La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2022 | LUXEMBOURG | N°46562C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 03 février 2022, 46562C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 46562C ECLI:LU:CADM:2022:46562 Inscrit le 11 octobre 2021 Audience publique du 3 février 2022 Appel formé par les époux (A) et (B), …, contre un jugement du tribunal administratif du 1er septembre 2021 (n° 43912 du rôle) ayant statué sur leur recours dirigé contre une délibération du conseil communal de la commune de Steinsel et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général (refonte) Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 46562C du rôle et déposée au greffe de

la Cour administrative le 11 octobre 2021 par la société à responsabilité lim...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 46562C ECLI:LU:CADM:2022:46562 Inscrit le 11 octobre 2021 Audience publique du 3 février 2022 Appel formé par les époux (A) et (B), …, contre un jugement du tribunal administratif du 1er septembre 2021 (n° 43912 du rôle) ayant statué sur leur recours dirigé contre une délibération du conseil communal de la commune de Steinsel et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général (refonte) Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 46562C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 11 octobre 2021 par la société à responsabilité limitée ELVINGER DESSOY MARX, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1461 Luxembourg, 31, rue d’Eich, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 251584, représentée aux fins de la présente procédure d’appel par Maître Serge MARX, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), retraité, et de son épouse, Madame (B), fonctionnaire de l’Etat, les deux demeurant ensemble à L-…, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 1er septembre 2021 (n° 43912 du rôle) ayant déclaré recevable mais non fondé leur recours en annulation de la délibération du conseil communal de Steinsel du 26 avril 2019 portant adoption du projet de plan d’aménagement général, parties graphique et écrite, ainsi que de la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur du 23 août 2019 concernant la superposition d’une zone d’aménagement différé [ZAD] par eux contestée apposée sur l’ensemble des terrains sis à l’arrière des Montée Willy Goergen, Rue du Bois et Rue Belle-Vue, classé en zone HAB-1 NQ, concernant plus particulièrement leurs parcelles inscrites au cadastre de la commune de Steinsel, section B de Steinsel, sous les numéros (1) et (2), au lieu-dit « … » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine KOVELTER, en remplacement de l’huissier de justice Frank SCHAAL, les deux demeurant à Luxembourg, immatriculés près le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, du 14 octobre 2021 portant signification de cette requête d’appel à l’administration communale de Steinsel, représentée par son collège des bourgmestre et échevins en fonctions, établie en sa maison communale à L-7317 Steinsel, 9, rue Paul Eyschen ;

1 Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 9 novembre 2021 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Steinsel ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 11 novembre 2021 par la société anonyme ELVINGER HOSS PRUSSEN, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-1340 Luxembourg, 2, place Winston Churchill, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 209469, représentée aux fins de la présente procédure d’appel par Maître Nathalie PRUM-CARRE, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 décembre 2021 par Maître Serge MARX au nom des appelants ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 5 janvier 2022 par Maître Steve HELMINGER, au nom de l’administration communale de Steinsel ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 janvier 2022 par Maître Nathalie PRUM-CARRE au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont appel ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Serge MARX, Adrien KARIGER, en remplacement de Maître Steve HELMINGER, et Inès GOEMINNE, en remplacement de Maître Nathalie PRUM-CARRE, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 janvier 2022.

Lors de sa séance publique du 21 septembre 2018, le conseil communal de Steinsel, ci-après « le conseil communal », fut saisi par le collège des bourgmestre et échevins de la même commune, ci-après « le collège échevinal », en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », d’un projet de plan d’aménagement général, ci-après « le PAG », pour la commune de Steinsel qu’il mit sur orbite en conséquence à travers un vote positif, de sorte que le collège échevinal put procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi du 19 juillet 2004.

Suite à une erreur procédurale liée à une publication incomplète sur le site internet de la commune de Steinsel de l’ensemble des pièces du PAG, telles que mentionnées à l’article 19 de la loi du 19 juillet 2004, la procédure d’adoption du PAG entamée par la prédite délibération du conseil communal du 21 septembre 2018 fut arrêtée et une nouvelle procédure d’adoption fut entamée par délibération du conseil communal du 16 novembre 2018.

