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13/11/2014 | LUXEMBOURG | N°74/14

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 13 novembre 2014, 74/14


N° 74 / 14.

du 13.11.2014.

Numéro 3394 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, treize novembre deux mille quatorze.

Composition:

Georges SANTER, président de la Cour, Edmée CONZEMIUS, conseiller à la Cour de cassation, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Romain LUDOVICY, conseiller à la Cour de cassation, Nathalie JUNG, conseiller à la Cour d’appel, John PETRY, premier avocat général, Patrick KELLER, greffier à la Cour.

Entre:

1) X), (…), et son épouse 2) Y),

(…), les deux demeurant à (…), demandeurs en cassation, comparant par Maître Laurent SUIN, avocat à la Cou...

N° 74 / 14.

du 13.11.2014.

Numéro 3394 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, treize novembre deux mille quatorze.

Composition:

Georges SANTER, président de la Cour, Edmée CONZEMIUS, conseiller à la Cour de cassation, Irène FOLSCHEID, conseiller à la Cour de cassation, Romain LUDOVICY, conseiller à la Cour de cassation, Nathalie JUNG, conseiller à la Cour d’appel, John PETRY, premier avocat général, Patrick KELLER, greffier à la Cour.

Entre:

1) X), (…), et son épouse 2) Y), (…), les deux demeurant à (…), demandeurs en cassation, comparant par Maître Laurent SUIN, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

Maître Yvette HAMILIUS, avocat à la Cour, demeurant à L-2229 Luxembourg, 2, rue du Nord, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société anonyme de droit luxembourgeois A), en liquidation judiciaire, établie et ayant son siège social à (…), inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B (…), défenderesse en cassation, comparant par Maître Yvette HAMILIUS, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu.

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LA COUR DE CASSATION :

Vu l’arrêt attaqué rendu le 15 mai 2013 sous le numéro 37088 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 15 avril 2014 par X) et Y) à Maître Yvette HAMILIUS, déposé au greffe de la Cour le 17 avril 2014 ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 13 juin 2014 par Maître Yvette HAMILIUS à X) et à Y), déposé au greffe de la Cour le 16 juin 2014 ;

Sur le rapport du conseiller Edmée CONZEMIUS et sur les conclusions de l’avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER ;

Sur la recevabilité du pourvoi, qui est contestée :

Attendu que la défenderesse en cassation soulève l’irrecevabilité du pourvoi pour cause de tardiveté sur le fondement de l’article 7 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation au motif que le demandeur ne saurait bénéficier d’un quelconque délai de distance en vertu du jugement de liquidation qui impose une élection de domicile dans la commune de Luxembourg pendant la durée de la procédure ;

Attendu que, selon l’article 7, alinéa 1er, le délai de deux mois pour l’introduction du recours en cassation courra, pour les arrêts contradictoires, du jour de la signification à personne ou à domicile ;

Attendu que la régularité de la signification à domicile élu n’est en tant que telle pas critiquée par les demandeurs en cassation ;

Attendu que selon l’article 7, alinéa 2, celui qui demeure hors du Grand-

Duché a, pour introduire le recours en cassation, outre le délai de deux mois, le délai prévu à l’article 167 du Nouveau code de procédure civile ;

Attendu que l’élection de domicile ne fait pas obstacle à l’augmentation du délai dont bénéficie la personne dont le domicile réel se trouve à l’étranger ; que le domicile réel des demandeurs en cassation se trouvant en France, ils bénéficient du délai de distance de 15 jours ;

Que le recours est donc recevable ;

Sur les faits :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, statuant sur la demande des époux X) et Y) tendant à l'admission de leur créance au passif de la liquidation de la société anonyme A) et sur la demande reconventionnelle du liquidateur en condamnation des époux X)-Y) au paiement du solde du prêt à la société A), le tribunal d'arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière commerciale, avait rejeté la déclaration de créance des époux du passif de la liquidation et avait déclaré la demande reconventionnelle fondée ; que sur appel, la Cour d'appel a dit irrecevables pour être nouvelles en appel et pour défaut de se rattacher à des préjudices invoqués dans la déclaration de créance, les demandes en nullité ou en résolution des contrats et investissements litigieux et les demandes en responsabilité de la Banque et a dit l'appel non fondé ;

