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06/08/2025 | LUXEMBOURG | N°52648C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 06 août 2025, 52648C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 52648C ECLI:LU:CADM:2025:52648 Inscrit le 4 avril 2025

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Audience publique du 6 août 2025 Appel formé par Madame (A1) et consorts, …, contre un jugement du tribunal administratif du 4 mars 2025 (n° 49504 du rôle) en matière de protection internationale

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Vu l’acte d’appel

, inscrit sous le numéro 52648C du rôle, déposé au greffe de la Cour administrative ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 52648C ECLI:LU:CADM:2025:52648 Inscrit le 4 avril 2025

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Audience publique du 6 août 2025 Appel formé par Madame (A1) et consorts, …, contre un jugement du tribunal administratif du 4 mars 2025 (n° 49504 du rôle) en matière de protection internationale

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Vu l’acte d’appel, inscrit sous le numéro 52648C du rôle, déposé au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2025 par la société à responsabilité limitée WH AVOCATS SARL, inscrite sur la liste V du tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1630 Luxembourg, 46, rue Glesener, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 265.326, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom, d’une part, de Madame (A1), née le … à … (Irak), et Monsieur (A2), né le … à …, agissant tous deux en leur nom personnel ainsi qu’au nom et pour le compte de leur enfant mineure (B1), née le … à …, et, d’autre part, de Monsieur (B2), né le … à …, tous de nationalité irakienne et demeurant ensemble à L-…, …, dirigé contre un jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 4 mars 2025 (n° 49504 du rôle), par lequel ledit tribunal a déclaré non fondé leur recours tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 28 août 2023 portant refus de faire droit à leur demande en obtention d’une protection internationale, ainsi que de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative par Madame le délégué du gouvernement Sarah ERNST pour compte de l’Etat le 2 mai 2025 ;

Vu l’accord des mandataires des parties de voir prendre l’affaire en délibéré sur base des mémoires produits en cause et sans autres formalités ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;

Sur le rapport du magistrat rapporteur, l’affaire a été prise en délibéré sans autres formalités à l’audience publique du 20 mai 2025.

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Le 26 octobre 2021, Madame (A1) et Monsieur (A2) introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-

après le « ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après la « loi du 18 décembre 2015 », pour leur propre compte ainsi qu’au nom et pour le compte de leur enfant mineure (B1). En date du même jour, leur enfant majeur, Monsieur (B2) introduisit la même demande auprès du même ministère.

Le même jour, Monsieur (A2) fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section criminalité organisée – police des étrangers, sur l’identité des membres de sa famille et sur leur itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

En date du 17 janvier 2022, Madame (A1) fut entendue par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale, tandis que Monsieur (B2) et Monsieur (A2) furent entendus, chacun individuellement, à cette fin en dates des 18 janvier, respectivement 8 avril 2022.

Par décision du 28 août 2023, notifiée aux intéressés par lettre recommandée le 30 août 2023, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après « le ministre », informa Madame (A1), Monsieur (A2), leur enfant mineure (B1) et Monsieur (B2), ci-après « les consorts (AA) », que leur demande de protection internationale avait été refusée comme étant non fondée, tout en leur ordonnant de quitter le territoire dans un délai de 30 jours. Ladite décision est libellée comme suit :

« (…) J'ai l'honneur de me référer à vos demandes en obtention d'une protection internationale que vous avez introduites pour vous, ainsi qu'au nom et pour le compte de votre enfant, respectivement soeur mineure (B1), née le … à … en Irak, de nationalité irakienne, auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et européennes le 26 octobre 2021 sur base de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après dénommée « la Loi de 2015 »).

Je suis malheureusement dans l'obligation de porter à votre connaissance que je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à vos demandes pour les raisons énoncées ci-après.

1. Quant à vos déclarations En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 26 octobre 2021, les rapports d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes sur les motifs sous-tendant vos demandes de protection internationale du 17 janvier 2022, Madame (A1), le vôtre du 18 janvier 2022, Monsieur (B2) et le vôtre du 8 avril 2022, Monsieur (A2), ainsi que les documents versés à l'appui de vos demandes de protection internationale.

Madame, Messieurs, il résulte de vos déclarations que vous seriez originaires de … en Irak, d'ethnie arabe et de confession musulmane chiite.

Monsieur (A2), vous précisez que vous auriez été chauffeur de taxi à … et propriétaire de votre propre véhicule.