Par courrier daté au 23 novembre 2018, Monsieur (A) et son épouse, Madame (B), ci-après « les époux (A-B) », propriétaires de deux parcelles inscrites au cadastre de la commune de Steinsel, 2section B de Steinsel, sous les numéros (1) et (2), soumirent au collège échevinal leurs objections à l’encontre dudit PAG.

Lors de sa séance publique du 26 avril 2019, le conseil communal décida :

« (…) avec 7 voix pour contre 4 abstentions d’approuver le projet d’aménagement général de la commune de Steinsel, mis en procédure par délibération du conseil communal du 16 novembre 2018, tel que modifié conformément à l’article 14 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 (…) ».

En ce qui concerne l’objection des époux (A-B), le conseil communal décida de suivre la prise de position du collège échevinal adoptée lors de la séance du 19 avril 2019 et formulée comme suit :

« (…) Vu la réclamation n°1 de Mme (B) et de M. (A) ayant comme objet :

Les réclamants s’opposent à la superposition d’une zone d’aménagement différé (ZAD) sur l’ensemble des terrains sis à l’arrière des Montée Willy Goergen, Rue du Bois et Rue Belle-Vue, classé en zone HAB-1 NQ dont font partie les parcelles inscrites au cadastre de la commune de Steinsel, section B de Steinsel sous les numéros … et … (sic), appartenant aux époux (A-B).

Entendu les réclamants, assistés par Me Marx, par le collège des bourgmestre et échevins en date du 04.03.2019 :

L’avocat des réclamants, Me Marx, conteste la superposition d’une ZAD sur la zone d’habitation HAB-1 NQ. D’après lui il n’y a pas de raison pour freiner l’urbanisation de cette zone. Il conteste également que dans la SUP on parle de zone à risque de glissement pour ces terrains.

Le collège des bourgmestre et échevins justifie la superposition d’une ZAD sur l’ensemble de la zone par le fait que seulement un accès à partir de la Montée Willy Goergen serait possible mais aucune lacune n’est actuellement possible en raison des constructions existantes formant un enclos incontournable à la zone. Il faut attendre la création ultérieure d’une entrée dans la zone destinée à être urbanisée. A ce moment seulement il pourra être envisagé de lever la ZAD moyennant la procédure de modification du PAG.

Au vu de la déclivité et de la pente de la zone il est techniquement impossible d’aménager un accès à n’importe quel autre endroit. Par ailleurs l’étude sur les incidences environnementales soulève des risques éventuels de glissement de terrains.

Dans cette optique le collège des bourgmestre et échevins propose de maintenir la ZAD et de rejeter ainsi la réclamation introduite par les époux (A-B) ».

Par courrier du 30 avril 2019, le collège échevinal informa les époux (A-B) du rejet de leurs objections par le conseil communal lors de sa séance du 26 avril 2019, courrier libellé comme suit :

3« (…) Dans le cadre de la refonte du Plan d’Aménagement Général (PAG) de la Commune de Steinsel et en vertu de l’article 13 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, vous aviez remis par écrit au collège des bourgmestre et échevins, des observations et objections dans le délai vous imparti, c’est-à-dire le 10 décembre 2018.

A la suite de vos réclamations, le collège des bourgmestre et échevins vous a convoqué pour présenter vos observations en vue de l’aplanissement des différends. A cette fin, vous vous êtes présentés en date du 04 mars 2019 à 9.00 heures.

Vos réclamations ainsi que les propositions y afférentes du collège des bourgmestre et échevins ont été soumises pour décision au conseil communal dans sa séance du 26 avril 2019.

Le conseil communal, sur conclusions du collège des bourgmestre et échevins dont copie de la délibération y afférente en annexe, a délibéré sur vos réclamations.

