GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 41320C du rôle Inscrit le 18 juin 2018 Audience publique du 13 novembre 2018 Appel formé par Monsieur …, …, contre un jugement du tribunal administratif du 8 mai 2018 (n° 39739 du rôle) ayant statué sur son recours contre une décision du ministre du Développement durable et des Infrastructures en matière de permis de conduire Vu l’acte d’appel, inscrit sous le numéro 41320C du rôle et déposé au greffe de la Cour administrative le 18 juin 2018 par Maître Daniel NOEL, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à L-… …, …, …, dirigé contre le jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 8 mai 2018 (n° 39739 du rôle) ayant déclaré non fondé son recours tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’une décision du ministre du Développement durable et des Infrastructures du 4 avril 2014 portant retrait de huit points de son permis de conduire, ainsi que d’une décision dudit ministre du 11 février 2016 portant suspension de son droit de conduire pour une durée de douze mois ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 11 septembre 2018 par le délégué du gouvernement ;
Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;
Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Daniel NOEL et Monsieur le délégué du gouvernement Daniel RUPPERT en leurs plaidoiries à l’audience publique du 6 novembre 2018.
Par courrier recommandé envoyé le 4 avril 2014, le Ministre du Développement durable et des Infrastructures, ci-après « le ministre », constata le retrait de deux fois 4 points du capital de points dont fut assorti le permis de conduire de Monsieur …, à la suite d’un jugement de la chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg du …, devenu irrévocable le …, pour des faits remontant au …, et constata que le capital de points dont est doté son permis de conduire est réduit à 2, dans les termes suivants :
1« (…) Conformément aux dispositions légales régissant le permis à points, je tiens à vous informer que 8 points ont été retirés du capital dont est doté votre permis de conduire pour les infractions suivantes au Code de la Route :
Libellé de l’infraction :
Délit de fuite Nombre de points déduits :
4 Date du fait : … 03.47 Lieu du fait : … … Libellé de l’infraction :
Avoir circulé avec un taux d’alcool d’au moins 0,55 mg par litre d’air expiré Nombre de points déduits :
4 Date du fait : … 03.47 Lieu du fait : … … Instance judiciaire : Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, chambre correctionnelle Date de la décision judiciaire : … Date à laquelle la décision judiciaire est devenue irrévocable … En vertu de l’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955, en cas de concours idéal d’infractions, seule la réduction de points la plus élevée est appliquée. En cas de concours réel, la réduction de points se cumule dans la limite de 6 points, lorsqu’il s’agit exclusivement de contraventions, et dans la limite de 8 points, lorsqu’il y a au moins un délit parmi les infractions retenues.
Par ailleurs, je me permets de vous rappeler que le capital de points dont est doté votre permis de conduire a déjà été réduit suite à l’avertissement taxé suivant :
Libellé de l’infraction :
Défaut d’informer le ministre des Transports en cas de mise en circulation d’un véhicule soumis à l’immatriculation au Luxembourg Nombre de points déduits :
