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06/02/2018 | LUXEMBOURG | N°40196C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 06 février 2018, 40196C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 40196C du rôle Inscrit le 22 septembre 2017 Audience publique du 6 février 2018 Appel formé par Monsieur …, L-…, contre un jugement du tribunal administratif du 9 août 2017 (n° 38578 du rôle) en matière de discipline Vu la requête d'appel, inscrite sous le numéro 40196C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 22 septembre 2017 par Maître Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, professeur à la Faculté … à l’U

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GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro 40196C du rôle Inscrit le 22 septembre 2017 Audience publique du 6 février 2018 Appel formé par Monsieur …, L-…, contre un jugement du tribunal administratif du 9 août 2017 (n° 38578 du rôle) en matière de discipline Vu la requête d'appel, inscrite sous le numéro 40196C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 22 septembre 2017 par Maître Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, professeur à la Faculté … à l’Université du Luxembourg, demeurant à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 9 août 2017 (no 38578 du rôle), par lequel le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître de son recours tendant à l’annulation d’une décision du recteur de l’Université du Luxembourg du 18 juillet 2016 ayant prononcé la sanction de l’avertissement à son encontre ;

Vu l’exploit du 4 octobre 2017 de l’huissier de justice suppléant Christine KOVELTER, agissant en remplacement de l’huissier de justice Frank SCHAAL, tous les deux demeurant à Luxembourg, portant signification de la susdite requête d’appel à Monsieur …, recteur de l’Université du Luxembourg, en son adresse professionnelle à L-…, ainsi qu’à l’établissement de droit public Université du Luxembourg, inscrite au R.C.S. de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son recteur actuellement en fonctions, établi à L-… ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative en date du 3 novembre 2017 par Maître Romain ADAM, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de l’Université du Luxembourg, préqualifiés ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative en date du 4 décembre 2017 par Maître Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA au nom de Monsieur … ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;

Le rapporteur entendu en son rapport ainsi que Maîtres Patrice Rudatinya MBONYUMUTWA et Romain ADAM en leurs plaidoiries à l’audience publique du 16 janvier 2018.

1 Par un contrat de travail à durée indéterminée, conclu en date du 22 septembre 2008, Monsieur … fut engagé par l’établissement de droit public Université du Luxembourg, ci-après « l’Université du Luxembourg », comme employé sous le statut de l’employé privé dans une fonction d’enseignant-chercheur portant le titre de « …, affecté à la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance », avec effet au 1er octobre 2008.

Lors de sa réunion du 27 juin 2016, la commission disciplinaire de l’Université du Luxembourg, ci-après « la commission disciplinaire », proposa, dans le cadre d’une instruction disciplinaire menée à l’encontre de Monsieur …, « à titre de sanction un avertissement écrit », avec les mentions plus particulièrement énoncées dans le procès-verbal de ladite réunion « pour satisfaire aux règles du droit du travail luxembourgeois ».

A la suite de la décision ainsi prise par la commission disciplinaire, le recteur de l’Université du Luxembourg, ci-après « le recteur », adressa en date du 18 juillet 2016 une lettre recommandée avec accusé de réception à Monsieur …, libellée comme suit :

« Vous occupez la fonction d’enseignant-chercheur au sein de la Faculté de …, portant le titre de ….

Selon proposition du 27 juin 2016 de la commission disciplinaire que j’ai nommée le 2 juin 2016 en application des articles 35 et 34 de la loi du 12 août 2003 portant création de l’Université du Luxembourg et en ma qualité de Recteur de l’Université du Luxembourg, j’applique la sanction d’un Avertissement Cette sanction est basée sur le procès-verbal de la commission disciplinaire ci-annexé et en particulier sur les faits suivants :

1) La commission a été saisie par le Doyen de … afin d’instruire le dossier portant sur un éventuel manquement commis par vous aux obligations des enseignants-

chercheurs résultant de la charte des droits et devoirs des enseignants-chercheurs de l’Université du Luxembourg.