Sur l’unique moyen de cassation :

tiré « de la violation :

-de l'article 54 du Nouveau code de procédure civile aux termes duquel Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé » et -de l'article 592, alinéa premier, du Nouveau code de procédure civile aux termes duquel et -de l'article 6, paragraphe premier, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes duquel , en ce que les juges d'appel ont déclaré demandes nouvelles telles que détaillées dans la motivation de l'arrêt », au motif que second degré sont à rechercher dans le jugement entrepris qui constitue la seule base du litige » et que d'appel du 9 février 2011, à la question de savoir, principalement s'il y a lieu de déclarer admise purement et simplement la créance de Monsieur X) et Madame Y) au passif de la procédure pour un montant de 394.397,23 euros et subsidiairement s'il y a lieu de surseoir à statuer dans l'attente des instances en cours » et que certaines de leurs clauses, respectivement celle de la responsabilité de la Banque ne peuvent, au cours des débats sur les contestations de créance, être examinées que pour autant qu'elles se rattachent à des préjudices invoqués dans la déclaration de créance (…) Or, les questions de nullité et de résolution des contrats, respectivement de certaines de leurs clauses ne sont pas abordées dans la déclaration de créance des consorts X)-Y) et aucun montant n'y est réclamé du chef de préjudice subi en raison de la nullité des contrats conclus avec A) » et que déclaration de créance ainsi que de la demande en surséance » et que l'opération et de tous les contrats conclus entre parties (…) sont irrecevables pour être nouvelles ; elles sont en effet sans rapport avec les revendications contenues dans la déclaration de créance des époux X)-Y) » et que conséquences de la nullité des investissements et de la déchéance fautive du terme (…), de même que leurs développements quant aux fautes reprochées à la Banque (…) ne rentrent pas dans le cadre du présent litige et ne seront pas examinées » et que indiquées au dispositif des conclusions des époux X)-Y)du 16/09/2011 (…) Ces demandes nouvelles sont irrecevables en application des dispositions de l'article 592 du Nouveau code de procédure civile » alors que tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire, y compris une demande en nullité du contrat sur lequel se fonde cette prétention, peuvent être valablement formés pour la première fois en instance d'appel » (Cour 28 juin 2000, 31, 395), que cours d'instance par le défendeur originaire contre le demandeur originaire » et qui (Thierry Hoscheit, le droit judiciaire privé au Grand-

