GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 44701C du rôle Inscrit le 23 juillet 2020
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Audience publique du 31 décembre 2020 Appel formé par Monsieur …, …, contre un jugement du tribunal administratif du 22 mai 2020 (n° 38826 du rôle) ayant statué sur son recours dirigé contre le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 portant modification de plusieurs règlements grand-ducaux concernant l’éducation nationale en matière d’actes administratifs à caractère réglementaire Vu la requête d'appel inscrite sous le numéro 44701C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 23 juillet 2020 par Maître Ferdinand BURG, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, professeur de l’enseignement secondaire et secondaire technique, demeurant à L-… …, …, …, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 22 mai 2020 (n° 38826 du rôle) ayant déclaré irrecevable son recours en annulation du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 portant modification 1.
du règlement grand-ducal modifié du 27 juillet 1997 fixant les modalités d'engagement et les conditions de travail des chargés d'éducation à durée déterminée des lycées et lycées techniques publics ;
2.
du règlement grand-ducal modifié du 27 juillet 1997 fixant les modalités d'engagement et les conditions de travail de deux cents chargés d'éducation à durée indéterminée des lycées et lycées techniques publics ;
3.
du règlement grand-ducal modifié du 31 juillet 2006 portant organisation de l'examen de fin d'études secondaires ;
4.
du règlement grand-ducal modifié du 31 juillet 2006 portant organisation de l'examen de fin d'études secondaires techniques et de l'examen de fin d'études de la formation de technicien ;
5.
du règlement grand-ducal modifié du 24 juillet 2007 portant fixation de la tâche des enseignants des lycées et lycées techniques ;
6.
du règlement grand-ducal modifié du 20 septembre 2002 portant fixation des indemnités dues aux membres des commissions d'examen, aux experts et aux deuxièmes correcteurs des examens de fin d'études secondaires et secondaires techniques ;
7.
du règlement grand-ducal modifié du 28 avril 2011 portant fixation des indemnités dues aux membres des équipes d'évaluation, aux experts et surveillants des projets intégrés, tout en rejetant sa demande en allocation d’une indemnité de procédure et en le condamnant aux frais ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 octobre 2020 par Madame le délégué du gouvernement Jeannine DENNEWALD ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 13 novembre 2020 par Maître Ferdinand BURG au nom de la partie appelante ;
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont appel ;
Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Ferdinand BURG et Madame le délégué du gouvernement Jeannine DENNEWALD en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 17 décembre 2020.
En date du 13 septembre 2016 fut publié au Mémorial A n° 194 le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 portant modification de plusieurs règlements grand-ducaux concernant l’Education nationale, ci-après « le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 », les dispositions à travers lui modifiées étant :
1. le règlement grand-ducal modifié du 27 juillet 1997 fixant les modalités d'engagement et les conditions de travail des chargés d'éducation à durée déterminée des lycées et lycées techniques publics ;
2. le règlement grand-ducal modifié du 27 juillet 1997 fixant les modalités d'engagement et les conditions de travail de deux cents chargés d'éducation à durée indéterminée des lycées et lycées techniques publics ;
3. le règlement grand-ducal modifié du 31 juillet 2006 portant organisation de l'examen de fin d'études secondaires ;
4. le règlement grand-ducal modifié du 31 juillet 2006 portant organisation de l'examen de fin d'études secondaires techniques et de l'examen de fin d'études de la formation de technicien ;
5. le règlement grand-ducal modifié du 24 juillet 2007 portant fixation de la tâche des enseignants des lycées et lycées techniques ;
6. le règlement grand-ducal modifié du 20 septembre 2002 portant fixation des indemnités dues aux membres des commissions d'examen, aux experts et aux deuxièmes correcteurs des examens de fin d'études secondaires et secondaires techniques ;
7. le règlement grand-ducal modifié du 28 avril 2011 portant fixation des indemnités dues aux membres des équipes d'évaluation, aux experts et surveillants des projets intégrés.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 décembre 2016, Monsieur …, professeur de l’enseignement secondaire et secondaire technique, fit introduire un recours tendant à l’annulation du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 en question.
Ce recours fit partie d’un ensemble de recours groupant une multitude de recours, parmi lesquels, de l’accord des parties, le tribunal choisit le recours introduit au nom d’un professeur de l’enseignement secondaire en éducation physique Monsieur …sous le numéro 38823 du rôle en tant que recours pilote.
Par jugement du 8 décembre 2017, le tribunal déclara ce recours pilote recevable mais non fondé et en débouta le demandeur.
