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11/02/2021 | LUXEMBOURG | N°45389C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 11 février 2021, 45389C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 45389C du rôle Inscrit le 17 décembre 2020 Audience publique du 11 février 2021 Appel formé par l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg contre un jugement du tribunal administratif du 17 novembre 2020 (n° 43028 du rôle) ayant statué sur le recours de Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale Vu l’acte d'appel inscrit sous le numéro 45389C du rôle et déposé au greffe de la Cour administrative le 17 décembre 2020 par Monsieur le délégué du gouv

ernement Yannick GENOT, agissant au nom et pour compte de l'Etat du Grand-Du...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 45389C du rôle Inscrit le 17 décembre 2020 Audience publique du 11 février 2021 Appel formé par l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg contre un jugement du tribunal administratif du 17 novembre 2020 (n° 43028 du rôle) ayant statué sur le recours de Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale Vu l’acte d'appel inscrit sous le numéro 45389C du rôle et déposé au greffe de la Cour administrative le 17 décembre 2020 par Monsieur le délégué du gouvernement Yannick GENOT, agissant au nom et pour compte de l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg, en vertu d'un mandat lui conféré à cet effet par le ministre de l’Immigration et de l’Asile le 15 décembre 2020, dirigé contre le jugement du 17 novembre 2020 (n° 43028 du rôle) par lequel le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg a déclaré fondé le recours introduit par Monsieur …, né le … à … (Somalie), de nationalité somalienne, demeurant à L-…, contre la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 29 avril 2019 portant refus de sa demande de protection internationale et ordre de quitter le territoire et, par réformation de ladite décision ministérielle, lui a accordé le statut de réfugié au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire et annulé l’ordre de quitter le territoire ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 8 janvier 2021 par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, préqualifié ;

Vu l’accord des mandataires des parties de voir prendre l’affaire en délibéré sur base des mémoires produits en cause et sans autres formalités ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;

Sur le rapport du magistrat rapporteur, l’affaire a été prise en délibéré sans autres formalités à l’audience publique du 4 février 2021.

1Le 10 septembre 2018, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après « la loi du 18 décembre 2015 ».

En date du même jour, il fut entendu par un agent du service de police judiciaire de la police grand-ducale sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg.

En date du 15 février 2019, Monsieur … fut auditionné par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 29 avril 2019, notifiée par un courrier recommandé expédié le même jour, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après « le ministre », informa Monsieur … que sa demande de protection internationale avait été rejetée comme étant non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Cette décision est libellée comme suit :

« (…) J’ai l’honneur de me référer à votre demande en obtention d’une protection internationale que vous avez introduite le 10 septembre 2018 sur base de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après dénommée « la Loi de 2015 »).

Je suis malheureusement dans l’obligation de porter à votre connaissance que je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à votre demande pour les raisons énoncées ci-après.

1. Quant à vos déclarations En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 10 septembre 2018 et le rapport d’entretien de l’agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes du 15 février 2019 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale.

Monsieur, il ressort de vos déclarations que vous seriez né le … à … dans le Somaliland, où vous auriez vécu avec votre mère. Vous indiquez que votre père serait décédé alors que vous n'étiez qu'un enfant. D'après vos dires, vous seriez marié depuis le … avec … et vous seriez le père d'… .

Vous appartiendrez au clan de « Muse Abdele/Habar Yunis ».

En ce qui concerne les raisons de votre fuite, vous indiquez que « wir wurden in meinem Heimatland wie Sklaven behandelt » (p. 8/ 20 rapport d'entretien). Dans ce contexte, vous précisez que vos oncles paternels vous auraient menacé et rejeté dès le début en raison du fait que votre mère serait d'un clan minoritaire, tout en soulignant que ces derniers n'auraient à aucun moment accepté le mariage de vos parents. En février 2015, vos oncles vous auraient enchaîné et vous auraient emmené à la police en demandant que vous soyez emprisonné - vous précisez ignorer la raison de votre détention. Après un mois en détention, votre état de santé se serait dégradé et vous auriez été transféré dans un hôpital pour être soigné. Après un séjour de quatre jours, vous vous seriez enfui et seriez retourné chez votre mère qui vous aurait caché pendant un an.

