La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2023 | LUXEMBOURG | N°75/23

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 15 juin 2023, 75/23


N° 75 / 2023 du 15 juin 2023 Numéro CAS-2022-00109 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, quinze juin deux mille vingt-trois.

Composition:

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Caroline ENGEL, conseiller à la Cour d’appel, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à B-ADRESSE1.), demanderesse en cassation, comparant par Maître Den

is PHILIPPE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et la société...

N° 75 / 2023 du 15 juin 2023 Numéro CAS-2022-00109 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, quinze juin deux mille vingt-trois.

Composition:

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Marie-Laure MEYER, conseiller à la Cour de cassation, Caroline ENGEL, conseiller à la Cour d’appel, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à B-ADRESSE1.), demanderesse en cassation, comparant par Maître Denis PHILIPPE, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et la société anonyme SOCIETE1.), établie et ayant son siège social à L-

ADRESSE2.), représentée par le conseil d’administration, inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro NUMERO1.), défenderesse en cassation, comparant par Maître Thierry REISCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 60/22 - VII - CIV, rendu le 23 mars 2022 sous le numéro CAL-2021-00566 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, septième chambre, siégeant en matière civile ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 28 octobre 2022 par PERSONNE1.) à la société anonyme SOCIETE1.), déposé le 31 octobre 2022 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Ecartant le mémoire en réponse déposé le 27 décembre 2022 au greffe de la Cour par la société SOCIETE1.) pour ne pas avoir été signifié conformément à l’article 16 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation ;

Sur les conclusions du premier avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière civile, avait rejeté les demandes de PERSONNE1.) en indemnisation et en communication des documents relatifs aux opérations effectuées sur les comptes bancaires ouverts aux noms des époux GROUPE1.) et l’avait condamnée au paiement d’une indemnité de procédure. La Cour d’appel a confirmé le jugement, sauf à augmenter le montant de l’indemnité de procédure.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l'article 1315 du Code civil qui énonce que :

fait qui a produit l’extinction de son obligation. » ;

En ce que l'arrêt attaqué a décidé que il ne saurait être fait droit à la demande de la dame PERSONNE1.) de voir la banque SOCIETE1.) lui communiquer les pièces et documents bancaires relatifs aux comptes de ses parents en raison de son droit d'accès à ces documents en sa qualité d'héritière de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.) continuant la personnalité de ces derniers (point 2/ de l'arrêt) ;

Aux motifs que la banque SOCIETE1.) aurait déjà exécuté cette obligation puisqu'elle aurait nécessairement remis ces documents à ses parents au fil de leur relation contractuelle et que la dame PERSONNE1.) ne rapporte pas la preuve que la banque SOCIETE1.) n'aurait pas déjà exécuté cette obligation ;

2 Alors que ce faisant la Cour d'appel pose comme prémisse que la banque aurait nécessairement exécuté cette obligation, sans que la banque n'ait besoin de le prouver au préalable, et exige de la dame PERSONNE1.) de rapporter la preuve de l'inexécution de cette obligation ce qui opère un changement illégal de la charge de la preuve et exige également que la dame PERSONNE1.) rapporte une preuve négative et donc impossible ;

De sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Appel a violé le texte susvisé. ».

Réponse de la Cour Sous le couvert du grief tiré de la violation de l’article 1315 du Code civil, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de l’ensemble des éléments du dossier qui les ont amenés à retenir que la défenderesse en cassation avait rempli ses obligations contractuelles à l’égard des titulaires des comptes, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Sur le moyen pris de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l’article 1993 du Code civil, des articles 660 e.s. NCPC et de l’article 1315 du Code civil ;

En ce que l’arrêt attaqué décide que la banque a satisfait à ses obligations contractuelles de dépositaire, Alors que le dépositaire est investi d’une obligation de reddition de comptes et que la demanderesse ne rapporte aucunement la preuve de ce qu’elle a rempli cette obligation alors que la preuve lui incombe ;

En sorte que l’arrêt viole les dispositions précitées ».

Réponse de la Cour Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou un élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.

Le moyen articule, d’une part, la violation de l’article 1993 du Code civil qui traite de l’obligation du mandataire de rendre compte de sa gestion, d’autre part, la violation de l’article 660 du Nouveau Code de procédure civile qui régit la compétence juridictionnelle pour les redditions de comptes des comptables et des 3tuteurs et, enfin, la violation de l’article 1315 du Code civil relatif à la charge de la preuve, partant plusieurs cas d’ouverture distincts.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

Sur le troisième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l'article 288 du Nouveau Code de Procédure Civile (ci-après NCPC), en ce que l'arrêt attaqué a décidé que la demande de la dame PERSONNE1.) basée sur l'article 288 du NCPC est à rejeter (point 2/ de l'arrêt), aux motifs que cette procédure ne s'applique conformément à l'article 284 NCPC auquel renvoie l'article 288 NCPC qu'à un document , respectivement à , conditions qui ne sont pas remplies s’agissant des documents dont PERSONNE1.) demande la délivrance, alors que ce faisant la Cour d'appel a rajouté à l'article 288 NCPC une condition qu'il n'énonce pas, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Appel a violé le texte susvisé. ».

Réponse de la Cour Il est fait grief aux juges d’appel d’avoir violé la loi en ajoutant une condition à l’article 288 du Nouveau Code de procédure civile.

En retenant « Pour autant qu’il faille admettre que la demande de PERSONNE1.) est aussi basée sur l’article 288 du Nouveau Code de Procédure Civile, invoqué en première instance, elle doit être rejetée dans la mesure où cette procédure ne s’applique conformément à l’article 284 auquel renvoie l’article 288 qu’à un document « auquel elle n’a pas été partie », respectivement à « une pièce détenue par un tiers », conditions qui ne sont pas remplies dans le chef des documents dont PERSONNE1.) demande la délivrance.

