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19/04/2016 | LUXEMBOURG | N°37300C

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 19 avril 2016, 37300C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 37300C Inscrit le 17 décembre 2015

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Audience publique du 19 avril 2016 Appel formé par l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg contre un jugement du tribunal administratif du 25 novembre 2015 (n° 35122 du rôle) dans un litige l’opposant aux époux … et … …-…, … (B), en matière d’impôt sur le revenu

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Vu l’acte d’appel, inscrit sous le numéro 37300C du rôle, ...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 37300C Inscrit le 17 décembre 2015

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Audience publique du 19 avril 2016 Appel formé par l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg contre un jugement du tribunal administratif du 25 novembre 2015 (n° 35122 du rôle) dans un litige l’opposant aux époux … et … …-…, … (B), en matière d’impôt sur le revenu

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Vu l’acte d’appel, inscrit sous le numéro 37300C du rôle, déposé au greffe de la Cour administrative le 17 décembre 2015 par Monsieur le délégué du gouvernement Sandro LARUCCIA, agissant sur base d’un mandat afférent lui conféré par le ministre des Finances le 11 décembre 2015, au nom de l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, dirigé contre un jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 25 novembre 2015 (n° 35122 du rôle), par lequel ledit tribunal a déclaré justifié le recours introduit par Monsieur … … et son épouse, Madame … …, demeurant ensemble à …, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes (nos C 18141, C 18142 et C 18143 du rôle) du 26 mai 2014 en ce qu’elle a déclaré non fondée leur réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu pour les années 2008 et 2009, le tribunal ayant ainsi, dans le cadre du recours en réformation, annulé partiellement ladite décision en ce qui concerne les années d’imposition 2008 et 2009, renvoyé l’affaire en prosécution de cause devant le directeur de l’administration des Contributions directes, dit qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire et condamné l’Etat aux frais ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 18 janvier 2016 par Maître Christian ROLLMANN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte des époux … et … …-… ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Le rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Eric PRALONG et Maître Christian ROLLMANN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 avril 2016.

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Monsieur … … et Madame … …, dénommés ci-après les « époux …-… », déposèrent leurs déclarations pour l’impôt sur le revenu des années 2008, 2009 et 2010 respectivement en dates des 14 janvier 2010, 1er février 2011 et 21 mars 2012.

Par trois courriers du 31 août 2012, le bureau d’imposition Luxembourg X de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », informa les époux …-…, par rapport aux trois déclarations prévisées, conformément au § 205 (3) de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », que « les dispositions de l’article 157ter L.I.R. ou de l’article 24 de la convention belgo-luxembourgeoise contre les doubles impositions » ne seraient pas appliquées pour leur imposition, de sorte que ni « des dépenses spéciales, ni des charges extraordinaires » ne seraient prises en compte, au motif que « l’article 17 du règlement grand-ducal du 9 mars 1992 portant exécution de l’article 145 L.I.R. dispose que, lorsque le décompte n’a lieu que sur demande, celle-ci est à déposer au plus tard le 31 décembre de l’année qui suit celle pour laquelle le décompte est à effectuer », et qu’« en vertu du § 153 AO, les droits à restitution s’éteignent si la demande en restitution n’a pas été introduite avant la fin de l’année qui suit celle de la survenance des faits à l’origine du droit ».

En date du 5 septembre 2012, le bureau d’imposition émit à l’égard des époux …-… les bulletins de l’impôt sur le revenu pour les années 2008, 2009 et 2010, ci-après désignés par les « bulletins », en indiquant dans le bulletin concernant l’année 2008 que l’imposition diffère de la déclaration en ce que « la déclaration étant rentrée au-delà de la date limite, il ne peut pas être tenu compte de déductions ni au titre de dépenses spéciales, ni au titre de charges extraordinaires ».

Par courrier du 6 septembre 2012, envoyé par télécopie, les époux …-… firent parvenir au bureau d’imposition leurs observations relatives aux trois courriers du 31 août 2012, précités, en soulignant plus particulièrement qu’ils n’auraient pas agi de mauvaise foi et que la non-application de l’article 157ter de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR », aux impositions visées constituerait une sanction disproportionnée dans leur chef au regard de la faute commise, c’est-à-dire le fait d’avoir déposé leurs déclarations fiscales pour les années 2008, 2009 et 2010 peu de temps après l’expiration du délai légal.

Par trois courriers du 26 novembre 2012, les époux …-… s’adressèrent au directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par le « directeur », en les termes suivants :

« (…) Réclamation pour supplément pour dépôt tardif sur le revenu [2008, 2009, 2010].

Le 5 septembre dernier, nous avons reçu simultanément 3 courriers de vos services, datés du 31/08/2012 (voir annexe 1), par lesquels l'Administration des Contributions Directes nous informe que les dépenses spéciales et les charges extraordinaires de nos déclarations sur les revenus 2008, 2009 et 2010 ne seront pas prises en compte pour cause de dépôt tardif.

Déclaration sur les revenus 2008 introduite le 14 janvier 2010, soit 14 jours après la limite du 31/12/2009 ;

Déclaration sur les revenus 2009 introduite le 01 février 2011, soit 31 jours après la limite du 31/12/2010 ;

Déclaration sur les revenus 2010 introduite le 21 mars 2012, soit 82 jours après la limite du 31/12/2011.