Sur appel du demandeur initial, la Cour, par arrêt du 19 juin 2018 (n° 40638C du rôle), par réformation du jugement dont appel, dit le recours initial recevable uniquement en ce qu’il vise les articles V.1 et V.3 du règlement grand-ducal attaqué du 6 septembre 2016 et le dit irrecevable pour le surplus, tout en soumettant au fond, avant tout autre progrès en cause, une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle.
Par arrêt du 7 décembre 2018 (n° 00141 du registre), la Cour constitutionnelle retint d’abord que l’article 23, alinéa 3, de la Constitution, disposant que « la loi règle pour le surplus tout ce qui est relatif à l’enseignement (…) », par la généralité de ses termes, inclut l’organisation de la tâche des enseignants parmi les matières réservées à la loi.
Dans la mesure cependant où le législateur était libre de prévoir plus particulièrement la participation à la formation continue obligatoire comme faisant partie de la tâche normale des enseignants, de même que le coefficient correcteur litigieux au fond, le fait pour l’article 3 de la loi modifiée du 10 juin 1980 portant planification des besoins en personnel enseignant de l’enseignement post-primaire de ne pas régler plus en avant ces deux points ne rendait pas cet article non conforme à l’article 23, alinéa 3, de la Constitution.
Sur renvoi, la Cour, par arrêt du 12 février 2019 (n° 40638CA du rôle) déduisait de cette constellation que si certes le législateur était libre de ne pas prévoir les deux éléments de la participation à la formation continue obligatoire comme faisant partie de la tâche normale des enseignants et du coefficient correcteur litigieux au niveau de la loi n’impliquait pas moins qu’en application de l’article 23, alinéa 3, de la Constitution, ce n’était pourtant pas le pouvoir réglementaire qui pouvait en disposer librement, mais qu’il appartenait toujours au législateur de ce faire. La Cour en déduisit que du fait que le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 avait, à travers ses articles litigieux V.1 et V.3 balisé cette matière, sans passer par la loi, il était contraire à la fois aux dispositions de l’article 3 de la loi du 10 juin 1980 et de l’article 23, alinéa 3, de la Constitution, et de ce fait encourait l’annulation dans la mesure prévisée.
Dans la mesure où la juridiction administrative n’avait pas définitivement statué au-delà des articles V.1 et V.3 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 critiqué, cinq autres affaires, dont celle sous analyse, furent exposées par la suite devant le tribunal administratif.
Dans l’affaire sous analyse, à travers ses dernières conclusions devant le tribunal, la partie demanderesse limita son recours, notamment compte tenu des antécédents prédécrits, aux seuls articles VI.1, VI.2, VI.3 et VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016. Ceux-ci sont libellés comme suit :
« Art. VI. Le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 portant fixation des indemnités dues aux membres des commissions d’examen, aux experts et aux deuxièmes correcteurs des examens de fin d’études secondaires et secondaires techniques est modifié comme suit :
1. Est inséré un alinéa 2 libellé comme suit : [sic] « La surveillance effectuée par le titulaire de la classe pour les épreuves d’examen, les épreuves complémentaires et les ajournements de sa propre branche ne donne pas lieu à une indemnisation. » 2. Il est ajouté un article 1bis libellé comme suit :
« Art. 1bis. Pour le membre de la commission d’examen pour laquelle il assurait la tenue des cours au cours de l’année terminale, les premières 25 copies de l’épreuve écrite ne sont pas indemnisées ; s’il n’y a pas d’épreuve écrite, cette disposition s’applique aux épreuves pratiques ou orales. Aucune indemnité n’est due pour les activités en 2e session ou dans le cadre des ajournements. » 3. L’article 5 est remplacé par la disposition suivante :
« Art. 5. L’indemnité revenant aux commissaires du Gouvernement est fixée à 37,84 € par examen ou commission. Les directeurs ou leurs délégués, membres des commissions d’examen, ont droit à une indemnité de 13,76 € par commission et par session. » 4. Les articles 6 et 8 sont abrogés. ».
Il est constant en cause que l’article VI du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 portait modification du règlement grand-ducal modifié du 20 septembre 2002 portant fixation des indemnités dues aux membres des commissions d’examen, aux experts et aux deuxièmes correcteurs des examens de fin d’études secondaires et secondaires techniques, ci-après « le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 », de telle manière que ces dispositions s’intégraient entièrement dans le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 avec effet à partir de l’année scolaire 2016/2017.
Entre-temps un règlement grand-ducal du 22 mars 2017 portant fixation des indemnités dues aux membres des commissions d’examens et aux experts des examens de fin d’études secondaires et secondaires techniques, ci-après « le règlement grand-ducal du 22 mars 2017 », est venu baliser la matière et abroger, à travers son article 7, le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002.
