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06/05/2021 | LUXEMBOURG | N°44915C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 06 mai 2021, 44915C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 44915C du rôle Inscrit le 24 août 2020

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Audience publique du 6 mai 2021 Appel formé par Monsieur «S», …, et consorts, contre un jugement du tribunal administratif du 13 juillet 2020 (n° 40607 du rôle) ayant statué sur le recours dirigé contre une délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement particulier « quartier existant » (PAP QE) Vu la

requête d'appel inscrite sous le numéro 44915C du rôle et déposée au greffe de la C...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 44915C du rôle Inscrit le 24 août 2020

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Audience publique du 6 mai 2021 Appel formé par Monsieur «S», …, et consorts, contre un jugement du tribunal administratif du 13 juillet 2020 (n° 40607 du rôle) ayant statué sur le recours dirigé contre une délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement particulier « quartier existant » (PAP QE) Vu la requête d'appel inscrite sous le numéro 44915C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 24 août 2020 par Maître Martine LAMESCH, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, aux noms de :

1) Monsieur «S», demeurant à L-… …, …, …, agissant en sa qualité de propriétaire de l’immeuble sis à Luxembourg, 34, avenue de la Gare, inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HoA de Hollerich, sous le numéro 368/5918, 2) Madame …, épouse …, demeurant à L-… …, …, … et Monsieur «L», demeurant à D-

… …, …, …, propriétaires par indivis de l’immeuble sis à Luxembourg, 38, avenue de la Gare, inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HoA de Hollerich, sous le numéro 368/5920 et 3) la société à responsabilité limitée …, établie et ayant son siège social à L-… …, …, …, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, agissant en sa qualité de propriétaire de l’immeuble sis à Luxembourg, 40, avenue de la Gare, inscrit au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HoA de Hollerich, sous le numéro 370/6999, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 13 juillet 2020 (n° 40607 du rôle) ayant déclaré recevable, mais non fondé leur recours en annulation de la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 rejetant leurs objections du 18 juillet 2016 et adoptant les projets d’aménagement particulier « quartier existant » (PAP QE), de même que la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur du 5 octobre 2017, tout en les déboutant de leur demande en allocation d’une indemnité de procédure et les condamnant aux frais et dépens ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 13 octobre 2020 par la société anonyme ARENDT & MEDERNACH S.A., inscrite à la liste V du tableau de l’ordre des avocats à Luxembourg, établie et ayant son siège social à L-2082 Luxembourg, 41A, avenue J.F. Kennedy, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro B 186.371, représentée aux fins de la présente procédure d’appel par Maître Christian POINT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

1 Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 14 octobre 2020 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique déposée au greffe de la Cour administrative le 16 novembre 2020 par Maître Martine LAMESCH au nom des appelants ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 14 décembre 2020 par Maître Christian POINT au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 14 décembre 2020 par Maître Albert RODESCH au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement dont appel ;

Par courriels respectifs des mandataires des parties dans le cadre de la mise en place du calendrier de fixation de l’affaire pour plaidoiries, il y a eu unanimité en vue de voir prendre l’affaire en délibéré sans autre formalité ;

Sur le rapport du rapporteur, l’affaire a été prise en délibéré en conséquence à l’audience publique du 26 janvier 2021.

Lors de sa séance publique du 13 juin 2016, le conseil communal de la Ville de Luxembourg, ci-après le « conseil communal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », « (…) pour lancer la procédure d’adoption du nouveau projet d’aménagement général (PAG) de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique accompagnées des documents et annexes prescrits par la législation y relative (…) » et « (…) charge[a] le collège des bourgmestre et échevins de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (…) ».

Le 14 juin 2016, le collège des bourgmestre et des échevins de la Ville de Luxembourg, ci-après « le collège échevinal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 30, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004, pour « (…) engager la procédure d’adoption des premiers plans d’aménagement particuliers « quartiers existants » de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique et de les soumettre à la procédure d’adoption en les déposant à l’inspection du public et en les transmettant pour avis à la cellule d’évaluation de la Commission d’aménagement instituée auprès du Ministère de l’Intérieur ainsi qu’au Ministère de l’environnement et à la Direction de la Santé (…) ».