2) Le Doyen de …a été saisi par le professeur …, … et … de griefs qui vous sont reprochés. Les griefs relatés se rapportent à la période de fin 2010 jusqu’au 19 avril 2016.

3) La commission a décidé de ne retenir pour instruction que les griefs qui concernent votre comportement vis-à-vis de Mme … par e-mail du 29 mai 2014 et les violences verbales à l’encontre de Mme …, enseignante vacataire, à la Faculté de …, le 19 avril 2016.

4) Je considère deux griefs comme étant formellement établis :

-

l’e-mail du 29 mai 2014 adressé à Mme … ; particulièrement l’expression « (…) you look like a stupid cow girl (…) » ;

2 -

les violences verbales à l’encontre de Mme … le 19 avril 2016, particulièrement l’expression « tu m’emmerdes ».

5) Ces deux griefs constituent des violations des obligations des enseignants-chercheurs résultant de la Charte des droits et devoirs des enseignants-chercheurs de l’Université du Luxembourg ;

« Tous les membres de l’université se doivent mutuellement respect et courtoisie » (Art.

VIII.3.101). « Les enseignants-chercheurs ont le devoir d’agir en membres responsables de la communauté institutionnelle en adoptant une attitude responsable et respectueuse envers le personnel et les étudiants et en se conformant aux règlements internes de l’institution » (Art.

VIII.3.103).

Les faits soulevés sont des manquements certains à cette Charte, mais ne présentent pas la gravité entendue au sens de l’article 35 (3) de la loi du 12 août 2003 portant création de l’Université du Luxembourg, qui pourrait donner lieu au licenciement d’un enseignant chercheur.

Je souligne qu’un tel comportement ne peut être toléré par l’Université qui se caractérise par un environnement de tolérance et de respect. En outre, j’attire votre attention sur le fait qu’une sanction disciplinaire plus grave pourrait être prononcée à votre égard, si vous veniez à commettre des faits similaires à l’avenir.

La présente lettre vaut avertissement (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 14 octobre 2016, Monsieur … fit introduire un recours tendant à l’annulation de la décision précitée du 18 juillet 2016 portant avertissement à son encontre.

Dans son jugement du 9 août 2017, le tribunal administratif se déclara incompétent pour connaître du recours introduit, rejeta la demande en allocation d’une indemnité de procédure introduite par le demandeur, tout en condamnant celui-ci aux frais de l’instance.

Pour ce faire, le tribunal nota, en application de l’article 2, paragraphe (1), de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, que les recours en annulation sont dirigés non pas contre les auteurs des actes qu’un demandeur entend critiquermais que l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives ne peut viser qu’une décision administrative, c’est-à-dire un acte émanant d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés, le recours contentieux ne visant dès lors pas les autorités administratives en tant que telles mais les actes administratifs. Il constata ensuite que l’acte attaqué par le demandeur dans le cadre de l’instance menée devant le tribunal avait été signé par le recteur en date du 18 juillet 2016 et qu’il est couché sur un papier à en-tête intitulé « Université du Luxembourg, Le Recteur ».

Sur ce, le tribunal releva que la décision sous examen émanait de l’Université du Luxembourg constituant d’après l’article 1er de la loi du 12 août 2003 portant création de l’Université du Luxembourg, ci-après « la loi du 12 août 2003 », « un établissement public d’enseignement 3 supérieur et de recherche », doté « de la personnalité juridique », ayant son siège à Luxembourg, que suivant l’article 17 de la loi du 12 août 2003, l’Université du Luxembourg est composée d’un conseil de gouvernance, d’un rectorat, d’un conseil universitaire et du décanat. Il nota encore que conformément à l’article 20 de la loi du 12 août 2003, le rectorat, constituant « l’organe exécutif de l’Université », est composé du recteur, au plus de trois vice-recteurs, ainsi que du directeur administratif et que le recteur, qui fait partie du rectorat, exerce, en application de l’article 22, paragraphe (2), de la loi en question, notamment, comme attribution la représentation de l’Université « à l’égard des tiers ainsi qu’en justice », de même qu’il constitue également « le chef hiérarchique des personnels enseignants et non-enseignants de l’Université ».