Nous avons immédiatement transmis par fax, le 6 septembre dernier, un courrier au bureau d'imposition (voir annexe 2) et essayé, en vain, de joindre le bureau d'imposition par téléphone.

Ce courrier est resté sans aucune réaction à ce jour !! Le 10 septembre dernier, nous avons reçu les bulletins d'impôts pour les revenus 2008, 2009 et 2010 (daté du 5/09/2012) qui ne tiennent effectivement pas compte des dépenses spéciales et charges extraordinaires.

Nous nous permettons donc d'introduire un recours hiérarchique formel pour cause de supplément pour dépôt tardif pour notre bulletin sur le revenu [2008, 2009, 2010].

Je vous joins, en annexe, une argumentation et une copie des pièces utiles à la compréhension du dossier ».

Par une décision du 3 janvier 2013, répertoriée sous les numéros C 18141, C 18142 et C 18143 du rôle, le directeur déclara sans objet le recours des époux …-… aux motifs suivants :

« Décision sur recours hiérarchique formel Le directeur des contributions, Vu les requêtes introduites le 28 novembre 2012 par le sieur … … et la dame … …, B-

…, ayant élu domicile à Luxembourg, en ce qu'elles tendent à exercer un recours contre la fixation de suppléments d'impôt pour déclaration tardive des revenus des années 2008, 2009 et 2010 ;

Vu le dossier fiscal;

Considérant que les instances étant suffisamment connexes, il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule et même décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction du dossier fiscal, que pour les années en cause, le bureau d'imposition n'a décerné aucun supplément d'impôt pour une déclaration tardive de revenus ;

PAR CES MOTIFS Déclare les recours sans objet. […].

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 3 avril 2013, les époux …-… firent introduire un recours en réformation, sinon en annulation contre la décision directoriale du 3 janvier 2013.

Par un jugement du 31 mars 2014 (n° 32257 du rôle), le tribunal administratif reçut le recours en annulation et annula la décision directoriale du 3 janvier 2013, au motif que l e directeur n’aurait pas pu se méprendre sur l’intention des époux …-… d’introduire une réclamation contre les bulletins du 5 septembre 2012, de sorte qu’il n’aurait pas valablement pu qualifier les trois courriers du 26 novembre 2012 de recours hiérar chique formel. Par un obiter dictum, le tribunal constata encore que du fait que les époux …-… avaient admis avoir soumis leurs déclarations pour l’impôt sur les revenus des années 2008, 2009 et 2010 postérieurement au délai d’un an après l’écoulement des années d’imposition concernées, la demande d’admission à l’imposition par voie d’assiette au sens de l’article 153 (4) LIR y relative avait été introduite de manière tardive.

Par une nouvelle décision datée au 26 mai 2014, référencée sous les nos C 18141, C 18142 et C 18143 du rôle, le directeur rejeta comme non fondées les réclamations des époux …-… aux motifs suivants :

« (…) Vu les requêtes introduites le 28 novembre 2012 par les époux, le sieur … … et la dame … …, demeurant à B-…, ayant élu domicile au Luxembourg, pour réclamer contre les décisions de refus d'une imposition par voie d'assiette pour les années 2008, 2009 et 2010, tous émis le 30 août 2012 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 228 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 31 mars 2014, numéro 32257 du rôle ;

Considérant qu'en vertu de son pouvoir discrétionnaire, il est loisible au directeur des contributions de joindre des affaires si elles lui paraissent suffisamment connexes (cf.

Conseil d'État du 06.02.1996, n° 8925 du rôle) ; qu'en l'espèce, les réclamations ayant le même objet, il échet, dans l'intérêt d'une bonne administration de la loi, de les joindre pour y statuer ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit, dans les forme et délai de la loi, qu'elles sont partant recevables ;

Considérant que les réclamants font grief au bureau d'imposition de ne pas avoir pris en compte la déduction des charges extraordinaires ainsi que l'excédent des frais d'obtention et de dépenses spéciales ;

Considérant qu'en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d'office un réexamen intégral de la cause, la loi d'impôt étant d'ordre public ;

Qu'à cet égard le contrôle de la légalité externe de l'acte doit précéder celui du bien-

fondé; qu'en l'espèce la forme suivie par le bureau d'imposition ne prête pas à critique ;

Considérant que pour l'année litigieuse, les réclamants, résidents de la Belgique et tous les deux salariés auprès d'un employeur situé au Grand-Duché, sont en principe imposables au Luxembourg d'après les dispositions particulières concernant les contribuables non résidents prévues aux articles 156 à 157ter L.I.R. ;

Considérant qu'aux termes de l'article 157 alinéa 4 L.I.R. les contribuables non résidents occupés comme salariés au Grand-Duché pendant neuf mois de l'année d'imposition au moins et y exerçant leurs activités d'une façon continue pendant cette période, ainsi que les contribuables non résidents visés à l'alinéa 3 de l'article 157bis L.I.R.

et dont au moins l'un des époux touche des revenus d'une occupation salariée exercée au Grand-Duché ou des revenus résultant de pensions ou de rentes visés au numéro 5 de l'article 156 L.I.R, tombent sous l'application de l'article 153 L.I.R. en ce qui concerne les conditions de l'imposition par voie d'assiette des revenus passibles d'une retenue d'impôt ;

