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22/06/2017 | LUXEMBOURG | N°39166C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 22 juin 2017, 39166C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 39166C du rôle Inscrit le 27 février 2017

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Audience publique du 22 juin 2017 Appel formé par l’administration communale de Hesperange contre un jugement du tribunal administratif du 17 janvier 2017 (nos 37717 et 37756 du rôle) ayant statué sur les recours de la société anonyme … S.A., …, et de la société anonyme … S.A., …, contre une délibération du conseil communal de la commune de Hesperange et une décision du ministre de l’Intérieur e

n matière de servitude (art. 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004) Vu la requête ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 39166C du rôle Inscrit le 27 février 2017

_____________________________________________________________________

Audience publique du 22 juin 2017 Appel formé par l’administration communale de Hesperange contre un jugement du tribunal administratif du 17 janvier 2017 (nos 37717 et 37756 du rôle) ayant statué sur les recours de la société anonyme … S.A., …, et de la société anonyme … S.A., …, contre une délibération du conseil communal de la commune de Hesperange et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de servitude (art. 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004) Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 39166C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 27 février 2017 par Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Hesperange, représentée par son conseil des bourgmestre et échevins en fonctions, et pour autant que de besoin par son bourgmestre, ayant sa maison communale à L-5886 Hesperange, 474, route de Thionville, dirigée contre un jugement du tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg du 17 janvier 2017 (nos 37717 et 37756 du rôle) ayant déclaré justifiés, après les avoir joints, les recours en réformation respectivement introduits par la société anonyme …S.A., établie et ayant son siège social à L-…, inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration en fonctions (n° 37717 du rôle) et par la société anonyme … S.A., établie et ayant son sièges social à L-…, de fait établie à L-…, …, inscrite au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le numéro …, représentée par son conseil d’administration en fonctions (n° 37756 du rôle), pour, dans le cadre desdits recours en réformation, annuler la délibération du conseil communal de Hesperange du 5 février 2016 frappant d’une servitude, conformément aux articles 20 et 21 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, les parcelles inscrites au cadastre de la commune de Hesperange, section A du chef-lieu, sous les numéros …, ainsi que la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur du 16 février 2016 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Véronique REYTER, demeurant à Esch-sur-Alzette, inscrite auprès le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, du 3 mars 2017 portant signification de cette requête d’appel aux sociétés anonymes …S.A. et … S.A., préqualifiées ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 10 mars 2017 par Monsieur le délégué du gouvernement Yves HUBERTY ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 3 avril 2017 par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme …S.A., préqualifiée ;

Vu le mémoire en réponse déposée au greffe de la Cour administrative le même jour par Maître Laurent NIEDNER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A., préqualifiée ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 3 mai 2017 par Maître Steve HELMINGER au nom de l’administration communale de Hesperange ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le 6 juin 2017 par Maître Georges KRIEGER au nom de la société anonyme …S.A. ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe de la Cour administrative le même jour par Maître Laurent NIEDNER au nom de la société anonyme … S.A. ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement dont appel ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maîtres Steve HELMINGER, Sébastien COUVREUR, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, et Laurent NIEDNER, de même que Monsieur le délégué du gouvernement Luc REDING en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 13 juin 2017.

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La société anonyme … S.A., ci-après « la société … », est propriétaire d’une parcelle d’une contenance de 21 ares 22 centiares, inscrite au cadastre de la commune de Hesperange, section A du chef-lieu, au lieu-dit « rue … » à Howald, sous le numéro 1292/5969, parcelle donnée en location à la société anonyme …S.A., ci-après « la société … », en vue de l’exploitation d’une station-service pendant quinze ans.

Le 15 juin 2015, la société … introduisit une première demande d’autorisation de construire une station-service sur ladite parcelle, rencontrée par un refus de la part du bourgmestre de la commune de Hesperange, ci-après « le bourgmestre », au motif tiré de ce que la hauteur du mur de soutènement n’était pas conforme aux dispositions du plan d’aménagement général de la commune de Hesperange, ci-après le « PAG ».

Cette décision de refus fit l’objet d’un recours devant le tribunal administratif introduit le 27 octobre 2015 sous le numéro 37092 du rôle. Par jugement non appelé du 25 janvier 2017, le tribunal déclara ce recours non fondé.

A la suite de ce refus, la société … introduisit le 20 novembre 2015 une seconde demande en obtention d’une autorisation de construire, présentée comme étant en tous points conforme aux dispositions en vigueur de la réglementation communale d’urbanisme.

Estimant être en l’absence de décision du bourgmestre depuis un délai de trois mois, la société … fit déposer le 24 février 2016 un second recours contentieux inscrit sous le numéro 37576 du rôle et dirigé contre la décision de refus implicite découlant du silence ainsi gardé par le bourgmestre.

