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22/02/2024 | LUXEMBOURG | N°49186C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 22 février 2024, 49186C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 49186C du rôle ECLI:LU:CADM:2024:49186 Inscrit le 18 juillet 2023

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Audience publique du 22 février 2024 Appel formé par Monsieur (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 19 juin 2023 (n° 46152 du rôle) ayant statué sur le recours dirigé par Monsieur (B) et Madame (C) contre une décision du bourgmestre de la commune de Boulaide en matière de permis de construire Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 49186C du rôle

et déposée le 18 juillet 2023 au greffe de la Cour administrative par Maître...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 49186C du rôle ECLI:LU:CADM:2024:49186 Inscrit le 18 juillet 2023

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Audience publique du 22 février 2024 Appel formé par Monsieur (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 19 juin 2023 (n° 46152 du rôle) ayant statué sur le recours dirigé par Monsieur (B) et Madame (C) contre une décision du bourgmestre de la commune de Boulaide en matière de permis de construire Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 49186C du rôle et déposée le 18 juillet 2023 au greffe de la Cour administrative par Maître Trixi LANNERS, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Monsieur (A), demeurant à L-…, dirigée contre le jugement du 19 juin 2023 (n° 46152 du rôle) rendu par le tribunal administratif sur le recours introduit par Monsieur (B) et son épouse, Madame (C), les deux demeurant à L-

…, contre une décision du bourgmestre de la commune de Boulaide du 3 mai 2021, portant le numéro …, autorisant Monsieur (A) à ériger « une dépendance sur une parcelle inscrite au cadastre de la commune Boulaide, section C de (aa), sous le n° 44/200 » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Patrick MULLER, demeurant à Diekirch, du 18 juillet 2023, portant signification de ladite requête à la commune de Boulaide, représentée par son bourgmestre et « pour autant que de besoin » par son collège des bourgmestre et échevins en fonctions, ayant sa maison communale à L-9640 Boulaide, 3, rue de la Mairie et à Monsieur (B) et son épouse, Madame (C), préqualifiés ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Jean-Luc GONNER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre de avocats à Diekirch, déposée le 27 juillet 2023 au greffe de la Cour administrative pour compte de Monsieur (B) et son épouse, Madame (C), préqualifiés ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de la société à responsabilité limitée RODESCH Avocats à la Cour, représentée aux fins de l’instance d’appel par Maître Rachel JAZBINSEK, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre de avocats à Luxembourg, déposée le 31 juillet 2023 au greffe de la Cour administrative pour compte de la commune Boulaide, préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse de Maître Rachel JAZBINSEK, déposé au greffe de la Cour administrative en date du 11 octobre 2023, au nom et pour le compte de la commune de Boulaide, préqualifiée ;

1 Vu le mémoire en réponse de Maître Jean-Luc GONNER, déposé au greffe de la Cour administrative en date du 13 octobre 2023, au nom et pour le compte de Monsieur (B) et de son épouse, Madame (C), préqualifiés ;

Vu le mémoire en réplique de Maître Trixi LANNERS, déposé au greffe de la Cour administrative en date du 8 novembre 2023, au nom et pour le compte de Monsieur (A), préqualifié ;

Vu le mémoire en duplique de Maître Jean-Luc GONNER, déposé au greffe de la Cour administrative en date du 22 novembre 2023, au nom et pour le compte de Monsieur (B) et de son épouse, Madame (C), préqualifiés ;

Vu le mémoire en duplique de Maître Rachel JAZBINSEK, déposé au greffe de la Cour administrative en date du 27 novembre 2023, au nom et pour le compte de la commune de Boulaide, préqualifiée ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;

Vu l’accord des mandataires des parties de voir prendre l’affaire en délibéré sur base des mémoires produits en cause et sans autres formalités ;

Sur le rapport du magistrat rapporteur, l’affaire a été prise en délibéré sans autres formalités à l’audience publique du 16 janvier 2024.

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En date du 2 juillet 2020, le bourgmestre de la commune de Boulaide, ci-après « le bourgmestre », accorda à Monsieur (A) l’autorisation pour « la construction d’un carport » sur sa parcelle inscrite au cadastre de la commune de Boulaide, section C de (aa), sous le numéro 44/200, ci-après « la parcelle ».

A la suite d’une réclamation de Monsieur (B) et de Madame (C), ci-après « les consorts (B-C) », affirmant que le mur auquel la construction sera accolée leur appartiendrait, le bourgmestre ordonna en date du 14 juillet 2020 la fermeture de chantier.

