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28/01/2025 | LUXEMBOURG | N°50751C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 28 janvier 2025, 50751C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50751C ECLI:LU:CADM:2025:50751 Inscrit le 15 juillet 2024 Audience publique du 28 janvier 2025 Appel formé par Madame (A1), épouse (A2), …, contre un jugement du tribunal administratif du 5 juin 2024 (n° 47104 du rôle) ayant statué sur le recours de Monsieur (B), …, et de Madame (C), veuve (C1), …, dirigé contre deux décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal en matière de permis de construire Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 50751C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le

15 juillet 2024 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50751C ECLI:LU:CADM:2025:50751 Inscrit le 15 juillet 2024 Audience publique du 28 janvier 2025 Appel formé par Madame (A1), épouse (A2), …, contre un jugement du tribunal administratif du 5 juin 2024 (n° 47104 du rôle) ayant statué sur le recours de Monsieur (B), …, et de Madame (C), veuve (C1), …, dirigé contre deux décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal en matière de permis de construire Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 50751C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 15 juillet 2024 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame (A1), épouse (A2), demeurant à L-…, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 5 juin 2024 (n° 47104 du rôle) déclarant recevable et fondé le recours en annulation de Monsieur (B), demeurant à L-…, et de Madame (C), veuve (C1), demeurant à L-…, de manière à annuler les décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal des 29 avril et 30 novembre 2021 y visées contenant l’autorisation de bâtir n°2021/0058 dudit bourgmestre au profit de Madame (A1), préqualifiée, et son refus subséquent de la « révoquer » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Patrick KURDYBAN, demeurant à Luxembourg, immatriculé auprès du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, du 24 juillet 2024 portant signification de cette requête d’appel au consorts (B) et (C), veuve (C1), préqualifiés ;

Vu l’exploit du même huissier de justice du 30 juillet 2024 portant signification de cette requête d’appel à l’administration communale de Kopstal représentée par son collège des bourgmestre et échevins en fonctions, établie en sa maison communale sise à L-8189 Kopstal, 28, rue de Saeul ;

1Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2024 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Kopstal ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le même jour par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des consorts (B) et (C), veuve (C1), préqualifiés ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 14 novembre 2024 par Maître Nicky STOFFEL au nom de l’appelante ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 décembre 2024 par Maître Anne-Laure JABIN au nom des consorts (B) et (C), veuve (C1), préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 16 décembre 2024 par Maître Steve HELMINGER au nom de l’administration communale de Kopstal ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont appel ;

Le magistrat-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Carolyn LIBAR, en remplacement de Maître Nicky STOFFEL, Steve HELMINGER et Anne-Laure JABIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 7 janvier 2025.

Monsieur (B) est propriétaire de la maison sise à L-8154 Bridel, 1, rue de Steinsel, érigée sur la parcelle portant le numéro cadastral 57/1007, maison …, tandis que Madame (C), veuve (C1), est propriétaire de la maison d’habitation sise à L-8151 Bridel, 28, rue de Schoenfels, érigée sur la parcelle portant le numéro cadastral 55/2561, ainsi que des parcelles cadastrées sous les numéros 55/2562, 55/2563, 55/2564, 55/2565 et 55/2566 sises en enfilade derrière la parcelle numéro 55/2561 abritant ladite maison d’habitation.

Les propriétés respectives de Monsieur (B) et de Madame (C), veuve (C1) sont adjacentes respectivement du côté gauche et du côté droit à une série de parcelles numérotées, vues à partir de la rue de Schoenfels, 56/2525, 56/2526, 56/2527, 56/2528, 56/2529, 56/2530 et 56/2531, ces parcelles étant issues d’une opération de morcellement.

En date du 24 juillet 2020, le bourgmestre de la commune de Kopstal, ci-après « le bourgmestre », délivra des autorisations de bâtir sur quatre des parcelles issues de ce morcellement.

