La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2024 | LUXEMBOURG | N°50974C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 17 décembre 2024, 50974C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50974C ECLI:LU:CADM:2024:50974 Inscrit le 23 août 2024 Audience publique du 17 décembre 2024 Appel formé par Madame (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 12 juillet 2024 (n° 8986 et 47357 du rôle) en matière de résiliation du stage Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 50974C du rôle, déposée au greffe de la Cour administrative le 23 août 2024 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, en l’étude duquel domicile est élu,

au nom de Madame (A), salariée, demeurant au …, L-…, dirigée contre le jug...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50974C ECLI:LU:CADM:2024:50974 Inscrit le 23 août 2024 Audience publique du 17 décembre 2024 Appel formé par Madame (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 12 juillet 2024 (n° 8986 et 47357 du rôle) en matière de résiliation du stage Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 50974C du rôle, déposée au greffe de la Cour administrative le 23 août 2024 par Maître François MOYSE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, en l’étude duquel domicile est élu, au nom de Madame (A), salariée, demeurant au …, L-…, dirigée contre le jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 12 juillet 2024 (n° 8986 et 47357 du rôle) ayant ordonné la jonction des recours en réformation, sinon en annulation, inscrits sous les numéros 8986 et 47357 du rôle, le premier dirigé contre la décision du ministre d’Etat du 25 juin 1990 portant résiliation de son stage avec effet au 1er août 1990 et la décision confirmative du 13 septembre 1990 intervenue sur recours gracieux du 9 juillet 1990 et le second contre une « décision non datée » du ministre d’Etat portant résiliation de son stage avec effet au 1er août 1990, et ayant déclaré irrecevables ces recours ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 11 octobre 2024 par le délégué du gouvernement pour compte de l’Etat ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 24 octobre 2024 par Maître François MOYSE pour compte de l’appelante ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 22 novembre 2024 par le délégué du gouvernement pour compte de l’Etat ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Laurent HEISTEN, en remplacement de Maître François MOYSE et Monsieur le délégué du gouvernement Tom HANSEN, en leurs plaidoiries à l’audience publique du 3 décembre 2024.

1 Madame (A) fut admise au stage dans la carrière de l’expéditionnaire à l’administration des Postes et Télécommunications avec effet au 1er octobre 1987.

Par arrêté du ministre des Finances du 18 mai 1988, Madame (A) fut transférée à l’administration des Contributions directes à partir du 16 mai 1988.

Par arrêté ministériel du 9 septembre 1988, le stage de Madame (A) auprès de l’administration des Contributions directes fut prorogé jusqu’au 30 septembre 1989.

Par arrêté ministériel du 29 septembre 1989, elle fut transférée d’office de l’administration des Contributions directes à l’administration gouvernementale où elle fut affectée au ministère du Logement et de l’Urbanisme à partir du 1er octobre 1989.

Par arrêté du ministre d’Etat, ci-après « le ministre », du 5 février 1990, le stage de Madame (A) fut prorogé pour une durée d’une année à partir du 1er octobre 1989.

Par courrier du 29 mai 1990, le ministre du Logement et de l’Urbanisme proposa au ministre de procéder à la résiliation du stage de Madame (A) sur base des motifs et considérations suivants :

« (…) Me référant à l'affaire reprise sous rubrique je tiens à vous informer qu'en face du comportement de plus en plus insupportable de Mlle (A) je me dois de vous proposer le recours au licenciement dudit stagiaire et ceci conformément aux dispositions de l'article 2 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l'Etat :

"le licenciement du stagiaire peut intervenir à tout moment, l'intéressé entendu en ses explications. Sauf dans le cas d'un licenciement pour motifs graves, le stagiaire a droit à un préavis d'un mois".

Cette mesure fort grave s'impose en raison de toute une ribambelle de faits qui se sont déroulés les dernières semaines et que veuillez trouver ci-après.

1. Refus d'ordre En vue de ses attributions futures au sein du Ministère - informer les administrés sur les dispositions en matière d'aides au logement, d'autorisations de construire etc. - il a été prévu à ce que Mlle (A) fasse un stage, pour une période temporaire (1 mois) au Service des Aides au Logement. En outre ce stage aurait permis de décharger quelque peu les autres fonctionnaires jusqu'à l'arrivée du personnel demandé.

Mlle (A) a alors clairement refusé de se rendre audit service et a annoncé qu'au cas où cette décision serait maintenue elle produirait des certificats de maladie, ce qu'elle a d'ailleurs fait et ceci une première fois pour la semaine du 14 au 18 mai. Depuis Mlle (A) n'a pas repris son service.

2 Ceci constitue indubitablement un refus d'ordre et est à considérer comme atteinte à l'article 9 du statut général du fonctionnaire qui dispose que: "Il (le fonctionnaire) doit de même se conformer aux instructions du Gouvernement qui ont pour objet l'accomplissement régulier de ses devoirs ainsi qu'aux ordres de service de ses supérieurs." 2. Calomnies et diffamations à l'encontre de ses supérieurs et collègues.