Au vu des motifs exposés dans la délibération du conseil échevinal, le conseil communal a décidé unanimement de ne pas prendre en compte vos observations et objections.

Il a donc rejeté vos réclamations.

Il vous est loisible de réclamer contre le vote du conseil communal auprès du Ministre de l’Intérieur dans les quinze jours de la notification de la présente, sous peine de forclusion. (…) ».

Par courrier du 15 mai 2019, les époux (A-B) introduisirent auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après « le ministre », une réclamation à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 26 avril 2019.

Par décision du 23 août 2019, le ministre approuva la délibération du conseil communal du 26 avril 2019 portant adoption du PAG et déclara la réclamation introduite par les époux (A-B) recevable, mais non fondée.

Cette décision ministérielle est libellée comme suit :

« (…) Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve la délibération du conseil communal du 26 avril 2019 portant adoption du projet de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la commune Steinsel, présenté par les autorités communales.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la loi précitée du 19 juillet 2004.

La Commission d’aménagement a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 9 juillet 2019.

4Le conseil communal a donné son avis sur les réclamations introduites auprès du ministre de l’Intérieur en date du 11 juillet 2019.

Conformément à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

Les modifications ainsi apportées à la partie graphique sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Les autorités communales sont tenues de me faire parvenir les schémas directeurs concernés, ainsi que les plans et documents modifiés suite aux réclamations déclarées fondées par la présente décision, pour signature.

Il est statué sur les réclamations émanant de […] Maître Serge MARX au nom et pour le compte de Madame (B) et de Monsieur (A) […] Ad réclamation (B) et (A) […] Les réclamants s’opposent au classement en « zone d’aménagement différé [ZAD] » des parcelles cadastrales nos (1) et (2), sises à Steinsel.

D’abord, il y a lieu de noter la situation excentrique des fonds litigieux par rapport au noyau de Steinsel.

Il a été de la volonté des autorités communales de constituer sur ces fonds une réserve foncière destinée à l’habitat, sans pour autant les urbaniser de suite, ceci principalement pour des raisons de sécurité, étant donné qu’un risque manifeste de glissement du terrain y est établi.

Qui plus est, l’urbanisation des fonds en question s’avère être difficile pour des raisons techniques, notamment en matière d’accès.

Au vu de ces considérations, la réclamation est non fondée. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 18 décembre 2019, les époux (A-B) firent introduire un recours tendant à l’annulation de la délibération du conseil communal du 26 avril 2019 portant adoption du PAG, ainsi que de la décision ministérielle d’approbation afférente du 23 août 2019.

Par jugement du 1er septembre 2021, le tribunal déclara ce recours recevable et non fondé, en débouta les demandeurs avec rejet de leur demande en allocation d’une indemnité de procédure et condamnation aux frais et dépens de l’instance.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 11 octobre 2021, les époux (A-B) ont fait entreprendre le jugement précité du 1er septembre 2021, dont ils sollicitent la réformation dans le sens de voir annuler la délibération communale d’adoption du PAG du 26 avril 2019 et la décision ministérielle d’approbation afférente du 23 août 2019 critiquée et de voir statuer quant aux frais ce qu’en droit il appartiendra.

5 Tant la commune que l’Etat se rapportent à prudence de justice quant à la recevabilité de l’appel.

L’appel ayant été interjeté suivant les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.

La partie étatique dégage à partir de la requête d’appel que les appelants ne réitèrent plus en instance d’appel leur moyen tiré d’une violation des formes destinées à protéger les intérêts privés pris sur base de l’article 15 de la loi du 19 juillet 2004, ni celui tiré d’un vice de compétence au regard des dispositions des articles 13 et 14 de la même loi, ni encore d’un défaut de motivation tiré des dispositions de l’article 18 de la même loi.

La Cour est amenée à partager cette analyse, de sorte qu’en instance d’appel elle reste saisie des questions de légalité interne des délibération communale et décision ministérielle critiquées concernant plus particulièrement le classement en zone superposée [ZAD] des deux parcelles litigieuses des appelants.