Monsieur (B) et Madame (C), veuve (C1), ci-après « les consorts (B-C) », firent introduire en date du 23 octobre 2020 un recours gracieux contre chacune de ces quatre autorisations de bâtir, lesquelles firent finalement l’objet, après que les bénéficiaires de ces autorisations eurent pu faire 2valoir leurs observations, d’une décision de retrait en date du 28 janvier 2021 de la part du bourgmestre.

Il est constant en cause que le 10 mars 2021, une réunion eut lieu entre les responsables communaux, les consorts (B-C) et les bénéficiaires des autorisations de construire retirées le 28 janvier 2021.

Les consorts (B-C) prirent connaissance début mai 2021 de nouveaux certificats dits « point rouge » pour des autorisations de bâtir délivrées le 29 avril 2021 sur les mêmes parcelles par le bourgmestre, ces autorisations étant ci-après désignées par « les autorisations du 29 avril 2021 ». Parmi ces autorisations figure celle portant le numéro de référence 2021/0058, émise au profit de Madame (A1) et portant sur la construction d’une maison unifamiliale à L-8154 Bridel, 7, rue de Steinsel, sur les parcelles cadastrées sous les numéros 57/1746 et 57/1006, ladite autorisation étant ci-après désignée par « l’autorisation 0058 ».

Une demande des consorts (B-C) en communication des autorisations de bâtir resta sans réponse de la part de l’administration communale de Kopstal.

Les consorts (B-C), après prise de connaissance à la maison communale des autorisations et plans afférents, introduisirent par courrier du 28 juillet 2021, réceptionné le lendemain, un recours gracieux visant, d’après eux, chacune des autorisations du 29 avril 2021.

Par décision du 30 novembre 2021, le bourgmestre, après avoir initialement proposé de révoquer les autorisations litigieuses par courriers du 30 septembre 2021, décida cependant de les maintenir pour les motifs suivants :

« (…) Par la présente, je me permets de faire suite à mes courriers du 30 septembre 2021 vous informant de ma volonté de retirer les autorisations sous rubrique suite à un recours gracieux introduit en date du 29 juillet 2021 par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, au nom et pour compte de Monsieur (B) et Madame (C1).

En date du 15 octobre 2021, Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, a introduit deux courriers en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059.

En date du 18 octobre 2021, Maître Hervé HANSEN, avocat à la Cour, a introduit un courrier en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0055 et 2021/0056.

Par un courrier du 28 octobre 2021, l’Administration communale de Kopstal a donné quelques précisions quant aux propositions de révocation en question.

3En date du 22 novembre 2021, Maître Hervé HANSEN a introduit un courrier en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0055 et 2021/0056.

Après avoir analysé tous les moyens et arguments présentés, soit dans le recours gracieux du 29 juillet 2021, soit pour donner suite à la proposition de révocation des autorisations, je suis arrivé à la conclusion suivante :

Les cinq autorisations de construire en question se basent sur des autorisations de morcellement délivrées en 2018/2019 qui reprenaient exactement l’implantation des futures constructions.

Bénéficiaire d’une telle autorisation de morcellement était entre autres Madame (C1) qui, à l’époque, ne s’opposait ni à sa propre autorisation de morcellement, ni à celles délivrées pour les parcelles adjacentes.

On peut donc retenir qu’il n’y avait aucun recours contre le projet urbanistique planifié sur l’ensemble des différentes parcelles de terrain, bien au contraire.

Or aujourd’hui, la même Madame (C1) demande la révocation des autorisations de construire délivrées sur base des mêmes considérations que les autorisations de morcellement précitées.

Ensuite Monsieur (B), autre signataire du recours gracieux du 29 juillet 2021, a bénéficié lors de la construction d’un immeuble sur la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro 57/1007 d’une dérogation similaire quant aux reculs à celles demandées par les bénéficiaires des autorisations de construire litigieuses.

Afin d’éviter toute rupture d’égalité de traitement et notamment afin de se conformer au principe général de confiance légitime qui a été consacré tant par la jurisprudence communautaire en tant que principe du droit communautaire que par la jurisprudence nationale en tant que principe général du droit, il n’y a pas lieu de faire droit au recours gracieux introduit en date du 29 juillet 2021. Les autorisations n° 2021/0055, 2021/0056, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059 du 8 juillet 2021 ne sont dès lors pas révoquées.