2 Date du fait : … 15.00 Lieu du fait : … Date du paiement : … … Nombre de points restants : 2 (…) ».
Par courrier recommandé du 10 février 2016, le ministre informa Monsieur … du retrait de 2 points du capital de points dont est doté son permis de conduire suite au paiement de la taxe d’un avertissement taxé émis à son encontre en date du … pour « défaut pour le conducteur d’un véhicule routier automoteur de porter la ceinture de sécurité de façon réglementaire », décision libellée comme suit :
« (…) Conformément aux dispositions légales régissant le permis à points, je tiens à vous informer que 2 points ont été retirés du capital dont est doté votre permis de conduire pour les infractions suivantes au Code de la Route :
2 Libellé de l’infraction :
Défaut pour le conducteur d’un véhicule routier automoteur de porter la ceinture de sécurité de façon réglementaire Nombre de points déduits :
2 Date du fait : … 07 :00 Lieu du fait : … - Date du paiement : … … Par ailleurs, je me permets de vous rappeler que le capital de points dont est doté votre permis de conduire a déjà été réduit suite aux avertissements taxés et/ou aux condamnations judiciaires suivants :
Libellé de l’infraction :
Avoir circulé avec un taux d’alcool dans le sang d’au moins 0,55 grammes par litre d’air expiré Nombre de points déduits :
4 Date du fait : … 03.47 Lieu du fait : … Instance judiciaire : le Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, chambre correctionnelle Date de la décision judiciaire : … Date à laquelle la décision judiciaire est devenue irrévocable : …
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Libellé de l’infraction :
Délit de fuite Nombre de points déduits :
4 Date du fait : … 03.47 Lieu du fait : … Instance judiciaire : le Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, chambre correctionnelle Date de la décision judiciaire : … Date à laquelle la décision judiciaire est devenue irrévocable : …
_______________________
Libellé de l’infraction :
Défaut d’informer le ministre des Transports en cas de mise en circulation d’un véhicule soumis à l’immatriculation au Luxembourg Nombre de points déduits :
2 Date du fait : … 15.00 Lieu du fait : … Date du paiement : …
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Nombre de points restants : 0 (…) » Par un arrêté du 11 février 2016, le ministre suspendit pour 12 mois le droit de conduire un véhicule automoteur de Monsieur …. Ledit arrêté est fondé sur les motifs et considérations suivants :
« Vu les articles 2bis et 13 de la loi modifiée du 14 février 1955 concernant la réglementation de la circulation sur toutes les voies publiques ;
3Vu l’article 90 de l’arrêté grand-ducal modifié du 23 novembre 1955 portant règlement de la circulation sur toutes les voies publiques ;
Considérant que Monsieur … …, né le … à … et demeurant à …, …, L-… …, a commis plusieurs infractions à la législation routière sanctionnées par une réduction du nombre de points dont son permis de conduire est doté en vertu de l’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955 précitée ;
Considérant qu’à chaque infraction ayant donné lieu à une réduction de points, l’intéressé a été informé du nombre de points retirés et du solde résiduel de points ;
Considérant que le capital de points affecté au permis de conduire de l’intéressé est épuisé et qu’il y a donc lieu à application des dispositions du paragraphe 3 de l’article 2bis de la loi modifiée du 14 février 1955 précitée ; (…) ».
Par deux requêtes déposées au greffe du tribunal administratif le 12 mai 2016 (nos 37901 et 37902 du rôle), Monsieur … introduisit deux recours tendant à l’annulation, sinon à la réformation des décisions du ministre des 10 et 11 février 2016.
Par jugement du 5 avril 2017, le tribunal prononça la jonction de ces deux rôles, se déclara incompétent pour connaître des recours en réformation, reçut les recours en annulation en la forme et les déclara non fondés.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 15 juin 2017 (no 39739 du rôle), Monsieur … introduisit un recours tendant à l’annulation, sinon à la réformation de la décision du ministre du … portant retrait de 8 points de son permis de conduire, ainsi que de la décision du ministre du … portant suspension de son droit de conduire un véhicule automoteur pour une durée de 12 mois.
Par jugement du 8 mai 2018, le tribunal, après s’être déclaré incompétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation, reçut le recours principal en annulation en la forme, le déclara cependant irrecevable, rejeta encore la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par Monsieur …, tout en le condamnant aux frais de l’instance.
Pour ce faire, le tribunal accueillit en premier lieu le moyen d’irrecevabilité tiré de l’autorité de chose jugée pour autant que dirigé contre la décision ministérielle du 11 février 2016, constatant que cette décision a déjà fait l’objet du jugement du 5 avril 2017 contre lequel Monsieur … n’avait pas interjeté appel.
Quant au recours pour autant que dirigé contre la décision du ministre du 4 avril 2014, le tribunal constata que le courrier recommandé ayant contenu ladite décision et envoyé à l’adresse …, … à …, avait été renvoyé à son expéditeur avec la mention « pas de boîte à ce nom ». Il releva ensuite que Monsieur … n’avait fourni aucune explication quant à son adresse au moment de la notification de cette décision en date du … et n’avait plus particulièrement pas contesté avoir officiellement résidé à …, …, …, sa radiation d’office n’ayant été opérée que le …, tel que cela se dégageait d’un certificat de résidence de l’administration communale de … daté au ….