Mlle (A) ne cesse de semer la zizanie parmi le personnel du Ministère du Logement en racontant des mensonges fort graves sur l'intégralité du personnel et même sur certains membres du Ministère de l'Intérieur.

Mlle (A) a même l'audace de faire le tour des ministères afin d'assurer une diffusion adéquate de ses calomnies et diffamations.

Elle porte ainsi atteinte aux dispositions de l'article 10 paragraphe 1 alinéa 2 qui dispose que :

"Il (le fonctionnaire) est tenu à la politesse, tant dans ses rapports de service avec ses supérieurs, collègues ou subordonnés que dans ses rapports avec le public".

3. Sorties non autorisées Comme le montrent les pièces annexées, Mlle (A) présentait pour la semaine du 14 au 18 mai 1990 un certificat qui ne portait aucune mention relative à une autorisation de sortie. Ce n'est qu'un rectificatif du deuxième certificat pour la semaine du 21 au 25 mai 1990 qui prévoit une telle autorisation.

Or il se fait que pendant la première semaine la stagiaire a rôdé à plusieurs reprises en dehors des heures de bureau dans les locaux du Ministère de l'Intérieur et du Ministère de la Famille et de la Solidarité.

Mademoiselle (A) se trouvait par conséquent en infraction avec les dispositions de l'article 17 du règlement grand-ducal du 22 août 1985 fixant le régime des congés des fonctionnaires et employés de l'Etat qui dispose que :

"Pour toute incapacité de travail dépassant 3 jours, l'agent doit présenter un certificat médical mentionnant la durée de l'incapacité de travail, le lieu du traitement, et, le cas échéant, les heures de sortie…." Tous ces faits me semblent justifier le licenciement pour motifs graves de Mlle (A) qui devra par conséquent quitter les services de l'Etat avec effet immédiat. (…) ».

Après que Madame (A) fut entendue par le ministre du Logement et de l’Urbanisme en date du 11 juin 1990, le ministre informa cette dernière, par courrier du 25 juin 1990, de la résiliation de son stage avec effet à partir du 1er août 1990 dans les termes suivants :

3 « (…) Après examen du dossier constitué au sujet de votre comportement pendant la période de stage à l'administration gouvernementale, et compte tenu de la proposition du Ministre du Logement et de l'Urbanisme, je suis au regret de devoir vous signaler que votre stage est résilié avec effet à partir du 1er août 1990.

En effet, le licenciement est motivé par le fait que vous avez contrevenu à plusieurs dispositions du statut général des fonctionnaires de l'Etat, contraventions qui vous ont été d'ailleurs signalées à plusieurs reprises par vos supérieurs hiérarchiques. (…) ».

Le recours gracieux de Madame (A), introduit par un courrier de son mandataire de l’époque du 9 juillet 1990, et ayant fait l’objet d’un rappel en date du 13 août 1990, fut rejeté par une décision ministérielle du 13 septembre 1990 dans les termes suivants :

« (…) Revenant à votre courrier du 9 juillet, respectivement du 13 août 1990 concernant la résiliation du stage de Mlle (A), je vous transmets en annexe la prise de position de Monsieur le Ministre du Logement et de l'Urbanisme, accompagnée des rapports détaillés de Messieurs …, …, … et ….

Alors que ces rapports me semblent répondre de façon explicite aux différents points soulevés dans vos lettres, je ne puis que me rallier aux précisions contenues dans la lettre du Ministre du Logement et de l'Urbanisme au sujet de la régularité de la procédure suivie dans la présente affaire. (…) ».

Par requête déposée au secrétariat du comité du contentieux du Conseil d’Etat le 7 octobre 1993, Madame (A) fit introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision, précitée, du ministre du 25 juin 1990 portant résiliation de son stage avec effet au 1er août 1990, ainsi que de la décision confirmative du 13 septembre 1990 intervenue sur recours gracieux du 9 juillet 1990.

Il se dégage des éléments du dossier et des divers échanges y figurant que le précédent litismandataire de Madame (A) s’était, par courrier du 13 décembre 1993, enquis auprès du secrétaire du comité du contentieux du Conseil d’Etat de la date de la fixation de l’affaire sous rubrique et avait informé le Conseil d’Etat, par courrier déposé au secrétariat du comité du contentieux du Conseil d’Etat en date du 4 mai 1994, soit peu de temps après le dépôt du mémoire en réponse de l’Etat en date du 18 avril 1994, du dépôt de son mandat. Aucun mémoire en réplique n’a été déposé.

Par courrier du secrétaire du comité du contentieux du Conseil d’Etat du 8 juillet 1994, Madame (A) fut informée que son recours, appelé pour contrôle à l’audience du 22 juin 1994, fut refixé pour contrôle à l’audience du 12 octobre 1994.

