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30/01/2025 | LUXEMBOURG | N°50850C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 30 janvier 2025, 50850C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50850C ECLI:LU:CADM:2025:50850 Inscrit le 1er août 2024 Audience publique du 30 janvier 2025 Appel formé par Monsieur (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 26 juin 2024 (n° 48541 du rôle) en matière de résiliation de contrat Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 50850C du rôle, déposée au greffe de la Cour administrative le 1er août 2024 par Maître Laurent HEISTEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, d

irigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Lux...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50850C ECLI:LU:CADM:2025:50850 Inscrit le 1er août 2024 Audience publique du 30 janvier 2025 Appel formé par Monsieur (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 26 juin 2024 (n° 48541 du rôle) en matière de résiliation de contrat Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 50850C du rôle, déposée au greffe de la Cour administrative le 1er août 2024 par Maître Laurent HEISTEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 26 juin 2024 (n° 48541 du rôle) ayant rejeté son recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de (i) « la décision du 28 novembre 2022 qui a résilié le contrat de travail du requérant avec effet immédiat », (ii) « la décision du 28 novembre 2022 en ce que le requérant aurait dû être le candidat choisi à l’appel à candidatures et nommer le requérant en tant que chef de section FS3 en 2019, à défaut ordonner la nomination du requérant à un poste au moins équivalent à celui de chef de section FS3, correspondant tant à ses compétences qu’à son expérience professionnelle », (iii) à voir « condamner la BCL au paiement d’arriérés de rémunérations au profit de Monsieur (A) au titre du préjudice matériel subi, à partir de la date de la résiliation de son contrat de travail à savoir le 28 novembre 2022 », et (iv) à voir « ordonner que des sanctions disciplinaires soient prises à l’égard de Messieurs (B), (C) et (D) au regard des faits de harcèlement qui leur sont reprochés sur la personne de Monsieur (A) », tout en rejetant les demandes respectives des parties en allocation d’une indemnité de procédure et en condamnant Monsieur (A) aux frais et dépens de l’instance ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilles HOFFMANN, demeurant à Luxembourg, du 6 août 2024, portant signification de la requête d’appel à l’établissement public BANQUE CENTRALE DU LUXEMBOURG, établi et ayant son siège social à L-2983 Luxembourg, 2, boulevard Royal, représenté par ses organes statutaires en fonctions ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative en date du 15 octobre 2024 par Maître Marisa ROBERTO, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à 1Luxembourg, au nom de l’établissement public BANQUE CENTRALE DU LUXEMBOURG, préqualifié ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 15 novembre 2024 par Maître Laurent HEISTEN au nom de l’appelant ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative en date du 13 décembre 2024 par Maître Marisa ROBERTO au nom de l’établissement public BANQUE CENTRALE DU LUXEMBOURG, préqualifié ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Lejla MUJKIC, en remplacement de Maître Laurent HEISTEN, et Nathalie BORON, en remplacement de Maître Marisa ROBERTO, en leurs plaidoiries à l’audience publique du 7 janvier 2025.

Par courrier recommandé du 3 juin 2022, Monsieur (A), employé de l’Etat auprès de l’établissement public BANQUE CENTRALE DU LUXEMBOURG, ci-après « la BCL », se vit informer, en application de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, que la BCL envisageait de procéder à la résiliation de son contrat de travail à durée indéterminée en tant que « Project Portfolio Manager », ledit courrier ayant été libellé comme suit :

« (…) En application de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’État et des communes, nous tenons à vous informer que la Banque centrale du Luxembourg (la BCL ou la Banque) envisage de procéder à la résiliation du contrat de travail à durée indéterminée, par lequel vous avez été engagé sous le statut assimilé d’un employé de l’État pour un poste de « Project Portfolio Manager » (pièces no. 1 à 3).

Divers motifs réels et sérieux nous paraissent être de nature à ébranler la confiance qui doit présider à notre relation de travail dans l’intérêt du bon fonctionnement des services que notre Banque est tenue d’assurer dans le cadre de ses missions de service public, ce qui justifierait la résiliation de votre contrat de travail sur la base de l’article 7.1 de la loi du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat, telle que modifiée (lesquels s’appliquent à vous le cas échéant par voie d’analogie en vertu de l’article 14(3)(b) de la loi du 23 décembre 1998 relative au statut monétaire et à la Banque centrale du Luxembourg, telle que modifiée).

Tout d’abord, alors que votre position de « Project Portfolio Manager » suppose que vous collaboriez étroitement et efficacement avec les agents de la Banque impliqués dans les projets dont la gestion vous est confiée, vous avez rencontré des difficultés relationnelles avec plusieurs collègues, en ce compris avec Monsieur (C), chef de la section FS3 - Stratégie et Projets, sous la responsabilité duquel vous avez été affecté après la réorganisation du département « Finance et Stratégie » en trois sections. Plusieurs collègues, dont votre chef de section, se sont plaints de 2votre attitude hautaine, de vos commentaires blessants quant à la qualité de leurs prestations, de votre rejet de toute forme d’autorité, ainsi que de votre refus d’exécuter les instructions qui vous sont données (pièces no. 4).

Une telle attitude nous paraît mettre en péril votre bonne intégration dans la Banque, ainsi, qu’en conséquence, votre capacité d’agir dans la qualité du « Project Portfolio Manager » pour laquelle vous avez été engagé.

Par ailleurs, la quantité du travail que vous avez effectivement fournie depuis votre arrivée à la BCL en avril 2016 nous paraît très réduite, eu égard à l’expertise de près de vingt ans dont vous vous êtes prévalu dans le processus de candidature, ainsi que des nombreuses heures durant lesquelles vous vous êtes connecté à distance durant la pandémie de la Covid-19. Les « Work Packages » que Monsieur (C) vous a préparés pour vous inciter à travailler davantage dans l’intérêt du service sont d’ailleurs, pour la plupart, restés lettres mortes (pièces no. 4 et 5). De tels comportements paraissent accréditer, dans votre chef, un manque de respect des instructions qui vous sont données, ainsi que l’inexécution des tâches qui vous sont confiées.

De plus, alors que la Direction a décidé en décembre 2021 de vous affecter à la section FS2 - Budget, contrôle de gestion et organisation, sous la direction de Monsieur (I), en qualité de « Enterprise Architect Consultant » pour contribuer à plein temps à la mise en œuvre de la pratique d’« Architecture d’entreprise » au sein de la Banque, dans la droite ligne d’une expertise que vous aviez développée tandis que vous travailliez pour la Banque centrale européenne, vous avez continuellement contesté les conditions d’un tel transfert, exigeant de disposer d’une ligne de rapport direct à la Direction et d’une équipe pour vous assister dans cette tâche (pièces no. 6, 7 et 8). Le 18 janvier 2022, vous avez été jusqu’à affirmer que la position à laquelle la Direction avait décidé de vous transférer n’était pas conforme à ce « qui a été discuté et convenu » et vous avez exigé qu’une telle position « soit modifiée aussitôt que possible » (pièce no. 9). Ce faisant, vous entendez imposer à la Direction vos desiderata quant à la teneur des activités que vous étiez disposé à effectuer, comme vous l’aviez déjà fait en 2019, lorsque vous cherchiez à modifier la teneur de la fiche de fonction de votre poste (pièce no. 10). De tels comportements nous paraissent contraires aux devoirs de bonne conduite et de disponibilité.

Enfin, alors que les agents avaient été invités à travailler sur site au moins deux jours sur une période de 15 jours à compter du 8 novembre 2021, vous nous avez informés le 9 novembre 2021 que vous devriez continuer à travailler depuis votre domicile à cause de problèmes de dos, pour lesquels votre médecin traitant avait établi un certificat attestant d’une blessure en spirale osseuse, recommandant un ajustement de la position assise selon les douleurs dorsales (« (…) due to a bony spiral injury (…) it would be highly advisable for the patient to work from home where he can adjust his sitting position accordingly to his back pain (…) » (pièce no. 11).

En application de l’article 6 alinéa 3 du règlement grand-ducal du 5 mars 2004 et conformément à l’article 16 de la loi modifiée du 16 avril 1979 instituant l’obligation de se soumettre à tout examen médical ordonné dans l’intérêt du personnel ou dans l’intérêt du service, vous avez été convié à une visite auprès de l’Administration des services médicaux du secteur public - Division de la santé au travail du secteur public, le 3 janvier 2022, suite à une demande du Département Ressources Humaines de la BCL (pièce no. 12).

3 Alors que l’avis du médecin responsable du 3 janvier 2022 (pièce no. 13) indique que vous vous êtes présenté au rendez-vous et que vous avez été invité à fournir des documents médicaux afin de pouvoir procéder à l’examen médical et à une évaluation définitive de votre état de santé et des conséquences sur votre situation professionnelle avec un retour éventuel au bureau, vous n’avez visiblement toujours pas donné suite à cette demande, comme l’a confirmé le secrétariat de l’Administration des services médicaux du secteur public - Division de la santé au travail du secteur public dans un courriel envoyé le 23 mars 2022, à la demande du département Ressources Humaines (pièce no. 14).

A défaut d’avoir communiqué au médecin responsable les documents demandés, vous nous mettez dans l’impossibilité d’évaluer votre aptitude à effectivement revenir travailler sur site, ce qui faciliterait, au demeurant, l’exécution de vos tâches au sein du département « Finance et Stratégie ».

Votre silence sur votre état de santé suscite d’autant plus de défiance de notre part, que le 6 mars 2022, vous avez adressé à Monsieur (I), chef adjoint du département FS, un message « Threema Work » par lequel vous demandiez un congé pour les 7 et 8 mars 2022 pour vous rendre en Ukraine en voiture pour y secourir des réfugiés (« I am leaving for Ukraine at midnight with a friend to share the driving. (…) It’s about 16hrs each way ») (pièce no. 15).

