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06/05/2021 | LUXEMBOURG | N°44968C,44971C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 06 mai 2021, 44968C,44971C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéros 44968C et 44971C du rôle Inscrits le 7 septembre 2020

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Audience publique du 6 mai 2021 Appels formés respectivement par l’administration communale de la Ville de Luxembourg et l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg en présence de l’établissement public FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG contre un jugement du tribunal administratif du 22 juillet 2020 (n° 40567 du rôle) ayant statué sur le recours de Madame A

et consorts, Luxembourg, contre une délibération du conseil communal de la Vil...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéros 44968C et 44971C du rôle Inscrits le 7 septembre 2020

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Audience publique du 6 mai 2021 Appels formés respectivement par l’administration communale de la Ville de Luxembourg et l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg en présence de l’établissement public FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG contre un jugement du tribunal administratif du 22 juillet 2020 (n° 40567 du rôle) ayant statué sur le recours de Madame A et consorts, Luxembourg, contre une délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général (refonte) I.

Vu la requête d'appel inscrite sous le numéro 44968C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 7 septembre 2020 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH S.A., inscrite au barreau de Luxembourg sur la liste V, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le n° B 186.371, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins en fonctions, ayant sa maison communale à L-1648 Luxembourg, 42, Place Guillaume II, Hôtel de Ville, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 22 juillet 2020, ayant déclaré partiellement fondé le recours introduit par les consorts 1. Madame A, demeurant à L-…, 2. Madame B, demeurant à L-…, 3. Madame C, demeurant à L-…, 4. Madame D, demeurant à L-…, 5. Madame E, demeurant à L-…, 6. Madame F, demeurant à L-…, 7. Monsieur et Madame G, demeurant à L-…, 8. Monsieur et Madame H, demeurant à L-…, 9. Monsieur I, demeurant à L-…, 10. Monsieur J, demeurant à L-…, ci-après « Madame A et consorts », 1de sorte à annuler partiellement la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, de même que les décisions d’approbation respectives y relatives du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 et du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 dans la mesure où ces décisions s’appliquent aux parcelles cadastrales n° 435/5133 et n° 472/4944 appartenant à l’établissement de droit public FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG, inscrit au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro J16, représenté par ses organes statutaires en fonction et ayant son siège social à L-1468 Luxembourg, 4, rue Erasme, tout en déboutant les demandeurs pour le surplus ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Laura GEIGER, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, les deux demeurant à Luxembourg, immatriculés auprès du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg du 17 septembre 2020, portant signification de cette requête d’appel à Madame A et consorts, ainsi qu’à l’établissement de droit public FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 octobre 2020 par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame A et consorts ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 octobre 2020 par Maître Patrick KINSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom du FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 16 novembre 2020 par Maître Christian POINT au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 16 décembre 2020 par Maître Georges KRIEGER au nom de Madame A et consorts ;

II.

Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 44971C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 7 septembre 2020 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, déclarant agir tant en ce qui concerne la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur que celle du ministre de l’Environnement, précitées, dirigée contre le jugement précité du 22 juillet 2020 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2020 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH S.A., inscrite à la liste V du tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 186.371, représentée aux fins de la présente procédure d’appel par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 octobre 2020 par Maître Georges KRIEGER au nom de Madame A et consorts ;

2Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 octobre 2020 par Maître Patrick KINSCH au nom du FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 16 novembre 2020 par Maître Albert RODESCH au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 16 décembre 2020 par Maître Georges KRIEGER au nom de Madame A et consorts ;

I. et II. Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont appel ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Gilles DAUPHIN, en remplacement de Maître Christian POINT, Rachel JAZBINSEK, en remplacement de Maître Albert RODESCH, Marie LAHAYE, en remplacement de Maître Patrick KINSCH et Sébastien COUVREUR, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 26 janvier 2021.

Lors de sa séance publique du 13 juin 2016, le conseil communal de la Ville de Luxembourg, ci-après « le conseil communal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », « (…) pour lancer la procédure d’adoption du nouveau projet d’aménagement général (PAG) de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique accompagnées des documents et annexes prescrits par la législation y relative (…) » et « (…) charge[a] le collège des bourgmestre et échevins de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (…) ».

Le 14 juin 2016, le collège des bourgmestre et des échevins de la Ville de Luxembourg, ci-après « le collège échevinal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 30, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004, pour « (…) engager la procédure d’adoption des premiers plans d’aménagement particuliers « quartiers existants » de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique et de les soumettre à la procédure d’adoption en les déposant à l’inspection du public et en les transmettant pour avis à la cellule d’évaluation de la Commission d’aménagement instituée auprès du Ministère de l’Intérieur ainsi qu’au Ministère de l’environnement et à la Direction de la Santé (…) ».

Par courriers respectifs des 13, 15, 16, 18, 19 juillet 2016, Madame B, Monsieur et Madame K, Monsieur J, Monsieur et Madame L, Madame E, Monsieur I, Monsieur et Madame H, Monsieur et Madame G, Madame F et Madame D soumirent au collège échevinal des objections à l’encontre de ces projets d’aménagement général et particuliers.

Lors de sa séance publique du 28 avril 2017, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre du projet d’aménagement général, ci-après « le PAG », et, d’autre part, adopta ledit projet, « (…) tel qu’il a été modifié suite aux réclamations et avis ministériels reçus (…) ».

3Parallèlement et lors de la même séance publique, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre des projets d’aménagement particulier « quartier existant », ci-après le « PAP QE » et, d’autre part, adopta les parties graphiques et la partie écrite de ces derniers, « (…) sous [leur] forme revue et complétée (…) ».

Par plusieurs courriers du 22 mai 2017, Monsieur et Madame L, Madame B, Monsieur et Madame Jean et C, Madame D, Madame E, Madame F, Monsieur et Madame G, Monsieur et Madame H et Monsieur I introduisirent auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après « le ministre », une réclamation à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption du PAG et ayant statué sur les objections dirigées par les administrés à l’encontre de ce même projet.

Par décision du 5 octobre 2017, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 13 juin 2016, de même que celle du 28 avril 2017 portant adoption du PAG, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, en déclarant fondées une partie de celles-ci et en apportant, en conséquence, certaines modifications aux parties graphique et écrite du PAG, les réclamations introduites par les parties précitées ayant, quant à elles, été déclarées partiellement fondées dans les termes suivants :

« (…) Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve les délibérations du conseil communal des 13 juin 2016 et 28 avril 2017 portant adoption de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la Ville de Luxembourg, présenté par les autorités communales.

Conformément à l’article 18 de [la] loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain (dénommée ci-après « Loi ») j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la Loi.