La présente décision est susceptible d’un recours devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d’un avocat à la Cour dans un délai de 3 mois à partir de la notification de la présente. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 1er mars 2022, inscrite sous le numéro 47104 du rôle, les consorts (B-C) firent introduire un recours tendant, aux termes de son dispositif, à l’annulation de l’autorisation 0058 du 29 avril 2021 et de la décision, précitée, du bourgmestre du 30 novembre 2021, les autres autorisations du 29 avril 2021 ayant, elles aussi, fait 4l’objet de recours contentieux introduits par les consorts (B-C) le même jour, inscrits respectivement sous les numéros 47102, 47103, 47105 et 47106 du rôle.

Par requête séparée déposée le même jour, inscrite sous le numéro 47109 du rôle, ils introduisirent encore une demande tendant à voir prononcer un sursis à exécution de l’autorisation de construire déférée en attendant la solution de leur recours au fond, inscrit sous le numéro 47104 du rôle, demande à laquelle le président du tribunal administratif fit droit, par ordonnance du 25 mars 2022.

Par quatre ordonnances du même jour, portant respectivement les numéros 47107, 47108, 47110 et 47111 du rôle, le président du tribunal administratif fit encore droit aux demandes de sursis à exécution introduites par les consorts (B-C) le 1er mars 2022 dans le cadre de leurs recours parallèles visant les autres autorisations du 29 avril 2021.

Par courriers du 16 mai 2022, le bourgmestre annonça aux bénéficiaires des autorisations du 29 avril 2021 son intention de procéder au retrait de ces dernières, compte tenu des susdites ordonnances du président du tribunal administratif du 25 mars 2022.

Par courriers du 19 juillet 2022, il informa cependant lesdits bénéficiaires du maintien des autorisations en question.

Par jugement du 5 juin 2024, le tribunal déclara recevable et fondé le recours en annulation des demandeurs de manière à annuler les décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal déférées du 29 avril 2021 portant autorisation de la construction litigieuse de Madame (A1) et du 30 novembre 2021 portant refus de « révoquer » celle-ci.

Ce même jugement débouta encore les demandeurs ainsi que Madame (A1) de leurs demandes en allocation d’une indemnité de procédure respectives, tout en rejetant la demande en distraction des frais formulée par le mandataire de Madame (A1) et en condamnant l’administration communale de Kopstal aux frais et dépens.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 15 juillet 2024, Madame (A1) a fait régulièrement entreprendre le jugement précité du 5 juin 2024 dont elle sollicite la réformation dans le sens de voir dire que les premiers juges auraient dû rejeter le recours en annulation inscrit sous le numéro 47104 du rôle des consorts (B-C) et dire en conséquence que les décisions du bourgmestre des 29 avril et 30 novembre 2021 sont à maintenir.

En premier lieu, la partie appelante reprend son moyen tendant à voir constater un défaut d’intérêt à agir à la fois dans le chef de Monsieur (B) et de Madame (C), veuve (C1).

L’appelante déclare expressément ne pas maintenir son moyen formulé à l’encontre de Madame (C), veuve (C1), tiré d’un défaut de qualité voire d’une violation du principe d’estoppel, c’est-à-dire de l’interdiction de se contredire au détriment d’autrui, celle-ci ayant en effet, dans un 5premier stade, participé aux côtés des consorts (A) en vue de l’obtention d’autorisation de morcellement parallèlement à celle de ceux-ci, tout en se dissociant actuellement d’eux au stade des autorisations de construire sollicitées en conséquence.

L’appelante propose ensuite une démarche de nature à analyser séparément la qualité de voisin de l’un et de l’autre par rapport aux parcelles 57/1746 et 57/1006 faisant l’objet de l’autorisation de construire litigieuse 0058 à la base du présent appel.

Ce serait dans cette optique que l’analyse de la Cour devrait dégager si l’un et/ou l’autre se trouvait dans une situation de grief vérifié à partir de l’autorisation de construire critiquée concernant son impact sur les propriétés respectives des deux intimés en question, demandeurs originaires.