La demande serait encore à rejeter au fond dans le cadre de cette base additionnelle en raison de son caractère absolument vague et général. Une demande de communication de pièces ne peut se borner à exiger la communication tous azimut d’un ensemble de documents non spécifiés, mais doit porter sur des documents bien déterminés dont il doit au surplus être établi que leur communication est pertinente pour la solution du litige.

4 A l’égard de ce dernier point, la Cour constate enfin que PERSONNE1.) reste en défaut d’avancer le moindre argument plausible ou le moindre élément de preuve ou même d’appréciation qui tendrait à démontrer ou à indiquer que la société SOCIETE1.) n’aurait pas, contrairement à ses indications et ses affirmations itératives, transmis en date du 24 novembre 2009 tous les avoirs ayant appartenu à PERSONNE2.) et à PERSONNE3.) à PERSONNE1.). », les juges d’appel ont motivé le rejet de la demande, outre sur le motif critiqué au moyen, sur d’autres motifs pertinents qui constituent le soutien nécessaire à leur décision.

Le motif critiqué étant surabondant, il est inopérant.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

Sur le quatrième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 62 et 65 alinéa 3 du Nouveau Code de Procédure civile, ainsi que du principe du contradictoire ;

en ce que l'arrêt attaqué, a décidé que la banque SOCIETE1.) n'avait pas commis de faute en ne bloquant pas les comptes des époux GROUPE1.) au décès de PERSONNE3.), la cour considérant que la preuve de cette obligation de blocage telle qu’elle existe en droit successoral belge, n’était pas rapportée ;

aux motifs que, même si la Cour peut admettre qu'en raison de la nationalité et du dernier lieu de résidence de PERSONNE3.) la succession mobilière de celle-ci ait été soumise au droit belge, elle considère que la preuve de l'obligation de blocage des comptes que la SOCIETE1.) aurait dû respecter en vertu du droit successoral belge, n'est pas présente (point 3b/ de l'arrêt), alors que ce faisant la Cour d'appel a simplement constaté que le contenu du droit belge n'avait pas été établi, et a donc écarté son application, sans pour autant inviter les parties à prendre position sur cette question qui n'avait été débattue à aucun moment dans les conclusions respectives de chaque partie, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Appel a violé les textes et le principe susvisés. ».

Réponse de la Cour La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé les articles 62 et 65, alinéa 3, du Nouveau Code de procédure civile.

5La demanderesse en cassation, tout en constatant que l’article 62 du Nouveau Code de procédure civile constitue une simple faculté pour le juge, n’en tire aucune conséquence en droit.

Il s’ensuit que, sous ce rapport, le moyen est irrecevable.

En retenant « Pour asseoir son allégation de faute à charge de la société SOCIETE1.) pour avoir effectué des opérations de banque postérieurement au décès de PERSONNE3.), alors que tous les comptes auraient dû être bloqués, PERSONNE1.) se prévaut de ce que pareil blocage aurait obligatoirement dû intervenir en vertu du droit belge successoral applicable.», les juges d’appel n’ont pas soulevé d’office l’applicabilité du droit belge et n’ont partant pas violé le principe du contradictoire.

Il s’ensuit que, sous ce rapport, le moyen n’est pas fondé.

Sur le cinquième moyen de cassation Enoncé du moyen « tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l'article 922 du Code civil et de l’article 1135-1 du Code civil.

Première branche Sur la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l’article 922 du Code civil En ce que l’arrêt attaqué écarte la demande de production des pièces Aux motifs que la demanderesse base son droit d’accès sur sa qualité d’héritière de M. PERSONNE2.) et Mme PERSONNE3.) continuant la personnalité de ces derniers ; or, l’ensemble des documents leur a été remis en telle sorte que la défenderesse ne saurait être contrainte d’exécuter deux fois la même obligation.

Alors que lorsque les héritiers agissent en se prévalant un droit propre, notamment le droit à la protection du patrimoine successoral, ils sont à considérer comme des tiers Que l’action est basée, comme indiqué dans les conclusions et l’arrêt, sur un droit propre de l’héritier réservataire, à savoir le droit de connaître l’assiette précise du patrimoine du de cujus, affecté par un recel successoral ; que c’est précisément pour faire valoir ses droits contre le patrimoine spolié que la demanderesse introduit cette action ;

6Qu’elle agit alors en qualité de tiers En sorte que l’arrêt attaqué a violé l’article 922 du Code civil. ».

Seconde branche Sur la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 922 et suivants et 1135-1 du Code civil.

En ce que l’arrêt rejette l’action ;

Aux motifs les conditions générales de la banque étaient opposables à la demanderesse et que la demanderesse n’avait émis aucune réclamation à dater de la disponibilité de celles-ci ;

Alors que la demanderesse n’a jamais eu connaissance de ces conditions générales, et en tant que titulaire d’un droit propre, n’a pas adhéré à ces conditions générales qui ne peuvent donc lui être opposées ;

Que l’arrêt attaqué viole ainsi les dispositions précitées ; ».

Réponse de la Cour Sur les deux branches du moyen réunies Il ne résulte pas des actes de procédure auxquels la Cour peut avoir égard que la demanderesse en cassation ait invoqué devant les juges d’appel, à l’appui de sa demande en communication de pièces, les articles 922 et 1135-1 du Code civil ni qu’elle ait fait valoir qu’elle se prévalait d’un droit propre et agissait en tant que tiers.

Le moyen est dès lors nouveau et, en ce qu’il comporterait un examen des circonstances de fait, mélangé de fait et de droit.

Il s’ensuit que le moyen, pris en ses deux branches, est irrecevable.

Sur le sixième moyen de cassation Enoncé du moyen « Sur le moyen pris de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 1110 et 1131 du Code civil.