Les modifications ainsi apportées à la partie graphique et à la partie écrite du PAG sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Il est laissé le soin aux autorités communales d’adapter les délimitations des plans d’aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférents et ce conformément aux modifications résultant de la décision ministérielle. Les autorités communales sont ainsi tenues de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique du PAG ainsi que des plans d’aménagement particulier « quartier existant » adaptés en conséquence.

(…) Ad réclamations C (rec …), D (rec …), I (rec …), G (rec …), H (rec …), F (rec …), E (rec …), L (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), … (rec …), B (rec …) Les réclamations contiennent diverses doléances en relation avec l'aménagement futur d'un ensemble de terrains sis à l'arrière-fond des propriétés des réclamants, longeant la rue des Muguets, au Weimershof.

4Premièrement, les réclamants invoquent que la « zone de servitude "urbanisation - coulée verte" CV » prévue à proximité de la rue des Muguets, au Weimershof, ne soit pas indiquée conformément à la légende-type définie par le règlement grand-ducal concernant le plan d'aménagement général d'une commune.

Or, l'article 3 du même règlement dispose que de légères modifications par rapport à la légende-type sont tolérées. Les réclamations sont partant non fondées sur ce point.

Deuxièmement, les réclamants souhaitent également le reclassement en « zone de parc public [PARC] » des fonds couverts par la servitude précitée. Or, ces réclamations sont non fondées.

En effet, il y a lieu de relever que la « zone de servitude "urbanisation - coulée verte" CV » garanti un urbanisme de haute qualité en les lieux litigieux lors de l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier « nouveau quartier ». Ainsi, il ne s'avère guère utile de prévoir une « zone de parc public [PARC] » en ces endroits. Qui plus est, en cas d'un tel classement, ces terrains ne sauraient être exécutés par un plan d'aménagement particulier conformément à l'article 26 et ne sauraient dès lors être cédés au domaine public communal moyennant l'article 34 de la Loi.

Ceci dit, le classement, tel que préconisé par les réclamants risque d'hypothéquer l'aménagement des fonds concernés en tant qu'espace vert public lors de la réalisation dudit plan d'aménagement particulier.

Qui plus est, il y a, dans ce contexte, lieu de préciser que l'envergure de la « coulée verte » litigieuse est largement suffisante, du fait que selon les conclusions dérivées de l'étude environnementale la flore et la faune existantes en ces lieux ont été prises en compte de façon adéquate.

Troisièmement, les réclamations sont non fondées en ce qui concerne les remarques ayant trait à une éventuelle interdépendance entre le degré d'utilisation du sol et la cession de terrains, qui aurait déjà dû, selon les réclamants, été opérée avant la confection du présent PAG.

En effet, force est de constater qu'une cession antérieure de terrains sis en les endroits litigieux n'aurait eu aucun effet sur le degré d'utilisation du sol, et plus spécifiquement sur la densité de logement. Pour ce qui est de la densité de logement, le degré d'utilisation du sol est calculé sur base de la surface du terrain brut, sise à l'intérieur de la délimitation des plans d'aménagement particulier respectifs, et ceci indépendamment des diverses propriétés et de leur appartenance au domaine public ou privé.

Quatrièmement, en ce qui concerne la densité prévue sur le site litigieux, et nonobstant le fait de la proximité immédiate d'un boulevard à grande envergure, tel que le boulevard Kennedy, le coefficient de scellement du sol (CSS) devrait être revu à la baisse, sachant que le coefficient actuellement défini permet un scellement intégral des terrains à bâtir net, ce qui risque fortement d'être en contradiction avec les dispositions de la « zone de servitude "urbanisation - coulée verte" CV ».

Partant, les réclamations sont partiellement fondées et il y a lieu de réduire le coefficient de scellement du sol pour la zone soumise à l'élaboration d'un plan d'aménagement particulier « nouveau quartier », intitulé [PAP NQ-SD: WH-08], à 0,9. (…) ».

5Par décision du même jour, le ministre approuva encore la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des PAP QE, cette décision étant libellée comme suit :

« (…) Par la présente, j 'ai l'honneur de vous informer que j'approuve la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d'aménagement particulier « quartier existant » de la Ville de Luxembourg.

Or, conformément à ma décision d'approbation du projet de la refonte du plan d'aménagement général de la Ville de Luxembourg de ce jour, modifiant les délimitations des plans d'aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférents, le vous prie de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique des plans d'aménagement particulier « quartier existant » adaptées en conséquence.

De manière générale, je tiens encore à soulever que toutes les réclamations introduites à l'encontre du vote des plans d'aménagement particulier « quartier existant » ne sont pas recevables. En effet, le Législateur n'a pas prévu la possibilité d'introduire une réclamation auprès du ministre de l'Intérieur contre le plan d'aménagement particulier « quartier existant » alors qu'il a uniquement prévu dans l'article 16 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain que les réclamants puissent exclusivement porter leurs objections contre le projet d'aménagement général devant le ministre de l'Intérieur. (…) ».

Par décision du 6 octobre 2017, le ministre de l’Environnement arrêta que :« les modifications de la délimitation de la zone verte telles qu’elles découlent du projet d’aménagement général adopté par le conseil communal de la Ville de Luxembourg dans sa séance publique du 28 avril 2017 ainsi que de la décision du 5 octobre 2017 du Ministre de l’Intérieur ayant fait droit aux réclamations listées aux liminaires sont approuvées », que « tout fonds classé à l’intérieur d’une zone destinée à rester libre conformément au règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune reste soumis aux dispositions de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles » et que « les dispositions énoncées aux articles 12 et 17-33 de la prédite loi du 19 janvier 2004 restent applicables indépendamment du statut de classement par rapport au plan d’aménagement général des fonds auxquels elles pourraient se rapporter. Les effets du présent arrêté ne préjugent pas de la décision à rendre par le Ministre de l’Environnement en vertu des articles précités ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 5 janvier 2018, Madame A et consorts, firent introduire un recours tendant à l’annulation de (i) « la décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 adoptée en application de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, portant « mise sur orbite » du projet de refonte globale du Plan d’Aménagement Général de la Ville de Luxembourg », (ii) de « la décision du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du projet de refonte globale du Plan d’Aménagement Général de la Ville de Luxembourg », de (iii) « la décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg » et (iv) de « la décision de la ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 approuvant les décisions précitées de la Ville de Luxembourg ».

