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06/05/2021 | LUXEMBOURG | N°44797C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 06 mai 2021, 44797C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 44797C du rôle Inscrit le 4 août 2020

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Audience publique du 6 mai 2021 Appel formé par la société anonyme …, …, contre un jugement du tribunal administratif du 22 juin 2020 (n° 40639 du rôle) ayant statué sur son recours contre deux décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général (refonte) Vu la requête d'appel inscrite sous le numéro

44797C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 4 août 2020 par Maît...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 44797C du rôle Inscrit le 4 août 2020

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Audience publique du 6 mai 2021 Appel formé par la société anonyme …, …, contre un jugement du tribunal administratif du 22 juin 2020 (n° 40639 du rôle) ayant statué sur son recours contre deux décisions du conseil communal de la Ville de Luxembourg et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de plan d’aménagement général (refonte) Vu la requête d'appel inscrite sous le numéro 44797C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 4 août 2020 par Maître Hervé HANSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme …, établie et ayant son siège social à L-… …, …. …, inscrite au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration en fonctions, déclarant agir en tant que propriétaire de deux parcelles inscrites au cadastre de la Ville de Luxembourg, section LA de Clausen, l’une au lieu-dit « Rue de Clausen », sous le numéro 85/1135, et l’autre au lieu-dit « Rives de Clausen » sous le numéro 297/1263, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 22 juin 2020 (n° 40639 du rôle) à travers lequel le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître du recours principal en réformation, tout en disant le recours subsidiaire en annulation irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 portant mise sur orbite du projet d’aménagement général (PAG), en le déclarant recevable, mais non fondé pour le surplus, en tant que dirigé contre la délibération du même conseil communal du 28 avril 2017 portant adoption du PAG et contre la décision ministérielle d’approbation afférente du 5 octobre 2017, tout en rejetant les demandes en allocation d’une indemnité de procédure présentées respectivement par la demanderesse et la partie étatique et en condamnant la demanderesse aux frais et dépens ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Luana COGONI, en remplacement de l’huissier de justice Véronique REYTER, les deux demeurant à Esch-sur-Alzette, immatriculées auprès le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, du 17 août 2020 portant signification de cette requête d’appel à l’administration communale de la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins en fonctions, établie en son Hôtel de Ville, 42, Place Guillaume II ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 13 octobre 2020 par Maître Albert RODESCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 13 octobre 2020 par Maître Anne BAULER, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

1Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 novembre 2020 par Maître Hervé HANSEN au nom de l’appelante ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 4 décembre 2020 par Maître Albert RODESCH au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 11 décembre 2020 par Maître Anne BAULER au nom de l’administration communale de la Ville de Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont appel ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Hervé HANSEN, Paul SCHINTGEN, en remplacement de Maître Albert RODESCH, et Jonathan HOLLER, en remplacement de Maître Anne BAULER, en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 19 janvier 2021.

Lors de sa séance publique du 13 juin 2016, le conseil communal de la Ville de Luxembourg, ci-après « conseil communal », se déclara d’accord, en vertu de l’article 10 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », « (…) pour lancer la procédure d’adoption du nouveau projet d’aménagement général (PAG) de la Ville de Luxembourg, parties écrite et graphique accompagnées des documents et annexes prescrits par la législation y relative (…) » et « (…) charge[a] le collège des bourgmestre et échevins de procéder aux consultations prévues aux articles 11 et 12 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain et à l’article 7 de la loi modifiée du 22 mai 2008 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (…) ».

Par deux courriers de son mandataire du 20 juillet 2016, la société anonyme …, ci-après « la société … », déclarant agir en sa qualité de propriétaire des parcelles portant les numéros cadastraux 297/1263 et 85/1135, sises respectivement aux lieux-dits « Rives de Clausen » et « Rue de Clausen », désignées ci-après par les parcelles « Rives de Clausen » et « Rue de Clausen », soumit au conseil communal des objections à l’encontre de ce PAG.

Lors de sa séance publique du 28 avril 2017, le conseil communal, d’une part, statua sur les objections dirigées à l’encontre du projet d’aménagement général et, d’autre part, adopta ledit projet, « (…) tel qu’il a été modifié suite aux réclamations et avis ministériels reçus (…) ».