Par courrier déposé au secrétariat du comité du contentieux du Conseil d’Etat le 11 octobre 1994, Madame (A) demanda au Conseil d’Etat de ne pas classer son dossier, au motif qu’elle serait encore à la recherche d’un nouvel avocat pour assurer la défense de ses intérêts dans le cadre du recours sous examen.

4 Par courrier du secrétaire du comité du contentieux du Conseil d’Etat du 8 novembre 1994, Madame (A) fut informée que son recours, appelé pour contrôle à l’audience du 12 octobre 1994, fut refixé pour contrôle à l’audience du 22 février 1995.

Par courrier déposé au secrétariat du comité du contentieux du Conseil d’Etat le 21 février 1995, Madame (A) demanda au Conseil d’Etat de refixer son affaire, au motif qu’elle serait toujours à la recherche d’un nouvel avocat.

Par courrier du secrétaire du comité du contentieux du Conseil d’Etat du 21 mars 1995, Madame (A) fut informée que son recours, appelé pour contrôle à l’audience du 22 février 1995, fut refixé pour contrôle à l’audience du 18 octobre 1995 avant d’avoir été mise au rôle général à l’audience du 8 novembre 1995.

L’affaire de Madame (A) fut appelée pour fixation à l’audience du tribunal administratif du 20 décembre 1999, lors de laquelle elle fut refixée, pour fixation, à l’audience du 13 mars 2000.

Par courrier déposé au greffe du tribunal administratif le 20 décembre 1999, Madame (A) sollicita la refixation de son affaire au rôle général.

Par courrier du 11 mars 2000, Madame (A) sollicita à nouveau la mise au rôle général de son affaire, demande à laquelle le tribunal donna suite à l’audience publique du 13 mars 2000.

Par courrier du 13 juillet 2002, Madame (A) demanda le maintien de son affaire au rôle général.

Par courrier du 11 août 2020, Madame (A) sollicita du greffe du tribunal administratif la communication des pièces déposées par son litismandataire de l’époque à l’appui de son recours du 7 octobre 1993.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 26 avril 2022, inscrit sous le numéro 47357 du rôle, Madame (A) fit introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une « décision non datée » du ministre d’Etat portant résiliation de son stage avec effet au 1er août 1990.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 16 septembre 2022, le délégué du gouvernement demanda au tribunal administratif de constater la péremption du recours introduit par Madame (A) en date du 7 octobre 1993 et inscrit sous le numéro 8986 du rôle.

Par son jugement du 12 juillet 2024, le tribunal ordonna la jonction des deux recours, en retenant que si le second recours visait une décision non datée du ministre portant résiliation de son stage avec effet au 1er août 1990, il porterait néanmoins clairement sur la décision ministérielle du 25 juin 1990 ayant fait l’objet du premier recours et en conclut que les deux recours étaient dirigés contre la même décision du ministre.

Le tribunal releva ensuite qu’un recours en annulation, encore que recevable pour avoir rencontré notamment la condition de l’intérêt à agir au moment de son introduction, devient sans 5 objet en cours d’instance contentieuse lorsque le demandeur est resté en défaut d’établir, voir seulement d’alléguer un quelconque avantage que l’annulation de l’acte litigieux pourrait lui procurer, tout en soulignant que la recevabilité d’un recours est conditionnée en principe par l’existence et la subsistance d’un objet, qui s’apprécie du moment de l’introduction du recours jusqu’au prononcé du jugement.

Après examen des circonstances de l’espèce, les premiers juges arrivèrent à la conclusion que l’attitude affichée par Madame (A) depuis le dépôt du mandat par son ancien litismandataire en mai 1994 ne faisait preuve du moindre intérêt pour le déroulement et le maintien de l’instance introduite le 7 octobre 1993, et qu’elle n’était pas en mesure d’expliquer dans quelle mesure, à l’heure actuelle, soit plus de 30 ans après la prise des actes litigieux et l’introduction d’un recours contentieux à l’encontre desdits actes, l’annulation de ceux-ci pourrait lui procurer une satisfaction personnelle et certaine.

En tout état de cause, le tribunal releva que le principe de sécurité juridique s’opposerait qu’un administré puisse remettre en cause, sans condition de délai, des situations consolidées par l’effet du temps, de sorte que, nonobstant la question d’un défaut d’indication dans une décision administrative des voies de recours, ce principe ferait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle ayant été notifiée à son destinataire ou dont il a eu connaissance de manière certaine. Le tribunal en conclut que Madame (A) n’était au moment de l’introduction du recours inscrit sous le numéro 47357 du rôle, plus recevable à introduire un recours contre la décision du 25 juin 1990.