6Par jugement du 22 juillet 2020 (n° 40567 du rôle), le tribunal a déclaré le recours en annulation irrecevable dans le chef de Monsieur J en ce qu’il vise la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 et la décision du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017, de même qu’il le déclara irrecevable dans sa globalité en tant que dirigé contre la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 pour, pour le surplus, le recevoir en la forme et, au fond le déclarer partiellement justifié, de sorte à annuler la délibération du conseil communal, précitée du 28 avril 2017, de même que les décisions d’approbation afférentes du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 et du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 dans l’unique mesure où ces décisions s’appliquent aux parcelles n° 435/5133 et 472/4944 appartenant au FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG, ci-après « le FONDS DU KIRCHBERG », le recours ayant été déclaré non fondé pour le surplus avec rejet des demandes en allocation d’une indemnité de procédure proposées respectivement par les demandeurs et l’Etat et condamnation de l’administration communale de la Ville de Luxembourg, de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et du FONDS DU KIRCHBERG aux frais et dépens.

Par deux requêtes d’appel respectivement déposées au greffe de la Cour administrative le 7 septembre 2020 sous les numéros du rôle 44968C et 44971C, l’administration communale de la Ville de Luxembourg et l’Etat, déclarant spécialement agir en ce qui concerne à la fois les décisions d’approbation critiquées du ministre de l’Intérieur et du ministre de l’Environnement, ont fait introduire deux appels dirigés contre le jugement précité du 22 juillet 2020, à travers lesquels ils demandent à la Cour, en substance, de rejeter comme étant non fondé le recours initial de Madame A et consorts avec toutes les conséquences de droit.

Les deux appels étant dirigés contre le même jugement, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de les joindre pour les toiser par un seul et même arrêt.

Les deux appels sont recevables pour avoir été interjetés dans le délai de la loi – compte tenu de la notification du jugement dont appel aux mandataires des deux parties appelantes le 28 juillet 2020, le délai d’appel a expiré le dimanche 6 septembre 2020 et se trouva reporté au lundi 7 septembre 2020 – de même que suivant les formes prévues par la loi.

Liminairement, il convient de préciser que dans la mesure où les intimés Madame A et consorts sollicitent la confirmation pure et simple du jugement dont appel, les questions préalables tenant à l’irrecevabilité du recours initial dans le chef de Monsieur J, de même qu’en ce qui concerne la délibération de mise sur orbite du 13 juin 2016 ne sont plus remises en cause par aucune partie et sont à déclarer comme ayant été définitivement toisées par le tribunal.

Les deux appels se dressent contre le jugement querellé en ce qu’il a annulé la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption du PAG, de même que les décisions d’approbation du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 et du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 dans la mesure où elles s’appliquent aux deux parcelles querellées n° 435/5133 et 472/4944 appartenant au FONDS DU KIRCHBERG.

Cette annulation se trouve essentiellement justifiée par les considérants suivants dégagées par le tribunal dans son jugement :

« Ainsi, ledit rapport [Umweltherheblichkeitsprüfung W de juillet 2013, phase 1 de la SUP] reste muet sur la présence d’une quelconque espèce animale et plus particulièrement sur la présence de chiroptères et n’évoque aucune raison pour laquelle aucune analyse à ce titre n’a été entamée. Les parties défenderesses ne fournissent aucune explication à cet égard, mais 7l’administration communale soutient qu’à supposer que la Umwelterheblichkeitsprüfung ait été lacunaire, la consultation publique menée aurais permis de révéler cette lacune et aurait abouti à l’établissement d’une enquête supplémentaire dont les conclusions ne remettent pas en cause le fait que le site peut être urbanisé, en soulignant que les mesures compensatoires identifiées seraient prises en compte dans la planification ultérieure.

Or, si le tribunal pourrait, le cas échéant, admettre la possibilité par le bureau d’études en charge de fournir des informations complémentaires isolées destinées à expliquer des données contenues dans la Umwelterheblichkeitsprüfung, il en va cependant différemment des informations venant combler des lacunes importantes dudit document, tel que c’est le cas en l’espèce où la présence d’animaux sur le site n’a tout simplement pas été recherchée, hypothèse dans laquelle ces informations doivent prendre la forme d’une évaluation sommaire des incidences sur l'environnement complémentaire, soumise aux mêmes garanties procédurales et notamment, d’enquête publique1. Il est constant en cause que le rapport d’Öko-Log Freilandforschung de juin 2017, ordonné par V n’a pas fait l’objet d’une telle publication, de sorte que la procédure est viciée à cet égard.

Force est dès lors au tribunal de conclure que, d’un côté, les informations et documents dont disposait le conseil communal au moment de la prise de la décision déférée n’étaient pas complets – étant donné qu’ils n’ont notamment pas révélé la présence de la chauve-souris du type du Grand Murin sur les parcelles litigieuses – et que partant ils ne lui permettaient pas d’évaluer en connaissance de cause les effets du PAG sur les habitats de certaines espèces animales protégées par la loi du 19 janvier 2004 et, d’un autre côté, en ne soumettant pas le rapport d’Öko-Log Freilandforschung de juin 2017, qui n’est pas de nature à suppléer aux carences de la Umwelterheblichkeitsprüfung de 2013, à l’enquête publique, la procédure d’élaboration de l’étude environnementale a été viciée.

Dans la mesure où, tel que retenu ci-avant, la procédure d’élaboration d’une étude environnementale s’inscrit nécessairement dans le cadre de la procédure d’adoption d’un PAG, de sorte qu’un vice constaté au niveau de la procédure d’élaboration de l’étude environnementale peut affecter la légalité de la procédure d’adoption du PAG2et, dans la mesure où en l’espèce il a été retenu que la procédure d’élaboration de l’étude environnementale est viciée et que, par ailleurs, ce vice n’est pas susceptible d’être réparé au niveau contentieux, le tribunal est amené à conclure que les décisions déférées relatives à l’adoption de la refonte du PAG de la Ville de Luxembourg sont affectées d’un vice de procédure et encourent l’annulation, sans qu’il n’y ait lieu d’analyser les autres moyens avancés par les demandeurs, cet examen devenant surabondant.

Etant donné que l’illégalité ainsi constatée ne concerne que le site litigieux, les décisions d’adoption et d’approbation prises respectivement par le conseil communal et par le ministre n’encourent l’annulation qu’en ce qui concerne le classement des parcelles visées, conformément à la maxime « potius ut valeat quam ut pereat », en vertu de laquelle il y a lieu de faire valoir pour autant que possible les dispositions réglementaires prises plutôt que de les voir périr ».

C’est essentiellement contre cet argumentaire que se positionnent les deux parties appelantes.

1 Dans ce sens : Conseil d’Etat belge, 28 mars 2018, n° 241141 du rôle. Les lacunes de l’étude d’incidences ayant fait l’objet d’un avis complémentaire concernaient « l’historicité de la forêt, les bryophytes et les lichens, ainsi que l’empierrement réalisé autour des éoliennes », qui selon le Conseil d’Etat, ne présentent pas de caractère important, qui aurait nécessité l’organisation d’une nouvelle enquête publique à la suite de cet avis.