Par deux courriers de son mandataire du 23 mai 2017, la société …, déclarant agir en sa qualité de propriétaire des parcelles Rives de Clausen et Rue de Clausen, introduisit auprès du ministre de l’Intérieur, ci-après « le ministre », des réclamations à l’encontre de la susdite délibération du conseil communal du 28 avril 2017.

Par décision du 5 octobre 2017, le ministre approuva la délibération, précitée, du conseil communal du 13 juin 2016, de même que celle du 28 avril 2017 portant adoption du PAG, tout en statuant sur les réclamations lui soumises, en déclarant fondées une partie de celles-ci et en apportant, en conséquence, certaines modifications aux parties graphique et écrite du PAG. La réclamation de la société … concernant la parcelle Rives de Clausen fut, cependant, déclarée non fondée, tandis que celle concernant la parcelle Rue de Clausen fut déclarée partiellement fondée.

Cette décision est libellée comme suit :

2 « (…) Par la présente, j’ai l’honneur de vous informer que j’approuve les délibérations du conseil communal des 13 juin 2016 et 28 avril 2017 portant adoption de la refonte du plan d’aménagement général (dénommé ci-après « PAG ») de la Ville de Luxembourg, présenté par les autorités communales.

Conformément à l’article 18 de [la] loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain (dénommée ci-après « Loi ») j’ai fait droit à certaines objections et observations formulées par les réclamants à l’encontre du projet d’aménagement général.

La procédure d’adoption du projet d’aménagement général s’est déroulée conformément aux exigences des articles 10 et suivants de la Loi.

Les modifications ainsi apportées à la partie graphique et à la partie écrite du PAG sont illustrées dans la présente décision et en font partie intégrante. Il est laissé le soin aux autorités communales d’adapter les délimitations des plans d’aménagement particulier « quartier existant » sur les plans de repérage et les parties graphiques afférents et ce conformément aux modifications résultant de la décision ministérielle. Les autorités communales sont ainsi tenues de me faire parvenir des versions coordonnées de la partie écrite et de la partie graphique du PAG ainsi que des plans d’aménagement particulier « quartier existant » adaptés en conséquence.

Il est statué sur les réclamations émanant (…) de Maître Hervé Hansen au nom et pour le compte de la société … (…) Ad réclamations société … (rec …), (rec …), (rec …), (rec …) et (rec …) (…) Troisièmement, la réclamation est non fondée pour autant qu’elle a trait à la revendication de la réclamante de reprendre sur la partie graphique du PAG des constructions existantes, non indiquées, à la limite nord-est de la parcelle cadastrale n° 297/1263, sise à Clausen, au lieu-dit « Rives de Clausen ».

En effet, l’indication ou non de constructions existantes sur la partie graphique du PAG ne saurait produire aucun effet juridique.

Le principe du droit acquis est toujours garanti.

Quatrièmement, la réclamation est partiellement fondée pour autant qu’elle a trait à la revendication de la réclamante de reclasser la parcelle cadastrale n° 85/1135, sise à Clausen, actuellement classée en « zone forestière [FOR] », en « zone mixte urbaine ».

Ainsi, partie de la parcelle litigieuse est reclassée en « zone mixte urbaine [MIX-u] » et en « secteur protégé d’intérêt communal "environnement construit" © » soumis au plan d’aménagement particulier « quartier existant » intitulé [SPR-cl], sur une profondeur identique à celle des parcelles adjacentes.

Or, il convient de maintenir en « zone forestière [FOR] » une bande de 6 mètres entre la « zone mixte urbaine [MIX-u] » ainsi modifiée et la « zone d’habitation 1 [HAB-1] », permettant 3à moyen ou à long terme une connexion de mobilité douce entre la rue de Clausen et le site du séminaire de Luxembourg Centre Jean XXIII.

Les problèmes techniques éventuels résultant de la présence d’une source en les lieux litigieux peuvent ultérieurement être résolus moyennant des solutions techniques adaptées.