Par sa délibération du 5 février 2016, le conseil communal de Hesperange décida de frapper plusieurs parcelles situées à Howald dans la rue …, dont celle précitée portant le numéro cadastral … et appartenant à la société …, des « servitudes visées à l’article 21, alinéa 1er, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ceci conformément à l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ». Cette décision s’agence comme suit :

« Vu la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 ;

Vu la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain ;

Vu le plan d’aménagement général de la commune de Hesperange actuellement en vigueur ;

Considérant que le plan d’aménagement général fait l’objet d’une refonte complète et que toutes les prescriptions relatives au mode d’utilisation et degré d’utilisation du sol sont soumises à une révision complète ;

Considérant que le bureau … de Luxembourg a été chargé par le collège des bourgmestre et échevins de procéder à une révision complète du plan d’aménagement général et que le dossier du PAG est avancé à un stade permettant d’entamer la procédure dans le courant de l’année 2016 ;

Vu notamment l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée, qui prévoit qu’au cours des études ou travaux tendant à établir, à modifier, à compléter ou à réviser un plan ou projet d’aménagement général « le conseil communal peut décider, sous l’approbation du ministre, que tous ou partie des immeubles touchés par le plan à l’étude ou en élaboration sont frappés des servitudes visées à l’article 21, alinéa 1er sauf que les propriétaires restent libres de procéder aux travaux d’entretien et de réparation » ;

Considérant que ces servitudes consistent dans une interdiction de toute modification de limites de terrains en vue de l’affectation de ceux-ci à la construction, toute construction ou réparation confortative ainsi que tous travaux généralement quelconques qui sont contraires aux dispositions du projet d’aménagement général en élaboration, à l’exception des travaux de conservation et d’entretien ;

Considérant que le plan d’aménagement général et le règlement sur les bâtisses en vigueur autorisent un mode et un degré d’utilisation du sol qui n’ont pas évolué de manière adéquate pour garder la maîtrise face à la pression foncière et que les autorités communales compétentes risquent ainsi de devoir autoriser des constructions en contradiction avec leurs objectifs généraux en matière d’aménagement communal arrêtés au niveau de l’étude préparatoire dans le cadre de la refonte de leur plan d’aménagement général ;

Considérant que la commune s’est engagée, par le biais de la convention DICI, de promouvoir sur son territoire la mixité fonctionnelle dans le sens de la « ville des courtes distances », d’atteindre une part modale des transports en commun et de la mobilité douce de 60-40 et de transposer ceci au niveau de son nouveau PAG ;

Considérant que, depuis 2003 différentes études et projets ont porté sur les stratégies à adopter pour mettre en œuvre la transformation d’une zone monofonctionnelle, quasi exclusivement vouée à la mobilité individuelle en un quartier urbain mixte dont le centre de gravité sera le futur nœud d’échange multimodal, la gare … ;

Considérant que par conséquent, le projet d’aménagement général prévoit un mode d’utilisation du sol sensé générer la mixité des fonctions souhaitée par le biais de zones telles que les zones mixtes à caractère urbain (MIX-u), les zones de bâtiments et d’équipement publics (BEP) et les zones de récréation (REC) ;

Considérant qu’un tel quartier n’est viable que si les transports publics ont un haut niveau de service et s’ils sont priorisés par rapport à la mobilité individuelle ;

Considérant que le tronçon nord de la rue … accueillera le tram entre la rue … et le chemin … pour aller rejoindre la future gare …, en passant à travers la parcelle cadastrale 1302/6451 ;

Considérant que l’avant-projet détaillé du nouveau « boulevard urbain … », en cours d’étude, réserve d’ores et déjà un corridor d’environ 7,00 m de large du côté droit de la rue … ainsi qu’une halte aux abords de l’actuel infrastructure de tennis ;

Considérant que les parcelles … donnent directement sur le corridor réservé au tram et que la fréquence du tram variera entre un tram toutes les 3 à 6 minutes ;

Considérant que, sur les parcelles susmentionnées, de futurs projets engendrant des flux réguliers et fréquents, d’engins motorisés tels notamment des centres commerciaux, des centres de loisirs, des stations de service, des établissements de restauration rapide du type « drive-in » ainsi que des parkings risquent de générer de graves perturbations de la circulation ainsi que des situations dangereuses ;

Considérant que la commune, souveraine en matière d’aménagement communal et de développement urbain, a également pour mission de garantir la sécurité et le respect de l’intérêt général et ne peut donc autoriser des projets à la fois contraires à son projet d’aménagement général et aux projets d’infrastructures de transports étatiques dont elle est tributaire pour se développer ;

Considérant que, partant, les conditions de l’article 20 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain sont remplies et qu’il importe que les parcelles susmentionnées soient grevées dans les meilleurs délais des servitudes prévues à l’article 21 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain […] ».

Par décision du 16 février 2016, le ministre de l’Intérieur, ci-après « le ministre », approuva, sur base des articles 20 et 21 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », la délibération précitée du conseil communal de Hesperange du 5 février 2016.

Cette délibération communale du 5 février 2016 ainsi que la décision ministérielle d’approbation du 16 février 2016 firent l’objet de deux recours introduits respectivement par la société … et la société … sous les numéros 37716 et 37777 du rôle. Ces recours furent toisés, ensemble celui précité de la société … dirigé contre la décision implicite de refus du bourgmestre prévisée sous le numéro 37576 du rôle par un jugement du tribunal du 18 janvier 2017 déclarant le recours contre la décision implicite de refus irrecevable, tandis que les deux autres recours furent déclarés justifiés et la délibération communale du 5 février 2016 ensemble la décision ministérielle d’approbation du 16 février 2016 annulées.

La société … et l’administration communale de Hesperange ont entrepris ce jugement en dates respectivement des 23 et 28 février 2017 (nos 39142C et 39169C du rôle). L’arrêt afférent est rendu par la Cour ce jour même parallèlement au présent arrêt.

Par courrier du 2 mars 2016, le bourgmestre exprima un refus exprès par rapport à la seconde demande en obtention d’une autorisation de construire de la société … datée du 20 novembre 2015 en s’appuyant sur la délibération du conseil communal du 5 février 2016, approuvée par le ministre le 16 février 2016.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 mars 2016, sous le numéro 37717 du rôle, la société … fit introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du conseil communal de Hesperange du 5 février 2016 prérelatée, frappant des servitudes prévues à l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004 les parcelles y visées, dont plus particulièrement celles portant le numéro 1292/5969 prise en location par elle auprès de la société ….