2 Trib.adm, 30 juillet 2014, n° 33181 du rôle, confirmé par Cour adm, 11 décembre 2014, n° 35167C du rôle, Pas.

adm. 2018, V° Urbanisme, n° 192.

8La Ville conclut à titre principal qu’une étude environnementale n’était pas requise pour les terrains litigieux, étant entendu que déjà sous l’ancien plan JOLY, ils s’étaient trouvés à l’intérieur du périmètre d’agglomération. Elle se réfère en cela à trois arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018 (nos 40403C, 40379C et 40380C) rendus dans le cadre de la refonte du PAG de la commune de Käerjeng, retenant en substance qu’en l’absence de modification de la délimitation du périmètre d’agglomération, aucune SUP n’avait en définitive dû être faite pour les terrains y litigieux.

Pareille étude n’aurait point été obligatoire en ce que la SUP n’est pas de nature à diriger le classement de terrains maintenus finalement dans le périmètre d’agglomération en ce qu’ils s’y sont trouvés d’ores et déjà lors de l’ancien PAG.

La Ville expose que les terrains litigieux du site Kennedy-Sud sont couverts par le schéma directeur SD WH-08 et se trouvaient majoritairement classés sous l’empire du plan JOLY comme « terrains à études – ensembles à restructurer », tandis que seulement une petite partie, située le long de la rue des Coquelicots, était classée en zone d’habitation 2.

Par ailleurs, la partie non litigieuse du site Kennedy-Sud, couverte par le schéma directeur SD WH-07, était classée en « zone d’habitation 2 » et en « terrains réservés à destination particulière (zone mixte du plateau de Kirchberg) ». Dès lors, le site aurait fait partie du périmètre d’agglomération, sinon, suivant la terminologie plus précise de la loi du 19 juillet 2004, aurait constitué une zone urbanisée ou destinée à être urbanisée.

Le projet de refonte du PAG aurait gardé intact ce statut urbanisable du site Kennedy-Sud.

En suivant la jurisprudence citée, la rédaction d’un rapport sur les incidences environnementales portant sur le site Kennedy-Sud n’aurait pas été légalement requis. Pareil rapport ayant été réalisé, d’éventuelles imperfections afférentes, à les supposer établies, - ce que la Ville conteste -, ne sauraient dès lors avoir une incidence sur la légalité des décisions communale et ministérielle portant respectivement adoption et approbation du PAG concernant le site litigieux Kennedy-Sud.

La Ville constate que le jugement dont appel prend le contre-pied des enseignements des arrêts de la Cour administrative du 3 mai 2018 en retenant qu’une évaluation environnementale stratégique (SUP) portant sur un projet de refonte du PAG devrait a priori porter sur l’intégralité du territoire communal.

La Ville déclare ne pas pouvoir partager cette approche.

Bien que s’agissant de la « refonte » du PAG, ce nouveau PAG n’interviendrait pas dans un vide juridique ou urbanistique, mais resterait influencé à sa base par le PAG précédent, le plan JOLY, voire encore par des plans plus anciens.

En aucune manière une SUP ne saurait dès lors viser l’intégralité du territoire communal, mais tout au plus porter que sur des terrains qui verront, par la mise en œuvre du projet de plan sous examen, leur classement urbanistique changer. Uniquement les modifications à apporter à la situation réglementaire préexistante seraient donc à analyser. Cependant, en l’occurrence, l’on serait en présence de terrains d’ores et déjà constructibles dont le classement serait maintenu.

9Si le jugement dont appel motivait sa position par le fait que l’absence de SUP sur de telles parcelles reviendrait à dire que tout élément naturel situé à l’intérieur du périmètre d’agglomération ne mériterait pas de protection, la Ville oppose à cela que d’après la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles relayée par la loi du 18 juillet 2018, concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après « la loi du 18 juillet 2018 », les éléments naturels protégés, tels que les biotopes, habitats et espaces protégés découverts au cours de la procédure d’adoption de la refonte du PAG de la Ville resteraient couverts, respectivement par les articles 17 et suivants de la loi ancienne et par l’article 17 et le chapitre V de la loi du 18 juillet 2018.

D’après la Ville, les lois respectives des 19 janvier 2004 et 18 juillet 2018 s’appliqueraient indépendamment selon que la faune et la flore protégées se trouvent situées sur des terrains classés en zone verte ou sur des terrains destinés à être urbanisés et classés en zone urbanisée ou destinée à l’être. Cette protection s’appliquerait même indépendamment de la description de la faune et de la flore protégées dans le cadre de l’évaluation environnementale. La SUP ne serait pas de nature à influer dans un sens ou dans un autre sur cette protection et l’absence de SUP pour des terrains classés à l’intérieur du périmètre d’agglomération n’aurait donc pas d’impact sur ladite protection.

A titre subsidiaire, la Ville estime que le rapport sur les incidences environnementales ne serait point lacunaire. De manière générale, la Ville estime qu’en application de toutes les contraintes afférentes à la mise en place d’une SUP et compte tenu du caractère évolutif de la nature, il serait illusoire de penser qu’un rapport sur les incidences environnementales puisse être « complet » et « actuel ». Un tel rapport ne pourrait dès lors être considéré que comme une première étape dans un processus d’élaboration et de mise en œuvre d’un PAG.

Appliqué au cas particulier de l’espèce, la Ville estime que le rapport du bureau d’études W de juillet 2013 ne se référait certes pas à une espèce animale en particulier, mais aurait bien analysé les effets éventuels sur la faune, la flore et la diversité biologique, sinon il n’aurait pas pu inclure dans sa conclusion la « Pflanzen/Tier/biologische Vielfalt », tel qu’il l’a fait.

En outre, la « Studie zur Bestimmung des Kompensationsbedarf » jointe à la « Umwelterheblichkeitsprüfung » contiendrait une description très détaillée des biotopes présents à l’endroit. Selon la Ville, une démarcation nette entre protection des biotopes et protection d’espèces serait illusoire. Des biotypes seraient les aires de vie de la faune et de la flore. Afin de protéger une espèce animale, il conviendrait de protéger en tout premier lieu son aire de vie.

La Ville met en cause l’affirmation suivant laquelle des chiroptères et plus particulièrement des espèces faisant partie de la famille des Grands Murins auraient leurs espaces vitaux à l’endroit.

En tout cas, le site litigieux ne saurait être qualifié d’habitat du Grand Murin au sens légal du terme.

Par ailleurs, le PAG n’aurait comme fonction que de diviser le territoire communal en différentes zones et en arrêter l’affectation. La mise en œuvre du PAG nécessiterait dès lors en l’espèce l’élaboration préalable d’un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », ci-après « PAP NQ », en l’absence duquel l’affectation donnée par le PAG n’aurait pas d’effet concret sur le terrain. Ce PAP NQ serait dès lors autrement plus précis que le PAG et déterminerait des éléments telles que les localisations des futures constructions qui ne seraient même pas appréhendées au stade du présent PAG. Ce ne serait dès lors qu’au niveau du PAP NQ que l’incidence concrète de la présence d’une espèce animale protégée serait prise en compte.