En date du 7 janvier 2021, Monsieur (A) introduisit auprès de l’administration communale de Boulaide, ci-après « la commune », une demande d’autorisation de construire adaptée.

Par courrier de leur mandataire du 1er mars 2021, les consorts (B-C) s’opposèrent à ce projet.

En date du 3 mai 2021, le bourgmestre autorisa Monsieur (A) à ériger sur la parcelle « une dépendance ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 22 juin 2021, inscrite sous le numéro 46152 du rôle, les consorts (B-C) introduisirent un recours en annulation contre l’autorisation de construire, précitée, du 3 mai 2021.

Par requête séparée déposée au greffe du tribunal administratif le 4 août 2021, inscrite sous le numéro 46332 du rôle, ils introduisirent encore une demande tendant à voir prononcer 2 un sursis à exécution de l’autorisation de construire déférée en attendant la solution de leur recours au fond, demande dont ils furent déboutés par ordonnance du 19 août 2021.

Par un jugement du 19 juin 2023, le tribunal administratif reçut en la forme le recours en annulation, au fond, le déclara justifié et annula la décision du bourgmestre n° … du 3 mai 2021. Le tribunal rejeta encore la demande en paiement d’une indemnité de procédure formulée par les consorts (B-C) et condamna la commune au paiement des frais de l’instance.

Pour ce faire, le tribunal rejeta le moyen d’irrecevabilité présenté par la commune et par Monsieur (A) tenant au défaut d’intérêt à agir des consorts (B-C), et, au fond, accueillit le moyen tiré d’un non-respect des reculs latéral et postérieur imposés par l’article 12, point c), de la parte écrite du plan d’aménagement particulier « quartier existant », ci-après « le PAP QE », en retenant en l’occurrence que la question des reculs à respecter devrait être examinée par rapport à la rue (XZ) dans la mesure où la parcelle litigieuse serait le résultat d’un morcellement d’une parcelle longeant cette même rue.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 18 juillet 2023, Monsieur (A) a régulièrement relevé appel de ce jugement 1) Quant à la recevabilité du recours de première instance Arguments des parties L’appelant réitère de prime abord son moyen d’irrecevabilité du recours des consorts (B-C) pour défaut d’intérêt à agir et critique les premiers juges pour ne pas l’avoir accueilli.

Il leur reproche plus particulièrement de s’être basés sur la seule contiguïté des fonds concernés et fait valoir que la vue sur le projet litigieux, qui n'existerait qu'à l'arrière du jardin des consorts (B-C), serait insuffisante pour justifier l’intérêt à agir.

En réalité, les consorts (B-C) ne souffriraient d'aucune aggravation concrète de leur situation de voisins, l’appelant relevant que les premiers juges n’auraient pas expliqué en quoi la simple vue constituerait une telle aggravation.

L’appelant s’empare encore de la motivation de l’ordonnance de référé du 19 août 2021 ayant retenu que la construction litigieuse ne mettait pas en cause la vue des consorts (B-C).

L’appelant fait valoir que les consorts (B-C) n’auraient pas de vue directe sur le carport, alors que (i) leur maison se trouverait à plus de 14 mètres du carport, (ii) leur parcelle se trouverait sur une autre hauteur que la sienne, l’atelier existant étant en plus encore situé plus haut que le carport, (iii) ils auraient planté, à l'arrière de leur jardin, des haies opaques pour se démarquer de la pente, la partie du jardin disposant d’une vue sur le projet litigieux étant alors quasiment inutilisée.

Monsieur (A) conteste ensuite l’existence de bruits et d’odeurs invoqués pour justifier l’intérêt à agir, en se référant à la motivation de l’ordonnance de référé du 19 août 2021.

L’appelant insiste ensuite sur la considération que le carport servirait uniquement à y garer des machines, de sorte à limiter tout au plus des éventuels bruits ou odeurs et de mettre les machines à l'abri.

3 L’appelant fait valoir que même à admettre l’intérêt à agir sur la seule base d’une vue sur le projet litigieux par l'arrière du jardin, il y aurait lieu de procéder à une balance entre les avantages et les inconvénients que présenterait la nouvelle construction, l’appelant réitérant dans ce contexte que la construction du carport permettrait de limiter tout éventuel bruit ou encore des odeurs.

Subsidiairement, l’appelant demande une visite des lieux.

Dans sa réplique, il réitère son renvoi à l’ordonnance présidentielle du 19 août 2021. Il se réfère, par ailleurs, à une expertise immobilière pour conclure que le patrimoine des consorts (B-C) ne subirait aucune dépréciation de valeur du fait de la construction litigieuse. Enfin, il renvoie à des photos des lieux pour conclure à l’absence de préjudice visuel.