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 4 avril 2016, sous le numéro 37756 du rôle, la société … fit introduire à son tour un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la même décision du conseil communal de Hesperange du 5 février 2016, ainsi que de la décision d’approbation du ministre du 16 février 2016.

Par jugement du 17 janvier 2017, le tribunal joignit ces deux recours, les déclara recevables et fondés et, dans le cadre des recours en réformation, annula la décision du conseil communal du 5 février 2016, ainsi que la décision ministérielle d’approbation du 16 février 2016, tout en disant qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les recours subsidiaires en annulation, en rejetant les demandes en allocation d’une indemnité de procédure et en faisant masse des frais pour les mettre à charge de l’Etat et de l’administration communale de Hesperange chaque fois à raison de la moitié.

En substance, cette annulation se justifie, d’après le tribunal, en ce que la réalisation sur la parcelle litigieuse d’une station-service ne constitue un obstacle, ni matériel, ni politique à la réalisation ultérieure, sur un terrain adjacent, d’une voie de tram ou encore d’une piste cyclable, de sorte que l’une des trois conditions cumulatives prévues à l’article 20, alinéa 1er, de la loi du 19 juillet 2004 pour la mise en place d’une servitude urbanistique ne se trouvait pas utilement remplie.

Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 27 février 2017, l’administration communale de Hesperange a fait entreprendre le jugement précité du 17 janvier 2017 dont elle sollicite la réformation dans le sens de voir annuler le premier jugement en ce qu’il a déclaré les recours des sociétés anonymes … et … recevables et fondés et de voir par contre confirmer purement et simplement la délibération litigieuse du conseil communal de Hesperange du 5 février 2016 ensemble la décision ministérielle d’approbation du 16 février 2016.

La société … invoque l’irrecevabilité de l’appel en ce que l’appelante demande l’annulation du premier jugement sans cependant formuler le moindre moyen tendant à pareille annulation.

La commune estime qu’en ayant demandé la réformation du jugement dont appel et en ayant clairement énoncé les moyens sur lesquels cette demande se fonde, son acte d’appel n’encourrait aucune irrecevabilité.

Eu égard à la multitude des rôles, notamment de première instance, et au nombre impressionnant de pages de conclusions prises en cause, la Cour est amenée à procéder par voie d’un arrêt synthétique se limitant à tracer les éléments essentiels nécessaires à la solution du litige sur réponse concise aux moyens invoqués par les parties en vue de garantir précisément une lisibilité effective de son arrêt.

Il y a lieu de souligner d’emblée que les deux séries d’affaires ayant trait, les unes à la servitude introduite par le conseil communal de Hesperange suivant délibération du 5 février 2016, confirmée par le ministre de l’Intérieur le 16 février 2016 et, les autres, aux refus successifs de l’autorisation de construire sollicitée par la société … consistant dans la décision de refus implicite ainsi désignée par cette société et la décision de refus explicite du 2 mars 2016 du bourgmestre, sont largement interdépendantes en ce que précisément au niveau du refus d’autorisation de construire, la servitude précitée figure comme motif essentiel de refus.

Les deux arrêts afférents rendus en date de ce jour par la Cour, toujours dans une optique de lisibilité, procèdent dès lors également par renvoi chaque fois que la solution dégagée par l’un d’entre eux répond à des argumentaires également présentés dans le cadre de l’autre, les mêmes parties, hormis l’Etat, figurant aux deux séries d’instances d’appel.

Il est vrai que la formulation choisie par l’appelante au niveau du dispositif de sa requête d’appel et non autrement modifiée au niveau de son mémoire en réplique peut a priori prêter à confusion en ce que l’appelante demande à la Cour de « par réformation, annuler le premier jugement en ce qu’il a déclaré les recours des sociétés …et … recevables et fondés (…) » pour demander ensuite à voir « confirmer purement et simplement la délibération du conseil communal de Hesperange du 5 février 2016, ainsi que la décision d’approbation de ladite délibération du ministre de l’Intérieur du 16 février 2016 ».

Il est patent qu’aucun moyen ne soutient la demande en annulation du jugement dont appel, de sorte que l’appel est à déclarer non fondé sous ce volet.

Cependant, contrairement aux énonciations des parties intimées, il n’y a pas lieu de coller aux mots, mais il convient de dégager de la requête d’appel et des conclusions subséquentes de l’appelante la substance de sa demande en appel.

A ce niveau, il est encore patent que l’appelante sollicite la réformation du jugement dont appel, ainsi que la confirmation de la délibération communale du 5 février 2016 et de la décision ministérielle d’approbation du 16 février 2016. Pareille confirmation signifie corollairement que suivant l’argumentaire de l’appelante, les demandes initiales des sociétés … et …, pourtant accueillies par les premiers juges, seraient à déclarer irrecevables, sinon non fondées en suivant l’argumentaire de l’appelante. Tous ces éléments d’argumentaire sous-

tendent en substance une demande en réformation du jugement dont appel.

Le moyen d’irrecevabilité est partant à déclarer non fondé pour le surplus.