Par courrier du 18 juillet 2016, Monsieur «S», déclarant agir en sa qualité de propriétaire d’une parcelle inscrite au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HoA de Hollerich, sous le numéro 368/5918, ci-après « la parcelle 368/5918 », sise à L-1611 Luxembourg, 34, avenue de la Gare, Madame «R», épouse …, et Monsieur «L» déclarant agir en leur qualité de propriétaires par indivis d’une parcelle inscrite au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HoA de Hollerich, sous le numéro 368/5920, ci-après « la parcelle 368/5920 », sise à L-1611 Luxembourg, 38, avenue de la Gare, et la société à responsabilité limitée …, ci-après « la société … », déclarant agir 2en sa qualité de propriétaire d’une parcelle inscrite au cadastre de la Ville de Luxembourg, section HoA de Hollerich, sous le numéro 370/6999, ci-après « la parcelle 370/6999 », sise à L-1611 Luxembourg, 40, avenue de la Gare, soumirent au collège échevinal des objections à l’encontre du projet d’aménagement particulier, ci-après « le PAP QE ».

Lors de sa séance publique du 28 avril 2017, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre du PAG et, d’autre part, adopta ledit projet, « (…) tel qu’il a été modifié suite aux réclamations et avis ministériels reçus (…) ».

Parallèlement et lors de la même séance publique, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre des PAP QE et, d’autre part, adopta les parties graphiques et la partie écrite de ces derniers, « (…) sous [leur] forme revue et complétée (…) ».

Par décision du 5 octobre 2017, le ministre de l’Intérieur, ci-après « le ministre », approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 13 juin 2016, de même que celle du 28 avril 2017 portant adoption du PAG, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, en déclarant fondées une partie de celles-ci et en apportant, en conséquence, certaines modifications aux parties graphique et écrite du PAG.

Par une seconde décision du 5 octobre 2017, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des PAP QE et statua sur les réclamations précitées lui soumises dans les termes suivants :

« (…) Par la présente, j'ai l'honneur de vous informer que j'approuve la délibération du conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption des projets d'aménagement particulier « quartier existant » de la Ville de Luxembourg.

Or, conformément à ma décision d'approbation du projet de la refonte du plan d'aménagement général de la Ville de Luxembourg de ce jour, modifiant les délimitations des plans d'aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférents, je vous prie de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique des plans d'aménagement particulier « quartier existant » adaptées en conséquence.

De manière générale, je tiens encore à soulever que toutes les réclamations introduites à l'encontre du vote des plans d'aménagement particulier « quartier existant » ne sont pas recevables. En effet, le Législateur n'a pas prévu la possibilité d'introduire une réclamation auprès du ministre de l'Intérieur contre le plan d'aménagement particulier « quartier existant » alors qu'il a uniquement prévu dans l'article 16 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain que les réclamants puissent exclusivement porter leurs objections contre le projet d'aménagement général devant le ministre de l'Intérieur.

Cette décision est basée sur l'article 30 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l'aménagement communal et le développement urbain. (…) ».

3Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 janvier 2018, Monsieur «S», Madame «R», épouse …, Monsieur «L», ainsi que la société …, ci-après « Monsieur «S» et consorts », firent introduire un recours tendant à l’annulation de « 1) la décision du ministre de l'Intérieur du 5 octobre 2017, notifiée en date du 13 octobre 2017, approuvant sur base de l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, les décisions du conseil communal de Luxembourg des 13 juin 2016 et 28 avril 2017 et portant rejet de leur réclamation du 22 mai 2017 » et « 2) (…) la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017, rejetant leur réclamation du 18 juillet 2016 et approuvant les projets d’aménagements particuliers « quartier existant » ; (…) ».

Par jugement du 13 juillet 2020 (n° 40607 du rôle), le tribunal déclara ce recours recevable mais non fondé tout en en déboutant les demandeurs.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 24 août 2020, Monsieur «S» et consorts ont fait déposer une requête d’appel dirigée contre ce jugement du 13 juillet 2020 tendant à voir dire leur recours initial justifié et à voir annuler en conséquence la délibération communale et la décision ministérielle d’approbation critiquées sinon, en ordre subsidiaire, à voir préalablement soumettre à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle par eux proposée.

Tant la Ville de Luxembourg que la partie étatique se rapportent à prudence de justice quant à la recevabilité de l’appel en la forme et quant au délai.

L’appel ayant été interjeté suivant les formes et délai prévus par la loi, il est recevable.

A partir des énonciations de l’acte d’appel, la Ville de Luxembourg entend dégager que le PAG n’était pas litigieux dans le cas d’espèce et que les débats étaient appelés à se limiter aux immeubles sis 34, 38 et 40, avenue de la Gare et à leur classement en secteur [MIX-u•avga], voire à leur désignation par la partie graphique du PAP QE du secteur [MIX-u•avga] par un astérisque, impliquant l’application des dispositions de l’article C.4.6 de la partie écrite du PAP QE aux immeubles en question.

Dans leur requête d’appel, les appelants reprennent au fond les neuf séries de moyens déjà exposés pour l’essentiel en première instance.