A titre surabondant, le tribunal estima encore que le recours inscrit sous le numéro 47357 du rôle, en ce qu’il vise la même décision que celui inscrit sous le numéro 8986 du rôle, et en ce qu’il s’agirait d’un recours complémentaire ayant pour seul objet de produire, en sus du contenu du recours initial, des nouveaux moyens, sans que le recours ne poursuive per se un quelconque objet autonome, serait pris en violation de l'article 7, alinéa 1er, de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après « la loi du 21 juin 1999 », limitant à deux le nombre de mémoires par partie, en ce compris la requête introductive d’instance et ce nonobstant le fait que le deuxième recours a été déposé endéans le délai légal, puisqu’admettre un tel recours reviendrait à devoir accepter, en présence d'une décision à l'égard de laquelle a priori aucun délai ne court, qu'un demandeur complète indéfiniment son recours initial par de multiples recours complémentaires, violant de la sorte non seulement l'article 7, alinéa 1er de la loi du 21 juin 1999, mais encore la ratio legis de cette loi, à savoir la recherche et la garantie d'une prompte évacuation des litiges pendants devant les juridictions administratives, et portant gravement atteinte à la sécurité juridique indispensable à l'action de l'administration, en prolongeant indûment le débat juridique.

Au vu de ces considérations, les premiers juges retinrent que les deux recours étaient à rejeter pour avoir perdu, respectivement pour être dépourvu de tout objet, étant donné que Madame (A) a perdu tout intérêt à agir contre les actes déférés, en les déclarant irrecevables selon le dispositif du jugement attaqué.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 23 août 2024, Madame (A) a régulièrement relevé appel de ce jugement.

6 Arguments des parties A l’appui de son appel, l’appelante fait valoir qu’elle aurait fait des démarches pour pouvoir continuer son action et n'aurait jamais eu l’intention de l’abandonner.

Elle estime que les premiers juges ont retenu une irrecevabilité à caractère hybride, puisqu'elle revêtirait deux aspects distincts, à savoir une irrecevabilité ratione personae et une irrecevabilité ratione temporis, dans la mesure où ils avaient retenu que le recours était irrecevable, puisqu'elle n'aurait pas témoigné le moindre intérêt pour son affaire durant un laps de temps trop prolongé.

S’agissant de l’aspect temporel, l’appelante reproche au tribunal de rechercher à faire respecter le principe de la sécurité juridique dans le seul objectif de protéger les intérêts de l'Etat et non pas ceux du justiciable, dans la mesure où il a retenu que le justiciable ne saurait critiquer une situation de fait ou de droit consolidée par l'effet du temps.

Elle fait valoir qu’appliquer cette thèse aux actes réglementaires, aurait comme conséquence qu’il serait impossible de soulever, après l’écoulement d'un certain laps de temps, l’illégalité, voire l’inconstitutionnalité d’un acte réglementaire. Or, une telle approche mettrait en cause le bon fonctionnement de l’Etat de droit.

Par ailleurs, l’appelante fait valoir que le principe de la sécurité juridique viserait à protéger les intérêts du justiciable contre des décisions arbitraires des autorités publiques, de sorte que les premiers juges auraient procédé à un détournement du principe de la sécurité juridique pour l’avoir opposé, dans l’objectif de protéger les intérêts de l’administration, à un justiciable qui aurait dû être protégé par ce principe.

Le tribunal aurait encore, sur base d’un principe général du droit, adopté une solution contraire à loi.

A cet égard, l’appelante se prévaut des articles 13, paragraphe (1), de la loi du 21 juin 1999 et 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », de même que de la jurisprudence selon laquelle la sanction d’une inobservation de l'article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 est que le délai imparti pour introduire le recours n'a pas commencé à courir utilement.

En l’espèce, comme, selon l’appelante, la décision attaquée ne porterait pas de date, et à défaut d’indication des voies de recours, aucun délai n'aurait commencé à courir.

Cette règle de droit aurait à tort été écartée sur base du principe de la sécurité juridique.

Dans ce contexte, l’appelante fait valoir, par référence à la hiérarchie des normes, que les principes généraux du droit pourraient compléter la législation en vigueur, mais ne pourraient jamais remplacer une loi.

7 Tant que le législateur n’aurait pas modifié la loi, l’Etat ne serait pas admis à tenter d’écarter ses propres règles, mais devrait subir toutes les conséquences juridiques qui en découlent et le juge ne pourrait intervenir pour modifier la législation pour protéger les intérêts de l’Etat au détriment des droits et intérêts du justiciable.

Les premiers juges n’auraient dès lors pas pu écarter, sur base d'un principe général du droit, la règle découlant de l’article 13, paragraphe (1), de la loi du 21 juin 1999 de l’article 14 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, suivant laquelle aucun délai pour introduire un recours administratif ne commence à courir si l'administration n'a pas indiqué les voies de recours dans l'acte administratif individuel attaqué.

L’appelante donne encore à considérer qu’en tout état de cause, dans un Etat de droit, le principe de la sécurité juridique ne pourrait être appliqué au détriment des droits du justiciable, puisque ce principe viserait à protéger ces derniers contre les décisions arbitraires et illégales de l'administration. Elle poursuit que lorsque les règles de droit sont claires et accessibles pour l’administré, elles ne pourraient être écartées sur base d'un principe général dont la portée exacte ne serait pas forcément prévisible pour l’administré, qui serait la partie faible dans les relations avec l’administration.