Le tribunal en déduisit que la décision sous examen avait été prise par l’Université du Luxembourg, et que celle-ci était à considérer comme partie défenderesse dans le cadre du litige lui soumis et qu’en déposant en date du 16 janvier 2017 un mémoire en réponse, l’Université du Luxembourg avait entendu agir non pas en tant que partie tierce intéressée mais comme partie défenderesse, de sorte à ce que les développements du demandeur tendant à voir déclarer irrecevable une prétendue intervention volontaire formée par l’Université du Luxembourg étaient à rejeter.

Le tribunal arriva dès lors à la conclusion que le recours contentieux avait valablement pu être signifié au recteur en sa qualité de représentant juridique de l’Université du Luxembourg pour agir en justice, en application de l’article 22, paragraphe (2), point d) de la loi du 12 août 2003 et que de même ledit recours avait été valablement signifié à l’Université du Luxembourg, telle que représentée par son recteur, et que celle-ci était par la suite valablement intervenue dans le cadre de l’instance en tant que partie défenderesse, de sorte qu’aucune irrecevabilité, voire nullité du recours ne pouvait être tirée d’une quelconque erreur qui aurait été commise au niveau de la signification du recours.

Concernant ensuite la question de savoir si l’acte faisant l’objet du litige lui soumis est à qualifier de décision administrative, le tribunal releva d’abord que le contrat de travail à durée indéterminée conclu en date du 22 septembre 2008 entre l’Université du Luxembourg et Monsieur … prévoyait que ce dernier avait été engagé « sous le statut d’un employé privé », en application de l’article 1er dudit contrat de travail et que ledit contrat ne contenait aucune référence à un quelconque statut public sur base duquel le demandeur aurait été engagé, que ce soit le statut de fonctionnaire ou celui d’employé public, mais qu’il était fait à plusieurs reprises référence expresse au Code du travail, et ce, notamment en ce qui concerne l’examen médical et les congés s’appliquant au demandeur. Il nota encore que les dispositions générales prévues à l’article 15 du contrat de travail faisaient conclure à un statut relevant du droit du travail, en ce qu’il était fait référence à la législation sur la sécurité sociale applicable notamment en matière d’assurance pension, d’assurance contre la maladie et d’assurance contre les accidents professionnels « du statut de l’employé privé ».

Le tribunal conclut dès lors, au vu de l’ensemble des éléments contenus au contrat de travail litigieux, à un statut d’employé privé dans le chef de Monsieur …, pareils contrats de travail pouvant valablement être conclus par un établissement public, étant donné qu’il n’existe aucune disposition légale ou réglementaire qui interdirait à un tel établissement de conclure des contrats 4 de travail avec son personnel relevant du droit du travail.

Finalement, le tribunal se référa encore, d’une part, à l’article 29, paragraphe (2), de la loi du 12août 2003 qui dispose que « les personnels sont liés à l’Université par un contrat de droit privé », « sous réserve des dispositions prévues à l’article 59 » de la même loi, article qui ne vise cependant que les personnes ayant été reprises par l’Université du Luxembourg au jour de sa création, catégories de membres du personnel sous laquelle le demandeur ne tombait pas, et, d’autre part, au règlement d’ordre intérieur de l’Université du Luxembourg disposant à son article VIII.1.101 que l’Université du Luxembourg peut notamment recruter des salariés, ne constituant ni des fonctionnaires ni des employés ni des ouvriers de l’Etat et à son article VIII.1.103 que « le régime juridique des salariés relève du Code de Travail ».

Au vu de l’ensemble de ces considérations, le tribunal en déduisit qu’il n’était pas compétent pour connaître du litige.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 22 septembre 2017, Monsieur … a relevé appel du jugement du 9 août 2017, requête d’appel signifiée le 4 octobre 2017 à l’Université du Luxembourg, ainsi qu’à Monsieur …, ayant succédé à Monsieur … en tant que recteur de l’Université du Luxembourg.

