GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 50604C ECLI:LU:CADM:2024:50604 Inscrit le 17 juin 2024 Audience publique du 12 décembre 2024 Appel formé par Monsieur (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 2 mai 2024 (n° 47340 du rôle) en matière d’impôts - appel en garantie Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 50604C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 17 juin 2024 par Maître Yves KASEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, en l’étude duquel domicile est élu, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-… …, …., rue …, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 2 mai 2024 (n° 47340 du rôle), par lequel ledit tribunal a rejeté comme non fondé son recours en réformation dirigé contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes portant rejet de sa réclamation dirigée contre un bulletin d’appel en garantie émis à son encontre le 3 juin 2021 par le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1, tout en disant qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation, et a rejeté une demande d’injonction ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 12 septembre 2024 par le délégué du gouvernement ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2024 pour le compte de l’appelant ;
Vu l’accord des mandataires des parties de voir prendre l’affaire en délibéré sur base des mémoires produits en cause et sans autres formalités ;
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;
Sur le rapport du magistrat rapporteur, l’affaire a été prise en délibéré sans autres formalités à l’audience publique du 21 novembre 2024.
En date du 11 mars 2020, le bureau d’imposition RTS Luxembourg 1, ci-après « le bureau d’imposition », émit à l’encontre de la société anonyme (BB) S.A., en faillite, ci-après « la société (BB) », un bulletin de la retenue d’impôt sur les salaires et les pensions portant fixation de compléments de retenue (« Lohnsteuerbescheid »), ci-après « le bulletin de compléments de retenue », sur le fondement du § 217 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, telle que modifiée, dénommée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », fixant des retenues d’impôt non effectuées de … euros, …. euros, …. euros, …euros, …. euros et … euros, respectivement pour les années d’imposition 2013, 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018, ledit bulletin étant libellé comme suit :
« (…) En date du 05/03/2020 il a été procédé, en application des dispositions de l’article 136 L.I.R. de la loi du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, à une révision des retenues d’impôt à opérer, à déclarer et à verser par vos soins à l’Administration des contributions, du chef de rémunérations allouées à votre personnel salarié et retraité.
La révision portant sur les années d’imposition 2013 à 2018 inclusivement a eu lieu conformément aux dispositions de la section 5 du règlement grand-ducal du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d’impôt sur les salaires et les pensions.
D’après l’état récapitulatif du rapport de la révision, les compléments de retenue d’impôt et les suppléments y relatifs sont fixés aux montants ci-après, ceci sans préjudice des intérêts de retard grevant les arriérés conformément à l’article 155 L.I.R. ainsi que, le cas échéant, des retenues d’impôt déclarées mais non encore versées.
(…) Les montants sont repris au décompte qui vous parviendra séparément. (…) Conformément aux dispositions de l’article 136 de la loi du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, l’employeur est personnellement responsable de la déclaration et du paiement de l’impôt retenu. (…) Observations relatives à la révision (…) Taxation d’office de l’impôt dû suivant §217 AO (…). ».
Le bulletin en question renseigna, par ailleurs, ce qui suit : « Années 2013-2016 :
A défaut des livres/comptes de salaires et des dépôts électroniques des extraits de compte de salaires ainsi que des déclarations d’impôt sur les salaires, les salaires comptabilisés dans les frais généraux ont été taxés selon la loi en vigueur.
Années 2017-2018 : A défaut de dépôt des frais généraux au registre de commerce des sociétés, l’impôt sur les salaires a été taxé d’office. ».
En date du 3 juin 2021, le bureau d’imposition émit un bulletin d’appel en garantie (« Haftungsbescheid ») sur le fondement du § 118 AO à l’égard de Monsieur (A) en sa qualité d’administrateur de la société (BB), ledit bulletin déclarant Monsieur (A) codébiteur solidaire d’un montant de … euros, au titre de l’impôt sur les traitements et salaires qui aurait dû être retenu et continué à l’administration des Contributions directes par la société (BB) pour les années d’imposition 2013 à 2018.
Ledit bulletin est libellé comme suit :
« (…) En date du 05.03.2020 le bureau d'imposition RTS Luxembourg 1 a procédé, en application de l'article 136 L.I.R. de la loi du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, à une révision des retenues d'impôt à opérer, à déclarer et à verser par les soins de la société (BB) S.A. en sa qualité d'employeur à l'Administration des contributions directes, du chef de rémunérations allouées au personnel de ladite société, actuellement en faillite.
La révision portait sur les années d'imposition 2013, 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018 et elle a eu lieu conformément à la section 5 du règlement grand-ducal du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d'impôt sur les salaires et pensions.
D'après l'état récapitulatif du rapport de révision, les compléments de retenues d'impôt et les suppléments y relatifs ont été fixés au montant tels qu'indiqué sur le « bulletin de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions portant fixation des compléments de retenue -
Lohnsteuerbescheid » (bulletin joint en annexe) émis en date du 11 mars 2020 et transmis par voie postale au curateur de la société en faillite, à savoir Maître Marie-Christine GAUTIER.
Les compléments de retenue d'impôt et les suppléments y relatifs ont été fixés aux montants repris sur ledit bulletin, et ceci, sans préjudice des intérêts de retard grevant les arriérés conformément à l'article 155 L.I.R. ainsi que, le cas échéant, des retenues déclarées mais non encore versées.
Il est dû à l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg par la société (BB) S.A. en faillite ayant son siège à L-…, immatriculée sous le numéro fiscal … et enregistrée au Luxembourg Business Registers sous le numéro B … à titre de l'impôt sur les traitements et salaires :
Année Principal Intérêts Total 2013 0,00 € 2014 0,00 € 2015 0,00 € 2016 0,00 € 2017 0,00 € 2018 0,00 € Total …. € 0,00 € …. € Il résulte du dépôt au Luxembourg Business Registers sous la référence …. du 22.04.2015 que vous avez été nommé administrateur de la société (BB) S.A. en faillite.
En cette qualité vous avez eu le pouvoir d'engager la société sous signature conjointe depuis le 10.03.2015.
En votre qualité d'administrateur vous étiez en charge de la gestion de la société (BB) S.A. en faillite.
Par conséquent et conformément aux termes des §§ 108 et § 103 AO, vous étiez personnellement tenu à l'accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société (BB) S.A. en faillite, dont notamment le paiement des impôts dus par la société (BB) S.A. en faillite à l'aide des fonds administrés.
En vertu de l'article 136 alinéa 2 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, l'employeur est tenu de retenir l'impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel.
En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu, l'employeur est tenu à déclarer et à verser l'impôt retenu à l'Administration des contributions directes.
En vertu de l'article 136 alinéa 6 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l'impôt sur le revenu et du règlement grand-ducal modifié du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, l'employeur est tenu de présenter au bureau RTS compétent les comptes de salaires ainsi que tous autres documents comptables.
Dans le cas d'une société, conformément aux termes du § 103 AO, ces obligations incombant aux employeurs sont transmises à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers.
En votre qualité de représentant de la société (BB) S.A. en faillite il vous appartenait de déclarer et de verser/de veiller à la retenue, à la déclaration et au versement de la retenue d'impôt due sur les traitements et les salaires du personnel.
Or pour les années 2013 à 2018 le paiement des salaires a été fait sans que les montants à retenir aient été continués entièrement au receveur.
L'omission de retenir, de déclarer et de payer les sommes dues à titre de retenue d'impôt est à qualifier d'inexécution fautive de vos obligations en tant que représentant de la société (BB) S.A. en faillite.
L'omission de payer sur les fonds disponibles de la société (BB) S.A. en faillite les retenues échues avant votre entrée en fonction est à qualifier d'inexécution de vos obligations.
Suite à l'inexécution fautive de vos obligations, le receveur de l'Administration des contributions directes n'a pas perçu les retenues d'impôt d'un montant de …. €.
Ce montant de … € se compose comme suit :
Année Principal Intérêts Total 2013 0,00 € 2014 0,00 € 2015 0,00 € 2016 0,00 € 2017 0,00 € 2018 0,00 € Total …. € 0,00 € …. € En vertu du § 110 AO votre responsabilité pour les actes accomplis pendant la période de vos fonctions survit à l'extinction de votre pouvoir de représentation.
Considérant qu'en vertu du § 103 AO vous êtes tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société (BB) S.A. en faillite.
Considérant que l'inexécution de ces obligations est à qualifier de fautive.
Considérant que l'inexécution fautive de vos obligations a empêché la perception d'impôt sur les traitements et salaires d'un montant de …. €.
Considérant que dans la mesure où, par l'inexécution fautive de vos obligations, vous avez empêché la perception de l'impôt légalement dû, vous êtes constitué codébiteur solidaire de ce montant conformément au § 109 AO.
Considérant que le § 118 AO m'autorise à engager votre responsabilité.
Considérant le fait qu'en votre qualité de représentant vous êtes chargé de la gestion de la société (BB) S.A. en faillite j'engage votre responsabilité, l'appel en garantie s'élève au montant de ….. €, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs.