Le raisonnement des premiers juges serait dès lors contraire à la législation en vigueur, au principe de la sécurité juridique et au principe constitutionnel de l’Etat de droit.

La conséquence en serait qu’une décision administrative individuelle pourrait être attaquée à n’importe quel moment lorsqu’elle ne précise pas les voies de recours, sans que l’écoulement du temps, à lui seul, puisse être à l’origine d’une consolidation d'une situation de fait ou de droit, respectivement d’une disparition de l’intérêt à agir.

En ce qui concerne l’intérêt à agir à proprement parler, l’appelante donne à considérer que la décision attaquée produirait par elle-même des effets juridiques affectant sa situation personnelle, notamment en ce qu’elle porterait atteinte à son honorabilité et ce même après l’écoulement du temps. Le traitement qu’elle aurait subi de la part des autorités concernées affecterait toujours son bien-être moral.

Elle souligne qu’elle n’aurait jamais eu l’intention d’abandonner son affaire introduite en octobre 1993. A la suite du dépôt de son mandat par Maître SCHONCKERT, elle n'aurait plus eu d’informations par rapport à cette affaire et aurait cherché un avocat qui aurait pu remplacer son précédent litismandataire. Elle fait valoir qu’il ne pourrait lui être reproché de ne pas être autorisée à se défendre elle-même devant les juridictions administratives et de ne pas avoir « immédiatement » trouvé un nouveau litismandataire.

En raison de la représentation obligatoire par un avocat devant les juridictions de l'ordre administratif, aucune information relative à la première affaire ne lui aurait été communiquée suite au dépôt de mandat de Maître SCHONCKERT, l’appelante soulignant qu’elle ne serait pas un professionnel du droit et ignorerait le fonctionnement de la procédure administrative et ses particularités.

8 Elle fait en outre valoir que l’avis juridique de Maître Trixi LANNERS démontrerait qu’elle n’avait jamais eu l’intention d’abandonner son affaire, tout en soulignant que Maître LANNERS lui aurait conseillé d’introduire une nouvelle action contre la décision attaquée, de sorte qu’il ne saurait non plus lui être reproché d’avoir suivi le conseil d’un professionnel du droit.

En tout cas, ce ne serait pas de sa faute si elle avait été mal représentée ou mal conseillée dans le cadre de son action contre la décision attaquée devant les juridictions de l'ordre administratif et cette circonstance ne pourrait avoir un quelconque impact sur la recevabilité de son recours, son intention d’attaquer son « licenciement » et de rétablir son honorabilité n’ayant pas disparu.

Pour le surplus, l’appelante prend position quant au fond du litige.

Dans sa réponse, l’Etat conclut à l’irrecevabilité de l’appel à défaut pour la partie appelante de disposer d’un intérêt à agir. Pour le surplus, il demande la confirmation du jugement a quo.

Dans sa réplique, l’appelante fait valoir qu’elle disposerait d'un intérêt à interjeter appel, puisque le jugement a quo a rejeté ses demandes.

Elle réitère qu’elle n’aurait jamais abandonné son action, mais aurait, à la suite du dépôt du mandat par Maître SCHONCKERT, essayé de trouver un nouveau litismandataire et même sollicité un avis juridique.

En tant que destinataire direct de l’acte attaqué, elle tirerait une satisfaction personnelle et certaine de la réformation sinon de l’annulation de la décision du 25 juin 1990 portant résiliation de son stage avec effet à partir du 1er août 1990, dans la mesure où une résiliation non justifiée du stage porterait atteinte à son intégrité morale, à son honorabilité et à sa réputation. L’écoulement du temps n’aurait pas fait disparaître son droit de voir réformer sinon annuler la décision litigieuse et d'obtenir sur base d'une telle décision une indemnisation adéquate par la suite.

En absence de texte légal ou règlementaire, l’écoulement du temps ne ferait jamais consolider une situation de fait ou de droit, sous réserve de l’hypothèse d’une prescription, qui ne pourrait jouer qu’en présence d’une disposition légale.

Pour le surplus, l’appelante réitère en substance ses explications fournies à l’appui de la requête d’appel, tout en soulignant que le principe de la sécurité juridique viserait à protéger le justiciable contre toute décision arbitraire de l’Etat, mais n’aurait pas pour but de protéger l’Etat.

L’appelante relève, enfin, que la procédure administrative ne connaîtrait pas le concept juridique de la péremption d'instance, prévu à l’article 540 du Nouveau Code de procédure civile, mais non prévue par l’arrêté royal grand-ducal du 21 août 1886 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, ni par la loi du 21 juin 1999, ni par la jurisprudence. Dans ces conditions, une instance ne s’éteindrait pas au cas où aucune des parties ne se manifeste pendant une période prolongée dans le cadre d'une procédure devant les juridictions de l'ordre administratif.

9 Analyse de la Cour C’est de prime abord à juste titre que l’appelante conclut au rejet du moyen d’irrecevabilité de l’appel soulevé par l’Etat.