2Vous vous seriez enfui en mai 2016 à … en Éthiopie, où vous auriez vécu pendant environ neuf mois. Vous y auriez rencontré votre future épouse. En mars 2017, vous auriez finalement décidé de quitter l'Ethiopie et de partir en direction de l'Europe avec l'aide d'un passeur.

Vous ajoutez finalement que le fait que la famille de votre épouse aurait menacé de vous tuer si vous ne quittez pas leur fille et le fait que vous auriez été enlevé par Al Shabab lors de votre enfance pour un entraînement militaire dans un camp près de Mogadiscio auraient conforté votre décision de quitter votre pays d'origine.

Quant à votre trajet, vous indiquez que vous auriez quitté l'Ethiopie en direction du Yémen.

Par la suite, vous auriez traversé le Soudan pour rejoindre la Libye, d'où vous auriez traversé la Méditerranée en direction de Malte. Dans ce contexte, il convient de soulever que vous indiquez lors de votre entretien à Malte que vous auriez quitté votre pays d'origine en raison d'un « lack of education and work opportunities. » (p. 7 rapport d'entretien Malte). Vous avez bénéficié du programme de « relocalisation » et êtes arrivé à Luxembourg le 10 septembre 2018.

Vous ne présentez aucun document d'identité.

2. Quant à la motivation du refus de votre demande de protection internationale Suivant l’article 2 point h de la Loi de 2015, le terme de protection internationale désigne d’une part le statut de réfugié et d’autre part le statut conféré par la protection subsidiaire.

Dès lors la véracité de votre récit est formellement contestée.

 Quant au refus du statut de réfugié Les conditions d’octroi du statut de réfugié sont définies par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après dénommée « la Convention de Genève ») et par la Loi de 2015.

Aux termes de l’article 2 point f de la Loi de 2015, qui reprend l’article 1A paragraphe 2 de la Convention de Genève, pourra être qualifiée de réfugié : « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 45 ».

L’octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par un des critères de fond définis à l’article 2 point f de la Loi de 2015, que ces actes soient d’une gravité suffisante au sens de l’article 42 paragraphe 1 de la prédite loi, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l’article 39 de la loi susmentionnée.

3Monsieur, en ce qui concerne les menaces de vos oncles et des membres de la famille de votre épouse, il convient de noter que ces faits relèvent a priori du champ d'application de la Convention de Genève, étant donné qu'il existe une crainte de persécution en raison de votre race.

En effet, vos oncles vous auraient uniquement rejeté car ils n'auraient pas approuvé le mariage de votre père avec une femme d'un clan minoritaire.

Dans ce contexte, il convient néanmoins de soulever que vous indiquez que vous seriez issu du clan « Muse Abdele/Habar Yunis » qui est considéré comme un sub-clan de la « principale famille clanique » au Somaliland les « Isaaq ». D'après l'analyse du Ministère de l'intérieur britannique « there is not cogent evidence to indicate that members of majority clans are at risk of persecution or serious harm based on their clan membership alone. ». Ainsi, l'autorité ministérielle constate que vos craintes par rapport à votre appartenance clanique ne constituent pas une crainte fondée de persécution au sens de la prédite Convention.

Quand bien même ces faits seraient à considérer comme des actes de persécution, l'autorité ministérielle est amenée à soulever qu'une persécution commise par des tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités pour l'un des motifs énoncés par ladite Convention et dont l'existence doit être mise suffisamment en évidence par le demandeur de protection internationale. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce.

En effet, il ne ressort pas du rapport d'audition que la police ou d'autres organisations étatiques présentes sur le territoire de votre pays ne peuvent ou ne veulent pas vous accorder une protection à l'encontre de vos oncles et des membres de la famille de votre épouse. Vous déclarez même que vous n'avez jamais requis la protection des autorités de votre pays et par conséquent, il n'est pas démontré que les autorités du Somaliland seraient dans l'incapacité de vous fournir une protection quelconque.