4Le tribunal arriva dès lors à la conclusion que la notification de la décision litigieuse du 4 avril 2014 à l’adresse officielle de Monsieur … n’emportait aucune critique, dans la mesure où le renvoi dudit courrier à son expéditeur était exclusivement imputable au demandeur qui n’avait pas pris les dispositions nécessaires pour assurer la réception effective de la correspondance lui envoyée, et déclara le recours à l’encontre de la décision du 4 avril 2014 irrecevable rationae temporis, tout en rappelant que le tribunal administratif, dans le cadre de son jugement du 5 avril 2017, a retenu que Monsieur … avait, en tout état de cause et au plus tard à travers la décision ministérielle du 10 février 2016, eu connaissance de la décision de retrait de 8 points de son permis de conduire du 4 avril 2014, laquelle y était expressément mentionnée.
Par requête déposée le 18 juin 2018 au greffe de la Cour administrative, Monsieur … a régulièrement relevé appel du jugement du 8 mai 2018.
A l’appui de cet appel, Monsieur … réitère son argumentaire en signalant que la décision du ministre du 4 avril 2014 portant retrait de 8 points du capital de points de son permis de conduire ne lui aurait été communiquée que le jour des plaidoiries le 15 mars 2017 dans le cadre de l’instance ayant conduit au jugement du tribunal administratif du 5 avril 2017 (nos 37901 et 37902 du rôle). Il signale encore avoir été rayé d’office en date du 21 mai 2014 à son ancienne adresse à …, …, … et s’être inscrit à partir du … auprès de l’administration communale de … à sa nouvelle adresse à … au …, …. Or, faute d’avoir été valablement informé du retrait des 8 points, la décision du ministre du 11 février 2016 n’aurait jamais dû intervenir.
La Cour constate en premier lieu que l’appelant ne critique plus le jugement entrepris dans la mesure où celui-ci a déclaré irrecevable sa requête introductive d’instance du 15 juin 2017 pour autant que dirigé contre la décision ministérielle du 11 février 2016 en raison de l’autorité de chose jugée rattachée au jugement du tribunal administratif du 5 avril 2017, de sorte que le jugement entrepris est à confirmer purement et simplement sur ce point.
Pour le surplus, et indépendamment des circonstances de notification de la décision ministérielle du 4 avril 2014 portant retrait de 8 points du permis de conduire de Monsieur …, c’est encore à juste titre que le délégué du gouvernement signale que la notification régulière de la décision du ministre du 10 février 2016 n’est pas contestée et que l’appelant a nécessairement dû avoir connaissance de l’existence et du contenu de la décision litigieuse du 4 avril 2014 à travers cette deuxième décision du 10 février 2016 contenant une énumération détaillée tant des infractions que des condamnations à la base des retraits de points antérieurs.
Au vu de ce simple constat, la Cour est amenée à confirmer les premiers juges dans leur conclusion que le recours initial de Monsieur …, introduit le 15 juin 2017, pour autant que dirigé contre la décision du ministre du 4 avril 2014, est à déclarer irrecevable ratione temporis.
A titre superfétatoire, il convient encore de noter qu’au moment de la notification de la décision ministérielle du 4 avril 2014, Monsieur … résidait officiellement à l’adresse à laquelle ladite décision lui avait été notifiée par envoi recommandé, de sorte que ladite notification ne prête pas à critique, eu égard aux modalités d’information telles que réglementées à l’article 15, paragraphe (1), du règlement grand-ducal modifié du 26 août 1993 relatif aux avertissements taxés, aux 5consignations pour contrevenants non-résidents, ainsi qu’aux mesures d’exécution de la législation en matière de mise en fourrière des véhicules et en matière de permis à points.
Au vu de l’issue du litige, Monsieur … est encore à débouter de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure de 1.500.- €.
Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l'égard de toutes les parties ;
reçoit l'appel du 18 juin 2018 en la forme ;
au fond, le déclare non justifié et en déboute ;
partant, confirme le jugement du 8 mai 2018 ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par l’appelant ;
condamne l’appelant aux dépens de l'instance d'appel.
Ainsi délibéré et jugé par :
Henri CAMPILL, vice-président, Lynn SPIELMANN, conseiller, Martine GILLARDIN, conseiller, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier de la Cour Jean-Nicolas SCHINTGEN.
s. SCHINTGEN s. CAMPILL Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 15 novembre 2018 Le greffier de la Cour administrative 6