En second lieu, la société … soulève la question du maintien de l’objet du recours en instance d’appel en soulevant celle de l’étendue du contrôle des juges d’appel par rapport à l’acte administratif querellé. Après avoir fait valoir que la décision querellée du conseil communal du 5 février 2016 n’avait qu’une durée de validité d’un an et que, dès lors, elle a, depuis le mois de février 2017, cessé de produire ses effets, elle invoque un arrêt de la Cour du 7 décembre 2013 (n° 33242C du rôle) suivant lequel le recours intenté reste un recours en réformation et tous les moyens doivent être évalués suivant le standard du recours en réformation, sauf les dispositions inhérentes à ce recours qu’il sera impossible à la juridiction saisie de prendre du fait que la mesure critiquée a cessé ses effets dans le temps.

La société … a en réalité déjà fourni la réponse à son propre moyen en ce qu’elle invoque à juste titre l’arrêt précité de la Cour du 7 décembre 2013 qui véhicule précisément la clé aux questions soulevées.

Il est constant en cause que dans la mesure où la servitude prononcée par la délibération communale attaquée du 5 février 2016 et approuvée par la décision ministérielle également attaquée du 16 février 2016 a cessé ses effets après une année, c’est-à-dire au mois de février 2017, la Cour, saisie dans le cadre d’un recours en réformation, ne peut plus utilement, par la force des choses, la mesure ayant cessé de produire ses effets, puiser dans la plénitude du recours en réformation porté devant elle et se trouve partiellement limitée dans ses attributions de ce fait.

Cependant, pareille situation ne permet pas d’induire que la Cour ne serait plus saisie dans le cadre d’un recours en réformation et qu’elle devrait se rabattre à un recours en annulation. Tel que la Cour l’a déjà signalé dans son arrêt précité du 7 décembre 2013, pour des raisons d’effet utile et d’effectivité du recours, telles que se dégageant plus particulièrement des dispositions des articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et, dans la mesure où il y aurait mise en œuvre du droit de l’Union Européenne, de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, la Cour reste saisie dans le cadre d’un recours en réformation et, suivant les contours effectifs de la situation se présentant à elle, elle exercera les attributions relevant du recours en réformation qui restent opérationnelles compte tenu du cadre dorénavant tracé.

Il serait encore erroné de conclure que le recours en réformation soit devenu sans objet.

Tout d’abord, les exigences d’effectivité du recours s’y opposeraient. La Cour ayant été saisie à un moment où, en date du 27 février 2017, la mesure allait cesser de produire ses effets, elle n’a eu aucune possibilité de changer la donne, alors que, par ailleurs, le droit à un appel effectif persiste dans le chef de toutes les parties ayant succombé dans leurs moyens en première instance.

De plus, le sort d’une affaire ne saurait dépendre de la diligence plus ou moins grande des parties dans la prise de leurs mémoires, voire dans l’initiative de demander une abréviation des délais devant le tribunal, ni de l’expéditivité de celui-ci dans l’évacuation de l’affaire.

Toutes ces raisons sous-tendent la solution ci-avant dégagée, en continuité de celle résultant de l’arrêt précité du 7 décembre 2013, suivant laquelle la Cour continue à statuer dans le cadre d’un recours en réformation, tout en étant amenée à adapter ses attributions afférentes par rapport à la situation de fait et de droit se présentant suivant à elle au moment où elle rend son arrêt.

Enfin, il convient de souligner que l’affaire garde tout son objet dans la mesure où, suivant les indications concordantes des parties, la servitude prononcée à travers les délibération communale et décision ministérielle attaquées a été reconduite en 2017 par délibération du conseil communal de Hesperange.

Le sort de la présente affaire conditionnera dès lors directement ces décisions de continuation d’application de la servitude originairement mise en place par les délibération communale et décision ministérielle respectivement prises les 5 et 16 février 2016 actuellement sous analyse.

Pour autant que le moyen visait à mettre en cause le fait pour la Cour de rester saisie dans le cadre d’un recours en réformation, il est à écarter.

Plus loin au fond, la commune estime que dès la délibération du 5 février 2016, elle a pour le moins rempli les conditions prévues par l’article 20 de la loi du 19 juillet 2004 en ce que les études en vue de la mise en place de la refonte du PAG se trouvaient suffisamment avancées pour que la servitude prononcée ait pu l’être tel qu’elle l’a été. La commune entend distinguer entre les dispositions de l’article 20 et celles de l’article 21 de la même loi, en ce que cette dernière disposition vise non pas les études devançant la mise en place d’un projet de PAG, mais le projet lui-même. Au plus tard la version de la partie écrite du projet de PAG du 11 août 2016 versée en cause témoignerait à son tour que les conditions de l’article 21 se trouvaient remplies, également dès le mois de février 2016 en ce que pareil document ne s’invente pas en quelques semaines, ni en quelques mois.

Pour le surplus, la commune estime que l’incompatibilité entre la mise en place d’une station-service et les nombreux mouvements des engins participant à la circulation routière serait incompatible avec une ligne de tram passant sur le couloir adjacent avec une fréquence élevée avancée dans le sens qu’un tram passerait au moins tous les trois à six minutes suivant les intervalles considérés. Rien que cette considération justifierait entièrement la mise en place de la servitude prononcée.

La commune s’appuie pour le surplus sur des arguments d’ordres complémentaires dans le contexte des concepts de mobilité douce et de transfert pour la partie concernée de la localité de Howald d’un espace urbanisé ayant jadis fait partie d’une zone industrielle et ayant transité entre-temps vers une zone artisanale, dont une affectation comprenant de plus en plus d’éléments d’habitation serait envisagée dans un futur proche au niveau du projet de refonte du PAG en gestation avancée.