Par conséquent, vous êtes invité à payer sans délai le montant de …..€, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs, au receveur de l'Administration des contributions directes à Luxembourg au …….., tout en indiquant le numéro du dossier fiscal (…). ».
Par courrier recommandé du 1er septembre 2021, Monsieur (A) introduisit auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après « le directeur », une réclamation à l’encontre du bulletin d’appel en garantie prévisé.
Par décision du 21 janvier 2022, répertoriée sous le n° …. du rôle, le directeur rejeta comme non fondée la réclamation introduite par Monsieur (A) dans les termes suivants :
« (…) Vu la requête introduite le 2 septembre 2021 par le sieur (A), demeurant à L-….
…., pour réclamer contre le bulletin d'appel en garantie émis en vertu du § 118 de la loi générale des impôts (AO) par le bureau d'imposition RTS Luxembourg 1 en date du 3 juin 2021 ;
Vu le dossier fiscal ;
Vu le § 119, alinéa 1er AO, ensemble les §§ 228 et 301 AO ;
Considérant que la réclamation a été introduite par qui de droit (§ 238 AO) dans les forme (§ 249 AO) et délai (§ 245 AO) de la loi, qu'elle est partant recevable ;
Considérant que le bulletin attaqué a déclaré le réclamant codébiteur solidaire de l'impôt sur les traitements et salaires des années 2013, 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018, y compris les intérêts accumulés depuis lors, au motif qu'il aurait en sa qualité de représentant légal de la société anonyme (BB), en faillite clôturée, commis une faute en ne veillant pas à ce que soient payées au receveur des Contributions, sur les fonds administrés, les sommes qui ont été retenues ou qui auraient dû être retenues à titre d'impôt sur les salaires, et dont la société était (et est toujours) redevable ;
Considérant, à titre liminaire tout comme en matière de principe, que le représentant d'une personne morale est responsable du paiement des dettes d'impôt de la personne morale qu'il représente dans les conditions prévues aux §§ 103 et 109 AO ; qu'aux termes du § 103 AO il est tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société, notamment de remettre les déclarations fiscales dans les délais légaux et de payer sur les fonds qu'il gère les impôts dont la société est redevable (CE du 20 octobre 1981, n° 6902) ;
Considérant dès lors que dans la mesure où le représentant, par l'inexécution fautive de ces obligations, a empêché la perception de l'impôt légalement dû, il est, en principe, constitué codébiteur solidaire des arriérés d'impôt de la société, conformément au § 109 AO ; que la responsabilité du représentant est à qualifier de fautive du moment que les impôts échus, même avant son entrée en fonction, ne sont pas payés sur les fonds disponibles de la société à l'administration ;
Considérant qu'il s'avère nécessaire dans ce contexte de mettre en exergue qu'en matière de responsabilité du fait personnel (article 1382 du code civil), l'auteur du dommage ne peut pas s'exonérer en invoquant une prétendue faute d'un tiers, lequel n'entrera en ligne de compte qu'au stade du recours entre les coresponsables ; que le représentant responsable sur le fondement du § 109 AO ne peut s'opposer à une poursuite au motif qu'elle n'a pas été engagée contre un autre, quod non en l'espèce, étant donné que trois autres bulletins d'appel en garantie ont été émis à l'encontre des sieurs (D), (F) et (G) ;
Considérant, matériellement, qu'en vertu de l'article 136, alinéa 4 de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) l'employeur est tenu de retenir, de déclarer et de verser l'impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel ; que dans le cas d'une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise à celui qui a le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers (§ 103 AO) ; que la responsabilité de l'administrateur, voire du gérant, selon le cas, est à qualifier de fautive du moment que des paiements de salaires sont effectués sans retenue d'impôt et sans continuation des montants à retenir à l'administration (Cour administrative du 6 mai 2003, n° 15989C du rôle) ; qu'il en est de même en ce qui concerne les retenues échues avant son entrée en fonction, si, par sa faute, elles ne sont pas payées sur les fonds disponibles de la société ;
Considérant que sous l'empire du § 118 AO la poursuite du tiers responsable, à la différence de l'imposition du contribuable, est toujours discrétionnaire et exige de ce fait et en vertu du § 2 de la loi d'adaptation fiscale (StAnpG) une appréciation effective et explicite des circonstances qui justifient la décision en raison et en équité (BFH du 19 février 1965 StRK § 44 EStG R.13 ; jurisprudence constante pour RTS, notamment BFH du 24 novembre 1961, BStBI. 1962.37 ; 3 février 1981, BStBI. 1981 II 493 ; cf Becker-Riewald-Koch § 2 StAnpG Anm. 5 Abs. 3) ; que l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire implique une motivation quant au principe même de la mise en œuvre de la responsabilité d'un ou de plusieurs représentants, quant à la désignation du représentant dont la responsabilité est engagée et quant au quantum de sa responsabilité ;
Considérant qu'un manquement à une obligation fiscale découlant du § 103 AO dans le chef du représentant (« Vertreter ») d'une société n'est pas suffisant pour engager sa responsabilité en application du § 109, alinéa 1er AO et pour voir émettre à son encontre un bulletin d'appel en garantie, le législateur ayant posé à cet égard l'exigence supplémentaire d'une inexécution fautive - « schuldhafte Verletzung » - des obligations du représentant de la société envers le fisc (Cour administrative du 22 février 2000, n° 11694C du rôle) ;
Considérant que la responsabilité du représentant est cependant à qualifier de fautive du moment qu'il n'accomplit pas ses obligations fiscales, dont notamment celle de veiller à ce que les impôts dus soient payés, même ceux datant d'avant son entrée en fonction, à l'aide des fonds administrés ; que cette dernière prémisse l'emporte, le cas échéant, ainsi de plein droit sur la situation telle qu'elle s'est présentée durant les années antérieures ;
Considérant dans ce contexte, et notamment d'après une jurisprudence constante, que le paiement de salaires sans retenue d'impôt et sans continuation des montants à retenir à l'Administration des contributions directes est à qualifier de fautif per se (Cour administrative du 6 mai 2003, n° 15989C du rôle ; Cour administrative du 6 janvier 2011, n° 27126C du rôle ;
Tribunal administratif du 15 janvier 2009, n° 24145 du rôle) ;
Considérant encore qu'en ce qui concerne la notion de l'inexécution fautive, à savoir de la « schuldhafte Verletzung seiner steuerlichen Pflichten durch den Vertreter des Steuerpflichtigen » au sens du § 109, alinéa 1er AO, que la Cour administrative a consigné que :
1) « Dans la mesure où il n'est pas contesté que les bilans pour les années litigieuses n'ont pas été déposés dans les délais au RCS et que les déclarations fiscales n'ont pas non plus été déposées, ce qui a contraint le bureau d'imposition à procéder par la voie de la taxation d'office pour les années 2008 à 2010 et par la fixation d'avances pour les années 2012 à 2014, le bureau d'imposition a en principe valablement pu retenir une inexécution fautive dans le chef de l'appelant, étant donné qu'en sa qualité de gérant unique, il était conformément au paragraphe 103 AO personnellement tenu à l'accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société (…), de sorte qu'il était tenu de veiller au dépôt des déclarations fiscales et au paiement des créances d'impôt et que l'omission de ce faire est à qualifier de comportement fautif.
(…) Or, le fait pour l'appelant de ne pas avoir veillé, en tant que gérant unique de la société (…), à ce que les déclarations d'impôt soient déposées en temps utile auprès de l'administration des Contributions directes, est à qualifier d'inexécution fautive des obligations du représentant d'une société envers les autorités fiscales, de sorte que les conditions pour la mise en œuvre de sa responsabilité personnelle à l'égard des créances d'impôt visées dans le bulletin d'appel en garantie litigieux se trouvent réunies en cause. Cette conclusion ne saurait être invalidée par l'argumentation de l'appelant selon laquelle il serait inéquitable de le poursuivre personnellement après tous les efforts entrepris pour régulariser les affaires de la société, étant donné qu'il est resté trop longtemps inactif et qu'il semblerait, d'après les éléments du dossier, qu'il n'est devenu actif que lorsque le Parquet a décidé de demander la dissolution judiciaire de la société. » (Cour administrative du 23 août 2016, n° 38378C du rôle), et que :
2) « Les premiers juges ont essentiellement retenu que le « § 103 AO soumet les dirigeants d'une société à l'obligation de veiller à ce que les impôts dus soient payés au trésor public », pointant de la sorte essentiellement l'obligation des représentants d'une société de veiller au paiement des impôts dus (…).
La Cour ne saurait entériner cette vision des choses.
En premier lieu, il est erroné de limiter l'analyse sur l'obligation de paiement des impôts dus, mais il convient d'avoir égard à l'ensemble des obligations incombant au contribuable en vue de la fixation et du paiement de l'impôt dû.
(…) Cette façon de procéder au cours de la procédure d'imposition est aux antipodes de l'attitude que l'on peut attendre d'une société raisonnablement prudente et diligente et elle caractérise manifestement une violation des obligations incombant aux organes d'administration de la société (…). Le manquement ainsi dépeint est encore de toute évidence grave.