Dans leur mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 3 novembre 2017, les parties intimées, Monsieur … et l’Université du Luxembourg, signalent qu’en première instance seule une partie avait été assignée, à savoir l’ancien recteur Monsieur …, mais que la requête d’appel n’a plus été signifiée à ce dernier. Elles relèvent également que la requête d’appel a été signifiée à l’Université du Luxembourg, tandis que le recours introductif d’instance n’avait pas été signifiée à celle-ci.

Sur ce, les intimés demandent à voir déclarer l’acte d’appel caduc en application de l’article 39, paragraphe 2, de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après « la loi du 21 juin 1999 », pour ne pas avoir été signifié à Monsieur … et pour avoir été signifié à l’Université du Luxembourg en tant que personne morale, soutenant que la signification, par exploit d’huissier, de l’acte d’appel aux parties de la première instance est seule de nature à mettre d’une façon certaine toutes les parties en cause au courant de l’introduction d’une procédure d’appel, cette formalité étant à considérer comme substantielle et dont le non-accomplissement entraînerait l’irrecevabilité de l’appel.

Dans ce contexte, ils estiment encore, au vu du constat que l’Université du Luxembourg n’avait pas été formellement assignée en première instance, que Monsieur … ne peut pas couvrir cette irrégularité en signifiant la requête d’appel à l’Université du Luxembourg et le fait de ne pas signifier la requête d’appel à Monsieur … pourrait entraîner une contrariété de jugements.

Monsieur … conclut à la recevabilité de son appel en relevant que sa requête d’appel a été signifiée tant à l’Université du Luxembourg qu’au nouveau recteur de celle-ci, Monsieur …, l’ancien recteur, Monsieur …, n’ayant plus été en fonctions au moment de la signification de la requête d’appel. Il estime dans ce contexte que le nom du recteur serait indifférent, étant donné que l’organe auteur de la décision attaquée, à savoir le recteur, aurait été touché. Partant, le fait 5 d’avoir signifié l’acte d’appel au nouveau recteur n’affecterait en rien la procédure et les droits de la défense demeureraient préservés, les intimés restant par ailleurs en défaut de prouver le moindre grief de nature à pouvoir entraîner l’irrecevabilité de l’appel. Comme aucune partie présente en première instance n’aurait été « soustraite de l’affaire », tant le recteur que l’Université du Luxembourg figurant à l’instance d’appel, ledit appel serait à déclarer recevable en la forme.

L’article 39 de la loi du 21 juin 1999 dispose comme suit dans ses paragraphes (1) et (2) :

« (1) L’appel est interjeté par une requête déposée au greffe de la Cour administrative, (…) et signifiée aux parties ayant figuré en première instance ou y ayant été dûment appelées.

(2) Faute par le requérant de signifier son recours dans le mois du dépôt du recours, celui-ci est caduc ».

Il se dégage de cette disposition que toutes les parties ayant figuré en première instance ou y ayant été dûment appelées doivent figurer en instance d’appel, soit comme parties, soit se voir signifier la requête d’appel formée par rapport à un jugement ayant statué dans le cadre de cette instance. Au vu de l’effet relatif des décisions de justice qui ne s’imposent qu’aux parties au procès, le but de la règle énoncée par l’article 39 de la loi du 21 juin 1999 est en effet d’assurer que les mêmes personnes puissent être considérées comme parties tant en première instance qu’en instance d’appel afin de rendre la décision d’appel opposable à l’égard de toutes les parties et d’éviter de la sorte des situations de contrariété de jugements dans le cas où la décision d’appel, le cas échéant différente de celle de la première instance, ne serait pas opposable à l’une ou plusieurs des parties impliquées en première instance, hypothèse dans laquelle celles-ci pourraient se prévaloir à leur propre égard de la décision de première instance et même former tierce opposition contre la décision d’appel.