En effet, les deux recours ayant été déclarés irrecevables et Madame (A) n’ayant de la sorte pas obtenu satisfaction, elle a un intérêt à interjeter appel. L’argumentaire de l’Etat fourni à l’appui de son moyen d’irrecevabilité de l’appel, qui en substance tourne autour de la question de la satisfaction que l’annulation de la décision litigieuse peut actuellement procurer à Madame (A), a en réalité trait à l’intérêt à agir, tel que discuté en première instance, qui devient une question de fond en instance d’appel.

La Cour constate ensuite que l’appelante ne remet pas en cause la conclusion des premiers juges selon laquelle, encore que le deuxième recours introduit le 26 avril 2022 se réfère à une « décision non datée », les deux recours sont en réalité dirigés contre la même décision, à savoir celle du 25 juin 1990 du ministre portant résiliation de son stage, le tribunal ayant retenu qu’à l’appui de son deuxième recours, Madame (A) a déposé une copie de la décision du 25 juin 1990 où la partie supérieure de la page manque.

L’appelante a dès lors successivement introduit deux recours contre la même décision, à savoir un recours en date du 7 octobre 1993 et un deuxième recours le 26 avril 2022.

Il convient de prime abord d’examiner les contestations de la partie étatique quant à l’intérêt à agir de Madame (A), accueillies par les premiers juges, par rapport au premier recours, introduit le 7 octobre 1993.

Après analyse du dossier soumis à son appréciation ainsi que des moyens présentés de part et d’autre, la Cour est amenée à rejoindre les premiers juges en ce qu’ils ont en substance retenu que Madame (A) n’explique pas à suffisance en quelle mesure l’annulation recherchée de la décision du 25 juin 1990 puisse lui procurer à l’heure actuelle, compte tenu de l’écoulement du temps et de l’attitude affichée par elle depuis le dépôt de sa requête introductive en date du 7 octobre 1993, une quelconque satisfaction et que, de la sorte, elle ne justifie pas son intérêt au maintien de son recours. En revanche, la Cour estime que la conséquence à déduire de ce constat n’est pas l’irrecevabilité du recours du 7 octobre 1993, tel que cela a été retenu par les premiers juges selon le dispositif du jugement a quo, la recevabilité du recours étant en effet à apprécier au jour de son introduction, mais le recours est à rejeter pour perte d’objet.

En effet, au-delà de conditionner la recevabilité du recours, l’intérêt à agir ou plus précisément l’intérêt à poursuivre une action, doit encore être vérifié au jour du jugement. Si tel n’est pas le cas, le recours perd son objet.

Aussi, tel que les premiers juges l’ont retenu à juste titre, l’exigence de la subsistance de l’objet du recours est liée à l’exigence du maintien de l’intérêt à agir et, plus particulièrement, de l’intérêt à voir sanctionner l’acte faisant l’objet du recours, étant précisé qu’un tel intérêt à agir présuppose que la censure de l’acte querellé reste de nature à procurer au demandeur une 10 satisfaction personnelle et certaine en ce sens qu’elle mette fin aux conséquences négatives que l’acte querellé a sur sa situation.

Sous cet aspect, un recours en annulation, recevable pour avoir rencontré notamment la condition de l’intérêt à agir au moment de son introduction, devient sans objet en cours d’instance contentieuse en raison de la disparition de l’intérêt requis en droit et est à rejeter, l’absence de toute marque d’intérêt et le défaut de justifier un quelconque avantage que l'annulation de l'acte litigieux pourrait encore procurer constituant un motif suffisant pour retenir que l’intérêt pour obtenir une décision sur la demande n’existe plus.

Admettre le contraire aurait pour effet, tel que les premiers juges l’ont relevé, de vider le jugement ou l’arrêt à intervenir de tout effet utile, d’encombrer le rôle des juridictions administratives et d’entraver la bonne marche des services publics en imposant à l’autorité compétente de devoir se justifier inutilement devant les juridictions administratives, exposant, le cas échéant, ses décisions à la sanction de l’annulation ou de la réformation, sans que l’administré ayant initialement introduit le recours ne soit encore intéressé par l’issue de ce recours.

A l’instar des premiers juges, la Cour relève que la première personne à pouvoir justifier s’il existe effectivement dans son chef un intérêt concret et personnel suffisant pour intenter un procès et pour le poursuivre ensuite est le justiciable lui-même qui a saisi la juridiction administrative d’une demande, et ce en établissant qu’il a été porté atteinte à ses droits ou que ses intérêts ont été lésés et que le redressement obtenu au moyen d’une décision juridictionnelle apportera à sa situation une amélioration qui compense les frais qu’entraîne les désagréments que comporte un procès. La volonté du justiciable, manifestée par l’introduction d’une demande en justice, de défendre ce qu’il considère comme un intérêt le concernant est donc le premier élément qui est nécessaire pour rendre possible la constatation que ce justiciable justifie effectivement de l’intérêt concret et personnel requis en droit pour être recevable à intenter un procès. Si cette volonté venait à disparaître en cours de procès, il ne serait potentiellement plus satisfait à la condition que la partie litigante conserve effectivement un intérêt concret et personnel à faire statuer sur la demande qu’elle a introduite.