La commune de Boulaide rejoint en substance les contestations de l’appelant concernant l’intérêt à agir des consorts (B-C).

Les consorts (B-C) insistent sur leur intérêt à agir en réitérant en substance leurs explications données en première instance.

Appréciation de la Cour La Cour relève de prime abord que les moyens d’appel formulés relativement à la requête introductive de première instance, quoiqu’ayant trait à des questions de recevabilité, relèvent du fond de l’appel1.

La Cour constate, à l’instar des premiers juges, que les consorts (B-C) sont les voisins directs de la parcelle devant accueillir le projet litigieux et qu’il ressort à suffisance des pièces soumises à son appréciation, sans qu’il n’y ait lieu de procéder à une visite des lieux telle que sollicitée par l’appelant, et notamment des photos versées aux débats qu’ils ont une vue sur le projet litigieux, même si ce n’est qu’à l’arrière de leur jardin, de sorte à disposer d’un intérêt à agir en raison de la contiguïté des fonds concernés. S’il est certes vrai que la nouvelle construction n’est pas plus élevée que le hangar existant et que, par ailleurs, l’appelant tend à voir mettre en balance les avantages apportés par la nouvelle construction par rapport à ses inconvénients, il n’en reste toutefois pas moins que les consorts (B-C) critiquent en l’occurrence l’implantation du hangar par rapport à leur propre terrain. Sous cet aspect, ils ont un intérêt à voir contrôler la légalité d’une décision du bourgmestre autorisant la construction d’un carport qui, selon eux, serait implanté en violation de la réglementation urbanistique applicable.

Le moyen afférent est dès lors rejeté.

1 Cour adm. 11 mai 2006, n° 20937C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 1164.

4 2) Quant aux reculs à respecter Arguments des parties L’appelant, rejoint sur ce point par la commune, est d’avis que ce serait à tort que les premiers juges ont retenu un non-respect des reculs à respecter et ont de ce fait annulé l’autorisation litigieuse.

Si l’appelant est d’accord pour retenir, à l’instar des premiers juges, que les dispositions du PAP QE « espace villageois » s’appliquent et que la parcelle litigieuse serait à analyser de façon séparée par rapport à celle accueillant sa maison d’habitation dans la mesure où ni le hangar ni le carport ne seraient à considérer comme des accessoires de cette maison, il s’oppose toutefois à l’analyse des premiers juges ayant retenu que la question des reculs à respecter devra être examinée par rapport à la rue (XZ). Ce serait dès lors à tort que les premiers juges avaient retenu que le carport aurait été autorisé dans le recul postérieur du hangar. Il faudrait, au contraire, examiner la question du recul par rapport à la rue (VW), dans la mesure où une telle analyse permettrait une implantation beaucoup plus harmonieuse des constructions. Il donne à considérer que la parcelle numéro 44/200 serait enclavée et que le seul accès à la voie publique passerait par la parcelle numéro 391/111 lui appartenant et longeant la rue (VW), la rue (XZ) se trouvant dans la direction complètement opposée et étant située beaucoup plus loin de la parcelle litigieuse que la rue (VW).

Tout en rappelant les pouvoirs et devoirs de contrôle du juge administratif dans le cadre d’un recours en annulation, par référence à un arrêt de la Cour du 12 janvier 2021, numéro 44684C du rôle, l’appelant fait valoir que le juge administratif devrait examiner si la mesure prise se justifie dans le contexte précis dans lequel elle a été prise. En considération du contexte précis et des éléments objectifs en l’espèce, tels que la proximité de la parcelle vers la rue (VW) et « l’utilité » de la parcelle, il serait plus logique et conforme à l’objectif d’harmonie des constructions d’apprécier la situation par rapport à la rue (VW).

Dans ce contexte, l’appelant estime qu’au moins à titre subsidiaire, il est utile d’ordonner une visite des lieux.

De l’ensemble de ces considérations, l’appelant conclut que le carport aurait été autorisé dans le recul antérieur du hangar, tout en rappelant que le carport serait à qualifier de dépendance et qu’aucune disposition de la partie écrite du PAP QE ne permettrait de refuser l’aménagement d’un carport dans le recul antérieur du hangar.

Il fait valoir que pour un carport, le recul serait à mesurer « par rapport à l’élément le plus proche de la limite du lot ou de la parcelle », tout en soulignant que l’article 12, point g), du PAP QE exigerait uniquement un recul de 1,50 m par rapport à la voie publique, qui serait respecté.