La partie graphique est modifiée en conséquence, conformément à l’illustration telle que reprise ci-dessous. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 15 janvier 2018, la société …, agissant en sa qualité de propriétaire des parcelles Rives de Clausen et Rue de Clausen, fit introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation - (i) « (…) [de] la décision prise par Monsieur le Ministre de l’Intérieur (…) en date du 5 octobre 2017, notifiée au conseil du requérant en date du 13 octobre 2017 et portant approbation des délibérations du conseil communal de la Ville de Luxembourg, des 13 juin 2016 et 28 avril 2017, portant la première adoption provisoire et la seconde définitive de la refonte du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg présenté par les autorités communales, décision par laquelle, Monsieur le Ministre déclara o non fondée la réclamation introduite par la requérante tendant à la reprise sur la partie graphique du projet de PAG des constructions existantes sur la parcelle n°297/1263, Ville de Luxembourg, Section LA de Clausen, Lieu dit « Rives de Clausen », o que partiellement fondée la réclamation introduite par la requérante tendant au reclassement de la parcelle n°85/1135, Ville de Luxembourg, Section LA de Clausen, Lieu dit « Rue de Clausen », en zone mixte urbaine (…) », - (ii) « (…) [de] la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 13 juin 2016 portant adoption provisoire de la refonte du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg (…) » et - (iii) « (…) [de] la délibération du conseil communal de la Ville de Luxembourg du 28 avril 2017 portant adoption définitive de la refonte du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg (…) ».

Par jugement du 22 juin 2020 (n° 40639 du rôle), le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître du recours principal en réformation tout en déclarant le recours subsidiaire en annulation irrecevable en tant que dirigé contre la délibération du conseil communal du 13 juin 2016 portant mise sur orbite du PAG, en le déclarant recevable, mais non fondé pour le surplus, en rejetant les demandes en allocation d’une indemnité de procédure formulées respectivement par la demanderesse et la partie étatique et en condamnant la demanderesse aux frais et dépens.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 4 août 2020 (n° 44797C du rôle), la société … a fait entreprendre le jugement précité du 22 juin 2020 dont elle sollicite la réformation dans le sens de voir réformer, sinon annuler les délibérations du conseil communal des 13 juin 2016 et 28 avril 2017 ainsi que la décision d’approbation du ministre du 5 octobre 2017 4querellées et de voir, le cas échéant, pour autant que de besoin, renvoyer l’affaire devant l’autorité compétente pour voir statuer conformément à l’arrêt à intervenir.

Tant la Ville de Luxembourg que la partie étatique se rapportent à prudence de justice quant à la recevabilité de l’appel en la forme et quant au délai.

Etant entendu que le jugement dont appel a été notifié en date du 25 juin 2020, l’appel est recevable quant au délai et, pour le surplus, ayant été interjeté suivant les formes de la loi, il l’est dans son intégralité.

Quant aux prétentions de l’appelante en instance d’appel, il convient de constater que pour les deux terrains litigieux, les objections formulées dès la phase précontentieuse devant le conseil communal n’ont pas été, tout au long de la procédure, rencontrées par une quelconque mesure d’aplanissement effectif concernant la parcelle Rives de Clausen, de sorte que la problématique afférente reste entière en instance d’appel.

Par contre, concernant la parcelle Rue de Clausen la réclamation devant le ministre a été déclarée partiellement fondée, de sorte qu’uniquement la prétention rémanente de l’appelante, non accueillie par les premiers juges, reste encore soumise à l’analyse de la Cour.

Ainsi, au niveau de la parcelle Rives de Clausen, l’appelante réitère sa revendication de voir reprendre sur la partie graphique du PAG des constructions existantes, y cependant non indiquées, situées à la limite nord-est de la parcelle cadastrale numéro 297/1263.

L’appelante critique le tribunal pour avoir retenu une absence de disposition normative expresse imposant la représentation sur la partie graphique d’un PAG de l’ensemble de bâti existant sur le territoire communal en ce que pareille absence serait sans conséquence sur la légalité du plan.

Elle invoque l’article 9, paragraphe 1, alinéas 1 et 2, de la loi du 19 juillet 2004, tant dans sa formulation d’avant la mise en vigueur de la loi Omnibus du 3 mars 2017, le 1er avril 2017, qu’après celle-ci. La loi renvoyant à un règlement grand-ducal d’exécution, l’appelante énonce encore les articles 4 et 5 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune, ci-après « le règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG) », lesquels traitent successivement de la légende et de la représentation sur les plans, ainsi que des échelles et fonds de plans.