Ensuite, vous indiquez que vous auriez participé, notamment en juillet 2020 et septembre 2020 ainsi qu'en juin ou août 2021, de manière occasionnelle à des rassemblements qui auraient eu lieu sur la place Tahrir à …. Vous ajoutez que vos fils, (B2) et (B3), auraient également participé à ces manifestations au motif : « (…) Wir gingen auf die Straßen wegen unserer Rechte. Wir bekamen nichts (…) » (p.6/11 de votre rapport d'entretien du 8 avril 2022).

Vous mentionnez en outre que vous vous seriez souvent rendu dans une cafétéria où vous auriez constamment critiqué la politique et le gouvernement lors des discussions avec vos amis.

Vous poursuivez votre récit en faisant état de menaces de mort que vous auriez perçues en 2021. A cet égard, vous indiquez que vous et vos fils, auriez été menacés de mort par le biais de deux lettres que vous auriez trouvées.

En date du 13 août 2021, vous auriez découvert la première lettre dans la cour de votre maison à … et en date du 20 août 2021, vous auriez trouvé la seconde dans votre voiture près d'un hôpital du nom d'« … », alors que vous vous seriez brièvement absenté de votre taxi pour rejoindre des collègues. Vous précisez dans ce contexte que vous auriez conduit une voiture de marque iranienne « Saipa » et que les fenêtres auraient été défectueuses.

Vous concédez ne pas avoir porté plainte contre la première lettre de menace, mais vous auriez néanmoins décidé de déménager le jour-même dans votre résidence d'été située à « … », alors que votre épouse aurait eu peur.

En ce qui concerne la seconde lettre, vous affirmez que vous vous seriez adressé à la police et que vous auriez porté plainte contre inconnu. Vous expliquez que la police aurait diligenté une enquête sur ordre du juge d'instruction et qu'elle se serait rendue sur place, mais qu'elle n'aurait rien trouvé. Vous auriez demandé des nouvelles de votre plainte à deux reprises mais vous n'auriez reçu aucune réponse satisfaisante, raison pour laquelle vous auriez décidé de quitter l'Irak.

Vous avancez être convaincu que ces lettres de menace seraient en lien avec vos participations aux manifestations.

Madame (A1), vous confirmez les dires de votre époux. Vous ne faites état d'aucune crainte personnelle, mais vous indiquez avoir peur que vos enfants pourraient être tués.

Monsieur (B2), vous confirmez les dires de vos parents et vous avancez être également visé par ces menaces de la part des inconnus. Vous précisez en outre que vous auriez participé à des manifestations à partir d'octobre 2019 et également en 2020, ainsi qu'en juin ou juillet 2021.

Madame, Messieurs, vous auriez finalement quitté votre pays d'origine en date du 10 octobre 2021.

A l'appui de vos demandes, vous présentez vos passeports irakiens et celui de votre fille, respectivement sœur mineure, ainsi qu'une photo de ce qui serait un procès-verbal d'une plainte déposée auprès de la police irakienne et une photo de ce qui serait une demande de la police au magistrat instructeur concernant l'ouverture d'une procédure d'enquête, sans traduction.

2. Quant à la motivation du refus de vos demandes de protection internationale Suivant l'article 2 point h) de la Loi de 2015, le terme de protection internationale désigne d'une part le statut de réfugié et d'autre part le statut conféré par la protection subsidiaire.

A toutes fin[s] utiles, il convient de noter qu'en application de l'article 10 (5) de la Loi de 2015, à l'exception des documents d'identité, tout document remis au ministre rédigé dans une autre langue que l'allemand, le français ou l'anglais doit être accompagné d'une traduction dans une de ces langues, afin d'être pris en considération dans l'examen de la demande de protection internationale.

• Quant au refus du statut de réfugié Les conditions d'octroi du statut de réfugié sont définies par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après dénommée « la Convention de Genève ») et par la Loi de 2015.

Aux termes de l'article 2 point f) de la Loi de 2015, qui reprend l'article 1A paragraphe 2 de la Convention de Genève, pourra être qualifié de réfugié : « tout ressortissant d'un pays tiers ou apatride qui, parce qu'il craint avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n'entre pas dans le champ d'application de l'article 45 ».

L'octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par un des critères de fond définis à l'article 2 point f) de la Loi de 2015, que ces actes soient d'une gravité suffisante au sens de l'article 42 paragraphe 1 de la prédite loi, et qu'ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l'article 39 de la loi susmentionnée.