Avant d’entamer l’étude des différents moyens, la Cour tient à mettre en exergue qu’il résulte des éléments constants du dossier qu’à travers le classement mis en place au niveau du PAP QE du secteur [MIX-u•avga] applicable aux différents immeubles des appelants, seule la façade côté avenue de la Gare est à maintenir, avec possibilité de rénovation et de restauration.

Pour le surplus, un nouvel immeuble peut être érigé et même prendre une forme surélevée par rapport au gabarit actuel, pourvu qu’il respecte les limites fixées se dégageant plus particulièrement de la partie graphique dudit secteur.

La hauteur à l’acrotère de même que celle admise pour l’étage en retrait, en l’occurrence respectivement 25 mètres et 4 mètres, ont ainsi été fixées en s’inspirant essentiellement des immeubles plus récents présents des deux côtés de l’avenue de la Gare et passablement plus élevés que ceux actuellement querellés, de nature à laisser aux immeubles litigieux, dont seule la façade côté rue est à préserver, une potentialité certaine en termes de surélévation, tel que notamment 4démontré par les nouvelles constructions surélevées des immeubles 3 et 5 de la même avenue de la Gare.

En premier lieu, les appelants reprochent au PAG d’avoir classé leurs immeubles querellés en zone [MIX-u] sans y avoir superposé un quelconque secteur protégé.

A partir du moment où le contenu de l’article C.4.6 de la partie écrite du PAP QE serait à qualifier de servitude spéciale de sauvegarde et de protection, tout en correspondant à l’identique aux servitudes des secteurs protégés d’intérêt communal à déterminer par le PAG, le pouvoir réglementaire aurait ici opéré en pratique dans un sens contraire à l’économie de la loi du 19 juillet 2004 en faisant figurer dans le PAP QE ce qui aurait dû l’être dans le PAG. Ainsi, concernant les immeubles litigieux, le PAP QE du secteur [MIX-u•avga] comporterait une interdiction de démolition et correspondrait à l’identique aux dispositions de l’article 29, point c) de la partie écrite du PAG refondu. Ainsi, suivant les appelants, il incomberait au PAG de déterminer le secteur protégé d’intérêt communal en tant que faisant partie d’une zone et il n’incomberait ensuite au PAP QE que de préciser et d’exécuter les dispositions du PAG, en l’occurrence de définir les servitudes urbanistiques correspondant aux différents secteurs protégés.

Tout d’abord, il est constant en cause que le recours à la base de l’appel sous analyse était dirigé uniquement contre les délibération communale et décision ministérielle ayant adopté et approuvé le PAP QE et ne se dirigeait pas contre le PAG.

Or, en matière de recours directs en annulation dirigés contre un acte administratif à caractère réglementaire au sens de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, il est impératif de bien cerner l’objet du litige qui conditionne l’annulation qui va, le cas échéant, être prononcée, du moment que le recours est déclaré fondé.

Ainsi, en l’occurrence, le recours en annulation n’étant point dirigé contre le PAG, acte réglementaire à part du PAP QE, il ne saurait entraîner son annulation.

Le moyen laisse dès lors d’être fondé dans la mesure du classement visant directement le PAG.

Ceci étant dit, la Cour est amenée à rappeler que l’économie générale de la loi du 19 juillet 2004, par opposition à la législation antérieure du 12 juin 1937, emporte que le PAG ne constitue plus qu’un cadre large comportant des dispositions d’ordre général concernant le classement des terrains faisant partie du territoire communal, tandis que le détail des règles d’urbanisation est appelé à figurer au niveau des PAP pertinents qui doivent être en tous points conformes au PAG.

Pour rappel, sous l’égide de la loi du 12 juin 1937, l’essentiel des règles d’urbanisme figurait au niveau du PAG et le PAP servait à des dispositions précises de détail qui, le cas échéant, pouvaient être contraires aux règles du PAG dans l’intérêt notamment d’une urbanisation cohérente de la partie concernée du territoire communal.

Ainsi, l’article 5 de la loi du 19 juillet 2004 définit précisément le PAG comme étant un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère réglementaire qui se complètent réciproquement et qui couvrent l’ensemble du territoire communal qu’elles divisent en diverses zones dont elles arrêtent l’utilisation du sol.

5 C’est précisément l’article 25, alinéa 1er, de la loi du 19 juillet 2004 qui porte que « le plan d’aménagement particulier précise et exécute les dispositions réglementaires du plan d’aménagement général concernant une zone ou partie de zone ».