En l’espèce, la Cour constate, à l’instar des premiers juges, que le comportement de Madame (A) depuis l’introduction de sa requête en date du 7 octobre 1993 jusqu’à l’introduction de son deuxième recours en 2022, soit durant presque 30 ans, fait preuve d’un désintérêt manifeste pour la poursuite de son action tendant à obtenir l’annulation de la décision de résiliation de son stage prise le 25 juin 1990, et ce nonobstant ses quelques manifestations sporadiques au fil du temps auprès du greffe du tribunal, respectivement au secrétariat du Comité du Contentieux du Conseil d’Etat.

Tel que le tribunal l’a relevé, Madame (A) n’a, à la suite du dépôt de son mandat par son litismandataire de l’époque le 4 mai 1994, soit peu de temps après le dépôt du mémoire en réponse par l’Etat, plus manifesté d’intérêt concret en relation avec son recours, mais s’est limitée à solliciter la refixation des plaidoiries, puis le 8 novembre 1995 la mise au rôle général de son affaire. Certes, dans un premier temps, elle a indiqué avoir été à la recherche d’un nouvel avocat.

Toutefois dans son dernier courrier du 13 juillet 2002 au tribunal, elle a uniquement demandé de « (…) retenir l’affaire au rôle général (…) » sans fournir de raison à la base de sa demande.

11 Si Madame (A) s’est adressée le 11 août 2020 au tribunal administratif, c’était pour solliciter la communication des pièces de son dossier, sans avancer une quelconque explication quant à cette démarche et ce n’est que le 26 avril 2022 qu’elle a fait déposer le recours inscrit sous le numéro 47357 du rôle, contre la décision ministérielle du 25 juin 1990, étant précisé que selon les explications fournies par son litismandataire, elle aurait omis de l’informer de l’introduction d’un recours en 1993 contre cette même décision.

C’est surtout la période entre son dernier courrier du 13 juillet 2002, à travers lequel elle a demandé la mise de l’affaire au rôle général, et son courrier du 11 août 2020, à travers lequel elle a sollicité la communication des pièces déposées par elle, qui est particulièrement parlante, dans la mesure où, tel que cela a été relevé par les premiers juges, Madame (A) ne s’est durant toute cette période de dix-huit ans plus du tout manifestée auprès du tribunal administratif. Un tel comportement traduit de façon évidente un désintérêt manifeste pour la poursuite de son affaire et pour l’issue de sa demande en annulation.

En même temps, cette attitude est de nature à contredire manifestement l’argumentation actuelle de Madame (A) selon laquelle la décision du 25 juin 1990, remontant à il y a presque 35 ans, porterait toujours actuellement atteinte à son honneur, atteinte à laquelle l’annulation sollicitée, voire par la suite une indemnisation pécuniaire, pourraient remédier. En effet, les explications actuellement avancées par Madame (A) pour justifier le maintien de son intérêt ne sont guère compatibles avec le silence gardé par elle durant toutes ces années. Au contraire, si la décision litigieuse l’avait affectée dans son honneur à tel point qu’elle s’estime toujours lésée après presque trente-cinq ans, elle aurait pris l’initiative de faire trancher sa demande dès l’introduction de son recours et son instruction, mais n’aurait pas gardé le silence durant tant d’années.

La Cour retient dès lors que la justification avancée de son intérêt au maintien du recours, à savoir une atteinte à son honorabilité par rapport à laquelle l’appelante entendrait demander une indemnisation, ne correspond à aucun élément concret, mais est au contraire contredit par son attitude, de sorte qu’elle n’est pas de nature à convaincre.

A cet égard, son affirmation selon laquelle son silence s’expliquerait par le fait qu’elle aurait en vain cherché un avocat n’est pas non plus de nature à convaincre, dans la mesure il n’est guère concevable, à défaut de tout élément probant à ce sujet, que durant toutes ces années, aucun avocat n’aurait été prêt à reprendre le mandat. Sous cet aspect, le seul fait de verser une liste manuscrite avec des noms d’avocats qu’elle aurait contactés, sans autre précision, ne permet pas de retenir qu’entre 1994 et 2022, il aurait été impossible pour elle de trouver un avocat qui soit d’accord à la représenter en vue de la poursuite de son affaire.

L’affirmation de l’appelante selon laquelle elle n’aurait, en tant que non-professionnelle, pas été au courant de la procédure devant les juridictions administratives, n’est pas non plus de nature à donner à son silence durant tant d’années un autre sens que le désintérêt par rapport à l’issue de son affaire. En effet, Madame (A) était manifestement consciente de la seule règle qu’elle avait à respecter, à savoir celle d’être représentée par un avocat, puisqu’après le dépôt du mandat de son litismandaire de l’époque, elle a informé le tribunal qu’elle était à la recherche d’un nouvel avocat.