Nous observons par ailleurs que depuis le 15 mai dernier, et contrairement aux demandes formulées dans les communications de la direction publiées sur notre intranet « BCL connect » et transmises par message « Threema Work », vous ne vous êtes pas présenté sur site afin d’y travailler un minimum de deux jours par semaine.

Dès lors que les faits précités sont de nature à mettre en péril la confiance qui constitue une condition nécessaire à la poursuite de nos bonnes relations de travail, nous envisageons par conséquent de résilier votre contrat de travail.

Conformément aux dispositions de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’État et des communes, vous disposez d’un délai de 8 jours à compter du jour de la réception de la présente pour présenter vos observations écrites à propos de ce qui précède.

Vous pouvez par ailleurs solliciter dans le même délai un entretien afin d’être entendu en personne dans vos observations.

Copie de votre dossier personnel ainsi que des documents mentionnés dans ce courrier sont annexés à la présente. (…) ».

A la suite d’une entrevue en date du 29 juin 2022 lors de laquelle Monsieur (A) fut entendu en ses observations, la BCL lui notifia, par courrier recommandé du 28 novembre 2022, la résiliation avec effet immédiat de son contrat de travail sur base des considérations suivantes :

4« (…) En application de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’État et des communes, nous vous avions informé par une lettre du 3 juin 2022 signée par Messieurs (E) et (D), Directeurs de la Banque centrale du Luxembourg (la « Banque » ou la « BCL »), que la Banque envisageait de procéder à la résiliation de votre contrat de travail pour des motifs exposés dans le même courrier.

A votre demande, Monsieur (D), accompagné de Madame (F), chef des Ressources humaines et Monsieur (G), chef du département Audit interne, vous ont reçu - vous étiez accompagné de Mme (H) (Confédération Générale de la Fonction Publique - CGFP) - lors d’un entretien organisé le 29 juin 2022 de 10 heures 10 à 11 heures 30, pendant lequel vous avez pu nous faire part de vos observations.

Monsieur (G) a établi un procès-verbal de cette réunion (pièce no. 1) qui vous a été communiqué par email du 9 août 2022 et à propos duquel vous n’avez pas fait part d’observations, ni suite à son email de rappel du 17 août 2022, vous invitant à nous transmettre vos observations éventuelles. Dans un email du 8 septembre 2022, Monsieur (G) a indiqué qu’en l’absence de commentaires reçus suite à son email du 17 août 2022, le procès-verbal était à considérer comme étant finalisé.

Nous vous informons que la Direction de la BCL a pris la décision de résilier, avec effet immédiat, votre contrat de travail sur base des motifs suivants, et nous vous notifions dès lors par la présente cette décision.

En 2015, la BCL a indiqué rechercher, dans une annonce publiée sur son site internet ainsi que d’autres sites, une position à plein temps de « Project Portfolio Manager / Project Support (BA/MA) (m/f) (ref.: FS/016/15) affecté au département « Finance et stratégie internes » (FS) et rapportant au chef de section en vue d’assurer la mise en œuvre d’un portefeuille de projets pluriannuels de la BCL (« The Project Portfolio Manager will report directly to the Head of Section and will assist implementing BCL’s multiannual project portfolio »).

Compte tenu de l’accroissement progressif du champ de ses missions et de ses tâches, la BCL - qui compte désormais plus de 400 agents - intervient dans des domaines aussi divers que la politique monétaire, la supervision des liquidités, le mécanisme de supervision unique, la surveillance des systèmes de paiement et de règlement titres ainsi que des instruments de paiement et doit collecter des informations statistiques toujours plus nombreuses dans tous ces domaines.

De ce fait, la Banque a dû, et continue de devoir lancer et gérer des projets de grande ampleur pour moderniser ses outils informatiques, opérationnels et technologiques.

Le 5 novembre 2015 vous avez posé votre candidature pour ce poste et avez transmis, à cet effet, votre curriculum vitae ainsi qu’une lettre de motivation.

Vous vous êtes prévalu, dans ce contexte, de votre expérience de plus de 20 ans en matière gestion de programme et de projets dans le monde des banques centrales, en particulier pour la Banque centrale européenne (BCE) pour laquelle vous aviez travaillé durant 20 ans, notamment pour la mise en place des procédures de gouvernance et de contrôle des projets ainsi que des 5standards européens pour la gestion de portefeuille de projets. Vous avez également évoqué des projets de transformation digitale et votre statut d’architecte d’entreprise certifié selon les standards « TOGAF ». Vous avez fait état de votre expérience de gestion d’équipes pour plus de 50 personnes. Vous avez également mentionné vos titres de « Fellow of the chartered Management Institute », « Member of the Institute of Directors », « Member of the British Computer Society » ainsi que « Member of the Association of Enterprise Architects ».

Vu votre parcours professionnel et votre enthousiasme à l’idée de pouvoir contribuer à la mise en place d’une collaboration transversale dans le cadre de la gestion du portefeuille de projets de notre Banque, cette dernière vous a proposé un contrat de travail sous régime d’assimilation des employés de l’Etat pour une durée de deux années à compter du 1er avril 2016, que vous avez accepté (pièce no. 2). A l’issue de ces deux premières années passées au sein de la BCL, vous avez accepté un contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 2018 (pièce no. 3).

Conformément à l’annonce précitée, vous avez été affecté dans la section « Stratégie », au sein du département « Finance et Stratégie », sous la direction de Monsieur (I) au titre de « Project Portfolio Manager » (pièce no. 4), sans que vous n’ayez même cherché à remettre en cause le titre ou le lien hiérarchique, que ce soit au moment des discussions préalables à votre engagement en 2016 ou l’offre que vous nous avons faite de disposer d’un contrat à durée indéterminée, en 2018.

Suite à la réorganisation de ce département intervenue avec effet au 1er avril 2019 et compte tenu de vos responsabilités en matière de gestion de projets, vous avez été intégré dans la section « Stratégie et Projets » (FS3) sous la direction de Monsieur (C).

Comme vous l’avez reconnu au cours de l’entretien du 29 juin dernier, vous avez rencontré d’importantes difficultés relationnelles avec Monsieur (C). Vous avez toutefois prétendu n’avoir rencontré de difficultés relationnelles avec aucun autre agent dans la Banque. En tout état de cause, vous estimez que les difficultés rencontrées avec Monsieur (C) trouveraient leur origine dans le fait, d’une part, que votre position de « Project Portfolio Manager » serait une fonction de conseil (« advisory function »), et, selon vous, incompatible avec tout lien hiérarchique et, d’autre part, que Monsieur (C), dont le profil est, selon vous, essentiellement celui d’un comptable, n’aurait pas disposé des compétences et de la formation requise pour assurer la direction de la section « Stratégie et Projets ». Lors dudit entretien, vous avez également déclaré que vu votre expérience et votre expertise dans le domaine de la gestion de projets, vous auriez dû être nommé chef de la section « Stratégie et Projets » (FS3), en lieu et place de M. (C).

Avant toute chose, nous vous rendons attentif au fait que l’annonce publiée en 2015 pour le poste de « Project Portfolio Manager », pour lequel vous avez transmis votre candidature, indiquait clairement une ligne de rapport hiérarchique au chef de section.

Au vu de cet élément de gouvernance, dont vous aviez été parfaitement informé et que vous aviez accepté en signant votre premier contrat à durée déterminée pour deux ans ainsi que votre second contrat à durée indéterminée, vous ne pouvez maintenant, soit près de 7 années après la parution de l’annonce à laquelle vous avez répondu, prétendre que le poste qui vous a été confié serait incompatible avec tout lien hiérarchique ou qu’il y aurait eu un quelconque « malentendu » 6quant à de prétendues responsabilités managériales que vous vous attendiez à exercer dès votre arrivée à la BCL en 2016.

Nous contestons également votre affirmation selon laquelle vous n’auriez rencontré de difficultés personnelles qu’avec Monsieur (C). Comme Monsieur (J), Directeur de la BCL jusqu’au 31 mai 2021, l’a indiqué dans un email qu’il vous a adressé le 18 mai 2020 (pièce no. 5), si vos compétences techniques, telles que mises en avant dans votre curriculum et vos divers titres, tous reproduits sur la page intranet de la Banque sous votre profil, ne sont nullement mises en cause, vous vous êtes montré incapable de dialoguer de manière constructive avec vos collègues.

Comme relevé dans l’email susmentionné de Monsieur (J), vous vous êtes seulement borné à proposer de « copier/coller » les modèles opérationnels développés à la BCE, alors que la Banque - de taille bien plus modeste - dispose d’outils opérationnels différents ainsi que d’une culture d’institution tout à fait propre.

En adoptant une attitude qui a souvent été perçue comme distante et condescendante, vous avez compromis la bonne coopération avec vos collègues, laquelle constitue une condition nécessaire pour pouvoir analyser, concevoir et mettre en œuvre, de manière conjointe, des outils adaptés à la Banque.

Plutôt que de vous mettre à l’écoute des besoins et de chercher à bâtir des solutions pragmatiques élaborées à partir des outils en place, vous avez persisté à vouloir imposer des modèles abstraits développés dans des institutions toutes autres.

Contrairement à ce que vous avez affirmé lors de notre réunion du 29 juin dernier, ceci a occasionné des frictions avec d’autres agents que Monsieur (C). Comme le fait apparaître des courriels des 18 novembre 2016 et 13 janvier 2017 (pièces no. 6 et 7), votre supérieur hiérarchique, Monsieur (I) a dû notamment intervenir pour aplanir les différends que vous aviez eu avec Mme (K), notre chef du département Audit interne, Prévention des risques et Compliance, jusqu’au 15 mai 2020, ainsi que Monsieur (L), notre chef de la Communication et des Relations internationales jusqu’au 31 août 2021.