10Le ministre de l’Environnement pourrait encore exiger de toute façon d’autres études préalablement à la délivrance des autorisations requises par la loi du 18 juillet 2018, étant entendu que l’on serait en présence d’un processus allant du général au particulier.

De toute manière, ce serait à tort que le jugement d’appel aurait conclu à une non-conformité de la SUP par rapport à la loi du 22 mai 2008.

A titre encore plus subsidiaire, relativement aux conséquences, il y aurait lieu de s’interroger sur l’effet utile de l’annulation prononcée par le jugement dont appel sur base du constat du contenu prétendument lacunaire de la « Umwelterheblichkeitsprüfung » de 2013. Une étude qui aurait été établie entre-temps et le processus d’évaluation environnemental auraient dès lors permis de combler la lacune alléguée. Cette étude sur les chiroptères de 2017 serait connue de toutes les autorités publiques intéressées et elle aurait été communiquée par la partie appelante en première instance aux parties intimées. Celles-ci auraient eu la possibilité de prendre connaissance de l’étude et d’y prendre position dans le mémoire en réplique.

Les parties intimées auraient à nouveau insisté sur le caractère lacunaire rémanent de l’étude environnementale, sans toutefois proposer des développements circonstanciés afférents. Si dès lors le jugement dont appel était confirmé, un nouveau rapport sur les incidences environnementales et de nouvelles enquêtes publiques devraient être établis. La Ville voit mal quelles nouvelles informations un tel rapport et une telle enquête pourraient fournir aux autorités publiques et aux parties intimées.

De toute manière, sous réserve des mesures compensatoires à mettre en œuvre, dont la définition de détail dépend des autorités compétentes de l’Etat, une urbanisation du site Kennedy Sud resterait compatible avec la préservation du Grand Murin et des autres chiroptères.

En ce que le jugement attaqué ne semblerait consacrer aucune critique précise quant à l’approbation du PAG par le ministre de l’Environnement et vu que celle-ci ne concernerait que les zones précédemment classées en zone verte, dont l’affectation a été modifiée, l’annulation de cette décision ministérielle du 6 octobre 2017 ne serait en tout état de cause pas justifiée.

En dernier ordre de subsidiarité, la Ville demande, pour le cas de confirmation du jugement dont appel quant au principe d’annulation de la délibération communale et de la décision ministérielle d’approbation utilement querellées, de limiter celle-ci non pas aux parcelles numéros 435/5133 et 472/4944 dans leur entièreté, mais uniquement en ce qu’elles sont classées en zone [HAB-2] avec une zone superposée « zone soumise à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » (PAP NQ) » y visée par le schéma directeur WH-08, tout en laissant subsister les délibération et décision attaquées pour le surplus.

L’Etat conclut globalement dans le même sens que la Ville. Il insiste sur les dispositions de l’article 4, alinéa 3 et 6, alinéa 1er, de la loi du 22 mai 2008 en ce que seules les informations pouvant être raisonnablement exigées doivent figurer au niveau de la SUP. Sur cette toile de fond, il n’aurait pas été permis aux premiers juges de conclure utilement à l’existence d’un rapport lacunaire alors que le Grand Murin n’aurait pas été détecté en 2013. Au contraire, exiger un degré absolu de précision et d’exhaustivité dans la SUP serait en l’espèce disproportionné en ce que l’environnement serait un sujet intrinsèquement complexe et évolutif et que la SUP se situerait en l’occurrence au stade du PAG qui serait à regarder comme étant un élément de planification général et purement administratif sans aucun effet concret sur le terrain.

11Suivant l’Etat, la SUP serait un outil préparatoire à vocation stratégique et dont le degré de précision exigé pourrait être variable en fonction du degré de précision et du niveau hiérarchique du plan, désigné en allemand par « Tiefenschärfe ».

En s’appuyant sur l’article 4, alinéa 3, de la loi du 22 mai 2008, l’Etat estime que la précision exigée par les premiers juges ne saurait dès lors être interprétée de manière absolue, mais devrait être comprise dans la logique du principe du raisonnable et de l’effet utile, de manière à permettre la réalisation d’études complémentaires, sous réserve de garantir l’efficacité de la protection de l’environnement. Ce serait dès lors pour des raisons légitimes que la réalisation d’études complémentaires pourrait être reléguée à un autre niveau, sans retarder l’adoption du PAG.

L’Etat reproche encore aux premiers juges d’avoir fait un amalgame entre l’habitat et la zone de chasse concernant la présence d’un Grand Murin sur les parcelles litigeuses. Procéder à l’annulation des délibération communale d’adoption et décisions ministérielles d’approbation du PAG sur ce fondement serait disproportionné, étant donné que les objectifs de la loi du 22 mai 2008 seraient en l’espèce pleinement atteints, étant donné qu’une étude sur les chiroptères aurait été effectuée et irait orienter l’urbanisation des parcelles litigieuses aux stades procéduraux à venir. Cette étude ne serait d’ailleurs pas autrement critiquée par les parties requérantes au recours en annulation, lesquelles n’auraient à ce stade d’ailleurs toujours pas dénoncé un quelconque lien entre le PAG adopté et approuvé et une prétendue menace de l’habitat du Grand Murin.

En tout état de cause, tout comme la Ville, l’Etat conclut au caractère non justifié de l’annulation de la décision d’approbation du ministre de l’Environnement.

Le FONDS DU KIRCHBERG déclare avoir examiné la requête d’appel de la Ville et celle de l’Etat. Il estime que la problématique soulevée dans ces requêtes n’a pas trait au fond du classement des parcelles en question lui appartenant, de même qu’elle n’aurait pas trait à un comportement quelconque adopté par lui dans le contexte de la procédure d’adoption du PAG refondu de la Ville.

Si les moyens d’appel critiquaient la motivation du jugement de première instance ayant soulevé une prétendue illégalité externe de la procédure d’adoption dudit PAG, cette procédure relèverait d’abord de la Ville, dont le contrôle relèverait par la suite du ministre.

Le FONDS DU KIRCHBERG déclare se rallier à la critique de la Ville et à celle de l’Etat et invite la Cour à faire droit aux appels et à réformer le jugement dont appel dans le sens y indiqué.

Les parties intimées A et consorts concluent en substance à la confirmation du jugement dont appel, essentiellement à partir des motifs y déployés.