L’appelant fait encore valoir que l’article 30 du PAP QE, intitulé « disposition des constructions principales », auquel les premiers juges se sont référés, ne serait pas applicable, puisque la construction litigieuse ne répondrait pas à la définition afférente.

Par ailleurs, contrairement à ce qui avait été retenu par les premiers juges, l’article 17 du PAP QE, intitulé « dispositions dérogatoires », et invoqué par la commune en première 5 instance, ne comporterait aucune erreur matérielle. Comme l’erreur matérielle serait définie comme étant celle n’ayant aucune incidence sur le fond voire la substance d’un texte et comme les articles 11 et 12 du PAP QE viseraient des situations complètement différentes, il ne pourrait pas être question d’une éventuelle erreur matérielle du fait que l’article 17 renvoie à l’article 11 du PAP QE. Dès lors, l’article 17 du PAP QE viserait uniquement l’article 11 et non par l’article 12 du PAP QE.

Pour le surplus, l’appelant prend position par rapport aux autres moyens invoqués par les consorts (B-C) à l’appui de leur recours, qui n’ont pas été examinés par les premiers juges.

Dans sa réponse, la commune estime à son tour que les premiers juges ont commis une erreur d’interprétation en analysant la situation par rapport à la rue (XZ), vers laquelle la parcelle litigieuse ne disposerait toutefois pas d’accès. Or, il ne serait pas pertinent d'analyser la situation urbanistique par rapport à une voie non accessible.

Elle fait encore valoir que la situation urbanistique ne pourrait pas être analysée sans égard à la construction principale de l'appelant, qui elle serait reliée à la rue (VW), tout en soulignant que l’examen de la situation par rapport à cette rue n'impliquerait pas une implantation désharmonieuse.

A défaut de définition de la notion de recul antérieur, latéral et postérieur dans le PAP QE ou dans une autre disposition, les articles 12 et 14 du PAP QE permettraient d’appuyer sa position selon laquelle le recul devrait être défini par rapport à la voie publique desservante, partant par rapport à la rue (VW).

La commune donne encore à considérer que l'article 12, point c), du PAP QE pris en compte par le tribunal s'appliquerait aux dépendances situées à l'arrière des constructions. Or, le carport serait accolé au hangar, qui serait à qualifier de construction principale, sinon de construction existante. Si le carport se trouvait certes derrière la maison principale, il n’en resterait pas moins qu’il s'agirait de deux parcelles différentes, de sorte qu'on ne pourrait pas analyser la situation sous cet angle vue. L'article 12, point c), du PAP QE ne trouverait dès lors pas application.

La commune insiste ensuite sur la considération qu’il s’agirait d’un carport, qui disposerait de sa propre réglementation, à savoir le point g) de l’article 12 du PAP QE, imposant uniquement un recul minimum de 1,50 m par rapport à la voirie.

Elle demande dès lors la réformation du jugement au motif que la situation aurait de façon erronée été analysée par rapport à la rue (XZ) et sur base de l’article 12, point c), du PAP QE, alors qu'il aurait fallu appliquer l'article 12, point g), du PAP QE.

Les consorts (B-C), pour leur part, demandent la confirmation du jugement attaqué.

Ils donnent à considérer que leur propre parcelle et celle de l’appelant portant le numéro 33/111 seraient référencées au cadastre comme étant situées au lieu-dit « rue (VW) », tandis que la parcelle sur laquelle se trouve le carport, accolé à la construction existante, serait inscrite au cadastre sous le numéro 44/200 au lieu-dit « rue (XZ) ». L’autorisation de construire visant le carport préciserait la même indication cadastrale. Les mêmes indications seraient encore à retrouver sur le site geoportail, qui mentionnerait comme genre d’occupation du hangar « garage », de sorte que le carport serait bien situé dans le recul postérieur de celui-ci.

6 Les intimés précisent qu’à l'époque, le hangar aurait été construit à l’arrière de l'ancienne propriété actuellement scindée en deux. De ce fait, le hangar aurait été construit à l’arrière de cette parcelle.

Après avoir cité l'article 30 du PAP QE, ils font valoir que tant le hangar existant que le carport seraient à considérer comme une dépendance au sens du PAP QE et renvoient, pour le surplus, à l'article 12, point c), du PAP QE, tout en affirmant qu’aucun de ces reculs n’aurait été respecté.