Considérant que les réclamants répondent aux conditions de l'article 157 alinéa 4 L.I.R. et qu'il y a ainsi lieu de vérifier s'ils sont imposables par voie d'assiette en vertu des dispositions de l'article 153 L.I.R. ;

Considérant que lorsque le revenu imposable se compose, comme en l'espèce, en tout ou en partie de revenus passibles d'une retenue d'impôt sur les traitements et salaires, il y a lieu, en vertu de l'article 153 alinéa 1er L.I.R. ensemble l'article 3 numéro 4 du règlement grand-ducal du 28 décembre 1990, à imposition par voie d'assiette si, en cas de cumul de plusieurs rémunérations passibles de la retenue d'impôt sur les salaires et pensions, le revenu imposable dépasse 36.000 euros ;

Considérant qu'après examen du dossier fiscal des réclamants, il s'avère que pour l'année litigieuse le revenu imposable dépasse largement le montant de 36.000 euros et qu'ils sont partant obligatoirement imposables par voie d'assiette en vertu du jeu des articles 157 alinéa 4 L.I.R. et 153 L.I.R. ;

Considérant qu'aux termes de l'article 157 alinéa 1er L.I.R., les contribuables non résidents ne sont autorisés à défalquer leurs dépenses d'exploitation ou leurs frais d'obtention que pour autant que ces dépenses ou frais sont en rapport économique direct avec des revenus indigènes ; que l'alinéa 2 de l'article 157 dit encore non applicable à l'égard des contribuables non résidents les articles 109, alinéa 1, numéros 1 à 3 L.I.R.

(certaines dépenses spéciales), 127 L.I.R. (abattement de revenu imposable pour charges extraordinaires) et 154ter L.I.R. (crédit d'impôt monoparental); que ces dispositions restrictives sont dues au fait que les contribuables non résidents sont imposables uniquement en raison de leurs revenus indigènes au sens de l'article 156 L.I.R. et que, lorsqu'ils ne dépassent pas un certain seuil de revenus réalisés au Grand-Duché, il est supposé que leur situation personnelle et familiale est suffisamment prise en compte dans leur État de résidence, notamment par le biais de certains abattements, de tranches de revenus exonérés, etc. ;

Considérant que par dérogation aux dispositions des alinéas 1 et 2 de l'article 157 L.I.R. les charges et dépenses y énumérées peuvent être déduites dans le cadre d'une imposition selon les dispositions de l'article 157ter L.I.R. ; qu'en vertu de l'article 157ter alinéa 1er L.I.R., dans sa version applicable à l'année d'imposition 2010, les contribuables non résidents imposables au Grand-Duché du chef d'au moins 90 pour cent du total de leurs revenus tant indigènes qu'étrangers sont, sur demande imposés au Grand -Duché, en ce qui concerne leurs revenus y imposables, au taux d'impôt qui leur serait applicable s'ils étaient des résidents du Grand-Duché et y étaient imposables en raison de leurs revenus tant indigènes qu'étrangers ; que dans sa version applicable aux années d'imposition 2008 et 2009, les dispositions de l'article 157ter L.I.R. sont identiques, sauf qu'il est exigé que les contribuables non résidents soient imposables au Grand-Duché du chef d'au moins 90 pour cent du total de leurs revenus professionnels tant indigènes qu'étrangers ; que l'application de l'article 157ter L.I.R. permet, contrairement à l'article 157 L.I.R. qui est à la base applicable à tous les contribuables non résidents, de défalquer les mêmes dépenses que les contribuables résidents ; que le corollaire de l'application de ces dispositions est l'obligation de déclaration de l'ensemble des revenus étrangers réalisés pendant l'année d'imposition concernée ; que l'application de l'article 157ter L.I.R. ou bien de l'article 24 paragraphe 4a de la convention belgo-luxembourgeoise contre les doubles impositions, prévoyant un mode d'imposition identique, permet, contrairement à l'article 157 L.I.R. qui est à la base applicable à tous les contribuables non résidents, de défalquer les mêmes dépenses que les contribuables résidents (dans la suite de la présente décision, les commentaires et conclusions concernant l'article 157ter L.I.R. visent de manière identique les dispositions de l'article 24 paragraphe 4a de la convention belgo-luxembourgeoise contre les doubles impositions) ; que le corollaire de l'application de ces dispositions est l'obligation de déclaration de l'ensemble des revenus étrangers réalisés pendant l'année d'imposition concernée ;

Considérant qu'à l'endroit des contribuables non résidents salariés, le nombre des cas de figure dans lesquels une imposition par voie d'assiette a lieu, est bien plus restreint qu'à l'endroit des contribuables résidents (cf article 157 alinéas 3 et 4 L.I.R.) et que le régime d'imposition prévu aux articles 157 L.I.R. et 157bis L.I.R. (dans la suite ce régime d'imposition est désigné par « régime commun ») diffère nettement de celui prévu à l'article 157ter L.I.R.; que pour être imposables d'après les dispositions de l'article 157ter L.I.R., les contribuables en question doivent, contrairement à ce qui est le cas pour une imposition par voie d'assiette selon le régime commun applicable aux contribuables non-résidents, renseigner sur l'ensemble de leurs revenus tant indigènes qu'étrangers ; qu'en plus, un grand nombre de revenus étrangers sont pris en compte pour la détermination du taux d'impôt applicable aux revenus indigènes ; qu'en résumé, et selon les termes de la circulaire L.I.R.