Messieurs, vous avancez craindre d'être tués en cas de retour dans votre pays d'origine, étant donné que vous auriez perçu des menaces de la part d'inconnus par le biais de deux lettres. Vous avancez que ces menaces seraient en lien avec vos participations à des manifestations.

Force est toutefois de constater que vos motifs n'entrent pas dans le champ d'application de la Convention de Genève et de la Loi de 2015, étant donné qu'ils ne sont nullement liés à votre race, votre nationalité, votre religion, vos opinions politiques, ou encore votre appartenance à un certain groupe social.

En effet, il découle incontestablement de vos déclarations que vous ne connaissez ni les auteurs, ni les raisons pour lesquelles vous auriez perçu des menaces. Vous présumez uniquement que ces lettres de menace pourraient être en lien avec vos participations à des rassemblements. Messieurs, vous vous cantonnez à cet égard dans des suppositions sans fournir des explications suffisamment précises.

Quand bien même les faits que vous avancez seraient liés à un des critères de fond énumérés par les prédits textes, il importe néanmoins de souligner qu'ils sont exempts d'une gravité particulière et suffisante pour pouvoir être assimilés à une persécution au sens des dispositions précitées de la Convention de Genève et de la Loi de 2015.

A cet égard, il convient tout d'abord de réitérer qu'il ressort de vos propos que vous auriez été menacés par des inconnus, alors que vous ne savez pas qui sont les auteurs des deux lettres en question. Leurs motivations restent également inconnues, étant donné que vous ne pouvez que supposer qu'elles auraient un lien avec votre participation à des manifestations alors que vous restez en défaut de soumettre la moindre preuve.

Monsieur (B2), vous avancez que vous auriez participé avec votre frère à des manifestations à partir d'octobre 2019. Vous ajoutez avoir également participé à des rassemblements en 2020 et en juin ou juillet 2021. Monsieur (A2), vous indiquez avoir participé à des démonstrations en juillet et en septembre 2020, ainsi qu'en juin ou août 2021.

Vous déclarez cependant avoir trouvé la première lettre dans la cour de votre maison le 13 août 2021 et la seconde lettre dans votre taxi le 20 août 2021, soit plus ou moins deux années après le début de votre participation à des manifestations, respectivement celles de vos fils. Le fait qu'aucun autre incident ne serait survenu pendant tout ce temps prouve que votre situation n'est pas d'une gravité telle que vous tentez de le faire croire.

A cela s'ajoute que vous restez en défaut de préciser le contenu exact de ces lettres, vos propos restent vagues et peu étayés. En effet, vous vous contentez uniquement de répéter qu'il se serait agi de menaces de mort et que la seconde lettre aurait contenu trois balles.

Monsieur (A2), le fait de tenter de justifier ce manque de connaissance en alléguant que vous ne seriez pas très lettré ne saurait infirmer ces constats.

Messieurs, il sied de conclure que le simple fait que vous auriez découvert deux lettres contenant des menaces écrites proférées par des inconnus dont les motivations restent aussi inconnues, sans qu’aucun autre fait concret ne soit survenu, est exempt d’une gravité particulière et suffisante pour être qualifié d’acte de persécution.

Même à supposer que ces faits seraient suffisamment graves pour être qualifiés d’actes de persécution, quod non, notons qu’une persécution commise par des tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce.

Monsieur (B2), il ressort de façon claire et non équivoque de vos déclarations que vous ne vous seriez à aucun moment personnellement adressé aux autorités irakiennes, de sorte que vous restez en défaut de démontrer concrètement que l’Etat ou d’autres organisations étatiques présentes sur le territoire de votre pays d’origine ne peuvent ou ne veulent pas vous accorder une protection adéquate.

Monsieur (A2), vous affirmez que vous auriez dénoncé la seconde lettre de menace que vous auriez trouvé dans votre voiture en 2021 en vous adressant à la police et en déposant une plainte contre inconnu. Vous évoquez également que la police aurait diligenté une enquête et qu’elle se serait déplacée sur place pour inspecter les lieux.

Force est dès lors de constater que la police a clairement fait son travail en enregistrant vos déclarations et en diligentant une enquête, si bien qu’aucun reproche ne saurait être formulé à l’égard des autorités irakiennes lesquelles auraient ainsi exécuté leur mission. Le simple fait que personne n’aurait arrêté, faute d’indices ou de preuves, dans le cadre d’une plainte déposée contre inconnu ne saurait suffire pour établir une quelconque défaillance dans le chef des autorités.