En ce qui concerne votre prétendu enlèvement par Al Shabab lors de votre enfance, l'autorité tient à soulever que d'après les informations fournies par EASO « there have been no recorded terror attacks by AS in Somaliland since 2008 and the group is deemed incapable of executing targeted assassinations in Somaliland. ». Ainsi, l'autorité ministérielle conclut qu'il n'existe actuellement aucun risque de persécution futur de la part d'Al Shabab dans votre chef au sein de votre région d'origine.

Relevons finalement que des motifs économiques et de convenance personnelle sous-tendent votre demande de protection internationale. En effet, vous déclarez lors de votre entretien à Malte que vous auriez quitté votre pays d'origine en raison d'un « lack of education and work opportunities. » (p. 7 rapport d'entretien Malte). Or, veuillez noter que de tels motifs économiques ainsi que la volonté de travailler en Europe ne sauraient justifier une demande de protection internationale, à défaut de tomber dans le champ d'application de la Convention de Genève.

Eu égard à tout ce qui précède, il échet de relever que vous n’apportez aucun élément de nature à établir qu’il existerait de sérieuses raisons de croire que vous auriez été persécuté, que vous auriez pu craindre d’être persécutée respectivement que vous risquez d’être persécuté en cas de 4retour dans votre pays d’origine, de sorte que le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

 Quant au refus du statut conféré par la protection subsidiaire Aux termes de l’article 2 point g de la Loi de 2015 « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes 1 et 2, n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays » pourra obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire.

L’octroi de la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués soient qualifiés d’atteintes graves au sens de l’article 48 de la Loi de 2015 et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l’article 39 de cette même loi.

L’article 48 définit en tant qu’atteinte grave « la peine de mort ou l’exécution », « la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine » et « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

Eu égard à tout ce qui précède, il échet de relever que vous n’apportez aucun élément crédible de nature à établir qu’il existerait de sérieuses raisons de croire que vous encouriez, en cas de retour dans votre pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l’article 48 précité, de sorte que le statut conféré par la protection subsidiaire ne vous est pas accordé.

Votre demande de protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens des articles 26 et 34 de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire.

Votre séjour étant illégal, vous êtes dans l’obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive, à destination de l’Ethiopie, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisée à séjourner (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 28 mai 2019, Monsieur … fit introduire un recours tendant à la réformation de la décision précitée du ministre du 29 avril 2019 portant refus de faire droit à sa demande de protection internationale, ainsi qu’un recours en réformation contre l’ordre de quitter le territoire y énoncé.

Par jugement du 17 novembre 2020, le tribunal administratif déclara le recours en réformation recevable et fondé et, par réformation de la décision querellée, accorda à Monsieur … le statut de réfugié au sens de la loi du 18 décembre 2015, renvoya l’affaire devant le ministre pour exécution et annula l’ordre de quitter le territoire, tout en condamnant l’Etat aux frais de l’instance.

5Le tribunal constata en premier lieu que les faits mis en avant par le demandeur, en relation avec la milice terroriste « Al Schabaab », ne pouvaient justifier l’octroi du statut de réfugié dans son chef, étant donné que ces faits s’inscrivaient sur la toile de fond particulière d’un enlèvement d’enfant dans l’objectif d’en faire un enfant soldat, situation qui ne risquait pas de se reproduire au regard de la majorité du demandeur, âgé actuellement, d’après ses propres déclarations, d’au moins 20 ans.