n° 157ter/1 du 27 juin 2008 du directeur des contributions, le régime d'impositio n de l'article 157ter L.I.R. assimile par dérogation aux dispositions correspondantes des articles 157 L.I.R. et 157bis L.I.R., les contribuables non résidents aux contribuables résidents, tant sur le plan de la détermination du revenu imposable que sur celui de la détermination de l'impôt ; qu'il résulte que le régime d'imposition prévu à l'article 157ter L.I.R., uniquement applicable sur demande, diverge nettement du régime commun applicable aux contribuables non résidents, prévu aux articles 157 et 157bis L.I.R., de manière à constituer un régime d'imposition à part dont l'application n'a lieu que sur demande expresse du contribuable ;

Considérant que pour les années d'imposition litigieuses, les réclamants ont explicitement demandé l'application des dispositions de l'article 157ter L.I.R., en cochant la case prévue à cet effet ;

Considérant qu'aux termes de la circulaire L.I.R. n° 157ter/1 du 27 juin 2008 du directeur des contributions « le régime d'imposition de l'article 157ter n'est applicable que sur demande des contribuables non résidents et ne peut par conséquent jouer qu'en leur faveur. En effet, au cas où les dispositions de l'article 157ter s'avéreraient être en défaveur des contribuables non résidents, l'impôt relatif à leurs revenus indigènes est à déterminer conformément aux dispositions des articles 157 et 157bis L.I.R. » ;

Considérant que dans le cas d'un contribuable non résident salarié, obligatoirement imposable par voie d'assiette en vertu de l'article 157 alinéa 4 L.I.R. ensemble l'article 153 L.I.R., disposant d'une seule fiche de retenue d'impôt et dont le salaire a été correctement soumis à la retenue d'impôt sur les salaires, la demande d'application des dispositions de l'article 157ter L.I.R., compte tenu du fait que ces dispositions ne peuvent jouer qu'en faveur du contribuable et qu'elles permettent de faire valoir un certain nombre de dépenses spéciales (assurances, intérêts débiteurs, cotisations d'épargne-logement, etc.) qui ne sont généralement pas déductibles dans le chef des contribuables non résidents, tend manifestement à obtenir un remboursement de l'intégralité ou d'une partie de la retenue d'impôt sur les salaires ; que dans un pareil cas, la demande de l'application des dispositions de l'article 157ter L.I.R. constitue une demande en restitution d'impôts au sens du § 153 AO ;

Considérant que dans le cas des contribuables non résidents mariés, rangés dans la classe d'impôt 2 et dont chacun dispose d'une ou de plusieurs fiches de retenue d'impôt du fait qu'il réalise au Grand-Duché un salaire y imposable, la retenue d'impôt sur la (les) rémunération(s) supplémentaire(s) touchée(s) pendant l'année 2012 est déterminée de manière forfaitaire par la fixation du taux de retenue de 12% prévu à l'article 14 du règlement grand-ducal du 9 janvier 1974 relatif à la détermination de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions; que dû à la fixation forfaitaire de la retenue sur la (les) rémunération(s) supplémentaire(s), un décompte annuel au sens de l'article 145 L.I.R. ou une imposition par voie d'assiette, dans le cadre desquels les revenus du ménage sont cumulés, peut donner lieu soit à un remboursement d'impôt (au cas où le taux de retenue de 12 % s'avérerait trop élevé), soit à un paiement supplémentaire d'impôt sur le revenu au cas où ce taux s'avérerait insuffisant ;

Considérant donc qu'une application des dispositions de l'article 157ter L.I.R. dans le chef des contribuables disposant d'une ou de plusieurs rémunérations supplémentaires au sens de l'article 3 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 9 janvier 1974 relatif à la détermination de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, n'entraîne pas nécessairement un remboursement de retenue d'impôt sur salaire ; que toutefois l'application des dispositions de l'article 157ter L.I.R., permettant de faire valoir un certain nombre de dépenses spéciales (assurances, intérêts débiteurs, etc.) qui ne sont généralement pas déductibles dans le chef des contribuables non résidents, conduit, en principe, à une diminution d'un éventuel solde d'impôt à payer après imposition, ce qui, économiquement, a le même effet qu'un remboursement d'impôt, à savoir la réduction de la dette d'impôt annuelle globale ; que la seule différence est que le contribuable n'ayant pas intégralement payé l'impôt sur le revenu dû, par voie de retenue d'impôt sur ses salaires mensuels ou sous forme d'avances d'impôt, a pu disposer des sommes dues à l'État jusqu'au jour de l'échéance de l'impôt dû, un mois après l'imposition ;

Considérant qu'il ressort de tout ce qui précède que la demande d'application des dispositions de l'article 157ter L.I.R., introduite par des contribuables non résidents obligatoirement imposables par voie d'assiette et disposant d'une ou de plusieurs rémunérations supplémentaires au sens de l'article 3 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 9 janvier 1974 relatif à la détermination de la retenue d'impôt sur les salaires et les pensions, est à assimiler à une demande de remboursement au sens du § 153 AO ;