A cet égard, il y a lieu de rappeler que la notion de protection de la part du pays d’origine n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission d’actes de violences, mais suppose des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain degré de dissuasion. Une persécution ne saurait être admise dès la commission matérielle d’un acte criminel, mais seulement dans l’hypothèse où les agressions commises par un groupe de population seraient encouragées par des autorités en place, voire celles-ci seraient incapables d’offrir une protection appropriée.

Au vu de tout ce qui précède, on ne saurait retenir dans votre chef l’existence d’une crainte fondée de persécution.

Partant le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

• Quant au refus du statut conféré par la protection subsidiaire Aux termes de l’article 2 point g) de la Loi de 2015 « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes 1 et 2, n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays » pourra obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire.

L'article 48 définit en tant qu'atteinte grave « la peine de mort ou l'exécution », « la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d'origine » et « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d'un civil en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

L'octroi de la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués soient qualifiés d'atteintes graves au sens de l'article 48 de la Loi de 2015 et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l'article 39 de cette même loi. Or, en l'espèce, force est de constater que ces conditions ne sont pas remplies cumulativement.

Sied de souligner qu'à l'appui de vos demandes de protection subsidiaire, vous invoquez en substance les mêmes motifs que ceux qui sont à la base de vos demandes de reconnaissance du statut de réfugié. Or, sur base des développements et conclusions retenues qui précèdent dans le cadre du rejet du statut de réfugié, vous n'invoquez aucun autre élément additionnel susceptible de rentrer dans le champ d'application de l'article 48 précité.

Ainsi, tout en renvoyant aux arguments développés ci-dessus, force est de constater que vous ne risquez pas de devenir victime d'atteintes graves au sens des prédits textes dans le cas d'un retour dans votre pays d'origine.

Partant, le statut conféré par la protection subsidiaire ne vous est pas accordé.

• Quant à la fuite interne En vertu de l'article 41 de la Loi de 2015, le Ministre peut estimer qu'un demandeur n'a pas besoin de protection internationale lorsque, dans une partie du pays d'origine, il n'y a aucune raison de craindre d'être persécuté ni aucun risque réel de subir des atteintes graves et qu'il est raisonnable d'estimer que le demandeur peut rester dans cette partie du pays.

Ainsi, la conséquence d'une fuite interne présume que le demandeur puisse mener, dans une autre partie de son pays d'origine, une existence conforme à la dignité humaine.

Selon les lignes directrices de l'UNHCR, l'alternative de la fuite interne s'applique lorsque la zone de réinstallation est accessible sur le plan pratique, sur le plan juridique, ainsi qu'en termes de sécurité.

En l'espèce, il ressort à suffisance de vos dires que vous n'auriez pas tenté de vous réinstaller dans une autre ville ou région de votre pays d'origine.

Monsieur (A2), vous avancez : « Man [kann] einen überall im Irak auffinden. Sie haben bereits viele Personen innerhalb des Landes verfolgt und umgebracht » (p.8/11 de votre rapport d'entretien du 8 avril 2022).

Monsieur (B2), vous ajoutez: « Wir konnten dies nicht. Wir würden überall hin verfolgt werden, egal ab in … oder … » (p.8/11 de votre rapport d'entretien du 18 janvier 2022).

Madame (A1), vous indiquez également : « Wir konnten es nicht, weil sie uns überall auffinden konnten » (p.10/12 de votre rapport d'entretien du 17 janvier 2022).

Or, ces motifs ne constituent pas un obstacle à une réinstallation dans votre pays d'origine. Madame et Messieurs, vous déclarez tous être nés et avoir vécu à …, être d'ethnie arabe et de confession musulmane chiite. Vous auriez dès lors pu vous installer dans une autre région de la République d'Irak, notamment dans le sud de votre pays d'origine.

Il convient de remarquer dans ce contexte que les provinces de Kerbala, Najaf, Muthanna, Babil, Missan, Qadissiya, Nasiriya et Bassora sont des régions majoritairement chiites. Il ressort des informations en nos mains qu'il n'existe aucun risque réel pour un citoyen irakien ordinaire de voyager entre … et les régions du sud de l’Irak à condition d'être en possession des documents appropriés, respectivement des documents d'identité valables. Ces provinces ne sont non seulement accessibles par voie terrestre, mais de nombreuses compagnies aériennes proposent des vols domestiques et même internationaux.