En vertu du paragraphe (2) du même article 39, l’appel doit être signifié dans le délai d’un mois à partir du dépôt de la requête d’appel, sous peine de caducité. La caducité est constatée d’office par le juge compétent et si elle atteint le premier acte de l’instance, elle entraîne nécessairement les effets d’une cause d’extinction de l’instance et la nullité de la procédure d’appel dans son entièreté. Il ne s’agit pas d’une irrecevabilité telle que visée par l’article 29 de la loi du 21 juin 1999, aux termes duquel l’irrecevabilité n’est prononcée que si l’inobservation dont s’agit a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense.

En l’espèce, il est constant en cause que la requête de première instance a été uniquement signifiée le 17 octobre 2016 à Monsieur … en sa qualité de recteur, demeurant professionnellement à L-…, c’est-à-dire considéré comme constituant une autorité administrative distincte et autonome de l’Université du Luxembourg, tel que cela a été précisé à travers la requête d’appel et le mémoire en réplique du 4 décembre 2017, de même que par le mandataire de l’appelant à l’audience des plaidoiries du 16 janvier 2018.

Il se dégage également des rétroactes de procédure que l’Université du Luxembourg a déposé en première instance un mémoire en réponse en date du 16 janvier 2017.

6 Partant, la Cour se doit de constater que l’Université du Luxembourg a figuré en première instance en raison de sa comparution volontaire via le dépôt dudit mémoire en réponse et que le recteur de l’Université du Luxembourg, en tant que prétendue autorité administrative distincte et autonome et dont les compétences sont énumérées à l’article 22, paragraphe (2), de la loi du 12août 2003, y a été dûment appelé via l’exploit de signification du 14 octobre 2016.

La requête d’appel, quant à elle, a été signifiée en date du 4 octobre 2017 tant à l’Université du Luxembourg qu’au recteur, cette fois-ci en la personne de Monsieur … en son adresse professionnelle, avec la précision que ce dernier a succédé en tant que recteur à l’ancien recteur Rainer ….

Il s’ensuit que c’est à juste titre que Monsieur … soutient que l’appel a été signifié aux mêmes parties que celles ayant figuré en première instance ou y ayant été dûment appelées, à savoir le recteur et l’Université du Luxembourg, de sorte que le moyen de défense des intimés soulevant la caducité sinon l’irrecevabilité de la requête d’appel est à rejeter.

L’appel ayant pour le surplus été interjeté suivant les délai et formes prévues par la loi, il est recevable.

A l’audience des plaidoiries du 16 janvier 2018, la Cour a encore soulevé d’office la question d’ordre public de la caducité du recours introductif de première instance déposé au greffe du tribunal administratif le 14 octobre 2016 et signifié au seul ancien recteur, Monsieur …, en date du 17 octobre 2016.

Aux termes de l’article 4 de la loi du 21 juin 1999 :

« (1) Sous réserve du paragraphe 2, le requérant fait signifier la requête à la partie défenderesse et aux tiers intéressés, à personne ou à domicile, par exploit d’huissier, dont l’original ou la copie certifiée conforme est déposé sans délai au greffe du tribunal. L’affaire n’est portée au rôle qu’après ce dépôt.

(2) Faute par le requérant d’avoir procédé à la signification de son recours à la partie défenderesse dans le mois du dépôt du recours, celui-ci est caduc. ».

Afin de pouvoir solutionner cette question, il appartient en premier lieu à la Cour de déterminer qui est l’auteur de la décision du 18 juillet 2016 ayant prononcé la sanction de l’avertissement à l’égard de Monsieur … et partant la partie défenderesse à laquelle le recours introductif a dû être signifié obligatoirement dans le mois à partir du dépôt dudit recours.

Il se dégage du dossier que Monsieur … fut engagé suivant contrat de travail à durée indéterminée du 22 septembre 2008 par l’Université du Luxembourg représentée par son président du conseil de gouvernance, Monsieur …, et le recteur d’époque, Monsieur ….