Première branche En ce que l’arrêt attaqué rejette l’action dirigée contre la défenderesse en sa qualité de dépositaire ;

7Aux motifs que nécessairement reconnu le respect par la Banque de son obligation de restitution en tant que dépositaire » ;

Alors qu’une décharge ne peut s’étendre aux faits ignorés par son auteur ;

Que l’arrêt viole ainsi les dispositions précitées.

Seconde branche En ce que l’arrêt invoque les conditions générales de la banque et l’absence de réclamation à dater de la disponibilité de celles-ci ;

Alors que la requérante ne pouvait protester si elle ignorait l’existence de malversations et les conditions générales ne lui sont pas opposables ;

En sorte que l’arrêt viole les dispositions précitées. ».

Réponse de la Cour Sur les deux branches du moyen réunies Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.

Le moyen articule, d’une part, la violation de l’article 1110 du Code civil relatif à l’erreur sur la substance même de la chose qui en est l’objet, et, d’autre part, la violation de l’article 1131 du Code civil relatif respectivement à l’absence de cause, la fausse cause ou la cause illicite, partant deux cas d’ouverture distincts.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

Sur le septième moyen de cassation Enoncé du moyen « Sur le moyen pris de la dénaturation des actes et de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles, 284 et 288 du NCPC, de l’article 1315 du Code civil et de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Première branche Sur la violation des dispositions précitées.

En ce que l’arrêt attaqué rejette toute crédibilité aux trois rapports graphologiques datant des 5 décembre 2013, 4 novembre 2014 et 9 octobre 2018 ;

8Aux motifs que l’expert n’a pu travailler que sur des copies ;

Alors que, même s’il s’agit d’une expertise basée sur des copies, les conclusions de l’expert hautement qualifié de très haut niveau sont sans appel puisqu’il affirme clairement qu’il ne s’agit pas des signatures du père de la demanderesse qui était titulaire du compte ;

Que cet élément suffit à conclure à la nécessité de produire les documents sollicités par la demanderesse qui ne pouvait y avoir accès ;

Que l’égalité des armes, posée par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, suppose aussi que soit ouvert à chacune des parties la possibilité de faire valoir ses droits par l’accès équivalent aux documents pertinents ;

En sorte que l’arrêt viole les dispositions précitées.

Deuxième branche Sur la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 284 et 288 du Nouveau Code de Procédure Civile.

En ce que l’arrêt rejette la demande d’accès aux documents ;

Aux motifs que cette demande manque de précision ;

Alors qu’il est impossible à la partie demanderesse de donner plus de précisions concernant les extraits de compte à obtenir puisqu’elle n’en dispose pas ;

Qu’au surplus il est indispensable pour la demanderesse d’obtenir ces informations pour reconstituer l’assiette du patrimoine successoral ;

En sorte que l’arrêt viole les dispositions précitées. ».

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen La demanderesse en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir violé les articles 284 et 288 du Nouveau Code de procédure civile, 1315 du Code civil et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en déniant toute crédibilité aux rapports graphologiques.

Les dispositions visées au moyen sont étrangères au grief invoqué.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, est irrecevable.

9Sur la seconde branche du moyen La demanderesse en cassation invoque la violation des articles 284 et 288 du Nouveau Code de procédure civile et fait grief aux juges d’appel d’avoir rejeté sa demande d’accès aux documents au motif que cette demande manque de précision.

Il résulte de la réponse donnée au troisième moyen que ce moyen, pris en sa seconde branche, est sans objet.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa seconde branche, est irrecevable.

Sur le huitième moyen de cassation Enoncé du moyen « Sur le moyen, tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 62 et 65 alinéa 3 du Nouveau Code de Procédure civile, ainsi que du principe du contradictoire, pris de la dénaturation des actes et l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile, de l’article 1315 du Code civil, des articles 1156 et suivants du Code civil.

En ce que l’arrêt attaqué, après avoir relevé qu’au contrat de mariage des parents de la demanderesse était ajoint une clause d’attribution de la communauté pour l’entièreté au profit du conjoint survivant, rejette l’affirmation de la demanderesse selon laquelle elle déclare avoir gagné la procédure de tierce opposition à la modification du régime matrimonial de ses parents ;

Aux motifs que ce jugement en tierce opposition ne serait pas définitif puisque dans la transaction entre la Fondation roi Baudouin, légataire universel de M.

PERSONNE2.), et la demanderesse, on fait état d’un recours contre cette décision donnant droit à la tierce opposition.

Alors que la demanderesse fait référence à une opposition à la modification de régime matrimonial gagnée par Madame PERSONNE1.) » (pièce 34), pour en déduire que l’acte de modification du régime matrimonial de ses parents par lequel ils avaient adopté le régime de la communauté universelle avec attribution au survivant, n’aurait jamais existé et qu’elle n’aurait dès lors jamais perdu ses droits d’héritier réservataire, d’où elle déduit le droit de prendre inspection de tous les documents attenants aux comptes ouverts au nom et pour le compte de ses parents … Que l’arrêt attaqué ne donne qu’une version tronquée de l’acte authentique ;

En effet, la pièce 1-1 du dossier pièces de Madame PERSONNE1.) : acte authentique du 29 août 2012 mentionne aux pages 2 et 3 :

10Compte tenu des droits d’héritage réservataire de Madame PERSONNE1.), les parties ont décidé, dans leur intérêt mutuel, de mettre fin aux litiges judiciaires (…) et en conséquence, de conclure la présente convention transactionnelle (…) :

1. Il est reconnu et attribué à la Fondation Roi Baudouin pour solde de tous comptes dans la masse successorale de Monsieur PERSONNE2.) et à titre transactionnel, une somme forfaitaire de (…).

4. Tous les autres avoirs successoraux, droits et actions dépendants de la communauté et régime matrimonial ayant existé entre les époux PERSONNE3.) et PERSONNE2.), ainsi que leur succession respectives, sont irrévocablement acquis en pleine propriété à Madame PERSONNE1.), sans exception, ni réserve.