Vu la densité de la population dans les grandes villes de ces régions, le fait que les incidents que vous relatez étaient des cas isolés et que la crainte que vous exprimez s'avère être tout au plus un sentiment général d'insécurité, il appert que vous ne soulevez aucune raison valable qui puisse justifier l'impossibilité d'une fuite interne.

Vos demandes de protection internationale sont dès lors refusées comme non fondées.

Suivant les dispositions de l'article 34 de la Loi de 2015, vous êtes dans l'obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera coulée en force de chose décidée respectivement en force de chose jugée, à destination de l'Irak, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisée à séjourner. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 octobre 2023, les consorts (AA) firent introduire un recours tendant à la réformation de la décision du ministre du 28 août 2023 portant refus de faire droit à leur demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 4 avril 2025, les consorts (AA) ont régulièrement relevé appel du jugement du 4 mars 2025.

Moyens des parties Les consorts (AA) précisent être de nationalité irakienne. Monsieur (A2) affirme avoir participé à des manifestations en Irak avec ses deux fils, (B2) et (B3), en 2020 et 2021. Ces manifestations auraient été organisées contre le chômage, la corruption et la déliquescence des services publics. Il indique avoir exprimé librement sa désapprobation du gouvernement en place dans une cafétéria où il retrouvait ses amis pour discuter. Ses fils auraient participé à des manifestations plus fréquemment que lui et pourraient être qualifiés de militants actifs. Ils auraient passé une nuit sur la place Tahrir, place qui serait l’endroit emblématique pour les contestations et l’épicentre des révoltes populaires en Irak. Les appelants déclarent que le 13 août 2021, ils auraient trouvé, dans leur jardin, une lettre dans laquelle ils auraient été menacés de mort en raison de leur participation à des manifestations. Prenant au sérieux ces menaces, ils auraient déménagé dans la nuit dans leur maison de vacances. Le 20 août 2021, une seconde lettre de menaces aurait été glissée dans le taxi de Monsieur (A2) lors de son absence du véhicule. Cette lettre aurait été accompagnée de trois cartouches qui seraient destinées à chacune des personnes ayant pris part aux manifestations. Monsieur (A2) précise avoir porté plainte au poste de police et explique qu’une enquête aurait été confiée à un juge d’instruction.

Cependant, l’enquête en question aurait été vaine et l’affaire n’aurait connu aucune suite.

N’ayant obtenu aucune information sur le déroulement de l’affaire et voyant qu’il n’avait aucune chance d’être protégé de « ces personnes », Monsieur (A2) précise avoir quitté l’Irak en date du 12 octobre 2021 accompagné de sa famille, craignant pour sa vie et celle de ses proches. Les appelants déclarent avoir, après un long périple, déposé leur demande de protection internationale au Luxembourg en date du 26 octobre 2021 et indiquent être visés par un mandat d’arrêt qui aurait été émis en août 2022 à leur encontre, soit à un moment où ils avaient déjà quitté leur pays d’origine.

Selon les appelants, ce serait à tort que le statut de réfugié ne leur aurait pas été accordé par les premiers juges, alors que leurs craintes de persécutions en Irak seraient liées aux manifestations auxquelles ils auraient participé, de telle sorte à constituer une proclamation de leurs opinions politiques comme ils s’en seraient clairement expliqués lors de leurs auditions.

Ils y auraient indiqué que leur participation aux manifestations serait la cause de ces lettres de menaces. Il serait ainsi erroné de dire qu’ils ignoreraient les raisons de ces menaces de mort.

Ils font également état d’individus qui se seraient introduits dans leur maison et l’auraient brûlée après en avoir fait sortir les occupants, à savoir des membres de leur famille. Ces individus auraient, à cette occasion, désigné les consorts (AA) comme des participants à des manifestations et comme incitant « le peuple contre les partis ». Au regard de la situation en Irak, où la disparition forcée ne serait pas considérée comme un crime, les lettres de menaces reçues par eux seraient suffisantes pour démontrer leur crainte de se faire tuer et ces menaces seraient suffisamment graves pour relever du champ d’application du statut de réfugié.