En date du 27 juin 2016, la commission disciplinaire proposa, après instruction contradictoire, à titre de sanction un avertissement écrit à adresser au professeur …, avertissement devant entre autres contenir « utilement » diverses mentions, dont « l’identité de la personne notifiant 7 l’avertissement (prénom, nom, fonction) ».

Cette proposition de sanction de la commission disciplinaire fut appliquée par courrier recommandé du 18 juillet 2016 par le recteur, Monsieur …, non pas en tant qu’autorité indépendante de l’Université du Luxembourg, mais en tant que représentant de celle-ci, le recteur étant aux termes de l’article 22, paragraphe (2), points c) et d) de la loi du 12 août 2003 le chef hiérarchique des enseignants et non-enseignants et le représentant de l’université à l’égard des tiers ainsi qu’en justice, et partant l’interlocuteur naturel pour notifier des décisions en matière disciplinaire au personnel de l’Université du Luxembourg.

Pour le surplus, il convient de noter que l’avertissement du 18 juillet 2016 est rédigé sur du papier à en-tête de l’Université du Luxembourg et contient comme annexe la copie du procès-

verbal de la séance de la commission disciplinaire du 27 juin 2016, le recteur ayant encore clairement précisé à la fin dudit courrier recommandé que le comportement reproché à l’appelant ne pouvait être toléré par l’Université.

Dès lors, la Cour partage la conclusion des premiers juges que l’avertissement du 18 juillet 2016 a été émis par l’Université du Luxembourg et que celle-ci est à considérer comme partie défenderesse au litige et non pas le recteur en tant qu’autorité administrative indépendante, tel que soutenu par Monsieur … tout au long de la première instance.

Il s’ensuit que ce dernier aurait dû, conformément aux exigences de l’article 4 de la loi du 21juin 1999, procéder à la signification de son recours de première instance à l’Université du Luxembourg dans le mois de son dépôt au greffe du tribunal administratif, sous peine d’encourir la caducité. Il se dégage cependant du dossier que la requête introductive de première instance, déposée au greffe du tribunal administratif le 14 octobre 2016, n’a pas été signifiée à l’Université du Luxembourg.

Or, la caducité d'un recours contentieux est acquise à partir du moment où, dans le mois du dépôt de la requête introductive d'instance au greffe du tribunal administratif, celle-ci n'est pas signifiée à l'auteur de la décision ainsi déférée au tribunal, peu importe le dépôt par ledit défendeur de sa propre initiative d'un mémoire en réponse au greffe du tribunal après avoir eu connaissance du recours litigieux (cf. Cour adm. 7 janvier 2010, n° 25983 du rôle, Pas. adm.

2017, V° Procédure contentieuse, n° 345 et autres références y citées), ladite règle ne tolérant aucune exception.

Il s’ensuit que le fait incontesté et délibéré de l’absence de signification de la requête introductive de première instance, au mépris des exigences de l’article 4 de la loi du 21 juin 1999, entraîne la caducité du recours pris dans son intégralité, le jugement a quo étant à réformer en ce sens, cette conclusion s’imposant sans qu’il y ait encore lieu d’examiner plus en avant les moyens invoqués par les différentes parties en cause.

L’Université du Luxembourg est à débouter de sa demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500 € pour la première instance et d’un montant de 5.000 € pour l’instance d’appel, les conditions légales n’étant pas remplies en l’espèce.

8 Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l'égard de toutes les parties en cause ;

reçoit l’appel du 22 septembre 2017 en la forme ;

au fond, par réformation du jugement entrepris du 9 août 2017, déclare le recours en annulation de première instance de Monsieur … caduc  ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par l’établissement de droit public Université du Luxembourg ;

condamne Monsieur … aux dépens des deux instances.

Ainsi délibéré et jugé par:

Henri Campill, vice-président, Lynn Spielmann, conseiller, Martine Gillardin, conseiller, et lu par le vice-président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier assumé de la Cour Samuel Wickens.

s. Wickens s. Campill Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 06.02.2018 le greffier de la Cour administrative 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 40196C
Date de la décision : 06/02/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2018-02-06;40196c ?

Source

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