6. Dès ce jour, les parties s'engagent irrévocablement à accomplir les formalités de désistement d'instance (…) ».

Qu’en outre, la Cour reconnaissait que la demanderesse était l’unique héritière des successions de ses parents, ce qui avait pour conséquence que ce changement de régime matrimonial avait perdu tous ses effets ;

Alors que par ces considérants, l’arrêt dénature la portée de la convention transactionnelle, actée authentiquement le 29 août 2012 ;

En sorte que l’arrêt viole les dispositions précitées ;

L’arrêt doit être cassé. ».

Réponse de la Cour Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, un moyen ou élément de moyen ne doit, sous peine d’irrecevabilité, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture.

Le moyen articule, d’une part, la violation de l’article 62 du Nouveau Code de procédure civile qui permet au juge d’inviter les parties à fournir les explications de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige et de l’article 65, alinéa 3, du Nouveau Code de procédure civile qui interdit au juge de fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, d’autre part, la violation de l’article 53 du Nouveau Code de procédure civile relatif à l’objet du litige, ensuite, la violation de l’article 1315 du Code civil relatif à la charge de la preuve et, enfin, la violation des articles 1156 et suivants du Code civil relatifs à l’interprétation des conventions, partant plusieurs cas d’ouverture distincts.

Il s’ensuit que le moyen est irrecevable.

11PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation rejette le pourvoi ;

condamne la demanderesse en cassation aux dépens de l’instance en cassation.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN en présence du procureur général d’Etat adjoint John PETRY et du greffier Daniel SCHROEDER.

12Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) contre la société anonyme SOCIETE1.) Le pourvoi en cassation, introduit par PERSONNE1.) par un mémoire en cassation signifié le 28 octobre 2022 à la défenderesse en cassation et déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice le 31 octobre 2023, est dirigé contre un arrêt rendu par la Cour d’appel, septième chambre, siégeant en matière civile, statuant contradictoirement, en date du 23 mars 2022 (arrêt n°60/20) dans une affaire portant le numéro du rôle CAL-2021-00566. L’arrêt a été signifié à la demanderesse en cassation le 16 septembre 2022.

Le pourvoi en cassation a été interjeté dans les forme et délai prévus aux articles 7 et 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.

La partie défenderesse en cassation a déposé un mémoire en réponse le 27 décembre 2022 sans qu’il n’ait été préalablement signifié.

N’ayant pas été signifié conformément à l’article 16 de la loi précitée du 18 février 1885, ce mémoire doit être écarté du débat.

Sur les faits et antécédents :

La demanderesse est fille unique des époux GROUPE1.). Sa mère, PERSONNE3.), est décédée le DATE1.), et son père, PERSONNE2.), est décédé le DATE2.).

Par assignation en date du 5 octobre 2017, PERSONNE1.) a saisi le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg aux fins de voir condamner la société anonyme SOCIETE1.) (ci-après la société SOCIETE1.)) à lui communiquer une liste de documents et à lui fournir des renseignements concernant les comptes des époux GROUPE1.), le tout sous peine d’astreinte et avec exécution provisoire. En même temps, elle a demandé à ce que la société SOCIETE1.) soit condamnée à lui payer la somme provisoirement évaluée de 500.000,- euros au titre des avoirs successoraux retirés en fraude de ses droits de PERSONNE1.) après le décès de sa mère PERSONNE3.), respectivement après le décès de son père PERSONNE2.). Elle a réclamé la somme de 25.000,-

euros du chef de préjudice moral et une indemnité de procédure.

Par jugement du 23 décembre 2020, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg a rejeté la demande de communication de pièces et de renseignements, en déclarant sans objet la demande en exécution provisoire y relative. Le tribunal a rejeté la demande en indemnisation et la demande basée sur l’article 240 du Nouveau Code de Procédure Civile. Il a condamné PERSONNE1.) à une indemnité de procédure et aux frais de l’instance.

De ce jugement, la demanderesse en cassation a relevé appel suivant exploit d’huissier du 28 avril 2021. Par appel incident, la société SOCIETE1.) demanda à voir réformer le jugement entrepris en ce qui concerne le montant alloué à titre d’indemnité de pour la première instance. Elle demanda en outre à se voir allouer une indemnité de procédure pour les besoins de la procédure d’appel.

13 Un arrêt de la Cour d’appel rendu en date du 23 mars 2022 :

« dit recevable l’appel principal de PERSONNE1.), dit non fondé l’appel principal de PERSONNE1.), partant confirme le jugement du 23 décembre 2020 dans la mesure entreprise par l’appel principal, dit recevable l’appel incident de la société anonyme SOCIETE1.), dit partiellement fondé l’appel incident de la société anonyme SOCIETE1.), partant condamne PERSONNE1.) à payer à la société anonyme SOCIETE1.) une indemnité de procédure de 2.500,- euros pour les besoins de la première instance, déboute PERSONNE1.) de la demande basée sur l’article 240 du Nouveau Code de Procédure Civile, condamne PERSONNE1.) à payer à la société anonyme SOCIETE1.) une indemnité de procédure de 2.500,- euros pour les besoins de l’instance d’appel, condamne PERSONNE1.) aux frais et dépens de l’instance d’appel. » Cet arrêt fait l’objet du présent pourvoi.