A l’égard de Monsieur (C), vous avez ainsi fait preuve d’insubordination, mettant en cause ses instructions, que vous avez finalement pris l’habitude d’ignorer tout bonnement (pièce no. 8), et ce, en violation de l’article 9 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, s’appliquant à vous le cas échéant par voie d’analogie en vertu de l’article 14(3)(b) de la loi du 23 décembre 1998 relative au statut monétaire et à la Banque centrale du Luxembourg, telle que modifiée.

Le 8 mai 2019, vous avez ainsi refusé d’établir un formulaire visant à documenter les demandes de changement des projets (BCR), prétendant qu’un tel formulaire serait dénué de toute pertinence.

Le 8 juillet 2019, tandis que votre supérieur hiérarchique vous demandait d’établir un procès-verbal d’une réunion organisée avec les analystes de (MM) à propos de la stratégie suivie par la Bank of England et la Banque de Suède, vous avez seulement interrogé votre interlocuteur 7quant aux destinataires d’un tel compte-rendu, que vous n’avez jamais livré, estimant que les intéressés n’avaient qu’à se reporter aux 60 présentations mises à disposition des agents intéressés.

Le 24 septembre 2019, vous déclariez encore qu’en votre qualité de chef de projet, vous étiez habilité à décider seul du cours de vos actions, sans avoir à respecter les instructions de Monsieur (C), et sans que ce dernier ne puisse interférer, à quelque titre que ce soit, dans l’organisation des projets auxquels vous étiez affecté.

Vous avez également manqué à l’article 10 de la loi du 16 avril 1979 précitée, en vertu duquel les agents doivent traiter leurs collègues et supérieurs hiérarchiques avec civilité, compréhension et prévenance. Vous avez clairement manqué à votre devoir de respect envers votre supérieur hiérarchique, Monsieur (C), notamment dans un email du 25 septembre 2019 dans lequel vous avez inversé les rôles, vous permettant de l’interpeller quant aux décisions prises par ce dernier et en sa qualité de chef de section sur l’organisation et la répartition du travail. Vous concluiez cet email en déclarant qu’en définitive, Monsieur (C) ne disposait pas de l’expérience nécessaire pour s’acquitter de ses tâches de chef de section. Vous avez d’ailleurs réitéré de tels propos dans l’email que vous avez adressé le 4 mai 2020 à Monsieur (J) pour contester le processus de recrutement du chef de la section FS3, estimant qu’une telle position aurait dû vous revenir. Lors de l’entrevue du 29 juin dernier, vous avez, à nouveau, déclaré que Monsieur (C) n’aurait pas les compétences requises pour exercer le poste de chef de la section FS3, compte tenu de son profil comptable et de son manque d’expertise pour la gestion de projet, selon vous.

Eu égard à vos difficultés relationnelles avec Monsieur (C) et votre obstination à vouloir occuper un poste de conseiller de la Direction, qui serait délié de tout rapport hiérarchique au sein de la section FS3 et du département « Finances et stratégie internes FS » plus largement, Messieurs (I) et (C), respectivement chefs des sections FS2 et FS3, et après concertation avec Monsieur (J), Directeur de la BCL jusqu’au 31 mai 2021, vous ont soumis un projet de fiche de fonction, visant à clarifier l’étendue des responsabilités qui vous étaient confiées.

Alors qu’une telle fiche de fonction décrivait le même poste que celui pour lequel vous aviez candidaté en 2015, en tenant compte de la réorganisation du département FS intervenue en juin 2019 avec la référence faite au « PMO » (projet management office), au « portfolio management governance framework of the Bank » ainsi qu’à l’alignement avec les objectifs stratégiques de la Banque, vous avez refusé de signer ce document et avez persisté dans votre attitude de rejet de toute relation d’autorité à l’égard de votre supérieur hiérarchique, Monsieur (C).

Aussi, dès le mois de juillet 2020, votre supérieur hiérarchique, Monsieur (C), a établi à votre attention des « work packages » décrivant sur base régulière, les tâches qui vous étiez confiées (pièces no. 8 et 9).

Vous avez ignoré la plupart de ces « work packages », ne délivrant effectivement qu’une infime partie des tâches qu’il vous était demandé d’accomplir. Ce faisant, vous avez manqué à l’article 9(2) de la loi modifiée du 16 avril 1979 précitée, qui, en combinaison avec l’article 1(5) de la même loi et l’article 14(3)(b) de la loi du 23 décembre 1998 relative au statut monétaire et 8à la Banque centrale du Luxembourg, met à votre charge la responsabilité « de l’exécution des tâches qui lui sont confiées ; il doit prêter aide à ses collègues dans la mesure où l’intérêt du service l’exige ».

En outre, vous vous êtes isolé et avez perdu, de ce fait, le contact avec vos collègues avec lesquels vous ne cherchiez nullement à collaborer d’aucune manière que ce soit. Vous êtes mal venu de maintenant venir prétendre pour la première fois, lors de notre entretien du 29 juin dernier, que votre supérieur hiérarchique vous aurait intentionnellement tenu écarté des autres collègues de votre section et département, ainsi que des dossiers et groupes de travail. Une telle isolation est seulement la conséquence naturelle de votre attitude altière, votre communication emprunte de mépris et votre refus des tâches qui vous étaient confiées.

Malgré tout ce qui précède, le chef des Ressources humaines, Madame (F), en concertation avec Monsieur (D), Directeur en charge des Ressources humaines et Monsieur (I), chef de la section FS2 « Budget, contrôle de gestion et organisation », vous ont proposé en date du 29 juillet 2021 de rejoindre cette dernière section afin d’y agir en qualité de « Enterprise Architect Consultant » pour contribuer à la mise en œuvre de la pratique de « Architecture d’entreprise » au sein de la Banque, dans la droite ligne de l’expertise que vous aviez développée tandis que vous travailliez pour la BCE (pièces no. 10, 11 et 12).

Vous avez été convié, le 29 juillet 2021, à une réunion lors de laquelle vous avez été informé de ce que la Banque envisageait de vous transférer à la section FS2 en qualité de « Entreprise Architect Consultant » sans aucune modification quant à votre grade, rang, traitement, carrière et évolution de carrière, et de reconsidérer le titre de votre fonction dans les 6 mois suivant le début de votre affectation.

Ce faisant, la BCL s’est acquittée de ses obligations au regard de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’État et des communes, puisqu’elle vous a informé, au préalable, de ce qu’elle envisageait de vous transférer dans une autre section et ce, quoiqu’un tel transfert ne constitue nullement une mesure vous faisant grief dans la mesure où comme indiqué ci-dessous, un tel transfert n’avait aucun impact sur votre grade, rang, traitement, carrière et évolution de carrière, qui demeuraient tous, en tous points identiques.

Le 7 décembre 2021, la Direction a effectivement pris la décision de vous transférer au sein du FS2 pour ce poste.

La Banque vous a adressé le 16 décembre 2021 un courrier pour vous informer de la décision de la Direction de vous transférer effectivement à la section FS2, la possibilité vous étant encore donnée de demander à être entendu pour discuter des sessions de coaching ciblées destinées à améliorer vos capacités interrelationnelles, que le département RH estimait constituer un élément clé de réussite du projet « Enterprise architecture ».

Eu égard à ce qui précède, le reproche adressé à la BCL lors de l’entrevue du 29 juin dernier quant à une prétendue violation de la « Procédure administrative non contentieuse » (PANC) est dénué de tout fondement.

9 Votre transfert au FS2 pour ce poste présentait de multiples avantages, dont notamment le fait que vous ne travailleriez plus pour Monsieur (C) - à l’égard duquel vous avez reconnu lors de l’entretien du 29 juin dernier, avoir des problèmes personnels -, que vos compétences et expertise seraient avantageusement utilisées dans l’intérêt de ces services, tout en vous laissant plus de liberté dans votre rôle pour contribuer à élaborer la stratégie de la Banque en matière d’infrastructure informatique. Par le même temps, il vous était également recommandé d’entreprendre une formation afin d’améliorer votre capacité interpersonnelle. Nous nous permettons également de vous rappeler que vous étiez vous-même demandeur d’un tel transfert, que vous aviez déjà évoqué avec Monsieur (J).

La Banque vous offrait ainsi la possibilité de repartir sur de bonnes bases, dans une section distincte, sous la supervision bienveillante de Monsieur (I), avec un nouveau défi intéressant à relever, lequel offrait, pour le surplus, des possibilités d’évolution favorables au sein de la BCL.

Contre toute attente, vous avez refusé de signer pour accord votre nouvelle fiche de fonction. Le 18 janvier 2022, vous avez été jusqu’à affirmer que la position à laquelle la Direction avait décidé de vous transférer n’était pas conforme à ce « qui a été discuté et convenu », et vous avez exigé qu’une telle position « soit modifiée aussitôt que possible » (pièce no. 13).

Un tel comportement corrobore, pour autant que de besoin, votre refus de toute forme d’autorité et votre obstination à ignorer les instructions qui vous étaient pourtant données, cette fois, par la Direction, à l’égard de laquelle vous briguiez pourtant un poste de conseiller.

Le 6 mars dernier, vous avez encore adressé à Monsieur (I) - que vous reconnaissiez ainsi être votre supérieur hiérarchique, ceci contredisant vos propos formulés lors de la réunion du 29 juin dernier, durant laquelle vous avez indiqué ne pas savoir si vous releviez du FS2 ou du FS3 - un email pour demander un congé pour les 7 et 8 mars 2022 pour vous rendre en Ukraine en voiture pour y secourir les réfugiés (pièce no. 14). Lors de votre entretien du 29 juin dernier, vous avez précisé qu’il s’agissait de servir d’interprète afin d’aider un ami resté bloqué en Ukraine.