Dans la mesure où la propriété de Monsieur (B) ne toucherait guère la parcelle litigieuse en l’espèce, son intérêt à agir ne se trouverait nullement vérifié, contrairement à l’analyse des premiers juges.

En ce que l’autorisation de construire litigieuse porte sur une construction libre des quatre côtés, l’intérêt de Madame (C), veuve (C1), serait partiellement incompréhensible.

Contrairement à d’autres cas de figure parallèlement soumis à la Cour, l’on ne serait pas en présence de questions relatives à des maisons jumelées, voire à l’ensoleillement.

L’appelante poursuit que dans la mesure où la parcelle de Madame (C), veuve (C1), ne serait pas non plus construite encore, l’on verrait mal comment l’autorisation de construire lui conférée pourrait avoir un impact négatif sur la situation de cette voisine. Ceci serait d’autant plus vrai que son terrain serait directement adjacent à la rue de Steinsel et qu’aucune question de servitude ne se poserait non plus par rapport à la propriété de Madame (C), veuve (C1).

Par rapport à Monsieur (B), l’appelante relève encore que les auteurs de celui-ci auraient pu ériger en 1962 les constructions se trouvant actuellement sur sa parcelle longeant la rue de Steinsel sur laquelle il se base pour fonder son intérêt à agir, alors qu’ils n’auraient pu ce faire qu’en raison d’une dérogation accordée à l’époque.

Dès lors, actuellement Monsieur (B) ne saurait se prévaloir négativement du fait que l’appelante n’a demandé et obtenu qu’un traitement analogue en bénéficiant également de pareille dérogation. Aucune aggravation de la situation de Monsieur (B) ne serait dès lors à dégager non plus sous cet aspect.

Les consorts (B-C), chacun en ce qui le concerne, concluent à la confirmation du jugement dont appel en ce qu’il a retenu que leur intérêt à agir respectif se trouvait à suffisance vérifié en cause et invoquent, partant, le rejet du moyen d’irrecevabilité de l’appelante sous tous ses aspects.

6La commune ne prend pas position expressément quant à ce moyen et constate le désaccord des parties y relativement.

La Cour est tout d’abord amenée à rejoindre les premiers juges en ce qu’ils ont retenu que pour apprécier l’existence d’une aggravation de la situation de propriétaire dans le chef des demandeurs initiaux, le juge saisi ne peut méconnaître la réalité des choses ni les circonstances particulières de l’espèce.

Ainsi convient-il de considérer l’autorisation 0058 non point de manière isolée, mais il faut se rendre compte que le terrain par elle couvert fait partie, avec les autres terrains adjacents des consorts (A), d’un ensemble de propriétés d’abord morcelés, puis, liées entre elles par une voie privée nouvellement créée de manière à avoir conféré à chacune des nouvelles parcelles créées une potentialité de constructibilité concrétisée à travers les autorisations de construire actuellement critiquées dans le cadre des cinq appels parallèlement toisés par la Cour par arrêt de ce jour, dont le présent.

Il convient clairement de voir que, tel que les premiers juges l’ont encore clairement dégagé à partir des énonciations du mandataire de la commune à l’audience, le système des morcellements/autorisations de construire en question trouve son origine dans la sanction infligée à la commune de Kopstal n’ayant pas encore mis sur orbite son PAG refondu à la date limite retenue par le ministre de l’Intérieur au 1er novembre 2019, face aux exigences de la loi du 19 juillet 2004 de manière à de ne plus pouvoir utilement voir confectionner et autoriser des PAP.

La Cour constate que cette sanction, qui frappe a priori la commune, emporte néanmoins des effets certains par rapport aux propriétaires de terrains faisant partie de l’assiette communale en question.

Dans la mesure où aucune critique valable n’a été élevée, fût-ce par voie incidente, contre cette sanction, force est à la Cour de constater que celle-ci, de manière non contestée, se trouve finalement au cœur de la problématique lui actuellement soumise, en ce que cette sanction, du moment que l’on en admet le principe, devait valoir normalement jusqu’à la date de la mise sur orbite du PAG refondu ayant eu lieu bien postérieurement par rapport aux dates respectives des autorisations à construire actuellement critiquées et des décisions de refus de « révoquer » du bourgmestre également déférées.