Tout comme le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 sous analyse, celui du 22 mars 2017 s’applique à partir de l’année scolaire 2016/2017.
A travers son jugement dont appel du 22 mai 2020, le tribunal dégagea de la constellation réglementaire précitée qu’une annulation des articles VI.1, VI.2, VI.3 et VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 n’aurait plus aucun effet et en tout cas pas l’effet de faire revivre le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 tel qu’ayant existé avant la prise du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016. Le tribunal en déduisit que la partie demanderesse ne saurait dès lors plus tirer le moindre profit d’une annulation des quatre articles par elle visés du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 qui ne sont ainsi plus susceptibles de l’affecter, de sorte que son intérêt à agir contre ce dernier, tel qu’il a effectivement existé au jour de l’introduction de son recours, est venu à disparaître en cours d’instance depuis l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 22 mars 2017.
De la sorte, le tribunal accueillit le moyen d’irrecevabilité pour défaut d’intérêt à agir dans le chef de la partie demanderesse en ce qui concerne sa demande d’annulation des articles VI.1, VI.2, VI.3 et VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016, de manière à déclarer son recours en annulation irrecevable. Le tribunal rejeta encore la demande en allocation d’une indemnité de procédure présentée par la partie demanderesse et la condamna aux frais et dépens de l’instance.
Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 23 juillet 2020, Monsieur … a fait régulièrement entreprendre le jugement précité du 22 mai 2020 dont il sollicite la réformation dans le sens de voir dire son recours initial recevable et fondé et de voir annuler les articles VI.1, VI.2, VI.3 et VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016, sinon, subsidiairement, de voir saisir la Cour constitutionnelle d’une question préjudicielle sur la conformité des dispositions de la loi sur lesquelles s’appuient les articles règlementaires attaqués par rapport à l’article 23 de la Constitution.
La partie appelante déclare ne pas partager l’analyse des premiers juges et insiste sur le double fait que le règlement grand-ducal du 22 mars 2017 a été promulgué en cours de procédure contentieuse et qu’il ne change ni une virgule ni un mot des articles réglementaires actuellement sous discussion introduits dans la réglementation depuis le règlement grand-ducal querellé du 6 septembre 2016.
En reconnaissant qu’il est bien vrai que nul n’est censé ignorer la loi, la partie appelante indique qu’en pratique cette connaissance devient de plus en plus difficile, encore que sans cette règle l’Etat de droit n’existait plus.
La partie appelante estime que l’administré devrait pouvoir se fier aux publications qui sont faites au Mémorial. Elle invoque à la fois les principes de sécurité juridique et de confiance légitime à cet escient. Elle énonce que dans l’exercice de son pouvoir réglementaire, l’Etat doit agir dans l’intérêt général et que précisément dans ce contexte il devrait respecter ces deux principes de sécurité juridique et de confiance légitime.
La partie appelante estime qu’en adoptant le règlement grand-ducal du 22 mars 2017 l’Etat a violé à la fois le principe général de sécurité juridique et celui de la confiance légitime dans son chef, notamment en ce qu’il ne lui appartenait pas, à elle, de vérifier chaque jour dans le Mémorial si l’Etat avait procédé au remplacement de règlements par de nouveaux règlements, le cas échéant suivant des libellés identiques. De plus, cette façon de faire consisterait à court-circuiter les juridictions administratives en les privant d’exercer leur contrôle juridictionnel sur des règlements et compromettrait la sécurité juridique et sa propre confiance légitime d’autant plus qu’aucune motivation n’aurait été livrée à la base de ce changement de réglementation. De la sorte, le caractère effectif du recours serait encore touché. Par ailleurs le règlement grand-ducal du 22 mars 2017 serait critiquable en ce qu’il opérerait un effet rétroactif au début de l’année scolaire 2016/2017.
La partie appelante présente dans ce contexte la demande de voir constater par voie d’exception et sur base des arguments par elle présentés, la nullité du règlement grand-ducal du 22 mars 2017, de sorte à voir dégager que le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 reste toujours d’application et partant attaquable.
La partie appelante insiste encore que l’intérêt à agir ne s’analyse qu’au moment de l’introduction du recours et que partant le tribunal n’aurait pas été en droit de prononcer son irrecevabilité tel qu’il l’a fait. Enfin, le règlement grand-ducal du 22 mars 2017 n’aurait pas abrogé le règlement grand-ducal litigieux du 6 septembre 2016, de sorte que celui-ci resterait toujours applicable et attaquable.
L’Etat demande en substance la confirmation du jugement dont appel.