Sans mettre en doute vos valeurs humaines, nous avons toutefois quelques difficultés à comprendre comment vos problèmes de dos - dont la réalité n’a pas pu être confirmée par l’Administration des services médicaux du service public à laquelle vous avez omis de transférer les documents sollicités - justifient que vous restiez à la maison, en travail à distance pour « ajuster la position assise selon les douleurs dorsales » (pièce no. 15), mais ne vous empêchent nullement de parcourir près de 4000 kilomètres en voiture sur deux jours, sans crainte d’un quelconque impact sur votre dos pour jouer les interprètes afin d’aider un ami resté bloqué en Ukraine.

Cet incident est malheureusement dans la droite ligne de la dynamique générale de la relation contractuelle avec la BCL, où votre manière d’être (souvent perçue comme arrogante et méprisante), vos revendications (d’un poste de conseiller de la Direction), le travail effectivement délivré (de peu de contenance et de quantité), votre refus d’être affecté à une autre section (que vous aviez pourtant sollicité) ou encore votre version des faits présentés lors de la réunion du 29 juin dernier (où vous vous posez en victime, en prétendant, tour à tour, avoir fait l’objet de harcèlement et avoir été mal traité par la Banque qui ne vous aurait pas confié les responsabilités 10managériales en ligne avec votre expertise) constituent autant d’éléments inattendus, susceptibles d’obérer la relation de confiance qui devrait pourtant présider entre nous.

Tous les comportements précités, ainsi que les arguments avancés lors de l’entrevue du 29 juin dernier en vue de tenter de vous dédouaner de toute responsabilité pour l’échec de notre collaboration ont mis à mal la confiance que la Banque pensait pouvoir placer en vous au sein du département « Finances et stratégie internes FS », au vu de votre expérience de plus de 20 années au sein de banques centrales en qualité de gestionnaire de projets.

Or, l’impératif de la bonne marche de la Banque requiert l’existence d’une relation de confiance indéfectible avec et entre ses agents, qui est incompatible avec votre travail insuffisant, votre comportement interpersonnel ainsi que votre manière de communiquer.

Ces faits amènent la BCL à résilier, par la présente et avec effet immédiat, votre contrat de travail conclu le 28 mars 2018 et ce sur base de l’article 7.1 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat.

Dès réception de la présente, nous vous invitons dès lors à vous mettre en contact avec votre supérieur hiérarchique pour lui remettre immédiatement vos cartes d’accès, matériel informatique et cartes de visite.

Le département des Ressources humaines vous contactera également pour effectuer les démarches relatives à la fin de votre relation contractuelle avec la BCL. (…) » Par requête déposée le 15 février 2023 au greffe du tribunal administratif, Monsieur (A) fit introduire un recours tendant, d’après le dispositif de ladite requête, principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de (i) « la décision du 28 novembre 2022 qui a résilié le contrat de travail du requérant avec effet immédiat », (ii) « la décision du 28 novembre 2022 en ce que le requérant aurait dû être le candidat choisi à l’appel à candidatures et nommer le requérant en tant que chef de section FS3 en 2019, à défaut ordonner la nomination du requérant à un poste au moins équivalent à celui de chef de section FS3, correspondant tant à ses compétences qu’à son expérience professionnelle », à voir (iii) « condamner la BCL au paiement d’arriérés de rémunérations au profit de Monsieur (A) au titre du préjudice matériel subi, à partir de la date de la résiliation de son contrat de travail à savoir le 28 novembre 2022 », et à voir (iv) « ordonner que des sanctions disciplinaires soient prises à l’égard de Messieurs (B), (C) et (D) aux regard des faits de harcèlement qui leur sont reprochés sur la personne de Monsieur (A) ».

Par jugement du 26 juin 2024, le tribunal se déclara incompétent pour statuer sur les demandes de Monsieur (A) tendant à voir « ordonner que des sanctions disciplinaires soient prises à l’égard de Messieurs (B), (C) et (D) aux regard des faits de harcèlement qui leur sont reprochés sur la personne de Monsieur (A) », à voir « ordonner la nomination du requérant à un poste au moins équivalent à celui de chef de section FS3, correspondant tant à ses compétences qu’à son expérience professionnelle » et à voir « condamner la BCL au paiement d’arriérés de rémunérations au profit de Monsieur (A) au titre du préjudice matériel subi, à partir de la date de la résiliation de son contrat de travail à savoir le 28 novembre 2022 », déclara irrecevable le recours dirigé contre « la décision du 28 novembre 2022 en ce que le requérant aurait dû être le 11candidat choisi à l’appel à candidatures et nommer le requérant en tant que chef de section FS3 en 2019 », reçut en la forme le recours principal en réformation dirigé contre la décision du 28 novembre 2022 portant résiliation du contrat de travail de Monsieur (A), au fond, le déclara non justifié et en débouta le demandeur, dit qu’il n’avait pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation, rejeta encore les demandes respectives des parties tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure ainsi que la demande en distraction des frais formulée par le mandataire de la BCL, tout en condamnant le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Par requête d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 1er août 2024, Monsieur (A) a régulièrement entrepris le jugement du 26 juin 2024.

La Cour constate en premier lieu que l’appelant n’entreprend pas le jugement du 26 juin 2024 en ce que le tribunal s’est déclaré incompétent pour, d’une part, ordonner des sanctions disciplinaires à l’encontre d’autres employés de la BCL, d’autre part, le voir nommer à un poste au moins équivalent à celui de chef de section FS3, et, de troisième part, voir condamner la BCL au paiement d’arriérés de rémunérations à son profit, et a déclaré irrecevable le recours dirigé contre la décision du 28 novembre 2022 en ce qu’il aurait dû être le candidat choisi à l’appel à candidatures et le voir nommer en tant que chef de section FS3 en 2019, de sorte que la Cour n’a plus à y revenir, ces diverses demandes formulées en première instance n’étant plus dans les débats.

A l’appui de son appel, Monsieur (A) rappelle les faits et rétroactes de l’affaire, en insistant plus particulièrement sur sa carrière de plus de 25 ans dans le secteur bancaire dont notamment au sein de la Banque Centrale Européenne où il aurait acquis une expérience professionnelle significative.

Au vu de son parcours professionnel exceptionnel, il aurait été embauché par la BCL en tant que « Project Portofolio Manager ». A la suite d’une réorganisation du département au 1er avril 2019, conformément à la stratégie du bureau de gestion de projet fonctionnel dont il était en charge, une nouvelle section au sein de la BCL, la section FS3 « Projets et Stratégie », fut créée avec un avis de vacance pour le poste de chef de section. Or, sa candidature pour ledit poste n’aurait pas été retenue, malgré le fait qu’une société de recrutement interne aurait confirmé qu’il était le candidat le plus qualifié, et le poste aurait été attribué à Monsieur (C), qui, d’après l’appelant, n’aurait pas été qualifié pour le poste en question. Par la suite, il aurait été progressivement privé de travail et sa relation avec Monsieur (C) serait devenue de plus en plus difficile. En raison de ces conditions de travail difficiles et du harcèlement moral et psychologique exercé par ses supérieurs, il aurait dû être encadré par un psychologue et il aurait suivi un traitement psychiatrique pendant 2 ans.

Le 29 juillet 2021, il aurait été invité par sa direction à rejoindre la section FS2 « Budget, contrôle de gestion et organisation » afin de contribuer à la mise en œuvre de la pratique « Architecture d’entreprise » au sein de la BCL. Celle-ci lui aurait alors proposé un avenant à son contrat de travail qui aurait comporté un intitulé et un motif erroné, tout en prévoyant que son rôle serait celui d’un « Consultant en architecture d’entreprises », ce qui aurait été constitutif, à ses yeux, d’une réduction en rang et de ses responsabilités et la BCL aurait même essayé d’assortir ce transfert interne d’une période probatoire supplémentaire de 6 mois. Monsieur (A) précise encore qu’il aurait finalement signé ledit avenant, après correction de diverses erreurs, le 27 décembre 2021 pour éviter d’être considéré comme démissionnaire. Il expose encore qu’au vu d’un environnement de travail hostile au sein de la BCL et du traitement reçu de la part de ses supérieurs hiérarchiques, la qualité de ses performances aurait diminué, tout en précisant que depuis son entrée en fonction auprès de la BCL en avril 2016, aucun reproche ni avertissement 12formel n’auraient jamais été formulés à son égard et aucune évaluation de ses performances n’aurait été effectuée avant le déclenchement de la procédure de licenciement à son égard.

Après avoir renvoyé à l’article 108bis, première phrase, de la Constitution, applicable au moment de son licenciement, duquel se dégagerait que les établissements publics disposeraient des seules compétences que la loi leur attribuerait et que toute compétence non attribuée par la loi relèverait inévitablement de la compétence de l’autorité de tutelle, à savoir le ministre du ressort, et après avoir cité les articles 3, paragraphe (1), 6, sub j), 11, paragraphe (3), et 14, paragraphe (3), sub b), de la loi modifiée du 23 décembre 1998 relative au statut monétaire et à la Banque centrale du Luxembourg, ci-après « la loi du 23 décembre 1998 », ainsi que l’article 13 de la loi modifiée du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat, entretemps abrogée, ci-après « la loi du 27 janvier 1972 », et l’article 7, paragraphe (1), de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat, ci-après « la loi du 25 mars 2015 », Monsieur (A) fait rappeler que les employés de la BCL seraient assimilés au régime des employés de l’Etat depuis l’entrée en vigueur de la loi du 27 janvier 1972, prise en son article 13, disposition légale abrogée par la loi du 25 mars 2015 sans avoir été remplacée par une nouvelle disposition légale, de sorte que la portée de ladite assimilation ne serait plus légalement définie.

A supposer que les employés de l’Etat au sein de la BCL seraient désormais soumis à l’application de la loi du 25 mars 2015, l’appelant renvoie à l’article 7, paragraphe (1), de ladite loi prévoyant notamment qu’un contrat de travail en vigueur depuis moins de dix ans peut être résilié par le ministre ou par le ministre du ressort pour des raisons dûment motivées.