Les consorts (B-C) poursuivent que peu importe qu’on prenne comme point de référence la rue (VW) ou la rue (XZ), en toute hypothèse, l'article 12 du PAP QE devrait être respecté, eu égard au renvoi à cette disposition par l’article 30 du PAP QE.

Ils donnent encore à considérer que l’article 17 du PAP QE ne pourrait faire référence qu’à l'article 12 et non pas à l'article 11 du PAP QE, tel qu’énoncé erronément dans le PAP QE, puisque l'article 11 se référerait aux aménagements des espaces libres.

Pour le surplus, ils prennent position par rapport aux autres moyens d'annulation soulevés par eux.

Dans sa réplique, l'appelant rappelle que, le hangar et le carport se trouvant sur une parcelle séparée, ils ne pourraient pas être considérés comme des accessoires de sa maison d'habitation, de sorte que la parcelle numéro 44/200 devrait être analysée de façon individuelle.

Il maintient qu'il serait inconcevable d’analyser une situation urbanistique par rapport à une voie non accessible. La parcelle litigieuse aurait au contraire un accès à une rue, à savoir la rue (VW), l’appelant soulignant que le recul devrait être défini par rapport à la voie publique desservante.

Pour le surplus, il réitère ses reproches à l’égard du tribunal pour avoir appliqué l'article 12, point c), du PAP QE et maintient qu'il conviendrait de se référer au seul article 12, point g), du PAP QE, tout en rappelant l'interprétation restrictive qu'il conviendrait de donner à la réglementation urbanistique. Sur base de cette considération, l'article 30 du PAP QE ne serait pas applicable puisque ni le hangar ni le carport n'entreraient dans le champ d’application de celui-ci pour ne pas correspondre à une construction principale, l’appelant soulignant que les consorts (B-C) qualifieraient eux-mêmes le carport de dépendance.

Il poursuit que si le hangar était considéré comme une construction principale, dans cette hypothèse l'article 12, point a), du PAP QE trouverait application et le carport constituerait alors une dépendance accolée à une construction principale pour lequel aucun recul latéral ne serait imposé.

Dans leurs dupliques respectives, les consorts (B-C) et la commune reprennent en substance leurs contestations.

La commune insiste en l’occurrence sur la considération que l’article 12, point g), du PAP QE serait à appliquer de façon autonome s’il s’agit d’un carport, au motif que l’article 12 du PAP QE envisagerait des situations différentes à chaque alinéa qui ne pourraient être appliquées de façon cumulative.

7 Analyse de la Cour En ce qui concerne de prime abord la situation factuelle de l’espèce, la Cour constate que le carport litigieux est situé sur une parcelle qui se trouve enclavée entre, d’une part, la parcelle numéro 33/111, appartenant à Monsieur (A) et sur laquelle est située la maison d’habitation de celui-ci, et la parcelle numéro 33/222, appartenant aux consorts (B-C), ces deux parcelles étant situées le long de la rue (VW), et, d’autre part, une parcelle portant le numéro 44/201 et une parcelle numéro 22/555, appartenant à des tiers et situées le long de la rue (XZ).

Il ressort par ailleurs des explications concordantes des parties à l'instance qu'à l'époque le hangar avait été construit à l'arrière de l'ancienne propriété donnant sur la rue (XZ), actuellement scindée en deux, à savoir les parcelles portant les numéros cadastraux 44/200 et 44/201, mais ayant à l’époque appartenu au même propriétaire, le hangar ayant été construit en seconde ligne par rapport à la construction se trouvant sur la parcelle numéro 44/201.

La Cour constate encore, tel que cela se dégage des croquis faisant partie de l’autorisation litigieuse, que le carport est implanté directement à la limite postérieure de la propriété des consorts (B-C) et emprunte un mur en forme de L par rapport auquel les consorts (B-C) et l’appelant sont en litige quant à la question de savoir s’il est situé en limite de propriété ou s’il a été implanté sur le terrain des consorts (B-C). En tout cas, selon le croquis faisant partie de l’autorisation de construire, une distance de 601 cm est indiquée, sur l’un des angles du hangar, entre le hangar et la limite de la propriété, tandis que selon le croquis intitulé « plan car-port », le carport a une largeur de 6015 mm, de sorte qu’il y a lieu d’admettre que, indépendamment de la question du tracé exact de la limite de propriété par rapport au mur de soutènement qui divise les parties, question qui n’est pas de la compétence des juridictions administratives, selon les propres plans de l’appelant, le carport ne respectera aucun recul par rapport à la propriété des consorts (B-C), du moins sur un de ses angles.