Enfin, l’appelante invoque l’annexe I dudit règlement grand-ducal qui contient notamment la légende-type d’un PAG. L’appelante dégage de l’ensemble des dispositions légales et réglementaires ainsi citées, une obligation pour les auteurs d’un PAG d’indiquer l’ensemble des constructions existantes au niveau de sa partie graphique. Même en faisant usage de l’exception prévue à l’article 5, alinéa 2, du règlement grand-ducal du 28 juillet 2011 (PAG) et en utilisant sa propre banque de données topographiques urbaines, une commune garderait l’obligation de tracer l’ensemble des constructions existantes et, plus particulièrement, celles des Rives de Clausen.

Dès lors, par réformation du jugement dont appel, l’appelante sollicite en ordre principal l’annulation des délibérations communale et décision ministérielle querellées, du moins en ce qui concerne sa parcelle litigieuse.

5A titre subsidiaire, l’appelante estime que les auteurs du PAP QE ont fait figurer dans les parties graphiques afférentes l’ensemble du bâti construit sur le territoire de la Ville, mais contrairement au principe de cohérence administrative, ce bâti n’aurait pas été intégralement repris au niveau de la partie graphique du PAG. Il appartiendrait tout simplement à l’administration d’être exhaustive en traçant l’ensemble du bâti existant sur les deux plans, sous peine de violation des principes généraux du droit de la cohérence et de la sécurité juridique.

L’appelante cite un extrait du procès-verbal de la séance du collège des bourgmestre et échevins du 16 décembre 2016 lors de laquelle il aurait été projeté de prévoir également au niveau de la partie graphique du PAG l’ensemble du bâti par la Ville pareillement à ce qui est prévu au niveau des parties graphiques des PAP QE, sans que toutefois jusqu’à ce jour, cette promesse n’a été concrètement mise en œuvre.

Dans ce contexte, l’appelante conclut encore à un excès de pouvoir à la fois dans le chef de la commune et du ministre.

Au niveau de sa parcelle Rue de Clausen, initialement classée en zone forestière [FOR], l’appelante entendit la voir classer en zone mixte urbaine [MIX-u]. Il convient d’indiquer que l’accueil partiellement favorable de la réclamation par le ministre a impliqué que partie de la parcelle litigieuse fut reclassée en zone mixte urbaine [MIX-u] et en « secteur protégé d’intérêt communal « environnement construit - C » » soumis au PAP QE intitulé [SPR-cl] sur une profondeur identique à celle des parcelles adjacentes. Cependant le restant de la parcelle Rue de Clausen a été maintenu en zone forestière [FOR] sur une bande de 6 mètres entre la « zone mixte urbaine [MIX-u] » ainsi modifiée et la « zone d’habitation 1 [HAB-1] », de sorte à permettre, à moyen ou à long terme, une connexion de mobilité douce entre la Rue de Clausen et le site du séminaire de Luxembourg, Centre Jean XXIII.

L’appelante reproche aux premiers juges d’avoir retenu que la connexion de mobilité douce mise en avant par le ministre répondrait aux finalités d’intérêt général d’utilisation rationnelle du sol et de protection de l’environnement telles que prévues par les points a) et c) de l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

Notant que pareille connexion de mobilité douce se serait envisagée à moyen ou à long terme, l’appelante critique surtout le caractère purement abstrait et hypothétique de l’affirmation des parties publiques sans projet concret ni même documentation prouvant l’existence d’une réelle réflexion afférente. Elle suppute que le moment venu le terrain classé en zone forestière [FOR] pourrait être acquis par la partie publique à une valeur moindre et plus intéressante par elle.

L’appelante met encore en exergue que son terrain constitue une véritable « Baulücke » et que l’amputation d’une bande de six mètres de terrain constructible reviendrait à rendre toute utilisation rationnelle du sol impossible à l’endroit.

Elle critique encore le projet de piste cyclable pour être hypothétique, dans la mesure où la topographie à forte déclivité vers le Centre Jean XXIII rendrait pareille entreprise quasiment illusoire.