Sur ce, ils retinrent que les autres faits invoqués par Monsieur …, à savoir les agissements de ses oncles paternels et de sa belle-famille, étaient fondés sur des motifs relevant du champ d’application de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, ci-après « la Convention de Genève », Monsieur … ayant expliqué que ces faits étaient motivés par des considérations ethniques, et plus particulièrement par l’appartenance de sa mère au clan des « Gobaye », considéré comme étant « inférieur » par les autres clans, et que dans ce contexte il avait été agressé physiquement et menacé de mort par ses oncles paternels. Les premiers juges relevèrent encore que lesdits oncles avaient été à l’origine de son emprisonnement arbitraire d’un mois, effectué sur leur initiative par les forces de l’ordre somaliennes sans motif spécifique et sans jugement, et que sa belle-famille avait rejeté son épouse, également sur base des mêmes considérations ethniques, et qui serait actuellement prise en charge par la mère du demandeur.

Quant à la gravité des faits mis en avant, le tribunal nota que le demandeur avait fait l’objet d’agressions physiques et de menaces de mort et qu’il avait été détenu arbitrairement pendant un mois, faits qui, aux yeux des premiers juges, présentaient, de par leur nature et leur caractère répété, indéniablement une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe 1er, de la loi du 18 décembre 2015.

Quant aux acteurs des persécutions, le tribunal constata que, même s’il s’agissait de personnes privées, ces dernières avaient été soutenues par les autorités policières somaliennes, dans la mesure où Monsieur … avait fait l’objet, en tant que mineur, d’un emprisonnement arbitraire pour une durée d’un mois, sans avoir a priori commis la moindre infraction et sans avoir fait l’objet d’une condamnation judiciaire. Il releva encore qu’il ressortait du rapport du « UK Home office », intitulé « Country Policy and Information Note Somalia : Majority clans and minority groups in south and central Somalia », que les autorités répressives et judiciaires somaliennes étaient notoirement inefficaces faute de moyens, de formation et de qualification, ainsi qu’en raison de problèmes de corruption et d’influence clanique, de sorte qu’il y avait lieu de retenir, vu les circonstances particulières du cas d’espèce, que Monsieur … n’avait pas valablement pu obtenir une quelconque protection de la part des autorités de son pays.

Finalement, le tribunal souligna que l’article 37, paragraphe (4), de la loi du 18 décembre 2015 instaurait une présomption - réfragable - en faveur de la victime qui a déjà été persécutée ou a déjà subi des atteintes graves, que sa crainte d’être à nouveau persécutée en cas de retour dans son pays d’origine était fondée, à moins qu’il n’existait de bonnes raisons de penser que cette persécution ou ces atteintes graves ne se reproduiront pas, la preuve de « telles bonnes raisons » appartenant au ministre. Sur ce, il constata que ni le ministre, ni le délégué du gouvernement n’avaient mis en avant un quelconque élément permettant de conclure que les actes de persécution, basés sur des considérations ethniques, ne seraient pas susceptibles de se reproduire à l’égard de Monsieur … en cas de retour en Somalie.

6 Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 17 décembre 2020, l’Etat a régulièrement fait entreprendre le jugement du 17 novembre 2020.

Le délégué du gouvernement relève en premier lieu qu’il se dégage des déclarations faites par Monsieur …, au moment de son enregistrement à Malte et lors de son entretien de relocalisation effectué à Malte en date du 27 août 2018, qu’il n’aurait pas eu de problèmes personnels en Somalie, qu’il aurait vécu depuis l’âge de 14 ans en Ethiopie et qu’il ne pourrait pas retourner en Somalie en raison du manque d’éducation et d’opportunités professionnelles. Il estime encore que la partie étatique serait dans l’impossibilité d’effectuer une synthèse logique des déclarations faites à Luxembourg par l’intimé quant aux motifs justifiant sa demande de protection internationale, ceci au vu des innombrables contradictions et incohérences, ce d’autant plus que l’intéressé n’aurait remis aucun document à l’appui de sa demande de protection internationale.

D’après le représentant étatique, la crédibilité générale de Monsieur … serait à remettre en question, celui-ci tentant pour le surplus d’étoffer son récit au fur et à mesure de l’avancement de la procédure afin d’augmenter ses chances de se voir octroyer une protection internationale.