C’est dans ce contexte que la Cour administrative, à travers son arrêt du 13 juillet 2017 (n° 39294C du rôle) a pu retenir qu’il était patent que les secteurs protégés d’intérêt communal, qu’il s’agisse de ceux de type « environnement construit » ou de ceux de type « environnement naturel et paysage », constituent, sous l’angle de l’article 25, alinéa 1er, de la loi du 19 juillet 2004, des parties de zones.

Dès lors, en application dudit article 25, alinéa 1er, c’est le PAP qui est appelé à préciser et exécuter les dispositions réglementaires du PAG concernant précisément une partie de zone.

En d’autres termes, c’est au PAG de déterminer les secteurs protégés d’intérêt communal, tandis que, toujours suivant l’économie de la loi du 19 juillet 2004, il appartient, conformément à son article 25, alinéa 1er, au PAP de préciser et exécuter les dispositions réglementaires afférentes dont notamment les servitudes correspondant aux différents secteurs protégés d’intérêt communal, sans que ces servitudes ne doivent d’ores et déjà figurer au PAG.

En ce qui concerne dès lors le PAP QE, seul visé par le recours en annulation, à la base du présent appel, il ne saurait lui être reproché d’avoir défini les servitudes urbanistiques correspondant au secteur [MIX-u•avga], tel que les appelants le reconnaissent d’ailleurs eux-mêmes.

Le moyen laisse dès lors d’être fondé.

En second lieu, dans la même lignée, les appelants estiment être victimes d’une atteinte à leurs droits de la défense, ainsi que d’une violation du principe du contradictoire, de même que de l’article 10bis de la Constitution consacrant l’égalité devant la loi. Ils estiment qu’au nom du parallélisme des formes, il aurait été de bonne logique juridique d’instaurer la même procédure d’élaboration et de consultation pour les PAG que pour les PAP QE, en ce que tous les deux sont des instruments d’aménagement communal, ce d’autant plus qu’actuellement, les règles urbanistiques applicables aux zones retenues au PAG seraient dictées par les PAP QE. Le PAG serait dorénavant une coquille vide et les dispositions faisant grief seraient le plus souvent contenues dans le PAP QE. Sous cet aspect, il serait peu compréhensible que dorénavant, à partir de la modification de la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28 juillet 2011, les justiciables disposeraient d’une voie supplémentaire de leur réclamation devant le ministre au niveau du PAG dont ils ne disposeraient plus au niveau du PAP QE.

Il est vrai, tel que les appelants le soutiennent, que c’est depuis la modification de la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28 juillet 2011 et applicable, quant aux aspects procéduraux, aux procédures d’adoption et d’approbation de PAG et de PAP QE en cours, tel le PAP sous analyse, qu’un parallélisme ayant existé antérieurement a été rompu.

Si avant la modification de la loi du 19 juillet 2004 par celle du 28 juillet 2011, au niveau des séquences d’aplanissement des difficultés, tant pour le PAG que pour le PAP, à la fois une possibilité d’objection devant le conseil communal et de réclamation devant le ministre étaient prévues, la nouvelle législation ne prévoit plus le module de la réclamation que pour le PAG et 6non plus pour le PAP. Il y a dès lors manifestement un maillon d’aplanissement des difficultés en moins pour le PAP comparé par rapport au PAG.

Cependant, les principes des droits de la défense et du contradictoire invoqués par les appelants sont des principes de procédure contentieuse, non transposables tels quels en matière non contentieuse, de sorte que le moyen n’est pas pertinent sous ces aspects.

En ce qui concerne l’invocation du principe d’égalité devant la loi tel que découlant de l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution, suivant lequel les Luxembourgeois sont égaux devant la loi, l’application de cette norme constitutionnelle présuppose que les situations à analyser sous le spectre de ce principe soient suffisamment comparables. En application d’une jurisprudence constante tant de la Cour de cassation que de la Cour administrative, il appartient aux juges du principal de dégager les situations de non-comparabilité au regard de l’article 10bis de la Constitution du moment que cette non-comparabilité découle directement des données du litige.

En l’occurrence, il se dégage directement des articles 5 et 25 de la loi du 19 juillet 2004, déjà cités au niveau de l’analyse du premier moyen, que les PAG et PAP sont de natures différentes en ce que le premier fixe le cadre de la règlementation communale d’urbanisme et définit les zones prévues sur le territoire communal, tandis que le second s’analyse essentiellement en dispositif d’exécution et de précision du premier.

A partir de là, il se dégage que le PAG et le PAP ne sont pas suffisamment comparables pour voir mettre en œuvre utilement l’application de l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution, tel que suggéré par les appelants.

Le moyen laisse dès lors d’être fondé sous tous ses aspects.