(…) (…), il se dégage de l'ensemble des considérations qui précèdent que Monsieur (…) a de façon prolongée rendu impossible la détermination exacte des bases d'imposition et qu'il a singulièrement et fautivement manqué de remplir les obligations fiscales qui lui incombaient en tant que représentant de la société (…), de sorte que les conditions pour la mise en œuvre de sa responsabilité personnelle pour les impôts visés par le bulletin d'appel en garantie litigieux se trouvent réunies en cause. » (Cour administrative du 31 janvier 2017, n° 38343C du rôle) ;
Considérant que suivant le Registre de commerce et des sociétés (RCS), le réclamant était administrateur de la société (BB) du 10 mars 2015, date de sa nomination, jusqu'au 20 juillet 2018, date du jugement de faillite de la société, et, dès lors, habilité à engager la société vis-à-vis de tiers avec la signature conjointe d'un autre administrateur ;
Considérant que lors de la vérification de la retenue d'impôt sur les salaires de la société (BB), le bureau d'imposition RTS Luxembourg 1 a constaté que la société a occupé des salariés depuis sa constitution en 2013 jusqu'à sa faillite en 2018 sans remettre une seule déclaration de retenues d'impôt sur les traitements et salaires au bureau d'imposition compétent ; qu'à défaut de déclarations de retenues d'impôts sur les traitements et salaires, de paiements d'impôts sur les salaires, de livres de salaires et d'extraits de compte salaires et pensions (ECSP), le bureau d'imposition s'est vu contraint de procéder par la méthode de la taxation prévue au § 217 AO en se basant sur les comptes annuels déposés au RCS (années 2013, 2014 et 2015) et les comptes annuels remis au bureau d'imposition Sociétés 5 (année 2016) ; que, conformément aux articles 136, alinéa 7 de la loi concernant l'impôt sur le revenu (L.I.R.) et 21 du règlement grand-ducal du 27 décembre 1974 concernant la procédure de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, le bureau d'imposition a fixé, à bon escient, des retenues d'impôt sur les traitements et salaires des années 2013 à 2018 par l'émission d'un bulletin de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions portant fixation de compléments de retenue en date du 11 mars 2020 ;
Considérant que le réclamant s'exprime, par extraits, comme suit à l'endroit de son placet : « Ces dettes fiscales n'ont pas été acquittées à cause des difficultés économiques de la société. J'ai fait de mon mieux pour subvenir à la dette fiscale, chaque décision ayant été prise dans l'intérêt de la société. Dès lors, il apparaît que l'Administration des contributions directes est restée en défaut de prouver l'existence d'une quelconque faute dans mon chef susceptible d'engager ma responsabilité personnelle, tel que cela serait cependant exigé par le paragraphe 109 AO. » ;
Considérant qu'à l'égard de tiers, dont notamment l'Administration des contributions directes, le réclamant était un représentant de la société pour la période en cause et personnellement tenu à l'accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à ladite société ; qu'il était ainsi, entre autres, dans l'obligation de retenir, de déclarer et de payer les impôts sur salaires et traitements à l'Administration des contributions directes ;
Considérant qu'en l'espèce, la société, à travers ses représentants, a violé l'ensemble des dispositions légales applicables en la matière, de la constitution à la faillite, soit pendant plus de cinq ans ; qu'elle n'a pas seulement omis de continuer les retenues opérées sur les salaires de ses salariés, ce qui constitue déjà une inexécution fautive en soi, mais qu'elle a également omis de déclarer lesdits impôts et de faire le dépôt électronique des ECSP ;
Considérant que le représentant qui, tel que le réclamant, a accepté sa fonction ne peut, en matière d'appel en garantie, se contenter de contester son pouvoir ; qu'en n'exécutant pas les obligations légales de la société ou en ne veillant pas à leur accomplissement, le représentant manque à son premier devoir, celui d'administrer (Tribunal administratif du 19 mars 2014, n° 32140 du rôle) ;
Considérant que le réclamant, qui était d'ailleurs le gérant unique d'une (autre) société de peinture, déclarée en faillite au cours de l'année 2013, et bénéficiaire d'un salaire de la société (BB) du 1er avril 2014 au 19 juillet 2018 qui, suivant les déclarations pour l'impôt sur le revenu des années 2014 à 2018, était soumis à une retenue d'impôt, s'est comporté de manière fautive en ignorant les obligations fiscales lui incombant en tant que représentant de la société anonyme (BB) ; qu'il a même demandé l'imputation des retenues d'impôt, opérées sur ses salaires, dans ses déclarations pour l'impôt sur le revenu des années 2014 à 2018 et bénéficié d'un remboursement partiel, alors qu'il n'ignorait pas que la société n'avait jamais payé lesdites retenues à l'Administration des contributions directes ;
Considérant que c'est donc à tort que le réclamant estime sa responsabilité personnelle ne pas devoir être engagée ; que la mise à charge des arriérés de la société anonyme (BB), en faillite clôturée, au titre de la retenue d'impôt sur les traitements et salaires des années 2013, 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018, ainsi que les intérêts de retard y relatifs, est donc parfaitement justifiée en ce qui le concerne ;
PAR CES MOTIFS reçoit la réclamation en la forme, la rejette comme non fondée. (…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 22 avril 2022, Monsieur (A) fit introduire un recours tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation cette décision du directeur du 21 janvier 2022.
Par jugement du 2 mai 2024, le tribunal administratif rejeta la demande d’injonction à l’adresse de l’administration telle que formulée par Monsieur (A) et tendant à la communication de documents, reçut le recours principal en réformation en la forme, au fond, le déclara non justifié, partant en débouta, tout en disant qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation, débouta le demandeur de sa demande tendant à l’octroi d’une indemnité de procédure et le condamna aux frais et dépens de l’instance.
Le 17 juin 2024, Monsieur (A) a régulièrement interjeté appel contre ce jugement.
A l’appui de son appel et sous l’intitulé des faits et rétroactes, l’appelant rappelle la procédure telle que reprise ci-avant et reproche à l’administration de n’avoir, malgré ses demandes, fourni aucune clarification ou justification relative au calcul du montant réclamé selon le bulletin d’appel en garantie. Il est ensuite d’avis que certains reproches lui adressés seraient injustifiés, à savoir l’affirmation que l’administration fiscale aurait été dans l’impossibilité d’établir l’impôt redû, alors qu’elle aurait dû l’inviter à fournir des informations, le cas échéant, manquantes, ce qui lui aurait rendu impossible la coopération avec l’administration afin de déterminer une imposition exacte, l’appelant critiquant en l’occurrence que la taxation d’office aurait été opérée sans mise en demeure préalable. Il en serait de même du reproche selon lequel il n’aurait procédé qu’à des contestations générales et vagues. L’Etat aurait encore mal interprété une de ses affirmations dont il aurait, à tort, déduit une reconnaissance du quantum des sommes redues. L’appelant souligne encore qu’il ne disposerait plus de la comptabilité de la société (BB), tombée en faillite, et critique l’administration pour ne pas avoir demandé en temps utile des pièces à cette société. Enfin et toujours dans le cadre de l’exposé des faits et rétroactes, l’appelant reproche à l’administration une certaine confusion dans ses affirmations sur la question de savoir si l’ensemble des retenues à faire n’avait pas été continué ou seulement une partie.
En droit, l’appelant fait état des moyens suivants :
- fausse interprétation, sinon interprétation trop restrictive du § 205 AO par les premiers juges, - violation du principe du contradictoire, - contestation du montant de la dette fiscale tant par rapport à la période de référence que par rapport au montant, de même que d’une inexécution fautive dans son chef, - violation du § 217 AO relatif à l’établissement du bulletin d’imposition du 11 mars 2020 et du bulletin d’appel en garantie, qui serait admise par l’administration, - violation de la procédure prévue au § 205 (3) AO relative à l’établissement du bulletin d’imposition du 11 mars 2020 et du bulletin d’appel en garantie, - non-respect au niveau des exigences de transparence dans le chef du bulletin d’imposition, - contradiction constatée au niveau des saisies opérées à l’égard de l’appelant et à l’égard de Monsieur (D).
La Cour constate que sous réserve du premier moyen, précité, l’appelant reprend mot par mot les développements figurant dans la requête introductive et dans la réplique telles que déposées en première instance et qui ont été repris en résumés dans le jugement a quo, de sorte qu’elle renvoie au jugement à ce sujet.
Selon le dispositif de la requête d’appel, l’appelant réitère encore sa demande d’injonction comme suit : « Enjoindre l'Administration fiscale de fournir les documents à la base du calcul du montant réclamé dans le bulletin d'appel en garantie du 3 juin 2021, dont notamment les déclarations d'impôts de la société (BB) S.A, les bulletins d'imposition, les fiches de salaire, les certificats de salaire, de retenue d'impôt et de crédits d'impôt bonifiés, les décomptes annuels des impôts de 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018 ».