Ils ajoutent qu’il serait démesuré de devoir attendre que ces menaces soient mises à exécution pour estimer leur gravité comme étant suffisante. Les auteurs de ces menaces sauraient pertinemment qu’ils ne risqueraient aucune conséquence, de sorte qu’il serait évident que les menaces leurs adressées ne seraient que « la première étape », étant donné que ces individus bénéficieraient depuis des années d’une impunité de fait et de certains pouvoirs comme l’indiquerait une publication d’Amnesty International du 5 juin 2023 intitulé « iraq authorities must act to reveal fate of 643 men and boys abducted by government-linked militias ». Il s’agirait de « personnes privées qui se réunissent en organisation et sont reconnues par le pouvoir irakien ». Les appelants soulignent que depuis mars 2018, les milices irakiennes se seraient vues reconnaître les mêmes droits et privilèges que les forces armées conventionnelles. Les actes invoqués par eux justifieraient leurs craintes de subir des actes de persécution de leur part, dans la mesure où l’Etat irakien ne leur offrirait pas de protection suffisante contre les agissements de ces milices. Etant donné qu’aucune mesure suffisante ne serait prise par les autorités irakiennes pour lutter contre les exactions perpétrées par les milices dans le pays, les auteurs de ces persécutions auraient la qualité d’agents de persécution au sens de la loi. Les appelants en concluent qu’il n’existerait aucune « bonne raison » de penser que les faits subis par eux ne se reproduiront pas en cas de retour en Irak, au motif que leur maison aurait été brûlée et qu’un mandat d’arrêt aurait été délivré à leur encontre du fait de leur participation à des manifestations. Ils seraient ainsi confrontés à un risque d’interpellation en cas de retour en Irak et risqueraient jusqu’à 7 ans de prison pour avoir manifesté contre le régime en place.

En ce qui concerne la protection subsidiaire, les consorts (AA) considèrent que ce statut aurait dû leur être accordé par les premiers juges, vu que les faits relatés par eux témoigneraient d’un risque réel de subir des atteintes graves en cas de retour en Irak et plus particulièrement l’emprisonnement et la torture. Ils estiment ne pas être en sécurité sur tout le territoire irakien et que les possibilités de fuite interne ne devraient pas être appréciées à partir de leur appartenance à la population chiite, vu que les actes de persécution qu’ils subiraient seraient motivés par leurs opinions politiques et non par leur religion et croyances.

Les appelants contestent finalement l’ordre de quitter le territoire en faisant valoir qu’il serait contraire à l’article 129 de la loi modifiée du 29 août 2008 concernant la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après la « loi du 29 août 2008 », dans la mesure où un retour en Irak impliquerait dans leur chef des persécutions ou traitements dégradants et inhumains.

Enfin, dans le dispositif de la requête d’appel, les appelants renvoient encore à la motivation du recours en réformation déposé devant le tribunal administratif en date du 2 octobre 2023.

L’Etat, pour sa part, conclut à la confirmation pure et simple du jugement dont appel à partir des développements et conclusions du tribunal y contenus, tout en se référant à son mémoire déposé en première instance ainsi qu’aux pièces y versées.

Analyse de la Cour A titre liminaire, la Cour rappelle qu’elle est saisie dans la limite des prétentions des parties appelantes telles que concrétisées à travers les moyens invoqués dans leur requête, de sorte que sauf hypothèse des moyens à soulever d’office, elle n’est pas amenée à prendre position par rapport aux moyens qui ne figurent pas dans les conclusions d’appel et n’est pas tenue de répondre aux conclusions de première instance auxquelles se réfèrent simplement les conclusions d’appel. En effet, les moyens d’appel sont appelés à se diriger contre le jugement dont appel, de sorte à devoir être formulés concrètement par rapport aux dispositions dudit jugement faisant grief dans l’optique de l’appelant. La Cour ne saurait dès lors tenir compte des moyens simplement réitérés par les appelants par référence aux écrits de première instance, lesquels, par la force des choses, se dirigent contre la décision de l’administration initialement critiquée et non pas contre le jugement dont appel ayant statué par rapport à cette décision (cf. Cour adm. 6 avril 2006, n° 20736C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 1203 et les autres références y citées).

Dans ces conditions, la Cour n’est en l’espèce pas utilement appelée à analyser les moyens de première instance auxquels les appelants ont simplement renvoyé dans le dispositif de la requête d’appel, sans développement circonstancié en instance d’appel, et ne prendra position que par rapport aux moyens effectivement développés dans le cadre des écrits déposés en instance d’appel.