En troisième lieu, les appelants reprennent leur moyen tiré d’une violation de la loi modifiée du 18 juillet 1983 concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux, ci-après « la loi du 18 juillet 1983 ». Suivant les appelants, le classement de leur parcelle en secteur protégé d’intérêt communal reviendrait à attribuer compétence au conseil communal de décider ce qui appartiendrait au patrimoine culturel ou non, de sorte à interférer de manière indue par rapport aux dispositions de la loi du 18 juillet 1983.

A leurs yeux, le législateur aurait conféré au ministre de la Culture la compétence pour définir ce qui fait partie du patrimoine culturel, ainsi que d’établir le cas échéant, des secteurs sauvegardés. Cette compétence découlerait des articles 34 et 36 de la loi du 18 juillet 1983.

La mise en place de deux régimes différents, national et communal, poserait également problème au regard des dispositions de l’article 10bis de la Constitution quant aux différences de traitement instituées par les lois respectives du 19 juillet 2004 et du 18 juillet 1983 entre des situations similaires.

Les appelants sollicitent, comme en première instance, la saisine de la Cour constitutionnelle. Ils critiquent le jugement dont appel plus précisément, en ce que contrairement aux conclusions des premiers juges, on ne saurait valablement soutenir que ni l’objet ni le champ d’application des deux législations en question ne soient les mêmes, ni que les situations visées ne seraient point comparables. Il se poserait en plus la problématique des réserves à la loi et de la 7conformité plus particulièrement de l’article 2, point e) et de l’article 9 de la loi du 19 juillet 2004, à l’article 32, paragraphe 3, de la Constitution.

S’il est vrai que la Constitution n’érige point la protection du patrimoine culturel en tant qu’objectif d’ordre constitutionnel, ni en tant que domaine réservé à la loi, il n’en reste pas moins que le législateur, dans sa plénitude a pu valablement instaurer, à côté du régime classique de protection nationale du patrimoine culturel actuellement balisé par les dispositions de la loi du 18 juillet 1983, un second régime de protection inféré dans une logique de subsidiarité à partir des classements opérés par les autorités communales sous la tutelle étatique, ce régime étant actuellement balisé par l’article 2, point e), de la loi du 19 juillet 2004 et fonctionnant au niveau de la réglementation communale d’urbanisme à travers la mise en place des PAG et des PAP.

Si l’objectif de protection du patrimoine culturel est globalement le même pour les deux régimes, ceux-ci sont cependant appelés à répondre aux procédures respectives de mise en place, ainsi qu’aux critères prévus dans leur contexte impliquant que ces deux régimes fonctionnent essentiellement chacun d’après ses critères propres, agencés toutefois de manière telle à atteindre globalement le même objectif de protection du patrimoine culturel.

Dès lors, le législateur a valablement pu instaurer un régime communal de protection du patrimoine au niveau de l’article 2, point e), de la loi du 19 juillet 2004, de nature à fonctionner parallèlement à celui d’ores et déjà prévu par la loi du 18 juillet 1983 au niveau national.

En ce que la protection du patrimoine culturel n’a pas été consacrée par la Constitution jusqu’à ce jour et qu’a fortiori, elle n’a pas été prévue en tant que matière réservée à la loi, la question de conformité de l’article 2, point e), de la loi du 19 juillet 2004 par rapport à l’article 32, paragraphe 3, de la Constitution laisse d’être pertinente sous cet aspect.

La même conclusion vaut pour ce qui concerne l’article 9 de la loi du 19 juillet 2004, également invoqué par les appelants, lequel concerne le contenu du PAG et pour lequel aucune appartenance à une matière réservée à la loi n’a été valablement mise en avant par les appelants.

Le moyen laisse dès lors également d’être fondé.

En quatrième lieu, les appelants réitèrent leur moyen tiré d’une illégalité de l’article 33 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après « le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG) », voire l’article 32 correspondant du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après « le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (PAG) ».

En ce que les articles respectifs 33 du règlement grand-ducal de 2011 et 32 du règlement grand-ducal de 2017 en prévoyant des servitudes urbanistiques qui se superposent sur la désignation des zones prévues au PAG, qui ne seraient toutefois pas prévues par la loi, ces dispositions réglementaires devraient encourir la sanction prévue par l’article 95 de la Constitution pour dépassement du cadre de la base légale tracée et être de la sorte déclarées inapplicables.

L’article 39 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (PAG) intitulé « dispositions transitoires » procède certes à travers son paragraphe 2 à l’abrogation du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG), mais prévoit cependant que jusqu’au 8 août 2018, le collège échevinal 8peut entamer la procédure d’adoption d’un PAG élaboré conformément aux dispositions du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG).