Il est encore constant que la parcelle sur laquelle a été autorisé le carport litigieux est située dans le secteur « espace villageois », de sorte que les dispositions du titre IV du PAP QE, intitulé « règles spécifiques applicables au plan d'aménagement particulier « quartier existant - espace villageois », trouvent application en l'espèce, à côté des dispositions du titre II du PAP QE, intitulé « règles applicables à tout PAP QE ».

L’article 28 du PAP QE, intitulé « type de constructions », dispose en son point a) que « Les quartiers existants « espace villageois » sont réservés aux bâtiments isolés, jumelés ou érigés en ordre contigu ainsi qu’aux constructions, installations, aménagements et espaces libres qui leur sont complémentaires ».

C’est à tort que la commune fait plaider que l’article 30 du PAG QE, intitulé « disposition des constructions principales », ne serait pas pertinent en l’espèce.

Aux termes de cette disposition :

« a. Les prescriptions qui suivent sont applicables sans préjudice des dispositions relatives au patrimoine bâti.

8 b. Implantation Les constructions en seconde position sont interdites à l’exception des dépendances telles qu’admises à l’art. 12 et des constructions agricoles telles qu’admises à l’art. 33.

Cette interdiction vaut également pour les situations de mise en deuxième ligne d’une construction existante par l’implantation en première ligne d’une nouvelle construction.

c. Alignement L’alignement des façades antérieures est à fixer en référence à l’implantation des bâtiments voisins :

▪ Soit dans le prolongement du front de bâtisse des bâtiments adjacents avec une tolérance de 1 m en plus ou en moins, ▪ Soit de façon à établir la liaison entre deux fronts de bâtisses décalés.

d. Reculs sur limites de propriété Recul antérieur :

A défaut d’un alignement de référence tel que défini par les bâtiments voisins, les reculs de toute nouvelle construction par rapport à l’alignement de la voirie est de 2m au minimum et de 6m au maximum.

Les parties de la construction comprenant un accès carrossable auront un recul minimum par rapport à l’alignement de la voirie de 6m.

Recul latéral :

Sans préjudice de l’art. 28.a, le recul de toute nouvelle construction par rapport à la la limite latérale de propriété peut être soit nul, soit égal ou supérieur à 3m.

Pour toute nouvelle construction principale projetée sur la limite latérale d’un terrain non construit un accord notarié du voisin concerné est obligatoire.

Cependant, l’implantation d’une construction principale sur la limite latérale pourra se faire sans accord notarié du voisin si une construction principale existante sur le terrain adjacent n’accuse aucun recul sur ladite limite latérale et lorsque la construction projetée peut être adossée au pignon de la construction existante.

Si une construction existante sur le terrain adjacent accuse un recul sur la limite latérale, la construction projetée respectera un recul latéral égal ou supérieur à 3m.

Recul postérieur :

Le recul de toute nouvelle construction par rapport à la limite postérieure de propriété doit être égal ou supérieur à 10 m.

9 Dérogations Le bourgmestre peut accepter des dérogations aux présentes dispositions :

▪ afin de garantir l’isolation thermique des constructions existantes (cf. art. 5), ▪ si la dérogation s’avère indispensable pour améliorer la qualité urbanistique du projet et sous conditions que le volume maximal constructible ne soit pas augmenté, ▪ pour tous travaux de transformations ou de rénovations portant sur un bâtiment existant non-conforme aux reculs prescrits, Toute demande de dérogation est à accompagner d’une justification. Une présentation 3D et une étude d’ombrage pourront être exigées. ».

Si cette disposition détermine certes les reculs et l’alignement à respecter par une construction principale, alors que les parties s’accordent pour retenir que le carport litigieux ne saurait être qualifié de construction principale, c’est le point b) de cette disposition qui est, contrairement à ce qui est avancé par l’appelant et la commune, pertinent en l’espèce, en ce qu’il pose comme principe l’interdiction des constructions en seconde position, sauf s'il s'agit d'une dépendance au sens de l'article 12 du PAP QE, respectivement d'une construction agricole au sens de l'article 33 du PAP QE.

Dès lors, par principe dans le secteur concerné aucune construction ne pourra être érigée en seconde position et ce n’est que par exception qu’à côté des constructions agricoles, hypothèse non alléguée en l’espèce, seules des dépendances pourront être érigées en seconde position. C’est aussi sous cet aspect que le principe d’interprétation restrictive des dispositions urbanistiques, invoqué par l’appelant et la commune, doit être appliqué en l’espèce, le principe pour une implantation en seconde position étant l’interdiction.