Duché de Luxembourg, éditions Paul Bauler 2012, p. 59 et 60), que la demande faite en première instance par la défenderesse en cassation et tendant à la condamnation des époux X)-Y) au paiement du montant de 317.118,25 euros, à augmenter des intérêts conventionnels à partir du 31 octobre 2010 jusqu'à solde, est à qualifier de demande reconventionnelle, que l'action initialement introduite par les époux X)-Y) ne pouvait anticiper cette demande reconventionnelle de la partie défenderesse en cassation, que cette demande reconventionnelle a modifié l'objet du litige pendant l'instance, que, de surcroît, la juridiction de première instance a admis cette demande reconventionnelle en ce qu'elle a condamné solidairement les époux X)-Y) à payer à A) la somme de 317.118,25 euros avec les intérêts conventionnels sur le montant de 310.323,17 euros à dater du 1er novembre 2010 jusqu'à solde, que avoir pour corollaire l'admissibilité des demandes et moyens opposés par la partie adverse pour faire échec à cette prétention nouvelle du défendeur originaire » (extrait d'un arrêt de la Cour de cassation française du 23 novembre 1960 cité par Me Marc Thewes in ’’les variations du champ processuel’’, Annales du Droit Luxembourgeois, 2002, page 150), que la doctrine a confirmé que demande reconventionnelle, la situation dans laquelle se trouvait initialement le demandeur n'est plus la même ; et pour cette raison, le respect des droits de la défense veut que ce dernier puisse se prévaloir de tous les moyens dont il dispose, en formant au besoin une demande reconventionnelle, dès lors que celle-ci est de nature à tenir en échec les prétentions nouvelles de son adversaire » (Henry Solus et Roger Perrot, Droit judiciaire privé, t. 3 , n° 1032 - Cité par Me Marc Thewes in , Annales du Droit Luxembourgeois, 2002, pages 150 et 151), qu'il est constant que la condamnation prononcée par la juridiction de première instance contre les époux X)-Y) sur la demande reconventionnelle de la défenderesse en cassation n'a cessé d'être contestée par les demandeurs en cassation, qu’en l’espèce, les prétentions formées en appel par les époux X)-Y) tendant notamment à la nullité de contrats visaient à contrecarrer – sinon la prétention de la défenderesse en cassation au rejet de la déclaration de créance en cause - au moins sa demande reconventionnelle en condamnation des demandeurs en cassation au paiement de sommes d'argent, qu'en effet, ces prétentions puisent leur raison d'être dans la défense à la demande reconventionnelle en paiement, que, dès lors, ces prétentions constituaient manifestement un moyen de défense tendant à faire rejeter les prétentions de l'adversaire, que ces prétentions, en tant que moyens de défense, ne peuvent être déclarées irrecevables sauf à priver les demandeurs en cassation de la possibilité de faire valoir leurs droits, que la Cour de cassation a d'ailleurs, par un arrêt rendu en date du 30 janvier 2014 sous le numéro 3302 du registre, décidé dans une affaire similaire que les juges d'appel avaient violé l'article 592, alinéa 1 er, du Nouveau code de procédure civile en déclarant irrecevables les demandes en nullité des contrats et investissements litigieux et en responsabilité d'une société anonyme en liquidation judiciaire au motif qu'elles ne se rattachaient pas à des préjudices invoqués dans la déclaration de créance des demandeurs en cassation, alors que ces demandes étaient formées en défense à la demande reconventionnelle du liquidateur et étaient en tant que telles recevables en instance d'appel, que, partant, l'arrêt entrepris encourt la cassation pour violation des articles 54 du Nouveau code de procédure civile, 592, alinéa premier, du Nouveau code de procédure civile et 6, paragraphe premier, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Vu l'article 592, alinéa 1er, du Nouveau code de procédure civile ;

Attendu qu'en déclarant irrecevables les demandes en nullité des contrats et investissements litigieux et en responsabilité de la société anonyme A) en liquidation au motif qu'elles ne se rattachaient pas à des préjudices invoqués dans la déclaration de créance des époux X)-Y), alors que ces demandes étaient formées en défense à la demande reconventionnelle du liquidateur et étaient en tant que telles recevables en instance d'appel, les juges d'appel ont violé la disposition susvisée ;

D'où il suit que l'arrêt encourt la cassation ;

Sur l’indemnité de procédure :

Attendu que l’entièreté des dépens de l’instance en cassation étant à charge de la défenderesse en cassation, sa demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter ;

Par ces motifs :

casse et annule l’arrêt rendu le 15 mai 2013 par la Cour d'appel, quatrième chambre, siégeant en matière commerciale, sous le numéro 37088 du rôle ;

déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s'en sont suivis et remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel, autrement composée ;

rejette la demande en octroi d’une indemnité de procédure ;

condamne la défenderesse en cassation aux frais de l’instance en cassation et en ordonne la distraction au profit de Maître Laurent SUIN, avocat à la Cour, sur ses affirmations de droit ;

ordonne qu'à la diligence du procureur général d'Etat, le présent arrêt sera transcrit sur le registre de la Cour d'appel et qu'une mention renvoyant à la transcription de l'arrêt sera consignée en marge de la minute de l'arrêt annulé.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par Madame le conseiller Edmée CONZEMIUS, en présence de Monsieur John PETRY, premier avocat général, et de Monsieur Patrick KELLER, greffier à la Cour.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 74/14
Date de la décision : 13/11/2014

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2014-11-13;74.14 ?

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