Il en résulte qu’un projet de PAG mis sur orbite avant l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (PAG) et élaboré suivant les règles du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG) est également adopté suivant ses dernières, du moment que la procédure a été entamée avant le 8 août 2018, ce qui est manifestement le cas en l’espèce.

Le moyen laisse dès lors d’être fondé en ce qu’il met en cause le règlement grand-ducal du 8 mars 2017 (PAG).

Pour le surplus, la Cour est amenée à reprendre les principes dégagés dans son arrêt précité du 13 juillet 2017 (n° 39296C du rôle), lequel a précisément retenu que l’article 33 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG) était illégal dans la mesure où il porte obligation de prévoir les servitudes au niveau du PAG (« doivent »), de sorte que leur prévision au niveau du PAP correspond précisément à l’ordonnancement juridique en place et que l’obligation de les prévoir par le PAG n’y correspond précisément pas, ce qui n’exclut pas que le PAG puisse, le cas échéant, en prévoir, question cependant non pertinente au regard du libellé du moyen.

En ce que respectivement le PAG et le PAP QE mettent en place des servitudes urbanistiques appelées à se superposer sur la disposition des zones prévues au PAG, ils agissent en application de la loi du 19 juillet 2004 et, plus particulièrement, de ses articles 2, point e) et 9 et s’inscrivent ainsi dans l’ordonnancement juridique mis en place, sans qu’une non-conformité à la loi n’ait pu en être dégagée en application de l’article 95 de la Constitution.

Ce quatrième moyen est dès lors également à écarter pour ne pas être fondé.

En cinquième lieu, les appelants réitèrent leur moyen tiré d’une violation du principe d’égalité consacré par l’article 10bis de la Constitution, toujours applicable aux deux législations concurrentes que sont celles du 18 juillet 1983 et du 19 juillets 2004 en ce qu’elles interviennent dans la même sphère de classement d’immeuble en tant que patrimoine culturel, mais qu’elles opèrent de manière foncièrement différente sur différents niveaux, tant au niveau du classement des immeubles qu’à celui des aides prévues et des travaux éligibles pour en faire l’objet.

Si au niveau du troisième moyen il a pu être retenu que le législateur a concurremment pu prévoir deux régimes, national et communal, en matière de protection du patrimoine culturel, c’est au niveau de l’analyse du même moyen qu’il a déjà été précisé que pour pouvoir valablement mettre en œuvre le mécanisme de l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution, consacrant le principe de l’égalité devant la loi, il faut que les situations mises en comparaison soient précisément suffisamment comparables.

Si la Cour a pu retenir, en application d’une jurisprudence constante que les deux mécanismes réglementaires d’urbanisation communale, le PAG et le PAP, ne sont pas suffisamment comparables, il en est a fortiori ainsi par rapport à deux mécanismes de protection du patrimoine culturel ne relevant pas de la même sphère de compétence, l’une étant étatique et l’autre communale.

Cette conclusion s’impose d’autant plus en ce que la procédure communale de classement s’inscrit dans une procédure plus large, celle de la mise en place de plans d’aménagement 9communaux, tandis que la procédure étatique est propre au domaine de la protection du patrimoine culturel.

A la base toutefois il n’a pas été allégué par les appelants que les personnes concernées n’aient pas joui des mêmes garanties en ce qu’il n’a pas été affirmé ni a fortiori établi que toutes les personnes ayant participé à l’aplanissement des difficultés dans le cadre du PAG n’aient pas eu les mêmes possibilités au niveau respectivement des objections et réclamations par elles formulées, de même que pour les personnes ayant agi au niveau du PAP où, certes, seulement le maillon de l’objection restait ouvert à elles.

Dès ce double constat, le moyen laisse dès lors d’être justifié.

En sixième lieu, les appelants reprennent leur moyen tiré d’une violation de l’article 16 de la Constitution en mettant en avant que le fait de voir classer son immeuble en tant que revêtu d’une servitude communale en matière de patrimoine culturel avec interdiction de démolition équivaudrait à une diminution massive de sa valeur et correspondrait à un enlèvement de manière substantielle d’attributs du droit de propriété, quant à un aspect essentiel tel que visé par l’arrêt 101 du registre de la Cour constitutionnelle du 4 octobre 2013.

Suivant les appelants, les servitudes imposées par l’article C.4.6 du PAP QE zone mixte urbaine affecteraient leur droit de propriété de telle manière que les restrictions et limitations ainsi opérées peuvent être qualifiées d’expropriation et non pas seulement de simples limitations d’usage de leur immeuble, de sorte que le jugement dont appel serait encore à réformer sur ce point.