La Cour relève ensuite que selon l'annexe II du PAG, intitulée « définitions », la dépendance est définie comme suit : « On entend par dépendance tout volume accolé ou isolé, ni destiné au séjour prolongé de personnes, ni destiné à une activité professionnelle, comme notamment les abris de jardin, les garages et les car-ports. ».

Une lecture combinée du point a) de l’article 28, précité, du PAP QE et de l’article 30 du PAP QE mène encore au constat que la dépendance s’entend par opposition à la construction principale dont elle est complémentaire.

En l’espèce, la Cour retient de prime abord que peu importe que l’implantation du hangar, en tant que construction existante, et celle du carport litigieux est appréciée par rapport à la rue (VW) ou par rapport à la rue (XZ), et indépendamment de toute autre considération, au regard de leur situation par rapport aux constructions principales de la rue (VW) et de la rue (XZ), telle qu’elle se dégage des extraits cadastraux à la disposition de la Cour, ces deux constructions constituent en tout état de cause des constructions en seconde position.

Il s'ensuit que la construction du carport litigieux n'est autorisable que dans les limites tracées par l'article 12 du PAP QE auxquelles l'article 30, point b), du PAP QE renvoie.

10 Un second constat s’impose, à savoir celui que le hangar existant, peu importe sous quelle réglementation il a été érigé et peu importe sa légalité - question dont n’est pas saisie la Cour -, ne saurait actuellement être qualifié de construction principale par rapport à laquelle les reculs tels qu’énoncés à l’article 12 du PAP QE sont à examiner, de sorte que les développements des parties sur la question de savoir si le carport se situe dans le recul antérieur ou postérieur du hangar, voire y est accolé, et des conséquences à en déduire, ne sont pas pertinents.

L'article 12 PAP QE, intitulé « dépendances », est libellé comme suit :

« a. Pour les dépendances accolées à la construction principale, pour autant que les reculs réglementaires sur les limites de propriété soient respectés, la profondeur cumulée est limitée à 16m.

b. La construction de dépendances est admise dans l’un des deux reculs latéraux réglementaires moyennant un accord notarié entre voisins concernés.

c. Les dépendances situées à l’arrière des constructions respecteront une distance minimale de 3m par rapport au nu de la façade de la construction principale, ils sont en plus soumis aux prescriptions suivantes :

▪ les dépendances d’une surface au sol inférieure à 16m2 sont autorisées dans les reculs latéraux et postérieurs sous conditions de respecter un recul minimum de 1,00m par rapport aux limites latérales et postérieures. Ce recul peut être réduit voire nul sous réserve d’un accord notarié entre voisins.

▪ Les dépendances d’une surface supérieure à 16m2 sont autorisées à l’arrière des constructions dans le recul postérieur sous condition de respecter un recul minimum de 5m par rapport à la limite postérieure. Le recul latéral de 3m est à respecter.

(…) 11 g. Les car-ports auront un recul minimum par rapport à l’alignement de la voirie de 1,50m sans préjudice des conditions fixées dans le cadre de la permission de voirie. (…) ».

La Cour relève de prime abord que, contrairement à ce qui est soutenu par la commune et par l'appelant, l’article 12 du PAP QE n’est pas à interpréter en ce sens que son point g) serait la seule disposition applicable à la construction d'un carport. Il faut, au contraire, lire l'article 12 du PAP QE en ce sens que ses dispositions s'appliquent de manière générale aux dépendances, parmi lesquelles figurent, entre autres, les carports, et que le point g) impose une exigence additionnelle pour ce type de constructions, qui doit dès lors respecter, à côté notamment des reculs énoncés aux points a) à c), un recul minimum de 1,50m par rapport à l'alignement de la voirie.

La Cour constate ensuite que les points a) à c) de l’article 12 du PAP QE envisagent différentes hypothèses d'implantation d’une dépendance, à savoir (i) la situation où elle est accolée à la construction principale (point a), (ii) celle où elle est située dans l'un des deux reculs latéraux, tel qu’ils se dégagent du croquis représenté sous le point b), et (iii) celle où elle est située à l'arrière de la construction principale (point c)). La Cour constate encore que le croquis prémentionné représente l’ensemble des cas de figure susceptibles de se présenter en ce qu’il mentionne (i) une dépendance située derrière la construction principale, (ii) une dépendance accolée et (iii) définit les zones à l’intérieur desquelles une dépendance peut être érigée dans les reculs latéraux avec l’accord du voisin, tout en indiquant les différents reculs latéraux et postérieurs à respecter, de sorte qu’il y a lieu d’admettre que ce croquis, encore qu’il est représenté sous le point b), de l’article 12, est à interpréter de façon plus globale de nature à représenter graphiquement l’ensemble des cas de figure pouvant se présenter, encore que la Cour se doit de constater une incohérence au niveau des reculs latéraux indiqués, en ce que la légende mentionne un recul « r » de 1,90m, tandis le point c) de l’article 12 mentionne un recul latéral de 1m pour les dépendances d’une surface au sol inférieure à 16m2 et de 3m pour une dépendance d’une surface supérieure à 16m2.