A la barre, le mandataire de la commune explique que le non-dépôt du projet de PAG s’expliquerait en ce qu’actuellement encore les responsables communaux seraient en tractations avec des riverains du futur tracé du tram en vue d’obtenir à l’amiable la cession des parcelles nécessitées pour le couloir réservé au futur tracé des rames, ensemble leurs entourages et que certains riverains seraient fort peu enclins à aller dans le sens préconisé par la commune. Ceci expliquerait actuellement le fait que le projet de refonte du PAG, par ailleurs prêt à être mis en procédure, n’aurait pas encore été présenté au conseil communal en vue du vote prévu par l’article 10 de la loi du 19 juillet 2004.

L’Etat déclare se rallier entièrement à l’argumentaire de la commune de Hesperange et demande à voir déclarer l’appel recevable et fondé en conséquence.

Les sociétés … et … sollicitent en substance la confirmation du jugement dont appel, dont plus particulièrement celle de la considération essentielle suivant laquelle les conditions prévues par les articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004 pour la mise en place d’une servitude ne se trouvaient réunies, ni à la date de la délibération du 5 février 2016, ni plus tard, dans la mesure où, d’une part, les études nombreuses versées en cause ne feraient pas état d’un projet suffisamment concrétisé et que pareil projet de PAG n’aurait pas été suffisamment concret et précis à la date de la mise en place de la servitude, ni ne l’auraient été par la suite, malgré le dépôt en instance d’appel seulement d’une version provisoire d’une partie écrite d’un nouveau PAG reprenant pour l’essentiel les dispositions relatives à la zone litigieuse sauf à préciser en une phrase ajoutée que dorénavant l’implantation de stations-

service y serait prohibée.

Suivant les deux sociétés intimées, la servitude prononcée à travers la délibération communale du 5 février 2016 ne méconnaîtrait pas seulement les articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004, mais encore les articles 10bis, 11, paragraphe 6, et 16 de la Constitution.

Lesdites sociétés contestent le caractère incompatible mis en avant par la commune de la réalisation d’une station-service par rapport aux objectifs de mobilité douce mis en avant et plus particulièrement la mise en place d’une ligne de tram. Cette mise en place devrait tout simplement s’aménager dans le sens que le tram ferait partie de la circulation routière publique et que les flux de véhicules y participant devraient être organisés en conséquence, sans que cependant la mise en place du tram à l’endroit ne soit incompatible comme telle avec la présence sur un terrain adjacent d’une station-service.

Les deux sociétés intimées insistent pour dire que la servitude ne frappe pas une parcelle devant accueillir une future rame de tram ni ses alentours directs, mais une parcelle adjacente qui, d’après les dispositions du PAG actuellement en vigueur, devrait pouvoir accueillir valablement une station-service telle que projetée par elle.

Pour le surplus, du moins la société … est d’avis qu’elle détient des droits acquis à l’implantation de pareille station-service sur le terrain litigieux dès avant une mise en place valable de la servitude litigieuse, tandis qu’en ordre subsidiaire, elle estime inopportune et disproportionnée cette mise en place par rapport à l’objectif recherché.

Les premiers juges ont valablement dégagé à partir des dispositions de l’article 20, alinéa 4, de la loi du 19 juillet 2004 que les juridictions administratives sont appelées à statuer en l’occurrence dans le cadre d’un recours en réformation.

Les premiers juges ont encore correctement décidé que dans la mesure où les servitudes prévues par les articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004 se raccrochent nécessairement à la mise en place des éléments de la réglementation communale d’urbanisme y visés et que ceux-ci constituent globalement des actes réglementaires, la même qualification doit être opérée par rapport à la délibération communale et à la décision ministérielle d’approbation de la servitude arrêtée dans le contexte de l’article 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004, lesquelles s’analysent encore en quelque sorte en tant qu’incident de la procédure de mise en place de nouveaux éléments de la réglementation communale d’urbanisme.

Il est vrai que du coup, en combinaison de l’article 20, alinéa 4, de la loi du 19 juillet 2004 et de la qualification ainsi valablement retenue d’actes réglementaires pour les délibération et décision ministérielle mettant en place pareille servitude, par exception au droit commun, un recours en réformation se trouve en l’occurrence ouvert à l’encontre d’un acte réglementaire.

Il est encore constant en cause qu’au moment de la mise en place de la servitude litigieuse, c’était la loi du 19 juillet 2004 dans sa version résultant de la modification du 28 juillet 2011 qui se trouvait applicable. La Cour étant amenée à statuer dans le cadre d’un recours en réformation, il y a lieu de signaler qu’entre-temps la loi du 19 juillet 2004 a notamment été modifiée à travers la loi du 3 mars 2017 dite « Omnibus » qui modifie plus particulièrement les alinéas 1er et 2 de l’article 20, ainsi que l’alinéa 2 de l’article 21 sans que toutefois ces modifications, somme toute mineures du texte antérieur, ne soient de nature à porter à conséquence quant à l’analyse à mener au niveau des points présentement litigieux dans l’application des dispositions des articles 20 et 21 en question.

L’article 20, dans sa version pertinente issue de la loi du 28 juillet 2011 de la loi du 19 juillet 2004 est intitulé « interdictions pouvant frapper les immeubles pendant la période d’élaboration d’un projet d’aménagement général » et dispose en son alinéa 1er qu’ : « Au cours des études ou travaux tendant à établir, à modifier, à compléter ou à réviser un plan ou projet d’aménagement général et jusqu’au moment de sa décision intervenant dans les conditions de l’article 10, alinéa 2, le conseil communal peut décider, sous l’approbation du ministre, que tous ou partie des immeubles touchés par le plan à l’étude ou en élaboration sont frappés des servitudes visées à l’article 21, alinéa 1er, sauf que les propriétaires restent libres de procéder aux travaux d’entretien et de réparation. Ces servitudes frappent les propriétés sans conférer de droit à indemnité ».