Considérant qu'en vertu du § 153 AO, les droits à restitution permis en dehors des cas visés aux §§ 151 et 152 AO s'éteignent si la demande en restitution n'a pas été introduite avant la fin de l'année qui suit celle de la survenance des faits à l'origine du droit ; qu'en l'espèce les réclamants ont introduit leur demande d'imposition selon l'article 157ter L.I.R.

pour l'année 2008 en date du 14 janvier 2010, pour l'année 2009 en date du 1er février 2011, et pour l'année 2010 en date du 21 mars 2012, alors qu'ils les auraient dû introduire respectivement jusqu'au 31 décembre 2009 (imposition de l'année 2008), jusqu'au 31 décembre 2010 (imposition de l'année 2009) ou encore jusqu'au 31 décembre 2011 (imposition de l'année 2010) au plus tard ; que, partant, lesdites demandes sont à considérer comme tardives ;

Considérant que les dispositions du § 86 AO sont applicables en cas de dépassement du délai précité, au cas où des circonstances seraient susceptibles de justifier un relevé de forclusion ;

Considérant en plus que l'instruction n'a pas révélé de circonstance susceptible de justifier un relevé de forclusion (§§ 86 et 87 AO) ; (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 26 août 2014, les époux …-

… firent introduire un recours tendant principalement à la réformation, sinon subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du directeur du 26 mai 2014 en ce qu’elle a rejeté leurs réclamations introduites le 26 novembre 2012 contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2008 et 2009.

Dans son jugement du 25 novembre 2015, le tribunal reçut le recours principal en réformation en la forme et le déclara justifié, de manière à avoir, dans le cadre du recours en réformation introduit, annulé partiellement la décision directoriale du 26 mai 2014 en ce qui concerne les années d’imposition 2008 et 2009 et renvoyé l’affaire en prosécution de cause devant le directeur. Le tribunal dit encore qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur le recours en annulation introduit à titre subsidiaire et condamna l’Etat aux frais.

Par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 17 décembre 2015, l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg a fait régulièrement relever appel de ce jugement du 25 novembre 2015.

L’Etat base son appel sur le reproche au tribunal d’avoir fondé son analyse sur un raisonnement erroné et manifestement contraire à la finalité des dispositions pertinentes et d’avoir omis de prendre en considération les arguments par lui développés en première instance.

Il rappelle que les intimés auraient déposé leur déclaration d’impôt pour l’année 2008 avec quinze jours de retard par rapport au délai d’un an, celle pour l’année 2009 avec un retard de 32 jours et celle pour l’année 2010 avec un retard de presque trois mois. Il renvoie en outre aux dispositions légales pertinentes des articles 153 et 157 LIR et insiste sur le fait que les contribuables non résidents ont la possibilité d’opter, sur demande, pour l’application de l’article 157ter LIR, option que les intimés auraient exercée dans le cadre de leurs déclarations d’impôt des années 2008 et 2010. Concernant l’année 2009, l’Etat admet qu’alors même que les intimés auraient demandé l’application de l’article 24 (4) a) de la Convention modifiée du 17 septembre 1970 entre le Luxembourg et la Belgique en vue d'éviter les doubles impositions et de régler certaines autres questions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, telle qu’elle a été approuvée par une loi du 14 août 1971, dénommée ci-après la « Convention », sans explicitement formuler la demande de se voir appliquer le régime prévu par l’article 157ter LIR, l’indication de certaines dépenses spéciales et des charges extraordinaires dans leur déclaration pourrait être assimilée à une demande au sens de l’article 157ter LIR.

L’Etat précise que le régime d’imposition prévu par l’article 157ter LIR ne serait applicable que sur demande expresse et uniquement pour les contribuables non-résidents, le régime de droit commun des articles 157 et 157bis LIR étant applicable en l’absence d’une telle demande. Compte tenu de ce que ce régime spécial par rapport aux dispositions des articles 157 et 157bis LIR ne saurait jouer qu’en faveur du contribuable, en lui permettant de faire valoir un certain nombre de dépenses spéciales, il tendrait manifestement à obtenir un remboursement de l’intégralité ou d’une partie de la retenue d’impôt et s’analyserait partant en une demande en restitution d’impôts au sens du § 153 AO. Or, un tel droit à restitution s’éteindrait, conformément au § 153 AO et au § 3 de la loi d’adaptation fiscale modifiée du 16 octobre 1934, dite « Steueranpassungsgesetz », en abrégé « StAnpG », si la demande n’a pas été introduite avant la fin de l’année qui suit celle de la survenance des faits à l’origine du droit et au vu du fait non contesté du non-respect de ce délai par les intimés, le directeur aurait fait une exacte application de la loi en rejetant leurs demandes pour cause de tardiveté.

L’Etat ajoute que les intimés n’auraient fourni à aucun stade de la procédure une explication adéquate quant aux dépôts tardifs de leurs déclarations d’impôt, de manière que rien ne justifierait une prorogation du délai telle que prévue au § 86 AO, l’argumentation des intimés relative à une tolérance administrative ne faisant qu’éluder le problème de l’applicabilité du § 153 AO aux restitutions d’impôts dont la prescription extinctive serait fixée à un an.