La Cour n’est pas obligée d’examiner les moyens dans l’ordre tels que présentés par les parties, mais sera en l’espèce amenée à les regrouper à l’instar de l’analyse opérée par le tribunal, ayant distingué entre l’examen des différents moyens tournant autour de la question du respect du contradictoire, d’une part, et celui des moyens ayant trait à la mise en œuvre de la responsabilité de l’appelant, d’autre part.
1) Quant au respect du contradictoire Arguments des parties L’appelant se prévaut d’une violation du § 205 AO, tout en critiquant l’examen des premiers juges sur cette question, de même qu’une violation du § 217 AO relatif à la taxation.
L’appelant insiste sur la considération que le § 205 (3) AO imposerait à l’administration fiscale, avant de procéder à une taxation d’office, d’informer le contribuable et de fournir les éléments et explications à la base de sa décision, le non-respect entraînant la nullité du bulletin d’imposition. Ce serait à tort que les premiers juges ont conclu à l’inapplicabilité du § 205 (3) AO, au motif qu’il ne serait pas le contribuable principal, mais l’appelé en garantie. L’appelant se prévaut des § 212 et 212 a) AO, dont il déduit que comme le bulletin d’appel en garantie fixerait un montant de l’impôt et mentionnerait une personne déterminée, il devrait être assimilé à n’importe quel autre bulletin d’imposition fixant une cote d’impôt, de sorte qu’il n’y aurait pas lieu à distinguer selon la nature du bulletin d’imposition en termes de respect du contradictoire. Il souligne que tout écrit fixant une cote définitive d’impôt serait à considérer comme un bulletin d’imposition et serait soumis au respect du § 205 AO. De plus, cette disposition n’exclurait pas explicitement l’appel en garantie et ferait référence de manière générale au contribuable sans préciser qu’il ne serait applicable qu’au contribuable principal, l’appelant soulignant, à cet égard, que les premiers juges l’auraient qualifié à plusieurs reprises de contribuable. Il critique encore les premiers juges pour avoir retenu, d’une part, qu’il serait personnellement responsable de l’entièreté de l’impôt, mais en même temps auraient refusé de lui accorder les mêmes droits que ceux reconnus au contribuable principal, alors qu’il conviendrait de retenir que si l’appelé en garantie avait une obligation personnelle, il devrait être considéré comme contribuable et bénéficier plus particulièrement des garanties attachées au § 205 AO.
L’appelant souligne encore que même si les déclarations à opérer étaient à charge de la société (BB), l’obligation de déclaration aurait pourtant incombé aux administrateurs. Il en déduit que l’appelé en garantie serait « co-chargé » des déclarations fiscales, de sorte que le § 205 AO devrait lui être applicable.
Pour le surplus, tel que relevé ci-avant, l’appelant réitère les moyens exposés en première instance, en l’occurrence ceux fondés sur une violation du principe du contradictoire sur le fondement de l’article 9 du règlement grand-ducal 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », qui découlerait du fait qu’avant de recevoir le bulletin d’appel en garantie, il n’aurait pas été entendu et n’aurait reçu aucune explication quant au calcul du montant réclamé. L’administration aurait encore omis de porter à sa connaissance sa « Besteuerungsgrundlage », l’appelant se référant au § 211 (2) AO, et aurait violé les §§ 205 et 217 AO.
Dans sa réplique, l’appelant maintient ses contestions quant au non-respect du § 205 AO.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet de ces moyens et à la confirmation du jugement attaqué sur ce point.
Analyse de la Cour L’examen des moyens présentés par l’appelant à l’appui de son appel, ensemble les pièces et le dossier fiscal soumis à son appréciation, amène la Cour à confirmer la conclusion des premiers juges selon laquelle le reproche d’une violation du contradictoire n’est fondé en aucune de ses branches, la Cour partageant entièrement l’analyse pertinente des premiers juges à cet égard et qu’elle fait sienne, tout en constatant que les considérations avancées par l’appelant à l’appui de son appel n’énervent pas cette conclusion.
C’est ainsi à juste titre que les premiers juges ont conclu à l’inapplicabilité de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, ce au regard de l’article 5 dudit règlement.
Les premiers juges ont encore à juste titre relevé que le § 205 (3) AO, aux termes duquel « (…) (3) Wenn von der Steuererklärung abgewichen werden soll, sind dem Steuerpflichtigen die Punkte, in denen eine wesentliche Abweichung zu seinen Ungunsten in Frage kommt, zur vorherigen Äußerung mitzuteilen (…) », met en substance à charge du bureau d’imposition, préalablement à l’émission d’un bulletin d’impôt, une obligation positive de communication des éléments au sujet desquels il envisage de ne pas s’en tenir à la déclaration du contribuable, pour autant que ces éléments représentent une « wesentliche Abweichung » en défaveur du contribuable par rapport à sa déclaration. Ils ont conclu à bon escient que cette disposition légale ne trouve pas à s’appliquer dans le cadre de l’élaboration d’un bulletin d’appel en garantie, dans la mesure où un tel bulletin n’est pas établi sur base d’une déclaration fiscale, préalablement déposée par la personne appelée en garantie, de laquelle ledit bulletin pourrait diverger. Etant donné que ni le § 205 (3) AO ni une quelconque autre disposition normative n’imposent au bureau d’imposition compétent d’entendre le contribuable concerné en ses explications préalablement à l’émission de pareil bulletin1, ni a fortiori d’informer au préalable le contribuable de son intention d’émettre un bulletin d’appel en garantie à son encontre, c’est à bon droit que les premiers juges ont rejeté le moyen tenant à un non-respect, dans le cadre de l’émission du bulletin d’appel en garantie, du § 205 (3) AO.
La Cour souligne que le § 205 AO, tout comme le § 204 AO, dont il est une application particulière, s’insère dans la logique d’une procédure d’instruction déclenchée par une 1 Cour adm., 14 novembre 2019, n° 42532C du rôle, disponible sur le site www.jurad.etat.lu.
déclaration de la part du contribuable, son but étant de permettre à ce dernier de prendre position si l’administration entend opérer une « wesentliche Abweichung » en sa défaveur par rapport à sa déclaration. Tel n’est pas le cas de l’appel en garantie, qui est un acte décisionnel spontané pris par le bureau d’imposition s’il estime que le recouvrement effectif d’impôts non réglés par le contribuable devrait être assuré par l’adjonction d’une autre personne soumise à l’obligation légale de payer cet impôt. Par essence, dans une telle situation, aucune obligation d’avertir d’une déviation par rapport à une déclaration, nécessairement inexistante, ne s’impose. C’est partant le dépôt d’une déclaration d’impôt qui constitue la cause d’ouverture de la procédure d’imposition régie plus particulièrement par les §§ 204 à 227 AO, la jurisprudence retenant d’ailleurs que le § 205 AO n'a pas vocation à s'appliquer dans un cas où le contribuable a manqué à son obligation de déclarer ses revenus, étant donné que dans cette hypothèse, l'administration n'a pas pu s'écarter de la déclaration du contribuable2.
Pour cette raison, l’argumentation de l’appelant consistant à assimiler, par référence aux §§ 212 et 212 a) AO, le bulletin d’appel en garantie à n’importe quel autre bulletin d’imposition fixant une cote d’impôt, ce dont il conclut à l’applicabilité du § 205 AO, est encore à rejeter, la question pertinente pour l’application de cette disposition n’étant point celle de savoir si le bulletin d’appel en garantie est à qualifier de bulletin de l’impôt, mais le déclencheur pour l’application de cette disposition étant l’existence d’une déclaration par rapport à laquelle il est dévié.
Comme l’émission d’un bulletin d’appel en garantie ne fait pas suite à une déclaration du contribuable et comme de ce fait un tel bulletin ne rentre pas dans le champ d’application du § 205 AO, l’appelant n’est pas non plus fondé à conclure à l’application de cette disposition à partir du constat que celle-ci n’exclurait pas explicitement l’appel en garantie.
Si l’appelant insiste encore sur la considération qu’en tant qu’administrateur de la société (BB), il aurait été chargé d’opérer les déclarations en relation avec les retenues sur salaires, la Cour relève que non seulement cette obligation lui est imposée en tant que représentant de la société et non pas en tant que contribuable, mais surtout la déclaration que vise l’appelant n’est pas un préalable à l’établissement de l’appel en garantie, mais est en lien avec les retenues d’impôt à faire par la société (BB).
De même, si le § 119 AO accorde au tiers appelé en garantie les mêmes voies de recours contre le bulletin d’appel en garantie que celles dont dispose le débiteur principal de l’impôt et si par ailleurs les §§ 103 et 109 AO mettent à charge des représentants légaux une obligation personnelle, il n’en découle toutefois pas, tel que l’appelant l’affirme en substance dans sa réplique lorsqu’il affirme qu’il serait à assimiler au contribuable, que de ce fait le § 205 AO trouverait application.
