La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2022 | LUXEMBOURG | N°99/22

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 30 juin 2022, 99/22


N° 99 / 2022 du 30.06.2022 Numéro CAS-2021-00111 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, trente juin deux mille vingt-deux.

Composition:

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Christiane JUNCK, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Jean ENGELS, premier conseiller à la Cour d’appel, Monique SCHMITZ, avocat général, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre:

1) J), 2) P), demandeurs en cassation, comparant

par Maître Charles KAUFHOLD, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et...

N° 99 / 2022 du 30.06.2022 Numéro CAS-2021-00111 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, trente juin deux mille vingt-deux.

Composition:

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Christiane JUNCK, conseiller à la Cour de cassation, Agnès ZAGO, conseiller à la Cour de cassation, Jean ENGELS, premier conseiller à la Cour d’appel, Monique SCHMITZ, avocat général, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre:

1) J), 2) P), demandeurs en cassation, comparant par Maître Charles KAUFHOLD, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

M), défendeur en cassation.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 105/21-VII, rendu le 7 juillet 2021 sous le numéro CAL-2019-00859 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, septième chambre, siégeant sur requête en suppression d’astreintes ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 15 septembre 2021 par J) et P) à M), déposé le 17 septembre 2021 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Sur les conclusions du premier avocat général Serge WAGNER.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le juge des référés du tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait rejeté la demande dirigée par M) contre ses anciens associés, J) et P), tendant à l’obtention, sous peine d’astreinte, des codes d’accès à diverses adresses électroniques de l’étude d’avocats.

Par arrêt du 26 février 2020, la Cour d’appel avait, par réformation partielle, condamné J) et P), sous peine d’une astreinte de 100 euros par jour de retard, limitée à un maximum de 50.000 euros, à communiquer à M) les codes lui permettant d’accéder à toutes les correspondances le concernant, entrées à l’adresse électronique M)@x)-legal.com durant la période du 1er juillet au 8 novembre 2017 ainsi qu’à celles entrées à l’adresse électronique info@x)-legal.com depuis le 1er juillet 2017 jusqu’au jour de la désactivation prouvée de cette adresse.

Statuant sur la demande de J) et de P) en suppression des peines d’astreinte prononcées à leur encontre sur base de l’article 2063 du Code civil, la Cour d’appel avait, par arrêt du 1er juillet 2020, rejeté la demande relative à l’adresse électronique info@x)-legal.com et institué une expertise afin de vérifier la faisabilité technique de la réactivation, sinon de la restauration de la boîte électronique M)@x)-legal.com.

La réactivation de l’adresse M)@x)-legal.com s’étant avérée techniquement impossible à réaliser, la Cour d’appel a, par arrêt du 7 juillet 2021, déchargé J) et P) du paiement de la moitié du montant plafonné de l’astreinte, constaté, concernant l’adresse info@x)-legal.com, que le plafond de 25.000 euros était atteint et rejeté la demande reconventionnelle de M) en obtention d’une nouvelle astreinte.

Le pourvoi est dirigé contre l’arrêt du 7 juillet 2021.

Sur l’unique moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon de la mauvaise interprétation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 587 du nouveau Code de procédure civile.

première branche En ce que l’Arrêt attaqué constate que le montant maximum de l’astreinte serait atteint sans pour autant indiquer les motifs qui l’amènent à cette conclusion, Alors que les juges du fond auraient dû, motiver cette décision.

La motivation précise est une motivation circonstanciée, propre à l’espèce dans laquelle le juge s’explique sur les éléments de preuves sur lesquels il s’est fondé et qui ne laisse aucun doute sur le fondement juridique de la décision (N°98/2021 du 10 juin 2021 ; CAS-2020-00100).