A cet égard, les appelants estiment en ordre principal que le jugement dont appel serait à réformer dans la mesure où la mise en place d’une [ZAD] ne serait point justifiée par des considérations urbanistiques répondant à une finalité d’intérêt général.

En premier ordre de subsidiarité, les appelants estiment que la mise en place d’une ZAD ne pourrait pas être justifiée par une prétendue absence d’accès, ni par un prétendu risque de glissement de terrain et d’éboulement. Aux yeux des appelants, l’on serait en présence d’une absence de motifs pouvant justifier le cas échéant la mise en place d’une ZAD à l’endroit, tandis que les questions de l’accès et d’éventuels glissements et éboulements seraient à régler dans le cadre d’un PAP NQ.

En deuxième ordre de subsidiarité, à supposer que la mise en place d’une ZAD puisse être justifiée par une prétendue absence d’accès ou par un prétendu risque de glissement de terrain ou d’éboulement, il y aurait lieu de constater que ni l’absence d’accès, ni le risque de glissement ou d’éboulement invoqués ne seraient vérifiés en fait pour être tout simplement inexistants et se résorber, du moins pour l’absence de l’accès, en erreur de fait.

Finalement, les appelants estiment que la superposition de la zone ZAD litigieuse reviendrait en tout état de cause à les priver de l’exercice de leur droit de propriété protégé par la Constitution en son article 16 et les textes internationaux dont plus particulièrement l’article 1er du 1er Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, ci-après « CEDH ».

En tout état de cause, la superposition de la ZAD et l’inconstructibilité indéfinie qui en résulterait présenteraient une atteinte qui serait disproportionnée à leur droit de propriété et devrait être sanctionnée au regard des dispositions constitutionnelles et de droit international invoquées.

Pour le moins, les délibération communale d’adoption du PAG et décision ministérielle d’approbation afférente encourraient l’annulation sur cette base.

6 En fait, les appelants précisent que leurs deux parcelles d’un seul tenant portant les numéros cadastraux (1) et (2), sises au lieu-dit « … », d’une contenance respectivement de … ares, … centiares et … ares, … centiares, soit au total … ares, … centiares, avaient été classées sous l’ancien PAG en secteur soumis à un plan d’aménagement particulier (PAP).

Dès lors, ces parcelles auraient été directement ouvertes au développement sur base d’un PAP, tandis qu’à travers le classement résultant du PAG refondu actuellement sous analyse, elles feraient partie d’une zone HAB-1 munie de zones superposées PAP NQ et ZAD qui les rendraient inconstructibles pour une durée indéterminée et imprévisible.

L’intégralité de l’argumentaire des appelants tourne dès lors autour de la question du bien-fondé de la ZAD, y compris celle de la conformité du classement afférent par rapport à l’article 16 de la Constitution et l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la CEDH.

Quant au classement des terrains litigieux en ZAD, les premiers juges ont retenu que celui-ci s’est opéré sur des considérations urbanistiques poursuivant un but d’intérêt général, de sorte à être justifié, de manière à ce que le moyen tiré de la violation de l’article 16 de la Constitution et de l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la CEDH était également à rejeter. Ils poursuivent qu’une commune présentant un potentiel de développement important, tel c’est le cas pour la commune de Steinsel, pouvait valablement envisager une urbanisation en procédant d’abord à une viabilisation des terrains se prêtant plus facilement à une mise en valeur en termes de constructibilité, de sorte qu’eu égard aux difficultés de viabilisation tenant aux risques d’éboulement ou de glissement de terrains et au problème général d’accessibilité, un classement en ZAD, en tant que réserve foncière aménageable ultérieurement, ne présentait pas un dépassement de la marge d’appréciation dans le chef des autorités publiques l’ayant décidé.

Les parties publiques demandent la confirmation du jugement dont appel sur base des considérations et développements qui précèdent.

La commune précise que suivant l’article 28 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après « le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (contenu PAG) », les terrains classés en ZAD constitueraient en principe seulement des réserves foncières destinées à être urbanisés à moyen ou long terme.