Les premiers juges ont ensuite à bon escient rejeté les contestations tirées d’un défaut de justification suffisante dans le bulletin d’appel en garantie des montants y réclamés. A ce sujet, c’est de façon pertinente qu’ils ont relevé que le bulletin d’appel en garantie, en ce qu’il constitue son destinataire en débiteur de l’impôt resté en souffrance et l’oblige au paiement de cet impôt, doit, conformément au § 211 (1) AO, indiquer le montant des impôts fixés par voie d’assiette ou des retenues d’impôt dont le paiement est requis de la personne appelée en garantie, de même que le § 211 (2) 1. AO requiert l’indication d’une instruction sur les voies de recours, tandis qu’il est admis qu’une « sinngemäβe » application du § 211 (2) 2. AO, 2 Cour adm., 11 janvier 2024, n° 48770C du rôle, disponible sur le site www.jurad.etat.lu conformément au § 97 (2) AO, dans le cadre du régime de l’appel en garantie emporte une interprétation d’après laquelle le bureau compétent doit indiquer dans le bulletin d’appel en garantie les montants des impôts ou retenues d’impôt, les périodes au titre desquelles ils sont dus, ainsi que les accessoires qui se trouvent à la base du montant global pour lequel la personne visée est appelée en garantie.
En revanche, à l’instar des premiers juges, la Cour relève que si le § 211 (2) 4. AO impose l’indication des « Punkte, in denen von der Steuererklärung abgewichen worden ist », il y a lieu de constater que ce texte établit clairement un lien entre le contenu de la déclaration du contribuable et celui de la fixation des bases d’imposition et de la cote d’impôt par le bureau d’imposition, de sorte à s’insérer dans la logique de la procédure d’imposition par voie d’assiette et à établir une obligation à charge de l’administration seulement lorsque la charge d’impôt déterminée par le bureau d’imposition est plus lourde que celle escomptée par le contribuable dans sa déclaration. Or, en l’absence d’une procédure préalable, le régime de l’appel en garantie n’est par essence pas fondé sur une déclaration de la part de la personne concernée, mais repose sur la seule initiative du bureau compétent, de sorte que le § 211 (2) 4.
AO ne peut pas trouver application à l’égard du bulletin d’appel en garantie.
La Cour relève encore qu’il est de jurisprudence que l’obligation de motivation, à laquelle le reproche de l’appelant, selon lequel les sommes réclamées n’auraient à ces yeux pas été justifiées à suffisance, peut être rattaché, ne se conçoit en matière d’appel en garantie qu’à travers le principe général du droit au respect des droits de la défense, en ce sens que le destinataire de ce bulletin doit être en mesure de connaître la motivation d’une décision au plus tard au cours de la procédure contentieuse devant les juridictions administratives afin de pouvoir utilement préparer sa défense3.
La Cour rejoint les premier juges en leur constat qu’en l’espèce, il se dégage aussi bien du bulletin d’appel en garantie que de la décision directoriale rendue sur réclamation, ainsi que des explications fournies par le délégué du gouvernement que c’est lors d’une révision des retenues d’impôt à opérer, à déclarer et à verser par la société (BB) à l’administration des Contributions directes du chef des rémunérations allouées à son personnel salarié et retraité, à laquelle le bureau d’imposition a procédé le 5 mars 2020, que celui-ci a constaté que ladite société avait occupé des salariés depuis sa constitution en 2013 jusqu’au prononcé de sa faillite en 2018 sans remettre durant ces années une seule déclaration de retenue d’impôt sur les traitements et salaires desdits salariés au bureau d’imposition compétent. Il ressort encore plus particulièrement du bulletin de compléments de retenue, de la décision directoriale et des explications du délégué du gouvernement qu’à défaut de déclarations, de paiements, de la tenue de livre de salaires et d’extraits de compte salaires, voire de tout document comptable pertinent, le bureau d’imposition a procédé par voie de taxation en se fondant sur les comptes annuels publiés au registre du commerce et des sociétés pour ce qui est des années 2013 à 2015 et sur les comptes annuels remis au bureau d’imposition pour ce qui est de l’année 2016 et qu’à défaut de toute pièce relative aux années 2017 et 2018, le montant arrondi de l’année 2016 a été repris pour les deux années. Par ailleurs, tant les montants que la catégorie d’impôts et les périodes au titre desquelles ils sont dus ont été indiqués dans le bulletin d’appel en garantie lequel a lui-
même repris les bases du bulletin de compléments de retenue du 11 mars 2020 qui y a, par ailleurs, été annexé. Le tribunal a encore relevé à juste titre que le bulletin de compléments de 3 Cour adm., 11 octobre 2016, n° 37833C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 530 et les autres références y citées.
retenue en question indique expressément sous la rubrique « Observations relatives à la révision […] », ce qui suit :
« Les déclarations et paiements des retenues d’impôt sont à faire d’après les dispositions légales (…) Les comptes de rémunération sont à tenir d’après les prescriptions des articles 136 et 137 L.I.R. (…) Taxation d’office de l’impôt suivant §217 AO (…) Le présent bulletin de vérification est établi sous réserve d’une éventuelle vérification ultérieure portant sur la retenue en vertu de l’article 142 L.I.R. concernant votre régime complémentaire de pension (loi du 8 juin 1999). (…) Années 2013-2016 : A défaut des livres/comptes de salaires et des dépôts électroniques des extraits de compte de salaires ainsi que des déclarations d’impôt sur les salaires, les salaires comptabilisés dans les frais généraux ont été taxés selon la loi en vigueur.
Années 2017-2018 : A défaut de dépôt des frais généraux au registre de commerce des sociétés, l’impôt sur les salaires a été taxé d’office. (…) ».
La Cour ne voit pas non plus de contradiction dans les explications de la partie étatique au sujet du quantum des retenues à faire, tel que l’appelant le soutient, puisque l’Etat a clairement retenu qu’aucune déclaration et retenue n’avait été faite.
Enfin, à l’instar du tribunal, la Cour constate qu’il se dégage des explications non autrement énervées du délégué du gouvernement que la faillite de la société (BB) a été clôturée le 19 octobre 2021 sans que l’administration n’ait pu recouvrir un quelconque montant en relation avec sa créance.
Les contestations du demandeur relatives à une absence de justification suffisante dans le bulletin d’appel en garantie des montants pour lesquels il a été appelé en garantie ont dès lors à juste titre été rejetées, la Cour ne voyant pas non plus d’atteinte aux droits de la défense dans le chef de l’appelant.
C’est, enfin, à juste titre et pour des motifs que la Cour rejoint entièrement que le tribunal a rejeté la demande formulée dans le dispositif de la requête introductive d’instance et réitérée dans le dispositif de la requête d’appel à voir enjoindre l’administration à produire certains documents.
A l’instar des premiers juges, la Cour procède encore à l’examen de l’admissibilité et, le cas échéant, du bien-fondé des critiques de l’appelant en ce qui concerne la méthodologie employée par le bureau d’imposition pour fixer les compléments de retenue d’impôts dus par le débiteur principal, à travers lesquels l’appelant entend en réalité remettre en question la validité des compléments de retenue d’impôts fixés à travers le bulletin complémentaire du 11 mars 2020 qui se trouve à la base du bulletin d’appel en garantie litigieux dans le cadre de l’analyse des conditions de mise en œuvre de la responsabilité du demandeur en sa qualité de tiers appelé en garantie.
2) Quant à la mise en œuvre de la responsabilité de l’appelant Arguments des parties Tel que cela a été retenu ci-avant, l’appelant reprend mot par mot ses développements contenus dans la requête et le mémoire en réplique déposés en première instance et tels que résumés par les premiers juges, de sorte que la Cour entend y renvoyer.
Dans sa réplique, l’appelant réitère en substance ses moyens, tout en reprochant à l’administration de s’être adressée au seul curateur avant d’émettre le bulletin d’imposition du 11 mars 2020 au lieu de lui accorder les mêmes droits qu’au contribuable et de l’avertir au préalable.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet des moyens.
Analyse de la Cour Les premiers juges ont de façon correcte tracé le cadre légal de l’examen du bien-fondé de la responsabilité personnelle de l’appelant, en rappelant qu’en vertu des dispositions de l’article 136, alinéa (4) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après « LIR », l’employeur est tenu de retenir et de verser l’impôt qui est dû sur les salaires et traitements de son personnel et que dans le cas d’une société, cette obligation incombant à l’employeur est transmise aux représentants de celle-ci, conformément au § 103 AO, qui dispose que « Die gesetzlichen Vertreter juristischer Personen und solcher Personen, die geschäftsunfähig oder in der Geschäftsfähigkeit beschränkt sind, haben alle Pflichten zu erfüllen, die denen Personen, die sie vertreten, obliegen ; insbesondere haben sie dafür zu sorgen, dass die Steuern aus den Mitteln die sie verwalten, entrichtet werden. Für Zwangsgeldstrafen und Sicherungsgelder die gegen sie erkannt, und für Kosten von Zwangsmitteln die gegen sie festgesetzt werden, haften neben ihnen die von ihnen vertretenen Personen ». Il s’ensuit que le représentant légal d’une société commerciale est tenu de remplir les obligations fiscales incombant à la société et notamment de payer sur les fonds qu’il gère les impôts dont la société est redevable directement, respectivement ceux dont elle est redevable pour le compte d’autrui.