Ainsi, l’initiative des consorts (A) considérée globalement ne peut pas être valablement analysée sans la mettre en rapport avec l’interdiction de voir passer des PAP dans la commune de Kopstal à l’époque et, parallèlement, la nécessité flagrante de pareil PAP, telle qu’admise implicitement par certaines prises de position du bourgmestre s’agissant précisément de terrains non viabilisés, ensemble la nécessité de mise en place de structures de voire pour l’essentiel non existantes jusque lors sur le terrain.

7C’est cette problématique même qui fonde l’intérêt à la fois de Monsieur (B) et de Madame (C), veuve (C1), et ce même si a priori leurs situations respectives pouvaient s’avérer être différentes.

Il est constant que vue à partir de la rue de Steinsel la bande de terrain de Monsieur (B) se voit superposée vers le Nord et confrontée vers l’Est par les différents terrains des consorts (A) par rapport auxquels la propriété de Madame (C), veuve (C1), se superpose à nouveau vers le Nord, les terrains des consorts (A) se trouvant en quelque sorte en sandwich entre les propriétés respectives de Monsieur (B) au Sud et Madame (C), veuve (C1), au Nord.

Outre le fait que la mise en place d’une nouvelle structure de voirie, ensemble l’implantation des constructions projetées comprenant la problématique des dénivelés et, plus loin, des évacuations d’eaux usées, impactent respectivement les deux séries de terrains voisins au Nord et au Sud, l’autre question importante est celle de savoir quelle situation pouvait se dégager valablement d’un PAP à instaurer nécessairement et dans quelle mesure les terrains voisins au Nord et au Sud seraient appelés à faire partie de son assiette.

Il est vrai qu’également au niveau du PAP NQ prévu à l’endroit dans le cadre du projet de PAG refondu mis sur orbite non seulement les terrains de Madame (C), veuve (C1), mais encore celui de Monsieur (B) font partie de son assiette.

A ce stade non définitif, ces deux séries de terrains se trouvent dans une situation semblable sous ce dernier aspect.

Sans dès lors devoir entrer dans le détail des arguments avancés, il découle des éléments de systémique ci-avant décrits qu’à la fois Monsieur (B) et Madame (C), veuve (C1), revêtent un intérêt à agir suffisant pour voir contrôler la légalité de l’autorisation de construire critiquée du 29 avril 2021, ainsi que de la décision de refus « de révoquer » du 30 novembre 2021 également déférée.

A la suite des premiers juges, le moyen d’irrecevabilité pour défaut d’intérêt à agir est à rejeter.

Plus loin au fond, l’appelante retient que les premiers juges ont constaté à bon escient que ses parcelles litigieuses 57/1006 et 57/1746 disposent d’un accès direct à la voirie publique au niveau de la rue de Steinsel, de sorte que ces terrains ne pourraient pas a priori être considérés comme non viabilisés.

Elle critique cependant le jugement dont appel en ce que les premiers juges sont venus à la conclusion que le bourgmestre aurait violé les dispositions de l’article 37, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004 en ce que l’autorisation de construire délivrée ne serait pas conforme à la réglementation communale d’urbanisme et, plus particulièrement, à l’exigence du recul postérieur par rapport au terrain adjacent de Madame (C), veuve (C1), sans prendre en considération une 8possibilité de dérogation dont disposerait le bourgmestre notamment dans le cas d’un alignement pré-existant dans un quartier d’habitation.

Avant d’entamer plus loin l’analyse du moyen, il convient tout d’abord de relever que le tribunal a, parmi une série de moyens au fond tendant à voir constater la non-conformité de l’autorisation de construire litigieuse à la réglementation communale d’urbanisme, analysé en premier lieu le moyen tenant au non-respect du recul postérieur réglementaire.