En retenant que le montant maximum de 25.000.- euros se trouve atteint, fondé sur une simple affirmation, les juges de la Cour d’appel ne permettent pas de vérifier sur quels éléments de fait ils se sont basés pour en tirer cette conclusion, ce qui constitue de toute évidence une motivation imprécise et en l’espèce faussée.

deuxième branche En ce que l’Arrêt contient des motifs contradictoires, ce qui revient à une absence de motif, en constatant d’un côté que le montant de l’astreinte a été suffisamment coercitif pour inciter les requérants à s’exécuter, ces derniers ayant par lettre du 13 mars 2020 procédé à la communication des codes d’accès concernant la boîte électronique info@x)-legal.com » et que l’astreinte ne pouvait courir qu’à partir de la signification de l’arrêt du 26 février 2020, cette signification ayant eu lieu en date du 11 mars 2020 et d’un autre côté qu’il y aurait dès lors lieu de constater que le montant maximum de l’astreinte serait atteint.

Alors que la Cour aurait dû, après avoir constaté que la condamnation a été exécutée avant même que l’astreinte n’ait commencé à courir, en tirer la conséquence que le montant de l’astreinte devait être liquidée à zéro.

Attendu que mutuellement, (…) une contradiction entre deux motifs ne peut valoir absence de motifs qui s’il existe une réelle incompatibilité entre ces motifs » (Cass ; 1er mars 2012, décision 7/12, fiche JUDOC : 100000705).

Que selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation française les arrêts qui ne contiennent pas de motifs sont nuls ; la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs » (Civ, 7 janv. 1891, DP 1891.151 – Cass., ch.

Mixte, 21 juin 1974. Civ.N°2.-Civ 2e, 25 oct. 1995, n°93.14.077 et n°93-14.079, Bull.civ.II, n°252).

Que suivant ladite jurisprudence et s’annihilent réciproquement, aucun d’eux ne pouvant alors être retenu comme fondement de la décision » Qu’en l’espèce, les juges de la Cour d’appel ont adopté un raisonnement pour le moins incohérent en relevant que la Cour est dessaisie de la demande de suppression de l’astreinte ayant trait à l’adresse électronique info@x)-legal.com.

La Cour conclut que les requérants n’ont pas réussi à prouver que cette boîte électronique serait en cours de désactivation et qu’ils n’étaient pas fondés à invoquer une impossibilité matérielle de s’exécuter et de fournir les codes d’accès.

Or, dans ce même arrêt critiqué, la Cour d’appel, (page n°6) prend néanmoins position quant à la condamnation de l’astreinte relative à la boîte électronique info@x)-legal.com en reconnaissant d’une part qu’il s’agit de la seule astreinte exigible, et que le montant maximum de l’astreinte se trouve d’autre part, dès lors atteint.

D’ores et déjà il y a contradiction des motifs.

Or, bien que la Cour affirme sa position quant à l’astreinte due pour l’adresse info@x)-legal.com, cette même Cour affirme que le montant de l’astreinte a été suffisamment coercitif pour inciter les requérants à s’exécuter, reconnaissant que les demandeurs en cassation ont transmis par courrier du 13 mars 2020 les codes d’accès de l’adresse info@x)-legal.com.

La Cour d’appel n’a pas déduit de ses propres constatations de fait les conséquences légales qui s’imposaient avec évidence en ce que l’astreinte n’avait pas commencé à courir puisque les demandeurs en cassation se sont exécutés avant son exigibilité soit le 13 mars 2020.

La Cour d’appel tout en reconnaissant que l’astreinte relative à l’adresse info@x)-legal.com n’est en réalité pas due, décharge les demandeurs en cassation du paiement de l’astreinte pour l’adresse M)@x)-legal.com à hauteur de 25.000.-

euros avec effet au 26 février 2020, maintenant tout de même le montant final à 25.000.- euros, et constate que ce montant maximum de 25.000.- euros se trouve atteint ».

La contradiction de motifs équivaut à l’absence de motifs. Il y a partant lieu à cassation de l’arrêt à cet égard. ».

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen En tant que tiré de la violation des articles 89 de la Constitution et 249 du Nouveau Code de procédure civile auquel renvoie l’article 587 du même code, le moyen vise le défaut de motifs, qui est un vice de forme.

Une décision judiciaire est régulière en la forme, dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.