Il relève encore que d’après l’article 35 de la Constitution, tel qu’applicable au moment de son licenciement, disposant qu’« aucune fonction salariée par l’Etat ne peut être créée qu’en vertu d’une disposition législative », seule la loi pourrait créer des fonctions salariées auprès de l’Etat, y compris celle de l’employé de l’Etat, de sorte qu’il conviendrait de constater que la décision entreprise du 28 novembre 2022 aurait été adoptée « sur base d’une incompétence, sinon en violation des formes destinées à protéger les intérêts privés, sinon en violation de la loi ».

Sur ce, il conclut à la réformation sinon à l’annulation de la décision de licenciement du 28 novembre 2022 en précisant son argumentation à travers quatre moyens, à savoir :

1) défaut de base légale Par rapport à ce moyen, il argumente qu’il serait incohérent que les directeurs de la BCL auraient invoqué l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 pour fonder la décision litigieuse, ladite disposition ne leur conférent aucun pouvoir de révoquer des agents de la BCL. En effet, ledit article 7, visant essentiellement la résiliation d’un contrat à durée indéterminée serait en contradiction avec l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 23 décembre 1998 qui vise spécifiquement la révocation des agents de la BCL par la direction de celle-ci. En outre, il ressortirait de l’article 14 de la loi du 23 décembre 1998 que les « agents » de la BCL seraient placés dans différentes catégories et partant soumis à des régimes juridiques différents, de sorte qu’il serait manifeste que ledit article conférerait un statut spécifique aux agents ayant le statut assimilé d’un employé de l’Etat impliquant l’application du régime de droit commun des employés publics, malgré le pouvoir de révocation prévu à l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 23 décembre 1998. Or, comme l’article 13 de la loi du 27 janvier 1972 aurait été abrogé sans avoir été remplacé par une disposition légale au contenu identique ou similaire, aucune disposition ne déterminerait la portée 13de cette assimilation, de sorte qu’il n’existerait plus aucune base légale relative au régime des employés de l’Etat du personnel de la BCL susceptible de fonder la décision entreprise.

2) violation du principe général de la sécurité juridique Sur ce point, Monsieur (A) relève que même si la loi du 25 mars 2025 était applicable au régime des employés de l’Etat du personnel de la BCL, la portée de l’assimilation prévue à l’article 14, paragraphe (3), sub b), de la loi du 23 décembre 1998 ne serait plus déterminée par la loi, de sorte qu’il faudrait se demander si la loi du 25 mars 2015 était applicable in integrum « à la lettre » auxdits employés et il y aurait partant un doute quant à l’étendue de son applicabilité. Ainsi, la contradiction entre l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 et l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 23 décembre 1998, au niveau de la compétence des autorités publiques, remettrait en cause le principe général de la sécurité juridique et le risque de l’arbitraire serait d’autant plus élevé vu que l’administré ne serait pas en mesure d’apprécier quelle autorité serait compétente pour prendre à son égard la plus sévère des sanctions possibles. Aux yeux de l’appelant, il existerait une difficulté manifeste quant à l’accessibilité, l’intelligibilité et la clarté de la législation applicable pour son cas d’espèce, étant donné qu’il serait impossible de déterminer la disposition légale applicable au vu de la contradiction entre l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 et l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 23 décembre 1998 suite à l’abrogation de la loi du 27 janvier 1972.

Lesdits articles seraient dès lors contraires au principe constitutionnel de l’Etat de droit et aux articles 9 et 31 de la Constitution, telle qu’applicable au moment de son licenciement, pour créer une contradiction quant à l’autorité compétente pour résilier son contrat de travail, étant donné qu’il ne serait pas possible de déterminer la disposition légale applicable, rendant ainsi inaccessible et inintelligible la législation applicable en matière de licenciement d’un agent de la BCL engagé sous le statut assimilé d’un employé de l’Etat.

3) incompétence dans le chef de l’autorité ayant pris la décision attaquée L’appelant, en rappelant que la décision entreprise a été prise sur base de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2015 par les deux directeurs de la BCL, soutient que celle-ci aurait été prise par une autorité incompétente. Dans la mesure où il bénéficiait au moment de la prise de ladite décision d’une ancienneté de services inférieure à dix ans, la garantie prévue à la première phrase dudit article 7, paragraphe (1), à savoir que son contrat de travail ne peut pas être résilié, sauf à titre de mesure disciplinaire, ne lui serait pas applicable, de sorte qu’uniquement le ministre du ressort aurait été en droit de procéder à la résiliation de son contrat d’emploi pour des raisons dûment motivées.

4) violation des formalités prévues par la loi du 23 décembre 1998 Monsieur (A), pour l’hypothèse que la direction de la BCL aurait été l’organe compétent pour prendre la décision de résiliation du 28 novembre 2022, soutient finalement que celle-ci aurait été prise en violation des articles 12 et 13 de la loi du 23 décembre 1998. En effet, tant la lettre d’intention du 3 juin 2022 que la lettre de résiliation du 28 novembre 2022 porteraient uniquement les signatures des deux directeurs de la BCL, à l’exclusion de celle du directeur général, de sorte que la décision de résiliation n’aurait pas été prise par la direction en tant que collège. Or, le respect du principe de collégialité serait d’autant plus crucial en la matière de résiliation d’un contrat de travail qui représenterait la sanction la plus sévère à disposition de la direction à l’égard des membres du personnel de la BCL.

14 La Cour relève en premier lieu que l’argumentaire véhiculé par l’appelant à travers les quatre moyens prémentionnés se résume en substance à la question de savoir si la BCL disposait d’une base légale suffisante pour permettre à sa direction de prononcer la résiliation avec effet immédiat du contrat de travail de Monsieur (A), agent engagé sous le statut d’un employé de l’Etat, et, dans l’affirmative, avec les signatures conjointes uniquement de deux de ses directeurs, à l’exclusion de la signature du directeur général de la BCL.

Par rapport aux faits de l’espèce, il y a lieu de constater que Monsieur (A), suite à un premier contrat de travail à durée déterminée signé le 17 mars 2016, a été engagé par la BCL, par un contrat de travail à durée indéterminée signé le 28 mars 2018, en qualité d’employé de l’Etat conformément à l’article 14 de la loi du 23 décembre 1998, en tant que « Project Portofolio Manager » (« PPM ») au sein de la section « Stratégie interne et contrôle de gestion » du département « Finances et stratégies internes ».

Ledit contrat de travail à durée indéterminée a été amendé par un avenant portant la date du 27 décembre 2021, la nouvelle fonction de l’intéressé se trouvant définie comme suit :

« WHEREAS by a decision of the BCL’s Executive Board and following a discussion with the Employee, it was decided on 10th December 2021 to transfer the Employee to the “Budget contrôle de gestion et organization” Section (FS2), in order to work for the “Enterprise Architecture” Project, as “Enterprise Architecture Consultant”. A job description (fiche de function) was agreed with the Employee ».

Au moment d’apposer sa signature sur ledit avenant, Monsieur (A) a cependant rayé le passage « in order to work for the “Enterprise Architecture” Project, as “Enterprise Architecture Consultant”. A job description (fiche de function) was agreed with the Employee » en relation avec sa nouvelle fonction, tout en ajoutant de façon manuscrite que « this position title is not what was discussed and agreed and should be changed asap. I sign as I do not wish to be considered as démissionaire ».

Indépendamment de la question de savoir quelle fonction exacte l’intéressé occupait dès lors suite à la signature de l’avenant du 27 décembre 2021, le statut de Monsieur (A) au sein de la BCL se trouvait régi, aux termes de son contrat de travail initial, par l’article 14 de la loi du 23 décembre 1998, pris notamment en son paragraphe (3), sub b), aux termes duquel :

« Pour occuper les postes autres que ceux spécifiés au point précédent [agents de la BCL se voyant appliquer, le cas échéant par analogie, des dispositions relatives aux fonctionnaires ou fonctionnaires stagiaires de l’Etat], les agents de la Banque Centrale comprennent, dans le cadre de l’organigramme prévu à l’article 29 (2) :

-

des employés qui remplissent toutes les conditions pour être employés de l’Etat et dont le statut est assimilé au régime des employés de l’Etat au sens de l’article 13 de la loi du 27 janvier 1972 fixant le régime des employés de l’Etat ; leur sont applicables, le cas échéant par analogie, les dispositions de l’article 1er, paragraphe 5, de la loi modifiée du 16 avril 1979 ainsi que les lois et règlements fixant le régime des employés de l’Etat ;

(…) ».

15L’article 13 de la loi du 27 janvier 1972, loi entretemps abrogée, quant à lui, disposait ce qui suit :

« Un règlement grand-ducal pourra prévoir l’assimilation au régime des employés de l’Etat du personnel des établissements publics, des communes, des syndicats de communes et de la société nationale des chemins de fer luxembourgeois, qui, auprès de l’Etat répond à la notion d’employé de l’Etat (…) ».

Pareille assimilation pour les agents de la BCL, en tant que personnel d’un établissement public remplissant les conditions pour être employés de l’Etat, même si elle n’a pas été effectuée en vertu d’un règlement grand-ducal pris en exécution de l’article 13 de la loi du 27 janvier 1972, a précisément été effectuée par la loi du 23 décembre 1998, prise en son article 14 précité. Il s’ensuit que c’est à tort que l’appelant soutient que plus aucun texte ne prévoirait pareille assimilation et qu’il n’existerait plus de base légale relative au régime des employés de l’Etat du personnel de la BCL susceptible de fonder la décision entreprise.