La notion de « réfugié » est définie par l’article 2, sub f), de la loi du 18 décembre 2015 comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner (…) ».

Il se dégage de la lecture combinée des articles 2, sub f), 2, sub h), 39, 40 et 42, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 que doit être considérée comme réfugié toute personne qui a une crainte fondée d’être persécutée et que la reconnaissance du statut de réfugié est notamment soumise aux conditions que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond y définis, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe (1), et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 39 et 40, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles sont à qualifier comme acteurs seulement dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 39 ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions et, enfin, que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son pays d’origine.

La loi du 18 décembre 2015 définit la personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle était renvoyée dans son pays d'origine, elle « courrait un risque réel de subir des atteintes graves définies à l'article 48 », ledit article 48 loi énumérant en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine; des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ». L'octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis à la double condition que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c) de l'article 48 de la loi du 18 décembre 2015, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 39 et 40 de cette même loi, étant relevé que les conditions de la qualification d'acteur sont communes au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire.

Dans la mesure où les conditions sus-énoncées doivent être réunies cumulativement, le fait que l’une d’entre elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur de protection internationale ne saurait bénéficier du statut de réfugié ou de celui conféré par la protection subsidiaire.

Il s’y ajoute que la définition du réfugié contenue à l’article 2, sub f), de la loi du 18 décembre 2015 retient qu’est un réfugié une personne qui « craint avec raison d’être persécutée », tandis que l’article 2, sub g), de la même loi définit la personne pouvant bénéficier du statut de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle était renvoyée dans son pays d’origine, elle « courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48 », de sorte que ces dispositions visent une persécution, respectivement des atteintes graves futures sans qu’il n’y ait nécessairement besoin que le demandeur de protection internationale ait été persécuté ou qu’il ait subi des atteintes graves avant son départ dans son pays d’origine. Par contre, s’il s’avérait que tel avait été le cas, les persécutions ou atteintes graves antérieures d’ores et déjà subies instaurent une présomption réfragable que de telles persécutions ou atteintes graves se reproduiront en cas de retour dans le pays d’origine aux termes de l’article 37, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015, de sorte que, dans cette hypothèse, il appartient au ministre de démontrer qu’il existe de bonnes raisons que de telles persécutions ou atteintes graves ne se reproduiront pas. L’analyse du juge devra porter en définitive sur l’évaluation, au regard des faits que le demandeur avance, du risque d’être persécuté ou de subir des atteintes graves qu’il encourrait en cas de retour dans son pays d’origine.

A l’instar de l’analyse détaillée fournie par les premiers juges, la Cour constate que les craintes formulées par les appelants sont de deux ordres et se fondent sur leurs craintes d’être persécutés par les autorités irakiennes, qui seraient à leur recherche comme en témoignerait l’existence d’un mandat d’arrêt, et par les auteurs de deux lettres de menaces leur adressées.

L’examen des éléments du dossier, ensemble les moyens présentés en instance d’appel, amène la Cour à la conclusion, à l’instar des premiers juges, que les faits et considérations avancés par les appelants ne sont pas de nature à justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans leur chef, ni par ailleurs celle d’une protection subsidiaire.

En ce qui concerne le statut de réfugié, c’est pour de justes motifs que les premiers juges ont retenu que les appelants manquent de rattacher leurs craintes à un des motifs d’octroi de ce statut. La Cour constate plus particulièrement l’insuffisance d’éléments susceptibles de mettre en évidence des persécutions passées ou futures du fait de leurs opinions politiques. En effet, comme souligné par le tribunal, les consorts (AA) ignorent l’identité des auteurs des courriers de menace reçus et se limitent à supposer que ces courriers proviendraient de membres d’une milice irakienne même s’ils affirment lors de leurs auditions ne pas connaître les auteurs de ces courriers ni se souvenir précisément du contenu de ces lettres de menaces.

Étant donné que le contenu exact et les auteurs des lettres de menace de même que la motivation de ceux-ci leur sont inconnus et que les appelants ne fournissent pas d’éléments convaincants qui permettraient de rattacher les lettres à une activité politique de leur part, la Cour considère que les faits mis en avant par les appelants ne sont pas rattachables à un des critères de persécution prévus par la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social.