L’article 21 de la même loi, intitulé « servitude », dispose en ses alinéas 1 et 2 qu’ :

« A partir de la décision du conseil communal intervenue dans les conditions de l’article 10, alinéa 2, toute modification de limites de terrain en vue de l’affectation de ceux-ci à la construction, toute construction où réparation confortative ainsi que tous travaux généralement quelconques qui sont contraires aux dispositions du projet sont interdits, à l’exception des travaux de conservation et d’entretien.

Ces servitudes frappent les propriétés sans conférer le droit à indemnité. Elles deviennent définitives au moment de l’entrée en vigueur du plan d’aménagement général ».

Il est patent que dès le feu vert donné par le conseil communal en application de l’article 10, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004 correspondant à la mise en procédure effective du projet de PAG, les servitudes prévues à l’article 21, alinéa 1er, de la même loi trouvent immédiatement application et, parallèlement celles qui auraient été prononcées en application de l’article 20 au cours des études ou travaux préalables à l’élaboration d’un projet voire d’une modification de PAG cessent nécessairement leurs effets et se trouvent relayées par les servitudes découlant de la première délibération du conseil communal telle que prévue par l’article 10, alinéa 2, de la loi du 19 juillet 2004 combiné à son article 21, alinéa 1er.

Il découle de l’agencement des articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004 que, pour que des servitudes visées à l’article 21 puissent être valablement mises en place en vertu de l’article 20, il n’est pas exigé qu’un véritable projet de PAG ait déjà été élaboré, mais il suffit, aux termes de l’alinéa 1er de l’article 20, prérelaté, que l’on se trouve au niveau des études ou de travaux tendant à mettre en place pareil projet voire modification du PAG, étant entendu que les études et travaux en question doivent, par la force des choses, être suffisamment précis et circonstanciés pour qu’une servitude, qui constitue néanmoins une modalité passablement incisive dans l’usage du droit de propriété des propriétaires concernés, puisse valablement être prise.

Les premiers juges ont certes valablement dégagé à partir des travaux parlementaires préalables à la première mise en place de pareille servitude à travers la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire que la ratio legis consiste à éviter la mise en place de situations urbanistiques qui se révéleraient d’ores et déjà, au moment d’un stade avancé des études ou travaux tendant à l’établissement d’un projet voire d’une modification de PAG, être contradictoires par rapport au nouveau contenu projeté de la réglementation communale d’urbanisme. Cet objectif se décline encore en un mécanisme préventif d’une future expropriation pour cause d’utilité publique qui devrait être initiée ex post pour résorber pareille contradiction, alors qu’ex ante, de manière préventive il aurait été possible, au biais d’une servitude valablement mise en place, d’éviter pareille situation contradictoire, une fois le classement futur probable de tel terrain devenu prévisible avec suffisamment de précision.

Pourtant, les premiers juges ont tiré de l’application des dispositions combinées des articles 20, alinéa 1er et 21 de la loi du 19 juillet 2004 une conclusion passablement inadéquate en décidant que dans le cas d’espèce ces conditions ne se trouvaient pas suffisamment réunies.

Il est patent que pour la mise en place d’éléments d’infrastructures telle une ligne de chemin de fer, une nouvelle voie publique voire une rame de tram, les couloirs à emprunter, une fois qu’ils se trouvent suffisamment précisés, ne souffrent plus d’affectations incompatibles des terrains appelés à leur servir d’assiette, de sorte que la mise en place de servitudes en application des articles 20, alinéa 1er, et 21 de la loi du 19 juillet 2004 s’avère, en règle générale, être un outil indispensable en vue de prévenir pareilles incompatibilités à l’avenir, une fois ces tracés suffisamment précisés au niveau des études ou des travaux préparatoires à la mise en place d’un nouveau PAG ou d’une modification de celui-ci.

Dans pareils cas de figure, la mise en place utile de la servitude ne se discuterait guère.

Il est vrai qu’en l’occurrence, le terrain litigieux de la société … n’est pas appelé à servir d’assiette à la nouvelle ligne de tram préfigurée avec suffisamment de précision au niveau de l’ensemble des éléments du dossier dès la date du 5 février 2016, mais s’analyse en parcelle directement adjacente à la ligne de tram qui est précisément projetée au niveau de la rue … du côté du terrain litigieux et non point du côté opposé.

La Cour peut retracer les motifs déterminants ayant guidé la société … à vouloir implanter une station-service au niveau de la rue …, étant donné que compte tenu de la mise en place de la future route nationale 3 à proximité, devant déboucher dans la rue …, l’essentiel du trafic passera là où jusque lors la …l’a en grande majorité accueilli. Autrement dit, une station-service le long de la …risquera de souffrir d’une fréquentation passablement amoindrie et une station-service bien placée à proximité de la nouvelle route nationale 3 jouira probablement d’une course ascendante inverse de fréquentation.