L’appelante met encore en exergue que le nouveau classement, même s’il était plus favorable que celui antérieur, contreviendrait néanmoins au principe de proportionnalité dans la 6mesure où le même objectif pourrait être obtenu à travers des moyens moins contraignants, de manière à rendre l’entière parcelle constructible sur la profondeur d’ores et déjà admise.

En ordre subsidiaire, même à admettre pour les besoins de la discussion, la nécessité d’un couloir pour une future piste cyclable, la bande de six mètres resterait disproportionnée quant à sa largeur. Pour une piste cyclable, l’appelante estime qu’une largeur de deux mètres serait largement suffisante. Les parties publiques n’auraient pas réussi à apporter des éléments convaincants pour justifier une largeur plus ample.

Ainsi, serait-on en présence d’une flagrante disproportion entre le but poursuivi et les moyens mis en œuvre.

Les parties publiques concluent, chacune en ce qui la concerne, à la confirmation pure et simple du jugement dont appel, essentiellement sur base des motifs déployés par les premiers juges.

A travers son appel, l’appelante continue à solliciter l’annulation de la délibération communale du 13 juin 2016 ayant mis sur orbite le PAG.

Depuis des arrêts de principe de la Cour du 15 décembre 2016 (numéros respectifs 38139C, 38174C et 38175C), la jurisprudence est constante pour retenir que les délibérations de mise sur orbite d’un PAG ne revêtent en principe pas par elles-mêmes des conséquences juridiques concernant plus particulièrement les propriétaires de terrains formant l’assiette du projet de PAG ainsi mis en procédure, de sorte que c’est à juste titre que les premiers juges ont déclaré le recours en annulation afférent irrecevable.

En ce qui concerne le premier volet de l’appel, si d’après l’article 5 de la loi du 19 juillet 2004, le PAG est un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère règlementaire qui se complètent réciproquement et qui couvre l’ensemble du territoire communal qu’elles divisent en diverses zones dont elles arrêtent l’utilisation du sol, la loi n’a cependant pas instauré le PAG en tant qu’inventaire conforme des constructions existantes et à venir sur le territoire communal.

S’il pouvait paraître idéal dans un monde futur de ne voir apparaître dans la partie graphique d’un PAG que les seules constructions existantes qui, pour le surplus se trouvent dûment autorisées, force est cependant de reconnaître à l’heure actuelle qu’au-delà de l’absence de base légale, aucune base de données valable afférente n’existe en ce que, d’un côté, les plans cadastraux, qui partiellement, servent de fond de plan, n’ont eux-mêmes qu’une valeur indicative quant aux droits réels relatifs aux immeubles qu’ils indiquent et ne valent ni titre de propriété ni titre suffisant par rapport aux droits réels en question en ce qu’ils sont classiquement analysés par la jurisprudence en tant que simple indice en la matière ; tandis que la Ville n’avance pas non plus être en possession de documents pouvant servir de fond de plan, tout en fournissant les informations précitées sur l’ensemble du bâti se trouvant de manière dûment autorisé sur le territoire communal. Or, le moyen de l’appelante tente à voir entériner pareil état idéal des choses.

Il convient dès lors de retenir, tel que les premiers juges l’ont dégagé à bon escient, que les immeubles bâtis désignés dans la partie graphique à la fois du PAG et des PAP QE n’ont qu’une valeur indicative et qu’un oubli voire une différence d’indications par rapport à la réalité, au-delà de tout caractère légalement autorisé, ne sauraient tirer à conséquence et, à plus forte raison, entraîner une quelconque annulation.

7L’appel laisse dès lors d’être fondé sous ce premier volet et le jugement dont appel est à confirmer y relativement.

En ce qui concerne le second volet de l’appel concernant le maintien du classement d’une bande de six mètres en zone [FOR], il convient tout d’abord de rappeler que c’est sur l’accueil de la réclamation de l’appelante que le ministre a classé la majeure partie de la parcelle de l’appelante longeant la Rue de Clausen, à concurrence d’une profondeur analogue à celle des parcelles voisines, en zone [MIX-u], tandis que l’appelante réclame actuellement qu’à concurrence de cette profondeur, l’entière parcelle soit classée en zone [MIX-u].