L’Etat souligne encore que les déclarations d’impôt seraient portables et non pas quérables et que l’on ne pourrait pas raisonnablement imposer à l’administration l’obligation d’informer chaque contribuable de son droit à restitution, pareille obligation n’étant prévue par aucune disposition législative et étant même irréalisable à défaut de déclaration d’impôt permettant de déterminer la cote d’impôt due et un éventuel trop-perçu d’impôt sujet à restitution.

Finalement, l’Etat conteste le raisonnement du tribunal en ce qu’il a admis que tant l’article 157ter LIR que l’article 24 de la Convention consacrent le principe d’un traitement fiscal égalitaire des contribuables étrangers ayant choisi l’option de faire imposer leurs revenus indigène et étranger au Luxembourg par rapport aux contribuables luxembourgeois imposés également de manière globale au Luxembourg. D’après l’Etat, cette assertion ne serait pas correcte au vu de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle qui n’admettrait l’existence d’une discrimination qu’en cas d’application de règles différentes à des situations comparables ou d’application des mêmes règles à des situations différentes. Or, l’article 157ter LIR ne s’appliquerait qu’aux contribuables non résidents que sur base de leur demande expresse et seulement si ce régime leur est plus favorable que celui résultant des articles 157 et 157bis LIR, de manière que la situation de départ des contribuables résidents et non résidents ne serait pas exactement la même.

Sur base de ces arguments, l’Etat conclut que le directeur aurait fait une exacte application des dispositions légales et que le jugement entrepris devrait encourir la réformation.

Il est constant en cause que les intimés revêtaient au cours des années d’imposition en cause la qualité de résidents fiscaux belges et qu’ils réalisaient tous les deux des revenus d’une occupation salariée de source luxembourgeoise découlant de leurs occupations salariées respectives auprès d’employeurs privés établis au Luxembourg. Les revenus salariés réalisés au Luxembourg par les intimés rentraient dès lors dans le champ d’application de l’article 156 n° 4 LIR en tant que revenus d’une occupation salariée au sens de l’article 95 LIR exercée au Grand-Duché réalisés par des contribuables non résidents et se trouvaient en principe soumis au régime d’imposition tel que prévu par les articles 157 et 157bis LIR.

Il découle pareillement des éléments en cause que les intimés ont réalisé durant les années 2008 et 2009 l’intégralité de leurs revenus professionnels au Luxembourg, de manière qu’ils rentraient pour ces années d’imposition dans la situation des « contribuables non-résidents imposables au Grand-Duché du chef d’au moins 90 pour cent du total de leurs revenus professionnels indigènes et étrangers » visée à l’article 157ter (1) LIR dans sa teneur applicable au titre desdites années d’imposition et qu’ils pouvaient à chaque fois valablement faire la demande prévue par cette disposition afin d’être « imposés au Grand-

Duché, en ce qui concerne leurs revenus y imposables, au taux d’impôt qui leur serait applicable s’ils étaient des résidents au Grand-Duché et y étaient imposables en raison de leurs revenus tant indigènes qu’étrangers ».

Les intimés ont présenté expressément la demande en vue de l’application des dispositions de l’article 157ter LIR dans leur déclaration d’impôt pour l’année 2008. Au titre de l’année 2009, les intimés ont certes sollicité, dans leur déclaration d’impôt, l’application des dispositions non pas de l’article 157ter LIR, mais de l’article 24 de la Convention, mais dans la mesure où l’Etat admet lui-même que l’indication, par les intimés, de certaines dépenses spéciales et des charges extraordinaires dans leur déclaration pourrait être assimilée à une demande au sens de l’article 157ter LIR, il y a lieu d’admettre pour les années imposables litigieuses que les intimés ont expressément, sinon implicitement demandé l’application de ce régime d’imposition dérogatoire par rapport au régime d’imposition de droit commun des contribuables non-résidents.

La question essentielle qui oppose l’Etat aux intimés est celle de savoir si la présentation de cette demande prévue par l’article 157ter (1) LIR est soumise au respect d’un délai spécifique, voire si, comme le prétend la partie étatique, un tel délai découle nécessairement du délai annuel pour les demandes de remboursement tel qu’il est prévu par le § 153 AO.

Il convient de relever d’abord de concert avec les premiers juges que ni l’article 157ter LIR, ni l’article 24, paragraphe 4 a) de la Convention ne prévoient un délai spécifique dans lequel les contribuables non-résidents doivent opter pour une imposition par voie d’assiette telle qu’elle est prévue pour les contribuables résidents.

La réponse à la question de savoir si un délai découle nécessairement du délai annuel pour les demandes de remboursement implique d’abord la détermination du cadre procédural dans lequel pareille demande s’insère.

Aux termes de l’article 157 (4) LIR, « les contribuables non résidents occupés comme salariés au Grand-Duché pendant neuf mois de l’année d’imposition au moins et y exerçant leurs activités d’une façon continue pendant cette période, ainsi que les contribuables non résidents visés à l’alinéa 3 de l’article 157bis et dont au moins l’un des époux touche des revenus d’une occupation salariée exercée au Grand-Duché ou des revenus résultant de pensions ou de rentes visés au numéro 5 de l’article 156, tombent sous l’application de l’article 153 en ce qui concerne les conditions et les modalités de l’imposition par voie d’assiette ». L’article 157bis (3) LIR dispose que « par dérogation aux dispositions de l’alinéa 2 les contribuables non résidents, mariés et ne vivant pas en fait séparés, sont imposés dans la classe d’impôt 2, s’ils sont imposables au Grand-Duché du chef de plus de 50 pour cent des revenus professionnels de leur ménage. Si les deux époux réalisent des revenus professionnels imposables au Grand-Duché, l’octroi de la classe 2 entraîne leur imposition collective ».

