être imputée à celui qui en est la victime, et que le prévenu a versé dans une ignorance qui eut été dans les mêmes 3 circonstances celle de tout homme raisonnablement et prudent (Cour 4 novembre 1982, no 213/83 ; Cour 20 octobre 1983, no 212/83) ; l’erreur invincible, pour pouvoir être prise en considération doit dès lors s’apparenter à la force majeure (Cour 19 février 1981, no 48/81, LJUS98104948) ; le tribunal retient que les explications fournies par la prévenue (non-paiement des loyers par le locataire, courrier du greffe de la justice de paix retourné, conseil de son litis mandataire) ne sont pas de nature à établir une erreur invincible dans son chef ; en effet, la simple bonne foi de la prévenue, à la supposer établie, n’est pas suffisante pour valoir cause de justification des agissements illégaux retenus à sa charge (Cass.

Bel. 12 février 1985, Pas. Bel. 1985, I, 348) ; par ailleurs, ne saurait se prévaloir d’une erreur invincible la personne qui a négligé de se faire renseigner par des personnes compétentes et le seul fait que la prévenue a été mal conseillée, même par une personne qualifiée ne saurait suffire (Cass. Bel. 29 novembre 1976, Pas.

Bel. 1977, I, 355) ; il en résulte que X.) ne saurait se retrancher derrière les conseils, erronés, de son mandataire pour justifier son agissement délictueux, ni derrière les indications erronées figurant sur le pli envoyé par la justice de paix », les juges d’appel ont fait l’exacte application de la loi sans encourir le grief de violation de l’article 71-2 que le moyen vise ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur les frais :

Attendu que la partie demanderesse succombant dans son recours doit supporter les frais de celui-ci, sauf cependant ceux occasionnés par la signification du mémoire en réponse de la partie défenderesse qui doivent rester à la charge de celle-ci, dès lors qu’en matière pénale, l’article 44 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation n’exige pour la régularité d’un mémoire en réponse des défendeurs que son dépôt dans le délai imparti au greffe où la déclaration de pourvoi aura été reçue ;

Attendu qu’une distraction des frais ne saurait être ordonnée, les règles applicables étant celles des pourvois en matière pénale ;

Sur l’indemnité de procédure :

Attendu que la demande en indemnité de procédure du défendeur en cassation est à rejeter, l’article 240 du Code de procédure civile étant sans application en procédure pénale ;

P a r c e s m o t i f s :

r e j e t t e le pourvoi ;

rejette la demande en indemnité de procédure du défendeur en cassation ;

4 condamne X.) aux frais de l’instance en cassation, à l’exception de ceux occasionnés par la signification du mémoire en réponse de la partie défenderesse, les frais exposés par le ministère public étant liquidés à 3,25 €.

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, vingt-cinq mars deux mille quatre, au Palais de Justice à Luxembourg, 12, Côte d'Eich, composée de :

Marc THILL, président de la Cour, Marc SCHLUNGS, conseiller à la Cour de cassation, Jean JENTGEN, conseiller à la Cour de cassation, Jean-Claude WIWINIUS, premier conseiller à la Cour d'appel, Lotty PRUSSEN, conseiller à la Cour d'appel, Jeanne GUILLAUME, avocat général, Marie-Paule KURT, greffier à la Cour, qui, à l'exception du représentant du ministère public, ont signé le présent arrêt.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Monsieur le président Marc THILL, en présence de Madame Jeanne GUILLAUME, avocat général et Madame Marie-Paule KURT, greffier à la Cour.

5 Document Outline le MINISTERE PUBLIC,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 09/04
Date de la décision : 25/03/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2004-03-25;09.04 ?

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