A côté des contradictions relevées entre le contenu des deux entretiens menés à Malte et celui à Luxembourg, le délégué cite encore de nombreuses déclarations faites par Monsieur … à Luxembourg, qualifiées de contradictoires, erronées, incohérentes et farfelues, en relation notamment avec (i) sa date de mariage, (ii) la possibilité d’obtenir un passeport en Somalie, (iii) le lieu de séjour de son épouse et de sa fille, (iv) les agressions et menaces subies de la part de ses oncles paternels, (v) les conditions de sa détention, (vi) sa vie en cachette après sa prétendue fuite de prison, (vii) son retour volontaire en Somalie après son séjour en Ethiopie, (viii) la composition de sa fratrie et (ix) les motifs supplémentaires de fuite invoqués à la fin de son entretien concernant les menaces de la part de sa belle-famille et son prétendu enlèvement par la milice « Al-Shabaab ».

Partant, il conviendrait de retenir que l’intimé n’aurait pas joué franc jeu avec la partie étatique et qu’il aurait inventé un récit de toutes pièces, comportement qui serait inacceptable et qui constituerait un abus des procédures en matière de protection internationale.

Même à supposer que les déclarations de Monsieur … soient véridiques, le délégué du gouvernement soutient que l’intimé aurait lui-même estimé que la situation en Somalie ne serait pas d’une gravité telle à rendre une fuite à l’étranger indispensable. Ainsi, après sa libération de prison, il n’aurait pas quitté de suite la Somalie mais se serait caché pendant plus d’une année auprès de membres de la famille de sa mère avant de partir pour l’Ethiopie. Par la suite, il aurait décidé de retourner de nouveau à … en Somalie au lieu de rester en Ethiopie respectivement de partir à destination d’un pays sûr. Le représentant étatique relève encore que l’intimé ne fournirait aucun élément concret permettant d’établir que ses oncles auraient tenté de le tuer, ce d’autant plus que rien ne l’obligerait à l’avenir, en tant que majeur, à aller vivre de nouveau à proximité de ceux-ci. Finalement, le représentant étatique note que Monsieur … resterait très vague dans ses explications concernant les prétendus problèmes avec sa belle-famille et qu’il ne fournirait aucun indice concret permettant d’établir qu’il risquerait d’être persécuté par celle-ci.

7Monsieur …, de son côté, demande en ordre principal la confirmation pure et simple du jugement dont appel.

Après avoir rappelé sa version des faits à la base de sa demande de protection internationale, l’intimé soutient que la partie étatique ne pourrait pas mettre en doute sa crédibilité « et cela pour la première fois en instance d’appel », ce d’autant plus que les éléments mis en avant pour contester sa crédibilité seraient tous issus du rapport d’entretien déjà effectué en date du 15 février 2019. Partant, le moyen étatique serait à rejeter pour avoir été invoqué tardivement.

Cet argumentaire est cependant à rejeter.

En effet, il y a lieu de noter en premier lieu que si le ministre, dans sa décision du 29 avril 2019, n’a pas formellement remis en cause la crédibilité du récit de l’intimé, celui-ci a cependant clairement relevé que l’intéressé avait déclaré lors de son entretien à Malte avoir quitté son pays d’origine en raison d’un « lack of education and work opportunities », c’est-à-dire pour des motifs économiques, déclaration reprise par le délégué du gouvernement pour relever que le récit de Monsieur … serait contradictoire et partant non crédible.

Pour le surplus, le constat que le moyen étatique tiré du prétendu défaut de crédibilité de l’intimé a été invoqué pour la première fois dans la requête d’appel n’emporte pas à conséquence, étant donné que l’article 41 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives prévoit expressément que les moyens nouveaux sont admis en instance d’appel, y compris des moyens présentés par une partie défenderesse initiale.