De manière systémique, il convient dès lors, en présence du moyen de la partie appelante tendant à voir dire erroné le raisonnement du tribunal, de traiter d’abord ce moyen tiré du non-respect du recul postérieur réglementaire ayant emporté l’annulation de l’autorisation de construire litigieuse et du refus de révoquer subséquent.

De cette analyse découlera soit une confirmation du jugement dont appel, auquel cas l’analyse de la Cour pourra s’arrêter à l’endroit à l’instar de celle du tribunal, l’autorisation de construire déférée se trouvant définitivement annulée, de même que le refus de révoquer également critiqué.

Au cas contraire où, par réformation du jugement dont appel, le moyen tiré du non-respect du recul postérieur serait déclaré non justifié, il importerait d’analyser les autres moyens initialement invoqués par les demandeurs en première instance dans la mesure où ils se trouvent maintenus en instance d’appel.

En appel, la partie appelante ne conteste pas que le recul postérieur observé par rapport au terrain de Madame (C), veuve (C1), adjacent à l’arrière, vu à partir de la rue de Steinsel, est de deux mètres. Elle reproche au tribunal de ne pas avoir fait application des dérogations prévues à l’article 2.2.5 de la partie écrite du PAG et, plus particulièrement, de celle tirée d’un alignement préexistant dans un quartier d’habitation.

L’appelante fait en effet valoir que les maisons situées le long de la rue de Steinsel auraient des alignements passablement différents et que la maison voisine appartenant à Monsieur (B) aurait un recul quasiment inexistant par rapport au terrain situé juste derrière.

L’appelante explique qu’afin de rencontrer les doléances de Madame (C), veuve (C1), n’ayant pas souhaité être obligée de construire à la limite une maison jumelée à celle par elle projetée, un compromis aurait été trouvé entre voisins dans le sens de voir effectuer un recul postérieur de deux mètres de la limite du terrain de Madame (C), veuve (C1), précisément pour permettre à celle-ci la construction d’une maison isolée et à ne pas l’obliger à mettre en place une maison jumelée par la suite.

La commune de Kopstal aurait expressément accepté que par rapport à ladite limite de propriété postérieure, l’immeuble voisin à construire de manière isolée observerait un recul de huit 9mètres, de sorte qu’au total une distance de dix mètres séparerait celle-ci de la construction projetée de l’appelante d’après les plans autorisés.

L’appelante estime encore avoir pu profiter de la dérogation de l’article 2.2.2.2 de la partie écrite du PAG concernant l’implantation et la profondeur des constructions, lequel article préciserait expressément que l’alignement pourra déroger aux dispositions de l’alinéa précédent.

L’appelante souligne encore que le propriétaire de la parcelle (B) aurait pu profiter à l’époque, dans les années 1960, d’une telle dérogation et estime que, pour le moins, il existerait une inégalité de traitement si elle n’était pas traitée de la même manière. Cette inégalité de traitement serait alors contraire à l’article 15 de la Constitution.

Tandis que les consorts (B-C) sollicitent la confirmation du jugement dont appel, essentiellement sur base des motifs y énoncés découlant de la non-conformité de l’autorisation de construire délivrée pour non-respect du recul postérieur et de la non-applicabilité des dérogations invoquées, la commune estime qu’à la base, la parcelle litigieuse de l’appelante, non issue comme telle du morcellement de 2019, mais d’une délimitation bien antérieure, serait tout simplement inconstructible.

Compte tenu d’un recul antérieur de 6,20 mètres par rapport à la rue de Steinsel et d’une profondeur de la construction n’atteignant pas 9 mètres, le recul arrière restant varierait approximativement entre 3 et 4 mètres. Autrement dit, en imposant un recul postérieur de 8 mètres pour cette parcelle, la maison autorisable n’aurait plus eu qu’une profondeur n’atteignant même pas 5 mètres.

Compte tenu du parcellaire reposant sur des délimitations plus anciennes, le terrain litigieux aurait été inconstructible si la commune n’avait pas fait application de la dérogation prévue à l’article 2.2.5 c) de la partie écrite du PAG.