En constatant qu’ils étaient dessaisis de la demande en suppression de l’astreinte relative à la boîte électronique info@x)-legal.com et qu’il il y avait lieu de supprimer, pour impossibilité matérielle d’exécution, l’astreinte relative à la communication des codes d’accès à toutes les correspondances entrées dans la boîte électronique M)@x)-legal.com pendant la période du 1er juillet 2017 au 8 novembre 2017 et en retenant « Aux termes de l’article 2063 du Code civil, le juge qui a ordonné l’astreinte peut en ordonner la suppression, en suspendre le cours durant le délai qu’il indique ou la réduire à la demande du condamné, si celui-ci est dans l’impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle de satisfaire à la condamnation principale.

L’arrêt du 26 février 2020 ayant prononcé deux condamnations sous astreinte de 100.- euros par jour d’inexécution, tout en limitant le montant maximum ainsi encouru à 50.000.- euros, le montant maximum encouru du chef de l’inexécution des obligations de faire figurant au dispositif de l’arrêt du 26 février 2020 est en conséquence à réduire à 25.000.- euros. (…) Il est constant en cause que l’arrêt du 26 février 2020 ayant prononcé l’astreinte a été signifié par M) aux requérants par acte d’huissier de justice du 11 mars 2020.

L’astreinte prononcée en ce qui concerne la condamnation à délivrer les codes d’accès à la boîte électronique info@x)-legal.com est dès lors exigible à partir de cette signification.

Il y a lieu de constater que le montant maximum de l’astreinte tel que résultant des développements précédents, se trouve dès lors atteint. », les juges d’appel ont motivé l’arrêt sur le point considéré.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, n’est pas fondé.

Sur la seconde branche du moyen Vu les articles 89 de la Constitution et 249 du Nouveau Code de procédure civile, auquel renvoie l’article 587 du même code.

En retenant, d’une part, que l’arrêt du 26 février 2020 avait été signifié aux demandeurs en cassation le 11 mars 2020, date à partir de laquelle l’astreinte était devenue exigible et que l’astreinte avait atteint le montant maximal de 25.000 euros et, d’autre part, que les demandeurs en cassation avaient exécuté ledit arrêt pour avoir communiqué au défendeur en cassation, par courrier du 13 mars 2020, les codes d’accès relatifs à la boîte électronique info@x)-legal.com, les juges d’appel se sont déterminés par des motifs contradictoires.

Il s’ensuit que l’arrêt encourt la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

casse et annule l’arrêt attaqué numéro 105/21 - VII, rendu le 7 juillet 2021 sous le numéro CAL-2019-00859 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, septième chambre, siégeant sur requête en suppression d’astreintes ;

déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s’en sont suivis, remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel, autrement composée ;

condamne le défendeur en cassation aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Charles KAUFHOLD, sur ses affirmations de droit ;

ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt soit transcrit sur le registre de la Cour d’appel et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt soit consignée en marge de la minute de l’arrêt annulé.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN en présence de l’avocat général Monique SCHMITZ et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet général dans l’affaire de cassation J) et P) contre M) (n° CAS-2021-00111 du registre) Par mémoire signifié le 15 septembre 2021 et déposé au greffe de la Cour supérieure de justice le 17 septembre 2021, Maître Charles KAUFHOLD, avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de J) et P), a introduit un pourvoi en cassation contre un arrêt n° 105/21 - VII rendu contradictoirement en date du 7 juillet 2021 par la Cour d’appel, septième chambre, siégeant sur requête en suppression d’astreintes (n° CAL-

2019-00859 du rôle).

Il ne résulte pas du dossier répressif que l’arrêt entrepris aurait été signifié aux demandeurs en cassation, de sorte que le pourvoi introduit est recevable au regard du délai de deux mois prévu à l’article 7 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation. Le pourvoi répond encore aux conditions de forme prévues dans cette loi.

Aucun mémoire en réponse n’a été déposé.

Sur les faits et rétroactes :

Par lettre du 11 mai 2017 les demandeurs en cassation ont notifié au défendeur en cassation leur décision de l'expulser de leur association commune et ce au motif que malgré sommation le défendeur en cassation restait toujours en défaut de payer sa part des frais dans l’association.