12 S’agissant de l’avis juridique sollicité par elle en 2015, celui-ci n’est pas non plus de nature à énerver la conclusion ci-avant retenue, étant relevé, à l’instar des premiers juges, que Madame (A) n’y a réservé dans un délai rapproché une quelconque suite contentieuse. En effet, encore que cet avis, rédigé en 2015, envisage la possibilité d’introduire un recours contentieux, Madame (A) a attendu encore environ sept ans avant d’introduire son deuxième recours.

La Cour retient dès lors, à l’instar des premiers juges, que l’appelante reste toujours en défaut d’expliquer de façon convaincante dans quelle mesure, à l’heure actuelle, soit pratiquement 35 ans après la prise de la décision de résiliation de son stage, son annulation sinon sa réformation pourrait encore lui procurer une satisfaction personnelle et certaine, de sorte qu’elle ne justifie pas le maintien d’un intérêt suffisant à la poursuite de son affaire.

Il suit des considérations qui précèdent que Madame (A) s’est manifestement désintéressée de son recours au fil des années et reste en défaut d’expliquer en quoi, après qu’elle s’est de nouveau manifestée en 2022, l’annulation sinon la réformation de la décision litigieuse puisse lui procurer actuellement une quelconque satisfaction.

Encore que la Cour partage l’analyse des premiers juges tenant à un défaut de justification d’un intérêt à la poursuite du recours, le jugement a quo est à réformer en ce qui concerne la conclusion en déduite par les premiers juges, dans la mesure où le recours en annulation sinon en réformation introduit le 7 octobre 1993, ayant perdu son objet, n’est pas à déclarer irrecevable, tel que les premiers juges l’ont retenu, mais à rejeter.

Les contestations de l’appelante en relation avec la question de savoir si le législateur a prévu la péremption d’instance au niveau du contentieux administratif ne sont pas pertinentes par rapport à cette conclusion, puisqu’en l’espèce, ni le tribunal, ni la Cour n’ont retenu que l’action était éteinte par la péremption, mais la Cour a rejeté le recours pour perte d’objet.

En ce qui concerne ensuite le sort à réserver au deuxième recours, introduit le 26 avril 2022 et inscrit sous le numéro 47357 du rôle, et tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision du ministre du 25 juin 1990, la Cour retient que comme celui-ci porte sur la même décision que celle ayant fait l’objet du recours introduit le 7 octobre 1993 et comme elle vient de rejeter ce recours pour avoir perdu son objet, Madame (A) ne justifiant pas un intérêt suffisant au maintien de son recours après qu’elle s’est manifestement désintéressée de celui-ci durant au moins dix-huit ans, voire plus, le constat s’impose que Madame (A) n’établit pas davantage son intérêt à solliciter en 2022 la réformation, sinon l’annulation de la même décision. Dès lors, indépendamment du débat mené par les parties à l’instance sur la question de savoir si un délai de recours a commencé à courir à l’égard de la décision du 25 juin 1990, de l’incidence du principe général de sécurité juridique sur lequel les premiers juges se sont, entre autres, appuyés et de la question de savoir si, voire dans quelles conditions un second recours peut être introduit contre la même décision administrative, en tout état de cause le recours en réformation sinon en annulation du 26 avril 2022 est à déclarer irrecevable à défaut par Madame (A) de justifier un intérêt à agir en 2022 contre une décision prise en 1993, de sorte que le jugement a quo est à confirmer sous ce rapport.

13 Au vu de l’issue du litige, la demande de Madame (A) tendant à l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000.- euros sur le fondement de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999 est à rejeter.

Encore que le jugement a quo est partiellement réformé, les frais de l’instance doivent rester à charge de Madame (A) dont les prétentions n’ont pas été accueillies.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

reçoit l’appel du 23 août 2024 en la forme ;

au fond, par réformation du jugement entrepris du 12 juillet 2024, rejette le recours en annulation sinon en réformation introduit le 7 octobre 1993, inscrit sous le numéro 8986 du rôle, pour être devenu sans objet ;

confirme le jugement du 12 juillet 2024 en ce que le recours en réformation sinon en annulation introduit le 26 avril 2022, inscrit sous le numéro 47357 du rôle, a été déclaré irrecevable pour défaut d’intérêt à agir ;

rejette la demande en paiement d’une indemnité de procédure formulée par Madame (A) ;

condamne Madame (A) aux dépens des deux instances.

Ainsi délibéré et jugé par :

Henri CAMPILL, vice-président, Lynn SPIELMANN, premier conseiller, Annick BRAUN, conseiller, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Jean-Nicolas SCHINTGEN.

S. SCHINTGEN S. CAMPILL 14


Synthèse
Numéro d'arrêt : 50974C
Date de la décision : 17/12/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2024-12-17;50974c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award