L’article 2.2.2.4 de la partie écrite du PAG dispose que « le recul des constructions postérieures de la parcelle sera égal ou supérieur à une fois et demie de la hauteur à la corniche, mais sera au moins de 8 mètres (…) ».

Il n’est plus contesté en cause que ce recul postérieur doit être calculé en ayant comme repère la rue de Steinsel.

Pour les besoins de la discussion, le recul postérieur est en l’occurrence regardé comme correspondant au minimum réglementaire de 8 mètres, sans préjudice de la question de la hauteur de la corniche impliquant, le cas échéant, un recul postérieur même supérieur à cette limite.

Il se dégage des éléments du dossier que par rapport aux parcelles litigieuses, la parcelle attenante à l’arrière par rapport à laquelle un recul postérieur doit être observé n’est point une parcelle appartenant à Madame (C), veuve (C1), mais bien la parcelle 56/2531 faisant partie de 10celles appartenant aux consorts (A) et faisant l’objet de l’autorisation 0059, le recours afférent étant toisé par arrêt parallèle de ce jour (n° 50752C du rôle).

Tel que le tribunal l’a dégagé à bon escient, c’est la distance entre l’arrière de la construction projetée litigieuse dans le présent rôle et celle projetée sur la parcelle 56/2531 qui est de huit mètres. Partant, le recul postérieur observé par la construction litigieuse au présent rôle est bien inférieur à huit mètres et, à défaut d’indication précise sur les plans autorisés, est même à évaluer à moins de la moitié des huit mètres en question d’après les configurations des plans d’autorisation en question.

Dès lors, pour pouvoir être autorisé, le bourgmestre devait avoir recours pour ce projet aux dérogations prévues en la matière par la réglementation communale d’urbanisme applicable à l’époque.

L’article 2.2.5 de la partie écrite du PAG prévoit ainsi des dérogations pouvant être, le cas échéant, accordées par le bourgmestre en s’exprimant comme suit :

« Le bourgmestre pourra accorder ou imposer une dérogation aux dispositions relatives à la hauteur et aux reculs de constructions pour motifs graves.

Sont considérés comme étant des motifs graves :

a) les problèmes découlant de la topographie particulière des lieux telle que la forte déclivité du terrain à construire ou d’un alignement préexistant dans un quartier d’habitation ;

b) la nécessité de raccorder esthétiquement une nouvelle construction à des constructions mitoyennes récentes ;

c) le fait que les constructions voisines récentes ont rendu impropre à la construction une parcelle non construite devenue place à bâtir à la suite d’une autorisation de lotissement ou de morcellement antérieure au présent projet d’aménagement. ».

Il résulte du mémoire en réponse communal que le bourgmestre a fait application de la dérogation inscrite au point c) de l’article 2.2.5 de la partie écrite du PAG.

L’appelante par contre s’appuie sur les dérogations inscrites au point a) du même article et se fonde sur un alignement préexistant dans le quartier d’habitation en question.

Il est vrai que cette demande de dérogation relative au point a) a été formulée pour la première fois en appel par l’appelante. Même à ne la considérer que comme moyen nouveau admissible en appel, elle se heurte au fait que l’alignement préexistant au niveau de la rue de 11Steinsel, s’il était observé en l’occurrence, ne permettrait aucune construction sur la parcelle en question.

Or, tel que les consorts (B-C) l’énoncent à bon escient, le problème dans le présent rôle ne consiste nullement en ce que sans dérogation le terrain litigieux serait inconstructible, mais en ce qu’une construction présentant des dimensions largement supérieures à la surface au sol minimale de 7x10 mètres a été prévue et que pareille construction entre en conflit avec toutes les dispositions réglementaires en vigueur pour ce qui est des reculs sauf le recul antérieur.

Or, sous ces aspects, l’alignement préexistant de la maison (B) et de celle voisine à sa gauche vue à partir de la rue de Steinsel ne peut pas être considérée comme motif grave justifiant une dérogation, du moins pas dans le sens opéré en l’espèce pour la construction projetée qui dépasse largement les potentialités du terrain passablement exigu sur lequel repose encore, en vertu des morcellements de 2019, une servitude de passage du côté de la parcelle (B).