Ainsi, il convient de rappeler que quoiqu’un moyen déterminant ne soit concrètement fourni qu’en instance d’appel par la partie publique, cette fourniture n’en est pas moins valable en tant que complément de motivation indiqué en phase contentieuse et ayant existé dès le moment de la prise de la décision ministérielle critiquée. Cette faculté de fourniture complémentaire de motifs ayant existé au jour de la prise de la décision litigieuse doit être entrevue parallèlement à la faculté de l’administré de produire en phase contentieuse des moyens complémentaires par rapport à ceux fournis en phase précontentieuse ainsi qu’à celle pour les parties de produire des moyens nouveaux en instance d’appel, non invoqués antérieurement. Les droits de la défense de la partie intimée ne sont pas lésés de la sorte, celle-ci ayant pu valablement prendre position en phase contentieuse, en l’occurrence par la fourniture de son mémoire en réponse. Pour les mêmes raisons, les exigences d’un procès équitable telles que posées par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) se trouvent également rencontrées (cf. Cour adm. 12 juillet 2012, n° 30555C du rôle, Pas adm. 2020, V° Procédure contentieuse, n° 1062).

Par rapport aux contradictions soulevées par la partie étatique pour mettre en doute la crédibilité du récit de Monsieur …, celui-ci soutient que lesdites contradictions seraient manifestement grossières et s’expliqueraient par des difficultés d’expression et du fait qu’il ne disposerait pas de toutes ses facultés de discernement, fait que son mandataire aurait porté à la connaissance du ministère par un courrier du 17 février 2019. Ainsi, il n’aurait jamais eu l’intention d’induire l’autorité ministérielle en erreur, mais il souffrirait de difficultés de discernement qui le rendraient inapte à réaliser son entretien devant l’agent en charge de son audition.

8 En ordre subsidiaire, Monsieur … sollicite l’octroi du statut conféré par la protection subsidiaire.

Il soutient être exposé, en cas de retour dans son pays d’origine, au risque de subir des atteintes graves, telles que définies à l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015, et notamment à des actes de harcèlement et de discrimination. Dans ce contexte, il fait valoir qu’à défaut de définition légale contenue à l’article 48, point b), de la loi du 18 décembre 2015 des notions de torture et de traitements inhumains ou dégradants, il conviendrait de se rapporter à l’interprétation donnée par la Cour européenne des droits de l’homme à partir des dispositions de l’article 3 de la CEDH. Il estime ainsi que le fait de vivre dans la crainte permanente de subir de telles atteintes graves constituerait un véritable traitement inhumain, sinon dégradant au sens de l’article 3 de la CEDH.

Finalement, au dispositif de son mémoire en réponse, l’intimé sollicite encore l’institution d’une mesure d’instruction complémentaire par la nomination d’un expert médical pour analyser son « état de santé mentale eu égard aux traumatismes subis tant dans son pays d’origine qu’en Lybie et sa capacité à répondre aux questions ministérielles de manière ordonnée ».

Il se dégage de la combinaison des articles 2 sub h), 2 sub f), 39, 40 et 42, paragraphe 1er, de la loi du 18 décembre 2015 que l’octroi du statut de réfugié est notamment soumis aux conditions que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond y définis, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe 1er, de la loi du 18 décembre 2015, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 39 et 40 de ladite loi, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles sont à qualifier comme acteurs seulement dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 39 de la loi du 18 décembre 2015 ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions et, enfin, que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son pays d’origine.

L’octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis à la double condition que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c) de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 39 et 40 de cette même loi, étant relevé que les conditions de la qualification d’acteur sont communes au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire. La loi du 18 décembre 2015 définit la personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle était renvoyée dans son pays d’origine, elle « courrait un risque réel de subir des atteintes graves définies à l’article 48 ».

Il s’y ajoute que dans la mesure où les conditions sus-énoncées doivent être réunies cumulativement, le fait que l’une d’entre elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure qu’un demandeur ne saurait bénéficier d’une protection internationale.