En date du 30 juin 2017 les demandeurs en cassation ont quitté les locaux de l'association.

Le défendeur en cassation a contesté la décision d’expulsion devant le Bâtonnier.

Le défendeur en cassation a lancé une assignation en référé voie de fait en date du 3 janvier 2018 pour obtenir sous peine d'une astreinte journalière de 1.000,- € les codes d'accès de son ancienne adresse électronique, M)@x)-legal.com, de l'adresse commune de l'étude, info@x)-legal.com, ainsi que de celles d'anciens collaborateurs de l'étude.

Par ordonnance du 12 juillet 2019 le juge des référés a débouté le défendeur en cassation de sa demande.1 Contre cette décision, le défendeur en cassation a relevé appel en date du 26 août 2019 réclamant cette fois-ci une astreinte de 2.000,- € par jour de retard.

Par arrêt rendu contradictoirement en date du 26 février 2020, la Cour d’appel, septième chambre, siégeant en matière d’appel de référé, a reçu l’appel en la forme, l’a dit partiellement fondé ;

réformant, a décidé :

« déclare la demande de M) recevable pour la boîte électronique M)@x)-legal.com et le domaine info@x)-legal.com;

condamne J) et P) à communiquer dans les quinze jours à partir du prononcé du présent arrêt, sous peine d’une astreinte de 100.- euros par jour de retard, limitée à la somme de 50.000.- euros, les codes d’accès permettant à M) d’accéder à toutes les correspondances le concernant entrées dans la boîte électronique M)@x)-legal.com pendant la période du 1er juillet 2017 au 8 novembre 2017 et d’accéder à toutes les correspondances lui adressées entrées à l’adresse électronique info@x)-legal.com depuis le 1er juillet 2017 jusqu’au jour de la désactivation prouvée de cette adresse ;

confirme l’ordonnance entreprise en ce qui concerne les boîtes électroniques… »2 Une requête en interprétation déposée au greffe de la Cour en date du 20 avril 2020 par les demandeurs en cassation dans le but de permettre à la Cour d'interpréter sa décision a été déclarée irrecevable par arrêt de la Cour d’appel du 27 mai 2020.3 Par requête déposée le 28 mai 2020 au greffe de la Cour, J) et P) se sont basés sur l’article 2063 du Code civil pour solliciter la suppression des astreintes découlant de l’arrêt rendu le 26 février 2020.

Par arrêt rendu contradictoirement en date du 1er juillet 2020, la Cour d’appel, septième chambre, siégeant sur requête en suppression d’astreintes, a décidé ce qui suit :

« déclare la requête recevable en la pure forme ;

la déclare non fondée quant à la boîte électronique info@x)-legal.com;

quant à la boîte électronique « M)@x)-legal.com » :

avant tout autre progrès en cause :

1 Pièce 1 de la farde de pièces des demandeurs en cassation 2 Pièce 2 de la farde de pièces des demandeurs en cassation 3 Pièce 3 de la farde de pièces des demandeurs en cassation nomme consultant Monsieur T), demeurant à L-

____, avec la mission, dans un rapport motivé et détaillé, de :

« se prononcer sur la faisabilité technique de la réactivation, respectivement restauration, de la boîte électronique « M)@x)-legal.com » et par conséquent sur la possibilité matérielle des requérants de communiquer les codes d’accès permettant à M) d’accéder à toutes les correspondances le concernant entrées à l’adresse email M)@x)-legal.com pendant la période du 1er juillet 2017 au 8 novembre 2017, ceci au vu des dispositions contractuelles ayant lié l’étude d’avocats X)-LEGAL au prestataire de services Z) GmbH (notamment quant aux obligations éventuelles d’un back-up) ainsi qu’au vu du courrier émanant de ce prestataire de services du 10 mars 2020 à la société __ Law SARL » ;… »4 L’expert T) a dressé son rapport le 15 mars 2021.