S’il était vrai que les problèmes rencontrés devaient être solutionnés au niveau du PAP NQ, la problématique devrait néanmoins être rencontrée dès le niveau du PAG et il faudrait, avec précaution, aborder les questions qui se posent. Ici, la superposition de la ZAD ne changerait rien à la constructibilité des terrains en question.

L’Etat, tout en se ralliant aux conclusions communales pour l’essentiel, renvoie également à l’étude préparatoire pour souligner le potentiel de développement de la commune de Steinsel suivant son PAG qui correspondrait à 54,41 hectares pouvant être mis en rapport avec une population totale d’environ 11.396 habitants.

Suivant l’Etat, les motifs à la base de la ZAD ne seraient pas, comme en l’espèce, exclusivement en relation avec la maîtrise de l’évolution démographique de la commune, mais ce 7classement serait motivé avant tout par une urbanisation difficile des parcelles concernées. Pareil motif serait parfaitement légal.

L’Etat demande plus spécifiquement la confirmation du jugement dont appel en ce que les premiers juges ont retenu qu’une urbanisation future des terrains litigieux s’avérerait être laborieuse et justifierait dès lors le classement en ZAD.

Les appelants insistent pour dire que Monsieur SAUBER a accédé à sa retraite et que son projet de vie avait été de viabiliser les terrains litigieux, une fois pensionné.

La Cour constate que les terrains litigieux font partie d’un pâté de terrains situé dans la localité de Steinsel et délimité par la Montée Willy Goergen au Nord, la rue Belle-vue à l’Est, une rue innommée au Sud et la rue du Bois à l’Ouest. Il est vrai que les deux terrains se situent à l’intérieur dudit pâté, sans accès immédiat utile à l’une quelconque des voies publiques précitées.

Néanmoins, sous l’ancien PAG, les parcelles litigieuses ensemble celles situées au Nord et au Sud à l’intérieur du pâté précité, de même qu’une autre parcelle située de l’autre côté de la rue innomée, avaient été classées en secteur soumis à un plan d’aménagement particulier (PAP).

Il y la ieu de noter encore que historiquement parlant, en prenant comme témoin la carte Ferraris de 1777 produite en cause, la localité de Steinsel se trouvait déjà établie le long des voies qui s’appellent aujourd’hui Montée Willy Goergen et rue du Bois formant le cadre Nord Ouest du pâté en question, dont font partie les parcelles litigieuses.

Sachant que l’objectif des autorités communales de Steinsel, vérifié pour l’essentiel, était de ne pas ouvrir plus largement la plage des parcelles constructibles au-delà de ce qu’il est convenu d’appeler sommairement le périmètre d’agglomération, la superposition critiquée d’une ZAD à travers le PAG refondu doit être regardée comme une rétrogradation dans la séquence du phasage devant permettre une constructibilité future, étant donné que l’autre zone superposée d’un PAP NQ doit être regardée dans la continuité directe de la soumission antérieure du secteur concerné à un PAP.

C’est dès lors sous cet angle de vue particulier de l’espèce qu’il convient d’analyser la seule question pertinente de savoir si, en opérant de telle manière la mise en place d’une zone superposée ZAD, les autorités communale et étatique compétentes ont dépassé leur marge d’appréciation.

De manière générale, la mise en place d’une ZAD a pour objectif de ne pas rendre immédiatement constructible un terrain classé en zone constructible, mais de différer à plus ou moins long terme son accession à la constructibilité.

Si l’article 28 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (contenu du PAG) prévoit en son deuxième alinéa que les ZAD constituent en principe des réserves foncières destinées à être urbanisées à moyen ou long terme, ce constat doit être mis en relation avec la volonté des autorités publiques compétentes d’opérer un phasage dans l’accession à la constructibilité des terrains en question, pour lequel le principe d’être constructible est d’ores et déjà retenu dans leur chef au niveau des PAG et PAP pertinents.