Comme la loi du 23 décembre 1998 prévoit que le statut d’une certaine catégorie d’agents de la BCL, tel Monsieur (A), est assimilé au régime des employés de l’Etat, le simple constat que l’article 14, paragraphe (3), sub b), de la loi du 23 décembre 1998, précité, fait référence à la loi du 27 janvier 1972, entretemps abrogée, ne crée dès lors pas un vide juridique. En effet, admettre la thèse de l’appelant aurait comme conséquence d’abroger cette catégorie d’agents de la BCL, à savoir les employés de l’Etat, uniquement en raison d’une fausse référence à une loi entretemps abrogée et remplacée par la nouvelle loi régissant le statut des employés de l’Etat, à savoir la loi du 25 mars 2015.

Monsieur (A) ayant été engagé d’après l’article 1er de son contrat de travail en tant qu’employé de l’Etat suite à l’entrée en vigueur de la loi du 25 mars 2015, la résiliation de son contrat à durée indéterminée, indépendamment de la question du bien-fondé de cette résiliation, doit dès lors nécessairement respecter les conditions de résiliation telles que figurant à ladite loi de 2015, dont notamment l’article 7, paragraphe (1), tel qu’indiqué dans la lettre de résiliation du 28 novembre 2022, article de la teneur suivante :

« Le contrat de travail à durée indéterminée de l’employé ne peut plus être résilié, lorsqu’il est en vigueur depuis dix ans au moins, sauf à titre de mesure disciplinaire ainsi que pour l’application de la procédure d’amélioration des prestations professionnelles et de la procédure d’insuffisance professionnelle. Pendant la période précédant cette échéance, il peut être résilié par le ministre ou par le ministre du ressort soit pour des raisons dûment motivées, soit lorsque l’employé s’est vu attribuer un niveau de performance 1 par application de l’article 4bis de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat ».

Il convient de relever ensuite que la BCL, aux termes de l’article 3 de la loi du 23 décembre 1998, est un établissement public, doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, et ses agents ont – en principe – un statut de droit public consistant dans l’application, le cas échéant, par voie d’analogie, des dispositions relatives aux employés publics, dont notamment les employés de l’Etat, tel que cela se dégage de l’article 14 de la loi du 23 décembre 1998, pris notamment en son paragraphe (3), sub b), précité.

16Comme l’article 14 de la loi du 23 décembre 1998, loi spéciale applicable aux agents de la BCL, a assimilé le statut d’une partie de ces agents à celui des employés de l’Etat, la Cour ne note pas non plus de contradiction au niveau de l’application conjointe de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2015 et de l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 23 décembre 1998 permettant à la direction de la BCL d’engager, de nommer et de révoquer les agents de la BCL, étant rappelé dans ce contexte que les textes légaux et réglementaires doivent être interprétés de préférence de façon à dégager un sens concordant, en conciliant les termes de leurs dispositions plutôt que d'en voir dégager des significations contradictoires.1 Tel que relevé à bon escient par la partie intimée, la direction de la BCL ne dépend d’aucun ministère et n’est pas soumise à la tutelle d’un ministère, de sorte qu’aucun ministre n’a compétence pour nommer ou résilier le contrat d’emploi d’un agent de la BCL.

En effet, seule la direction de la BCL, en tant que collège, composée de son directeur général et de deux directeurs en vertu de l’article 12, paragraphe (1), de la loi du 23 décembre 1998, a compétence pour engager, nommer et révoquer les membres du personnel au vu de la disposition claire et précise figurant à l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 23 décembre 1998 réglant la question de la compétence en matière d’engagement et de révocation des agents de la BCL.

Or, il se dégage des pièces du dossier que la direction s’est réunie de manière collégiale le 28 novembre 2022, conformément à l’article 13 de la loi du 23 décembre 1998, pour valider le courrier de résiliation du contrat de travail de Monsieur (A) et le simple constat que la lettre de résiliation du contrat de travail de Monsieur (A) du même jour a uniquement été signée par les deux directeurs, sans contenir en outre la signature du directeur général, ne porte pas à conséquence, aucune disposition de la loi du 23 décembre 1998 ne prescrivant qu’une lettre de résiliation d’un contrat d’emploi doive être signée par les trois membres de la direction.

Finalement, c’est encore à bon escient que la partie intimée soutient que la direction de la BCL est tenue de respecter les dispositions nationales régissant le statut des employés de l’Etat et de se fier, par analogie, aux dispositions de l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 concernant la méthode de résiliation d’un contrat de travail d’un de ses agents employés sous le statut d’un employé de l’Etat, étant donné que ces agents sont assimilés aux employés de l’Etat en vertu de l’article 14, paragraphe (3), sub b), de la loi du 23 décembre 1998, ce qui est le cas pour Monsieur (A) d’après l’article 1er de son contrat de travail, et faire abstraction de l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 reviendrait à vider de toute substance la capacité de la BCL, par le biais de sa direction, de résilier un contrat de travail de ses agents engagés sous le statut d’un employé de l’Etat.

Partant, la Cour arrive à la conclusion que la BCL disposait d’une base légale suffisante pour permettre à sa direction, sous la signature de ses deux directeurs, de prononcer la résiliation avec effet immédiat du contrat de travail de Monsieur (A), agent engagé sous le statut d’un employé de l’Etat, en vertu de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2025 et l’argumentation afférente de l’appelant est à rejeter.

Le moyen afférent, pris en ses quatre branches, est partant à rejeter comme non fondé.

1 Cour adm. 4 juin 2019, n° 42281C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Lois et règlements, n° 190 et autres références y citées 17La Cour n’étant pas tenue de suivre l'ordre dans lequel les moyens sont présentés par une partie à l’instance mais, dans l'intérêt de l'administration de la justice, sinon de la logique inhérente aux éléments de fait et de droit touchés par les moyens soulevés, pouvant les traiter suivant un ordre différent2, il convient ensuite de se prononcer sur un moyen nouveau soulevé par Monsieur (A) en instance d’appel, celui-ci soutenant que la BCL aurait violé le devoir de sollicitude.

Ainsi, il se dégagerait du droit européen relatif à la fonction publique que les obligations découlant du devoir de sollicitude seraient substantiellement renforcées en présence d’une situation particulière d’un agent pour lequel il existe des doutes quant à sa santé mentale et, par conséquent, quant à sa capacité à défendre, d’une manière adéquate, ses propres intérêts. Ainsi depuis 2019, il aurait vécu une période très difficile en raison des conditions de travail difficiles et suite aux actes de harcèlement moral et psychologique subis à l’initiative de ses supérieurs ayant nécessité un suivi psychologique et des traitements psychiatriques pendant deux ans. Sa situation se serait encore aggravée en 2021 en raison d’une fracture au niveau de la colonne vertébrale ayant nécessité une intervention chirurgicale en 2022. Cependant, il aurait refusé tout arrêt de maladie et se serait connecté au télétravail le lundi 24 janvier 2022, c’est-à-dire trois jours après son opération, et aurait continué à travailler depuis son domicile en suivant les recommandations de son médecin traitant préconisant un ajustement de sa position assise. Or, en ignorant son état de santé et en le menaçant même par un courrier du 31 mai 2021 dans le contexte de son congé de maladie, la BCL aurait adopté un comportement répréhensible démontrant une absence de sollicitude à son encontre.

Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le devoir de sollicitude de l'administration à l'égard de ses agents reflète l'équilibre des droits et des obligations réciproques que le statut a créé dans les relations entre l'autorité publique et les agents du service public. Ce devoir implique notamment que, lorsqu'elle statue à propos de la situation d'un fonctionnaire, l'autorité prenne en considération l'ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision et que, ce faisant, elle tienne compte de l'intérêt du service, mais aussi de l'intérêt du fonctionnaire concerné (arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 23 octobre 1986, Schwiering/Cour des comptes, 321/85, Rec. p. 3199, point 18 ; arrêts du Tribunal de première instance du 5 février 1997, Ibarra Gil/Commission, T-207/95, RecFP p. I-A-13 et II-31, point 75, du 6 février 2003, Pyres/Commission, T-7/01, RecFP p. I-A-37 et II-239, point 87 et du 7 mars 2007 Wandschneider /Commission, T-110/04, RecFP p. II-A-2-533, point 163).

Au vu des pièces du dossier, la Cour arrive cependant à la conclusion que Monsieur (A) n’a pas rapporté la preuve d’une quelconque violation par la BCL de son devoir de sollicitude.

Ainsi, la BCL n’a pas procédé à la résiliation du contrat de travail de l’appelant en raison de son état de santé, notamment pour cause d’absence prolongée de plus de six mois sur les douze derniers mois, mais « pour des raisons dûment motivées » notamment, d’une part, en raison d’importantes difficultés relationnelles avec son supérieur hiérarchique, Monsieur (C), et d’un manque de respect envers celui-ci, d’autre part, au vu d’une incapacité de dialoguer de manière constructive avec ses collègues de travail et des frictions en découlant, et de troisième part, en raison d’une mauvaise exécution des tâches qui lui avaient été confiées.

2 Cour adm. 7 octobre 2003, n° 16446C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 528 et autres références y citées 18 Quant au courrier du 31 mai 2021 adressé par la direction de la BCL à l’appelant, la Cour constate que ledit courrier rend ce dernier seulement attentif sur le total des jours d’absence cumulés depuis fin octobre 2020 et sur la possibilité d’une résiliation d’un contrat de travail pour des absences pour raison de santé pendant six mois, consécutifs ou non, au cours d’une période de douze mois, et sur la possibilité pour l’employé, sur base d’un rapport médical circonstancié de son médecin traitant, de solliciter une prolongation du délai d’une durée supplémentaire de trois mois.

La Cour n’entrevoit dès lors pas en quoi la BCL aurait menacé Monsieur (A) en lui rappelant les dispositions légales applicables concernant les absences pour raison de santé et aurait de sorte violé son devoir de sollicitude.