Seulement, il est patent que la mise en place d’une station-service, particulièrement celle appelée à jouir d’une fréquentation élevée, va de pair avec un nombre accru d’allers et de venues de véhicules participant à la circulation routière d’autant accrue. Si une rame de tram passe à proximité directe du terrain adjacent devant accueillir une station-service, la conséquence directe en est que pour tous ces flux d’allers et de venues des véhicules participant à la circulation routière et dont la fréquentation de la station-service est souhaitée, un passage par la ligne des rails du futur tram devient doublement nécessaire, une fois pour la venue et une fois pour le départ de la station-service directement adjacente. Il en résulte potentiellement une incompatibilité flagrante des deux installations en question, si tant est que la ligne de tram est elle aussi appelée, tel que le mettent en exergue les études versées au dossier, à connaître une fréquence soutenue se déclinant en un passage de tram au moins dans un intervalle variant entre 3 à 6 minutes.

Aux yeux de la Cour, l’ensemble des éléments versés au dossier fait ressortir avec suffisamment d’acuité dès le 5 février 2016 le problème de l’incompatibilité à l’endroit d’une station-service par rapport à la ligne de tram projetée, compte tenu des fréquentations et fréquences, toutes les deux prévues comme allant être soutenues, mises en avant.

Contrairement à l’analyse des premiers juges, la Cour vient à la conclusion que la première condition essentielle consistant en une incompatibilité prévisible suffisamment caractérisée entre la mise en place d’une station-service à l’endroit litigieux face à la ligne de tram projetée sur le couloir adjacent, se trouvait caractérisée d’une manière suffisamment concrète et précise à partir des études et pièces versées au dossier ensemble les travaux de préparation de longue date du projet de refonte du PAG de la commune de Hesperange documentés au dossier, pour que dès le 5 février 2016 la servitude mise en place fût justifiée concernant le terrain litigieux de la société … pris en location par la société ….

Vu que cette incompatibilité n’a fait que se préciser davantage par la suite au gré des éléments complémentaires versés en cause se situant après le 5 février 2016, dont notamment l’interdiction de mise en place de stations-service prévue au projet de PAG pour l’endroit litigieux dans la version provisoire versée datant du 11 août 2016, la conclusion ci-avant tirée par la Cour ne fait que s’accentuer au fil de la révolution du temps couru.

Il est patent encore que les deux autres conditions prévues par l’article 20, alinéa 1er, en combinaison avec l’article 21 de la loi du 19 juillet 2004 ne posent pas problème en ce que la servitude litigieuse a été prévue pour un délai d’une année et vient d’être reconduite tel qu’exposé ci-avant et que, d’un autre côté, en troisième lieu, l’approbation ministérielle est requise. Il est incontesté que le ministre de l’Intérieur, par sa décision du 16 février 2016, également attaquée, a rempli cette condition.

L’argument soulevé par les sociétés intimées suivant lequel l’article 20, alinéa 1er, pêcherait en visant, le cas échéant, « tous les immeubles » touchés par le plan à l’étude ou en élaboration manque de pertinence à de multiples égards.

En l’espèce, la servitude prononcée le 5 février 2016 ne vise que quelques parcelles précisément indiquées, dont celle litigieuse.

Par ailleurs, le tribunal, en annulant la délibération communale du 5 février 2016 ensemble la décision ministérielle d’approbation du 16 février 2016, aurait dû, dans sa logique, se limiter à l’annulation, dans le cadre d’un recours en réformation de la servitude concernant cette seule parcelle.

Par ailleurs le texte de l’article 20, alinéa 1er, en question, d’une teneur générale, est appelé à viser des situations où seulement quelques immeubles du territoire communal se trouvent visés par la mise en place d’une modification d’un PAG, à l’exemple de la prévision d’un tracé d’une nouvelle voie publique ou d’une nouvelle rame de tram et que pour l’ensemble de ces terrains précisément, délimités, eu égard à l’objet de la modification du PAG, la servitude s’impose.

L’argumentaire afférent des sociétés intimées est partant à écarter pour ne pas être pertinent.

Le moyen tiré du caractère disproportionné de la mesure est à son tour à écarter, s’agissant d’une incompatibilité radicale, ci-avant nettement dégagée par la Cour au regard de la situation précise de la rame de tram projetée se trouvant à proximité du terrain adjacent devant accueillir une station-service selon les sociétés et engendrant des passages par-delà les rails du tram, s’analysent à la fois en des allers et des venues potentiels d’une fréquentation soutenue espérée par lesdites sociétés intimées de la station-service qu’elles voudraient voir implantée à l’endroit.

Les mêmes considérations amènent la Cour à écarter également le moyen tiré du caractère inopportun de la mesure de la part des sociétés intimées.

L’argumentaire tiré d’un soi-disant droit acquis dans le chef de la société … du fait du dépôt le 20 novembre 2015 d’un projet absolument conforme, suivant les sociétés intimées, à la réglementation communale d’urbanisme laisse également de convaincre, face aux conclusions auxquelles la Cour est arrivée dans son arrêt parallèle de ce jour concernant les refus implicite non vérifié à la date de l’introduction du recours de la société … et explicite, pleinement justifié eu égard aux conclusions tirées à travers le présent arrêt, sans qu’un droit acquis n’ait de toute façon pu être valablement tiré d’une simple demande en autorisation de construire dont la conformité à la réglementation communale d’urbanisme n’a, pour le surplus, pas pu être utilement vérifiée en cause.

La société … se plaint encore de ce que la servitude prévue serait contraire à l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution disposant que les Luxembourgeois sont égaux devant la loi.

Or, pour que le principe d’égalité prévu par l’article 10bis en question puisse être valablement mis en œuvre, il convient de pouvoir dégager deux situations comparables par rapport auxquelles une inégalité de traitement puisse être utilement invoquée.