Ils ont ensuite rappelé à juste titre, en ce qui concerne la mise en oeuvre de la responsabilité personnelle du fait du non-paiement des impôts dont est redevable une personne morale, le § 109 AO, qui dispose dans son alinéa 1er comme suit : « Die Vertreter und die übrigen in den §§ 103 bis 108 bezeichneten Personen haften insoweit persönlich neben dem Steuerpflichtigen, als durch schuldhafte Verletzung der ihnen in den §§ 103 bis 108 auferlegten Pflichten Steueransprüche verkürzt oder Erstattung oder Vergütung zu Unrecht gewährt worden sind ».
Ils ont conclu à bon escient que ces dispositions légales mettent une obligation personnelle à charge des représentants légaux de la société, tout en soulignant que le simple constat d’un manquement à une obligation fiscale découlant du § 103 AO, précité, n’est pas suffisant pour engager la responsabilité personnelle des dirigeants d’une société en application du § 109, alinéa (1), AO et pour voir émettre à leur encontre un bulletin d’appel en garantie, le législateur ayant, en effet, posé, à cet égard, l’exigence supplémentaire d’une inexécution fautive (« schuldhafte Verletzung ») des obligations du représentant de la société.
Les premiers juges se sont encore de façon pertinente référés au § 7, alinéa (3), de la loi d’adaptation fiscale du 16 octobre 1934 (« Steueranpassungsgesetz »), en abrégé « StAnpG »), qui dispose que « Jeder Gesamtschuldner schuldet die ganze Leistung. Dem Finanzamt steht es frei an welchen Gesamtschuldner es sich halten will. Es kann die geschuldete Leistung von jedem Gesamtschuldner ganz oder zu einem Teil fordern », qui prévoit, en cas de pluralité de responsables, la possibilité de poursuivre simultanément tous les responsables qui sont tenus solidairement, sans que le bureau d’imposition ne soit obligé de poursuivre tous les co-responsables et peut limiter son recours contre un ou plusieurs d’entre eux4.
A l’instar des premiers juges, la Cour relève qu’en toute hypothèse, il appartient au bureau d’imposition de relever les circonstances particulières qui ont déterminé son choix, puisque le pouvoir du bureau d’imposition d’engager une poursuite contre un tiers responsable, et, plus particulièrement, contre le représentant d’une société, ne relève pas d’une compétence liée, mais constitue un pouvoir d’appréciation dans son chef et ce à un double titre, d’abord en ce qui concerne l’appréciation du degré fautif du comportement de la personne visée, et, ensuite, en ce qui concerne le choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, chaque fois compte tenu des circonstances particulières de l’espèce.
Quant à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation par l’administration, le § 2 StAnpG dispose dans ses alinéas (1) et (2) que « (1) Entscheidungen, die die Behörden nach ihrem Ermessen zu treffen haben (Ermessens-Entscheidungen), müssen sich in den Grenzen halten, die das Gesetz dem Ermessen zieht.
(2) Innerhalb dieser Grenzen sind Ermessensentscheidungen nach Billigkeit und Zweckmässigkeit zu treffen », de sorte que l’administration, investie d’un pouvoir d’appréciation, doit procéder selon des considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières susceptibles en raison et en équité de fonder sa décision.
Le tribunal s’est ensuite de façon pertinente référé au § 110 AO, qui dispose que « Das Erlöschen der Vertretungsmacht oder der Vollmacht läβt die Pflichten der Vertreter und Bevollmächtigten unberührt, soweit es sich um die vorangegangene Zeit handelt », et qui impose le maintien intégral de la responsabilité personnelle du dirigeant pour l’ensemble des obligations fiscales de la société échues avant et au cours de la période d’exercice de son mandat, tout en libérant le dirigeant des obligations fiscales de la société pour le futur.
En l’espèce et tel que les premiers juges l’ont relevé à juste titre, il se dégage du bulletin d’appel en garantie, de la décision directoriale déférée, ainsi que des explications non autrement énervées du délégué du gouvernement que l’appelant est appelé en garantie en sa qualité d’administrateur de la société (BB) au motif que depuis la constitution de ladite société en 2013 et jusqu’au prononcé de sa faillite en 2018, celle-ci n’avait procédé ni à des déclarations de retenues d’impôts, ni au paiement d’impôts sur les salaires et traitements de son personnel, ni au dépôt de livres de salaires et d’extraits de compte salaires et pensions.
Il ressort d’une publication au registre de commerce et des sociétés figurant au dossier que Monsieur (A) a été nommé administrateur de la société (BB) lors de l’assemblée générale des actionnaires qui s’est tenue en date du 10 mars 2015, étant relevé qu’il n’est pas contesté que celui-ci a continué d’endosser ses fonctions d’administrateur jusqu’à la déclaration en 4 Cour adm., 6 janvier 2011, n° 27126C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 571 et les autres références y citées.
faillite de la société (BB) par jugement du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg du 20 juillet 2018.
Il n’est pas non plus contesté, ni en première instance, ni en instance d’appel, qu’en sa qualité d’administrateur de la société (BB), l’appelant avait le pouvoir d’engager celle-ci à l’égard des tiers par sa signature conjointe avec celle d’un autre administrateur et ceci depuis le 10 mars 2015 jusqu’au prononcé de sa faillite par jugement du 20 juillet 2018.
Comme l’appelant a ainsi rempli jusqu’à la déclaration de la faillite de la société (BB) la fonction d’administrateur de ladite société, il doit être considéré comme ayant été, jusqu’à cette date, officiellement en charge de l’administration de celle-ci et, conformément à l’article 441-9 de la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales, comme ayant été jusqu’à cette date un des représentants légaux de ladite société à l’égard des tiers, la société (BB) ayant, en effet, été représentée à l’égard des tiers par son conseil d’administration.
Les premiers juges ont retenu à bon escient qu’en tant que personne de jure et de facto en charge de l’administration de la société (BB), l’appelant était, conformément au § 103 AO, personnellement tenu, pendant l’exercice de cette fonction, à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société pendant cette période, de sorte qu’il était notamment obligé de retenir, lors du paiement des salaires, l’impôt sur les salaires, ainsi que de le déclarer et le continuer au Trésor.
Les premiers juges ont à juste titre rejeté le moyen consistant à vouloir se décharger de toute responsabilité pour ce qui est des retenues à faire avant son entrée en fonction, tel que réitéré en appel. En effet, il est de jurisprudence constante que ce n’est pas seulement l’ancien représentant qui peut se voir opposer, après la cessation de ses fonctions, des manquements aux obligations fiscales du représenté survenus au cours de la période pendant laquelle il assumait les fonctions de représentant, mais également le nouveau représentant, étant donné que le nouvel administrateur ne saurait pas prétendre à avoir ignoré les manquements qui sont survenus antérieurement à son entrée en fonctions, la circonstance qu’une obligation aurait dû être exécutée avant son entrée en fonctions ne libérant pas un nouvel administrateur de ses responsabilités, mais il doit remédier au manquement dès qu’il en a connaissance5. En présence d’un manquement prolongé aux obligations incombant normalement à un administrateur, tel que cela est le cas en l’espèce, puisque de façon systématique, depuis la constitution de la société (BB) jusqu’à sa faillite, les retenues sur salaires n’ont pas été payées, le nouvel administrateur ne saurait pas non plus s’exonérer par un défaut de connaissance des manquements6. Ainsi, l’appelant n’était pas dispensé de veiller notamment au versement au receveur de la retenue d’impôt sur les traitements et salaires qui aurait dû être payée avant son entrée en fonctions.
S’agissant des contestations de l’appelant des montants mis à sa charge à travers le bulletin d’appel en garantie que de l’existence d’une inexécution fautive dans son chef, la Cour rejoint encore l’analyse des éléments de la cause telle qu’opérée des premiers juges qu’elle fait sienne.
Les premiers juges ont, en effet, à juste titre relevé que si l’émission du bulletin de compléments de retenue pour les années d’imposition 2013 à 2018 qui est à la base de l’appel 5 Cour adm., 29 juin 2017, n° 39336C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 596, rappelé par la Cour adm. dans un arrêt réent du 20 février 2024, n° 49268C du rôle.
6 Idem.
en garantie n’est intervenue qu’à la suite d’une révision des retenues d’impôt à opérer, à déclarer et à verser par la société (BB), effectuée par le bureau d’imposition compétent le 5 mars 2020, donc après la faillite de ladite société en juillet 2018, les compléments de retenues d’impôt redues trouvent néanmoins leur origine dans l’omission de continuer au receveur les montants qui ont été retenus ou qui auraient dû être retenus par la société (BB) à titre d’impôt sur les traitements et salaires payés pour les années 2013 à 2018, donc durant les années durant lesquelles l’appelant était en charge de l’administration de la société et devait en l’occurrence veiller à l’accomplissement par la société qu’il administrait de ses obligations au niveau des retenues sur salaires, voire durant les années ayant précédé son mandat et par rapport auxquelles il ne peut pas raisonnablement affirmer ne pas avoir eu connaissance du défaut de paiement des retenues sur salaires, cette omission ayant été poursuivie de façon systématique durant son mandat.