En outre, il se dégage du dossier que la BCL n’a pas procédé dans l’immédiat à la résiliation du contrat de travail de Monsieur (A), mais lui a proposé un transfert de la section FS3 vers la section FS2 sans aucune modification quant à son grade, traitement et évolution de carrière, prenant de sorte en compte les intérêts du concerné en lui proposant notamment une affectation vers une section ne dépendant plus de son ancien supérieur hiérarchique, Monsieur (C). Cependant, tel que relevé ci-avant, l’appelant a refusé de signer l’avenant à son contrat de travail dans la version lui proposée par sa direction, de même qu’il a refusé de signer sa nouvelle fiche de fonction.

L’argumentation afférente de l’appelant est partant à rejeter.

Monsieur (A) soutient encore que la décision entreprise serait empreinte d’un détournement de pouvoir. Il relève dans ce contexte que la BCL a résilié avec effet immédiat son contrat de travail sur base de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2015, mais que la notion de résiliation d’un contrat de travail avec effet immédiat serait propre au Code du travail qui n’aurait pas vocation à s’appliquer à la résiliation d’un contrat d’emploi d’un employé de l’Etat et ne serait pas transposable aux agents ayant le statut d’employé de l’Etat. Conformément audit article 7, paragraphe (1), le contrat de travail d’un employé de l’Etat ayant une ancienneté de service de moins de dix ans pourrait être résilié soit pour des raisons dûment motivées soit lorsque l’employé s’est vu attribuer un niveau de performance 1 et les raisons indiquées dans l’attestation patronale de la BCL, à savoir la « perte de confiance », ne constitueraient pas un motif grave justifiant le licenciement sans préavis, de sorte que la notion de licenciement pour motifs graves n’aurait pas vocation à s’appliquer à la résiliation d’un contrat de travail d’un employé de l’Etat, même si la loi du 25 mars 2015 ne prévoit pas de délai de préavis. D’après l’appelant, la perte de confiance avancée par la BCL comme motif de résiliation ne reposerait sur aucune base objective ou documentée et ne pourrait pas justifier un licenciement sans préavis dans le cadre d’un contrat d’emploi d’un employé de l’Etat. Partant, la décision de résiliation apparaîtrait manifestement comme une action arbitraire des directeurs de la BCL, visant à le priver de ses possibilités d’avancement et à le contraindre à quitter l’institution de manière injustifiée, et le caractère arbitraire de ladite décision se trouverait encore renforcé par le fait que les directeurs n’avaient pas le pouvoir de prendre pareille décision, leur action étant dépourvue de toute base légale.

Il y a lieu de rappeler en premier lieu que le détournement de pouvoir consiste dans l'utilisation d'une compétence par l’autorité administrative dans un but autre que celui pour lequel elle est conférée, ce qui amène le juge administratif à examiner si le mobile véritable de l'administration 19correspond à celui qu'elle a exprimé, étant entendu que la charge de la preuve afférente incombe au demandeur invoquant les faits par lui incriminés3.

Or, en résiliant le contrat de travail de Monsieur (A) par application de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2015, et en invoquant une perte de confiance vis-à-vis de l’appelant se dégageant de la motivation contenue dans la lettre de résiliation du contrat de travail du 28 novembre 2022, la direction de la BCL n’a pas commis un détournement de pouvoir mais a simplement fait usage des dispositions légales applicables à un employé de l’Etat présentant une ancienneté de service de moins de dix années, étant rappelé qu’il est de jurisprudence constante que les dispositions du Code du travail relatives à la résiliation du contrat de travail n’ont pas vocation à s’appliquer à la résiliation d’un contrat d’emploi d’un employé de l’Etat.

Comme un employeur public est en droit de résilier le contrat de travail à durée indéterminée d’un employé de l’Etat pour des raisons dûment motivées, en vertu de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2015, et que seuls sont applicables auxdits agents, au vœu de l’article 4 de la loi du 25 mars 2015, les articles L.121-1 à L.121-4, les articles L.122-1 à L.122-10 et les articles L.122-12 et L.122-13 du Code du travail réglant les formes et les modalités de l’engagement, la Cour arrive à la conclusion que nonobstant le fait que la loi du 25 mars 2015 ne prévoit pas de délai de préavis en cas de résiliation d’un contrat de travail d’un employé de l’Etat et que la lettre de résiliation litigieuse du 28 novembre 2022 résilie le contrat de travail de Monsieur (A) avec effet immédiat, ladite résiliation n’est pas à considérer comme un licenciement pour faute grave avec effet immédiat au sens du Code du travail. En effet, la résiliation d’un contrat de travail d’un employé de l’Etat ne s’apparente ni à un licenciement avec effet immédiat, ni à un licenciement avec préavis, la loi n’offrant aucun choix à l’autorité compétente qui ne peut pas respecter un préavis du fait que les règles y relatives du Code du travail ne sont pas applicables aux employés de l’Etat.4 Il s’ensuit que la résiliation du contrat de travail querellée ne constitue pas une décision arbitraire empreinte d’un détournement de pouvoir mais s’inscrit dans le respect des dispositions légales applicables en la matière, de sorte que le moyen afférent de Monsieur (A) est à rejeter.

Monsieur (A) soutient finalement que la décision litigieuse serait empreinte d’une erreur manifeste d’appréciation des faits en ce que les motifs invoqués par la BCL, à la base de la résiliation de son contrat de travail, ne seraient pas fondés. Ainsi, les motifs invoqués par la BCL ne prendraient pas en compte les circonstances extérieures ayant contribué à la diminution de la qualité de son travail, à savoir la privation expresse de travail, son exclusion de réunions et de procédures importantes et son traitement par ses supérieurs hiérarchiques, le tout à la lumière de ses problèmes médicaux et psychologiques, et les premiers juges auraient omis de vérifier l’exactitude matérielle des motifs de fait qui devraient être établis « à l’exclusion de tout doute raisonnable ».

En ce qui concerne les prétendues difficultés relationnelles, celles-ci seraient entièrement dues et liées à son exclusion systématique de réunions, des groupes de travail et des comités, de sorte que le contact et le dialogue avec ses collègues auraient été très difficiles voire impossibles.

3 Cour adm. 27 janvier 2022, n° 46386C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Recours en annulation, n° 9 et autres références y citées 4 voir en ce sens Cour adm. 2 juillet 2024, n° 50160C du rôle, non encore publié 20 Quant au prétendu manque de respect envers sa hiérarchie, et, plus particulièrement, vis-à-vis de Monsieur (C), il serait essentiel de distinguer entre une critique professionnelle et un comportement irrespectueux. Si l’appelant admet avoir exprimé des doutes sur les qualifications et les compétences de son supérieur hiérarchique pour remplir efficacement ses fonctions, lesdites observations auraient cependant été basées sur des faits concrets et des évaluations professionnelles et non sur des attaques personnelles et ne sauraient partant être qualifiées comme un « acte de manque de respect ».

Concernant les prétendus actes d’insubordination, il conviendrait de noter qu’il n’aurait jamais refusé d’exécuter les tâches lui confiées par pure défiance, mais il aurait tenté de mettre en avant l’inadéquation des directives reçues avec les standards de l’industrie et les meilleurs pratiques. Sa position, bien que contestataire, aurait été fondée sur des considérations professionnelles visant à garantir l’efficacité et la qualité de travail, plutôt que sur une volonté de désobéir systématiquement.

Quant au refus de vouloir signer l’avenant à son contrat de travail avec la fiche de travail y afférente et la conclusion des premiers juges y relative qu’il aurait « de nouveau refusé toute hiérarchie », Monsieur (A) estime que les premiers juges auraient méconnu le principe de la liberté contractuelle, ce d’autant plus que le contrat aurait contenu des erreurs matérielles manifestes, de sorte que pareil refus ne saurait être interprété comme une insubordination de sa part. Le fait d’avoir néanmoins fini par signer la proposition de réaffectation au sein de la section FS2, bien qu’acceptée à contre-cœur, démontrerait sa volonté de trouver un terrain d’entente malgré les désaccords antérieurs. Partant, son attitude ne constituerait pas en soi une preuve d’insubordination ou de manque de respect, mais plutôt l’expression de préoccupations légitimes concernant la gestion des projets et les qualifications professionnelles pour les mener à bien.

Concernent finalement le prétendu manque à délivrer le travail lui confié, il serait indéniable qu’il aurait continué de fournir un travail de qualité exceptionnelle malgré un environnement de travail hostile et il aurait toujours agi dans le meilleur intérêt de la BCL, cherchant à ajouter de la valeur à l’institution même lorsqu’il n’était pas directement sollicité, voire privé de travail et mis à l’écart.

Ainsi, les réalisations et les améliorations apportées par ses soins auraient non seulement permis à la BCL de progresser dans ses projets mais aussi de renforcer ses capacités opérationnelles, sans qu’il n’ait cependant reçu l’appréciation et la reconnaissance professionnelles qu’il méritait, situation à qualifier d’« injustice » due à une pratique de favoritisme au sein de la BCL et un manque de reconnaissance de ses compétences. Sur ce point, il signale encore qu’une entreprise d’évaluation externe l’aurait retenu comme meilleur candidat pour le poste de chef de la section FS3 et lui aurait même recommandé de quitter la BCL en raison du manque de reconnaissance lui apporté.

Il se dégage de la lettre de résiliation du contrat de travail de Monsieur (A) du 28 novembre 2022 que la BCL lui a reproché des manquements aux articles l’article 9, paragraphes (1) et (2), et 10, paragraphe (1), de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après « le statut général », rendues applicables aux employés de l’Etat en vertu de l’article 1er, paragraphe (5), du statut général, articles de la teneur suivante :

21[art. 9] « 1. Le fonctionnaire est tenu de se conformer consciencieusement aux lois et règlements qui déterminent les devoirs que l’exercice de ses fonctions lui impose.

Il doit de même se conformer aux instructions du gouvernement qui ont pour objet l’accomplissement régulier de ses devoirs ainsi qu’aux ordres de service de ses supérieurs. » 2. Il est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées ; il doit prêter aide à ses collègues dans la mesure où l’intérêt du service l’exige ; la responsabilité de ses subordonnés ne le dégage d’aucune des responsabilités qui lui incombent ».