Dans ce contexte, il convient de rappeler qu’il incombe au demandeur d’asile de rapporter, dans toute la mesure du possible, la preuve des faits, craintes et persécutions par lui allégués, sur base d’un récit crédible et cohérent et en soumettant aux instances compétentes le cas échéant les documents, rapports, écrits et attestations nécessaires afin de soutenir ses affirmations. En effet, 9l’administration reste passive au cours d’une première phase de l’instruction de la demande d’asile, en collectant les informations orales et écrites lui soumises par le demandeur d’asile, avant de procéder elle-même à ses propres investigations non seulement quant à la situation générale du pays d’origine dont se déclare être originaire le demandeur d’asile, mais également quant à sa situation particulière. Il appartient partant au demandeur d’asile de mettre l’administration en mesure de saisir l’intégralité de sa situation personnelle (cf. Cour adm. 14 octobre 2004, n° 18283C du rôle, Pas adm. 2020, V° Etrangers, n° 58).

Ceci étant rappelé, dans le cadre du recours en réformation dans lequel il est amené à statuer sur l’ensemble des faits lui dévolus, le juge administratif doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur d’asile en ne se limitant pas à la pertinence des faits allégués, mais il se doit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur d’asile, la crédibilité du récit constituant en effet un élément d’appréciation fondamental dans l’appréciation du bien-fondé d’une demande de protection internationale, et plus particulièrement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut.

Sur ce, la Cour est amenée à constater sur base des éléments d’appréciation soumis en cause que Monsieur … n’a pas fait état de manière crédible qu’il existerait des raisons sérieuses de croire qu’il encourrait, en cas de retour dans son pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des persécutions ou des atteintes graves au sens de la loi du 18 décembre 2015.

En effet, cette conclusion s’impose à la lumière de son revirement de position fondamental au fil de ses auditions à Malte d’abord, où il avait déposé initialement sa demande de protection internationale et où il a été auditionné en vue d’une éventuelle relocalisation, et à Luxembourg par la suite.

Ainsi, il convient de relever qu’il se dégage de la fiche d’enregistrement de sa demande de protection internationale auprès des autorités maltaises du 22 août 2018 que, à la question de savoir pour quelle raison il avait quitté la Somalie et à un deuxième stade l’Ethiopie, Monsieur … a répondu « because of lack of education and work opportunities. In Ethiopia I could not live because there was violence between the government and civilians ». A la question de savoir pour quelle raison il ne pourrait pas rentrer dans son pays d’origine, il a répondu « I cannot go back to Somalia because I do not have hope of getting a job or education ». Enfin, à la question « did anything else ever happen to you », l’intimé a répondu formellement par la négative, tout en ajoutant « except my siblings died in a car accident and my father was killed. I do not know who killed my father ».

A l’occasion de son entretien du 27 août 2018 à Malte avec un agent ministériel luxembourgeois en vue d’une relocalisation éventuelle au Luxembourg, Monsieur … précisa entre autres avoir quitté la Somalie à l’âge de … ans en les termes suivants : « I went to live in Ehiopia when I was …. I went on my own. My mother stayed in Somalia. Since then we only communicate by telephone.

I never saw her since then. I went by myself without anyone. I[t] was to save my life. I stayed in a refugee camp. …. I stayed there 6-7 months. There were many problems in the region of Somalia where I lived. There was a lot of clan violence. That is the reason I left. They don’t kill the troublemakers, they kill innocent people. I don’t remember if my family was involved. I did not have any problems myself, I ran away before. (…)».

10 Ainsi, si initialement, lors de son premier entretien à Malte, l’intéressé était formel à déclarer avoir quitté son pays d’origine à l’âge de … ans principalement pour des raisons de manque d’éducation et d’opportunités professionnelles, il a encore ajouté, au moment de son deuxième entretien à Malte, avoir également quitté la Somalie en raison d’un climat d’insécurité généralisée dû à des violences entre divers clans.