La Cour constate et relève que dans le cadre des deux appels combinés, les discussions tournent pour l’essentiel autour de la question de savoir si le projet de refonte du PAG de la Ville de Luxembourg requérait ou non la réalisation d’une SUP, plus particulièrement sous l’aspect des deux parcelles actuellement litigieuses, et dans l’affirmative quel devait en être le contenu concernant plus particulièrement la présence d’animaux sauvages, protégés pour l’essentiel.

12La problématique afférente est légalement cadrée par l’article 2 de la loi du 22 mai 2008 qui dispose comme suit :

« 1. Les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 sont soumis préalablement à leur adoption à une évaluation environnementale.

2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes :

a) qui sont élaborés pour les secteurs de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l’énergie, de l’industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l’eau, des télécommunications, du tourisme, de l’aménagement du territoire urbain et rural ou de l’affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive modifiée 85/337/CEE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement pourra être autorisée à l’avenir, ou b) pour lesquels, étant donné les incidences qu’ils sont susceptibles d’avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu de l’article 12 de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles.

3. Les plans et programmes visés au paragraphe 2 qui déterminent l’utilisation de petites zones au niveau local et des modifications mineures des plans et programmes visés au paragraphe 2 ne sont obligatoirement soumis à une évaluation environnementale que lorsque l’autorité responsable du plan ou programme estime, le ministre entendu en son avis, qu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement. (…) ».

Il convient de dégager de l’article 2, paragraphes 1) et 2), point b), de la loi du 22 mai 2008 que toute partie du territoire luxembourgeois qui risque de se voir impacter par la mise en œuvre d’un projet de plan ou de programme est soumise à l’obligation d’une SUP, à réaliser préalablement à son adoption.

En l’espèce, il s’agit d’examiner concrètement si le projet de refonte du PAG de la Ville de Luxembourg, c’est-à-dire le projet de plan relatif à la réorganisation de l’aménagement de son territoire communal, requérait la réalisation d’une SUP.

Liminairement, c’est à tort que les parties appelantes font en substance soutenir que la réponse à apporter à cette question serait conditionnée par la réponse à apporter à la question de savoir si le projet de plan en question apporte ou non une modification à la délimitation du périmètre d’agglomération et partant à la zone verte et, plus particulièrement, à propos d’un terrain qui est déjà classé à l’intérieur du périmètre d’agglomération, un projet de refonte du plan d’aménagement en question, qui ne fait que confirmer le caractère urbanisable dudit terrain, serait dispensé ipso facto et ipso jure de la réalisation d’une SUP.

En effet, sans préjudice de ce qu’un simple reclassement d’un terrain à l’intérieur du périmètre d’agglomération ou la révision des modalités d’urbanisation de pareil terrain constitue a priori un indice majeur militant en direction d’une absence d’incidence environnementale, le défaut de modification de la délimitation du périmètre d’agglomération ne constitue pas le critère distinctif décisif en la matière, la vision de l’examen requis dans le cadre de l’article 2, paragraphes 1) et 2), point b), de la loi du 22 mai 2008 devant être plus large et englober l’ensemble du potentiel d’impact environnemental concret du projet en question.

13Or, en l’espèce, sous ce spectre élargi, il appert qu’à travers une précision des conditions et modalités d’urbanisation du site, le projet de refonte du PAG de la Ville de Luxembourg est ostensiblement de nature à engendrer des conséquences environnementales sensibles pour ledit site.

Ce constat s’impose en premier lieu au regard de la situation factuelle particulière patente au niveau des deux parcelles litigieuses faisant partie du plateau du Kirchberg. Il est un fait avéré que les terrains actuellement litigieux servaient, il y a de nombreuses décennies, avant l’expropriation de leurs propriétaires antérieurs, à des fins maraîchères et ont été laissés depuis sinon en jachère du moins à l’abandon relatif, de sorte que la nature a pu, du moins en partie, reprendre du terrain. C’est dans cette situation particulière que s’inscrit la présence à l’endroit, actuellement vérifiée au dossier de chiroptères dont au moins trois variétés ont été décrites par rapport à ce secteur dans le rapport de juin 2017, confectionné ex post par rapport à la délibération communale d’adoption du PAG critiquée du 28 avril 2017 suivant l’« Abschlussbericht » de la « Oeko-Log Freilandforschung ». Il est constant en cause que le site en question, d’une étendue certaine de plusieurs hectares s’étendant des abords de l’avenue J.F. Kennedy jusqu’aux fins des jardins de la rue des Muguets n’a jamais été urbanisé et est resté en quelque sorte à l’état vague, tandis que la nature a pu, en partie, regagner du terrain.

Or, cette situation factuelle avérée in situ appert manifestement de nature à engendrer un risque qu’un projet d’aménagement en vue de la construction et de l’aménagement d’immeubles résidentiels appelés à recueillir plusieurs centaines d’unités de logement nouvelles y engendrera concrètement des incidences environnementales notables.

Il s’y ajoute que pour le site en question, de facto non urbanisé, force est encore de constater qu’en dépit d’un maintien du site à l’intérieur du périmètre d’agglomération, le projet de planification, de par le fait d’emporter une augmentation du potentiel constructible sur ledit site, est de ce fait encore de nature à engendrer des conséquences nouvelles sur l’environnement.

Ceci dit, il est patent qu’il ne saurait être question d’un projet relevant du champ d’application des possibilités dérogatoires prévues par l’article 2, paragraphe 3), de la loi du 22 mai 2008 visant les « petites zones au niveau local » ou les « modifications mineures » d’un plan ou programme.

Ainsi, non seulement, sur le plan juridique, l’impact du projet de refonte sous examen, de par l’augmentation du potentiel constructible, est loin d’être marginal, mais encore et surtout, sur le plan factuel, la mise en œuvre du projet de développement urbain de cette partie du site Kennedy-Sud appert indéniablement caractériser un risque d’impact concret sensible sur l’environnement existant.

De par l’effet combiné de ces deux constats, la réalisation d’une SUP était incontournable.

La Cour est dès lors amenée à rejoindre la conclusion intérimaire des premiers juges suivant laquelle, dans la mesure où le projet de refonte globale du PAG devait faire l’objet d’une évaluation environnementale, un rapport sur les incidences environnementales identifiant, décrivant et évaluant les incidences notables probables de la mise en œuvre du plan ou du programme, ainsi que les solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d’application géographique du plan ou de programme devait être élaboré.

Par rapport aux terrains litigieux, il est constant en cause qu’un projet de modification ponctuelle du plan JOLY en 2013 avait été lancé sans que les parcelles litigieuses aient été 14intégrées dans le rapport sur les incidences environnementales. Ce projet a été abandonné encore qu’en 2013 une « Umwelterheblichkeitsprüfung » ait été réalisée par la société W qui, par rapport au reclassement projeté, avait conclu à l’absence d’incidences notables sur l’environnement. Il est vrai encore que par courrier du 10 juillet 2014 à la Ville de Luxembourg, le ministre de l’Environnement avait, dans le contexte de la modification ponctuelle de la partie graphique du plan JOLY concernant les parcelles litigieuses, conclu à l’absence d’incidences notables sur l’environnement dans le sens de la loi du 22 mai 2008, de sorte à conclure à la non-nécessité d’une analyse plus approfondie dans le cadre d’un rapport sur les incidences environnementales.