Seulement, la société …, d’un côté, n’est que locataire de l’immeuble litigieux et surtout, de l’autre, il s’agit de toute apparence de la seule station-service se trouvant potentiellement logée dans le secteur visé sur un terrain directement adjacent au corridor des rails de tram sinon accessoirement à une piste cyclable.

Faute d’éléments de comparabilité valablement mis en avant, l’argument est à rejeter.

La société … invoque ensuite une méconnaissance pour la servitude litigieuse des dispositions de l’article 11, paragraphe 6, de la Constitution garantissant la liberté de commerce et de l’industrie ainsi que l’exercice de la profession libérale, sauf les restrictions à établir par la loi.

Or, la servitude litigieuse est précisément issue des dispositions de la loi, à savoir des articles 20 et 21 de la loi du 19 juillet 2004.

L’argument laisse dès lors de convaincre.

La société … invoque enfin une incompatibilité de la servitude prononcée par rapport à l’article 16 de la Constitution suivant lequel nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennement juste indemnité, dans les cas et de la manière établis par la loi.

Dans la mesure où la société … n’est que locataire de la parcelle litigieuse, les dispositions de l’article 16 de la Constitution ne s’appliquent pas à sa situation précise.

L’argument est dès lors à écarter.

Pour autant que l’argument ait été utilement invoqué, par renvoi, par la société …, effectivement propriétaire de la parcelle litigieuse, il convient de préciser certains éléments.

Il est vrai que l’article 20, alinéa 1er, in fine de la loi du 19 juillet 2004, dans sa version issue de la loi du 28 juillet 2011, peut prêter à discussion en ce qu’il dispose que les servitudes y visées « frappent les propriétés sans conférer de droit à indemnité ».

L’arrêt de la Cour constitutionnelle du 4 octobre 2013 (00101 du registre) permet cependant de dénouer la question, du moins au stade des recours devant le juge administratif.

A supposer pour les besoins de la discussion que la servitude prononcée puisse être analysée en tant qu’expropriation au sens de l’article 16 de la Constitution dans la mesure où les attributs du droit de propriété seraient épluchés – à l’image de l’artichaut – d’une manière telle qu’une pareille équivalence à une expropriation puisse être retenue, l’article 16 en question ne s’opposerait pas à ce que pareille servitude puisse être légalement prise du moment qu’elle se justifie par les conditions relevant de l’intérêt général et prévues par la loi, mais ouvrirait tout au plus une action en dommages et intérêts devant les juridictions civiles si tant était que le droit de propriété se trouverait vidé de telle manière de sa substance qu’une équivalence à une expropriation au sens dudit article 16 de la Constitution devrait être retenue.

Dès lors, le moyen est inopérant devant le juge administratif, une fois que la vérification des conditions légales prévues pour la mise en place valable de la servitude se trouvent vérifiées, tel le cas d’espèce.

L’ensemble des autres éléments d’argumentaire déployés ou suggérés par les sociétés intimées se trouve nécessairement écarté, per se, par le fait que la Cour a pu dégager ci-avant qu’en application précisément de l’article 20, alinéa 1er de la loi du 19 juillet 2004 ensemble son article 21, le conseil communal, approuvé par le ministre, avait pu valablement mettre en place la servitude instaurée, tous autres éléments d’argumentaire non encore toisés ci-avant se trouvant de la sorte implicitement mais nécessairement écartés du chef de ce constat de base justifiant la légalité de la servitude instaurée pour la première période d’un an et rejaillissent, toutes choses restant égales par ailleurs, sur la seconde période d’un an actuellement en cours.

Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que, par réformation du jugement dont appel, il y a lieu de déclarer non fondés les recours respectifs introduits par les sociétés … et … sous les numéros 37717 et 37756 du rôle devant le tribunal administratif et d’en débouter lesdites sociétés.

Eu égard à l’issue du litige, les demandes respectives en allocation d’une indemnité de procédure, tant pour la première instance que pour l’instance d’appel de la société … et de la société … sont à rejeter.

La commune de Hesperange sollicite l’allocation d’une indemnité de procédure de 1.500.- € pour l’instance d’appel à charge de chacune des deux sociétés intimées Cette double demande est à écarter à son tour, les conditions d’iniquité prévues par les articles conjugués 33 et 54 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée ne se trouvant pas réunies à suffisance de droit.

Eu égard à l’issue du litige, il convient de faire masse des dépens des deux instances et de les imposer par moitié aux deux sociétés intimées.

Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l'égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel principal recevable ;

déclare l’appel incident de la société …S.A. irrecevable ;

au fond, dit l’appel principal justifié ;

réformant, déclare non fondés les recours respectivement introduits par la société …S.A. et la société … S.A. sous les numéros 37717 et 37756 du rôle et les en déboute ;

écarte les demandes en allocation d’une indemnité de procédure desdites sociétés intimées, ainsi que celle de la commune de Hesperange ;

fait masse des dépens des deux instances et les impose pour moitié à chacune desdites sociétés intimées.

Ainsi délibéré et jugé par :

Francis DELAPORTE, président, Henri CAMPILL, vice-président, Serge SCHROEDER, premier conseiller, et lu par le président en l'audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier assumé de la Cour Sam WICKENS.

S. WICKENS s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 22.06.2017 le greffier de la Cour administrative 16


Synthèse
Numéro d'arrêt : 39166C
Date de la décision : 22/06/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2017-06-22;39166c ?

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