Arrivé au Luxembourg, l’intimé change cependant radicalement sa position lors de son entretien devant l’agent en charge de son audition, en invoquant subitement des actes de persécution trouvant leur origine dans l’appartenance de sa mère au clan minoritaire des « Gobaye » et des menaces subséquentes et agressions physiques perpétrées par ses oncles paternels, ayant culminé en février 2015 en un emprisonnement arbitraire d’un mois. Par la suite, il serait encore resté en Somalie pendant plus d’une année avant de s’enfuir pour l’Ethiopie à l’âge approximatif de … ans, pays dans lequel il aurait rencontré sa future épouse, ce qui aurait provoqué la colère de la famille de celle-ci, opposée à leur union, et qui l’aurait également menacé de mort. Finalement, Monsieur … a encore relevé lors de son entretien à Luxembourg avoir été kidnappé en tant qu’enfant par la milice « Al Shabaab ».

Face à pareil changement radical de position du demandeur de protection internationale, c’est à juste titre que le délégué du gouvernement a remis en question la crédibilité du récit de l’intéressé dans sa globalité.

Ce manque de crédibilité de l’intimé se trouve encore corroboré par les nombreuses autres incohérences et contradictions relevées in extenso par le délégué dans sa requête d’appel (pages 6 – 12) laissant croire que le récit final présenté par l’intéressé est inventé de toutes pièces et qu’aucun crédit ne saurait être accordé à ses déclarations, de sorte qu’il y a lieu de conclure à l’absence de raisons sérieuses de croire que Monsieur … encourt, en cas de retour dans son pays d’origine, un risque réel et avéré de subir des persécutions ou des atteintes graves, les raisons l’ayant poussé à quitter la Somalie étant, au contraire, à rechercher au niveau purement économique dû à un manque d’éducation et d’opportunités professionnelles, lequel ne saurait justifier une crainte fondée de persécution.

Cette attitude incohérente remettant en doute la crédibilité de l’intégralité du récit présenté par Monsieur … ne saurait non plus trouver son explication en des difficultés de discernement dans le chef de celui-ci au moment de son entretien le 15 février 2019 à Luxembourg.

En effet, de prétendues difficultés de discernement dans le chef de Monsieur …, non étayées par la moindre pièce versée en cause et qui sont partant restées au stade de simples allégations, ne sont pas de nature à démontrer que l’intéressé a présenté au final un récit crédible et cohérent, étant rappelé qu’il appartient au demandeur d’asile de mettre l’administration en mesure de saisir l’intégralité de sa situation personnelle, le cas échéant, en produisant des rapports, écrits et attestations afin de soutenir ses affirmations, ce que l’intimé n’a précisément pas fait dans l’affaire sous rubrique.

Or, dans ces circonstances d’un ébranlement manifeste de la crédibilité de l’ensemble du récit du demandeur de protection internationale, l’intéressé ne saurait bénéficier ni du statut de réfugié, ni 11du statut conféré par la protection subsidiaire, et sans qu’il ne soit encore nécessaire de procéder à une mesure d’instruction supplémentaire visant en définitive à voir suppléer à la carence de la partie intimée dans l’administration d’une preuve qu’il lui incombe en principe de rapporter.

Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel étatique dirigé contre le jugement entrepris est fondé et que la demande de protection internationale de l’intéressé n’est justifiée ni dans son volet principal, ni dans celui subsidiaire, de manière que ledit jugement encourt la réformation dans le sens que le recours contentieux dirigé par l’intimé contre la décision ministérielle du 29 avril 2019 portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et ordre de quitter le territoire est à rejeter.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

reçoit l’appel étatique du 17 décembre 2020 en la forme ;

au fond, le déclare justifié ;

partant, par réformation du jugement du 17 novembre 2020, rejette le recours en réformation dirigé par Monsieur … contre la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 29 avril 2019 portant refus de sa demande de protection internationale et ordre de quitter le territoire ;

condamne l’intimé aux dépens des deux instances.

Ainsi délibéré et jugé par :

Serge SCHROEDER, premier conseiller, Lynn SPIELMANN, conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller, et lu par le premier conseiller en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Jean-Nicolas SCHINTGEN.

s. SCHINTGEN s. SCHROEDER Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 11 février 2021 Le greffier de la Cour administrative 12



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 11/02/2021
Date de l'import : 17/02/2021

Numérotation
Numéro d'arrêt : 45389C
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2021-02-11;45389c ?

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