Le contentieux direct de l’annulation des actes réglementaires, introduit dans la législation luxembourgeoise seulement à travers la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, répond à des critères particuliers à analyser de manière stricte eu égard aux conséquences dirimantes de pareil recours, une fois définitivement accueilli par les juridictions administratives.
En effet, le recours déclaré fondé emporte l’annulation d’une norme réglementaire ayant produit des effets juridiques erga omnes.
L’annulation d’une norme réglementaire comporte que celle-ci disparaît de l’ordonnancement juridique et devient ainsi inexistante juridiquement parlant.
L’importance de ces effets de l’annulation d’un acte réglementaire est reflétée par l’article 7 de la loi précitée du 7 novembre 1996 en ce qu’il prévoit, sur base de la règle du parallélisme des formes, la publication du jugement ou arrêt définitif d’annulation dans les mêmes formes que l’acte annulé. Pour les règlements grand-ducaux le jugement ou arrêt définitif d’annulation doit être publié au Journal Officiel, Mémorial A, dans le mois de la décision juridictionnelle définitive.
Le corollaire des effets particulièrement dirimants du recours direct en annulation d’un acte réglementaire consiste en ce que la requête en annulation doit viser de manière précise les dispositions de l’acte réglementaire attaqué dont l’annulation est demandée.
Il n’est pas concevable, dans le contexte du contentieux direct en annulation des actes réglementaires, de solliciter, en plus par la voie d’exception, l’annulation d’un autre acte réglementaire en vue de faire revivre celui initialement attaqué.
Pareille façon de procéder reviendrait à invalider complètement par la tangente un autre acte réglementaire contre lequel, pourtant, aucun recours direct en annulation n’a été introduit.
La fin de la démarche de la partie appelante réside bien là : n’ayant pas attaqué directement par un recours en annulation le règlement grand-ducal du 22 mars 2017, ni de manière globale, ni dans ses dispositions correspondant à celles par elle critiquées au niveau des articles VI.1 à VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016, elle entend voir dire par la Cour que l’Etat n’aurait pas pu procéder tel qu’il l’a fait et, s’il l’a néanmoins fait, il aurait violé de ce fait les principes généraux de sécurité juridique et de confiance légitime, de même que les règles d’un procès équitable comportant celle de l’effectivité d’un recours engagé.
Tous ces raisonnements se heurtent à l’exigence de précision concernant les dispositions attaquées prévalant au niveau d’un recours direct en annulation dirigé contre un acte réglementaire et leur subsistance au moment où le juge administratif est appelé à statuer à leur encontre.
Vu le caractère technique et, il est vrai, de plus en plus complexe de la matière, l’inflation des dispositions réglementaires amplifiant le phénomène, le législateur a exigé que pareil recours en annulation direct ne peut être introduit que par le ministère d’un avocat à la Cour.
Il relève de la perspicacité de tout administré, dûment assisté, d’introduire tel recours en annulation direct contre un acte réglementaire. Il lui appartiendra de préciser à chaque fois les dispositions réglementaires effectivement attaquées. Sous ces aspects, aucune question pertinente de sécurité juridique ni de confiance légitime ne saurait valablement se poser dans le contexte donné, de même qu’il ne saurait être reproché à l’Etat, sauf abus de procédure, non vérifié en l’espèce, d’avoir remplacé le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002, modifié plusieurs fois, une quinzaine d’années plus tard par un texte refondu, afin d’optimiser la lisibilité de la réglementation pertinente.
En toute occurrence, la demande en annulation du règlement grand-ducal du 22 mars 2017, fût-elle agencée par voie d’exception, n’en demeure pas moins une demande nouvelle qui, contrairement aux moyens nouveaux, est irrecevable en matière de procédure administrative contentieuse et plus particulièrement en appel en application des dispositions de l’article 41 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.
Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que la Cour, à la suite du tribunal, est amenée à analyser la situation compte tenu de l’existence du règlement grand-ducal du 22 mars 2017, applicable à partir de l’année scolaire 2016/2017 conformément à son article 7.
Il est constant qu’à travers son article 7, l’arrêté grand-ducal du 22 mars 2017 a opéré l’abrogation du règlement grand-ducal du 20 septembre 2002.
Il est tout aussi constant que tel qu’il est rédigé, l’article VI du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016, comprenant les articles VI.1 à VI.4 actuellement querellés, a prévu des dispositions portant toutes modification au niveau du même texte réglementaire, à savoir au niveau du règlement grand-ducal du 20 septembre 2002.