Par arrêt rendu contradictoirement en date du 7 juillet 2021, la Cour d’appel, septième chambre, siégeant sur requête en suppression d’astreintes, a décidé ce qui suit :

« statuant en continuation de l’arrêt du 1er juillet 2020 ;

vu le rapport d’expertise T) du 15 mars 2021 ;

décharge J) et P) du paiement de l’astreinte ordonnée par arrêt du 26 février 2020 en ce qui concerne l’adresse M)@x)-legal.com à hauteur de la moitié du montant total de l’astreinte, à savoir 25.000.- euros avec effet au 26 février 2020;

dit partant que le montant de l’astreinte prononcée par l’arrêt du 26 février 2020 est à ramener au montant maximum de 25.000.-euros ;

constate que ce montant maximum de 25.000.- euros se trouve atteint ;… »5 Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Quant à l’unique moyen de cassation L’unique moyen de cassation est « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon de la mauvaise interprétation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 587 du nouveau Code de procédure civile.

4 Pièce 4 de la farde de pièces des demandeurs en cassation 5 Pièce 6 de la farde de pièces des demandeurs en cassation Première branche En ce que l’Arrêt attaqué constate que le montant maximum de l’astreinte serait atteint sans pour autant indiquer les motifs qui l’amènent à cette conclusion, Alors que les juges du fond auraient dû, motiver cette décision.

Deuxième branche En ce que l’Arrêt contient des motifs contradictoires, ce qui revient à une absence de motif, en constatant d’un côté que le montant de l’astreinte «a été suffisamment coercitif pour inciter les requérants à s’exécuter, ces derniers ayant par lettre du 13 mars 2020 procédé à la communication des codes d’accès concernant la boîte électronique info@x)-legal.com » et que l’astreinte ne pouvait courir qu’à partir de la signification de l’arrêt du 26 février 2020, cette signification ayant eu lieu en date du 11 mars 2020 et d’un autre côté qu’il y aurait dès lors lieu de constater que le montant maximum de l’astreinte serait atteint.

Alors que la Cour aurait dû, après avoir constaté que la condamnation a été exécutée avant même que l’astreinte n’ait commencé à courir, en tirer la conséquence que le montant de l’astreinte devait être liquidée à zéro. » En ce qui concerne la première branche En ce qui concerne cette branche qui est tirée du défaut de motifs, il y a lieu de constater que l’article 89 de la Constitution6 sanctionne l’absence de motifs qui est un vice de forme pouvant revêtir la forme d’un défaut total de motifs, d’une contradiction de motifs, d’un motif dubitatif ou hypothétique ou d’un défaut de réponse à conclusion.7 Un jugement est régulier en la forme dès qu’il comporte un motif, exprès ou implicite, si incomplet ou si vicieux soit-il, sur le point considéré.8 La Cour d’appel a d’abord constaté qu’elle était dessaisie du volet concernant la demande de suppression de l’astreinte concernant la boîte électronique info@x)-

legal.com suite à l’arrêt du 1er juillet 2020 qui a déclaré cette demande non fondée.9 Sur base du rapport d’expertise T), la Cour d’appel a décidé qu’il il y a lieu de supprimer, pour impossibilité matérielle d’exécution, l’astreinte prononcée par arrêt du 6 L’article 89 de la Constitution est ainsi libellé : « Tout jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique. » 7 Boré, La cassation en matière civile, 5ème édition, Dalloz Action 2015, n° 77.60 8 Boré, ouvrage cité, n° 77.31 9 Arrêt entrepris p.4 26 février 2020 en vue de contraindre les demandeurs en cassation à communiquer au défendeur en cassation dans les quinze jours du prononcé de cet arrêt les codes d’accès lui permettant d’accéder à toutes les correspondances le concernant entrées dans la boîte électronique M)@x)-legal.com pendant la période du 1er juillet 2017 au 8 novembre 2017.10 La Cour d’appel a ensuite poursuivi son raisonnement de la manière suivante :

« Aux termes de l’article 2063 du Code civil, le juge qui a ordonné l’astreinte peut en ordonner la suppression, en suspendre le cours durant le délai qu’il indique ou la réduire à la demande du condamné, si celui-ci est dans l’impossibilité définitive ou temporaire, totale ou partielle de satisfaire à la condamnation principale.