A l’instar des premiers juges, la Cour constate que, par rapport à ces omissions, Monsieur (A) s’est limité en première instance et le fait toujours en instance d’appel, à contester le montant repris dans le bulletin d’appel en garantie, respectivement à reprocher à l’administration de ne pas l’avoir entendu en ses explications avant d’avoir fixé par voie de taxation d’office des compléments de retenue. Il estime également que comme l’affirmation contenue dans le bulletin d’appel en garantie suivant laquelle la totalité des retenues en relation avec les salaires payés pour les années 2013 à 2018 n’aurait pas été continuée au receveur resterait non seulement à l’état de pure allégation, mais permettrait, qui plus est, de présupposer qu’il aurait bien procédé à des retenues d’impôts qu’il aurait continuées et qu’a fortiori, il aurait donc bien fait des déclarations, aucune faute ne pourrait lui être imputée.
Tel que retenu à juste titre par les premiers juges, c’est à tort que l’appelant entend déduire des termes du bulletin d’appel en garantie, en l’occurrence des termes « sans que les montants à retenir aient été continués entièrement au receveur », que du moins certaines des retenues avaient été déclarées et continuées au Trésor, puisqu’il se dégage non seulement de la décision directoriale, mais également des explications du délégué du gouvernement, sous-tendues par les pièces du dossier fiscal, qu’il est reproché à la société (BB) de n’avoir, depuis sa constitution, notamment pas procédé à la moindre déclaration de retenues d’impôt sur les traitements et salaires au bureau d’imposition, ni effectué le moindre paiement d’impôts sur les salaires et traitements de ses salariés, l’appelant ayant lui-même admis l’existence de dettes fiscales dans le chef de la société (BB) dans sa réclamation.
Les premiers juges ont rappelé à juste titre que l’appelant actuel était, en sa qualité de représentant de la société (BB), personnellement tenu à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à celle-ci, respectivement tenu de veiller à ce que ces obligations soient accomplies, obligation qu’il n’a toutefois manifestement pas respectée, puisque la société (BB) a, de manière non contestée, violé depuis sa constitution les dispositions légales applicables en matière de retenues sur salaires, en ayant non seulement omis de continuer l’ensemble des retenues opérées sur les salaires, mais en s’étant également abstenue de déclarer lesdits impôts et de tenir des livres de salaire et des extraits de compte salaires et pensions. Les premiers juges en ont à bon droit déduit un comportement fautif dans le chef de Monsieur (A), étant relevé qu’il est de jurisprudence qu’en n’exécutant pas les obligations légales de la société ou en ne veillant pas à leur accomplissement, le représentant manque à son premier devoir, celui d’administrer.
A l’instar des premiers juges, la Cour retient que le comportement fautif de l’appelant, qui a engendré la non-perception par le Trésor de sommes dues au titre de l’impôt sur les traitements et salaires qui auraient dû être déclarées, retenues et continuées à l’administration des Contributions directes par la société (BB) est d’autant plus reprochable puisque, d’un côté, le défaut de paiement des retenues d’impôt s’est étendu sur six années et, de l’autre côté, qu’en arrogeant ainsi à la société (BB) un crédit en omettant de payer des sommes qui sont dues au fisc, l’appelant a permis un détournement des sommes retenues pour compte des salariés à d’autres fins, étant rappelé qu’il s’agit de sommes d’argent qui, dès le versement du salaire, ne doivent pas recevoir une affectation autre que le paiement de l’impôt dû par le salarié.
Sur base de ces considérations, les premiers juges ont à juste titre conclu que le comportement fautif de Monsieur (A) se trouve vérifié en l’espèce en ce qui concerne les années 2013 à 2018 et ont confirmé le bureau d’imposition pour avoir retenu une faute caractérisée à sa charge en relation avec la non-perception des retenues litigieuses visant ces mêmes années, de sorte qu’en avançant ces considérations à l’appui de sa décision, le directeur s’est livré à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières de nature à fonder sa décision en raison et en équité, l’appelant étant resté en défaut de renverser utilement les conclusions du directeur à cet égard et plus particulièrement les faits relevés par celui-ci pour conclure au caractère fautif de son comportement en tant qu’administrateur de la société (BB).
Les contestations quant à l’existence d’une inexécution fautive, de même que le reproche au directeur de ne pas avoir effectué une appréciation en équité et raison selon les circonstances particulières de l’espèce, ont dès lors à bon droit été rejetés.
Ensuite, les premiers juges ont de façon correcte situé les contestations de Monsieur (A) en relation avec la méthodologie employée par le bureau d’imposition pour fixer les compléments de retenues d’impôts redues par la société (BB) et le quantum de la créance d’impôt réclamée, par rapport à la question du bien-fondé du bulletin de compléments de retenue du 11 mars 2020 émis à l’égard de la société (BB) et qui se trouve à la base du bulletin d’appel en garantie litigieux.
Ils ont de façon pertinente relevé que la mise en œuvre de la garantie d’un représentant d’une société nécessite l’existence d’un dommage pour l’Etat consistant dans l’insuffisance de l’impôt effectivement perçu par rapport à celui légalement dû conformément aux bulletins d’impôt émis à l’égard du débiteur principal, à travers soit des défauts de paiements de cotes d’impôts dues ou des diminutions indues des cotes d’impôts fixées, soit par le biais de l’obtention de restitutions ou de crédits d’impôts indus (« […] Steueransprüche verkürzt oder Erstattung oder Vergütung zu Unrecht gewährt worden sind … ») et que ce sont les bulletins ayant fixé des cotes d’impôt qui constituent, à côté des paiements accomplis ou non par le débiteur principal, le facteur à la base du montant d’impôts pouvant donner lieu à un appel en garantie à l’égard d’un représentant du débiteur principal. Les bases d’imposition telles que retenues dans les bulletins d’impôt en tant que fondement des cotes d’impôt ne sauraient partant plus être remises en cause par le garant que pour autant qu’il est encore en mesure, conformément au § 119 AO, de contester, au-delà des conditions de son appel en garantie, également la soumission du débiteur principal à l’impôt ou la cote d’impôt fixée à son égard7.
La portée du recours introduit par une personne appelée en garantie d’impôts redus par un autre débiteur principal et partant l’étendue des moyens qu’il peut soulever contre le bulletin d’appel en garantie émis à son égard se trouvent régies par le § 119 AO qui dispose ce qui suit :
7 Cour adm., 10 mars 2015, n° 35065C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 561 et les autres références y citées.
« (1) Wer neben dem Steuerpflichtigen oder an dessen Stelle persönlich auf Zahlung einer Steuer in Anspruch genommen wird (§ 97 Absatz 2), kann gegen seine Heranziehung die Rechtsmittel geltend machen, die dem Steuerpflichtigen zustehen. Die Frist zur Einlegung des Rechtsmittels beginnt mit Ablauf des Tags, an dem Ihm der Beschluss über seine Heranziehung zugestellt oder, wenn keine Zustellung vorgeschrieben ist, bekannt gemacht worden ist.
(2) Ist die Steuerschuld dem Steuerpflichtigen gegenüber unanfechtbar festgestellt, so hat dies gegen sich gelten zu lassen, wer als Rechtsnachfolger des Steuerpflichtigen haftet oder wer in der Lage gewesen wäre, den gegen den Steuerpflichtigen erlassenen Bescheid als dessen Vertreter, Bevollmächtigter oder kraft eigenen Rechts anzufechten ».
En vertu du § 119 AO, le tiers appelé en garantie peut introduire les mêmes voies de recours et faire valoir les mêmes moyens contre le bulletin d’appel en garantie que ceux dont dispose le débiteur principal de l’impôt, tout en exceptant l’hypothèse où le bulletin émis à l’égard du débiteur principal a acquis autorité de chose décidée et où le tiers appelé en garantie aurait eu la possibilité de réclamer contre ce bulletin en tant que représentant légal du contribuable principal, cas dans lequel ce bulletin est définitif également à l’égard de la personne appelée en garantie8.
Dans la mesure où les arriérés d’impôts litigieux correspondent aux retenues d’impôt sur traitements et salaires des années 2013 à 2018 fixés à travers le bulletin de compléments de retenue du 11 mars 2020 et que ledit bulletin a été émis après le prononcé de la faillite de la société (BB) le 20 juillet 2018, les premiers juges ont à juste titre retenu que le § 119 (2) AO ne saurait être opposé à Monsieur (A), vu qu’il n’avait pas, durant tout le délai de recours contre ce bulletin, la qualité nécessaire afin de pouvoir introduire une voie de recours à son encontre, de sorte qu’ils l’ont admis à contester la validité du bulletin complémentaire et plus particulièrement la méthodologie employée par le bureau d’imposition pour fixer les compléments de retenue d’impôts redus par la société (BB), ainsi que le quantum de la créance d’impôt lui réclamée.