Etant donné que les intimés ont été occupés tous les deux durant l’intégralité des années 2008 et 2009 comme salariés au Luxembourg, qu’ils étaient mariés sans avoir vécu en fait séparés et qu’ils ont été imposables au Luxembourg pour l’intégralité de leurs revenus professionnels pour lesdites années, de manière qu’ils étaient imposables dans la classe d’impôt 2 et imposés collectivement, ils rentraient dans le champ d’application de l’article 157bis (3) LIR et également de l’article 157 (4) LIR, de manière que la question de savoir s’ils étaient soumis à la procédure de régularisation des retenues sur traitements et salaires sur base d’un décompte annuel prévue par l’article 145 LIR ou à celle de l’imposition par voie d’assiette était à trancher conformément à l’article 153 LIR.

L’article 153 (1) LIR soumet au régime de l’imposition par voie d’assiette les contribuables dont le revenu imposable se compose en tout ou en partie de revenus passibles d’une retenue d’impôt sur les traitements et salaires, sur les revenus de capitaux mobiliers ou sur les revenus de tantièmes, « 1. lorsque le revenu imposable dépasse une limite à fixer par règlement grand-ducal de façon absolue ou différenciée selon des catégories déterminées de contribuables (…) ». Le règlement grand-ducal modifié du 28 décembre 1990 portant exécution de l’article 153 LIR fixait ce seuil à un revenu imposable de 58.000 euros dans sa teneur applicable à l’année 2008 et de 100.000 euros dans sa teneur résultant du règlement grand-ducal modificatif du 19 décembre 2008.

Il découle du dossier fiscal soumis à la Cour que les revenus imposables réalisés par les intimés au cours respectivement des années 2008 et 2009 ont dépassé ces deux seuils respectifs, de manière qu’ils se trouvaient soumis au régime de l’imposition par voie d’assiette au titre de ces années d’imposition en vertu de la loi.

Il est vrai que le § 150 (1) AO établit la règle générale que le droit au remboursement naît certes dans le chef du contribuable au moment où il est constaté, mais qu’il ne crée une obligation de restitution correspondante dans le chef de l’administration que si le contribuable manifeste sa volonté d’obtenir l’exécution de son droit. Le caractère exécutoire du droit à restitution d’impôts est de la sorte soumis à la condition de principe de l’initiative prise par le contribuable afin de faire valoir son droit. En outre, le § 153 AO, disposant que « wo ausser den Fällen der §§ 151 und 152 Erstattungsansprüche aus Rechtsgründen zugelassen sind, erlöschen sie, falls nichts anderes bestimmt ist, wenn sie nicht bis zum Schluss des Jahres geltend gemacht werden, das auf das Jahr folgt, in dem die Ereignisse, die den Anspruch begründen, eingetreten sind », soumet la soumission de la demande en remboursement par le contribuable au respect d’un certain délai.

Cependant, les dispositions des §§ 150 et 153 AO constituent des dispositions générales, le § 153 AO précisant lui-même qu’une dérogation est possible par des dispositions spéciales, et l’exigence d’une demande de la part du bénéficiaire du droit à restitution ne trouve pas application lorsqu’une disposition légale prescrit expressément une restitution d’office par l’administration (cf. HÜBSCHMANN, HEPP, SPITALER, RAO-

Kommentar, § 150, Anm. 10).

Or, l’article 154 LIR relatif au régime du paiement de l’impôt établi par voie d’assiette dispose en son alinéa (7) que « lorsque la créance d'impôt sur le revenu est inférieure à la somme des déductions prévues à l'alinéa premier, l'excédent payé est, dès la notification du bulletin, à imputer sur d'autres créances exigibles du même contribuable ou, à défaut, à rembourser d'office à ce dernier ». Cette disposition consacre ainsi au profit de tout contribuable soumis au régime de l’imposition par voie d’assiette un droit légal à un remboursement d’office d’un éventuel trop-payé d’impôt, sauf l’hypothèse d’une compensation du trop-payé avec d’autres dettes d’impôt du même contribuable à l’égard de l’administration des Contributions directes. L’obligation faite à cette dernière de procéder d’office à ce remboursement d’un trop-payé après la fixation de la cote d’impôt sur le revenu due au titre d’une année d’imposition considérée et les imputations prévues à l’article 154 (1) LIR impliquent nécessairement que le contribuable se trouve dispensé de toute démarche en vue de l’obtention effective d’un tel remboursement d’un trop-payé d’impôt.

C’est partant à bon droit que les premiers juges ont considéré que l’article 154 (7) LIR doit être qualifié de dérogation à l’exigence d’une demande de remboursement au sens des §§ 150 et 153 AO et qui rend partant toute demande tendant à ces fins et à soumettre dans le délai prévu par le § 153 AO surabondante (cf. déjà en ce sens Cour adm. 1er février 2011, n° 27045C du rôle ; 3 septembre 2014, n° 33525C du rôle).