L’arrêt du 26 février 2020 ayant prononcé deux condamnations sous astreinte de 100.-

euros par jour d’inexécution, tout en limitant le montant maximum ainsi encouru à 50.000.- euros, le montant maximum encouru du chef de l’inexécution des obligations de faire figurant au dispositif de l’arrêt du 26 février 2020 est en conséquence à réduire à 25.000.- euros… »11 pour retenir ensuite :

« En droit luxembourgeois, l’astreinte est régie par les articles 2059 à 2068 du Code civil insérées à ce code par une loi du 21 juillet 1976 portant transposition de la Convention Benelux portant loi uniforme relative à l’astreinte, signée à La Haye le 26 novembre 1973.

Selon l’article 2060 du Code civil, l’astreinte ne peut jamais être encourue avant la signification de la décision qui la prononce. Ainsi, lorsque la décision contient une date de départ de l’astreinte, cette date n’est que conditionnelle et suppose la signification préalable de la décision (Cour d’appel Bruxelles 9 février 1989, Pas. B. II, 1989, n°9, p.201, cité par Jacques Van Compernolle, L’astreinte, éd. Larcier 1992, p.152).

Cette règle est absolue. Si la décision contient une date de départ de l’astreinte, cette date n’est que conditionnelle, et suppose une signification préalable de la décision (Cour d’appel de Bruxelles, 9 février 1989, Pas B. II, 1989, n°9, p. 201, jurisprudence citée par Marc THEWES, l’Astreinte en droit luxembourgeois, Annales de droit luxembourgeois 1999, p. 152) Il est constant en cause que l’arrêt du 26 février 2020 ayant prononcé l’astreinte a été signifié par M) aux requérants par acte d’huissier de justice du 11 mars 2020.

L’astreinte prononcée en ce qui concerne la condamnation à délivrer les codes d’accès à la boîte électronique « info@x)-legal.com est dès lors exigible à partir de cette signification.

10 Arrêt entrepris p. 4 et 5 11 Arrêt entrepris p.5 Il y a lieu de constater que le montant maximum de l’astreinte tel que résultant des développements précédent, se trouve dès lors atteint… »12 Il est évident qu’après avoir décidé que l’astreinte de 100.- euros par jour d’inexécution est devenue exigible en date du 11 mars 2020, date de la signification de l’arrêt du 26 février 2020 aux demandeurs en cassation et que le montant maximum de l’astreinte était fixé à 25.000.- euros les juges d’appel ont pu valablement retenir que le montant maximum de l’astreinte était atteint en date du 7 juillet 2021, jour du prononcé de l’arrêt.

En effet, le montant maximum de l’astreinte de 25.000.- euros était atteint après 250 jours (250 jours x 100.- euros = 25.000.- euros) c’est-à-dire plusieurs mois avant le prononcé de l’arrêt en date du 7 juillet 2021.

L’arrêt entrepris est donc régulier en la forme étant donné qu’il comporte un motif, du moins implicite, si incomplet ou si vicieux soit-il, sur le point considéré.

La première branche du moyen de cassation n’est donc pas fondée.

En ce qui concerne la deuxième branche Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel le vice de forme de la contradiction de motifs.

La Cour de cassation française retient trois types de contradiction de motifs : la contradiction réelle entre motifs de droit qui affecte le raisonnement du juge, la contradiction entre les motifs et le dispositif et la contradiction entre motifs de fait.13 Selon une formule consacrée de la Cour de cassation française « la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs » dès lors que les motifs contradictoires se détruisent ou s’annihilent réciproquement, aucun d’entre eux ne pouvant alors être retenu comme fondement de la décision. La contradiction de motifs ne vicie la décision entreprise que si elle est réelle et profonde c’est-à-dire s’il existe entre les deux motifs incriminés une véritable incompatibilité.