8 Pour diriger ce phasage, le conseil communal se voit attribuer comme moyen à travers l’alinéa 3 de l’article 28 en question, le levier important consistant en sa nécessaire décision de lever le statut de la ZAD uniquement à travers une procédure de modification du PAG.

Il est constant qu’eu égard aux documents préparatoires nécessités et plus loin, par essence même, une procédure de modification du PAG est plutôt lourde et onéreuse.

Deux vecteurs balisent en l’occurrence la décision à prendre par la Cour. D’un côté, le classement antérieur des terrains litigieux en secteur soumis à un PAP, sans mise en place d’une zone d’aménagement différé et, de l’autre, le classement actuel de ces mêmes terrains en zone HAB-1 avec deux zones superposées PAP NQ et ZAD, dans un contexte local où globalement la surface des terrains potentiellement constructibles de la commune est resté constant.

L’article 2 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement particulier « quartier existant » et du plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », ci-après « le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (contenu PAP) », énonce en son article 2, paragraphe 1er, que le PAP NQ définit les fonds nécessaires à la viabilisation du projet et continue par préciser que « pour les fonds nécessaires à la viabilisation du projet doivent être fixés :

« 1. Les espaces verts ;

2. les voies de circulation ;

3. les emplacements de stationnement ;

4. l’évacuation des eaux pluviales, y compris les bassins de rétention ;

5. le modelage du terrain ».

Enfin, le même paragraphe 1er de l’article 2 en question prévoit que le PAP NQ peut, « en outre, définir l’aménagement des espaces publics ou ouverts au public, des servitudes écologiques, l’évacuation des eaux usées, ainsi que les réseaux d’approvisionnement ».

D’après le paragraphe 2 du même article 2, c’est le PAP NQ qui « fixe la délimitation et la contenance des lots ou parcelles (…). Il peut en outre définir pour chaque lot, parcelle ou ilôt :

(…) 4. Les servitudes ;

5. les accès (…) ».

Il découle des dispositions réglementaires précitées que c’est bien au niveau du PAP NQ que les questions actuellement litigieuses d’accès, ainsi que de glissement ou d’éboulement de terrains sont appelés à être solutionnées.

Dès lors, dans un contexte de potentiel de terrains constructibles restés essentiellement constant et de continuité intrinsèque entre l’ancien PAP et le PAP NQ mise en place, à défaut d’élément pertinent justifiant que contrairement au principe les terrains litigieux ne soient pas à considérer comme réserves foncières sur base de l’article 28, alinéa 2, du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (contenu PAG), le conseil communal, en cela approuvé par le ministre, a dépassé 9sa marge d’appréciation en imposant au terrain litigieux, au-delà de la zone superposée PAP NQ justifiée, également la zone superposée ZAD.

Dès lors, par réformation du jugement dont appel, la délibération communale d’adoption du PAG et la décision ministérielle d’approbation afférente, déférée au fond, encourent l’annulation dans la seule mesure du classement des parcelles des appelants portant les numéros cadastraux (1) et (2) sous une zone superposée ZAD.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel recevable ;

au fond, le dit justifié ;

réformant, annule la délibération communale d’adoption du PAG du 26 avril 2019 et la décision du ministre de l’Intérieur en portant approbation du 23 août 2019 dans la mesure du classement des parcelles des appelants portant les numéros cadastraux (1) et (2) en zone superposée d’aménagement différé ZAD, le classement restant valable pour le surplus ;

renvoie l’affaire devant le conseil communal de Steinsel en prosécution dans cette mesure ;

fait masse des dépens des deux instances et les impose pour moitié à la commune de Steinsel et pour l’autre moitié à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Ainsi délibéré et jugé par :

Francis DELAPORTE, président, Serge SCHROEDER, premier conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour ….

s. … s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 4 février 2022 Le greffier de la Cour administrative 10


Synthèse
Numéro d'arrêt : 46562C
Date de la décision : 03/02/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2022-02-03;46562c ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award