[art. 10] « 1. Le fonctionnaire doit, dans l’exercice comme en dehors de l’exercice de ses fonctions, éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à la dignité de ces fonctions ou à sa capacité de les exercer, donner lieu à scandale ou compromettre les intérêts du service public.

Il est tenu de se comporter avec dignité et civilité tant dans ses rapports de service avec ses supérieurs, collègues et subordonnés que dans ses rapports avec les usagers de son service qu’il doit traiter avec compréhension, prévenance et sans aucune discrimination ».

A l’instar des premiers juges, la Cour note que la BCL reproche en substance à Monsieur (A) comme motifs justifiant la résiliation du contrat de travail d’« importantes difficultés relationnelles » avec ses collègues de travail en général et, plus particulièrement, avec son supérieur hiérarchique, Monsieur (C), son insubordination jugée contraire à l’article 9 du statut général, son manque de respect envers son supérieur hiérarchique, qualifié de contraire à l’article 10 du statut général et à l’article 6 de son contrat de travail, son refus d’exécuter les tâches lui confiées et d’avoir ainsi agi en contravention avec les obligations inscrites à l’article 9, paragraphe (2), du statut général et son refus d’accepter toute autorité de la part de sa hiérarchie, raisons qui d’après la BCL ont « obér[é] la relation de confiance qui devrait pourtant présider entre nous ».

La Cour partage entièrement et fait sienne l’analyse détaillée et exhaustive des premiers juges dans le jugement entrepris les ayant amenés à retenir que les faits reprochés à l’appelant sont à qualifier de « raisons dûment justifiées » au sens de l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 justifiant la résiliation du contrat de travail de Monsieur (A) avec effet immédiat.

Concernant plus particulièrement le refus d’exécuter les tâches lui confiées et les actes d’insubordination et de dénigrement vis-à-vis de son supérieur hiérarchique, Monsieur (C), les premiers juges se sont référés à bon escient aux nombreux extraits de courriels rédigés par Monsieur (A) pendant la période de mai 2019 à septembre 2020, n’hésitant même pas dans ce contexte à qualifier son supérieur hiérarchique de personne inexpérimentée et non-qualifiée au sein du département FS3. (« I understand you have no experience in this field (…), I was deliberately prevented from performing my role, while someone manifestly unqualified attempted to assume it (…), It will look ridiculous externally if I’m obliged to rubbish an unworkable and amateurish proposition (…) ».

Dans ce contexte, c’est encore à juste titre que les premiers juges ont retenu qu’il n’appartenait pas à Monsieur (A) de critiquer les décisions internes de la BCL, voire son organisation et l’utilité des tâches lui confiées, pour justifier son inaction, mais qu’il lui appartenait au contraire de suivre les instructions lui données par son supérieur hiérarchique en conformité avec l’article 9, 22paragraphe (1), de la loi du 16 avril 1979 prévoyant que l’agent doit se conformer aux ordres de service de ses supérieurs.

L’attitude de Monsieur (A) par rapport à son supérieur hiérarchique, respectivement vis-à-vis d’autres collaborateurs de la BCL se trouve encore confirmée par le contenu d’une attestation testimoniale datée au 27 avril 2023 de Monsieur (J), ancien directeur de la BCL, de laquelle ressort que l’appelant n’a cessé de discréditer, même en public, le travail du nouveau responsable [Monsieur (C)], qu’il a refusé tout changement d’attitude allant jusqu’à récuser toute forme de coopération avec son chef hiérarchique et décrivant dans le chef du concerné un comportement « teinté d’arrogance » vis-à-vis de ses collègues de travail plus jeunes ainsi qu’une « attitude non-

coopérative voire dédaigneuse ».

Quant à la qualité du travail fourni par Monsieur (A), c’est encore à juste titre que les premiers juges ont relevé qu’il se dégageait de l’attestation testimoniale de Monsieur (J) qu’il « est apparu assez vite que Mr. (A) se refusait de faire son analyse de l’existant. Il se cantonnait à une réplication sommaire des standards qu’il déclarait best practice et il s’attendait à ce que nous les appliquions tels quels. Nous avons reçu de sa part aucune proposition qui nous aurait permis d’avancer dans le sens souhaité par la Direction, étant donné notre situation particulière. Dans la plupart de nos discussions, il s’est cantonné à relever l’insuffisance de nos ressources et de leurs connaissances par rapport à des normes qu’il présentait comme standards de l’industrie ».

Le comportement affiché par l’intéressé n’a par ailleurs guère changé au moment où la BCL, afin de trouver une solution pour ces problèmes relationnels, avait proposé au courant de l’été 2021 à Monsieur (A) une réaffectation au sein de la section FS2 en qualité de « Enterprise Architect Consultant », section gérée par Monsieur (I), à savoir la personne avec laquelle l’appelant semblait le mieux s’entendre. En effet, l’appelant refusait de signer dans une première phase la fiche de fonction lui adressée par le département des ressources humaines et l’avenant à son contrat de travail en estimant son nouveau titre de « consultant » comme dégradant voire humiliant et exprimant le désir d’être soumis à la seule direction de la BCL, ce qui a incité la BCL, par un courrier du 16 décembre 2021, à lui assurer que l’affectation à la section FS2 n’aurait pas d’impact sur son grade, rang, traitement, carrière et évolution de carrière et en le rendant attentif au fait qu’en cas de refus de sa part du changement d’affectation lui proposé, il pourrait être considéré comme démissionnaire au sens de l’article 6, paragraphe (5), du statut général.

Or, tel que relevé ci-avant, l’appelant pour ne pas être considéré comme démissionnaire, a finalement signé l’avenant à son contrat de travail tout en biffant la fonction et le titre lui proposés, essayant d’imposer ainsi une modification unilatérale de son contrat de travail et s’opposant de nouveau à toute autorité.

Au vu du comportement ainsi adopté par Monsieur (A) depuis au moins l’année 2019, la Cour arrive à la conclusion que c’est à juste titre que la BCL a retenu à l’encontre de l’appelant des manquements aux articles 9, paragraphes (1) et (2), et 10, paragraphe (1), du statut général et a estimé que la poursuite de la relation de travail avec l’appelant s’avérait impossible, étant rappelé que l’impératif de la bonne marche d’un établissement public comme la BCL requiert l’existence d’une relation de confiance indéfectible avec et entre ses agents, autorisant de sorte celle-ci à 23résilier avec effet immédiat le contrat de travail entre parties sur base de l’article 7, paragraphe (1), de la loi du 25 mars 2015.

Cette conclusion n’est pas remise en cause par les vagues accusations de l’appelant afin de justifier son comportement à son lieu de travail en raison d’une prétendue privation expresse de travail, de son exclusion systématique de réunions, de groupes de travail et des comités existant au sein de la BCL, d’une inadéquation des directives reçues par sa direction « avec les standards de l’industrie et les meilleurs pratiques », d’un manque de reconnaissance professionnelle, d’une pratique de favoritisme existant au sein de la BCL, ainsi que d’un harcèlement moral et psychologique exercé par ses supérieurs hiérarchiques.

En effet, les contestations formulées à ce niveau par l’appelant ne sont nullement étayées et restent en l’état de pures allégations voire sont même contredites par les échanges d’e-mails, ainsi que par l’attestation testimoniale de Monsieur (J), produits en cause. Lesdites pièces, loin de confirmer l’argumentation de Monsieur (A) par laquelle il tente de minimiser les reproches professionnels formulés par la BCL, sont de nature à démontrer que le véritable problème rencontré par l’appelant pratiquement tout au long de son engagement au sein de la BCL résidait dans son incapacité à accepter la hiérarchie existante avec les difficultés relationnelles s’en dégageant, surtout à la suite de la réorganisation du département « Finance et Stratégie » avec effet au 1er avril 2019 et la création de la section FS3 sous la direction de Monsieur (C), poste de directeur pour lequel l’appelant estimait dû être nommé en lieu et place de celui-ci. Ce comportement négatif affiché par Monsieur (A) se trouve encore corroboré par le constat que celui-ci a dans une première phase refusé de signer l’avenant à son contrat de travail en vue de sa réaffectation à la section FS2, section gérée par Monsieur (I), au motif qu’il voulait uniquement être subordonné à la seule direction de la BCL, desiderata illustrant de nouveau les difficultés de l’appelant à accepter la hiérarchie existant au sein de la BCL.

L’appel n’étant dès lors pas fondé, il y a lieu d’en débouter l’appelant et de confirmer le jugement entrepris.

Monsieur (A) sollicite encore l’allocation d’une indemnité de procédure de 3.000.- € pour la première instance et de 3.000.- € pour l’instance d’appel.

Eu égard à l’issue du litige, ladite demande en allocation d'une indemnité de procédure est à rejeter.

La demande en paiement d’une indemnité de procédure de 3.000.- € formulée par la BCL est également à rejeter comme étant non fondée, celle-ci ne justifiant pas à suffisance en quoi il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais non compris dans les dépens, étant relevé que le seul fait que l’appel est considéré comme non fondé ne constitue pas une telle justification suffisante.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l'égard de toutes les parties ;

24reçoit l'appel du 1er août 2024 en la forme ;

au fond, déclare l’appel non justifié et en déboute Monsieur (A) ;

partant, confirme le jugement du 26 juin 2024 ;

déboute Monsieur (A) et l’établissement BANQUE CENTRALE DU LUXEMBOURG de leurs demandes respectives en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’appelant aux dépens de l'instance d'appel.

Ainsi délibéré et jugé par :

Henri CAMPILL, vice-président, Lynn SPIELMANN, premier conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Jean-Nicolas SCHINTGEN.

s. SCHINTGEN s. CAMPILL 25


Synthèse
Numéro d'arrêt : 50850C
Date de la décision : 30/01/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2025-01-30;50850c ?

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