En ce que le règlement grand-ducal du 22 mars 2017, à travers son article 7, a abrogé le règlement grand-ducal modifié du 20 septembre 2002, il a expressément et nécessairement abrogé de la sorte également les dispositions y introduites à travers l’article VI du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016, à savoir les articles VI.1 à VI.4 faisant l’objet du recours en annulation sous analyse.
A ce titre, il convient de préciser que suivant ses dernières conclusions devant le tribunal, maintenues comme telles devant la Cour, la partie appelante a limité son recours en annulation initial, compte tenu des antécédents prédécrits, aux seuls articles VI.1 à VI.4 en question.
Par combinaison des différents éléments précités, les premiers juges ont pu dégager à bon escient que dans la mesure où tant le règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 que celui du 22 mars 2017 sont appelés à s’appliquer à partir de l’année scolaire 2016/2017, les quatre articles attaqués du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 se trouvent abrogés, tel que prédécrit, et n’ont porté aucun grief de manière vérifiée aux intérêts de la partie appelante.
En effet, toute la matière des indemnités ainsi visées, se trouve réglée, à partir du début de l’année scolaire 2016/2017, non pas par les dispositions des articles VI.1 à VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016, mais bien par celles du règlement grand-ducal du 22 mars 2017 et ce uniquement par celles-ci, eu égard à l’abrogation opérée à la même date d’effet de toutes les dispositions du règlement grand-ducal modifié du 20 septembre 2002, y compris celles modificatives du 6 septembre 2016 sous analyse.
Eu égard à l’entrée en vigueur respective à partir de la même date du début de l’année scolaire 2016/2017, les dispositions attaquées des articles VI.1 à VI.4 du règlement grand-ducal du 6 septembre 2016 ne portent plus aucun effet depuis lors, tandis que seules les dispositions du règlement grand-ducal du 22 mars 2017 en emportent.
La conclusion s’impose : le recours sous analyse n’a plus d’objet.
Le cas de figure actuellement présenté à la Cour est effectivement celui d’une perte d’objet. En corollaire de l’exigence de précision de l’objet d’un recours en annulation direct d’un acte réglementaire concernant les dispositions par lui visées, l’abrogation de celles-ci emporte non seulement la perte d’objet du recours, mais nécessairement celle des dispositions ayant pu encourir pareille annulation.
Tel que la partie appelante le met en exergue à bon escient, l’intérêt à agir s’analyse au moment de l’introduction d’un recours. Il s’aligne dans le cas d’un recours direct en annulation d’un acte réglementaire suivant le prescrit de l’article 7 de la loi précitée du 7 novembre 1996.
La perte d’effet des dispositions réglementaires attaquées à travers un recours direct en cours d’instance ne se décline pas en termes de perte d’un intérêt à agir – celui-ci constituant en quelque sorte le ticket d’entrée à l’instance – mais en perte d’objet du recours en ce que la mesure sollicitée, à savoir l’annulation des dispositions réglementaires attaquées, n’a plus de raison d’être en raison de leur abrogation avec effet à leur date de prise d’effet emportant disparition depuis lors de l’ordonnancement juridique en place.
Tel est éminemment le cas en l’espèce où les dispositions modificatives des articles VI.1 à VI.4, telles qu’intégrées dans le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002, avaient été abrogées à travers le règlement grand-ducal du 22 mars 2017 avec effet à partir du début de l’année scolaire 2016/2017 correspondant au début de leur propre prise d’effet. Les dispositions réglementaires attaquées ayant été abrogées de la sorte, de manière patente, le recours en annulation, tel qu’introduit par la partie appelante actuelle, fût-ce sous le couvert d’un intérêt à agir vérifié, n’a plus d’objet.
Dès lors, tel que les premiers juges l’ont retenu, le recours initial était effectivement à déclarer irrecevable, mais en raison de sa perte d’objet.
La partie appelante sollicite encore la condamnation de la partie étatique au paiement d’une indemnité de procédure de ….- € pour la première instance et d’une indemnité de procédure d’un même montant pour l’instance d’appel.
Eu égard à l’issue du litige, ces deux demandes sont à rejeter.
Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;
déclare l’appel recevable ;
au fond, le dit non justifié ;
confirme le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré le recours irrecevable, quoique pour motif de perte d’objet ;
rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure de la partie appelante ;
condamne celle-ci aux dépens de l’instance d’appel.
Ainsi délibéré et jugé par:
Francis DELAPORTE, président, Serge SCHROEDER, premier conseiller, Lynn SPIELMANN, conseiller, et lu à l’audience publique du 31 décembre 2020 au local ordinaire des audiences de la Cour par le président, en présence du greffier assumé de la Cour ….
s. … s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 31 décembre 2020 Le greffier de la Cour administrative 9