Dans la mesure où l’article 157 (4) LIR prévoit à l’égard des contribuables non résidents soumis à l’imposition au Luxembourg en raison de leurs revenus d’occupations salariées exercées au Luxembourg « l’application de l’article 153 en ce qui concerne les conditions et les modalités de l’imposition par voie d’assiette », il faut conclure que la notion des « modalités » de l’imposition par voie d’assiette englobe également les dispositions de l’article 154 LIR dont son alinéa (7) instaurant le droit à la restitution d’office d’un trop-payé d’impôt sur le revenu.

Dans ces conditions, alors même que l’option, par le contribuable non résident, pour le régime d’imposition prévu par l’article 157ter LIR - permettant de faire valoir, au lieu des seuls frais d’obtention en rapport économique direct avec les revenus indigènes, des dépenses spéciales et charges extraordinaires pouvant diminuer l’assiette d’imposition - ne peut effectivement a priori que jouer en faveur des contribuables non-résidents, l’effet de cette option se trouve confiné au régime de détermination des bases d’imposition, en ce que le contribuable sollicite la soumission des revenus imposables au taux d’impôt correspondant à celui appliqué à un contribuable résident, et n’affecte, en l’absence d’une disposition expresse en ce sens, pas l’existence du droit au remboursement d’office d’un trop-payé d’impôt qu’il tire de sa soumission au régime de l’imposition par voie d’assiette par l’effet des dispositions combinées des articles 157 (4) et 153 LIR et de l’applicabilité en découlant de l’article 154 (7) LIR. En effet, à défaut d’un texte en ce sens, le contribuable ne peut pas être privé ni être considéré comme ayant renoncé à son droit au remboursement d’office dont il bénéficie de lege du fait de sa soumission en vertu de la loi au régime de l’imposition par voie d’assiette et comme se trouvant de nouveau soumis au régime de droit commun des droits de restitution découlant des §§ 150-s AO par le seul fait d’avoir demandé l’application d’un régime spécifique de détermination des bases d’imposition et de la cote d’impôt due.

Par voie de conséquence, la demande formulée par un contribuable non résident dans le cadre de sa déclaration d’impôt de se voir appliquer le régime d’imposition de son revenu annuel tel que prévu par l’article 157ter LIR ne peut pas être considérée comme tendant à obtenir un remboursement de l'intégralité ou d'une partie de la retenue d'impôt sur les salaires et être dès lors qualifiée de demande en restitution d'impôts au sens du § 153 AO, ainsi que le tribunal l’a retenu à bon droit.

Les premiers juges sont encore à confirmer en ce qu’ils ont conclu qu’étant donné que les intimés étaient de toute façon d’office soumis à une imposition par voie d’assiette en vertu de la loi, la jurisprudence ayant retenu, en application de l’article 17 (2) du règlement grand-ducal du 9 mars 1992 portant exécution de l’article 145 de la loi du 4 décembre 1967, le caractère définitif des retenues fiscales pour les contribuables soumis à une imposition par voie de décompte à défaut d’avoir opté pour une imposition par voie d’assiette avant le 31 décembre de l’année qui suit l’année d’imposition, n’est pas applicable au cas d’espèce.

Il convient partant de conclure qu’en l’absence d’un délai particulier prévu par l’article 157ter LIR ou une autre disposition légale et qu’au vu de l’inapplicabilité du délai prévu par le § 153 AO, l’option exercée par un contribuable non résident soumis de lege à l’imposition par voie d’assiette au vœu des dispositions combinées des articles 157 (4) et 153 LIR en vue d’être soumis au régime d’imposition prévu par l’article 157ter LIR ne se trouve soumise à aucun délai particulier et qu’elle peut être présentée au bureau d'imposition tant que la soumission d’une déclaration d’impôt est encore admissible.

A l’instar des premiers juges, la Cour est partant amenée à conclure que c’est à tort que le directeur a confirmé le refus du bureau d'imposition d’appliquer aux intimés pour les années d’imposition visées par leur recours le régime d’imposition prévu par l’article 157ter LIR et plus particulièrement la déduction des charges extraordinaires ainsi que l'excédent des frais d'obtention et de dépenses spéciales. C’est partant à juste titre que les premiers juges ont déclaré le recours des intimés justifié et qu’ils ont annulé, dans le cadre du recours en réformation, la décision directoriale déférée en ce qui concerne les années d’imposition 2008 et 2009, auxquelles le recours est limité, et renvoyé l’affaire en prosécution de cause devant le directeur.

Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent que l’appel étatique laisse d’être justifié et que le jugement entrepris est à confirmer dans toute sa teneur.

PAR CES MOTIFS la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties en cause, reçoit l’appel du 17 décembre 2015 en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute l’Etat, partant, confirme le jugement entrepris du 25 novembre 2015, condamne l’Etat aux dépens de l’instance d’appel.

Ainsi délibéré et jugé par:

Francis DELAPORTE, président, Serge SCHROEDER, premier conseiller, Lynn SPIELMANN, conseiller, et lu à l’audience publique du 19 avril 2016 au local ordinaire des audiences de la Cour par le président, en présence du greffier en chef de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.

s. WILTZIUS s. DELAPORTE Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 22 novembre 2016 Le greffier en chef de la Cour administrative 12


Synthèse
Numéro d'arrêt : 37300C
Date de la décision : 19/04/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2016-04-19;37300c ?

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