Sur le premier moyen de cassation:

Le premier moyen de cassation est « tiré de violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi, in specie l’article 1315 du Code civil. » L’article 1315 du Code civil dispose :

« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation, doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. » Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir décidé qu’il ne saurait être fait droit à la demande de la demanderesse en cassation de voir la société SOCIETE1.) lui communiquer les pièces et documents bancaires relatifs aux comptes de ses parents en raison de son droit d’accès en sa qualité d’héritière de ses parents continuant la personnalité de ces derniers aux motifs que la société SOCIETE1.) aurait déjà exécuté cette obligation puisqu’elle aurait déjà exécuté cette obligation puisqu’elle aurait nécessairement remis ces documents à ses parents au fil de leur relation contractuelle et que la demanderesse en cassation ne rapporte pas la preuve que la société SOCIETE1.) n’aurait pas déjà exécuté cette obligation.

Les juges d’appel auraient ainsi renversé la charge de la preuve et exigé que la demanderesse en cassation rapporte une preuve négative, donc impossible.

14Ce moyen procède d’une lecture incomplète et erronée de l’arrêt entrepris, dans la mesure où il passe sous silence que la demanderesse en cassation avait signé une décharge. La demande en communication de pièces a été rejetée pour les motifs suivants :

« 2/ S’agissant des obligations de la société SOCIETE1.) en tant que dépositaire, la Cour constate avec les premiers juges que sur base d’une instruction de PERSONNE1.) du 24 novembre 2009, la société SOCIETE1.) a liquidé les avoirs de la succession des époux GROUPE1.) en ses livres et a transféré le reliquat sur un compte propre de PERSONNE1.).

Dans le cadre de cette liquidation des successions de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.), PERSONNE1.) a signé en date du même 24 novembre 2009 un document selon lequel « L’exécution des présentes instructions vaudra à la Banque, décharge pleine et entière des successions des Défunts ».

Cette décharge s’inscrit dans la clôture des relations contractuelles du contrat de dépôt à travers laquelle PERSONNE1.) reconnait avoir été créditée de l’intégralité des avoirs auxquels elle pouvait prétendre. C’est à bon droit que les premiers juges ont retenu à cet égard que « En signant cette décharge, PERSONNE1.) a nécessairement reconnu le respect par la Banque de son obligation de restitution en tant que dépositaire ». C’est dès lors à tort que PERSONNE1.) met en question la portée de cette décharge en alléguant la découverte d’opérations frauduleuses ou fautives postérieurement à la signature de ce document, dès lors que cette décharge n’opère qu’au regard des obligations de la société SOCIETE1.) en tant que dépositaire et que les premiers juges ont encore à bon droit retenu que la signature de la décharge, emportant reconnaissance de l’exécution des obligations découlant du contrat de dépôt, n’empêche pas PERSONNE1.) de contester l’exécution correcte par la société SOCIETE1.) de ses obligations de mandataire.

Pour contester la portée de la décharge du 24 novembre 2009, il appartient à PERSONNE1.) de démontrer que la banque aurait détenu à ce moment d’autres avoirs qu’elle aurait refusé de lui révéler et de lui transmettre.

C’est à ces fins que PERSONNE1.) formule la demande en communication de pièces ci-dessus reproduite. Or, il ne saurait être fait droit à celle-ci. Il appert de l’agencement des écritures de Carine DE BRUYNE en leur dernier état qu’elle entend baser son droit d’accès à ces documents sur sa qualité d’héritière de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.) continuant la personnalité de ces derniers. Or, ceux-ci étaient les contractants originaires de la société BGL auxquels l’ensemble des documents contractuels relatifs aux différents comptes et les opérations y effectuées ont nécessairement été remis au fil du temps par la société BGL dans le cadre de l’exécution de ses obligations contractuelles dérivant de la relation contractuelle existante. La société BGL ne saurait être contrainte de s’exécuter une deuxième fois de la même obligation.

Si PERSONNE1.) entend faire valoir que la société SOCIETE1.) n’aurait pas exécuté cette obligation à l’égard de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.), de sorte qu’elle pourrait aujourd’hui en solliciter l’exécution, il lui appartient de rapporter la preuve de cette inexécution. Pareille preuve n’est pas rapportée, de sorte que sa demande doit être rejetée. »1 La Cour d’appel a donc décidé qu’il appartenait à la demanderesse en cassation de prouver que la banque aurait détenu d’autres avoirs au motif que c’était elle qui prétendait contester la portée de la décharge signée par elle et reconnaissant l’exécution par la banque de ses obligations en tant que dépositaire.

1 Arrêt du 23 mars 2022, pages 9 et 10 (nous soulignons) 15 Le moyen procède partant d’une lecture incomplète de l’arrêt entrepris et manque en fait.

Il découle également de ce qui précède, que les motifs cités dans le moyen sont surabondants, de sorte que le moyen est inopérant.

Subsidiairement :

Etant donné que c’était la demanderesse en cassation qui prétendait contester la portée de la décharge signée par elle, la Cour d’appel a décidé à bon droit qu’il lui appartenait de prouver que la banque aurait détenu d’autres avoirs sans violer la disposition visée au moyen.

Le moyen n’est pas fondé.

Sur le deuxième moyen de cassation :

Le deuxième moyen de cassation est «pris de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie l’article 1993 du Code civil, des articles 660 e.s. NCPC et de l’article 1315 du Code civil».

Le moyen met en œuvre la violation de plusieurs dispositions légales :

-l’article 1993 du Code civil a trait à l’obligation du mandataire de rendre compte de sa gestion ;

-l’article 660 du Nouveau code de procédure civile (ci-après NCPC) régit la compétence juridictionnelle : « les comptables commis par la justice seront poursuivis devant les juges qui les auront commis ; les tuteurs, devant les juges du lieu où la tutelle a été déférée ; tous les autres comptables, devant les juges de leur domicile » ;

-l’article 1315 régit la charge de la preuve ;

partant plusieurs cas d’ouverture distincts.

Conformément à l’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ne doit indiquer qu’un seul cas d’ouverture, sous peine d’irrecevabilité.

Le moyen est irrecevable.