Il est constant en cause que l’article 16 de la Constitution ne prévoit expressément que l’hypothèse de l’expropriation pour cause d’utilité publique non vérifiée en l’espèce.

Ce n’est que l’arrêt de la Cour constitutionnelle précitée du 4 octobre 2013 (n° 00101 du registre ; Mémorial A n° 182, page 3473) qui étend cette protection à des situations jugées équipollentes à une expropriation par le fait de toucher les attributs du droit de propriété dans leur substance.

Ceci dit, il est patent que l’hypothèse de l’expropriation pour cause d’utilité publique expressément visée à l’article 16 de la Constitution ne se trouve point vérifiée en l’espèce.

Au-delà, il convient de rappeler qu’au regard de la protection du droit de propriété tel que se dégageant plus particulièrement des dispositions de l’article 16 de la Constitution et de l’article 1er du Protocole additionnel à la CEDH, l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 4 octobre 2013 consacre le droit des pouvoirs publics d’instaurer des servitudes d’urbanisme dans un but d’utilité publique, laisse intact le principe de la mutabilité des PAG et n’autorise pas le juge administratif à sanctionner un reclassement d’un immeuble précédemment classé en zone constructible en zone non constructible, tout en réservant toutefois aux propriétaires touchés, conformément au droit commun, suivant la situation concrète du cas d’espèce, le cas échéant de faire valoir devant le juge judiciaire un droit à indemnisation dépendant, notamment, de la situation du terrain, du caractère contraignant de la servitude et des projets concrets de viabilisation du terrain.

10Ainsi, sans préjudice d’une éventuelle pertinence dans le cadre d’une action en dommage et intérêts, l’argumentaire développé par les appelants ne saurait aboutir à l’annulation d’une décision de classement par ailleurs justifiée.

Le moyen laisse dès lors encore d’être justifié.

En septième lieu, les appelants reprennent leur moyen tiré d’une erreur manifeste d’appréciation en reprochant aux instances compétentes une absence dans l’objectivité des critères suivis pour procéder au classement intervenu. Ils considèrent que l’argumentaire mis en avant en ce que « compte tenu de leur aspect extérieur et, notamment, de leurs gabarits analogues et de style similaire de leur façade, les immeubles situés au numéro 34, 38 et 40 [de l’avenue de la Gare] sont à considérer comme formant un tronçon de rue constituant, de par son caractère harmonieux et de par sa composition urbaine, un ensemble cohérent s’intégrant parfaitement dans le tissu urbain avoisinant », les instances communales n’auraient nullement apprécié de manière objective et adéquate la situation de façon à leur permettre le classement intervenu au regard notamment des dispositions de l’article 2, points b) et e) de la loi du 19 juillet 2004.

Les appelants trouvent particulièrement déplacée la motivation consistant à conserver une vision cohérente de tout un quartier et de voir une harmonie dans les façades, alors qu’à leurs yeux, aucune harmonie ne régnerait plus dans l’avenue de la Gare qui présenterait un aspect manifestement hétéroclite de par la typologie des constructions, leur style et les dates de mise en place. Le caractère harmonieux qui aurait pu exister à une certaine époque se trouverait actuellement définitivement détruit.

Les appelants n’entendent pas critiquer un choix politique, mais la mise en balance des intérêts en cause. Suivant eux, des constructions nouvelles pourraient également répondre à des critères esthétiques et ils déclarent vouloir se plier volontairement aux exigences de la Ville pour ériger des constructions de qualité, même en rappel d’une certaine époque.

Le jugement dont appel serait encore à réformer sous ce point.

Il est constant en cause, en matière de protection du patrimoine communal, que l’article 29, alinéa 2, de la partie écrite du PAG met en exergue comme critère essentiel, la préservation de l’identité et de l’histoire urbanistique de la Ville.

L’avenue de la Gare, tel que son nom l’indique, a été la première des deux avenues, avec l’avenue de la Liberté mise en place ultérieurement destinée à relier la nouvelle gare centrale érigée en 1859 avec le Centre-Ville. La construction de l’avenue de la Gare avançait d’autant plus vite que le Viaduc se trouvait mis en place en tant que lien avec le Centre-Ville. Elle répondait quant au style de construction à un agencement homogène des deux côtés de l’avenue. Les façades côté avenue des trois immeubles querellés situés 34, 38 et 40, avenue de la Gare, sont des éléments de construction ayant participé à ce tissu homogène, aujourd’hui disparu.

Le classement d’immeubles faisant partie de ce patrimoine constitue surtout un projet d’avenir et, par la force des choses, n’implique que ceux des immeubles bâtis qui restent toujours debout. En tout cas, la disparition d’immeubles classables n’est pas une cause de justification pour ne pas classer ceux qui subsistent et qui, comme en l’espèce, méritent néanmoins de l’être.