Il est constant en cause également que la « Umwelterheblichkeitsprüfung » de l’V confectionnée dans le cadre de la refonte du PAG et publiée le 20 juin 2016 s’est appuyée, dans le contexte précis des parcelles litigieuses et de leurs environs, sur les travaux effectués en 2013 par le bureau W dans le contexte de la modification ponctuelle du PAG alors entamée.

Au-delà de la question de savoir à quel point les parcelles litigieuses ont été incluses dans l’analyse concrète de l’V dans le cadre de la SUP ou non, le constat reste constant en ce que la présence d’une espèce animale sauvage, protégée pour l’essentiel, celle des chiroptères, n’a tout simplement pas été relevée, de sorte que des incidences notables sur l’environnement en rapport avec cette espèce animale n’ont pas pu être valablement établies, pour le moins avant la prise de la délibération communale litigieuse ayant adopté le PAG refondu.

Il est vrai encore que suite aux objections adressées à la Ville après la mise sur orbite du projet de PAG le 13 juin 2016, le rapport de Oeko-Log-Freilandforschung de juin 2017 atteste la présence de pareils chiroptères en distinguant avec précision trois espèces présentes sur le site, essentiellement la « Zwergfledermaus (pipistrellus pipistrellus) », épisodiquement le « grosser Abendsegler (nyctalus noctula) » et à deux reprises vérifiées le Grand Murin « grosses Mausohr (myotis myotis) ». Ces animaux auraient fait des terrains litigieux leur aire de chasse et des arbustes et plantes hautes y présentes leurs postes d’orientation.

Il découle de tous ces constats qu’à la date de la mise sur orbite du projet de PAG et, plus tard, lors de son adoption par le conseil communal, les rapports soumis n’avaient pas fait l’inventaire concernant une composante environnementale existante d’importance. Cette carence emporte également une impossibilité de dépeindre valablement la valeur globale du site constitué par les parcelles en question.

En conséquence, dès lors que parmi l’ensemble des mesures de l’évaluation environnementale, le rapport sur les incidences environnementales constitue la pierre angulaire de l’édifice d’appréciation et dès lors qu’il se révèle, comme c’est le cas en l’espèce, lacunaire et incomplet et que, de fait, il n’a pas non plus été complété avant l’adoption du nouveau PAG, il ne pouvait et ne peut pas utilement orienter le développement du terrain en question et la procédure se trouve nécessairement affectée d’un vice qui est loin d’être véniel.

En effet, la détermination de la stratégie de développement, c’est-à-dire de la ventilation entre les classements en zones destinées à rester libres de constructions et en zones à urbaniser et les affectation et emploi de chaque parcelle du territoire communal, pour être éclairée, présuppose une connaissance des éventuelles incidences négatives de la mise en œuvre des affectations et classements projetés sur l’environnement, en l’occurrence sur le site litigieux faisant partie de l’aréal Kennedy-Sud.

15L’équilibre entre une utilisation rationnelle du sol et de l’espace urbain et rural, d’un côté, et la protection de l’environnement naturel et du paysage, de l’autre côté, ne saurait se faire autrement.

Il s’ensuit que le défaut de prise en considération de l’existence d’espèces animales protégées, s’y trouvant de façon vérifiée, a inévitablement engendré un bilan écologique insuffisant et la légalité de la procédure d’élaboration du projet de refonte sous examen et, in fine, celle de la décision de classement y afférente s’en trouvent affectées.

La Cour ne saurait rejoindre les parties appelantes en ce qu’elles font valoir que l’exigence des études manquantes verserait dans le déraisonnable. En effet, la réalisation des études ex post démontre à elle seule qu’il s’agit d’informations qui peuvent être raisonnablement exigées, compte tenu des connaissances et des méthodes d’évaluation existantes.

Quant à la possibilité de voir compléter une SUP au cours de la phase d’exécution du PAG, notamment au niveau de la réalisation des PAP, telle qu’elle a encore été mise en balance par les parties appelantes, si cette vision des choses n’est pas fondamentalement erronée et que, même au-delà de ce que dans un ensemble de planification hiérarchisé, des données établies utilement en amont de la procédure, à condition de rester pertinentes, peuvent être réutilisées à un stade ultérieur, il est aussi, en principe, possible que ponctuellement, une SUP, réalisée au stade de l’élaboration du PAG, puisse être précisée voire complétée dans le cadre de l'adoption de son plan hiérarchiquement inférieur et de la concrétisation du projet, encore faut-il qu’à la base réside une étude globale et raisonnablement complète au niveau des points où la mise en œuvre du PAG est susceptible de causer un préjudice à l’environnement.

Or, en l’espèce, le problème réside à ce niveau fondamental, avec des rapports de 2013 et 2016 qui manquent de la profondeur requise avec notamment le défaut de prise en considération de la présence vérifiée de différentes espèces protégées de la famille des chiroptères.

Si la Ville de Luxembourg entend objecter que face à une nature en constante évolution, un rapport sur les incidences environnementales, simple « photographie de la situation de la faune et de la flore existante à un moment « t » », ne saurait jamais être complet, l’on ne comprend pas comment elle a pu ou peut considérer que les études de 2013 et 2016 seraient suffisantes malgré leur caractère déficitaire actuellement vérifié.

Il reste qu’un bilan complet de la valeur globale du site faisant partie de l’aréal Kennedy-Sud et comprenant les terrains litigieux aurait pu modifier la stratégie et les décisions du conseil communal s’il l’avait connu au moment de la fixation des grandes lignes de l'urbanisation et de la délimitation des différentes zones en date du 28 avril 2017.

En tout cas, dans les circonstances de la cause, il ne saurait être question d’un report de la réalisation d’études requises avant l’adoption du PAG refondu de la Ville de Luxembourg au niveau subalterne du PAP, une décision à prendre par le conseil communal en connaissance de cause étant manifestement à ce prix. Admettre le contraire serait admettre que la fixation des grandes lignes d'urbanisation et d’utilisation du sol, incluant la détermination et la délimitation des zones, puisse être reléguée au niveau subalterne de l’exécution du PAG, alors qu’elle relève de façon basique du niveau du PAG lui-même.

A cette considération primaire s’ajoutent les nécessités de la participation utile du public au processus décisionnel.