Subsidiairement :

Dans l’exposé du moyen, il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir décidé «que la banque a satisfait à ses obligations contractuelles de dépositaire, alors que le dépositaire est investi d’une obligation de reddition de comptes..».

Or, le moyen ne vise aucune déposition légale ayant trait aux obligations du dépositaire, mais uniquement l’article 1993 du Code civil concernant le mandataire.

Les dispositions légales visées au moyen sont étrangères au grief allégué.

16 Le moyen n’indique pas la partie critiquée de la décision entreprise. Il ne fournit aucune indication en quoi les trois dispositions légales visées auraient été violées et quelles sont les conclusions dont l’adjudication est demandée. De ce fait, le moyen ne répond pas aux exigences de l’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 précitée et il doit être déclaré irrecevable.

Sur le troisième moyen de cassation :

Le troisième moyen est «tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l’article 288 du Nouveau code de procédure civile».

Il est fait grief à l’arrêt dont pourvoi d’avoir rejeté la demande de la demanderesse en cassation basée sur l’article 288 du Nouveau code de procédure civile aux motifs que cette procédure ne s’applique conformément à l’article 284 du même code, auquel renvoie l’article 288, qu’à un document auquel «elle n’a pas été partie », respectivement à une « pièce détenue par un tiers ».

L’arrêt attaqué aurait ajouté à l’article 288 NCPC une condition qu’il n’énonce pas.

L’article 288 NCPC vise expressément les demandes de production d’éléments de preuve « détenus par les parties » et il renvoie, en ce qui concerne ces demandes et la production, aux articles 284 et 285 relatifs à l’obtention des pièces détenues par un tiers.

Ce renvoi est toutefois sans incidence sur la nature des éléments de preuve qui sont visés par la disposition en question. L’article 288 s’applique aux demandes de production d’éléments de preuve détenus par les parties. Il ne saurait dès lors être exigé que la partie qui formule une demande de production soit tiers par rapport à l’élément de preuve concerné.

L’arrêt du 23 mars 2022 a rejeté la demande en communication de pièces basée sur l’article 288 NCPC par les motifs suivants :

« Pour autant qu’il faille admettre que la demande de PERSONNE1.) est aussi basée sur l’article 288 du Nouveau Code de Procédure Civile, invoqué en première instance, elle doit être rejetée dans la mesure où cette procédure ne s’applique conformément à l’article 284 auquel renvoie l’article 288 qu’à un document « auquel elle n’a pas été partie », respectivement à « une pièce détenue par un tiers », conditions qui ne sont pas remplies dans le chef des documents dont PERSONNE1.) demande la délivrance.

La demande serait encore à rejeter au fond dans le cadre de cette base additionnelle en raison de son caractère absolument vague et général. Une demande de communication de pièces ne peut se borner à exiger la communication tous azimut d’un ensemble de documents non spécifiés, mais doit porter sur des documents bien déterminés dont il doit au surplus être établi que leur communication est pertinente pour la solution du litige.

A l’égard de ce dernier point, la Cour constate enfin que PERSONNE1.) reste en défaut d’avancer le moindre argument plausible ou le moindre élément de preuve ou même d’appréciation qui tendrait à démontrer ou à indiquer que la société SOCIETE1.) n’aurait pas, contrairement à ses indications et ses affirmations itératives, transmis en date du 24 novembre 2009 tous les avoirs ayant appartenu à PERSONNE2.) et à PERSONNE3.) à PERSONNE1.). » 17 Il découle de cette motivation que le rejet de la demande basée sur l’article 288 NCPC se justifie par d’autres motifs que ceux attaqués par le moyen. Ces derniers sont surabondants, de sorte que le moyen est sans influence sur la solution du litige et partant inopérant.

Sur le quatrième moyen de cassation:

Le quatrième moyen est «tiré de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 62 et 65 alinéa 3 du Nouveau code de procédure civile, ainsi que du principe du contradictoire.» L’article 62 NCPC prévoit que « le juge peut inviter les parties à fournir les explications de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige », tandis que l’article 65, alinéa 3, du même code dispose au’ « il [le juge] ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. » En ce qui concerne la première de ces dispositions, la demanderesse en cassation constate elle-

même qu’il s’agit d’une faculté pour le juge, et non pas d’une obligation. Aucun reproche n’étant formulé sur la base de l’article 62 NCPC, le moyen est irrecevable en ce qu’il vise cette disposition légale.

Le moyen soulève encore une violation du principe du contradictoire garanti par l’article 65, alinéa 3, du NCPC.2 Le moyen critique l’arrêt dont pourvoi pour avoir retenu que la défenderesse en cassation n’aurait pas commis de faute en ne bloquant pas les comptes des époux GROUPE1.) au décès de PERSONNE3.), la Cour d’appel considérant que la preuve de cette obligation de blocage n’était pas rapportée. La demanderesse en cassation estime que les juges du fond ont violé l’article 65 alinéa 3 NCPC ainsi que le principe du contradictoire «en invoquant que ce serait le droit belge qui serait applicable -le seul qui a été débattu entre parties et développé en conclusions- mais en écartant sans autre assise juridique son application, «sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations » ».3 Par rapport à l’obligation de blocage prévue en droit belge, l’arrêt dont pourvoi comporte les motifs suivants:

« 3b/ Pour asseoir son allégation de faute à charge de la société SOCIETE1.) pour avoir effectué des opérations de banque postérieurement au décès de PERSONNE3.), alors que tous les comptes auraient dû être bloqués, PERSONNE1.) se prévaut de ce que pareil blocage aurait obligatoirement dû intervenir en vertu du droit belge successoral applicable.