Le caractère protégeable des immeubles querellés résulte, pour ce qui est précisément de leur façade côté rue à préserver, de cette participation à l’ancien caractère homogène de l’avenue 11de la Gare et la mise en balance invoquée par les appelants a été atteinte par les délibération communale et décision ministérielle critiquées, sans dépassement majeur d’équilibre, en conférant aux propriétaires des immeubles marqués d’un astérisque – en règle générale ceux participant encore au niveau de leur façade à l’ancienne mouture, érigés fin du 19ième début du 20ième siècle – la possibilité massive de réaménagement par ailleurs, y compris la surélévation, grosso modo, jusqu’à concurrence des hauteurs à l’acrotère et possibilité d’un étage en retrait supplémentaire directement inspirées des constructions plus récentes les plus élevées y érigées.

Le moyen laisse dès lors encore d’être fondé.

En huitième et avant-dernier lieu, les appelants concluent à une rupture de l’égalité devant les charges publiques. Ils indiquent subir un dommage excessif du fait de la superposition d’une servitude exigeant le maintien de la façade, rendant tout projet de rénovation et de construction extrêmement difficile et coûteux et n’aboutissant pas au but recherché par la protection, c’est-à-dire celui de la conservation d’une image urbaine harmonieuse.

Les appelants tendent à inférer à partir de ce moyen qu’un classement en raison de l’appartenance d’un immeuble au patrimoine culturel, intervenant par définition dans une optique d’intérêt public, opérerait une rupture d’égalité devant les charges publiques. En ce que les appelants prennent comme situation de comparaison celle d’immeubles ne faisant précisément pas partie du patrimoine culturel, le moyen laisse à sa base d’être justifié et ne pourrait se voir analyser utilement que si une distinction de traitement était valablement mise en avant par rapport à des propriétaires d’immeubles se trouvant eux aussi classés en raison de leur appartenance au patrimoine culturel.

Tel n’est cependant pas le cas en l’espèce.

Ce huitième moyen laisse dès lors également d’être fondé.

En neuvième et dernier lieu, les appelants réitèrent leur moyen tiré d’une violation de l’article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ci-après « la CEDH », et des garanties y prévues concernant le droit de propriété.

Ce moyen s’apparente directement au sixième moyen ayant visé une violation de l’article 16 de la Constitution de manière essentielle, s’agissant de deux régimes protecteurs du droit de propriété, certes entrevus à partir de mécanismes différents tendant cependant à conférer aux tenanciers du droit de propriété des garanties semblables.

La même conclusion que celle dégagée au niveau du sixième moyen s’impose, en ce que, pas plus que pour la protection nationale au niveau de l’article 16 de la Constitution, le classement présentement opéré des immeubles des appelants ne saurait être qualifié de contraire aux dispositions de l’article 1er du Protocole additionnel à la CEDH.

Dans ce contexte, la Cour insiste encore une fois sur le potentiel de remplacement et d’augmentation de volume par surélévation accordé à travers la réglementation nouvellement mise en place, plus particulièrement par le PAP QE attaqué, seul le maintien de la façade côté rue étant imposé en termes de préservation du patrimoine culturel, entraînant qu’à travers les décisions querellées la substance des attributs du droit de propriété ne se trouve point atteinte en l’occurrence.

12Dès lors, ce neuvième moyen est également à déclarer non justifié.

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel n’est justifié en aucun de ses moyens et qu’il y a lieu d’en débouter les appelants et de confirmer le jugement dont appel.

Eu égard à l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure des appelants est à son tour à rejeter.

La partie étatique demande à voir ordonner la distraction des frais et dépens de l’instance au profit de l’avocat à la Cour concluant affirmant en avoir fait l’avance.

Dans la mesure où pareille distraction, prévue par le Nouveau code de procédure civile devant le juge judiciaire, n’a pas été prévue par la loi au niveau de la procédure administrative contentieuse, cette demande est à rejeter.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel recevable ;

au fond, le dit non justifié ;

partant, en déboute les appelants ;

confirme le jugement dont appel ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure des appelants ;

rejette la demande en distraction de l’avocat à la Cour de la partie étatique concernant les dépens de l’instance d’appel ;

condamne les appelants aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par :

Francis DELAPORTE, président, Henri CAMPILL, vice-président, Lynn SPIELMANN, conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier assumé de la Cour ….

s. … s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6 mai 2021 Le greffier de la Cour administrative 13


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44915C
Date de la décision : 06/05/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2021-05-06;44915c ?

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