16En effet, si c’est à juste titre que la Ville de Luxembourg soutient que la prise en considération des incidences environnementales ne s'arrête pas avec la rédaction d'un rapport sur les incidences environnementales et que tout au cours de la procédure, des mesures additionnelles peuvent se révéler nécessaires et venir compléter le tableau de mesures initiales, il n’en reste pas moins que l’évaluation environnementale visée à l’article 2 de la loi du 22 mai 2008 doit, en vertu de l’article 4 de ladite loi, se faire à un stade où toutes les options sont encore ouvertes, c’est-à-dire avant l'adoption du PAG auquel elle se rapporte, étant donné qu’autrement elle ne saurait guère être « early and effective » (cf. not. Cour administrative 15 décembre 2016, nos 38139C, 38174C et 38175C), c’est-à-dire de nature à garantir les principes fondamentaux en droit de l'environnement, qui sont l'accès à l'information et la participation du public au processus décisionnel.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’une étude environnementale complète sur un point sensible, concernant des espèces d’animaux sauvages protégés, en l’occurrence les chiroptères, alors que pourtant leur présence se trouve vérifiée à raison d’au moins trois espèces différentes sur le site, était obligatoire et que dès lors la SUP confectionnée doit être considérée comme ayant été outrancièrement lacunaire par rapport aux terrains litigieux notamment.

Si bien que dans le cadre d’une procédure de refonte d’un PAG, la SUP ne soit qu’un élément d’appréciation parmi d’autres, il n’en reste pas moins que parmi les actes préparatoires, c’est un des éléments d’appréciation clé, préalable à une décision éclairée de refonte.

Sur ce, face à un vice de procédure en l’occurrence flagrant, il s’impose au juge administratif de la légalité d’annuler la ou les décisions prises à sa suite.

En effet, l'irrégularité d'un acte préparatoire et intérimaire s'étend nécessairement à la décision qui s'en est suivie dans la mesure où cette dernière est directement conditionnée par ledit acte vicié à sa base.

La mission circonscrite du juge de l’annulation, laquelle lui impose de ne prendre en considération que la seule situation, en droit et en fait, qui a existé au jour de la prise de décision, ne lui permet pas d’avoir égard aux études qui ont pu être établies par la suite, ces études additionnelles ne pouvant remédier et réparer le vice ci-avant constaté.

Saisi d’un recours dirigé contre des décisions prises et non pas juge des décisions à venir, il n’appartient pas non plus au juge administratif de se prononcer sur la question de savoir si et dans quelle mesure des études qui ont pu être réalisées notamment dans le cadre de la viabilisation du PAP NQ sont susceptibles et de nature à constituer tout ou partie d’une SUP à établir dans le cadre de la reprise de la procédure par les autorités communales.

Les parties appelantes faisant encore soutenir qu’une nouvelle étude ne pourrait rien dévoiler de plus, la Cour se doit de retenir qu’elle ne peut anticiper le futur et tenter de répondre à la question de savoir si une nouvelle étude ou une étude complémentaire peut ou non apporter des enseignements supplémentaires à l’ensemble de ceux apportés par les études qui ont été réalisées avant et après la prise des décisions litigieuses. La nature n’étant pas figée, mais toujours en constante évolution, la réponse à apporter à cette question reste nécessairement ouverte.

17C’est partant à bon escient que, face à une procédure d’adoption du PAG litigieux de la Ville de Luxembourg viciée et face à un vice ne pouvant être réparé au niveau contentieux, les premiers juges ont conclu que la décision d’adoption du conseil communal du 28 avril 2017 leur déférée en premier lieu encourait l’annulation dans la mesure où elle se rapporte au site litigieux.

C’est encore de manière conséquente que le tribunal a annulé les décisions d’approbation respectives du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 et du ministre de l’Environnement du 6 octobre 2017 pour autant qu’elles se rapportent au site visé faisant partie de l’aréal Kennedy-Sud.

C’est ainsi encore à bon escient que les premiers juges ont fait application de la maxime « potius ut valeat quam ut pereat », en vertu de laquelle il y a lieu de faire valoir pour autant que possible les dispositions réglementaires prises plutôt que de les voir périr et ont limité leur mesure d’annulation.

La Ville de Luxembourg fait cependant valoir à juste titre devant la Cour que les motifs d’annulation retenus par les premiers juges, s’ils étaient confirmés en appel, ne sauraient valablement être retenus que par rapport aux parties des deux parcelles litigieuses se situant entre le l’avenue J.F. Kennedy et la rue des Muguets, à l’exclusion de celles se trouvant de l’autre côté de l’avenue J.F. Kennedy aux alentours de la Coque.

La Ville demande à limiter, dans cet ordre subsidiaire d’idées, l’objet de l’annulation aux deux parcelles litigieuses en ce qu’elles sont classées à travers le PAG refondu en zone [HAB-2] avec une zone superposée « zone soumise à un PAP NQ » en conformité avec le schéma directeur WH-08.

En ce que d’après les éléments actuellement fournis au dossier, la présence de chiroptères a été attestée essentiellement par rapport aux terrains non cultivés se situant entre l’avenue J.F.

Kennedy et la rue Muguets, il y a lieu d’accueillir cette demande de la Ville.

Dès lors, par réformation partielle du jugement dont appel, il convient encore de limiter l’annulation des délibération communale d’adoption du PAG refondu et décision ministérielle d’approbation afférente dans les limites ci-avant indiquées par la Ville en ordre subsidiaire.

Les parties intimées A et consorts sollicitent l’allocation d’une indemnité de procédure de 10.000 € à charge de l’Etat et de la commune de Luxembourg.

Cette demande est à rejeter, les conditions légales afférentes ne se trouvant pas remplies.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

joint les appels inscrits sous les numéros du rôle respectifs 44968C et 44971C ;

les déclare partiellement justifiés ;

18réformant, limite l’annulation de la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption du PAG refondu et la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017 aux deux parcelles numéros 435/5133 et 472/4944 appartenant au FONDS D’URBANISATION ET D’AMENAGEMENT DU PLATEAU DE KIRCHBERG dans la mesure où celles-ci sont classées par le PAG refondu en zone [HAB-2] avec une zone superposée « zone soumise à un PAP NQ » en conformité avec le schéma directeur WH-08 ;

déclare les appels non fondés pour le surplus et en déboute dans cette mesure les parties appelantes ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure des parties intimées A et consorts ;

laisse les dépens de l’instance d’appel à charge des deux parties appelantes à chacune pour moitié.

Ainsi délibéré et jugé par :

Francis DELAPORTE, président, Henri CAMPILL, vice-président, Lynn SPIELMANN, conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier assumé de la Cour ….

s. … s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6 mai 2021 Le greffier de la Cour administrative 19


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44968C,44971C
Date de la décision : 06/05/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2021-05-06;44968c.44971c ?

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