Si la Cour peut admettre qu’en raison de la nationalité et du dernier lieu de résidence de PERSONNE3.) la succession mobilière de celle-ci ait été soumise au droit belge, force est toutefois à la Cour de constater que PERSONNE1.) n’appuie son affirmation péremptoire de 2 dans les développements du moyen, la demanderesse en cassation indique erronément l’article 62 NCPC (page 12 du mémoire en cassation, 3e alinéa) 3 page 12 du mémoire en cassation, antépénultième alinéa des développements relatifs au 4e moyen 18l’obligation de bloquer les comptes en vertu dudit droit belge par aucune référence légale, jurisprudentielle ou doctrinale. L’obligation de blocage alléguée n’est partant pas établie. » Il découle de cette motivation que, contrairement aux affirmations de la demanderesse en cassation, ce n’est pas la Cour d’appel qui a relevé d’office l’applicabilité du droit belge, mais ce moyen avait été présenté par la demanderesse en cassation et il avait fait l’objet d’un débat contradictoire. Faute d’avoir relevé d’office un moyen de droit, les juges du fond n’étaient pas obligés d’inviter les parties à présenter leurs observations.

Le moyen procède partant d’une lecture erronée de l’arrêt et manque en fait.

Subsidiairement :

L’applicabilité du droit belge et l’obligation de blocage y prévue ayant été invoquées par la demanderesse en cassation, celles-ci se trouvaient dans le débat devant les juges d’appel qui avaient l’obligation de statuer sur ces questions, sans avoir à inviter les parties à conclure à cet égard.

Le principe du contradictoire n’a pas été violé et le moyen n’est pas fondé.4 Sur le cinquième moyen de cassation :

Le cinquième moyen de cassation est «tiré de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l’article 922 du Code civil et de l’article 1135-1 du Code civil. » Le moyen est articulé en deux branches:

La première branche est « tirée de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l’article 922 du Code civil ».

L’article 922 du Code civil a trait au calcul de la quotité disponible dans une succession.5 La demanderesse en cassation estime que sa demande de production de pièces a été écartée à tort par l’arrêt attaqué, aux motifs qu’elle base son droit d’accès sur sa qualité d’héritière de ses parents continuant la personnalité de ces derniers ; or, l’ensemble des documents leur a été remis en telle 4 Cass. n° 69 / 14 du 6.11.2014, n° 3386 du registre 5 Article 922 du Code civil:

« La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur.

On y réunit fictivement, après en avoir déduit les dettes, ceux dont il a été disposé par donation entre vifs d'après leur état à l'époque de la donation et leur valeur à l'ouverture de la succession. Si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l'époque de l'aliénation et, s'il y a eu subrogation de la valeur des nouveaux biens au jour de l'ouverture de la succession.

On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer. » 19sorte que la défenderesse ne saurait être contrainte d’exécuter deux fois la même obligation, alors que, lorsque les héritiers agissent en se prévalant d’un droit propre, notamment le droit à la protection du patrimoine successoral, ils sont à considérer comme des tiers.

Devant les juges du fond, l’article 922 du Code civil n’a pas été invoqué. Il s’agit partant d’un moyen nouveau. L’analyse de ce moyen exigerait l’examen de circonstances de fait qui n’ont pas été retenues par les juges du fond, de sorte que le moyen est mélangé de fait et de droit.

S’y ajoute que ce moyen est en contradiction avec l’argumentation de la demanderesse en cassation devant les juges du fond.

La Cour d’appel a retenu qu’«il appert de l’agencement des écritures de PERSONNE1.) en leur dernier état qu’elle entend baser son droit d’accès à ces documents sur sa qualité d’héritière de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.) continuant la personnalité de ces derniers. » Le moyen est irrecevable pour être nouveau et mélangé de fait et de droit.6 Subsidiairement :

La disposition visée n’est pas applicable au litige qui ne concerne pas une réduction de libéralités pour dépassement de la quotité disponible.

L’arrêt attaqué n’a pas appliqué et n’avait pas à appliquer cette disposition, de sorte que la première branche n’est pas fondée.

La seconde branche est « tirée de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 922 et suivants et 1135-1 du Code civil ».

La demanderesse en cassation estime que sa demande de production de pièces a été rejetée à tort par l’arrêt attaqué, aux motifs que les conditions générales de la banque étaient opposables à la demanderesse et que la demanderesse n’avait émis aucune réclamation à dater de la disponibilité de celles-ci, alors que la demanderesse n’a jamais eu connaissance de ces conditions générales, et en tant que titulaire d’un droit propre, n’a pas adhéré à ces conditions générales qui ne peuvent donc lui être opposées.

Conformément à l’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ne doit indiquer qu’un seul cas d’ouverture, sous peine d’irrecevabilité.

L’article 922 du Code civil a trait au calcul de la quotité disponible dans une succession, tandis que l’article 1135-1 du même code régit les conditions générales d’un contrat préétablies par l’une des parties.

Il s’agit de dispositions légales qui ne présentent aucun lien entre elles, de sorte que le moyen invoque deux griefs différents, et partant deux cas d’ouverture distincts.

6 Jacques et Louis Boré, La cassation en matière civile, Dalloz, 5e éd. 2015/2016, n°82.111 et 82.211 20Le moyen est irrecevable.

Subsidiairement :

Devant les juges du fond, les articles 922 et suivants et 1135-1 du Code civil n’ont pas été invoqués.

Il s’agit partant d’un moyen nouveau. L’analyse de ce moyen exigerait l’examen de circonstances de fait qui n’ont pas été retenues par les juges du fond, de sorte que le moyen est mélangé de fait et de droit.

S’y ajoute que ce moyen est en contradiction avec l’argumentation de la demanderesse en cassation devant les juges du fond.

La Cour d’appel a retenu qu’«il appert de l’agencement des écritures de PERSONNE1.) en leur dernier état qu’elle entend baser son droit d’accès à ces documents sur sa qualité d’héritière de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.) continuant la personnalité de ces derniers. » Le moyen est irrecevable pour être nouveau et mélangé de fait et de droit.