Par voie de conséquence, les conditions pour rentrer dans le cadre de la dérogation prévue au point a), d’ailleurs non utilisée par le bourgmestre, ne se trouvent pas réunies à suffisance dans le cas précis, vu la gravité des motifs à la base exigée, mais non vérifiée, pour qu’elle puisse être valablement retenue.

La possibilité de dérogation du point c) se heurte également à ce que les conditions énoncées ne se trouvent pas réunies.

Ainsi, ce n’est pas le fait de constructions voisines récentes qui a rendu impropre à la construction la parcelle litigieuse de l’appelante, étant contant que la construction (B) remonte à l’année 1962 et que ce n’est pas elle qui a induit pareil caractère à la construction.

Par ailleurs, il n’est pas non plus établi à suffisance en cause que la parcelle litigieuse dans le présent rôle soit issue d’une autorisation de lotissement ou de morcellement qui aurait été antérieure au PAG applicable à l’époque, c’est-à-dire l’ancien PAG d’avant la refonte mise sur orbite postérieurement aux décisions du bourgmestre actuellement litigieuses.

Il ne faut pas perdre de vue que cette parcelle n’est pas issue du morcellement de 2019 et que son origine exacte n’a pas pu être établie valablement en cause au vu des autres considérations qui précèdent.

Quoiqu’il en soit, les conditions d’application de la dérogation prévue au point c) de l’article 2.2.5 de la partie écrite du PAG ne se trouvent de toute façon pas réunies à suffisance en cause.

L’argumentaire de l’appelante tiré d’une inégalité de traitement est également appelé à tomber à faux en ce que sa situation n’est pas comparable à celle de Monsieur (B) dont l’auteur a pu bénéficier au début des années 1960 d’une dérogation dans le contexte de l’époque, tandis qu’il 12est patent, d’après les énonciations qui précèdent, qu’aucune possibilité de dérogation n’a pu être valablement retenue dans le chef de l’appelante.

A défaut de comparabilité suffisante des situations respectives, il n’y a pas lieu de pousser plus loin l’analyse sur base des dispositions de l’article 15 de la Constitution consacrant le principe de l’égalité devant la loi, le contrôle de l’existence d’une inégalité éventuelle présupposant nécessairement l’existence de deux situations suffisamment comparables dont le traitement n’aurait pas été conforme au principe de l’égalité devant la loi.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que la conclusion du tribunal d’une non-conformité de l’autorisation de construire litigieuse à la réglementation communale d’urbanisme, au regard du recul postérieur inférieur à la limite minimale des huit mètres prévus et en l’absence de dérogation valablement possible, est à retenir en l’occurrence.

Pour des raisons analogues, l’annulation du refus de révocation du 30 novembre 2021 est également à confirmer.

Il suit de l’ensemble des éléments qui précèdent que l’appel n’est fondé en aucun de ses moyens et qu’il y a lieu d’en débouter l’appelante et de confirmer le jugement dont appel.

L’appelante sollicite l’allocation d’une indemnité de procédure de 5.000.- € pour l’instance d’appel et de 5.000.- € pour la première instance.

Eu égard à l’issue du litige, cette demande est à rejeter.

Les consorts (B-C) sollicitent l’allocation d’une indemnité de procédure globale de 5.000.- €, soit 2.500.-€ pour chacun, à charge de l’appelante.

Cette demande est également à rejeter, les conditions légales afférentes ne se trouvant point réunies.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel recevable ;

au fond, le dit non justifié ;

partant en déboute la partie appelante ;

confirme le jugement dont appel ;

13rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure présentées respectivement par la partie appelante et par les parties intimées personnes privées ;

condamne la partie appelante aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par :

Francis DELAPORTE, président, Henri CAMPILL, vice-président, Annick BRAUN, conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Jean-Nicolas SCHINTGEN.

s. SCHINTGEN s. DELAPORTE 14


Synthèse
Numéro d'arrêt : 50751C
Date de la décision : 28/01/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2025-01-28;50751c ?

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