Il convient tout d’abord de signaler qu’eu égard à la largeur de la parcelle classée en zone [MIX-u], le fait qu’une bande de six mètres reste classée en zone [FOR] ne rend pas cette première parcelle inconstructible, ni n’implique une utilisation irrationnelle du sol, ce d’autant plus qu’eu égard au recul observé par la construction en zone [HAB-1] sise à droite en direction de Neudorf, un recul latéral sera à observer au niveau du côté en question sur la parcelle sous analyse.

Compte tenu des éléments de chemin subsistants dans la montée vers le Centre Jean XXIII, le maintien d’une possibilité de passage avec accès à la Rue de Clausen précisément à l’endroit de la parcelle de l’appelante ci-avant entièrement classée en zone [FOR] n’est pas dépourvu de sens et, pour le surplus, participe à une finalité d’intérêt général consistant dans la mise en place de voies d’accès à mobilité douce de manière plus systématique au niveau du territoire de la commune.

Si suivant l’analyse de la Cour, le chemin de mobilité douce à l’endroit revêt toutes les caractéristiques pour le voir qualifier en tant qu’ouvrage correspondant à l’intérêt général et que cette qualification se trouve acquise pour le chemin considéré à lui seul, cette considération se justifierait d’autant plus si l’ancien projet d’une jonction du Tawioun au Cents et des hauteurs au niveau des alentours du Centre Jean XXIII était réalisé de nature à mieux relier, dans un intérêt de mobilité douce, notamment pour vélos et piétons, les hauteurs de Cents et de Weimershof. Dans cette dernière hypothèse, le chemin envisagé sous analyse permettrait de créer une connexion supplémentaire entre le plateau du Cents et la vallée au niveau de la Rue de Clausen à l’endroit.

Quant au principe, aucun dépassement de la marge d’appréciation n’est dès lors à constater en ce que, sur réclamation, le ministre a accueilli la réclamation de l’appelante, sauf à réserver un couloir de 6 mètres de largeur maintenu en zone [FOR] en vue de la réalisation d’une voie d’accès de mobilité douce à l’endroit de manière à relier la Rue de Clausen à la hauteur où se trouve le Centre Jean XXIII et, plus loin, à la rue Jules Wilhelm et dès lors également au Weimershof.

Compte tenu de la forte déclivité du terrain, même à proximité de la Rue de Clausen, une bande de six mètres de largeur n’apparaît pas comme étant disproportionnée en l’occurrence.

Il est vrai que si aucun recul latéral ne devait être observé, une possibilité aurait été de prévoir un passage sous forme de tunnel, suffisamment haut pour tenir compte de la déclivité du terrain, permettant néanmoins une construction à des étages supérieurs. Un recul latéral devant toutefois être observé, cette possibilité moins contraignante n’appert pas utilement.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel laisse d’être fondé et que le jugement dont appel est à confirmer également sous ce deuxième volet.

8Globalement, l’appel est à déclarer non justifié sous tous ses volets et le jugement dont appel à confirmer en conséquence.

L’appelante sollicite l’allocation d’une indemnité de procédure de 5.000 €.

Eu égard à l’issue du litige, cette demande est à rejeter.

La partie étatique demande à voir ordonner la distraction des frais et dépens de l’instance au profit de l’avocat à la Cour concluant affirmant en avoir fait l’avance.

Dans la mesure où pareille distraction, prévue par le Nouveau code de procédure civile devant le juge judiciaire, n’a pas été prévue par la loi au niveau de la procédure administrative contentieuse, cette demande est à rejeter.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel recevable ;

au fond, le dit non justifié ;

partant, en déboute l’appelante ;

confirme le jugement dont appel ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure de l’appelante ;

rejette la demande en distraction de l’avocat à la Cour de la partie étatique des dépens d’appel ;

condamne l’appelante aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par:

Francis DELAPORTE, président Henri CAMPILL, vice-président, Lynn SPIELMANN, conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier assumé ….

s. MORIS s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 6 mai 2021 Le greffier de la Cour administrative 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44797C
Date de la décision : 06/05/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2021-05-06;44797c ?

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