Plus subsidiairement :

Les articles 922 et suivants du Code civil ne sont pas applicables au litige qui ne concerne pas une réduction de libéralités pour dépassement de la quotité disponible.

L’arrêt attaqué n’a pas appliqué et n’avait pas à appliquer ces dispositions, de sorte que la seconde branche n’est pas fondée.

En ce qui concerne l’opposabilité des conditions générales, l’arrêt a constaté que la demanderesse en cassation entend « baser son droit d’accès à ces documents sur sa qualité d’héritière de PERSONNE2.) et de PERSONNE3.) continuant la personnalité de ces derniers »7 et que les conditions générales de la banque étaient « non contestées et non discutées par PERSONNE1.) »8.

En statuant ainsi, les juges du fond ont pu conclure que les conditions générales étaient opposables à la demanderesse en cassation sans violer les dispositions visées dans la seconde branche. Celle-

ci n’est pas fondée.

Sur le sixième moyen de cassation :

Le sixième moyen de cassation est «pris de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 1110 et 1131 du Code civil. » Le moyen est articulé en deux branches qui peuvent être analysés ensemble :

Dans la première branche, la demanderesse en cassation fait valoir que la décharge qu’elle a signée ne pourrait s’étendre aux faits ignorés par son auteur.

7 Arrêt du 23 mars 2022, page 10, troisième alinéa 8 idem, page 13, premier alinéa 21Dans la seconde branche, elle critique l’arrêt entrepris en ce qu’il a considéré que les conditions générales de la banque lui étaient opposables et a constaté l’absence de réclamation de sa part à dater de la disponibilité de celles-ci, alors qu’elle aurait ignoré l’existence de malversations.

Les deux dispositions visées au moyen ont trait au défaut de conditions essentielles affectant la validité des contrats, plus spécifiquement l’erreur (article 1110 du Code civil) et l’absence de cause (article 1131 du même code).

Aux termes de l’article 10, alinéa 2, de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou chaque branche doit préciser, sous peine d’irrecevabilité, la partie critiquée de la décision et ce en quoi celle-ci encourt le reproche allégué.

Le moyen ne précise pas en quoi les articles 1110 et 1131 du Code civil ont été violés.

Les développements en droit qui, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 10 précité peuvent compléter l’énoncé du moyen, ne peuvent suppléer la carence de celui-ci au regard des éléments dont la précision est requise sous peine d’irrecevabilité.

Le moyen est irrecevable.

Subsidiairement :

Le moyen est nouveau dans ses deux branches. Il est mélangé de fait et de droit, dans la mesure où il est demandé à votre Cour de statuer sur l’existence d’une erreur et/ou l’absence de cause.

L’analyse du moyen obligerait votre Cour à examiner des circonstances de fait qui n’ont pas été retenues par les juges du fond.

Le moyen est irrecevable.

Sur le septième moyen de cassation :

Le septième moyen de cassation est «pris de la dénaturation des actes et de la violation sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 284 et 288 du NCPC, de l’article 1315 du Code civil et de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme».

Le moyen est articulé en deux branches :

La première branche invoque la violation « des dispositions précitées ».

Aux termes de l’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou élément de moyen ne doit mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture, sous peine d’irrecevabilité.

Le moyen met en œuvre la violation des articles 284 et 288 NCPC qui régissent la production de pièces, la violation de l’article 1315 du Code civil qui régit la charge de la preuve, ainsi que la violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme qui garantit un procès équitable, partant des cas d’ouverture distincts.

22S’y ajoute que la demanderesse en cassation reproche à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté les trois rapports graphologiques aux motifs que l’expert n’a pu travailler que sur des copies, alors que, même s’il s’agit d’une expertise basée sur des copies, les conclusions seraient sans appel puisqu’il affirme clairement qu’il ne s’agit pas des signatures du père de la demanderesse qui était titulaire du compte.

Les dispositions légales visées sont étrangères au grief invoqué.

Le moyen est irrecevable.

La seconde branche invoque la violation des articles 284 et 288 NCPC et elle fait grief à l’arrêt dont pourvoi d’avoir rejeté la demande d’accès aux documents aux motifs que cette demande manque de précision.

Aux termes de l’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou élément de moyen doit préciser, sous peine d’irrecevabilité, la partie critiquée de la décision et ce en quoi elle encourt le reproche allégué. Il doit également contenir les conclusions dont l’adjudication est demandée.

Faute d’indications sur ces points, la branche est irrecevable.

Sur le huitième moyen de cassation :

Le huitième moyen est «tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie des articles 62 et 65 alinéa 3 62 NCPC du Nouveau code de procédure civile, ainsi que du principe du contradictoire, pris de la dénaturation des actes et l’article 53 du Nouveau code de procédure civile, de l’article 1315 du Code civil, des articles 1156 et suivants du Code civil. » Aux termes de l’article 10 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, chaque moyen ou élément de moyen ne doit mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture, sous peine d’irrecevabilité.

Le moyen met en œuvre la violation de l’article 62 NCPC permettant au juge d’inviter les parties à fournir les explications de droit qu’il estime nécessaires à la solution du litige, la violation de l‘article 62, alinéa 3, NCPC imposant au juge le respect du principe du contradictoire, « la dénaturation des actes », la violation de l’article 53 NCPC régissant l’objet du litige, ainsi que la violation de l’article 1315 relatif à la charge de la preuve, et encore la violation des articles 1156 et suivants du Code civil relatifs à l’interprétation des conventions, partant plusieurs cas d’ouverture distincts.

Le moyen est irrecevable.

Conclusion Le pourvoi est recevable, mais il est à rejeter.

23 Pour le Procureur Général d’Etat, Le premier avocat général Marie-Jeanne Kappweiler 24


Synthèse
Numéro d'arrêt : 75/23
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2023-06-15;75.23 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award