En outre, concernant la crainte de persécutions à l’initiative des autorités irakiennes et après analyse du document remis par les consorts (AA) intitulé « Mandat d’arrêt et d’enquête », dont l’auteur serait le « Conseil supérieur de la magistrature » de la République d’Irak, les premiers juges ont retenu, à juste titre, l’absence de preuve que les appelants feraient l’objet en Irak de poursuites du fait de leurs opinions politiques, mais qu’il s’agit simplement d’un document témoignant, tout au plus, de l’existence d’une plainte non spécifiée déposée à leur encontre et par rapport à laquelle ils auraient été invités à prendre position.

En effet, indépendamment de la question de l’authenticité de cette pièce, soulevée à bon escient par les premiers juges, la Cour retient qu’en tout état de cause, le contenu de ce document ne permet pas de le rattacher à une quelconque activité politique des appelants ou à un autre critère de rattachement à la Convention de Genève précitée, les appelants n’expliquant pas pour quel motif le mandat d’arrêt aurait été émis à leur encontre, la référence légale y indiquée n’étant pas autrement précisée par les appelants.

S’agissant de la protection subsidiaire, la Cour rejoint encore l’analyse des premiers juges à cet égard et la fait sienne, en ce qu’ils ont retenu qu’il n’est pas établi que les appelants se trouvent dans le collimateur d’une quelconque milice irakienne, les auteurs des lettres de menaces n’étant ni identifiés ni identifiables, que de toute façon un défaut de protection des autorités irakiennes n’est pas établi et qu’une fuite interne dans les provinces majoritairement chiites situées au sud de l’Irak serait possible, ces considérations les ayant menés à la conclusion que les appelants ne remplissent pas les condition d’octroi d’une protection subsidiaire sur le fondement de l’article 48, points a) et b), de la loi du 18 décembre 2015, cette analyse et cette conclusion n’étant pas utilement remises en cause par les considérations avancées en instance d’appel par les appelants.

A défaut, par ailleurs, de la preuve concrète d’une situation prévalant actuellement en Irak et, plus particulièrement, dans la ville d’origine des appelants, correspondant à un contexte de violence aveugle dans le cadre d’un conflit armé interne ou international au sens de l’article 48, point c), de la loi du 18 décembre 2015, la demande tendant à l’obtention du statut conféré par la protection subsidiaire a également été rejetée à bon escient.

Il suit de ce qui précède que c’est à bon droit que le ministre, puis les premiers juges, ont rejeté la demande de protection internationale prise en son double volet et le jugement est à confirmer sous ce rapport.

Enfin, concernant l’ordre de quitter le territoire, dès lors que l’article 34, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 dispose qu’« une décision du ministre vaut décision de retour (…) » et qu’en vertu de l’article 2, sub q), de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire », l’ordre de quitter est à considérer comme constituant la conséquence automatique du refus de protection internationale, avec comme conséquence pour le cas d’espèce, où le rejet ministériel de la demande de protection internationale vient d’être déclaré justifié dans ses deux volets, que l’ordre de quitter n’est pas sérieusement critiquable.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’invocation de l’article 129 de la loi du 29 août 2008 qui dispose que : « L'étranger ne peut être éloigné ou expulsé à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont gravement menacées ou s'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ou à des traitements au sens des articles 1er et 3 de la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

En effet, dans la mesure où la Cour vient de constater que les craintes invoquées par les appelants ne véhiculent pas un risque réel de subir des atteintes graves, le renvoi des appelants en Irak ne saurait être incompatible avec ledit article 129, précité.

Il s’ensuit que le jugement est encore à confirmer en ce qu’il a refusé de réformer cet ordre.

L’appel n’étant dès lors pas fondé, il y a lieu d’en débouter les appelants et de confirmer le jugement entrepris.

PAR CES MOTIFS la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause, reçoit l’appel du 4 avril 2025 en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute les appelants, partant confirme le jugement entrepris du 4 mars 2025, donne acte aux appelants qu’ils déclarent bénéficier de l’assistance judiciaire.

condamne les appelants aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par:

Serge SCHROEDER, premier conseiller, Lynn SPIELMANN, premier conseiller, Annick BRAUN, conseiller, et lu à l’audience publique du 6 août 2025 au local ordinaire des audiences de la Cour par le premier conseiller Serge SCHROEDER, en présence du greffier de la Cour Patrick WIES.

s. WIES s. SCHROEDER Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 8 août 2025 Le greffier de la Cour administrative 13


Synthèse
Numéro d'arrêt : 52648C
Date de la décision : 06/08/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2025-08-06;52648c ?

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