La Cour est amenée à retenir qu’il se dégage de l’économie générale des dispositions de l’article 12 du PAP QE, illustrées par le croquis prémentionné, que peu importe la situation d’une dépendance, en tout état de cause elle ne saurait être implantée, sauf accord exprès du voisin dans l’hypothèse d’une implantation dans le recul latéral tel que représenté sur le croquis prémentionné, sans respect d’un quelconque recul par rapport à la propriété voisine.

Or, tel est justement le cas en l’espèce, dans la mesure où, tel que cela a été relevé ci-avant, il se dégage du croquis faisant partie de l’autorisation de construire litigieuse que le carport est implanté immédiatement le long de la propriété des consorts (B-C), sans respecter un quelconque recul, aucun tel recul n’étant visible ni représenté sur le croquis afférent.

L’autorisation litigieuse est dès lors à annuler sur base de ce seul constat.

En outre, la Cour relève que pour une dépendance d’une surface supérieure à 16m2, tel que cela est de façon non contestée le cas en l’espèce, située « à l’arrière des constructions », un recul latéral de 3m est en tout état de cause à respecter, étant relevé que le carport litigieux est situé « à l’arrière » de la maison d’habitation de l’appelant, encore que sa propriété adopte une forme particulière, en forme de L, et que le carport n’est pas située immédiatement à l’arrière de sa maison, mais se trouve de facto plutôt derrière la maison des consorts (B-C).

12 En l’espèce, au regard de la configuration particulière des lieux, la propriété de l’appelant ayant la forme d’un L, la Cour est amenée à retenir que le recul latéral à respecter en application du deuxième tiret du point c) de l’article 12 du PAP QE est à situer sur la partie de la propriété de l’appelant longeant la propriété arrière du terrain des consorts (B-C).

Le constat s’impose dès lors que l’autorisation litigieuse a été émise en violation du recul latéral se dégageant du deuxième tiret du point c) de l’article 12 du PAP QE, de sorte que les premiers juges ont à juste titre annulé l’autorisation attaquée, encore que partiellement pour d’autres motifs, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner les autres motifs d’annulation invoqués par les consorts (B-C), cet examen devenant surabondant.

A admettre que la commune ait entendu maintenir son moyen de défense invoqué en première instance fondé sur les articles 14 du PAP QE visant les angles de rue, et 17, point c) du PAP QE visant la construction de dépendance en relation avec des « bâtiments ou parties de bâtiments existant situés sur la même parcelle/les mêmes parcelles et appartenant au même propriétaire ne sont pas conformes aux dispositions » du PAP QE, c’est pour de justes motifs que la Cour adopte, que les premiers juges ont conclu que cette disposition ne trouve pas application en l’espèce.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel est à rejeter comme non fondé et le jugement du 19 juin 2023 à confirmer.

Eu égard à l’issue du litige, la demande en paiement d’une indemnité de procédure de 3.500.-€ réclamée par l’appelant sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives est à rejeter.

Les demandes en paiement d’une indemnité de procédure de 3.500.-€ formulées sur base du même fondement par les consorts (B-C) pour chaque instance sont également à rejeter en ce qu’il n’est pas justifié à suffisance en quoi il serait inéquitable de laisser à leur unique charge les frais non compris dans les dépens.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit l’appel en la forme ;

au fond, le dit non fondé, partant en déboute l’appelant et confirme le jugement du 19 juin 2023 ;

rejette comme non justifiées les demandes respectives en allocation d’une indemnité de procédure formulées par l’appelant et par les consorts (B-C) ;

condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.

13 Ainsi délibéré et jugé par :

Henri CAMPILL, vice-président, Martine GILLARDIN, conseiller, Annick BRAUN, conseiller, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier ….

s. … s. CAMPILL Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 23 février 2024 Le greffier de la Cour administrative 14


Synthèse
Numéro d'arrêt : 49186C
Date de la décision : 22/02/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/02/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2024-02-22;49186c ?

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