La Cour relève à cet égard, à l’instar des premiers juges, que la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la cote d’impôt appartient au contribuable, cette preuve pouvant être rapportée par tous les moyens hormis le serment.
Pour ce qui est des critiques en relation avec la méthode employée par le bureau d’imposition pour fixer les compléments de retenues, la Cour constate, à l’instar des premiers juges, que comme l’appelant ne prend aucunement position par rapport aux reproches tirés du non-accomplissement, par la société (BB), des obligations fiscales lui ayant incombé depuis sa constitution, sans plus particulièrement contester que ladite société a effectivement omis, pour toute la période en cause, de remettre la moindre déclaration de retenues d’impôt sur les traitements et salaires au bureau d’imposition compétent, ni l’absence de tenue de livres de salaire et d’extraits de compte salaires, c’est à bon droit que le directeur a confirmé le bureau d’imposition non seulement en ce qu’il a procédé par la méthode de la taxation prévue au § 217 AO en se basant sur les salaires comptabilisés dans les frais généraux tels qu’indiqués dans les comptes annuels déposés au RCS pour les années 2013 à 2015, respectivement dans les comptes annuels remis au bureau d’imposition Sociétés 5 pour l’année 2016, mais également en ce qu’il 8 Cour adm., 4 février 2016, nos 36489C et 36490C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 562 et les autres références y citées.
a fixé des retenues d’impôt sur les traitements et salaires des années 2013 à 2018 par l’émission d’un bulletin de compléments de retenue.
La Cour partage entièrement l’analyse des premiers juges selon laquelle c’est en raison du comportement fautif de l’appelant lui-même, en tant qu’une des personnes de jure et de facto en charge de l’administration de la société (BB), que les montants fixés dans le bulletin de compléments de retenue du 11 mars 2020 ont dû faire l’objet d’une estimation, étant relevé que, conformément à sa dénomination allemande (« Schätzung »), la taxation d’office consiste « à déterminer et à utiliser une valeur probable et (ou) approximative, lorsque la détermination de la valeur réelle et exacte n’est pas possible »9.
Dans la mesure où aucune déclaration de retenues d’impôt sur les traitements et salaires n’a été remise au bureau d’imposition par la société (BB), l’appelant est en tout état de cause pas non plus fondé à se prévaloir du § 205 (3) AO pour critiquer le fait qu’il n’ait pas été entendu préalablement à la fixation des compléments de retenues d’impôts sur les traitements et salaires à la base du bulletin d’appel en garantie du 3 juin 2021, ladite disposition ne s’appliquant qu’au cas où l’administration envisage de s’écarter de manière significative des déclarations du contribuable, ce qu’elle ne peut faire que si elle s’est vue remettre de telles déclarations. Par ailleurs, même dans l’hypothèse d’une imposition à la suite d’une déclaration de l’impôt, le § 205 (3) AO, ni aucune autre disposition ne requiert d’avertir au préalable un tiers qui serait potentiellement susceptible de faire l’objet d’un appel en garantie à défaut de paiement par le débiteur principal, voire de le mettre en demeure avant d’émettre un appel en garantie.
Pour ce qui est du quantum de la créance d’impôt réclamée, il se dégage des explications fournies par le délégué du gouvernement en cours de procédure contentieuse que faute de livres de salaires, ni les salariés ayant disposé d’une fiche de salaire valable, ni les montants bruts des salaires n’étaient identifiables, de sorte que le bureau d’imposition a fait application de l’article 143 (3) LIR en vertu duquel l’employeur n’ayant pas réceptionné la fiche d’impôt est obligé d’imposer la rémunération selon les dispositions les plus onéreuses, c’est-à-dire sur base de la classe d’impôt 1, sans que le taux ne puisse être inférieur à 33%. Il ressort également des explications du délégué du gouvernement, appuyées par les pièces du dossier fiscal, que les comptes pertes et profits abrégés de la société (BB), tels que publiés au RCS ou remis à l’administration, renseignaient à titre de salaires et traitements, pour les années 2013 à 2016, les montants de respectivement … euros, … euros, … euros et … euros, lesquels ont été taxés à défaut de déclaration, et après déduction des cotisations sociales, à hauteur de 33%, ce qui a abouti pour les années en question aux montants de respectivement … euros, … euros, … euros et … euros dus à titre de retenue d’impôt sur les traitements et salaires. Selon les explications du délégué du gouvernement et tel que cela se dégage du bulletin de la retenue d’impôt, pour les années 2017 et 2018, faute de pièces comptables déposées ou publiées, le bureau d’imposition s’est basé sur les derniers comptes sociaux de 2016 pour retenir une retenue d’impôt sur les traitements et salaires à hauteur à chaque fois de … euros.
En instance d’appel, tout comme en première instance, Monsieur (A) reste en défaut de faire valoir un quelconque moyen utile pour contester les montants repris dans le bulletin de compléments de retenue en question, lesquels ont été fixés par le bureau d’imposition sur base des montants pourtant renseignés par la société (BB) elle-même à titre de salaires et de traitements dans les comptes pertes et profits abrégés, tels que publiés au RCS ou remis à 9 J. Olinger, La Procédure contentieuse en matière d’impôts directs, Etudes fiscales, nos 81 à 85, page 117, n° 190.
l’administration. Dans ces conditions, les premiers juges ont retenu le caractère insuffisant de la transmission par Monsieur (A) à l’appui du mémoire en réplique déposé en première instance de « « certificats de salaire, de retenue d’impôt et de crédits d’impôts bonifiés » des années 2014 à 2018 pour chaque salarié », respectivement de son affirmation que compte tenu de la faillite de la société (BB), il ne lui serait pas possible matériellement de rapporter la preuve du dépôt des documents en question, à défaut de tout élément permettant de vérifier le caractère complet des pièces ainsi déposées et d’expliquer pourquoi ces pièces diffèrent des chiffres renseignés de manière non contestée à titre de salaires et de traitements dans les comptes sociaux de la société (BB).
S’agissant de la demande de voir entendre le curateur de la faillite de la société (BB) au sujet de l’existence de documents comptables « en relation avec le présent litige », telle que formulée sans autre précision dans le dispositif du mémoire en réplique, celle-ci est à rejeter au regard des considérations qui précèdent, ceci d’autant plus que par un courriel du 10 octobre 2022, le curateur a fait savoir qu’il ne dispose pas des documents comptables demandés.
Au vu de ces considérations, les premiers juges ont à juste titre retenu que Monsieur (A) reste en défaut d’énerver valablement la validité du bulletin de compléments de retenue, de sorte que ses contestations relatives tant à la méthodologie employée par le bureau d’imposition pour fixer les compléments de retenues dus qu’au quantum de la dette d’impôt réclamée sont également à rejeter pour ne pas être fondées.
S’agissant du moyen fondé sur l’existence de contradictions entre le montant de la contrainte établie à l’encontre d’un autre administrateur, Monsieur (D), et les montants repris dans le bulletin d’appel en garantie émis à l’encontre de l’appelant, la Cour relève, à l’instar des premiers juges, qu’il se dégage du bulletin d’appel en garantie que trois autres bulletins d’appel en garantie ont été émis à l’encontre de Messieurs (D), (F) et (G) en leur qualité de codébiteurs solidaires des montants redus par la société (BB) et que selon les explications du délégué du gouvernement la différence s’explique par la durée de leurs mandats sociaux respectifs et donc de la période pendant laquelle ils étaient tenus à l’accomplissement des obligations fiscales incombant à la société (BB).
Enfin, en ce qui concerne les développements relatifs à la procédure de recouvrement des dettes fiscales non réglées, l’appelant semblant vouloir argumenter que l’administration aurait dû tenter de trouver un arrangement à l’amiable avec lui, les premiers juges ont relevé à juste titre qu’outre le fait qu’il ne se dégage pas des §§ 103 et 109 AO que la mise en œuvre de la responsabilité du représentant d’une société exige, au préalable, le déclenchement d’une procédure de recouvrement, les juridictions administratives ne sont de toute façon pas compétentes pour apprécier la régularité d’une telle procédure 10.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel laisse d’être fondé et qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris.
Au vu de l’issue du litige, il y a encore lieu de rejeter la demande de l’appelant en allocation d’une indemnité de procédure.
10 Cour adm., 18 novembre 2003, n° 16634C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Compétence, n° 130 et les autres références y citées.
Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause;
reçoit l’appel en la forme;
le dit non fondé et en déboute;
partant, confirme le jugement entrepris;
rejette la demande de l’appelant en allocation d’une indemnité de procédure;
condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.
Ainsi délibéré et jugé par :
Serge SCHROEDER, premier conseiller, Lynn SPIELMANN, premier conseiller, Annick BRAUN, conseiller, et lu par le premier conseiller Serge SCHROEDER en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Jean-Nicolas SCHINTGEN.
s. SCHINTGEN s. SCHROEDER 24