De plus, « la Cour de cassation ne retient le grief que si la contradiction reprochée affecte la pensée même du juge, et n’est pas le résultat d’une simple erreur de plume ou de langage. Ainsi elle écarte le moyen si la contradiction est le fruit d’une pure erreur matérielle, d’une faute de temps ou de terminologie. »14 Les juges d’appel ont d’abord retenu :

12 Arrêt entrepris p.6 13 Boré, ouvrage précité, n° 77.111 14 Boré, ouvrage précité, n° 77.91 « En droit luxembourgeois, l’astreinte est régie par les articles 2059 à 2068 du Code civil insérées à ce code par une loi du 21 juillet 1976 portant transposition de la Convention Benelux portant loi uniforme relative à l’astreinte, signée à La Haye le 26 novembre 1973.

Selon l’article 2060 du Code civil, l’astreinte ne peut jamais être encourue avant la signification de la décision qui la prononce. Ainsi, lorsque la décision contient une date de départ de l’astreinte, cette date n’est que conditionnelle et suppose la signification préalable de la décision (Cour d’appel Bruxelles 9 février 1989, Pas. B. II, 1989, n°9, p.201, cité par Jacques Van Compernolle, L’astreinte, éd. Larcier 1992, p.152).

Cette règle est absolue. Si la décision contient une date de départ de l’astreinte, cette date n’est que conditionnelle, et suppose une signification préalable de la décision (Cour d’appel de Bruxelles, 9 février 1989, Pas B. II, 1989, n°9, p. 201, jurisprudence citée par Marc THEWES, l’Astreinte en droit luxembourgeois, Annales de droit luxembourgeois 1999, p. 152) Il est constant en cause que l’arrêt du 26 février 2020 ayant prononcé l’astreinte a été signifié par M) aux requérants par acte d’huissier de justice du 11 mars 2020.

L’astreinte prononcée en ce qui concerne la condamnation à délivrer les codes d’accès à la boîte électronique « info@x)-legal.com est dès lors exigible à partir de cette signification.

Il y a lieu de constater que le montant maximum de l’astreinte tel que résultant des développements précédent, se trouve dès lors atteint…15 »16 pour continuer ensuite :

« Les derniers développements du litige semblent d’ailleurs établir que le montant fixé a été suffisamment coercitif pour inciter les requérants à s’exécuter, ces derniers ayant par lettre du 13 mars 2020 procédé à la communication de codes d’accès concernant boîte électronique « info@x)-legal.com. »17 Les juges d’appel ont donc décidé d’une part que l’astreinte prononcée en ce qui concerne la condamnation à délivrer les codes d’accès à la boîte électronique info@x)-

legal.com est devenue exigible en date du 11 mars 2020, date de la signification de l’arrêt de la Cour d’appel du 26 février 2020 aux demandeurs en cassation et a atteint le montant maximum de 25.000.- euros et d’autre part que les demandeurs en cassation ont exécuté l’arrêt de la Cour d’appel du 26 février 2020 en ayant par lettre du 13 mars 2020 procédé à la communication au défendeur en cassation de codes d’accès concernant la boîte électronique info@x)-legal.com.

15 Souligné par le soussigné 16 Arrêt entrepris p.6 17 Arrêt entrepris p.7 Or d’après ce dernier raisonnement l’astreinte aurait seulement couru du 11 mars 2020 au 13 mars 2020 de sorte qu’il est impossible que le montant maximum de 25.000.-

euros ait été atteint.

L’arrêt entrepris contient donc une contradiction de motifs équivalant à un défaut de motifs.

De plus, l’arrêt entrepris, en utilisant les termes : « Les derniers développements du litige semblent18 d’ailleurs établir que…. »19 contient un motif dubitatif équivalant à un défaut de motifs.

Il s’ensuit que la deuxième branche du moyen dans la mesure où elle est tirée de la violation de l’article 89 de la Constitution est fondée.

Conclusion Le pourvoi est recevable et fondé.

L’arrêt encourt la cassation.

Pour le Procureur général d’Etat, le premier avocat général, Serge WAGNER 18 Souligné par le soussigné 19 Arrêt entrepris p.7 14


Synthèse
Numéro d'arrêt : 99/22
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2022-06-30;99.22 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award